Skip to main content

Full text of "Revue celtique"

See other formats


4 


:^- 


>^ 


\ 


lSC 


"%. 


A. 


é'v  //4.  /^ 


Ci/^^^lrhU*^ 


I 


^^     'f^^ôoti^   h^C^UZ  .  ^Q  7^^  Ia/~ 


A^  c-  TKTT  ^a:q-  Tuirl  /J77 J 


REVUE 

ARCHÉOLOGIQUE 

ou  RECUEIL 

DE  DOCUMENTS  ET  DE  MÉMOIRES 

BELATirS 

A  L'ÉTUDE  DES  MONUMENTS;  A  LA  NUMISMATIQUE  ET  A  LA  PHIL0L06IE 

DE  L'ANTIQUITÉ  ET  DU  MOYEN  AGE 
Publléfl  par  les  principaux  Archéologues 

rRXMÇAU  BT  KTHANOKM 

et  aecompagnéi 
DE   PLANCHES  GRAVÉES   D'APRÈS   LES    HONUMRNTS    ORIGINAUX 


GARGANTUA 

ESSAI  DE  MYTHOLOGIE  CELTIQUE 
Par  M.  H.  GAIDOZ 

Tirage  à  part. 


PARIS 

AUX  BUREAUX  DE  LA  REVUE  ARCHÉOLOGIQUE 

UBBAIIME  ACADÉMIQUE  —  DIDIER  et  C* 

QUAI  DES  AUGDSTINS,  35 

IT  GHBZ 

FRANCK,   LIBRAIRE,       I      AoG.  DURAND,  libuaibe, 

Rne  Richelien,  67.  |  Rne  des  Grè». 

Droits  ae  traanction  et  reprodaction  réservés. 


%'UU7^    <^Cs^ 


1/    • 


^ 


^ 


</ 


^<^ 


//. 


^u^ 


'O-JcJ     i 


^        %cUl^    ^^Cs^  ^    ^ 


/r-y^z^    z:^.  ^i^c^u^^c   lot^c/:.^^ 


'^OC 


yiyXjUd.^^    ;^<^y</U^K^     /iX^^t^^docy 


fnrv\y^^j<j4y^   ^/^2^.M^^     i^u,^^^- 


I 


éù^z.^  -     /'/*-^^    ^^t^MX)     A^H^. 


/'^ 


U^ 


-^^VlV^^^^O 


2:^^. 


7^    <NArr-    ^   ^fe-  M:Aa^^ 

'^        "     'fl^t/K      Ç^^  "Svi^  '/^   ^ 

l^^i^     Zt^<2rCU    0-iAA^^    'V^^t^ 


^^^^.-..^^w^^i^*^ 


^^^C-C^ 


^*  /  -  Ce^yc^c^L.^'^Jl^^^  ^^^^^^^^ 


'/^ 


■y/-  ■ 


\ 


V^      ^^V"^    ^ 


.  C 


'•**'^*. 


>^ 


N^ 


i\^!''^f^î^?zv^^H 


GARGANTUA, 


géant  mangeur  que  nous  retrouvons  dans  les  traditions  de  presque 

•     ^»  r.;,  ip  np.nnle  Dersonnifie  les  aspirations  infinies  d'un 

•saôinao  3iooiohiak  aa  ivssa  '     ^~''"''"'^"    ^^^ 


u.._ 


(  Mémoire  lu  devant  la  Société  de  Lit, 
des  6  et  20  juin 


Extrait   de   la  REVUE  ARC 


La  civilisation  gauloise  a  été  arrêtée! 

la  conquête  romaine,  et  nos  ancêtres  i 

nument  de  leur  littérature,  presque  au» 

est  donc  grand  quand  on  veut  connaîtij 

n'est  pas  là  pour  en  exprimer  les  symi 

conter  les  mythes.  Nous  serions  réduits 

les  auteurs  anciens,  ou  conservés  dans 

si  nous  ne  pouvions  puiser  à  la  source 

ditions  populaires.  Chassés  des  tempL 

réfugiés  dans  nos  campagnes;  ils  y  sont 

Il  est  difficile  de  les  reconnaître,  avoj 

vent  perdu  cette  grandeur  poétique,  cel( 

térise  les  dieux  primitifs  de  la  race  indo 

l'ombre,  tanlôt  on  en  a  fait  des  saints  d/ 

on  les  a  Iransformés  en  hôtes  invisit 


CclAMM  UAACA 


dées,  ses  passions,  et  il  y  incarne  les  rôves  de  son  imagination 
laive.  Quand  une  ortliodoxie  sévère  ne  met  pas  l'objet  du  culie  hors 
le  son  atteinte,  il  s'en  empai-e  pour  le  recréer.  Mille  traits  nouveaux 
-tiennent  s'ajouter  au  type  divin  ot  en  cacher  le  caractère  piiraitif. 
Dans  les  religions  qui  nous  sont  connues  à  la  fois  par  le  culte,  par 
'art,  par  la  poésie  et  par  l.i  légende  populaire,  chacun  de  ces  élé- 
ments nous  sert  à  contrôler  l'autre  et  nou>  parvenons  à  retrouver  les 
nembres  dispersés  du  dieu.  Avec  la  religion  gauloise,  il  en  est  tout 
lutrement.  Son  côté  hiératique,  son  côié  poétique  ont  disparu;  seul, 
e  côté  populaire  a  subsisté.  Cela  veut  dire  que  nous  ne  la  connais- 
sons que  sous  sa  forme  vulgaire  et  que  nous  ne  l'entrevoyons  qu'à 
ravers  l'imagination  enfantine  du  peuple.  N'allons  pas  non  plus 
)ublier  que  celte  mythologie  des  bois  et  des  campagnes  a,  depuis  lors, 
îUbi  mille  transformations  dans  ^imagination  populaire,  et  qu'elle  a 
Jù  se  greffer  sur  une  religion  nouvelle  d'un  génie  tout  différent.  Un 
îimple  trait  mythologique  conservé  dans  une  tradition  qui  court  la 
:ampagne,  voilà  le  plus  souvent  ce  qui  nous  reste  pour  reconstruire 
an  personnage  de  TOlympe  gaulois. 

Mais  avant  de  recréer  un  dieu  gaulois  avec  les  traits  que  nous  a 
conservés  la  légende  de  Gargantua,  montrons,  par  l'exemple  d'une 

?ivinité  qui  nous  est  connue  dans  presque  toutes  les  phases  de  son 
éveloppement,  combien  de  dieux  différents  peuvent  se  cacher  dans 
un  seul  et  même  type.  Que  ne  trouvons-nous  pas  dans  la  légende 
d'Héraclès?  A  l'origine  c'est  «  la  gloire  de  l'air,  »  le  soleil  vainqueur 
et  glorieux,  qui  détruit  les  créations  monstrueuses  des  marécages, 
le  dieu  purifiant  et  bienfaisant.  Mais  peu  à  peu  le  sens  du  mythe 
primitif  s'oublie;  le  nom  et  les  exploits  d'Héraclès  deviennent  un 
thème  que  la  fantaisie  populaire  arrange  et  développe  à  son  gré. 
Entre  les  mains  des  philosophes,  il  arrive  jusqu'à  c;re  l'idéal  de  la 
vertu  et  de  la  sagesse  :  on  a  dans  la  mémoire  l'Héraclès  de  Prodicos. 
Est-ce  ainsi  que  le  comprend  le  peuple  grec?  Nullement;  Héraclès 
est  pour  lui  la  personnification  de  la  force  physique.  Enfant  d'une 
force  prodigieuse,  il  tue  d'un  coup  de  sa  llùte  Linos,  son  maître  de 
musique,  qui  l'ennuyait.  Devenu  homme,  c'est  à  la  fois  un  rude  et 
un  joyeux  compagnon,  qui  mange  et  boit  d'autant,  c'est  l"HpaxX9îç 
pou-focYo;,  c'est  l'Héraclès  que  le  peuple  connaît  et  aime,  que  le 
théâtre  met  en  scène.  Le  type  en  est  tellement  fixé  que,  dans  sa 
tragique  Alceste,  Euripide  n'ose  le  changer  (1).  C'est,  en  un  mot,  le 


(1)  Sur  le  mythe  d'Héraclès  et  ses  transformations  diverses,  voir  Preller,  Grî'e- 
chische  Mythologie^  2*  éd.,  t.  II,  p.  157 -28/1. 


._,f^  .-    ..,  ...'r/      WC  nc^^^^ 


9f/è  k 


GARGANTUA.  3 

géant  mangeur  que  nous  retrouvons  dans  les  traditions  de  presque 
tous  les  pays,  et  où  le  peuple  personnifie  les  aspirations  infinies  d'un 
estomac  borné  comme  tout  ce  qui  est  humain.  Le  mythe  héracléen 
ne  nous  serait  parvenu  que  sous  la  forme  de  celte  légende  populaire, 
pourrions-nous  en  reconstituer  l'histoire?  Avec  un  peu  de  pénétra- 
lion  et  beaucoup  de  bonne  volonté,  je  crois  que  cela  ne  serait  pas 
impossible.  Je  vais  du  moins  tenter  une  expérience  de  ce  genre  sur 
un  mythe  analogue  à  celui  d'Hôraclés,  sur  un  mylhe  «  de  haulte 
gresse,  »  celui  de  Gargantua.  Je  vais  lâcher  d'en  découvrir  «  la 
doctrine  absconse  laquelle  nous  révélera  de  très  haults  sacrements  et 
mystères  horrificques.  » 

Gargantua  est-il  une  création  de  Rabelais,  ou  bien  notre  Homère 
boutïon  a-t-il  emprunté  le  nom  de  ce  géant  à  une  légende  anté- 
rieure, de  même  que  Gœthe  a  transformé  dans  son  immortel  Faust 
l'obscur  sorcier  de  la  tradition  populaire?  Eloi  Johanneau  est,  à 
ma  connaissance,  le  premier  qui  ait  reconnu  dans  le  Gargantua  de 
Rabelais  un  reste  de  mythologie  oubliée  :  il  l'assimilait  à  l'Hercule 
Pamphagos  des  Grecs  (1).  Plus  tard,  en  1829,  un  critique  ingénieux, 
M.  Philarète  Chastes,  disait  :  «  Il  y  avait  en  Touraine  un  Gargan- 
tua, personnage  obscur  et  chimérique,  qui  avait  une  grossière  lé- 
gende. Rabelais  emprunta  au  peuple  ce  héros  fabuleux  (2).  »  Le 
savant  Jacques  Grimm  (3)  et  M.  Bourquelot  (4)  sont  d'accord  pour  y 
voir  une  tradition  qui  remonte  à  l'époque  celtique.  En  effet,  quel 
que  fût  le  succès  du  roman  de  Rabelais,  on  ne  peut  y  voir  Torigine 
de  ces  nombreuses  appellations  oîi  entre  le  nom  de  Gargantua. 
M.  Bourquelot  en  a  dressé  la  liste  avec  beaucoup  de  soin.  Nous  ne 
pouvons  mieux  faire  que  de  la  reproduire  ici  : 

«  La  popularité  de  Gargantua  est  grande,  surtout  dans  les  campagnes, 
au  fond  des  villages  et  des  hameaux.  Sur  tous  les  points  de  la  France,  les 
paysans  ont  à  conter  des  prodiges  incroyables  de  sa  force,  des  miracles 
de  son  appétit;  on  dit  encore  dans  la  Beauce  :  manger  comme  un  Gar- 
gantua. Son  nom  est  resté  attaché  à  une  foule  de  monuments,  et  particu- 


(1)  Dans  l'édition  dite  Variorum  de  Rabelais,  t.  I,  p.  37  et  p.  166,  n.  3,  et  aussi 
dans  une  note  ajoutée  à  un  travail  de  M.  de  Saint-Mars  [Mémoires  de  l'Académie 
celtique,  t.  V,  p.  395)  dont  nous  parlerons  plus  loin. 

(2)  Ph.  Chastes,  Tableau  de  la  littérature  française  au  XVI"  siècle. 

(3)  J.  Grimm,  Deutsche  Mythologie,  V  éd.,  p.  509. 

(/i)  F.  Bourquelot,  Notice  sur  Gargantua,  dans  le  XVII'  volume  des  Mémoires  de 
la  Société  royale  des  antiquaires  de  France. 


4  ESSAI    DE    MYTHOLOGIE   CELTIQUE. 

lièrement  A  ceux  que  l'on  appelle  monuments  celtiques  ou  druidiques  (i). 

—  Dans  la  chaîne  de  montagne  de  Sassenage  (Isère)  s'élève  un  rocher 
dont  le  sommet  est  composé  de  trois  éminences  en  forme  de  dénis  ca- 
nines :  on  les  désigne  sous  le  nom  de  Dents  de  Gargantua  ou  de  Roche 
prou-pena  (de  beaucoup  de  peine).  —  Les  monts  Jumeaux,  aux  environs 
de  Châlillon-sur-Seine,  sont  appelés  Bottes  de  Gargantua.  —  A  Verdes  (Loir- 
et-Cher)  on  voit  la  soupière  de  Gargantua.  C'est  une  grande  excavation 
évidemment  faite  de  main  d'homme,  et  près  de  laquelle  se  trouvent  un 
tumulus  et  des  pierres  posées  qui  contribuent  à  lui  donner  une  physionomie 
druidique.  —  Sur  le  méive  territoire  se  trouve  une  pierre  longue  d'en- 
viron dix  pieds  et  échancrée  dans  le  milieu,  que  les  gens  du  pays  pren- 
nent pour  les  lunettes  de  Gargantua.  —  Le  géant  a  laissé  dans  divers  en- 
droits des  monuments  de  ses  jeux  :  un  palet  et  une  drue  à  Tripleville 
(Lnir-et-Cher);  un  palet  et  une  drue  à  Saint-Sigismond  (Loiret);  des  pnlets 
a  Changé,  près  Maintenon  ((Eure-et-Loir).  Ces  derniers  sont  un  groupe 
de  peulvens  et  de  menhirs  dont  un  seul  reste  encore  debout.  Suivant  la 
tradition,  Gargantua  s'amusait  à  lancer  vers  un  but  des  pierres  en  guise 
de  disques  :  le  but  est  le  menhir  qui  a  conservé  sa  position  perpendicu- 
laire; les  palets  sont  les  rochers  épars,  lancés  par  le  géant  contre  le  but. 

—  On  montre  à  Néaulles  (Eure)  la  pierre  à  affiler  de  Gargantua.  —  Sur  la 
crête  d'une  falaise,  proche  du  château  de  Tancarville  (Seine-Inférieure) 
s'élève,  à  deux  cents  pieds  au-det^sus  du  niveau  de  la  Seine,  une  roche  de 
craie  semblable  à  un  immense  toit  qui  surplombe,  elle  paraît  prête  à  se 
détacher  et  à  se  précipiter  dans  le  fleuve.  Elle  est  connue  sous  le  nom  de 
Pierre  Gante,  et  sous  celui  de  Chaise  ou  Fauteuil  de  Gargantua.  Suivant  la 
tradition,  Gargantua  avait  coutume  de  s'y  asseoir  lorsqu'il  se  lavait  les 
pieds  dans  la  Seine,  et  il  y  faisait  entendre  de  sourds  rugissements  qui 
retentissaient  dans  les  nuages  chassés  par  le  vent  de  mer  et  amoncelés 
autour  du  rocher  (2).  —  Il  y  a  aussi,  près  de  Péronne  (Somme),  un  menhir 
dit  la  Pierre  fiche  de  Gargantua;  à  Membralle  (Loir-et-Cher,  une  pierre  de 
Gargantua;  à  Vic-sur-Aisne,  une  pierre  ou  pieire  à  pisser  de  Gargantua.  — 
Près  de  l'abbaye  de  Saint-Seine  (Côle-d'Or),  est  une  ferme  à  laquelle  on 
donne  le  nom  de  Ferme  de  Garganl  ;  aux  environs  de  Kambouillel  (Seine- 


(1)  [Depuis  l'époque  où  M.  Bourquelot  a  écrit  ces  lignes,  on  a  généralement  adopté 
l'opinion  que  les  monuments  mégalithiques  sont  prœ-celtigues.  Les  lecteurs  de  la 
Revue  u'ont  pas  oublié  les  travaux  de  M.  Alex.  Bertrand  sur  cette  matière.  | 

(2)  [M.  F.  Baudry,  qui  connaît  fort  bien  la  Normandie,  a  dit,  à  propos  de  cette 
description  de  la  chaise  de  Gargnulua  :  «  M.  Bourquelot  commet  à  cet  égard  deux 
petites  inexactitudes  :  1°  Il  place  la  chaise  de  Gnrgnntua  près  de  Tancarville, 
lorsqu'elle  est  à  une  vingtaine  de  kilomètres,  à  Declair;  2°  il  la  décrit  comme  une 
pierre  qui  surplombe  :  ce  n'est  rien  de  semblable.  La  Chaise  de  Gargantua  est  un 
vallon  creusé  dans  les  falaises  qui  bordent  la  Seine,  et  borné  de  chaque  côté  par  des 
relevés  de  roche  qui  lui  font  comme  deux  bras  de  fauteuil.  »  {Rei'ue  de  Flnstruclion 
pu/ilif/ue  du  19  mai  1859.)] 


GAHGAiNTUA.  O 

el-Oise),  uu  cimetière  où  l'on  a  découvert  des  restes  de  poterie  romaine  et 
des  lombes  mérovingiennes,  est  appelé  les  Gargants  (1). 

«  Aux  courtes  et  aux  voyages  du  géant  se  rattachent  divers  souvenirs-. 
C'est  à  lui  qu'on  attribue  la  formation  de  la  montagne  sur  laquelle  est 
établie  la  ville  de  Laon.  11  portait  un  jour  de  la  terre  dans  une  hotte;  se 
trouvant  trop  chargé,  il  jeta  dans  la  plaine  une  partie  de  son  fardeau,  et 
la  vallée  fut  changée  en  montagne. —  Près  de  Chalautre-la-Grande  (Seine- 
et-Marne)  est  une  butte  naturelle,  dans  l'intérieur  de  laquelle  on  atrouvé 
des  ossements  humains,  des  armes  et  des  instruments.  On  prétend  que 
cette  bulte  a  été  formée  par  la  boue  des  sabots  de  Gargantua,  qui  vint 
jadis  les  décrotter  en  cet  endroit.  Le  diable  hante  encore  de  nuit  la  mon- 
tagne de  Chalautre-la-Grande,  qui  est  elle-même  peu  éloignée  des  monu- 
ments druidiques  de  Liours.  —  A  Dormont,  près  de  Vernon,  deux  tumuli 
sont  appelés  la  floiée  rfe  Gacgrtniua.  Dans  une  plaine  de  Hurepoix,  entre 
Dùurdan,  Étampes  et  Arpajon,  s'élève  un  grand  rocher  isolé  que  l'on 
nomme  le  Gravier  de  Gargantua.  Au  dire  des  conteurs  du  pays,  Gargantua 
jeta  dans  la  prairie  ce  gravier  qui  se  trouvait  dans  son  soulier  et  lui  blessait 
le  pied.  —  On  montre  près  de  Portmort  (Eure),  sur  les  bords  de  la  Seine, 
une  pierre  levée  qui  porte  le  nom  de  Caillou  de  Gargantua.  —  11  existe 
aussi  près  du  bourg  de  Toury  (Loiret),  sur  la  grande  route  de  Paris  à 
Orléans,  un  dolmen  dont  l'origine  est  semblable  à  celle  du  gravier.  Le 
géant  s'y  débarrassa,  en  passant,  d'un  petit  caillou  qu'il  retira  de  son  sou- 
lier, et  ce  caillou  est  l'énorme  pierre  qui  a  pris  le  nom  de  Picire  de  Gar- 
gantua. 

«  Gargantua  paraît  avoir  fréquenté  particulièrement  la  Bt-auci',  le  Berry, 
la  Franche-Comlé.  Un  jour,  il  voyageait  en  Beauce  portant  sur  le  dos  un 
fardeau  de  bois;  pris  par  la  faim,  il  pria  une  vieille  qu'il  rencontra,  et 
qui  menait  un  troupeau  de  bœufs,  de  lui  donner  à  manger.  La  vieille  lui 
offrit  de  se  rassasier  sur  le  troupeau,  et  il  le  dévora  tout  entier;  en  ré- 
compense il  laissa  à  la  bergère  sa  charge  de  bois  avec  laquelle  elle  se 
chauffa  tout  l'hiver.  —  Les  Francs-Comtois  racontent  qu'en  se  désaltérant 
dans  les  rivières  du  Doubs  et  de  la  Drouenne,  Gargantua  les  mettait  à  sec  : 
c'est  à  lui  qu'on  attribue  l'origine  de   la  Pierre  qui  vire,  près  de  Poligny. 

(1)  [Dans  une  autre  partie  de  la  France,  nous  retrouvons  cette  appellation  de 
Gargans,  mais  attachée  à  un  autre  souvenir.  J'apprends  eu  effet,  de  M.  François  Le- 
normaot,  qu'à  Rouen,  le  jour  de  la  fête  de  Saint-Romain  (23  octobre),  on  vendait  de 
petites  figures  (de  deux  ou  trois  centimètres  de  liauteur)  représentant  des  hommes 
grotesques  pourvus  de  l'insigne  de  Priape.  On  appelait  ces  figures  des  G'irgans,  et  les 
jeunes  filles  en  achetaient  qu'elles  mettaient  dans  leur  corsage  d.ns  l'espoir  de 
trouver  plus  facilement  un  mari.  Il  y  a  une  quinzaine  d'années,  la  vente  de  ces 
objets  indécents  a  été  interdite  par  la  police.  Dans  le  louable  désir  de  conserver  aux 
archéologues  le  souvenir  de  cette  coutume,  M.  Fr.  Lenormant  a  donné  un  exemplaire 
de  ces  Gargans  au  Musée  de  Saint-Germain.  —  Je  ferai  remarquer,  en  outre,  que 
l'exemplaire  qu'il  a  eu  l'obligeance  de  me  communiquer  était,  outre  l'appendice 
priapique,  muni  d'une  double  paire  d'yeux.; 


6  ESSAI    DK    MYTHOLOGIE   CELTIQUE. 

—  D'après  une  tradition  répandue  dans  le  pays  des  Grisons,  Gargantua  a 
été  vu  à  Ilanz  dans  l'attitude  du  colosse  de  Rhodes,  debout  sur  deux  ro- 
chers, et  se  penchant  pour  boire  d'un  trait  la  rivière  qui  coule  à  leur 
base.  —  Il  s'est  trouvé  dans  la  même  position  près  de  Beaugency,  et  l'on 
prétend  qu'il  posait  jadis  l'un  de  ses  pieds  sur  la  Pierre  tournante  et  l'autre 
sur  la  Pierre  cVOurcière,  qui  en  est  distante  d'environ  trois  lieues.  —  On 
dit  aussi  que  Gargantua,  se  désaltérant  au  bord  de  la  mer,  avala  par 
niégarde  un  gros  navire  qui  voguait  à  pleines  voiles.  Celle  masse  tenait  à 
l'aise  dans  la  vaste  capacité  de  son  estomac,  mais  le  géant  ne  pouvait  digérer 
le  bois  du  navire.  11  manda  donc  le  médecin  et  lui  déclara  qu'en  buvant 
il  avait  avalé  une  egriesnasse  (grenasse,  petite  graine),  qui  le  gênait  beau- 
coup. Tous  les  vomitifs  ayant  été  employés  sans  succès,  le  médecin  prit 
le  parti  d'aller  reconnaître  sur  les  lieux,  la  cause  du  mal;  il  trouva  le  na- 
vire dans  l'estomac  de  Gargantua,  le  coupa  en  morceaux^  retira  les  frag- 
ments, et  le  malade  fut  guéri 

«  Suivant  quelques  histoires  locales,  le  tombeau  de  Gargantua  existe 

près  de  la  grotte  de  Miremont  (Dordogne),  entre  Sarlat  et  Périgueux.  C'est 
une  grosse  pierre  que  les  habitants  considèrent  comme  recouvrant  les 
restes  du  géant.  Il  y  a  aussi  une  Tomba  del  géant  à  Saint-Cirq,  près  de 
Caussade  (Tarn-et-Garonne).  Le  dolmen  qui  porte  ce  nom  paraît  avoir  eu 
des  dimensions  colossales  :  il  a  été  brisé  et  fouillé,  et  l'on  a  trouvé  sous 
ses  fragments  des  ossements  humains.  » 

A  celte  nomenclature  ajoutons  un  Palet  de  Gargantua  mentionné 
par  la  Commission  de  la  topograpliie  des  Gaules  dans  son  Diction- 
naire archéologique  de  la  Gaule  {époque  celtique),  au  mot:  «  Allyes, 
canton  de  Bonneval,  arrondissement  de  Châteaudun  (Eure-et-Loir). 
—  A  deux  cents  mètres  au  sud  des  premières  maisons  du  village, 
rive  gauche  du  Loir,  au  lieu  dit  la  Plaine  d'Ambré,  existe  un  demi- 
dolmen.  Il  est  connu  sous  le  nom  Pierre-Coupe  o\i  Palet  de  Gargan- 
tua, et  se  compose  d'une  grande  table  enfoncée  dans  la  terre  du  côté 
nord  et  soutenue,  soixante-dix  et  quatre-vingts  centimètres  au-des- 
sus du  sol,  du  côté  sud,  par  un  pilier  médian:  longueur  de  la  table, 
cinq  mètres;  largeur,  trois  mètres  quarante-cinq  centimètres;  épais- 
seur, quatre-vingts  centimètres.  Ce  dolmen,  dit-on,  n'a  pas  été 
fouillé.  »  M.  A.  JoanneCl)  signale  aussi  un  dolmen  appelé  le 
Tombeau  de  Gargantua  sur  le  territoire  de  Corlay  (Gôtes-du-Nord). 

Il  existe  encore  une  légemie  populaire  sur  Gargantua,  si  nous 
croyons  le  récit  que  M.  Thomas  de  Saint-Mars  a  donné,  au  com- 
mencement de  ce  siècle,  dans  les  Mémoires  de  l'Académie  celtique 
(tome  Y,  pp.  392-5). 

(1)  Bretayne  (dan?  1;.  colleciioQ  des  Guides-Joanue),  p.  481. 


GAUGANTUA.  7 

«  Gargantua  est  Irès-connu  dans  l'ancien  duché  de  Retz,  qu'il  a  par- 
couru il  y  a  bien  longtemps.  C'est  un  géant  énorme,  dont  la  taille  égale 
en  hauteur  celle  des  plus  grands  arbres  de  la  forêt.  Ce  géant  venait  de 
très-loin;  il  voyage  toujours.  Il  n'est  pas  méchant  pour\u  qu'il  trouve  de 
quoi  satisfaire  son  immense  appétit.  Il  porte  dans  ses  poches  tous  les  gens 
nécessaires  à  son  service.  Un  drôle  (i)  qui  le  suit,  a  le  dos  chargé  de  la 
j  farine  et  du  vin,  qu'il  doit  dévorer  dans  son  prochain  repas.  Lorsqu'il 
arrive  dans  un  endroit  qui  lui  semble  propre  à  établir  sa  cuisine,  il  s'ar- 
rê;e;  son  drôle  décharge  son  fardeau  et  s'occupe  de  suite  à  construire  un 
four  assez  grand  pour  faire  cuire  cent  pains  de  dix-huit  livres  pesant. 
Cette  opération  lui  coûte  tout  au  plus  dix  minutes;  le  bois  pour  chauffer 
ce  four  est  apporté  sans  qu'on  sache  comment;  les  flammes  consument 
des  arbres  entiers. 

«  Pendant  ce  temps  les  gens  du  géant  sont  sortis  de  ses  poches;  chacun 
s'est  occupé  de  son  travail,  et  en  moin?  d'une  demi-heure  la  table  est 
servie.  Cette  table,  dont  on  ne  donne  pas  les  dimensions,  est  ordinaire- 
ment chargée  d'un  bœuf  rôli,  de  quelques  veaux,  moutons  et  cochon*, 
pris  dans  le  voisinage.  Un  des  gens  de  Gargantua,  monté  sur  cette  table, 
remplit  à  coups  de  hache  les  fonctions  d'écuyer  tranchant;  les  autres, 
par  le  moyen  d'échelles  qui  posent  sur  la  table  et  sont  appuyées  sur  les 
épaules  de  sa  seigneurie,  introduisent  dans  son  énorme  bouche,  par  le 
moyen  de  fourches,  et  la  viande  et  le  pain.  Le  drôle  est  chargé  de  verser 
dans  le  gosier  du  géant  le  vin  qui  lui  est  nécessaire  pour  faire  passer  les 
aliments. 

Le  vase  dans  lequel  il  boit  est  le  tonneau  lui-même.  Il  en  vide  ordinai- 
rement douze  à.  chaque  repas.  Un  de  ces  tonneaux  s'échappa  un  jour  des 
mains  de  l'échanson,  et  passa  avec  la  liqueur  qu'il  contenait,  dans  les 
entrailles  de  Gargantua;  il  en  fut  quitte  pour  un  \iûlent  accès  de  colique; 
les  cris  qu'il  poussa  alors  furent  si  etlVayants  qu'ils  firent  déserter  tous  les 
habitants  des  environs,  qui  depuis  n'ont  point  osé  revenir  :  voilà  pourquoi 
le  pays  où  se  passa  cet  événement  (entre  Rennes  et  Nantes)  n'est  plus 
maintenant  qu'une  lande  sans  habitants  et  sans  culture. 

«  Après  son  diné,  Gargantua  s'endort  pendant  trente  ou  quarante  heures. 
Son  drôle  le  veille.  Le  reste  de  ses  gens  profite  de  son  sonmieil  pour 
faire  disparaître  les  débris  du  repas  et  chercher  les  nouvelles  provisions 
dont  doit  se  charger  le  drôle  avant  de  se  remettre  en  route. 

«  C'est  au  résultat  d'une  de  ses  digestions  que  les  villageois  de  ce  pays 
attribuent  la  formation  du  Moiit  Gargant,  situé  à  quelque  distance  de 
Nantes.  Il  y  a  près  de  Rouen  un  endroit  qui  porte  le  môme  nom,  et  qui, 
probablement,  a  la  même  origine. 

«  Us  racontent  aussi  comment  il  éteignit  l'incendie  qui  consumait  le 


'1)  Probablement  le  tiôll  de  la  niytliologie  germanique,  dout  le  àouvenir  s'tst 
môle  à  celui  de  notre  celtique  Gargantua. 


8  ESSAI    DE   MYTHOLOGIE   CELTIQUE. 

château  d'une  fée  de  ses  amies,  auquel  un  méchant  enchanteur  avait  mis 
le  feu.  » 

Une  œuvre  littéraire  ne  pénétre  pas  assez  avant  dans  les  croyances 
populaires  pour  que  le  nom  de  ses  héros  s'attache  aux  monuments 
des  anciens  âges  et  en  remplace  les  noms  anciens.  Dans  ces  dénomi- 
nations gargantuines  d'un  grand  nombre  de  nos  monuments  méga- 
lithiques, on  ne  peut  voir  que  l'importance  et  l'universalité  de  ce 
mythe  encore  inexpliqué.  —Mais,  dit  un  éruditdontje  regrette 
d'avoir  contre  moi  l'opinion,  M.  Baudry  (1),  Irouve-t-on  écrit 
quelque  part  avant  le  xvi«  siècle  le  nom  de  Gargantua?  La  chaise  de 
Gargantua,  que  l'on  montre  dans  les  environs  de  Rouen,  s'appelle 
cathedra  gygantis  dans  les  chartes  du  xiir  siècle.  —  Ce  silence  ne 
prouve  rien,  car  la  pensée  de  coucher  par  écrit  le  nom  d'une  super- 
stition populaire  eût  fait  sourire  de  dédain  un  scribe  du  moyen  âge, 
comme  il  ferait  aujourd'hui  sourire  le  bourgeois  voltairien  et  demi- 
lettré  de  nos  campagnes. 

Si,  sur  le  continent,  nous  ne  pouvons  trouver  avant  le  xvi*  siècle 
aucun  document  écrit  sur  Gargantua,  il  s'en  présente  en  Grande- 
Bretagne,  dès  le  xiie  siècle.  Nous  savons,  par  les  témoignages  des 
anciens,  que  la  Grande-Bretagne  ditïérait  peu  de  la  Gaule.  C'était  la 
même  population,  c'était  la  même  langue.  Il  ne  se  présentait  guère 
qu'une  différence,  c'est  que  les  Celtes  du  continent  avaient  atteint 
un  certain  degré  de  civilisation,  tandis  que  les  Celles  bretons 
restaient  plongés  dans  une  barbarie  profonde.  Or,  je  ne  puis  m'em- 
pêcher  de  reconnaître  le  dieu  celtique  qui,  sur  le  continent,  est  de- 
venu le  géant  Gargantua,  dans  ce  «  Gurguntius,  lilius  nobilis  illius 
Beleni  (2),  »  que  Giraud  de  Birry,  dit  Giraud  le  Gallois  (écrivain  du 
XII*  siècle),  assure  avoir  régné  sur  la  Grande-Bretagne  bien  long- 
temps avant  l'arrivée  de  Jules  César.  D'autres  chroniqueurs  de  la 
Grande-Bretagne  nous  entretiennent  de  ce  Gurguntius.  Geoffroy  de 
Monmouth,  écrivain  gallois  du  xii*  siècle,  dans  son  Historia  regum 
Britanniœ,  après  avoir  longuement  pailé  de  Bélinus,  consacre  deux 
chapitres  à  son  fils  et  successeur  Gurgiunt  Brabtruc  (3).  Le  Brut 
Tysylio,  chronique  en  langue  galloise  qui  est  très-probablement  anté- 
rieure à  VHistoria  de  Monmoutb  (4),  en  parle  sous  le  nom  de  Gurgant 

(1)  Dans  la  Revue  de  l'instruction  puljlique  du  19  mai  1859. 

(2)  Giraldi  Cambrensis  Tnpographia  Hibemirr'^  II,  8. 

(3)  Chap.  XI  et  xii  du  liv.  III.  —  Je  cite  d'après  l'édition  de  San-Marte,  Halle, 
1854,  in- 8. 

[k)  Voir  San-Marte  :  Gottfried  von  Monmouth' s  Historia  regum  Bri'anniœ.  In- 
troduction, p.  Lxxii  et  &q(|. 


GARGANTUA.  9 

Varf  druch.  En  présence  de  celle  forme,  nous  n'hésilons  pas  à  re- 
garder comme  une  fausse  leçon  le  Brabiruc  que  donne  l'édilion  de 
Geoffroy  de  Monmouth  par  San-Marte,et  nous  sommes  d'autant  plus 
autorisé  à  lire  firtri^rwc,  que  PonlicusYirnnnius,  qui  publia  un  extrait 
de  Gotlfried  et  de  Gildas  (1),  écrit  Gunjuint  Barb  trucli.  Le  v  cl  le  b 
sont  ici  équivalents,  et  les  formes  diverses  correspondent  parfaite- 
ment. Peler  Roberts,  dans  la  traduction  anglaise  qu'il  a  donnée  en 
1811  du  Brut  Tysylio,  rend  Varf  druch  par  Grimbeard  :  San-Marle, 
;idoptanl  cette  traduction,  dit  Grimmbart.  Cela  signifie  donc  en 
français  Gurgant  ou  Gurguint  à  la  barbe  effrayante.  Cette  «  barbe 
efl'iayante  »  dont  la  légende  fait  un  attribut  de  Gurgant,  doit  être 
considérée  comme  un  signe  de  force,  et  nous  retrouverons  un  attri- 
but analogue  dans  la  légende  de  Gargantua. 

Plus  d'une  ancienne  chronique  de  la  Grande-Bret;igne  fait  men- 
tion du  Gurguntius,  et  il  s'est  à  son  sujet  élevé  plus  d'une  polémique 
entre  l'Irlande  et  la  Grande-Bretagne.  Des  chroniques  de  la  Grande- 
Bretagne  (5/ wf  T?/.s///«o,  r/fùfor*V<  de  Geoffroy  de  Monmouth,  etc.) 
assuraient  que  Partholan,  le  chef  mythique  de  la  première  colonisa- 
tion en  Irlande,,  avait  reçu  l'Irlande  encore  inhabitée  comme  présent 
de  Gurguntius,  roi  de  la  Grande-Bretagne.  De  là  on  concluait  que 
l'Irlande  relevait  de  tout  iemps  de  la  Grande-Bretagne.  Les  écrivains 
irlandais  n'acceptaient  point  ce  raisonnement,  et  pour  le  détruire, 
s'efforçaient  de  démontrer  que  Partholan  et  Gurguntius  n'étaient 
point  contemporains  (2).  Ces  discussions,  qui  nous  semblent  ridicules, 
n'étaient  pas  inutiles,  puisque,  dans  un  acte  du  Parlement  passé  à 
Dublin  en  lo()l)  contre  Shane  O'Neill,  on  étayait  sur  cette  légende 
(où  l'on  confondait  môme  les  noms  de  Gurguntius  et  de  Garmondus) 
les  droits  de  la  reine  Elisabeth  sur  le  trône  d'Irlande  (3)  ! 

Le  souvenir  de  Gurguntius  s'était  même  conservé  dans  quelques 
villes  de  la  Grande-Bretagne,  à  Norwich,  par  exemple.  Lorsque,  le 
16  août  1378,  la  reine  Elisabeth  alla  visiter  Norwich,  une  procession 
sortie  de  la  ville  alla  au-devant  d'elle,  et  le  roi  fabuleux  de  la  Giande- 
Bretagne,  Gurgunt,  y  était  représenté  (4).  C'est  ainsi  qu'à  certain 

(1)  Pontici  Virunnii  Ilistoriœ  Britannicœ  libri  VI. 

(2)  Voir  V Histoire  d'Irlande  de  Keating,  p.  193,  dans  la  traduction  anglaise  de. 
John  0'  Mahony  (iu-8,  New-York),  et  Cambrensis  Eversus,  auctore  Gratiam  Lucio, 
Hiberno  (pseudonyme  de  John  Lynch),  chap.  xxvi. 

(3)  Voir  le  Cambrensis  Eversm  (loc.  cit.),  et  Haverty,  History  of  Ireland,  p.  398, 
HOle,  où  sont  indiquées  les  sources. 

(4)  D'après  Nath.  Drake,  Shakspeare  und  his  times,  se  chantait  à  Norwich  un 
noël  où  se  rencontre  le  couplet  suivant  : 

Nel  hatii  left  lier  wool  at  home. 


10  ESSAI   DE   MYTHOLOGIE   CELTIQUE. 

jour  la  ville  de  Douai  promène  son  géant  Gayant,  que  la  ville  de 
Paris  promenait  autrefois  un  grand  mannequin  qu'on  appelait  (e 
Suisse  de  la  rue  aux  Oues. 

Si  la  légende  de  Gargantua  n'est  pas  l'invention  de  Rabelais,  elle 
devra  se  retrouver  ailleurs  que  dans  cet  écrivain.  A-l-elle  élé,  avant 
Rabelais,  racontée  dans  des  chroniques  populaires?  Malheureuse- 
ment, si  répandus  qu'ils  puissent  être,  les  livres  populaires  dispa- 
raissent rapidement.  Il  ne  se  trouve  guère  de  colporteur  qui  ne  les 
ait  dans  sa  balle  el  ne  les  vende  de  village  en  village;  mais  ces 
livres,  misérablement  imprimés,  ont  bientôt  disparu  entre  les  mains 
de  lecteurs  curieux  et  négligents.  Les  bibliothèques  publiques  les 
ignorent,  et  les  bibliophiles  se  désespèrent  de  leur  rareté.  Que  nous 
reste-t-il  de  ces  Chronicques  gargantuines  dont  «  il  a  esté  plus 
vendu  par  les  imprimeurs  en  deux  mois,  dit  Rabelais,  qu'il  ne  sera 
acheté  de  Bibles  en  neuf  ans?  »  On  n'en  connaît  que  deux  ou  trois 
exemplaires.  Il  ne  faut  donc  pas  faire  de  la  rareté  de  ces  chroniques 
antérieures  au  Gargantua  de  Rabelais  un  argument  contre  l'ancien- 
neté de  notre  légende. 

On  n'a  pas  assez  remarqué,  à  mon  sens,  que  le  premier  livre 
publié  par  Rabelais  est  le  «  Pantagruel,  »  qui  vient  le  second  dans  nos 
éditions.  Ce  n'est  que  plus  tard  que,  encouragé  par  le  succès, 
Rabelais  donna  le  premier  livre  contenant  «  la  vie  très-horrificque 
du  grand  Gargantua.  »  Je  sais  bien  qu'on  attribue  quelquefois  à 
Rabelais  les  Chroniques  de  1532  et  de  ia33;  mais  je  ne  puis  recon- 

ïhe  Flanderkin  hath  stayed  his  loom; 

No  beame  doth  swinge  nor  wheel  go  round 

Upon  Gurguntum's  walled  ground; 
et  Drake  remarque  :  «Gerguntuin  (sic)  was  a  fabulous  king  of  Britain  who  is  sup- 
posed  to  hâve  builtNorwich  Castle.  In  the  procession  which  went  out  of  Norwich  to 
meet  the  queen  (Elisabeth)  on  the  lO'h  of  August  1578  was  «  one  whiche  repre- 
sented  king  Gorgunt,  soraetiire  king  of  Englande  whiche  buylded  the  castle  of 
Norwich,  called  Blanche  Flowre,  and  layde  the  foundation  of  the  citie.  He  was 
mounted  upon  a  brave  courser,  and  was  thus  furnishcd  :  his  body  armed,  his  bases 
of  Tvhite  and  green  silke;  on  his  head  a  black  velvet  hat,  with  a  plume  of  whije 
feathers.  There  attended  upon  him  three  henchmen  in  white  and  greene  :  one  of 
them  did  beare  his  helmet,  the  seconde  his  target,  the  ihirde  his  staffe.  »  Nicfiol's 
Progresses,  vol.  II,  p.  5-6.  » 

J'emprunte  cette  citation  à  l'excellent  commentaire  qui  suit  la  traduction  alle- 
mande de  Rabelais  par  Régis.  Leipzig,  1839,  in-8,  seconde  partie,  p.  lxxxii. 

Quant  aux  allusions  à  Gargantua  dans  la  littérature  anglaise  moderne,  c'est  bien 
certainement  à  Rabelais  qu'il  faut  les  rapporter,  celle-ci  par  exemple  qui  se  trouve 
dans  le  Comme  il  vous  plaira  de  Sliakspeare  :  «  Pri*tez-moi  d'abord  la  bouche  de 
Gargantua!  »  (.4s  you  like  if,  acte  III,  se.  ii.) 


GARGANTUA.  { I 

naître,  dans  ces  compilations,  ni  l'esprit  ni  le  style  de  Rabelais. 
Remarquons  en  outre  que  l'histoire  de  Gargantua  y  est  entièrement 
différente  de  celle  que  donne  Rabelais.  Il  me  semble  bien  plus  na- 
turel de  penser  que  Rabelais,  excité  par  la  vogue  que  rencontraient 
ces  histoires  de  géants,  voulut  donner  une  de  ces  légendes  pour 
cadre  aux  brillantes  fantaisies  de  son  imagination  railleuse.  Il  ne 
choisit  pas  Gargantua,  parce  que  la  légende  de  Gargantua  courait 
déjà  la  campagne  et  qu'un  nouveau  récit  de  la  vie  de  ce  géant  se 
perdrait,  malgré  son  mérite,  dans  la  foule  des  compilations  gargan- 
tuines.  Il  prit  pour  héros  un  lils  de  Gargantua,  Pantagruel,  dont  !a 
légende  ne  disait  presque  rien.  Là,  sa  fantaisie  ne  rencontrait  au- 
cune légende  convenue,  et  le  livre  qu'il  méditait  avait  chance  de 
réussir  comme  suite  à  ces  Chroniques  gargantuines  qui  avaient  tant 
de  succès.  On  sait  quel  accueil  favorable  rencontra  le  Pantagruel  de 
maître  Alcofribas  Nasier.  Mais  alors  Rabelais  rougit  de  voir  son 
t  spirituel  »  Pantagruel  continuer  un  insipide  Gargantua.  La  célé- 
brité qu'avait  proraptement  acquise  maître  Alcofribas  Nasier  lui 
permettait  de  reprendre  le  thème  vulgaire  et  de  le  frapper  à  son 
empreinte,  proprie  communia.  Alors  il  écrivit  ce  Gargantua  signé  du 
nom  d'Alcofribas  Nasier,  ce  «  livre  seigneurial  »  dont  le  succès  re- 
jeta bientôt  dans  l'ombre  le  Gargantua  populaire.  Rabelais  avait 
endigué  le  flot  courant  de  la  tradition,  mais  en  même  temps  il  pré- 
parait des  tortures  aux  mythologies  de  l'avenir. 

Dans  les  Chroniques  gargantuines  de  1532  et  de  1633,  non-seule- 
ment la  légende  est  autre  que  dans  Rabelais,  mais  Gargantua  ne  se 
détache  pas  bien  nettement  du  fond  de  nos  vieilles  légendes.  Il  y 
apparaît  comme  serviteur  du  roi  Arthur  de  la  Grande-Bretagne. 
Dans  la  môme  histoire  se  rencontrent  Merlin,  la  fée  Morgane,  Oger, 
Gallimassue,  Obéron,  et  sous  la  plume  de  l'écrivain  populaire  se 
confondent  et  s'entremêlent  les  histoires  de  ces  héros  légendaires. 
Le  père  de  Gargantua  s'appelle  ici,  comme  dans  Rabelais,  Grand- 
gousier,  mais  sa  mère  s'appelle  Galemelle;  elle  s'appellera  Garga- 
raelle  dans  Rabelais. 

Mais  un  texte  plus  précis  va  nous  montrer  Gargantua  antérieur  à 
l'œuvre  de  Rabelais.  Charles  Bourdigné,  publiant  en  1526  (c'est-à- 
dire  huit  ans  avant  la  première  chronique  gargantuine  connue)  sa 
légende  de  Maistre  Pierre  Faifeu,  s'écriait  dans  une  Ballades  aux 
lysans  : 

De  Patheltn  n'oyez  plus  les  canticques, 
De  Jehan  de  Meun  la  grant  jolyveté, 
Ne  de  Villon  les  subtilles  trafficques, 
Car  pour  tout  vray  ils  n'ont  que  nacquetté. 


12  ESSAI    DE   MYTHOLOGIE   CELTIQUE. 

Robert  le  Dyable  a  la  tête  abolie, 
Bacchus  s'endort  et  ronfle  sur  la  lyc; 
Laissez  ester  Caillette  la  folastre. 
Les  quatre  filz  Aymon  vestuz  de  bleu, 
G(0'gantuu  qui  a  chepveulx  de  piastre  : 
Oyez  les  faits  Maistre  Pierre  Faifeu. 

Ainsi,  en  1526,  l'histoire  de  Gargantua  était  connue  el  populaire, 
Uue  sont  ces  <i  clieveux  de  plâtre?»  M.  Gaston  Paris,  à  qui  je  dois 
de  connaître  ce  texte,  pense  que  c'est  peut-être  une  allusion  à  une 
enseigne  célèbre  de  celte  époque,  de  même  sans  doute  que  l'épi- 
thète  «  vestuz  de  bleu  »  appliquée  aux  quatre  fils  Aymon.  On  n'a 
pas  encore,  à  ma  connaissance,  trouvé  Gargantua  dans  ce  rôle;  mais 
le  fait  n'en  est  pas  moins  possible,  puisqu'il  est  certain  pour  les 
quatre  fils  Aymon.  L'épithéte  «  de  piastre  »  peut  donc  s'expliquer 
par  la  couleur  donnée  à  ses  cheveux  sur  une  enseigne.  Quant  à  sa 
chevelure,  qui  ne  serait  pas  mentionnée  si  elle  n'était  assez  abon- 
dante pour  être  caractéristique,  elle  nous  semble  correspondre  à 
merveille  à  la  «  barbe  horrible  »  de  Gurgant.  Le  poil  a  toujours  été 
un  signe  de  force,  et  c'est  parce  qu'on  s'imaginait  Gargantua  ou 
Gurgant  avec  cette  qualité,  qu'on  l'a  représenté  comme  un  individu 
«  à  poil.  »  J'emploie  à  dessein  cette  expression  vulgaire  parce  qu'elle 
exprime  la  façon  dont  le  peuple  comprend  la  force. 

Revenons  aux  Chroniques  garganluines. 

Différente  à  la  fois  de  la  légende  que  contiennent  les  Chroniques 
de  1532  et  1533,  et  de  la  création  de  Rabelais,  est  la  Vie  du  très- 
fameux  Gargantuas  (sic)  le  plus  terrible  r/éantqui  ait  jamais  paru  sur 
laterre,  dont  un  gi-and  nombre  d'exemplaires  furent  publiés  à  Troyes 
pendant  le  siècle  dernier  et  au  commencement  de  celui-ci  (I).  Cette 
histoire,  rédigée  en  style  moderne,  est  très-vulgaire  et  se  borne  à  des 
exploits  de  force  physique  et  de  gloutonnerie.  Les tiails  qu'on  y 
rencontre  sont  communs  à  presque  toutes  les  histoires  de  géants. 

(1)  Je  dois  à  l'obligeance  de  M.  Paul  Meyer  d'en  avoir  eu  un  exemplaire  entre  les 
mains.  En  voici  le  titre  exact  :  la  Vie  du  [(mieux  Gargantuas,  le  plus  terrible  géant 
r/ui  ait  jamais  paru  sur  la  terre;  traduction  nouvelle,  dressée  sur  un  ancien  ma- 
uuscrit,  qui  s'est  trouvé  dans  la  bibliothèque  du  Grand  Mogol.  A  Troyes,  chez  André, 
imprimeur-libraire,  près  THôtel  de  Ville,  n"  20^.  An  M.DCCCVII,  68  p.  in-18  (y  com- 
pris la  feuille  du  titre).  —  IM.  Régis  [op.  cit.,  2^'  part.,  p.  cxlix,  note)  signale  un 
exemplaire  de  cette  chronique  publiée  «  à  Troyes,  chez  Garnier,  »  sans  date,  avec 
un  privilège  du  12  juillet  1728.  Cet  exemplaire,  qui  se  trouve  à  la  Biblidlièque 
royale  de  Berlin,  comprend  40  pages  et  une  feuille  pour  le  privilège.  Par  les  frag- 
ments que  cite  M.  Régis,  je  me  suis  convaincu  que  le  texte  est  le  môme  que  dans 
l'édition  de  1807. 


GARGANTUA.  13 

Il  tue  ses  maîtres  comme  Héraclès  a  tué  Linos;  il  avale  une  de  ses 
nourrices,  ainsi  que  font  quelques  géants  des  légendes  germaniques, 
si  ma  mémoire  ne  me  trompa.  Son  père  est  Briarée  et  sa  mère 
Garganline.  Nous  verrons  plus  loin  que  le  mot  français  gourgandine 
n'est  qu'une  variation  dialectale  de  ce  nom. 

Examinons  maintenant  les  traditions  diverses  que  nous  avons 
énumérées.  Il  faut  d'abord  laisser  de  côté  Grandgousier,  Galemelle, 
Gargaraelle,  Briarée  et  Gargantine.  Quand  le  sens  d'un  mythe  est 
perdu,  quand  on  n'a  plus  conscience  du  phénomène  naturel  qu'il 
exprime,  quand  la  transformation  anthropomorphique  est  accomplie, 
l'esprit  populaire  sent  le  besoin  de  rattacher  le  dieu  à  d'autres  dieux, 
de  lui  trouver  une  famille  :  ou  bien  on  le  rattache  à  des  dieux  déjà 
existants,  ou  bien  on  lui  invente  une  famille  nouvelle.  C'est  ainsi  que, 
dans  plus  d'une  de  nos  traditions  populaires,  on  donne  une  mère  au 
Diable,  bien  que  la  mère  du  Diable  soit  inconnue  à  la  théologie 
chrétienne.  C'est  à  un  besoin  de  ce  genre  que  j'attribue  la  création 
de  Grandgousier  et  de  Gargamelle,  noms  dont  le  sens  est  parfaite- 
ment clair;  de  Gargantine,  diminutif  féminin  formé  sur  le  thème 
Gargant;  quant  au  nom  de  Galemelle,  je  ne  saurais  l'expliquer. 

Reste  le  nom  de  Gargantua.  Nous  négligeons  l'explication  de  Ra- 
belais :  «  Que  grand  tu  as!  {supple  le  gousier),  »  et  aussi  celle  que 
donne  l'auteur  inconnu  des  Chroniques  de  1533  :  v  Adonc  (Gale- 
melle) le  nomma  Gargantua  (lequel  est  ung  verbe  grec),  qui  vault 
aultant  à  dire,  comme  tu  as  ung  beau  filz.  Adonc  la  mère  distque 
elle  vouloit  que  il  eust  ainsi  nom,  et  le  père  fut  daccord.  »  La 
chronique  qui  s'imprimait  encore  au  commencement  de  ce  siècle  à 
Troyei  nous  a  conservé  de  ce  nom  une  forme  que  je  considère 
comme  plus  archaïque,  Gargantuas. 

Gargantua  me  semble  en  effet  venir  d'une  forme  Gargantiias-atis, 
comme  Nantua  (Ain)  est  venu  d'une  forme  Nnntuas-atis  (1),  comme 
Cruas  (Ardèche)  est  venu  de  Crudatus  (2),  etc.  A  mon  sens,  Gargan- 
tua est  formé  avec  le  suffixe  uas-atis  (3)  d'un  thème  Gargant,  parti- 


(1)  M.  J.  Quiclierat  (De  la  formation  française  des  noms  de  lieu,  p.  41)  donne 
Nanloacurn  comme  l'ancienne  forme  de  Nantua;  mais  je  trouve  Nantuadis  dans  Dom 
Bouquet,  VIII,  p.  388. 

(2^  Quicherat,  op.  cit.,  p.  42. 

(3)  Je  n'ignore  pas  que  la  plupart  des  noms  gaulois  en  -uas  sont  formés  du  suffixe  at 
joint  à  dus  substantifs  en  u  (voir  Gluck  :  Die  bei  C.  Julius  Cœsar  vorkommenden 
Keltischen  Namen,  p.  8  et  110).  Mais  l'existence  du  nom  breton  Gurgont  nous  semble 
répugner  à  cette  explication.  Nous  croyons  plutôt  que  les  noms  eu  -uas,  -uatis, 
étant  devenus  fréquents,  on  a  fini  par  considérer  uas  comme  un  suffixe,  et  qu'on  l'a 


14  ESSAI   DE   MYTHOLOGIE   CELTIQUE. 

cipe  présent  de  garg,  forme  intensive  formée  par  redoublement  de 
la  racine  Gar  «  avaler,  dévorer.  »  Du  môme  thème  participial,  mais 
avec  un  autre  suffixe,  est  formé  le  nom  de  Gurgunlius,  el  le  Brut 
Tysylioa  gardé  la  forme  primitive  en  affaiblissant  le  premier  a  en  u, 
Gurgant. 

Le  redoublement  de  cette  racine  Gar  doit  être  un  fait  très-ancien, 
car  nous  le  retrouvons  dans  la  forme  sanscrite  ni-galgal,  «  dévorer 
avec  avidité  (1),  n  dans  les  formes  grecques  pi-êpcoaxo),  Y°PPP-'^' 
7apYap-(Cw.  C'est  la  même  racine  qui  a  fourni  en  sanscrit  gargara, 
«  abîme,  »  en  grec  yépY^po-ç,  yapYap-ewv,  en  latin  giirgula,  gurgulio, 
plus  tard  ciirculio,  en  ancien  haut-allemand  querechda,  d'où  le 
moderne  allemand  Gurgel.  La  racine  redoublée  se  retrouve  sous  la 
forme  abrégée  garg  dans  le  latin  gurges,  g'tir^îïis,  dans  l'ancien 
norrois  Kverk,  et  dans  l'ancien  haut-allemand  querc-a,d'o\i  (soit  dit 
en  passant)  notre  mot  français  carcan  (2).  C'est  à  cette  racine  que  je 
rapporte  l'espagnol  et  le  languedocien  garganta,  «  gorge,  »  littéra- 
lement «  l'avaleuse,  »  et  aussi  l'ancien  anglais  gargate  et  le  breton 
gargaden,  qui  ont  le  môme  sens.  Gourgandine  n'est  évidemment  qu'une 
variation  dialectale  de  Gargantine,  le  nom  de  la  mère  de  Gargantua 
dans  la  Chronique  de  Troyes  (3).  /«e  étant  un  suffixe  de  diminution, 
Gargantine  et  Gourgandine  signitieraient  donc  étyniologiquement 
«  petite  mangeuse.  »  Le  masculin  correspondant  à  Gourgandine  se 
retrouve  dans  le  provincial  Gargandin,  «  garnement,  »  que  donne 
M.  le  comte  Jaubert  dans  son  Glossaire  du  Centre  de  la  France 
(2^  éd.).  Ajoutons  les  mots  provençaux  Gargantuan,  «  homme,  bote 
vorace;»  gargaou,  «  gavion,  gosier,  »  et  l'espagnol  gargantoti, 
«  glouton.  »  Je  rapporte  à  la  même  racine  les  mots  français  gargote 
etgargouille.  Ce  dernier,  qui  signifie,  comme  on  sait,  un  objet  par 
où  l'eau  s'échippe,  est  sans  doute  le  diminutif  d'un  nom  signifiant 
«  gorge,  »  et  ce  nom  aujourd'hui  perdu,  venu  du  radical  ^or^/,  signi- 
fiait à  peu  prés  «  l'avaleuse.»  J'explique  donc  le  thème  Gargant,  que 
nous  a  conservé  le  nom  de  Gargantua,  comme  signifiant  «  le  dévo- 
rant. »  Cette  observation  est  conlorme  aux  lois  de  la  phonétique 

joint  à  ce  titre  au  thème  Gargant  dont  on  oubliait  la  signification  participiale  et 
qu'on  voulait  renforcer  d'un  suffixe. 

(1)  Dans  cette  phrase  du  Jajur-véda,  par  exemple  :  â  hanti  gale  pasô  nigalgaliti 
dhânikâ. 

(2)  Pour  tous  ces  rapprochements,  voyez  Ficlc  :  Wœrterbuch  der  Indogermanischen 
Grundsprache,  p.  57  et  58. 

(3)  C'est  ainsi  que  dans  son  Glossaire  du  Centre  de  la  France  M.  le  comte  Jau- 
bert donne  à  cô..é  l'un  de  l'autre,  comme  signifiant  «  gorge,  larynx,  »  Gurganet  et 
Gourganet, 


GARGANTUA.  15 

celtique  ;  car,  d'une  part  nous  savons  que  le  Ginitial  indo-européen  se 
conserve  tel  en  gaulois;  par  exemple  garanos,  «  grue(l),))  qui  vient 
d'une  racine  Gar,  «  crier,  »  d'où  les  noms  grecs  et  germaniques  de 
la  grue  :  grec,  yspavo;,  anglo-saxon,  cran  (angl.  mod.  crâne),  et 
ancien  haul-allemand,  cran-uh  (2).  Quant  au  sulTixe  ant^  ou  plus 
exactement  nt,  il  était  fréquent  en  gaulois  (3)  et  probablement  il  y 
était  originairement,  comme  en  latin,  la  syllabe  formative  du  parti- 
cipe présent. 

Gargantuas  est  donc  une  épithète  ajoutée  au  nom  d'un  dieu, 
épiLhéte  qui,  séparée  deson  sul)stantif,  est  devenue  une  divinité  par 
elle-même.  Celte  même  racine  Gar  a  fourni  à  la  mythologie  indoue  le 
nom  d'un  dieu  que  Ton  regarde  comme  une  personnification  de  la 
lumière,  le  dieu  Garuda,  le  vainqueur  des  serpents  Nagas  (4). 

Ce  nom  de  Gargantua,  «  le  Dévorant,  »  convient  bien  à  un  géant. 
Les  géants  de  l'Allemagne  portaient  autrefois  une  dénomination 
analogue.  En  effet,  pour  désigner  les  géants,  nous  rencontrons  en 
norrois  iotunn,  en  anglo-saxon  eoten  (d'où  l'ancien  anglais  etiîiy 
l'ancien  écossais  ettyn),  en  ancien  saxon  etan.  Ce  nom,  identique 
sous  des  formes  diverses,  vient  en  effet  de  la  racine  ad,  «  manger  »  (en 
gothique  itan),  et  signifie  manducus,  -KoXu'^a'Yoç.  Ce  nom  a  disparu 
aujourd'hui  de  la  langue  et  ne  s'est  maintenu  que  dans  une  appella- 
tion géographique,  le  Jutland,  «  le  pays  des  Géants,  »  qui  a  conservé 
son  nom  des  êtres  fabuleux  dont  le  peuplait  autrefois  l'imagination 
des  Germains.  De  même  l'ancien  norrois  thurs,  «  géant,  »  signifie 
«  l'altéré  (5).  » 

Il  nous  reste  à  chercher  l'origine  du  mythe  de  Gargantua,  à  déter- 
miner l'époque  où  il  s'est  formé,  les  phases  qu'il  a  traversées.  La 
question  est  d'autant  plus  délicatequ'avant  le  xii*  siècle  nous  n'avons 
aucun  document  écrit  qui  fasse  mention  de  Gargantua.  Aucune  ins- 
cription ne  renferme  ce  nom. 

Gargantua  nous  semble  être  un  dieu  gaulois  transformé  en  géant; 
car  nous  avons  peine  à  croire  qu'il  ait  pris  naissance  au  moyen  âge. 
Ce  mythe,  en  effet,  ne  rentre  pas  dans  l'histoire  comme  les  légendes 
où  Charlemagne  a  remplacé  d'anciennes  divinités  germaniques.  Il 
ne  rentre  pao  non  plus  dans  les  traditions  chrétiennes;  il  viten 
dehors  d'elles  et  n'a  avec  elles  aucun  point  de  contact.  On  peut  attri- 

(1)  Dans  l'inscription  des  autels  de  Notre-Dame  :  TAnvos  trigaranos. 

(2)  Voyez  Fick,  o/j.  cit.,  p,  58. 

(3)  Voir  les  exemples  qu'en  donne  Zeuss,  p.  759  et  sqq.  de  sa  Grammatica  celiica. 

(4)  Voir  Bœthlinck  et  Roili:  Sanskrii-Wœrterbuc/i,  sub  verbo  Garuda. 

(5)  Voyez  J.  Grimm,  Deutsche  Mythologie,  2«  éd  ,  p.  485  et  sqq. 


16  ESSAI    DE   MYTHOLOGIE   CELTIQUE. 

buer  au  moyen  âge  la  créalion  de  quelques  personnages  légendaires 
du  christianisme,  tels  que  saint  Christophe  ou  sainte  Véronique; 
des  légendes  comme  celle  du  Trou  de  Saint-Patrice,  ou  comme  celles 
qui  en  maint  endroit  se  sont  attachées  au  nom  de  la  Vierge  Marie, 
peuvent  être  considérées  comme  créées  de  toutes  pièces  au  moyen  âge. 
Mais  dans  Gargantua  nous  avons  un  type  préchrélien.  Il  nous  semble 
que  l'imagination  populaire  d'une  race  devenue  chrétienne  n'aurait 
pu  créer  un  type  qui  ne  tient  au  christianisme  par  aucun  côté. 

Ce  qui  plaide  aussi  en  faveur  de  lantiquiié  de  la  tradition  gargan- 
tuine,  c'est  son  universalité.  Elle  se  rencontre  dans  les  provinces 
les  plus  diverses  de  notre  France,  elle  se  retrouve  en  Grande-Bre- 
tagne. Ce  n'est  pas  une  légende  locale,  c'est  un  souvenir  qui  appar- 
tient à  toute  une  race.  En  Grande-Bretagne  même,  nous  trouvons 
son  nom  associé  à  un  nom  qui  est  bien  évidemment  celui  d'une  divi- 
nité celtique,  «  Gurguntius,  filius  nobilis  illius  Beleni.  »  Comment  ne 
pas  reconnaître  dans  ce  prétendu  roi  de  la  Grande-Bretagne  qui,  sui- 
vant les  naïfs  chroniqueurs,  aurait  régné  plusieurs  siècles  avant 
Jésus-Christ,  l'Apollo  Bélénus  des  Gaulois,  dont  le  culte  était  si 
répandu?  C'est  l'opinion  de  M.  San-Marte  (1),  et  nous  la  partageons 
complètement. 

Mais  quelle  divinité  était  Gargantua,  ou,  pour  parler  plus  exacte- 
ment, à  quelle  divinité  s'était  attachée  cette  appellation  de  Gargantua, 
qui,  comme  nous  l'avons  vu,  signifie  le  «  Dévorant?  »  Ici,  avouons-le, 
nous  ne  pouvons  que  présenter  des  hypothèses. 

L'idée  maîtresse  du  type  de  Gargantua  est  la  force  :  de  là  décou- 
lent ses  différentes  qualités.  Le  dieu  qui  représente  principalement  la 
force  étant  Hercule,  nous  regardons  Gargantua  comme  un  développe- 
ment de  l'Hercule  gaulois.  Hercule  était  honoré  chez  les  Gaulois  :  de 
nombreuses  inscriptions  l'attestent.  Elles  ne  nous  le  font  connaître, 
il  est  vrai,  que  sous  le  nom  latin  d'Hercules.  Mais  peut-être,  les  noms 
celtique  et  latin  étant  à  peu  prés  homophones,  y  a-t-il  eu  confusion 
entre  eux,  de  môme  qu'à  Rome  il  y  eut  confusion  entre  l'ancien 
Herculus  italique  et  l'Héraclès  grec.  Si,  en  Gaule,  le  nom  latin 
Hercules  a  supplanté  le  nom  gaulois,  de  nombreuses  épithètes 
celtiques  (pour  la  plupart  encore  inexpliquées)  accompagnent  ce 
nom  dans  les  inscriptions  votives  et  montrent  bien  clairement  qu'il 
s'agit  là  d'une  divinité  nationale  de  la  Gaule.  Les  exploits  que  quel- 
ques écrivains  grecs  attribuent  en  Gaule  à  l'Hercule  grecou  tyrien. 


(IJ  Dans  son  édition  de  Gottfried  de  Monmoulli,  p.  238  et  sqq. 


«vARGANTL'A.  17 

l'explication  mythologique  tie  la  Cran,  de  ses  campi  lapidei  {{),  sont 
peut-être  des  légendes  gauloises  adaptées  par  les  colons  de  Marseille 
aux  légendes  de  leur  pays.  Quant  au  prétendu  Hercule  gaulois  de 
Lucien,  l'Hercule  Ogmios,  il  n'a  rien  à  faire  ici.  Des  personnes  com- 
pétentes s'accordent  à  croire  que  Lucien  s'était  trompé  et  que  pour 
un  Hercule  il  avait  pris  un  Mercure,  sans  doute  quelque  Mercure 
correspondant  à  l'Epu-YJ;  >.oftoç  des  Grecs  (2). 

Mais  d'où  Hercule  aura-t-il  reçu  cette  épilhèle  de  Dévorant?  Pro- 
bablement des  sacrifices  humains  qu'on  lui  offrait.  Les  sacrifices 
humains  étaient  chose  commune  chez  les  Gaulois  :  de  nombreux 
témoignages  nous  l'attestent  (3).  Le  plus  souvent  on  brûlait  les  vic- 
times; on  pouvait  donc  dire  que  la  divinité  les  dévorait,  et  si  un 
dieu  recevait  plus  qu'un  autre  Thoramage  de  victimes  humaines 
offertes  de  cette  façon,  la  terrible  épithète  de  dévorant  devait  s'appli- 
quer d'elle-même  à  ce  Moloch  celtique.  Rappelons-nous  ce  sacrifice 
que  raconte  César.  Dans  le  chapitre  où  il  nous  dit  que  les  Gaulois 
étaient  adonnés  aux  pratiques  et  aux  croyances  religieuses  (Natio 
est  omnis Gallorum  adinodum dedita  religionibus),  ilajoute  :  « Immani 
magniludine  simulacra  habent,  quorum  contexla  viminibus  membra 
vivis  hominibus  comptent  :  quibus  succensis  circumventi  flamma 
exanimantur  homines  (4).  »  César  ne  nous  dit  malheureusement  ni 
à  quelle  époque  de  l'année,  ni  à  quelle  divinité  s'offrait  ce  sacrifice. 
D'accord  avec  M.  Liebrecht(5),nous  voyons  un  reste  de  ces  sauvages 
offrandes  de  nos  ancêtres  dans  la  coutume  de  brûler  à  Paris  un 
mannequin  qu'on  appelait  au  moyen  âge  le  Suisse  de  la  rue  aux  Oues. 


(1)  Sur  les  prétendus  voyages  et  exploits  de  l'Hercule  tyrien  en  Gaule,  voir 
Araédée  Thierry,  Histoire  des  Gaulois,  liv.  I,  cli.  i. 

(2)  C'est  l'avis  de  Dom  Martin  {Religion  des  Gaulois,  t.  I,  p.  397),  et  un  des 
hommes  de  notre  temps  les  plus  compétents  en  matière  gauloise,  M.  J.  Becker, 
émet  la  même  opinion  {Jahrbûcher  des  Vereins  von  Alterthumsfreunden  im 
Rheinlandey  1867,  42  hft.).  —  Dom  Martin  {loc.  cit.)  dit  à  tort  que  déjà,  dans  l'anti- 
quité, Eunapios  de  Sardes  avait  reconnu  l'erreur  de  Lucien.  Cet  écrivain  parle,  il 
est  vrai,  des  chaînes  de  Mercure,  mais  sans  allusion  à  Ogmios.  Au  reste,  voici  ses 
paroles  :  To  os  Tlopçupioy  xXso;  eî;  n>.tDTÏvov  uàaa  [làv  àyopà,  Tràcra  Se  7t>,T|6ùc  àvé- 
(pepEv.  '0  [AÈv  yàp  IDiotïvo;  tw  t£  vf\^  'l'^X^'  oùpavîw  xai  tô)  \ol.îa  xai  atviyjjiaTwôêi 
TÔJv  ),6Ya)v  papùç  èooxsi  xal  ôuffVixoo;.  '0  oi  Ilop^Opio;  woTtep  io^.an%r\  tu;  aeipà  xai 
Ttpo?  àv6pu)uo\j;  ÈitiveOoucra  6ià  TtocxOiri;  Ttatosta;  nàna  ei;  tô  euYvaiffTOv  xac  xaôapôv 
è?TiYY£X).£v  ^Eunapios  de  Sardes,  édition  Boissonade,  Amsterdam,  1822,  2  vol.  in-8, 
t.  I,  p.  9). 

(3)  M.  Diefenbach  les  a  réunis  à  la  page  183  de  ses  Origines  Europeœ.  —  C'est 
l'autorité  des  Romains  qui  a  supprimé  en  Gaule  les  sacrifices  humains. 

{Il)  Strabon  fait  le  même  récit,  liv.  IV,  iv,  5. 

(5)  Dans  son  édition  des  Otui  imperialin  de  Gervasius  de  Tilbury,  p.  213. 


18  ESSAI   DE   MYTHOLOGIE   CELTIQUE. 

e  Au  milieu  de  celte  rue  (I)  et  au  coin  de  la  rue  Salle-au-Comte,  est 
une  statue  de  la  sainte  Vierge,  mal  à  propos  nommée  'Notre-Dame  de  la 
Carole.  Il  n'est  aucun  de  nos  historiens  qui  n'ait  parlé  d'un  attentat  sacri- 
lège commis  sur  cette  statue,  par  un  soldat,  le  3  juillet  UJ8;  on  rapporte 
que  cet  impie,  désespéré  d'avoir  perdu  son  argent  au  jeu,  frappa  cette 
figure  d'un  couteau  et  qu'il  en  sortit  du  sang;  que  ce  malheureux  ayant 
été  conduit  devant  le  chancelier  de  Marie,  son  procès  lui  fut  fait  et  qu'il 
subit  le  dernier  supplice  :  toutes  ces  circonstances  sont  représentées  dans 
un  tableau  qu'on  voit  à  Saint-Martin-des-Champs,  dans  la  chapelle  de  la 
Sainte-Vierge  qui  est  derrière  le  chœur.  Les  uns  ajoutent  que  cette  statue 
fut  portée  à  Saint-Martin-des-Champs,  où  elle  est  révérée  sous  le  nom  de 
Notre-Dame  de  la  Carole,  parce  que  cet  événement  arriva,  disent-ils,  sous 
le  règne  de  Charles  VI;  d'autres  prétendent  que  c'est  la  môme  qu'on  voit 
aujourd'hui  dans  cette  rue.  Je  n'ai  point  de  preuves  décisives  pour  ap- 
puyer ce  fait,  ni  pour  le  cortlester,  mais  j'avoue  que  la  variété  des  rap- 
ports et  des  circonstances  me  paraît  un  motif  assez  plausible  pour  ne  pas 
les  adopter  sur  la  foi  d'une  tradition  bien  incertaine.  En  premier  lieu,  le 
Journal  de  Charles  VI,  l'Histoire  de  ce  prince  par  Jean  Juvénal  des  Ur- 
sins,  la  continuation  de  celle  de  Le  Laboureur  par  Jean  Lefévre,  de  même 
que  nos  meilleurs  historiens  ne  parlent  point  de  ce  fait.  2'  En  le  suppo- 
sant vrai,  on  ne  peut  pas  dire  que  le  coupable  ait  été  traduit  devant  le 
chancelier  de  Marie,  puisque  ce  magistrat,  victime  de  la  faction  de  Bour- 
gogne, avait  été  massacré  le  12  juin  précédent.  3°  Les  registres  du  parle- 
ment portent  que  le  29  mai,  avant  l'aurore,  le  duc  de  Bourgogne  étant 
entré  dans  Paris,  le  parlement  suspendit  ses  fonctions,  et  ne  les  reprit  que 
le  23  juillet  suivant.  4°  La  chapelle  de  Notre-Dame-de-la-Carole  qui  est 
au  rond-point  ou  chevet  de  l'église  de  Saint-Martin-des-Champs,  et  la 
statue  qu'on  y  voit,  existaient  sous  ce  nom  longtemps  avant  le  règne  de 
Charles  VI  ;  ce  n'est  que  sur  la  tradition  de  l'événement  dont  il  s'agit  qu'on 
a  placé  à  l'entrée  de  cette  chapelle  un  tableau  qui  en  représente  les  dif- 
férentes circonstances.  Je  dois  cependant  observer  que  dans  la  nef  de  cette 
église,  à  gauche,  près  du  chœur,  est  un  autel  sur  lequel  est  posée  une 
petite  statue  de  la  Vierge,  qu'on  croit,  avec  assez  de  vraisemblance,  être 
la  même  que  celle  qui  était  dans  la  rue  aux  Oues.  Quoi  qu'il  en  soit,  il  y 
a  un  grand  concours  de  peuple  dans  celte  rue  le  3  juillet  de  chaque 
année.  Personne  n'ignore  que  ce  même  jour  on  faisait  en  ce  lieu  un  feu 
d'artifice,  et  qu'on  y  brûlait  une  figure  habillée  comme  les  Suisses  :  cette 
nation  a  réclamé  contre  un  usage  qui  lui  était  injurieux,  et  dont  elle 
avait  d'autant  plus  sujet  de  se  plaindre  qu'il  n'y  avait  point  alors  de 
Suisses  en  France.  La  sagesse  et  la  vigilance  des  magistrats,  qui  veillent 
au  bon  ordre  et  à  la  sûreté  publique,  ont  fait  cesser  les  plaintes  des 
Suisses,  et  prévenu  les  incendies  que  le  feu  d'artifice  pouvait  occasionner 
en  cet  endroit  si  resserré.  Il  serait  à  souhaiter  qu'on  supprimât  aussi 

(l)  La  rue  aux  Oue9  (via  ad  Aucas),  par  corruption  rue  aux  Ours. 


GARGANTUA.  19 

l'usage,  qui  subsiste  encore  (1),  de  promener  à  ce  sujet  dans  les  rues  de 
Paris  une  figure  gigantesque  et  ridicule,  qui  n'est  propre  qu'à  effrayer 
les  enfants  et  à  frapper  désagréablement  l'imagination  des  femmes  en- 
ceintes, au>:quelles  il  est  souvent  dangereux  de  présenter  des  objets  dif- 
formes :  de  fâcheuses  expériences  ne  font  que  trop  sentir  les  conséquences 
funestes  qui  en  peuvent  résulter  (2).  » 

On  voit  qu'ici  rimaginalion  populaire  a  cherché  l'origine  de  celte 
fête  dans  un  fait  historique.  Les  anachronismes  signalés  par  Jaillot 
montrent  bien  que  ces  explications  sont  venues  se  raccorder  posté- 
rieurement à  une  ancienne  coutume.  Cet  évhémérisme  ne  peut  donc 
nous  satisfaire,  et  il  est  bien  évident  que  nous  avons  ici  les  restes 
d'une  cérémonie  religieuse  antérieure  au  christianisme. 

Remarquons  en  effet  la  date  de  cette  fête  :  le  3  juillet,  c'est-à-dire 
à  peu  de  distance  du  solstice  d'été.  C'était,  chez  les  anciens  peuples 
indo-européens,  une  date  à  laquelle  on  rendait  un  culte  tout  particu- 
lier au  soleil  (3).  Ces  fêtes  du  solstice  avaient  tant  d'empire  sur  la 
foule,  qu'au  vii^  siècle  saint  Eloi  disait  au  peuple  :  «  Nullus  in 
festivitate  sancti  Jokannis,  vel  quibuslibet  sanctorum  solemnitatibus 
solstitia  aut  vallaliones,  vel  sailationes,  aut  casaulas  aut  cantica 
diabolica  exerceat  (4).  »  Quant  au  culte  direct  du  soleil,  il  avait 
certainement  laissé  des  traces,  puisque  le  même  prélat  disait  dans  le 
même  discours  :  «  Nullus  dominos  solem  aut  lunam  vocel,  neque 
per  eos  jurel.  j 

Dans  le  Suisse  de  la  rue  aux  Oues  que  l'on  brûle  en  grande  pompe, 
nous  avons  un  dédoublement  du  feu  delà  Saint-Jean.  On  sait  en 
effet  qu'en  beaucoup  d'endroits  l'usage  était  de  jeter  dans  le  feu  de 
la  Saint-Jean  des  mannes  ou  des  paniers  en  osier  contenant  des  ani- 
maux, chats,  chiens,  loups,  renards  (ijj;  contexta  viminibus  membra, 
comme  dit  César.  Sachant  par  d'anciens  témoignages  que  brûler  des 

(1)  Jaillot  écrirait  en  1782. 

(2)  Jaillot,  Recherches  sur  la  ville  de  Paris,  t.  II,  quartier  Saint-Denis,  p.  83-85. 

(3)  Voy.  J.  Grimm,  Deutsche  Mythologie,  2«  éd.,  p.  583  et  sq. 

(i)  S.  Eligii  episcopi  Noviomensis  Vita  a  S.  Audoeno  Rothomagensi  episcopo 
scripta,  lib.  Il,  cap.  xv.  —  Migne,  Patrologie,  t.  LXXXVIl,  p.  528. 

(5)  Voici  un  témoignage  de  1778  :  «  Il  y  a  encore  quelques  villes  dans  le  royaume 
où  le  maire  et  les  échevins  font  mettre  dans  un  panier  une  ou  deux  douzaines  de 
chats,  et  les  brûlent  dans  le  feu  de  joie  de  la  veille  de  la  Saint-Jean.  Cette  barbare 
coutume,  dont  j'ignore  l'origine,  subsistait  même  dans  Paris  et  n'y  a  été  abolie  qu'au 
commencement  du  règne  de  Louis  XIV. 

On  lit  dans  un  des  exécrables  libelles  (a)  du  temps  de  la  Ligue,  que  les  ecclésiasti- 
ques qui  avoient  assisté  à  la  prétendue  couversion  d'Henri  IV,  méritoient  d'être 

{a)  Le  banquet  d'Arété.  par  Louis  d'Orléans. 


20  ESSAI    DE    MYTHOLOGIE   CELTIQUE. 

victimes  humaines  était  chose  fréquente  chez  les  Gaulois,  nous  som- 
mes autorisés  à  penser  que,  dans  le  feu  de  la  Saint-Jean,  les  animaux 
ont,  à  une  époque  plus  civilisée,  remplacé  des  créatures  humaines. 
Le  sacrifice  que  mentionne  César  sans  en  donner  la  date,  devait  donc 
se  faire  au  solstice  d'été,  et  le  dieu  auquel  on  donnait  l'épilhéte  de 
Dévorant  était  celui  qu'on  adorait  au  solstice  d'été,  c'est-à-dire  un 
dieu  solaire.  Il  se  pourrait  donc  que  Gargantua  fût  originairement 
une  personnification  du  Soleil.  La  distance  est  longue  entre  l'être 
glorieux  qui  anime  la  nature,  et  le  géant  qui  boit  et  mange  d'autant  ; 
mais  le  mythe  d'Héraclès  nous  a  montré,  plus  haut,  la  possibilité  de 
cette  transformation. 

Disons  donc  pour  conclure  : 

1°  Que  Gargantua  est  certainement  un  type  antérieur  à  Rabelais, 
et  que  ce  mythe  est  celtique,  puisqu'on  le  trouve  répandu  en  France 
et  en  Grande-Bretagne,  et  non  ailleurs; 

2°  Que  Gargantua  est  probablement  le  développement  populaire 
d'un  Hercule  gaulois; 

3°  Que  Gargantua  est  peut-être  un  mythe  solaire. 

H.  Gaidoz. 

P.  S.  —  Dans  le  travail  qu'on  vient  de  lire,  nous  avons  voulu  seulement 
remonter  à  l'origine  du  mythe  de  Gargantua,  et  nous  avons  volontaire- 
ment laissé  de  côté  toute  une  série  de  légendes,  bien  qu'elles  nous  sem- 
blent rentrer  dans  la  même  famille,  (elles  que  le  Croque-mitaines  dont  on 
fait  encore  peur  aux  enfants,  le  Maschecroutte  qu'au  moyen  âge  on  prome- 
nait à  Lyon  pendant  le  carnaval  (1),  etc.  Peut-être  pourrait-on  y  rattacher 
le  Gayant  de  Douai,  le  GrauUide  Metz,  la  Gargouille  de  Rouen,  la  Chair 
Salée  de  Troyes,  etc.  Mais  pour  entreprendre  des  travaux  fructueux 
sur  ces  matières,  il  faudrait  que  nous  eussions  des  recueils,  faits  avec  soin, 
des  croyances  populaires  de  nos  provinces.  On  commence  dans  les  dépar- 
tements à  s'occuper  des  patois  :  ne  donnera-t-on  pas  quelque  attention 
aux  traditions  locales? 

attachés  en  Grève  comme  fagots,  depuis  le  pied  jusqu'au  haut  de  l'arbre  de  la  saint 
Jean;  que  ce  prince  devait  être  mis  dans  le  panier  oit  l'on  met  les  chats;  et  que  cela 
serait  un  sacrifice  agréable  au  ciel  et  délectable  à  la  terre.  »  (Saint-Foix,  historio- 
graphe des  ordres  du  roi.  Œuvres  complètes,  t.  V,  p.  427.) 

'L'Histoire  de  Metz.,  publiée  par  les  Bénédictins,  nous  atteste  qu'à  Metz  on  brûlait 
des  chats  la  veille  de  la  Saint-Jean  ;  et  quelques-uns  faisaient  remonter  cette  coutume 
à  saint  Clément,  le  légendaire  vainqueur  du  Graulli. 

(1)  Voy.  Rabelais,  liv.  IV,  ch.  Lix,  et  le  Commentaire  de  Le  Duchat. 


.,\HJS.   —    IMPniMKniE   ni.I.KT   FILS   aINÉ,    rue   nES    CnANDS-AUGUSTINS, 


ii 


^ 


^ 


v» 
^ 


V 


/ 

0 


i.dumiuisirdiion  ei  les  Dureaux  d'dbonnenfent  de  la  MWE  ARCHÉOLOGIQUE  son 
-a  Librame  académique  Didier  et  C»,  quai  desTugustins,  35.  j 

MODE   ET   CONDITIONS   DE   L'ABONNEMENT 

A  ï/?.Tf  ^^<^^^^^°9ique  paraît  le  ^»  de  chaque  mois,  à  partir  de  janvier  1860,  par  cahi, 
de  64  à  80  pages  grand  m-8%  qui  formeront  à  la  fin  de  chaque  année  deux  volumes  on 
de  24  planches  gravéea  sur  acier  et  de  graviïres  sur  bois  intercalées  dans  le  texte.  La  li 
des  bouscripteuis  sera  publiée  et  indépendamment  de  la  table  alphabétique  des  matiè 
du  semestre,  une  table  alphabétique,  destinée  à  faciliter  les  recherches,  terminera  chaq 


PRIH.  t 


PourParis  j^.°^"-. 25  fr. 

I  Six  mois 1 4  fr. 

Pour  rétranger, 
OIV  6  ABOniIVE  ÉGALEMENT 


Pour  les  départements  { 


27  f! 
15  C 


AGEN 

AIX 

ALGER 

AMIENS 

ANGERS 

ARRAS 

AUTUN 

AVIGNON 

BEAUVAIS 

BESANÇON.... 

BLOIS 

BORDEAUX.... 

BOULOGNE..., 

BOURGES 

CAEN 

CHALON 

CHAMBERY... 

DIEPPE 

DIJON 

DOQAI 

DUNKERQUE., 

GRAY 

GRENOBLE.... 
LE  HAVRE.... 
LA  ROCHELLE. 

LILLE 

LIMOGES , 

LYON , 

MARSEILLE.... 


Bertrand;  Chairou  et  C*. 
Makaire;  Remondet. 
Bastide;  Tissier. 
A.  Caron;  Prévost-Allo. 
Barasse;  Cosnier  ei  Lachêsb. 

TOPINO. 

Eenault. 

Clément  Saint-Just. 

V.  Pineau. 

Mme  Baudin. 

Rousseau;  Marchand. 

Chaumas;  Fkrbt. 

Mme  Deligny. 

Vermeil. 

Bouchard;  Lecost-Clérissb, 

MULCET. 

Perrin. 

Marais. 

Lamarchb; Hbmeht. 

Madoux. 

Maillard. 

Caussade. 

Maisonville  et  Jourdan;  Merlk. 

Mme  Buys  ;  Cochard. 

Gout. 

BiiGiiiN;  QUARRÉ. 

MaRMIGNON  ;   DUCOURTIEUX. 

Brun;  Bohaire. 

Camoin  frères;    Mme  Dotertrb; 

AlBESSARD  et  BÉRARD. 


Un  an. . . . 

Six  mois. . 
,  le  port  en  nu. 
DANS   LES  DÉPARTEMENTS i 

MEAUX Leblondel. 

METZ...  Rousseau. 

MONTPELLIER. , .     Virenque  ;  SÉGUIN. 

MOULINS Mal  Place. 

NANTES GuÉRAUD;  ForksT;  Fbtitpas.. 

NEVERS MiCHOT;  MOREL. 

NICE ViscoNTi. 

NIMES Peyrot-Tinel;  Giraud. 

ORLEANS Blanchard. 

PAU Lafon. 

PERIGUEUX Bounet;  Lenteionb. 

PERPIGNAN Alzine. 

POITIERS LÉTANc;  BoNAMT. 


QUIMPER 

REIMS 

RENNES , 

ROCHEFORT . 


Jacob. 

Bris?art-Binet. 

Deniel;  Verdier. 

Giraud. 

Lebrument;  Herpin. 
SAINT-QUENTIN.     Doloy. 

SAINT-OMER Tumerel-Bertram. 

SAINT-BRIEUC...     Guyon  frères. 

SOISSONS Cervaux. 

STRASBOURG Treuttel  etWuRTZ;  PiTON; 

Salomon. 

TOULON MoNGE. 

TOULOUSE Armaing;  Gimet;  Privât. 

TOURS Delpire;  Guil^and-Vercer. 

TROYES Bouquot;  Dufey-Robkrt. 

VALENCE CoMBiER. 

VALENC1ENNES..     Lemaitre;  Giard. 


A  L'ETRANCiEB 

ALLEMAGNE. 

FRANCFORT Baer,  Jugel. 

BERLIN Schneider  et  Ce. 

LEIPZIG Brockhaus;  Dorr:  Mierisch 

VIENNE Gerold  fils. 

HEIDELBERG Groos. 


ANGLETERRE. 

LONDRES BARTHESet  Ce;DULAU;  JeFFS; 

—       Williams  et  NoRGATEjCuRT. 

OXFORD Parker. 

EDIMBOURG Mackenzie. 

BELGIQUE. 

BRUXELLES Decq;  MuquardT;  Brouwkt. 

GAND Hoste. 

LIEGE Dbsoer;  Gnusé. 

LOUVAIN Fontevn. 

DANEMARK. 

COPENHAGUE Gyldendalu 

EGYPTE. 

ALEXANDRIE Schutz. 

GRÈCE. 

ATHENES Wilbero. 

ESPAGNE. 

MADRID Bailly-Baillièrb;  DuRak. 

ÉTATS-UNIS. 

NEW- YORK...... H.  Baillièbb;  Christkhn. 

NOUVELLE-ORLÉANS.     Hébert. 
HOLLANDE. 
AMSTERDAM..., Van  Bakkenes;  Caahiîlse» 

LA  HAYE , DOORHAN;  Bblinfantb. 

LEYDli Brill. 

ROTTERDAM Kramers. 


ITALIE. 


ROME Mbrle. 

FLORENCE Ricordi;  Ducci;  Vieussei: 

MILAN Dumolard  frères. 

NAPLES Marghieri;  Pedone  Laur 

TURIN Bocca:  MariettI;  Gianin 

GENES Bedf. 

VENISE Alla  Fenick. 

PORTUGAL. 

LISBONNE SiLVA. 

PORTO MoBis. 

RUSSIE. 

ST-PETERSBOURG.,  ,.  J.Issakoff:  Dufour;  Cluj 

MOSCOU ,,j...  Gautier;  Krooh. 

ODESSA Camoin. 

RIGA.. Kymmkl. 

VARSOVIE Sknsewald;  Natansom. 

SUÈDE, 

STOCKHOLM Fritzé;  Bonnisr. 

SUISSR. 

GENEVE Desroois;  Cherbulikz. 

BALR Georg. 

BERNE Dalp. 

NFUCH\T"L Gerster. 

LAUSANNE Delafontainb  ;    Martini 

TURQUIE. 

CONSTANTINOPLE....     Kohlkr. 


hprim£b;s  de  PiLLKr  ra:>  aL^,  huë  o^t.  uhancs  AU(.ubiuva>i 


Les  Numéros  ne  se  vendent  pas  séparément. 


/^  PUBLIÉE  V"^    ^ 

iQ^       AVEC     LE     CONCOURS     DES     PRINCIPAUX     SAVANTS         >^\\ 
DES    ILES    BRITANNIQUES    ET    DU    CONTINENT 


H.    GAIDOZ 

Membre  de  la  Camhnan  Archaological  Association 
et  de  la  Royal  Archaological  Association  of  Ireland,  etc. 


N»  1  —  Mai  1870 


LIBRAIRIE  A.  FRANCK  (f.  vieweg  propriétaire) 
67,  rue  de  Richelieu,  PARIS 

TRUBNER  AND  C» 
8  and  60,  Paternoster  Row,  E.  C,  LONDON 


Nurnbers  are  not  sold  separately . 


SOMMAIRE  DU  PRÉSENT  NUMÉRO  : 

I.  De  la  Divinité  gauloise  assimilée  à  Dis  Pater  à  l'époque  gallo-romaine, 
par  M.  Anatole  de  Barthélémy,  ancien  président  de  la  Société  des  Antiquaires 
de  France  (deux  gravures). 

II.  La  miniature  irlandaise,  son  origine  et  son  développement,  par  M.  F.  W. 
Unger,  professeur  à  l'Université  de  Gœttingue. 

III.  Un  Évangéliaire  à  miniatures  d'origine  irlandaise,  dans  la  Bibliothèque 
princière  d'Œttingen-Wallerstein,  par  M.  W.  Wattenbach,  professeur  à  l'Uni- 
versité d'Heidelberg  (deux  gravures). 

IV.  The  ancient  Irish  Goddess  of  War,  by  W.  M.  Hennessy,  Esq.  member 
of  the  Royal  Irish  Academy  ;  with  a  postcript  by  D'  G.  Lottner  (One 
efigraving). 

V.  Un  manuscrit  irlandais  de  Vienne,  par  M.  G.  Nigra,  ministre  d'Italie  à 
Paris. 

VI.  Les  Gloses  irlandaises  de  Milan,  par  le  même. 

VII.  Etude  phonétique  sur  le  breton  de  Vannes  (premier  article),  par 
M.  H.  d'Arbois  de  Jubainville,  Gorrespondant  de  l'Institut. 

VIII.  Koadalan,  conte  populaire  breton,  recueilli  et  traduit  par  M.  F.  M. 
Luzel. 

IX.  Observations  sur  le  conte  précédent,  par  M.  Reinhold  Kœhler,  conser- 
vateur de  la  Bibliothèque  Grand-Ducale,  à  Weimar. 

X.  Mélanges  :  The  name  of  the  Danube,  by  Prof.  Max  MùHer,  professer  of 
Comparative  Philology  at  the  University  of  Oxford,  associé  étranger  de  l'Institut 
de  France;  —  Le  vrai  nom  de  Gargantua,  par  M.  F.  Liebrecht,  professeur  à 
l'Athénée  de  Liège. 

Bibliographie  :  La  Table  de  Peutinger,  publiée  par  E.  Desjardins  (H.  G.). 
—  G.  Perrot  :  De  Galatia  provincia  romana  (H.  G.).  —  A.  Georgievski  : 
Gally  V  epochu  K.  J.  Cesaria  (*•*).  —  J.  E.  Wocel  :  Pravek  Zeme  Czeske 
(L.  Léger).  —  Zeuss  :  Grammatica  Celtica,  2'  éd.  p.  p.  Ebel  (G.  Nigra).  — 
P.  W.  Joyce  :  The  origin  and  history  of  Irish  names  of  places  (H.  G.).  — 
Merlin  p.  p.  Wheatley  ;  Glennie  :  Arthurian  Localities  (H.  G.).  —  Hingant  : 
Eléments  de  la  Grammaire  Bretonne  (H.  d'Arbois  de  Jubainville). 

Chronique,  par  M.  H.  Gaidoz  (Mort  de  M.  Todd.  —  Souscription  de  la  7oJ</ 
Professorship.  —  L'Université  galloise  d'Aberystwyth.  —  Procès  «  Pike  versus 
Nicholas  ».  —  Deux  conférences  de  M.  Huxley.  —  Annonce  d'un  Corpus  Ins- 
criptionum  Hibernicarum.  —  Création  d'une  chaire  de  langue  irlandaise  à  Notre- 
Dame). 

Supplément  :  Dosparth  byrr  ar  y  rhan  gyntaf  i  ramadcg  cymracg  [gan  Gruffydd 
Roberts,  1 567.]  A  fac-similé  reprint.  (This  will  be  continued  in  regular  instai- 
ments,  with  a  separate  pagination,  in  al!  subséquent  numbers  until  the  work  is 
completed). 

Bulletin  d'Annonces  n*  i . 

Voir  à  la  dernière  page  de  la  livraison  les  Errata  et  à  l'avant- 
derniére  la  liste  des  Abréviations. 


(^<^/i^^.^^  ^  ^r^^J 


lipreuves  cl  copie  de  la  Retue  Ceitique, 
CircuIatloD  autorisée  en  date  du  <8  Janvier  4870. 


7.  f.    Ca^lciJt       ^.^ 


ong.naI  gaehc    Many  of  the  ballads  can  be  seen  throug 

Os  ,an  uself  has  not  been  found   in   any  ancient  wri| 

^odern   trad.t,on.  Because    of  the  language  it  seenJ 

Ossun  ,s  more  modem  than  the  Ossian.c  ballads  and  t| 

longtothen,,Th.sisasamp!eofa   prose  taie  with  tl 

ched  ,,  F.onn  m  the  house  of  the  yellow  face  unable  toi 

was  wntten  by   Donald   Mac   Pherson,  a  Lochaber  ma 

volume  Jo     popular  poetry  and  gaelic  ;ongs  and     h 

grandmother  long  ago.  The  translation  ,s   dose   an      hi 

«me  to  me  m  )une  1S70.  ' 

FIONN    IK    THE    HOUSE    OF    THE    YELLoi 
^  .  ^  "'^ABLE    TO    RlSE    OR    TO    SIT. 

On  a  day  when  Fionn  Mac  Chumhail  -,  and  the  r 
m  he  mountams  of  the  chace,  there  came  on  sno^v^ 

rired  and  weaned  as  they  were,  they  took  to  thei 
'    ^  7'"  ^°  ^"^e  the  drinking  horns  and  to  te 

"nquered  the   whole  W^'d  "^f"  '''''^'^/''  ''^^  commander  i 
/        6/  wnicn  seem  more  appropnate  but  on  them  1 


ardly 
who 
îadly 
ce  to 
fthe 
/ife! 
aests 
onn, 
»1  to 
they 
gic  î 
fthe 
lads 
•him 
was. 
îtoit 
dhis 
jonn 

se  the 
Iside 

)ruids 


>  .._  ..aiiic  01  the  Danube,  by  Prof.   Max  Mûl'.er,  professer  of 

Comparative  Philology  at  the  University  of  Oxford,  associé  étranger  de  l'Institut 
de  France;  —  Le  vrai  nom  de  Gargantua,  par  M.  F.  Liebrecht,  professeur  à 
l'Athénée  de  Liège. 

Bibliographie  :  La  Table  de  Peutinger,  publiée  par  E.  Desjardins  (H.  G.). 
—  G.  Perrot  :  De  Galatia  provincia  romana  (H.  G.).  —  A.  Georgievski  : 
Gally  v  epochu  K.  J.  Cesaria  ("**).  —  J.  E.  Wocel  :  Pravek  Zeme  Czeske 
(L.  Léger).  —  Zeuss  :  Grammatica  Celtica,  2'  éd.  p.  p.  Ebel  (G.  Nigra).  — 
P.  W.  Joyce  :  The  origin  and  history  of  Irish  names  of  places  (H.  G.).  — 
Merlin  p.  p.  Wheatley  ;  Glennie  :  Arthurian  Localities  (H.  G.).  —  Hingant  : 
Eléments  de  la  Grammaire  Bretonne  (H.  d'Arbois  de  Jubainville). 

Chronique,  par  M.  H.  Gaidoz  (Mort  de  M.  Todd.  —  Souscription  de  la  Todd 
Professorship.  —  L'Université  galloise  d'Aberystwyth.  —  Procès  «  Pike  versus 
Nicholas  ».  —  Deux  conférences  de  M.  Huxley.  —  Annonce  d'un  Corpus  Ins- 
criptionum  Hibernicarum.  —  Création  d'une  chaire  de  langue  irlandaise  à  Notre- 
Dame). 

Supplément  :  Dosparth  byrr  ar  y  rhan  gyntaf  i  ramadeg  cymracg  [gan  Gruffydd 
Roberts,  1567.]  A  fac-similé  reprint.  (This  will  be  continued  in  regular  instal- 
ments,  with  a  separate  pagination,  in  ail  subséquent  numbers  until  the  work  is 
completed). 

Bulletin  d'Annonces  n'  1 . 

Voir  à  la  dernière  page  de  la  livraison  les  Errata  et  à  l'avant- 
derniére  la  liste  des  Abréviations. 


FIONN'S    ENCHANTMENT 

The  foISowing  sfiort  story  is  part  or  the  so  called  history  of  the  Feinn  < 
.alled  Fenians  in  Ireland  and  elsewhere).  As  the  history  now  ext ts  n  o      t  "h" 
t.on  m  the  H.ghiands  of  Scotland,   wild  rnythical  adventuTes         toM    f 
over  the  f.e  to  chi.dren  and  they  partage  oJthe  nature   7    h      po,      t^eT 
Havmg  set  a  man  above  ail  the  world  the  next  step  is  to  get  wTl 

t::Tf:tr''^  ''''--''-  p-essorafioU: 

form  the  Scotch  heroes  seem  to  he  related  to  Norse  den„gods  Lik  th  m 
Welsh  worth,es  who  appcar  .  the  Mab.og.n  share  ,n  adve  tures  wh,  Tn 
ib  Edda  are  attnbuted  to  Thorr,  and  probably  the  whole  northern  oa  heô 
*nclud.ng  Thorr,  Arthur  and  F.onn  had  so.e  conia,on  orig.n  m   Aryan    .  t ho 

try  of  wh,ch  a  great  deal  has  appeared  ,n  the  publications  of  th       0  ' 
^  W  ep,c  Oss.an  was  probably  founded.   But  when  or  by  whom   t    s  los 

nONN    IN    THE    HOUSE    OF    THE    YELLOW    FACE, 
UNABLE    TO    RISE    OR    TO    SIT. 

■     -    f  "  "  '^'y  ^^^"  ^'°""  Mac  Chumhail .,  and  the  rest  of  the  Feinn  were 
tX    w^^^^^^^^  ''""'  gathered  the  evening  came  upon 'hem. 

fS^   T  e^d. tir  '  °''  ^''"  '"'  ^^^>^  "^"^  ^°  ^-^  '"  't   They  made 
th  y  bel  n  o  /        :  ^"°^'^  "°°'  ^"'^  ^"'  '''  bird  stew  was  ready 
I  Thte  '  '"^'"^  ^''"^  '"'^  ^°  ^^"  ^^^^^  °f  ^he  olden 

^fSubiectp,Lrtîlt^;;'ea;S«'S^  "^'"^-  ,"  ^^^nis  to  mean  «  Pair  Son 

"nquered  the   whole  ZrldZ^Zl        V  ^^^  ""^mander  in  chief  of  the  Feinn  vho 
Ksraes  in  Mythology  which  sel  L?r.     °"^'"?  ^°  ,™^"y  '^S^^ti^  3"^  Poems.  There  are 
ëX  wnicti  seem  more  appropnate  but  ou  them  I  will  not  venture. 


> 


uompj 
de  Fr; 
l'Athé 

Bibl 
-  G. 
Gally 
(L.  L( 
P.  W 
Merlin 
Eléme 

Chr 
Profes 
Nicho 
criptio 
Dame 

Suf 
Rober 
ments 
compl 

Bul 

Voir 


times.  The  memory  of  the  prowess  of  their  ancesiors  made  them  exalt 
themselves  as  is  usual  and  they  a!l  said  together  that  the  man  or  beast 
was  tobe  pitiedthat  should  corne  to  trouble  the  Feinn  that  night  or  that 
would  offer  to  ir.sult  Fionn.  In  the  very  middle  of  this  talk  in  cornes  a 
slender  brown  hare  and  without  care  or  fear  turns  a  turn  or  two  on  the 
embers  and  tossed  up  the  ashes  to  the  rafters  and  out  she  goes  ^. 

But  if  she  did  so,  thaï  did  not  make  them  less  valiant.  They  made  a 
dark  leap  ont  after  her  ;  but  they  went  into  a  mist  so  great  withthedark- 
ness  that  came  upon  them  that  they  could  not  see  each  other.  Fionn 
and  his  twelve  lads  followed  the  hare  over  stump  and  stone  over  the 
shoulder  of  the  glen  and  they  never  losl  sight  of  her  till  she  sprang  in  at 
the  window  of  a  rickely  house  that  came  in  their  way  at  the  side  of  a 
green  knoll.  And  what  house  should  this  be  but  the  house  of  the  Yellow 
Face,  a  giant  that  lived  upon  enchanted  lojrs  and  ih.c  fies}]  of  men. 
In  they  go  to  take  the  news  but  they  found  no  trace  of  the  hare. 
There  was  within  a  woman  baking,  for  the  Yellow  Face  had  not  corne 
home  from  the  mountain  chase.  She  gave  them  méat  and  drink  and 
said  that  now  they  had  best  begone ,  before  the  Yellow  Face  came. 
Fionn  said  that  he  never  had  fled  from  man  and  that  they  would  not 
begin  v/ith  the  Yellow  Face  and  they  came  farther  into  the  house. 

«  Stop  till  the  end,  »  said  the  wife.  If  it  be  true  they  had  hardly 
settled  themselves  when  they  heard  clitter  clatter  at  the  door  and  who 
was  there  but  the  Yellow  Face  and  his  lads  with  a  great  big  deadly 
toothy  boar  on  his  back?  He  gave  himself  a  great  big  bittle  shake  to 
drive  off  the  snow  and  he  made  the  threshold  and  foundations  of  the 
house  tremble.  «  I  smell  the  smell  of  the  stranger  before  me,  wife  ! 
"Whom.  hâve  you  hère  t  »  said  the  Phiz.  The  wife  told  him  of  the  guests 
that  had  come  to  visit  her  since  he  went.  «  Out  with  yourlads,  Fionn, 
to  take  off  our  burdens,  »  said  the  Face.  Fionn  never  gave  a  refusai  to 
man,  so  six  of  them  were  sent  out  to  the  Face.  But  scarce  had  they 
passed  the  threshold  when  the  Phiz  struck  them  with  his  rod  of  magie  ' 
and  they  were  pillars  of  stone  and  he  set  them  at  the  north  side  of  the 
door  to  stop  the  sleety  wind.  There  he  left  them  and  he  and  his  lads 
took  in  the  boar  4.  They  did  but  wait  to  give  a  rough  scraping  over  him 
and  the  wife  put  him  on  in  the  great  kettle,  the  carcase  as  it  was. 
Before  it  got  a  boil  and  a  simmer  the  Face  stuck  the  flesh  stake  into  it 
and  there  he  had  it  out  on  the  floor  and  without  more  delay  he  and  his 
lads  sat  about  it.  Each  bone  as  they  picked  it,  that  they  threw  to  Fionn 

2.  It  is  cojnmon  to  suppose  that  witchcs  take  the  shape  cf  hares  but  in  this  case  the 
intention  is  to  rebuke  boasting.  A  hare  might  really  come  into  a  turf  hut  on  a  hill  side 
and  run  out  and  a  party  of  drunken  lads  might  chase  her  in  a  snow  storm. 

}.  Hereis  another  word  whiçh  may  set  Celtic  scholars  to  work.  It  looks  like  Druids 
rod  but  (he  giant  is  exceedingly  like  a  frost  giant  or  a  hell  ogre  from  Scandinavia. 


and  his  men.  It  was  bad  feeding  but  thcre  was  no  help  for  it.  Fionn 
was  silent  and  pondering  and  no  wonder.  When  the  tearing  was  donc 
and  that  was  not  long,  Yellow  Face  bade  his  wife  bring  out  the  golden 
apple  se  that  Fionn  might  pass  the  long  winternight.  She  brought  down 
the  apple  and  gave  it  to  him  î  They  began  at  each  other  with  the  apple 
and  if  they  did  is  not  long  before  the  Face  put  an  end  to  ail  Fionn's 
lads.  Then  the  Face  perceived  that  he  could  not  manage  Fionn  with  the 
apple  and  he  said  that  thuy  must  wresile.  To  grips  they  go  but  though 
they  should  be  wrestling  till  now  he  could  notshake  Fionn  ^. 

When  the  Face  saw  that  his  match  had  corne  he  bade  his  wife  put 
on  the  griddle  7  so  that  Fionn's  feet  might  be  warmed,  for  surely  he  was 
cold  in  this  cold  frosty  night.  The  griddle  was  put  on  till  it  was  a  glo- 
wing  red  blaze  and  they  ail  got  about  Fionn.  That  was  the  time  when 
he  said,  «  A  man  is  no  man  alone  »  and  they  set  him  on  the  griddle  til 
his  legs  were  burnttothe  hips.  Now  washeunabletositor  rise.  The  Face 
gave  a  hoarse  laugh  and  he  stuck  the  flesh  stake  through  both  his  hands 
and  then  he  could  neither  rise  nor  sit.The  Face  thought  that  he  had  not  a 
gasp  of  breath  in  him  and  cast  him  aside  in  a  corner.  Fionn  never  was  in  a 
greater  straitthan  this,  but  on  the  time  he  was  betweenWant  and  Déniai 8, 
and  he  remembered  that  he  had  the  horn''  of  the  worthies  and  that  it  could 
be  heard  in  the  five  fifths  of  Erin.When  the  house  took  a  rest  he  crawled 
out  dark  dumbly  and  still  to  the  top  of  a  hill  and  he  blew  the  horn  three 
times.  AU  this  time  the  other  set  of  the  Feinn  were  tearful  and  sad  in 
search  of  Fionn.  They  left  neither  corner  nor  thought  unsought  seeking 
him  for  dead.  At  last  when  they  had  given  yielding  and  black  yeilding 
Brown  Diarmaid  'o,  his  sisters'son,  heard  the  horn  and  if  he  did  it  was 
not  unanswered.  He  knew  that  deadly  need  made  Fionn  sound  the 
horn.  He  understood  that  the  matter  was  ill  and  he  gave  a  word  and  a 
vow  upon  his  sword  that  méat  nor  drink  should  go  over  his  breath  till 
he  should  aid  the  brother  of  his  mother.  He  took  up  his  burden  he  and 
his  lads  each  straight  was  bent  for  them  over  hill  and  plain  and  though 

4.  Is  this  the  boar  on  which  heroes  feasted  in  Walhalla  or  is  it  some  other  ?  In  any 
case  he  is  very  cominon  in  gaelic  stories. 

j.  This  is  another  bit  of  machinery  which  greatly  needs  explanation,  for  it  constantly 
appears  in  this  dass  of  stories.  If  thèse  be  solar  Aryan  heroes  the  golden  bal!  may  be  the 
sun  according  to  modem  authors  or  lightning  ;  but  it  seems  more  probable  that  some 
earthly  projectile  was  meant. 

6.  So  Thorr  wrestles  with  old  âge  in  the  houf-e  of  Ulgaard  Loki. 

7.  An  iron  plate  for  baking  oat  cakes. 

8.  This  story  I  do  not  know. 

9-  This  is  another  article  that  needs  explanation.  The  ordinary  meaning  is  a  bugle 
enlarged,  but  some  narrators  call  it  the  Hammer  of  Fionn  which  could  be  heard  over  ail 
Ireland.  That  looks  like  thunder. 
10.  In  ail  Fenian  stories  Diarmaid  plays  the  pan  of  Launcelot  to  Fionn's  Arthur. 


il  was  far  nwav  thev  were  not  long  going  tlierc.  Fionn  tliey  found  in  a 
sad  case  unable  to  sit  or  rise  in  the  lee  of  a  bush. 

Diarmaid  asked  what  had  befallen  him.  «  No  matter,  »  said  Fionn 
and  l:e  told  him  each  turn  as  it  happened.  How  the  Yellow  P'acehad  slain 
his  lads  and  the  ill  treatment  that  he  had  got  from  him  and  he  counselled 
him  10  turn  home  before  the  same  should  happen  to  him.  He  was  as  he 
was  at  ail  events.  Diarmaid  vowed  and  said  that  he  would  not  turn  til' 
he  took  out  the  shame  and  without  saying  more  he  betook  him  to  the 
house  of  the  Face.  In  the  house  was  but  the  woman  baking  and  she 
gave  them  méat  and  drink  and  took  their  taie.  She  told  them  that  ihe 
Yellow  Face  was  in  the  mountain  chase  and  that  they  had  better  begone 
before  he  came  home  or  that  it  might  happen  to  them  as  it  happened  to 
Fionn.  '<  Be  that  as  it  may,  said  Diarmaid,  we  will  not  go  till  we  hâve 
take  out  the  shame  "  and  they  sat  within.  «  Stay  till  the  end  then  » 
said  she. 

They  were  but  a  short  time  thus  till  they  heard  clitier  clatter  at  the 
door.  Who  was  there  but  the  Face  and  his  lads  with  a  great  venomous 
toothy  boar  on  his  back,  He  gave  himself  a  little  big  lift  to  shake  off 
the  snow  and  he  shook  the  threshold  and  foundations  and  cried  :  «  I 
smell  the  smell  of  the  stranger  before  me.  Wife,  whom  hâve  you  hère  to 
night  ?»  She  told  him  Diarmaid  and  his  set  of  lads.  )>  Out  with  your  lads, 
Diarmaid,  to  take  ofïour  wads,»  said  the  Yellow  Face.  Diarmaid  himself 
went  out  and  before  the  Face  had  looked  hither  orthitherheslewthe  half 
of  his  lads  and  set  their  heap  on  top  at  the  south  side  of  the  door  opposite 
to  Fionn's  lads.  «  You're  an  ill  guest,  »  said  the  Face.  <(  If  you  see  no 
worse  from  me  before  day  cornes,  you  need  not  complain,»  said  Diarmaid 
and  without  more  speech  he  took  in  the  boar.  They  dressed  it  well  and 
right  well  and  he  and  his  lads  took  enough  of  it  :  each  bone  that  they 
picked  bare  they  cast  to  the  Face  and  to  his  lads,  «  You're  an  evil  guest  » 
said  the  Face.  <<  If  you  see  no  worse  than  that  from  me  before  the  day 
comes,  dont  complain,  «said  Diarmaid,  and  he  asked  for  the  appleto  pass 
the  long  winter  night  for  the  Yellow  Face.  The  wife  brought  down  the 
apple  and  the  game  began.  At  the  cast  that  Diarmaid  made  he  slew  two 
that  were  on  the  right  hand  of  the  Face.  «  You  are  an  ill  guest  n  said  the 
Face.  «  If  you  see  no  worse  than  that  from  me  before  the  day  comes, 
dont  complain,  »  said  Diarmaid.  The  Face  cast  the  apple  back  but  he  did 
no  harm  to  Diarmaid's  lads.  But  Diarmaid  made  the  next  cast  with  the 
apple  and  slew  two  on  the  left  hand  of  the  Face.  And  so  it  went  on 
till  he  had  slain  the  last  of  them  while  the  Face  kept  continually  saying, 
«You  are  a  bad  guest  »  and  Diarmaid  as  constantly  answered  as  before. 


When  they  were  tired  ofthe  game  of  the  golden  apple,  Diarmaid  said 
to  the  Face  that  they  had  better  wrestle  a  turu,  and  if  they  did  the  fight 
did  not  hold  long  before  the  Face  was  on  the  ridge  of  his  back  on  the 
bare  flags  of  the  floor.  «  You're  an  ill  guest  »  said  the  Face  as  he  gave 
a  tortured  grunt.  «  If  you  see  no  worse  from  me  before  day,  dont  com- 
plain  »  said  Diarmaid  and  he  bade  the  wife  put  on  the  griddle  for  him 
to  warm  up  the  Face,  for  surely  he  was  cold  newly  corne  from  the  moun- 
tain  chase.  The  griddle  was  made  red-hot  and  Diarmaid  gave  the  Face 
,  a  lift  and  there  he  was  at  the  next  turn  upon  the  griddle.  «  Oiteag,  oit, 
oit,  »  said  the  Face  «  Take  it  easy  said  Diarmaid  your  yellow  bones 
would  burn  unless  I  helped  you  »  and  he  held  him  on  the  griddle  till  his 
legs  burned  to  the  hips.  Now  the  Face  was  unable  to  sit  and  swif  t 
Diarmaid  stuck  the  spit  through  both  his  hands  and  then  he  was  without 
power  to  sit  or  rise  and  he  cast  him  on  his  side  in  the  corner.  When 
he  was  seven  times  tired  of  hearkening  to  the  groanings  of  the  Face, 
Diarmaid  seized  him  by  the  hands  and  said  «  Death  is  upon  you,  old 
man  !  What's  your  eric  ? 

Death  is  upon  you,  old  man  and  what's  your  eric  ?  and  take  ofF  from 
me  the  worth  of  your  game.  y>  «  Oh!  Oh!  alas!  said  the  Face,  I  bave 
no  ransom  but  a  cup  of  balsam  that  is  at  the  foot  of  yonder  rock  and  i^- 
will  heal  Fionn.  »  When  Diarmaid  heard  of  the  cup  he  staid  to  seek  no 
other  ransom.  It  seemed  to  be  too  long  for  his  uncle  to  be  crouched  at 
the  lee  of  the  bush  and  so  he  went  to  the  cave.  He  laid  his  first  hand 
upon  the  cup  and  off  he  strikes  with  it  to  Fionn.  He  washed  his  wounds 
from  it  three  times.  The  first  time  his  legs  grew  to  the  knees;  the  second 
time  they  grew  to  the  ankles;  and  the  third  time  Fionn  was  unhurt, 
unharmed  whole  and  alive  as  he  ever  was.  One  palmful  ofthe  water  of 
the  cup  was  enough  to  break  the  spells  of  the  lads.  Then  he  went  to 
the  Face:  «  Misérable  wretch,  said  he,  swear  that  you  willnever  play  your 
tricks  or  lay  spells  on  the  Feinn.  »  That  îhe  Face  swore  and  many 
things  more  and  Diarmaid  generously  gave  him  and  his  lads  their  fill  of 
water  from  the  cup,  and  then  they  took  leave  of  each  other.  To  make  a 
long  story  short,  the  cup  staid  with  the  Feinn  and  I  left  it  with  them. 

In  ail  the  Fenian  stories  mention  is  made  of  Fionn's  healing  cup  with  which 
he  cured  ail  ills  and  wounds.  It  is  the  same  as  the  Holy  Graal  of  course,  and 
ail  that  bas  been  said  about  the  origin  of  that  Myth  applies  to  Fionn's  cup. 
According  to  other  stories,  Fionn's  cup  was  the  hollow  of  his  joined  palms  held; 
is  they  are  used  for  drinking  in  the  wilds.  Whosoever  drank  from  Fionn's  joined 
jalms  was  healed.  According  to  Highland  traditions,  the  Campbell  Clan  arer 
lescended  from  Brown  Diarmaid  and  from  him  take  their  old  names  of  Clann 
Diarmaid  and  Clann  0'  Duibhne.  Many  historic.il  personnages  bore  the  name  of 
Diarmaid  in  Ireland  and  elsewhere,  but  this  legend  is  enough  tn  prove  that. 
■"ionn,  Diarmaid  and  the  rest  of  the  family  are  as  mythica!  as  king  Arthur  and' 
is  knights.  They  are  Celtic  heroes  and  belong  to  comparative  mythologists.  Sa-, 
hère  I  leave  them. 

J.  F.  CAMPBELL. 


a.-' 


FIONN  'AN  TAIGH  4'  BHAIIR-BHUIDHE  GUN  CHOMAS 

ÈIRIGH  NO  SilIDHE. 

là  dh'an  rohh  Fionn  mac  Chumhail  's  a'chuid  cile  de  V;  Fhéinn  anns  a' 

inn-sheilg  ,    dh'  'eirich  cur  'us   cathadh;  's  mu  'n  d'    fliuair   iad  an 

Ig  a  chai  cruinn,  thàinig  an  t-anmoch  orra.  Sgith,  airtealuch  mar  a  bhà 

îhog  iad  orra  gu  téarnadh  gu  baile.  Mar  a  bha  iad  a'  gabhail  air  an 

art  gu  tram,  athaiseach,  thàinig  iad  air  bothan  fàs  'am  bràighe  glinne  ; 

s  ghabh  iad  gu  tàmh  ann.  Dli'  jhadaidh  iad  teirie,  's  chaidh  nagillean  air 

l  gréidheidh;  's  gus  am  biodh  an  t-eunbhruich  ullamh  thoisich  iad  air 

ùrt  nan  corn,  's  air  seanchus  mu'n  'am  bho  sliean.  Cliuir  cuimhn'  air 

an  sinnsire  togail  fôpa  mar  a  b'àbhaist  ;  's  thuirt  iad  uile  cruinn-a- 

hluath  gu'm  b'  e  mothruaighe  duine  no  beatliach  a  thigeadh  a  chur  dragb 

an  Fhéinn  an  oidhche  sin  ;  no,  a  theannadh  ritàif  a  thoirt  do  dh-Fhionn. 

teis-meadhoin  na  bruidhue  seo,  îhigear  maigheach  chaol,  ruadh  a's  taigh; 

,  gun  fhiamh  gum  umhail,  cuirear  car  no  dhà  dh'i  air  a'  chagailt,   's 

r  an  luath  mu  na  sparran  ;  agus  thugar  a  mach  oirre  !   Ma  thug  cha 

haidli  sin  air  mhïthapadli  dhaibhsam-thug  iad  daoidh-léum  a  mach  'as' 

oghaidh;  ach,  chaidh  iad  'n  am  bràth-cheô  cho  mor  le  dorchadas  a 

lig  orra,  's  nach  bu  leur  dhaibh  a  chéile.  Lean  Fionn  's  a  dhà  ghille 

gi  a  bhun  's  a  lorgthar  guallainn  a'  ghlinne;  's  cha  do  chaill  iad  sealladh 

î  gus  'na  léum  i  's  thaigh  air  sgùid  de  thaigh  ùdlaidh  a  thachair  orra  aig 

sïthein.  De'n  taigh  a  bha  'n  seo,  ach  taigh  a'  Bhlàir-Bhuidhe,  famhair  a 

'tighinn  beà  air  tuirc-nimhe  's  air  feoil  dhaoine!  Rachar  a's  taigh,  'us 

\ar  sgial;  ach  cha  d'  fhuaras  forfhais  air  a'  mhaighich.  Cha  robh  's 

i  ach  a'  bhean  's  i  fuineadh.  Cha  d'  thàinig  am  Blar-Buidhe  dhachaigh 

i'  bhcim-sheilg.  Tugh  i  biadh  'as  deoch  dhaibh;  'sthuirti  gu'm  b'  flièan 

\bha  nis  a  bluîh  'jalbh,  mu'n  tigeadh  am  Blàr-Buidhe  dhachaigh.  Thuirt 

n  nach  do  theich  iad  romh  dhuine  riahh,  agus  nach  deanadh  iad  toiseach 

Bhlàr  ;  's  theann  iad  na  b'  fhaide  's  taigh.   Teith  ri  dheircadh,  os  a' 

.  Mar  a  b'  fhior;  cha  d'  fhuairiad  iad  fhéin  a  shocruchadh  ach  gann, 

dh'  fhairich  iad  stùirn-stàirn,  aig  an  dorus!  Co  'bha  'n  siod  ach  am 

Buidhe  's  a  ghillean,  's  torc-nimhe  mor,fiaclach  aig  air  a  mhuin.  Thug 

thadh  beag  mor  air  fhém  a  chur  an  t-meachda  dheih,  's  chuir  e  crith  fo 

sainn  'sfo  shuidheachan  an  taighe  !  Tha  mi  'faireachduinn  fàilidh  fhar- 

ich  romham,  a  bhean,  cà  seo  th'  agad  a  nochd,    os'  am  Hàr?  Dh' 

a  bhean  na  h-aoidhean  a  thàinig  air  choimheadachd  oirre  bhonu  dh' 

he.  A  mach  do  ghillean,  'Fhlnn,  a  thoirt  na  h-eallaiche  dhiam,  os'  am 

Cha  d'  thug  Fionn  an  t-euradh  do  dhuine  riabh,  agus  cuirear  siathnar 

ch  dhiubh,  far  an  robh  'm  Blàr.  Mu'n  gann  a  bha  iad  seach  an  stairs- 

•■  bhuail  am  Blàr  slat-na-drao: Vieachd  orra,  's  bha  iad  '«  an  colbh- 

le;  's  chuir  e  air  taobh-tuath  an  doruis  iad  a  chur  stad  air  a'  ghaoth- 


Iheathaich  !  Dh'  fhùg  e  'n  sin  iad;  's  îhug  e  fhéin  's  a  ghillean  a's  taigh  an 
orc.  Cha  d'  fhuirich  iad  ach  ri  rohladh  lomaidh  a  îhoirt  air,  's  chuir  a' 
heanair  e  's  a  '  choire-mh'or  —  'n  a  chloraich  mar  a  bhàe!  Mu'n  d' 
luair  e  ac::  goil  'us  leth-goit,  spàrr  am  Blar  bior  na  feàl'  ann, 
bha  siod  aig  air  au  ùrlar;  's  gun  tuille  dàlach,  shuidh  e  fhéin  's 
'gkillean  mu'n  cuairt  da.  Gach  cnàimh  mar  a  Ghreidhmeadh  iad  thilgeadh 
id  siod  gu  Fionn  'sgu  'ghillean  !  B'  olc  a'  bhiatachd  è,  ach  cha  robh  comas 
r.  Bha  Fionn  'na  thosd  's  'n  a  chuimhne  's  b'  ion  dà  sin.  An  uair  a  bha  'n 
lie  t'iairis,  '5  cha  b'  fhada  h-uige,  dh'  iarr  am  Blàr-Buidhe  air  a  mhnaoi  an 
ubh.il-oir  a  îiwirt  a  nuas  gus  an  oidhch' fhada.  Gheamhraidh  a  chur seachad 
ir  Fionn.  Thug  i  nuas  an  t-ubhal,  's  thug  i  dhà  e.  Thàisich  iad  air  a 
héile,  leis  an  ubhal,  's  ma  toisich,  cha  b'  fhada  gus  'na  chuir  am  Blar'as 
o'n  iomlan  de  ghillean  Fhinn!  Thuig  am  Blàr  nach  deanadh  e  'n  gnoîhuch 
ir  Fionn  leis  au  uhhal,  's  thuirt  e  gu'm  feinnadh  iad  dol  aghleachd.'Andro- 
lannan  a  chéile gabhar  iad;  ach,  ged  a  bhiodh  iad  fhathasî  a'  gleachd,  cha 
igad'i  e  îlideaciûdh  air  Fionn.  Tra  a  chunnaic  am  Blar gu'n  do  îhachair  a 
hel^c  ris,  dh'  iarr  e  air  a  mhnaoi  a'  ghreideal  a  chur  air  gus  an  rachadh 
asan  Fhinn  a  gharadh,  gu'r  cinnte  gu'n  robh  efuar,  's  an  oidhche  chruaidh, 
cèd.d  a  .'•':'  ann.  Chaidh  a'  ghreideal  a  chur  air  gus  an  robh  i  'n  a  caoir 
iheirg;  's  dh'  iadh  iad  uile  mu  Fhionn  (^sin  tra  a  thuirt  e  :  Cha  duine, 
uine  'n  aonarj,  agus  spcrr  iad  air  a  ghreidil  e  gus  'n  loisg  a  chasan  gu  ruig 
m  iltisdean  !  bha  e  m:ie  gun  chômas  suidhe.  Leig  am  Blàr  rochd  gàif  'as, 
gus  s'àrr  e  siol-na-feàla  tromh  chorn  a  dhà  mhàis  ;  's  bhà  e  'n  sin  gun 
ornas  'eiri^ii  no  suidhe!  Shaoil  leis  a'  Blàr  gun  robh  e  gun  phlosg  analach, 
îhilg  e  seachad  's  a  chàil  e! 

Cha  robn  Fionn  riabh  roimhe  'an  gaile  na  bu  mhutha  na  seo,  ach  an  uair 
bha  e  eadar  an  t-euradh  's  aimbeairt.,  agus  cuimhnichear  e  gu'n  robh  càrn- 
vn-fiàth  aige,  's  gu'n  cluinnteadh  e  'an  côig  choigean  na  h-Eireann.  'Nuair 
g'.ab'i  an  taigh  gufois,  mhàgair  e  mach  gu dubhbalbh-sàmhach gu  mullach 
u'v  'us  shéid  e  'n  corn  tri  uairean !  Fad  an  ama  seo  bha  'chuid  elle  de'n 
hcinn  L;u  dubhach,  dèurach  air  toir  Fhinn.  Cha  d'  fhàg  iad  cùil  no  cial 
m  sircada,  's  iarraidh-mhairbh  aca  air.  Mu  dheireadh  thall,  'nuair  a  thug 
'.d  :'eill  'us  dubh-ghéill,  chuala  Diarmad  donn  mac  a  pheathar  an  corn  ;  's 
la  diuald  c  abu  rabhadh  gun  fhreagant.  Bha  fios  aige  gur  h-'eiginn-bhàis 
bheireadfi  air  Fionn  a  shéideadh.  Thuige  gu'n  robh  an  gnotuch  gu  h-olc;  's 
ug  e  bûid  'us  briathar  air  a  chlaidheamh  nach  rachadh  biadh  no  deoch  thar 
mail  gus  mi  coibhreadh  e  air  bràthair  a  mhàîhar.  Thog  e  air  e  fhéin  's  a 
hiiican,  ':  hu  cham  gach  direach  leôtha  thar  chnoc  us  shloc;  's  ge  b'  fhada 
huap'  c.  c/kî  b'  fhada  ga  ruighinn  iad.  Fiiu.ur  iad  Fionn  'na  dheoiridh 
'uag'.i  gaii  chômas  'eirigh  no  suidhe  'am  fasgath  tuim  !  Dh'  fharraid  Diarmad 
heti  c'.od  a  dh'  fhairich  e.  Is  coma  sin,  osa  Fionn;  's  dh'  innis  e  dha  gach 


ar  mar  a  thachair.  Mar  a  mharbh  am  Blàr  Buidhe  na  gillean,  agus  an  droch 
hiullachd  a  fhualr  e  fhéin  bhuaiîhe;  '5  chomhairlich  e  dhàsan  îilleadh  dha- 
haigh  mu'n  'eireadh  an  cleas  ciadna  dha-gu'n  robli  esan  mar  a  bhitheadh  e 
ia-dhiàbh.  Bhôidich  'us  bhriathraich  Diarmad  nach  îilleadh  e  gus  an  d'  thu- 
fidh  e  macti  an  aichsamhail ;  's  gun  tuillead  a  ràdli  tliug  e  taigh  a'  Bhlàir 
ihaidhe  air. 

Cha  robh  s  taigh  ach  a'  bhean  's  i  'fuineadh.  Thug  i  biadh  us  deoch 
haihh  ;  agus  ghabh  i  an  sgial.  Dlï  innis  i  dhaibh  gu'n  robh  am  Blàr  Buidhe 
'  bhéinn-sheilg  's  gum  fhèarr  dhaibh  a  bhith  'falbh  mu'n  tigeadh  e  dha- 
haigh,  no  gun  'eireadh  dhaibh  mar  a  dli  éirich  do  dh-Fionn.  A  roghainn 
iodh  dhà,  asa  Diarmad,  ach  cha  'nfiialbh  sinn  gus  an  loir  sinn  a  mach  an 
icheamhail ;  's  shuidh  iad  as  taigh.  Feith  ri  dheireadh,  ma  ta,  os  ise.  Cha 
obh  iad  ach  goirid  mas  sin  tra  a  dh'  fhairich  iad  stuirn-stairn  aigan  dorus. 
0  bha  siod  ach  am  Blàr  's  a'  ghillean,  's  torc-nimhe  màr  fiaclach  aig  air  a 
huin  !  Thug  e  togail  bheag  mhôr  air  fhéin  a  chrathradh  an  t-sneachda 
heth,  's  chuir  e  crithfôn  ursainn  's  forshuidheachan  an  taighe!  Chlaodh  e  : 
""ha  mi  ' faireachduinn  jàilidh  fharbhalach  romham,  a  bhean;  Co  seo  'th' 
gad  a  nochda?  Dh'  innis  a  bhean  gu'n  robh  Diarmad  's  a  chuid  gillean.  A 
mch  do  ghillean,  a  Dhiarmaid,  a  îhoirt  d'hiam  na  h-eallaiche,  os  am  Blàr. 
.éum  Diarmad  e  fhéin  a  mach;  agus,  mu'n  d'  fhairich  am  Blàr  thall  no  hhos 
,  mharbh  e  'n  dama  leth  dhe  ghillean,  s  chuir  e  turrach  iad  air  iao'  h-deas 
n  doruis  mu  chainneamh  gillean  Fiùnnl  Is  olc  an  î-aoidh  thu,  os  am  Blàr. 
lur  faic  thu  nas  miosa  na  siod  dhiam  mu'n  lig  an  latha,  na  bith  'gearan, 
sa  Diarmad;  s  gun  luilleadh  bruidhne,  thug  e  's  taigh  an  tore.  Ghréidh 
:d  an  tore  gu  math  ga  romhath,  's  ghabh  e  fhéin  s  a  ghillean  an  leor  dheth. 
ach  cnàimh  mar  a  lomadh  iad,  thilgeadh  iad  siod  do'n  Hhlàr  's  dh'a  ghil- 
•an  !  Is  olc  an  t-aoidh  thu,  os  am  Blàr.  Mur  faic  thu  nas  miosa  na  siod 
hiam  mu'n  tig  an  latha  na  bith  'gearan,  osa  Diarmad  ;  's  dh'  iarr  e  an  t- 
bhala  thoirt  a  nuas  gus  an  oidhch'fhada  gheamhraidh  a  chur  seachad  a 
hlàr-Bhuidhe.  Thug  a'  bean  a  nuas  an  t-ubhal,  agus  thoisich  an  cleas.  Air 

chiad  tilgeadh  a  thug  Diarmad  do'n  ubhal,  mharbh  e  dithis  de  na  bli  air 
imh-dheis  a  Bhlàir!  Is  olc  an  t-aoidh  thu,  os  am  Blàr.  Mur  faic  thu  nas 
iosa  na  siod  dhiam  mu'n  tig  an  latha,  na  bith  'gearan,  osa  Diarmad.  Thilg 
m  Blàr  air  ais  an  t-ubhal,  ach  cha  d'  rinn  e  dochunn  's  a  bith  air  gillean 
'hiarmaid.  Thug  Diarmad  an  î-ath-tliilgeadh  do'n  ubhal  's  mharbh  e  dithis 
îna  bh'  air  làimbii-chlith  a'  Blàir  agus  mar  sin  gus  'na  mharbh  e  am  fear 
u  dheireadh  dhiubh;  's  am  Blàr  gun  aon  tàmh  ag  ràdh  :  's  olc  an  t-aoidh 
u  ;  agus  amhuil  sin  Diarmad  'ga  'ga  fhreagairt  :  Mar  'n  uair  a  bha  iad  sgith 
'.  chluith  an  ubhail  oir  thuirt  Diarmad  ris  a  Blàr  gum  b'  fhéar,  dhaibh 
J/  a  chur  car  gleachd.  Chaidh  na  fir  a  ghleachd  ;  's  ma  chaidh,  cha  robh  an 


yleachd  fad  air  chumaily  tra  a  bha  'm  Blàr  air  daisneach  a  dhroma  air 
eacan  loma  n  ùrlair!  Is  olc  an  t-aoidli  thu,  os  am  Blàr  s  ihug  e  cnead 
hoinï  as!  Mur  feic  thunas  miosa  na  siod  dheam  mu'n  tig  an  latha,  na  bi 
jearan,  osa  Diarmad,  's  dli'  iarr  e  air  a'  mhnaoi  a'  ghreideal  a  chur  air  gus 
h  rachadh  casan  a  Bhlàir  a  a  gharadh  gur  cinnte  gu'n  robh  e  fuar  'an  deigh 
ghin  dachaidh  'as  a'  bheinn-sheilg.  Chaidh  a  ghreideal  a  dheanamh  dearg; 
■  thug  Diarmad  togail  don  Bhlàr,  's  bha  siod  'n  a  sgug  buidhe  air  a'  ghrei- 
il!  Oiteag,  oit,  oit,  os  am  Blàr!  Cabh  air  do  shocair  e,  osa  Diarmad,  crea- 
xidh  do  chnaimhean  buidhe  air  mu'n  cobhair  mis  ort,  'schàm  e  air  a  ghreida 
gus  'na  loisg  a  chasan  gu  hun  nan  sléisdean  !  Bha  'm  Blàr  a  nise  gun 
lomas  suidhe,  agus  ghrad-spàrr  Diarmad  stobna-feàla  îromh  chorn  a  dhà 
hais,  's  bha  e  'aj  sin  gun  chômas  'erigh  no  suidhe  ;  's  thilg  e  air  shlunich 

chùib  e! 

Tra  bhaiad  seachd  sgith  ag  'eisdeachd  oiîe  agail  a'  Bhlàir  rug  Diarmad  air 
rogan  air,  's  thuirt  e  :  Am  bas  air  do  mhuin,  a  bhoduicti,  ciod  è  d' 
rie? 


n  bas  air  do  mhuin,  a  bhoduich,  ciod  è  d'éiric,  'us  tog  dhinn  brigh  do 
luith?  Oiteag,  oit  oit  !  as  am  Blàr,cha'n  'eil  a  dh'  éiric  agams  ,ach  cuach 
shlaint  a  tha  'm  bun  na  creig  ud  thall,  agus  leighisidh  i  Fionn  ! 
'Nuair  a  chualu  Diarmad  mun  chuaich,  cha  d' fhuirich  e  ri  tuille  chumhlaid 
raidhbu  ro-fhada  Icis  a  bha  bràthair  omhàthar  'ga  chuaradh  aig  bun  an 
's  chaidh  e  do'n  uamha.  Thugar  a'  cinad  làmh  air  a'chuaich,  's  buai- 
r  leatha  gu  Fionn.  lonnlaidead  a  chréuchdan  aisde  tri  uairean.  A'  chiad 
r  dh' fhàs  a  chasan  gu  ruig  nan  glàn  ;  an  dàrna  h-uair  dh'fhàs  iad  gu 
%  nan  aobrunn  ;  's  an  treas  uair  bha  Fionn  gun  chron,  gun  chiothrom  cho 

slàn  's  a  bhà  e  riabh  ! 
Rum  aon  bhoiseag  dd  dh-uisge  na  cuaiche  geasan  nan  gillean  a  bhristeadh, 
hug  e  am  Blàr  air.  A  chulaidh-thruais,  osa  Diarmad  ris,  bôidich  nach 
is  thu  tuille  de  gheasan  no  'chleasan  air  an  Feinn.  Bhàidich  am  Blàr  siod 
ioma  rud  elle  bharrachd,  's  thug  Diarmad  gu  suairce  dha  fhéin  's  dha 
'lean  an  diol  dh-uisge  na  cuaiche  's  ghabh  iad  an  cead  dheth  chéile.  A 
■xnamh  sgiala  goirid  dheth,  lean  a    chuach  ris  an  Fhéirtn  'us  dh'  fhàg 


Donald  MACPHRRSON, 

Instinlees  Cottage, 
Dalkeith. 
April  27,  1S70. 


REVUE    CELTIQUE 


TOME    I 


-L      /^«^<>n>t^-^      /PLCCi^U.*Â.  , 


iQ^       AVEC      LE     CONCOURS     DES     PRINCIPAUX     SAVANTS         "^^V 


DES    ILES    BRITANNIQUES    ET    DU    CONTINENT 


DIRIGEE     PAR 


H.    GAIDOZ 


Professeur  de  géographie  et  d'ethnographie  à   VÉcole  des  Sciences  Politiques  de  Paris, 

Membre  de  la  Cambrian  Arch<£ological  Association  et  de  la  Royal  Arch<eological 

Association  of  Ireland,  etc. 


Tome  I 


LIBRAIRIE  A.  FRANCK,  (f.  vieweg  propriétaire) 
67,  rue  de  Richelieu,  PARIS 

TRUBNER  AND  C" 
8  and  60,  Paternoster  Row,  E.  C,  LONDON 

1870-1872 


AU   LECTEUR. 


Il  y  a  trois  ans,  lorsque  nous  appelions  sur  notre  entreprise  l'attention 
du  public  savant,  nous  nous  exprimions  en  ces  termes  sur  le  but  que 
nous  nous  proposions  d'atteindre  : 

«  L'étude  des  langues,  des  littératures  et  des  antiquités  celtiques  appelle 
l'attention  du  philologue,  du  lettré  et  de  l'historien  par  l'importance  du 
rôle  que  les  Celtes  ont  joué  dans  l'ancienne  histoire  d'Europe  et  aussi 
par  les  richesses  des  littératures  néo-celtiques.  La  période  gauloise  de 
notre  histoire  n'est  pas  la  moins  importante  pour  être  la  moins  connue; 
Arthur  et  les  Romans  de  la  Table-Ronde  défrayent  une  bonne  partie  de 
la  littérature  du  moyen-àge;  le  Purgatoire  de  saint  Patrice  et  le  Voyage 
de  saint  Brendan  ont  été  racontés  dans  presque  toutes  les  langues  de 
l'Europe;  on  sait  quelle  vogue,  au  commencement  de  ce  siècle,  s'attacha 
pour  un  temps  au  nom  d'Ossian.  La  vive  et  charmante  imagination  des 
races  Celtiques  a  laissé  dans  leur  littérature  des  trésors  inappréciés  de 
poésie.  Des  écrivains  de  talent  ont  levé  en  partie  le  voile  qui  dérobait  à 
nos  regards  la  Bretagne  Française  ;  mais  par  la  date  récente  et  par  le 
petit  nombre  de  ses  monuments,  la  littérature  Bretonne  est  de  beaucoup 
inférieure  en  importance  aux  littératures  Irlandaise  et  Galloise.  Les 
langues  Celtiques  n'ont  pas  une  moindre  valeur  pour  la  Grammaire 
Com.parée;  il  suffit  de  citer  les  grands  travaux  que  leur  consacrent  les 
philologues  de  la  savante  Allemagne. 

»  Il  existe  pourtant  un  grand  obstacle  au  progrès  des  Études  Celtiques, 
c'est  l'absence  d'union  entre  les  savants  qui  les  cultivent.  On  travaille 
isolément  et  comme  dans  l'obscurité.  Pour  les  savants  du  continent,  les 
Iles  Britanniques,  ce  principal  refuge  des  races  celtiques,  sont  presque 
en  dehors  du  monde.  Le  vers  de  Virgile  est  encore  vrai  : 

Et  penitus  toto  divisas  orbe  Britannos. 

Sur  le  continent  on  ne  peut  que  difficilement  savoir  quels  textes  se 
publient,  quels  travaux  se  poursuivent  là-bas.  De  leur  côté,  les  savants 
des  pays  celtiques  qui  ont  à  leur  disposition  les  monuments,  les  manus- 
crits, les  traditions  et  la  langue  de  leurs  pays,  cherchent  souvent  en  vain 
des  points  de  repère  et  de  comparaison;  les  travaux  les  plus  importants 
de  l'Europe  savante  n'arrivent  qu'à  grand'peine  jusqu'à  eux.  Vienne 
une  alliance  entre  les  celtistes  de  tous  les  pays,  et  le  jour  se  fera  peu  à 
peu  sur  l'histoire  et  la  littérature  d'une  grande  race.  Cette  alliance,  nous 
espérons  la  réaliser.  » 


—    VI    — 

Grâce  au  concours  bienveillant  des  érudits  dont  les  travaux  remplis- 
sent ce  volume,  cette  alliance  a  pu  se  réaliser.  A  eux  le  mérite  et  l'hon- 
neur de  cette  entreprise!  Nous  croyons  interpréter  fidèlement  les  senti- 
ments des  lecteurs  de  la  Revue  en  les  remerciant  de  leur  collaboration 
active  et  dévouée.  Nous  devons  également  des  remerciements  aux  revues 
et  journaux  qui,  en  Europe  et  en  Amérique,  ont  fait  un  accueil  favorable 
à  notre  publication. 

Par  suite  de  circonstances  indépendantes  de  notre  volonté,  la  Revue 
Celtique  a  paru  à  de  très-longs  intervalles,  et  de  revue  trimestrielle  qu'elle 
devait  être,  s'est  trouvée  transformée  en  annuaire.  Nous  avons  la  ferme 
intention  d'activer  la  publication  de  ses  fascicules  et  de  la  rendre  désor- 
mais plus  régulière.  Mais  en  même  temps  nous  réclamons  l'indulgence 
pour  les  difficultés  que  rencontre  l'impression  d'un  recueil  semblable  : 
Aucun  article  ne  paraît  sans  que  les  épreuves  en  aient  été  envoyées  une 
ou  deux  ou  même  trois  fois  aux  auteurs  ;  en  outre  l'impression  d'articles 
polyglottes  se  fait  plus  lentement  que  toute  autre.  D'autre  part,  l'exécu- 
tion typographique,  due  aux  soins  d'un  excellent  imprimeur,  est  au-dessus 
de  toute  critique.  Il  nous  semble  qu'un  recueil  scientifique  comme  la 
Revue  Celtique,  desùné  à  réunir  les  matériaux  d'une  science  désintéressée, 
ne  doit  pas  être  astreint  à  une  publicité  aussi  périodique  que  les  recueils 
littéraires  ou  politiques  :  le  principal  est  qu'il  apporte  à  son  heure  des 
travaux  originaux  et  instructifs,  et  qu'il  tienne  le  lecteur  au  courant  du 
progrès  des  études  celtiques.  Nous  consacrons  tous  nos  efforts  à  cette 
ambition. 

H.  G. 
Paris,  le  i"''  août  1872. 


TABLE  DES  MATIÈRES. 


Au  lecteur v 

Liste  des  collaborateurs x 

Liste  des  souscripteurs xi 

De  la  Divinité  gauloise  assimilée  à  Dis  Pater  à  l'époque  gallo-romaine, 

par  M.  Anatole  de  Barthélémy i 

La  miniature  irlandaise,  son  origine  et  son  développement,  par  M.  F. 

W.  Unger 9 

Un  Évangéliaire  à  miniatures  d'origine  irlandaise,  dans  la  Bibliothèque 

princière  d'Œttingen-Wallerstein,  par  M.  W.  Wattenbach  ...  27 
The  ancient  Irish  Goddess  of  War,  by  W.  M.  Hennessy,  Esq.;  with 

a  postcript  by  D'  C.  Lottner 32 

Un  manuscrit  irlandais  de  Vienne,  par  M.  C.  Nigra 58 

Les  Gloses  irlandaises  de  Milan,  par  le  même 60 

Etude  phonétique  sur  le  breton  de  Vannes,  par  M.  d'Arbois  de  Jubain- 

ville 8$,  211 

Koadalan,   conte  populaire  breton,  recueilli  et  traduit  par  M.  F.  M. 

Luzel 106 

Observations  sur  le  conte  précédent,  par  M.  Reinhold  Kœhler .     .     .  132 

The  name  of  the  Danube,  by  Prof.  Max  Mûller 135 

Le  vrai  nom  de  Gargantua,  par  M.  F.  Liebrecht 136 

De  la  disparition  de  la  langue  gauloise  en  Galatie,  par  M.  G.  Perrot.  179 
Fionn's  Enchantement  :  a  popular  taie  of  the  Highlands  of  Scotland, 

with  a  translation  by  J.  F.  Campbell.  Esq 193 

Welsh  Phonology,  by  the  Rev.  John  Peter 203 

Sainte  Tryphine  et  Hirlande,  par  M.  R.  Kœhler 222 

Traditions  et  superstitions  de  la  Basse-Bretagne,   par  M.  R.  F.  Le 

Men 226,  414 

Proverbes  et  dictons  de  la  Basse-Bretagne,  recueillis  et  traduits  par 

M.  L.  Sauvé 243,  400 

Mythologica!  Notes,  by  Wh.  Stokes,  Esq  .     ........  256 

Un  autographe  de  Marianus  Scottus,  par  M.  Wattenbach  ....  262 

Un  opuscule  grammatical  de  Sedulius,  par  ^L  Ch.  Thurot  ....  264 

Le  nom  d'Abélard,  par  M.  E.  Renan 265 


Zeuss  et  le  manuscrit  de  Cambrai  de  l'Histoire  Ecclésiastique  des  Francs, 

par  M.  H.  d'Arbois  de  Jubainville 269 

Note  à  l'article  de  M.  Hennessy  (H.  Gj 269 

Légendes  des  monnaies  gauloises,  par  M.  A.  de  Barthélémy     ...  291 

La  Racine  Dru  dans  les  noms  celtiques  des  rivières,  par  M.  A.  Pictet  299 

L'Ex-voto  de  la  Dea  Bibracte,  par  M.  J.  G.  Bulliot 306 

Influence  de  la  déclinaison  gauloise  sur  la  déclinaison  latine,  dans  les 
documents  latins  de  l'époque  mérovingienne,  par  M.   d'Arbois  de 

Jubainville 520 

The  manumissions  in  the  Bodmin  Gospels,  by  Wh.  Stokes,  Esq.  .     .  532 

The  Luxembourg  Folio,  by  John  Rhys,  Esq 346 

—  See  Corrigenda  et  Addenda 50^ 

Attodiad  i  Lyfryddiaeth  y  Cymry,  gan  y  Parch,  D.  Silvan  Evans.     .  376 

Le  Catholicon  de  J.  Lagadeuc,  par  M.  Wh.  Stokes 395 

La  véritable  Histoire    de  Bretagne    de  Dom  Lobineau,   par   M.    P. 

Levot 436 

Chronique,  par  M.  H.  Gaidoz 167,  284,  494 

Corrigenda  et  Addenda ^01 

BIBLIOGRAPHIE. 

Belloguet  (Roget  de).  Glossaire  Gaulois  (H.  d'A.  de  J.) 457 

Bottrell,  Traditions  and  Hearthside  stories  of  West  Cornwall  (Gaston 

Paris) 485 

Charnock,  Patronymica  Cornu-Britannica  (H.  G.)     ......  486 

Davies,  Gwaith  (H.  G.) 282 

Dicuili  liber  de  mensura  orbis,  éd.  Parthey  (H.  G.) 161 

Ebrard,  Haudbuch  der  mittel-gaelischen  Sprache 479 

Flechia,  di  alcune  forme  de'  nomi  locali  dell'  Italia  superiore  (H.  G.)  .  460 

Gaidoz,  Gargantua  (F.  Liebrecht) 136 

Georgievski,  Gally  v  epochu  Kaïa  Julia  Cesaria 456 

Glennie,  Arthurian  Localities  (H.  G.) 461 

Hingant,  Éléments  de  la  Grammaire  Bretonne  (H.  d'Arb.  de  J.)    .     .  160 

Hoimboe,  Om  Çivaisme  i  Europa  (F.  Liebrecht) 136 

—      Om  Vildssviintypen  paa  galliske  og  indiske  mynter     .     .     .  999 

Hucher,  L'Art  Gaulois  (H.  d'A.  de  J.) 999 

Joyce,  The  origin  and  history  of  Irish  names  of  places  (H.  G.)     .     .  999 

Kennedy,  The  fireside  stories  of  Ireland  (H.  G.) 276 

Knobelsdorff  (0.  von),  Die  Keltischen  Bestandtheile  in  der  Englischen 

Sprache  (H.  G.) 489 

Lageniensis,  Irish  Folk  Lore  (H.  G.) 276 

Mac  Coy,  Miscellaneous  poems  translated  into  Gaedhiic  (H.  G.)    .     .  277 

Martin  (Henri),  Études  d'Archéologie  Celtique  (H.  G.) 4r)4 

Merlin,  Ed.  by  Wheatley  (H.  G.) 162 


Meyer  (Hugo),  Abhandlung  liber  Roland  (F.  Liebrecht) i]6 

Mowat,  Études  philologiques  sur   les  Inscriptions  gallo-romaines  de 

Rennes  (H.  d'A.  de  J.) ■     .     .  272 

Nigra,  Reliquie  Celtiche  (H.  d'A.  de  J.i 477 

Ossian,  the  poems  of,  éd.  by  Clark  (H.  G.) 479 

Paliiser,  Brittany  and  its  Byways  (H.  G.) 285 

Perrot,  de  Galatia  provincia  Romana  (H.  G.) 145 

Peutinger,  la  table  de,  Ed.  Desjardins  (H.  G.) 143 

Revon,  Inscriptions  antiques  de  la  Haute-Savoie  (H.  G. j     ....  271 

Richey,  Lectures  on  the  history  of  Ireland 493 

Rowlands,  Llyfryddiaeth  y  Cymry  (H.  G.) 281 

Saulcy  (F.  de).  Lettres  à  M.  de  Longpérier  sur  la  numismatique  gau- 
loise (H.  d'A.  de  J.) 465 

Saxton,  vide  Terrien 999 

Spurrell,  Gramadeg  0  laith  y  Cymry  (H.  G.) 280 

Stokes,  l'Archéologie  Irlandaise  et  M""  (H.  G.) 274 

Stokes  (Whitleyi,  The  life  of  St  Meriasek,  éd.  by  (H.  G.)  .     .     .     .     "  486 

—  Goidelica^  éd.  by  (C.  N.; 504 

Terrien  and  Saxton,  Liherieu  hag  Avieleu  (H.  d'A.  de  J.)  ■     ■     •     •  278 

Thomas  (R.  D.),  Hanes  Cymry  America  (H.  G.) 490 

Wocei,  Pravek  ZemeCeske  (L.  Léger) 147 

Zeuss,  Grammatica  Celtica,  éd.  altéra,  I  (C.  Nigra) 148 

—  —  —         II  (H.  d'A.  de  J.)     .     .     .     .  468 


LISTE  DES  COLLABORATEURS 

AU     PRÉSENT    VOLUME. 

MM. 

H.   d'Arbois  de  JuBAiNviLLE,   Correspondant   de  l'Institut,   à  Troyes 

(Aube) . 
Anatole   de  Barthélémy,   membre  de  la  Société  des  Antiquaires  de 

France,  à  Paris. 
J.  G.  BuLLiOT,  président  de  la  Société  Éduenne,  à  Autun  (Saône-et- 

Loire). 
J.  F.  Campbell,  Esq.,  (of  Islay),  London. 
The  Rev  D.  Silvan  Evans,  B.  D.,  Editer  of  xhe  Arclidcologia  Cambrcnsis, 

Llanymawddwy,  Merionethshire,  North  Wales. 
Henri  Gaidoz,  professeur  à  l'École  des  Sciences  Politiques,  à  Paris. 
W.  M.*  Hennessy,  Esq.,  Member  of  the  Royal  Irish  Academy,  Dublin. 
Reinhold  Kœhler,  conservateur  de  la  Bibliothèque  Grand-Ducale,  à 

Weimar. 
Louis  Léger,  docteur  ès-lettres,  à  Paris. 
R.  F.  Le  Men,  archiviste  du  Finistère,  à  Quimper  (Finistère). 
P.  Levot*  bibliothécaire  de  la  Marine,  à  Brest  (Finistère), 
F.  Liebrecht,  professeur  à  l'Athénée,  à  Liège  (Belgique). 
D''  C.  LoTTNER,  à  Dublin. 

F,  M.  LuzEL,  à  Plouaret  (Côtes-du-Nord). 

Max  MùLLER,   associé  étranger  de  l'Institut  de  France,  professer  of 

Comparative  Philology  at  Oxford. 
C.  NiGRA,  ministre  d'Italie,  à  Paris. 
Gaston  Paris,  professeur  au  Collège  de  F'rance,  à  Paris. 

G.  Perrot,  un  des  directeurs  de  la  Revue  Archéologique,  à  Paris. 
The  Rev.  John  Peter,  Bala,  North  Wales. 

Adolphe  PiCTET,  â  Genève  (Suisse). 

Ernest  Renan,  membre  de  l'Institut,  professeur  au  Collège  de  France,  à 

Paris. 
John  Rhys,  Esq.,   Fellow  of  Merton  Collège  (Oxford),   Rhyl,  North 

Wales. 
L.  Sauvé,  à  l^'^bervrac'h  (Finistère). 
Whitley  Stokes,  Esq.,  Secretary  to  the  Government  of  India  in  the 

Législative  Department,  Simla  (India). 
Charles  Thurot,  membre  de  l'Institut,  à  Paris. 
F,  W.  Unger,  professeur  à  l'Université  de  Gœttingue. 
W.  Wattenbach,  professeur  à  l'Université  d'Heidelberg. 


LISTE   DES  SOUSCRIPTEURS 

AU   PRÉSENT   VOLUME. 

Us  noms  des  souscripteurs  décédés  pendant  Li  publication  du  présent  volume  ont  été 
conservés,  mais  sont  précédés  du  signe  j. 


ÉDITION   SUR  PAPIER  DE    HOLLANDE. 

MM. 
W.  Evving,  Esq.,  Glasgow,  Scotland. 
The  Rev.  R.  Jenkin  Jones,  M.  A.,  Aberdare,  South  Wales. 
Lemoigne,  libraire,  à  Paris. 
C.  Nigra,  ministre  d'Italie,  à  Paris. 
The  Rev.  C.  W.  Saxton,  D.  D.,  Newport,  Shropshire. 

ÉDITION  ORDINAIRE. 

MM. 
C.  Appleton,  Esq.,  London. 

H.  d'Arbois  de  Jubainville,  correspondant  de  l'institut,  à  Trêves  (Aubei. 
Asher  et  C*,  libraires,  à  Berlin  (3  ex.). 
Audran,  notaire,  à  Quimperlé  (Finistère). 
Baer,  libraire,  à  Paris. 
J.  Bahaux,  à  Paris. 
L.  Bamberger,  à  Paris 

The  Rev.  John  Bannister,  LL.  D.,  St  Day's  Vicarage,  Scorrier,  Cornwall. 
Bardonnet,  à  La  Crèche  (Deux-Sèvres). 
The  Rev.  E.  Barnwell,  M.  A.,  Melksham,  Wiltshire. 
Anatole  de  Barthélémy,  à  Paris. 
Barthès  et  Lowell,  libraires,  à  Londres  (2  ex.). 
Belamy,  lieutenant  au  1"  régiment  de  Tirailleurs  Algériens. 
Le  baron  de  Belloguet,  à  Nice  (Alpes-Maritimes). 
Eug.  Benoist,    professeur   à   la  Faculté  des  Lettres,   .\   Aix  (Bouches-du- 

Rhône). 
Bibliothèque  de  l'Institut  de  France,  à  Paris. 
Bibliothèque  de  l'École  Sainte-Geneviève,  à  Paris. 
Bibliothèque  de  l'Université,  à  Paris. 


—    Xll    — 
Bibliothèque  municipale  de  Moulins. 
Bibliothèque  municipale  de  Rennes. 
Bibliothèque  municipale  de  Strasbourg. 
Bibliothèque  de  la  ville  de  Francfort-sur-le-Mam. 
Bibliothèque  royale  de  Munich. 

Bibliothèque  de  l'Université  de  Tubingue  (Wurtemberg). 
A.  de  Blois,  à  Quimper  (Finistère). 
Borrani,  libraire,  à  Paris. 
Bossange,  libraire,  à  Paris  (2  ex.). 
Boucherie,  professeur  au  Lycée,  à  Montpellier  (Hérault). 
The  very  Rev.  Ulick  J.  Bourke,  président  of  St   Jarlath's  Collège,  Tuam, 

Ireland. 
M.  Bréal,  professeur  au  Collège  de  France,  à  Paris. 
The  Rev.  W.  K.  B.  Briscoe,  Fellow  and  Tutor  of  Jésus  Collège,  Oxford. 
H.  L.  L.  Brown,  Esq.,  Fellow  of  Queen's  Collège,  Oxford. 
J.  G.  Bulliot,  à  Autun  (Saône-et-Loire). 
J.  F.  Campbell,  Esq.,  London. 
The  Rev.  T.  L.  Carey,  0.  S.  F.,  Dublm. 
P.  du  Cassel,  à  Lassay  (Mayenne). 

The  Hon.  Mrs  Henry  Caulfield,  Hockley^  Armagh,  Ireland. 
A.  Chassaing,  juge  au  tribunal  civil,  au  Puy  (Haute-Loire). 
Le  comte  Arthur  de  Circourt,  à  Paris. 
E.  Claverie,  à  Tarbes  f Hautes-Pyrénées). 
Lord  Clermont,  Newry,  Ireland. 
M.  Cohen  et  fils,  libraires,  à  Bonn  (Prusse  Rhénane). 
G.  Comont,  curé  de  St  Pierre-le-Viger,  par  Fontaine-le-Dun  (Seine-lnlérieurc). 
Le  Comptoir  de  Londres,  chez  MM.  Hachette,  libraires,  à  F^aris. 
H.  Courel-Groult,  à  Lisieux  (Calvados). 

Mrs  Eliz.  Kerr  Coulson,  Cors  y  Gedol,  Dyffryn,  Merionethshire. 
Alex.  J.  Cranston,  Esq.,  Schloss  Gayen,  Meran,  Tirol  (Autriche). 
The  Rev.  F.  Crawford,  Cookstown,  Ireland. 
Mgr  A.  David,  évêque  de  Saint-Brieuc  et  Tréguier,  à  Saint-Brieuc  (Cùtcs-du- 

Nord). 
The  Rev.  A.  Davies,  London. 
A.  Debrie,  libraire,  au  Havre. 

Delaitre,  sous-lieutenant  au  i"'  régiment  de  Tirailleurs  Algériens. 
G.  Stirling  Home  Drummond,  Esq.,  Ardoch,  Braco,  Scotland. 
Earl  of  Dunraven,  Adare,  Limerick,  Ireland. 
A.  Dùrr,  libraire,  à  Leipzig  (Saxe). 
D'  H.  Ebel,  à  Schneidemùhl  (Prusse). 
Messrs  S.  and  O.  Edwards,  Liverpool. 
E.  Ernault,  à  Arcueil,  près  Paris. 
The  Rev.    I).   Silvan    Evans,    B.D.,    Llaiiyiiiawddwy ,    Diua.s    Mawddwy, 

Merionethshire. 


—    XIII    — 

s.  Ferguson,  Esq.,  Keeper  of  the  Public  Record';  of  Ireland,  Dublin. 
The  colonel  A.  Lane  Fox,  London. 

D.  A.  Freeman,  Esq.,  London. 
Frommann,  libraire  à  léna  fSa.xe). 
Galette,  libraire,  à  Paris. 

The  Rev.  Richard  Calvin,  P.P.,  Rathdrum,  Co  Galway,  Ireland. 

Gariel,  conservateur  de  la  Bibliothèque,  à  Grenoble  (Isère; 

Ch.  de  Gaulle,  à  Paris. 

Mr  Thomas  Gee,  Publisher,  Denbigh,  North  Wales. 

The  Rev.  G.  G.  Geldart,  London. 

H.  Georg,  libraire,  à  Genève  (?  ex.). 

Gerold  et  C",  libraire,  à  Vienne  (Autriche),  (2  ex.). 

E.  Goumy,  professeur  au  Collège  Rollin,  à  Paris. 

The  Rev.  James  Graves,  Stoneytord,  Co  Kilkenny,  Ireland. 

R.  Griffith,  Esq.,  principal  of  the  Benares  Collège,  Benares,  India. 

D'Edw.  Guest,  Master  of  Caius  Collège,  Cambridge. 

Guilmet,  libraire. 

Le  D'  Halléguen,  à  Chateaulin  (Finistère). 

Hauvette-Besnault,  à  Paris. 

W.  M.  Hennessy,  Esq.,  M.R.I.A.,  Dublin. 

Le  vicomte  Hersart  de  la  Villemarqué,  membre  libre  de  l'Institut,  à  C)uimperlé 

(Finistère). 
Hucher,  au  Mans  (Sarthe). 

G.  Hudson,  Esq.,  librarian  to  the  Liverpool  Free  Public  Library,  Liverpool. 
Rev.  Joseph  Hughes,  B.D.,  professer  of  Welsh  at  St  David's  Collège,  Lam- 

peter,  North  Wales. 
The  Rev.  A.  Hume,  Liverpool. 
Husson,  à  Paris. 

The  Library  of  the  Royal  Irish  Academy,  Dublin. 
M'  V'  Jacquin  et  ses  fils,  à  Paris. 

Rev.  T.  James,  F.S.A.,  F. G. H.,  F. G. H. S.,  Huddersfield. 
Yves  Jégou,  vicaire  de  Callac-en- Bretagne  (Côtes-du-Nord-. 
Walter  D.  Jeremy,  Esq.,  Barrister-at-Law,  London. 
The  Ven.  W.  Basil  Jones,  M.  A.,  Archdeacon  of  York,  York. 
Miss  Marianna  Jones,  Penmaen  Dovey,  Machynlleth. 
John  William  Jones,  Esq.,  Jésus  Collège,  Oxford. 

A.  Jourdain,  à  Paris. 

P.  W.  Joyce,  Esq.  Dublin. 

B.  Jullien,  à  Paris. 
Jung-Treuttel,  libraires,  à  Paris  (2  ex.). 

M.  J.  C.  Juta,  Bookseller,  Cape  Town,  Cape  of  Good  Hope. 

D.  H.  Kelly.  Esq.,  Dublin. 

Carie  de  Kerret,  à  Braspartz  (Finistère). 

Le  vicomte  René  de  Kerret,  à  Thoissey  (Ain). 


—    XIV    — 

Kramers,  libraire,  à  Rotterdam  (Pays-Bas}. 

Kymmel,  libraire,  à  Kiev  (Russie). 

De  La  Saussaye,  à  Paris. 

Lecoz,  ingénieur  civil,  à  Saint-Brieuc  (Côtes-du-Nord). 

André  Lefèvre,  à  Paris. 

Rév.  Père  Marc  Le  Gall,  S.  J.,  à  Paris. 

L.  Léger,  à  Paris. 

R.  F.  Le  Men,  archiviste  du  département,  à  Ouimper  (Finistère). 

Mgr  Le  Nouvel,  évêque  de  Quimper  et  de  Léon,  à  Quimper  (Finistère). 

Loescher,  libraire,  à  Florence. 

A.  de  Longpérier,  membre  de  l'Institut,  à  Paris. 

Lorenz,  libraire,  à  Paris. 

Louriou,  avocat,  à  Bourges. 

F.  M.  Luzel,  à  Plouaret  (Côtes-du-Nord). 

Robert  Mac  Adam,  Esq.,  Belfast,  Ireland. 

Henry  Mac  Cormac,  Esq.,  Belfast,  Ireland. 

The  Rev.  Edw.  Mac  Coy,  Raford,  Kiltulla,  Athenry,  Ireland. 

J.  Macdonald,  Esq.,  London. 

James  Mac  Knight,  Esq.  L.L.  D.  Londonderry,  Ireland. 

The  Rev.  D'  Th.  Mac  Lauchlan,  Edinburgh. 

The  Manchester  Free  Public  Libraries,  Manchester. 

Henri  Martin,  à  Paris. 

The  Rev.  Williams  Mason,  Llantrisant  Rectory,  LIangefni,  Anglesey. 

The  Rev.  Donald  Tolmie  Masson  M.A.,  M.D.,  minister  of  the  Gaelic  Church, 

Edinburgh. 
John  Meredith,  Esq.,  M.  D.,  Calcutta. 
Messrs   Mohun    and    Bestor,    booksellers  ,  Washington ,    United    States    ot 

America. 
Gabriel  Monod,  à  Paris. 
L.  A.  de  Montluc,  à  Paris. 
J.  Muir,  Esq.,  LL.D.,  Ph.  D.,  Edinburgh. 
Prof.  Max  Mùller,  Oxford. 

The  Rev.  Eug.  Murphy,  Kenmare,  Co  Kcrry,  Ireland  . 
Lord  Charles  Neaves,  Edinburgh. 
C.  Nigra,  ministre  d'Italie,  à  Paris. 
Noiriel,  libraire,  à  Strasbourg  [2  ex.). 
Henri  Norton,  Esq.,  Norwich. 
Nutt,  libraire,  à  Londres  (^  ex.). 
Odobesco,  con.seiller  d'Etat,  à  Bukarest  (Roumanie). 
The  Very  Rev.  D-"  O'Rorke,  P.P.,  Callooney,  Co  Sligo,  Ireland. 
Gaston  Paris,  à  Paris. 
Parker  etC",  libraires,  à  Oxford  (2  ex.). 
Penlou,  chez  MM.  Schulz  et  Thuillié,  libraires,  à  Paris. 
Pernolet,  ingénieur,  à  Paris. 


The  Rev.  John  Peter,  Bala,  North  Wales. 

A.  Peyrot,  professeur  au  Lycée,  i.  Nantes. 
G.  Philipps,  chez  M.  Baer,  libraire,  ;\  Pans. 

f  Sir  Thomas  Philipps,  Cheltenham. 
Messrs  Philip,  son  and  nephew,  booksellers,  Liverpool. 

B.  M.  Pickering,  Esq.,  London. 
A.  Pictet,  à  Genève  (Suisse). 

G.  Piquenard,  à  Quimper  (Finistère). 
Le  D'  Plicot,  à  la  Fère-Champenoise  (Marne). 
Ch.  Ploix,  ingénieur  hydrographe,  à  Paris. 
Thomas  Powell,  Esq.,  Jésus  Collège,  Oxford. 
f  Rajat,  capitaine  au  32°  de  ligne. 

Le  général  J.  Meredith  Read,  consul-général   des  Etats-Unis    d'Amérique,   à 

Paris. 
Reinwald,  libraire,  à  Paris  (5  ex.). 
E.  Renan,  membre  de  l'Institut,  à  Paris. 
Llywarch  Reynolds,  Esq.,  Jésus  Collège,  Oxford. 
Owen  Richards,  Esq.,  M.  D.,  Bala,  North  Wales. 
Rivett-Carnac,  Esq.,  Allahabad,  India. 
The  Rev.  John  Roberts,  Conway,  North  Wales. 
E.  William  Robertson,  Esq.,  London. 
Ronarc'h,  avocat,  à  (^imper  (Finistère). 
L.  Sauvé,  à  l'Aber  Vrac'h  (Finistère). 
Sayvé,  à  Versailles. 

E.  Schuré,  à  Paris. 

f  Mgr  Sergent,  évêque  de  (^imper  et  de  Léon,  à  C^imper  '  (Finistère). 

T.  G.  Shairp,  Esq.,  Principal  of  the  United  Collège,  St  Andrew's  University, 

Scotland. 
Sidot,  libraire,  à  Metz  (2  ex.). 
W.  F.  Skene,  Esq.,  Edinburgh. 
Messrs  Smith  and  Son,  booksellers,  Glasgow. 

John  Stuart,  Esq.,  for  the  Society  of  Antiquaires  of  Scotland,  Edinburgh. 
Miss  Stokes,  Dublin. 
Whitley  Stokes,  Esq.,  Simia,  India. 

F.  Szarvardy,  à  Paris. 

Tavernier,  à  Taninges  (Haute-Savoie). 

Le  comte  de  Tertu,  à  Tertu,  par  Trun  ^Oise). 

The  Right  Rev.  D'  Gonnop  Thirlwall,  Bishop  of  St  David's,  Carmarthen. 

E.  Thomas,  à  Marseille. 

Thonnelier,  à  Paris. 

Treuttel  et  Wurtz,  libraires,  à  Strasbourg  (2  ex.). 

Le  colonel  Troude,  à  Brest  (Finistère). 

I .  L'abonnement  de  Mgr  Sergent  a  été  continué  par  son  successeur,  Mgr  Le  Nouvel. 


—   XVI    — 
Nie.  Trûbner,  Esq.,  London. 
Turettini,  chez  M.  Delondre,  à  Paris. 
Van  der  Kindere,  à  Uccle  (Belgique). 

Vuillemin,  lieutenant  au  i"  régiment  de  Tirailleurs  Algériens. 
His  Excellency  M.  Van  de  Weyer,  London. 

Wattenbach,  professeur  à  l'Université  d'Heidelberg  (Grand  Duché  de  Bade 
Messrs  Wiley  and  son,  Booksellers,  New  York. 
Messrs  Willis  and  Sotheran,  booksellers,  London. 
Williams  et  Norgate,  libraires,  à  Londres  (9  ex.). 


i!?lSIS<^, 


/7^ 


J- 


h 


.    o'    ■'  e^  ^-    • 

REVUE  CELTIQUE 

Pam, 

'■//À^^'^'^ 

LIBRAIRIE    A.    FRANCK 

^■.    VifWEG,    PROPRIÉTAIRE 

o7,    ru.'    Riclicheii 

PARIS. 

;^n^  /'^'  %.  9^V^ /^^^    A^^x    Z'^^.^,  ^^,; 


1        /  ^xffLm&ii^-n  ^i 


/  yr/J  I 


^ '-^^y/ÙL  /    atx^      Jcn^     ^      y^  ^^^ét^/CrjL        .       /jC^ 

^  6^.^  ^  U /.(Lût   ^^v^^/^--^? 


// 


i*-r^      dX^    i  /^^^      ^0-Ax    S-e^if<^ 


.     C  a^e^f^^-^^^   i^-f . 


/ 


/ 


^S^»-^       J/xiL^X. 


^'^  & 


Cp 


^^  AMERICAN. 
CONTINENTAL   AND 
ORIENTAL 
"ARr  ACt*^ 


'C<^\ 


r^ 


<^^^^   <-^H^^ 


 


^t-if-t^^c^/ot^jf^ 


■^ 


^^^f^  ^A.*,.!*'^  ,  y"^ 


•^ 


^4     ^^^     ^/' 


.^ 


•  ^Xje r.c^  c^jf^. 


U^     /^^uji^  ^    ^2^r^^^ 


^ift^a^e^ 


'^ 


«^'^^aey  .<*tX*i-t-^ 


^^t-rf^^t^h/L- 


^^<-  '  c-c  ^<r  -^t-^oc^ti    ^i^'^^^^'^iuf^ 


<a^A^   9^    JU^'e^^.^/^jf,     ^  /^c^     (^^ 


r<^. 


3^ 


>^^.^      c^^ec^Jk        t-C^iji^,       /^^2d.t^- 


■é^^^^i    s^-<^. 


Q. 


^^^U^i^u^U^ 


-^  ^  /        /^  ^.. 


'-1 
ta  I 


■YK, 


Z 


j 


JE.C. 


^-^^-tsf^ 


TllÛBNER    &   CO. 
60,  PATEIiNOSTER  ROW,  LONDON, 


isieurs  archéologues  en  qui  j'ai  grande  confiance,  et  aussi  pai  ce  lan 
e  le  Musée  de  Saint-Germain,  dans  ses  vitrines,  a  adopté  mon 
stème  d'interprétation.  Je  me  décide  donc  à  en  parler,  me  réservant 
publier  ultérieurement  une  monographie  qui  comprendra  les  nom- 
eux  monuments  relatifs  à  ce  personnage  mythologique. 

I 

La  statuette  dont  je  donne  ici  la  gravure  est  la  seule  qui  révèle  l'objet 
\x  lequel  le  dieu  s'appuie;  c'est  ce  bronze  qui  m'a  permis  de  déter- 
liner  l'attribution  de  toute  une  série  de  monuments  sur  lesquels  je 
rois  que  mes  devanciers  n'avaient  proposé  que  des  assimilations  forcé- 
ment erronnées.  Si  j'ai  eu  la  bonne  fortune  de  trouver  la  solution  du 
)roblème,  il  me  reste  cependant  un  regret,  c'est  de  ne  pouvoir  dire 
naintenant  le  nom  gaulois  du  dieu.  Le  hasard  fera  peut-être  retrouver 
jn  jour,  dans  quelque  inscription  inédite,  ce  vocable  mystérieux. 

Le  bronze  en  question,  trouvé  à  Prémeaux  (Côte-d'Or),  dans  des 
fouilles  dirigées  par  M.  Ch.  Aubertin,  a  figuré  à  l'Exposition  universelle, 
et  fait  partie  du  Musée  de  la  ville  de  Beaune.  Il  représente  un  homme 
barbu,  vêtu  d'une  tunique  serrée  à  la  taille  par  une  ceinture,  les  jambes 
couvertes  d'un  vêtement  collant;  les  dessins  figurés  au  simple  trait  sur 
la  tunique  et  les  braies  dénotent  l'intention  d'indiquer  des  étoffes 
brodées  ou  enrichies  d'ornements  en  métal  appliqué  '  ;  de  la  main  droite 

I .  Ces  statuettes  me  serviront  utilement,  dans  un  autre  travail,  à  étudier  le  costume 
des  Gaulois  et  à  établir  que  la  forme  de  leurs  vêtements  se  conserva  traditionnellement 
pendant  un  long  espace  de  temps. 


\ 


DE 

LA   DIVINITÉ   GAULOISE 

ASSIMILÉE   A    DIS   PATER 
A  l'époque  gallo-romaine. 


Les  lecteurs  de  la  Revue  Celtique  me  permettront  de  célébrer  l'appa- 
rition de  ce  recueil  en  leur  faisant  connaître  un  bronze  qui  représente  le 
dieu  considéré  par  les  Gaulois  comme  le  père  de  leur  race.  J'hésitais 
depuis  longtemps  à  publier  les  notes  recueillies  sur  ce  sujet,  tant  je 
crains,  en  fait  de  mythologie  celtique,  de  me  laisser  séduire  par  quelque 
illusion;  mais  j'y  suis  aujourd'hui  encouragé  par  l'assentiment  de 
plusieurs  archéologues  en  qui  j'ai  grande  confiance,  et  aussi  par  ce  fait 
que  le  Musée  de  Saint-Germain,  dans  ses  vitrines,  a  adopté  mon 
système  d'interprétation.  Je  me  décide  donc  à  en  parler,  me  réservant 
de  publier  ultérieurement  une  monographie  qui  comprendra  les  nom- 
breux monuments  relatifs  à  ce  personnage  mythologique. 

I 

La  statuette  dont  je  donne  ici  la  gravure  est  la  seule  qui  révèle  l'objet 
sur  lequel  le  dieu  s'appuie;  c'est  ce  bronze  qui  m'a  permis  de  déter- 
miner l'attribution  de  toute  une  série  de  monuments  sur  lesquels  je 
crois  que  mes  devanciers  n'avaient  proposé  que  des  assimilations  forcé- 
ment erronnées.  Si  j'ai  eu  la  bonne  fortune  de  trouver  la  solution  du 
problème,  il  me  reste  cependant  un  regret,  c'est  de  ne  pouvoir  dire 
maintenant  le  nom  gaulois  du  dieu.  Le  hasard  fera  peut-être  retrouver 
un  jour,  dans  quelque  inscription  inédite,  ce  vocable  mystérieux. 

Le  bronze  en  question,  trouvé  à  Prémeaux  (Côte-d'Or),  dans  des 
fouilles  dirigées  par  M.  Ch.  Aubertin,  a  figuré  à  l'Exposition  universelle, 
et  fait  partie  du  Musée  de  la  ville  de  Beaune.  Il  représente  un  homme 
barbu,  vêtu  d'une  tunique  serrée  à  la  taille  par  une  ceinture,  les  jambes 
couvertes  d'un  vêtement  collant;  les  dessins  figurés  au  simple  trait  sur 
la  tunique  et  les  braies  dénotent  l'intention  d'indiquer  des  étoffes 
brodées  ou  enrichies  d'ornements  en  métal  appliqué  '  ;  de  la  main  droite 

I.  Ces  statuettes  me  serviront  utilement,  dans  un  autre  travail,  à  étudier  le  costume 
des  Gaulois  et  à  établir  que  la  forme  de  leurs  vêtements  se  conserva  traditionnellement 
pendant  un  long  espace  de  temps. 


2  De  la  divinité  gauloise  assimilée  à  Dis  Pater. 

il  tient  un  vase;  de  la  main  gauche  il  s'appuie  sur  une  masse  pourvue 

d'un  long  manche. 


De  la  divinité  gauloise  assimilée  à  Dis  Pater.  5 

Le  même  personnage  est  gravé  d'une  manière  identique  sur  une 
pierre  formant  le  chaton  d'une  bague  d'argent  massif,  trouvée,  au 
siècle  dernier,  à  Vendeuil-Caply  (Oise),  dans  des  fouilles  entreprises  au 
siècle  dernier  par  ordre  du  duc  de  Luynes'. 

Des  statuettes  de  bronze  de  différentes  grandeurs,  mais  analogues  à 
celle  de  Prémeaux ,  ont  été  découvertes  à  Besançon ,  à  Vienne,  en 
Suisse,  près  de  Saint-Paul-trois-Châteaux,  dans  la  Bresse,  à  Mâcon,  à 
Metz,  etc.  On  en  conserve  plusieurs  exemplaires  dans  les  musées  de 
Saint-Germain,  de  Lyon,  de  Nimes,  d'Avignon,  de  Lausanne.  Seule- 
ment, aucune  de  ces  nombreuses  statuettes  n'a  conservé  le  long 
marteau  qui  en  est  l'attribut  spécial  ;  cet  instrument,  simplement  passé 
dans  la  main  gauche,  et  jamais  fixé,  a  été  facilement  égaré,  ou  rongé  par 
l'oxide. 

Ce  dieu  n'a  pas  été  seulement  représenté  en  statuettes  de  bronze  : 
on  le  voit  aussi  sculpté  sur  des  autels  de  pierre,  au  Musée  de  Strasbourg, 
à  Sulzbach,  dans  le  grand-duché  de  Bade  et  à  Lyon.  Si  les  bronzes 
nous  le  montrent  avec  une  perfection  d'art  plus  ou  moins  complète,  les 
sculptures  le  représentent  presque  toujours  grossièrement  ;  mais  elles 
nous  apprennent  positivement  qu'à  l'époque  gallo-romaine  ce  dieu  était 
assimilé  à  Pluton. 

Sur  l'autel  du  Musée  de  Strasbourg,  provenant  d'Ober-Seebach 
(Bas-Rhin),  le  dieu,  appuyé  sur  son  long  marteau,  est  à  côté  d'une 
femme  qui  est  ^Erecura  ou  Proserpine  ;  à  ses  pieds  on  voit  Cerbère, 
reconnaissable  à  ses  trois  têtes*.  L'autel  de  Sulzbach  est  analogue?. 
Sur  les  autels  du  Musée  de  Lyon,  le  dieu,  toujours  isolé,  est,  une  fois, 
accompagné    d'un  chien  4;  quelquefois  le  marteau  paraît  tantôt  seul, 

1.  cf.  Grivaud  de  la  Vincelle,  pi.  XVII,  n"  3. 

2.  Cf.  Revue  archéologique,  18(4,  pp.  309  et  seq.  art.  de  M.  F.  Chardin. 

3.  Brambach,  Baden  unter  rœmischer  Hcrrschaft.  —  Revue  crit.,  1867,  2^  sem.,  p.  387. 

4.  [Si,  dans  l'autel  du  musée  de  Lyon,  la  présence  du  chien  n'est  pas  comme  dans 
l'autel  d'Oberseebach  une  réminiscence  du  Cerbère  grec,  et  s'il  est  bien  l'expression  indi- 
gène du  symbolisme  gaulois,  ce  serait  une  raison  de  plus  de  reconnaître  à  la  divinité  qu'il 
accompagne  la  signification  proposée  par  M.  A.  de  Barthélémy.  Le  plus  souvent,  en 
effet,  le  chien  est,  en  mythologie,  le  compagnon  des  dieux  sombres  de  la  nuit.  En  Grèce, 
à  côté  du  mythe  bien  connu  de  Cerbère,  qui  garde  les  portes  du  owiia  'Aîoao,  nous 
voyons  le  chien  consacré  à  Hécate  (Preller  :  Criechische  Mythologk-,  tome  1,  p.  248). 
Au  moyen-âge,  le  démon  revêtait  souvent  la  forme  d'un  chien  (A.  Maury  ;  Essai  sur  les 
légendes  pieuses  du  moyen-âge,  Paris,  1843,  in-80,  pp.  165-7,  cf.  J.  Grimm,  Deutsche 
Mythologie^,  p.  948).  C'est  aussi  sous  cette  forme,  comme  on  sait,  que  dans  le  Faust 
de  Goethe,  Méphistophélès  apparaît  pour  la  première  fois.  Dans  les  traditions  populaires 
des  Highlands  d'Ecosse,  le  chien  semble  avoir  quelque  chose  de  diabolique,  comme  le 
remarque  M.  J.-F.  Campbell  {Popular  Taies  of  the  West  Highlands,  vol.  I,  p.  LXXXIX) 
et,  d'après  Pennant,  cité  par  Brand  (Popular  Antiquities,  Bohn's  Ed.  vol.  II,  p.  170), 
les  Highlanders  prennent  bien  garde,  dans  la  célébration  d'un  mariage,  qu'un  chien  ne 
passe  entre  les  deux  fiancés.  De  même,  en  Irlande,  la  rencontre  d'un  chien,  dans  des 
circonstances  que  je  ne  me  rappelle  malheureusement  pas  d'une  façon  précise,  est  regardée 


4  De  la  divinité  gauloise  assimilée  à  Dis  Pater, 

tantôt  accompagné  du  vase  que  le  dieu  tient  ordinairement  de  la  main 

droite. 

La  représentation  la  plus  curieuse  que  je  connaisse  de  cette  divinité 
est  une  statuette  de  22  centimètres  1/2  de  hauteur,  faisant  partie  d'un 
laraire  trouvé  à  Vienne  en  1866.  Le  dieu,  avec  ses  attributs  habituels, 
a  les  pieds  posés  sur  un  piédestal  ;  derrière  lui  était  fixée  une  tige 
aujourd'hui  détachée,  mais  dont  on  peut  reconnaître  la  place;  cette 
tige  était  terminée  par  un  véritable  maillet  d'assez  grande  dimension,  et 
dans  la  masse  étaient  fixés  sept  autres  maillets,  plus  petits,  disposés  en 
rayons,  et  qui  formaient  une  sorte  d'auréole  derrière  la  tète  du  dieu  '. 

Dans  ces  statuettes,  Montfaucon  voit  tantôt  Esculape,  tantôt  un 
druide,  tantôt  un  victimaire;  d'autres  archéologues,  anciens  et  modernes, 
tiennent  pour  Jupiter,  Neptune  et  Hercule.  Grivaud  de  la  Vincelle  et 
M.  F.  Chardin  ont  proposé  Dis  paler  ou  Taranis  :  ils  ont  entrevu  la 
vérité,  mais  ils  n'ont  pas  approfondi  la  question. 

Nous  devons  remarquer  que  les  statuettes  dont  nous  nous  occupons 
n'ont  pas  toutes  la  tête  nue  :  quelques  unes,  —  ce  sont  celles  qui  ont 
fait  penser  à  Hercule,  —  ont  une  peau  de  bête  fauve  sur  les  épaules  ; 
la  tête  sert  de  coiffure,  et  les  pattes  sont  croisées  sur  la  poitrine.  Mais 
il  ne  s'agit  pas  ici  de  la  dépouille  du  lion  de  Némée;  le  museau  pointu 
et  les  oreilles  indiquent  plutôt  l'hyène  ou  le  loup. 

Après  avoir  décrit  sommairement  la  caractéristique  de  ce  dieu 
gaulois,  que  dès  à  présent  nous  pouvons  considérer  comme  ayant  été 
confondu  avec  Dis  Pater  ou  Pluton  à  l'époque  gallo-romaine,  je  vais 
essayer  de  coordonner  les  notes  que  j'ai  recueillies  jusqu'ici  pour  aider  à 
fixer  sa  personnalité  et  la  valeur  de  ses  attributs. 


«  Les  Gaulois  se  prétendent  tous  issus  de  Pluton  (Dis  Pater);  c'est, 
disent-ils,  une  tradition  des  druides.  En  vertu  de  cette  croyance,  ils 
mesurent  le  temps  écoulé,  non  par  le  nombre  des  jours,  mais  par  celui 

comme  un  signe  de  mauvais  augure.  Dans  l'île  de  Man,  le  château  de  Peel  a  longtemps 
été  hanté  par  un  fantastique  chien  noir,  Moddey  Dhoo  (J.  G.  Cumming,  The  IskofMan, 
Londres,  1848,  pp.  197  et  suiv.).  Le  hurlement  nocturne  des  chiens  a  généralement  été 
considéré  comme  un  présage  de  mort  (Brand,  Pop.  Aiit.  Bohn's  Ed.,  vol.  III,  pp.  1S4  et 

suiv.);  Virgile  témoigne  de  la  tradition  romaine  à  cet  égard  :  «  obscenxque  canes 

signa  dabant.  »  {Georg.  I,  470).  Il  est  aussi  curieux  de  remarquer  que  les  chiens  ont 
souvent  été  réputés  voir  des  «  esprits  »  que  les  yeux  des  hommes  ne  devinaient  pas,  et 
cette  croyance  se  trouve  déjà  dans  Homère  (Odyssée,  XVI,  r6o,  cf.  Crimm,  Dcut.  Myth.  '^, 
p.  632).  —  H.  Ci 

I.  Bull,  de  la  Soc.  imp.  des  antiquaires  de  France,  1866,  pp.  99  et  seq.,  et  109,  notes 
de  MM.  Allmer  et  de  Witte. 


De  la  divinité  gauloise  assimilée  à  Dis  Pater.  5 

des  nuits;  et  de  même,  pour  compter  la  date  des  naissances  ou  les 
commencements  de  mois  ou  d'années,  c'est  toujours  la  nuit  qu'ils 
prennent  pour  point  de  départ.  » 

Ainsi  parle  César  qui  fait  allusion  à  une  ancienne  légende  druidique  '. 
Dans  le  paragraphe  précédent,  il  rappelle  le  culte  dont  les  Gaulois 
honoraient  Mercure,  Apollon,  Mars,  Jupiter  et  Minerve,  donnant  ainsi 
les  noms  de  divinités  romaines,  à  cause  de  l'analogie  des  attributs,  à 
des  dieux  et  à  des  génies  gaulois  :  Jupiter  et  Mercure  sont  donc  bien 
distincts  de  Dis  Pater;  or,  nous  venons  de  voir  que  la  statuette  de 
Prémeaux,  par  suite  de  la  comparaison  des  monuments,  devait  être 
assimilée  à  Dis  Pater  ;  il  faut  donc  renoncer,  à  l'avenir,  à  lui  donner  un 
autre  nom.  Ce  fait  me  semble  acquis,  et  aussi  que  la  divinité  principale 
des  Gaulois  avait,  pour  les  Romains,  quelque  analogie  avec  Pluton  et 
les  dieux  infernaux. 

Il  nous  est  donc  permis  d'affirmer  que  dans  la  Gaule  romaine,  alors 
que  l'ancien  culte  était  proscrit,  on  garda  encore  le  souvenir  et  le 
culte  de  l'ancienne  divinité,  d'une  manière  plus  ou  moins  déguisée. 

Pendant  que  dans  des  laraires,  conservés  dans  les  maisons,  des  Celtes 
attachés  à  l'ancienne  croyance  glissaient  des  statuettes  qui,  à  la  rigueur, 
pouvaient  rappeler  Jupiter,  Hercule  ou  Vulcain,  d'autres,  sur  des  autels 
de  pierre,  faisaient  en  sorte  que  le  chef  de  la  race  gauloise  pût  être  pris 
pour  Pluton;  ils  se  contentaient  même  quelquefois  de  graver  ses  attri- 
buts isolés. 

M.  A.  de  Longpérier  a  rapproché  les  statuettes  qui  nous  occupent  en 
ce  moment  du  Zeùç  çOaoç,  honoré  à  Mégalopolis  d'Arcadie,  et  qui, 
suivant  Pausanias,  était  chaussé  de  cothurnes,  tenait  d'une  main  un 
vase  à  boire  et  de  l'autre  un  thyrse^.  Mais,  du  moment  où  il  est  établi 
que  notre  dieu  gaulois  tient  un  marteau  à  long  manche,  nous  ne  pouvons 
le  comparer  au  Jupiter  auquel  Polyclète  d'Argos  avait  donné  les  attri- 
buts de  Bacchus.  Je  ne  retrouve  guères  le  marteau,  comme  symbole 
d'une  divinité  infernale,  que  chez  les  Etrusques  et  dans  le  nord  de 
l'Italie;  or,  notre  dieu  avait  un  caractère  infernal  puisque  les  Gallo- 
Romains  eux-mêmes  l'assimilèrent  à  Pluton  5. 


1.  césar,  Bell,  gall.,  VI,  17  et  18. 

2.  Notice  des  bronzes  antiques  exposés  dans  les  galeries  du  Louvre,  p.  j. 

3.  [J.  Grimm  nous  apprend  dans  sa  Deutsche  Mythologie*  (p.  951)  que  le  démon  est 
quelquefois  comparé  à  un  marteau  dans  les  traditions  germaniques,  et  qu'il  est  même 
désigné  chez  saint  Jérôme  sous  le  nom  de  Malleus.  —  Le  marteau  (parfois  remplacé  par 
une  massue)  est  aussi  un  des  attributs  du  dieu  Scandinave  Thôrr;  mais  ce  marteau  mer- 
veilleux qui,  lorsque  le  dieu  l'a  lancé  contre  un  ennemi,  revient  dans  sa  main  après  avoir 
porté  coup,  n'est  autre  chose  que  la  foudre  et  doit  originairement  n'avoir  été  qu'une 
arme  de  jet.  En  effet  hamar,  nous  dit  Grimm,  a  primitivement  signifié  «  pierre  »   avant 


6  De  la  divinité  gauloise  assimilée  à  Dis  Pater. 

Le  marteau  est  porté  par  Cham,  dont  les  Romains  ont  fait  leur 
Charon.  Cham  est  représenté,  tantôt  habillé  et  chaussé,  tantôt  nu;  il  a 
quelquefois  sur  les  épaules  une  peau  de  bête  dont  la  tête  lui  sert  de 
coiffure:  lorsqu'il  est  habillé,  on  aperçoit  parfois  sur  ses  vêtements  des 
ornements  qui  ne  sont  pas  sans  analogie  avec  ceux  que  j'ai  signalés 
sur  le  sagum  du  dieu  gaulois.  En  Etrurie,  le  gardien  des  portes  de 
l'enfer,  accompagné  de  Cerbère  sur  quelques  monuments,  tient  toujours 
un  marteau  ou  une  masse,  dont  il  se  sert  pour  assommer  ceux  qui  sont 
voués  à  la  mort.  La  grande  différence  qui  existe  entre  le  Charon  étrusque 
et  le  dieu  gaulois,  c'est  que  le  premier  est  représenté  sous  des  traits 
hideux  qui  rappellent  les  diableries  du  moyen-âge,  tandis  que  le  Dis 
pater  des  Celtes  a  un  type  noble  et  majestueux.' 

Cette  idée  du  marteau,  en  Etrurie,  se  retrouve  dans  une  légende 
conservée  dans  les  Parallèles  de  Plutarque  ;  j'emprunte  la  traduction  de 
ce  passage  à  Ch.  Lenormant  qui  voulait  que  ce  marteau  fût  assimilé  à 
Vascia.  Cette  hypothèse  ne  peut  se  soutenir  puisque  Vascia,  ayant  la 
forme  d'un  pic,  carré  d'un  côté,  pointu  de  l'autre,  n'a  aucun  rapport  avec 
le  marteau.  Voici  la  légende  :  «  La  peste  ayant  frappé  les  habitants  de 
Paieries,  l'oracle  annonça  que  le  mal  prendrait  fin  si  l'on  sacrifiait  tous 
les  ans  une  vierge  à  Junon;  la  superstition  avait  maintenu  ce  sacrifice 
barbare,  lorsque  le  sort  tomba  sur  une  jeune  fille  nommée  Valeria 
Luperca.  Celle-ci  ayant  tiré  le  glaive  allait  s'en  frapper,  quand  un 
aigle  se  précipitant  dans  son  vol,  enleva  l'instrument  du  sacrifice,  et, 
en  même  temps  qu'il  déposait  sur  les  offrandes  un  marteau  emmanché 
dans  un  bâton  court,  il  jeta  l'épée  sur  une  génisse  qui  paissait  dans  le 
voisinage  du  temple.  La  vierge  s'en  étant  aperçue,  sacrifia  la  génisse, 
et  ayant  pris  le  marteau,  elle  s'en  alla  de  maison  en  maison,  réveillant 
les  malades  en  les  frappant  avec  douceur,  et  disant  à  chacun  de  se  bien 
porter.  Cette  cérémonie  mystérieuse  se  pratique  encore  à  Paieries^.  » 

de  s'appliquer  à  des  instruments  faits  de  pierre.  Chez  les  Romains,  le  silex,  Jovis  lapis, 
était  également  considéré  comme  un  symbole  de  la  foudre  et  recevait  les  serments  : 
«  Lapident  silicem  tenebant  juraturi  per  Jovem  lise  verba  dicentes  :  «  si  sciens  fallo,  tum 
me  Dispiter  salva  urbe  arceque  bonis  ejiciat,  uti  ego  hune  lapidem  !  »  Pauli  Epitome,  p. 
115,  dans  l'édition  de  Festus  donnée  par  G.  0.  Millier  (Leipzig,  1839),  cf.  Polybe,  III, 
26,  et  Tite-Live,  I,  24  et  IX,  $.  Voyez  Grimm,  Dctit.  Mytlir,  pp.  164-166  et  1171, 
et  Preller,  Rœmisciie  Mythologie*,  pp.  218-223.  Remarquons  à  ce  propos  qu'on  croit 
encore  aujourd'hui  en  Cornwall  à  la  présence  réelle  du  tonnerre  dans  des  objets  de  même 
nature  :  «  Rheumatism  is  attempted  to  be  cured  by  a  «  boiled  thunderbolt  »,  in  other 
words,  a  boiled  celt,  supposed  to  be  a  thunderbolt.  This  is  boiled  for  hours  and  the  water 
then  dispensed  to  rheumatic  patients.  »  J.  O.  Halliwell  :  Rambles  in  Western  Cornwall 
(Londres,  1861,  in-8",  p.  205).  Des  superstitions  analogues  se  rencontrent  aussi  en 
France;  voir  Cochet  :  La  Seine-Inférieure  (Paris,  1864,  in-4),  p.  15,  n.  4.  —  H.  G.| 

1.  J.  Ath.  Ambrosch,  de  Charontc  Etnisco  comm.   antiq.  (Breslau,  1837). 

2.  Nouv.  Ann.  de  l'Institut  archéol.,  t.  II,  p.  143,  Mém.  de  Gh.  Lenormant  sur  les 
deniers  romains  portant  le  nom  de  L.  Valerius  Acisculus. 


De  Li  divinité  gauloise  assimilée  à  Dis  Pater.  7 

Cette  légende  paraît  indiquer  la  fin  de  l'ancien  culte  étrusque  et  des 
sacrifices  humains  :  le  marteau  de  Charu  devient  un  instrument  de 
guérison  après  avoir  été  un  instrument  léthifère.  Chez  les  Romains,  le 
souvenir  du  dieu  étrusque  se  conserva  longtemps.  C'était  un  person- 
nage muni  d'un  marteau  qui  était  chargé  d'enlever  les  cadavres  des 
gladiateurs  tombés  dans  les  combats  du  cirque,  et  ce  personnage,  au 
dire  de  Tertullien,  était  appelé  Dis  Pater  :  «  Risimus  et  meridiani  ludi 
de  deis  lusum,  quo  Dis  Pater,  Jovis  frater,  gladiatorum  exequias  cum 
malleo  deducit'.  »  A  la  rigueur  on  pourrait  croire  que  Tertullien  a 
pensé  au  dieu  gaulois,  car  il  parle  de  Dis  pater  et  non  pas  de  Charon, 
et  ce  texte  est  en  quelque  sorte  expliqué  par  le  bas-relief  d'Ober-See- 
bach  qui  nous  a  donné  le  sens  de  toute  la  série  de  statuettes  dont  je 
m'occupe  en  ce  moment. 

La  numismatique  gauloise  vient  aussi  nous  fournir  la  preuve  que  le 
marteau  jouait  un  certain  rôle  dans  les  croyances  de  nos  ancêtres. 
Voici  deux  statères  d'or  de  très-bon  style,  par  conséquent  d'une  date 
reculée,  que  l'on  a  retrouvés  sur  le  territoire  jadis  occupé  par  les 
Baiocasses.  Sur  le  premier,  le  marteau  est  gravé  devant  le  cheval  attelé; 
le  personnage  qui  guide  ce  dernier  tient  un  de  ces  petits  navires  ana- 
logues à  celui  qui  a  fait  partie  de  la  collection  de  feu  M.  Houbigant,  et 
qui  est  aujourd'hui  au  Musée  de  Beauvais  ;  sous  le  cheval  est  une  épée. 
Le  second  statère  représente  Vauriga  tenant  de  la  droite  une  épée  et  de 
la  gauche  une  lanière  au  bout  de  laquelle  est  le  marteau  qu'il  semble 
avoir  lancé;  sous  les  pieds  du  cheval  est  une  sorte  de  vase  ou  de 
lampe. 


Je  crois  que  nous  avons  ici  une  représentation  vraiment  gauloise  du 
dieu  au  marteau;  je  dis  vraiment  gauloise,  parce  que  les  statères  sont 
antérieurs  à  la  conquête,  tandis  que  les  autels  et  les  statuettes  sont 
postérieurs  à  l'époque  où  cessa  l'indépendance  gauloise. 


I.  Tertullien,  Ad  Nationes,  I,  10. 


8  De  la  divinité  gauloise  assimilée  à  Dis  Pater. 

Les  Etrusques  ont-ils  emprunté  leur  Charu  aux  Gaulois  ?  je  ne  veux 
pas  aujourd'hui  aborder  ce  côté  de  la  question.  Je  me  borne,  après 
avoir  constaté  des  faits  qui  me  semblent  certains,  à  faire  remarquer  que 
des  découvertes  archéologiques  récentes  permettront  de  constater  les 
rapports  internationaux  qui,  à  une  époque  où  la  tradition  historique  fait 
défaut,  existaient  entre  la  Gaule  et  l'Étrurie. 

Je  note  aussi  que  la  rareté,  sur  notre  sol,  des  inscriptions  portant  le 
nom  de  DIS  PATER  semble  indiquer  que  les  Gallo-Romains  ne  cher- 
chaient pas  à  nommer  le  dieu  mystérieux  que  les  Romains  appelaient 
Pluton. 

Anatole  de  Barthélémy. 


LA 


MINIATURE    IRLANDAISE, 


SON  ORIGINE  ET  SON   DÉVELOPPEMENT. 


Les  initiales  ornées  dont  les  enlumineurs  du  moyen-âge  ont  embelli 
nombre  de  manuscrits  n'attirent  pas  seulement  l'attention  par  la  variété 
de  l'invention,  la  délicatesse  de  l'exécution  et  le  goût  qui  se  montre 
dans  le  dessin  aussi  bien  que  dans  le  coloris  ;  elles  sont  aussi  instructives 
pour  ceux  qui  s'intéressent  au  développement  historique  de  l'art.  Elles 
ont  même  pour  ces  études  d'autant  plus  d'importance  qu'elles  réunissent 
deux  avantages  déjà  rares  par  eux-mêmes  :  remarquable  conservation  et 
date  certaine.  Aussi  bien  garanties  de  l'influence  de  la  lumière,  de  l'air 
et  de  l'humidité  que  des  accidents,  elles  ont  souvent  gardé  une  fraîcheur 
qu'on  ne  retrouve  dans  aucune  peinture  d'une  époque  aussi  reculée. 
Elles  sont  en  outre  généralement  accompagnées  de  renseignements 
exacts  sur  l'âge  de  leur  composition,  et,  lorsque  par  hasard  ces  rensei- 
gnements nous  manquent,  la  diplomatique  nous  fournit  sur  cet  âge  des 
renseignements  exacts  par  l'examen  des  caractères  de  l'écriture. 
L'importance  de  ces  miniatures,  pour  les  époques  antérieures  au  onzième 
siècle,  est  d'autant  plus  grande  que  ce  sont  presque  les  seuls  monuments 
qui  nous  restent  de  la  peinture  d'alors. 

Les  manuscrits  irlandais,  je  veux  dire  les  manuscrits,  soit  rédigés  en 
langue  irlandaise,  soit  copiés  par  des  moines  irlandais  ou  dans  des 
couvents  irlandais,  appellent  d'une  façon  spéciale  l'attention  par 
le  style  tout  particulier  de  leurs  initiales ,  et  même  ce  style  se 
distingue  à  tel  point  des  autres  styles  que  l'on  connaît  au  moyen-âge, 
que  quelques  personnes  ont  été  amenées  à  lui  supposer  un  rapport  étroit 
avec  les  formes  artistiques  les  plus  éloignées.  On  a  cru  lui  trouver  des 
ressemblances  avec  les  productions  de  l'ancien  art  égyptien.  La  vague 
assertion  que  des  moines  égyptiens  avaient  paru  dans  les  Iles  Britan- 


10  La  Miniature  Irlandaise. 

niques  arrivait  pour  confirmer  l'hypothèse  que  des  relations  de  ce  genre 
avaient  introduit  l'influence  de  l'art  égyptien  dans  les  monastères  de 
Pirlande.  Mais,  d'autre  part,  la  comparaison  des  miniatures  anglo- 
saxonnes,  françaises  et  allemandes,  montre  entre  celles-ci  et  les  minia- 
tures irlandaises  une  certaine  parenté,  et  jusqu'au  xii*-'  siècle  et  même 
au-delà,  on  peut  suivre  un  développement  continu  du  style  de  ces 
miniatures  auquel  les  initiales  irlandaises  servent  de  point  de  départ. 
Les  initiales  irlandaises  ont  donc,  pour  l'histoire  du  développement 
de  la  peinture  un  double  intérêt  :  d'abord  leur  origine,  et  ensuite,  leurs 
rapports  avec  ce  qu'on  appelle  l'ornementation  byzantino-romane.  C'est 
pour  ces  motifs  que  je  leur  ai  consacré  quelque  attention,  et  j'accède 
volontiers  au  désir  que  m'a  exprimé  le  Directeur  de  la  Revue  Celtique  en 
consignant  ici  mes  observations  et  mes  réflexions  sur  ce  sujet.  Sans  avoir 
la  prétention  d'élucider  complètement  cette  intéressante  question,  je 
voudrais  du  moins  en  provoquer  l'étude. 

I 

L'usage  d'orner  de  miniatures  les  livres  d'Église  régnait  déjà  dans 
les  lies  Britanniques  au  vii^  et  peut-être  même  au  vie  siècle  de  notre 
ère.  Moines  et  ecclésiastiques  pratiquaient  cet  art  avec  une  infatigable 
patience  et  avec  un  goût  tout  particulier.  Ils  donnaient  une  atten- 
tion toute  spéciale  aux  initiales  qu'ils  dessinaient  à  la  plume,  avec 
un  soin  merveilleux  et  d'une  façon  tout-à-fait  artistique,  et  ils  les 
enluminaient  de  couleurs  bigarrées  et  éclatantes.  Ils  composaient  ces 
lettres  de  rubans  plus  ou  moins  larges;  ils  les  ornaient  de  lignes  artiste- 
ment  entrelacées  et  y  introduisaient  des  figures  d'hommes  ou,  plus 
souvent,  d'animaux. 

Ces  entrelacs  forment  ordinairement  l'extrémité  des  rubans,  mais  ils 
servent  aussi  à  en  orner  la  surface  comme  des  fils  de  couleur  fixés  sur 
un  fond  noir;  tantôt  ils  s'étendent  sur  toute  la  superficie  des  rubans, 
tantôt  ils  remplissent  des  parties  isolées  des  lettres.  Les  spirales,  ou 
volutes,  aux  enroulements  pressés  caractérisent  surtout  ce  genre  d'ini- 
tiales où  l'élégance  du  dessin  suppose  une  longue  pratique  et  une  grande 
habileté.  Ces  mêmes  ornements  s'ajoutent  comme  fioritures  aux  traits 
qui  forment  les  lettres  ou  bien  remplissent  l'espace  entre  eux.  Un  grand 
nombre  d'initiales  n'ont  que  ces  lignes  en  spirale  pour  tout  ornement. 
Les  figures  d'hommes  et  d'animaux  sont  autrement  employées.  Le  plus 
souvent,  les  extrémités  des  rubans  sont  ornées  de  têtes  d'hommes  ou 
d'animaux.  Il  arrive  aussi  qu'un  semblable  ruban  se  termine  en  haut  par 


La  Miniature  Irlandaise.  1 1 

une  tête  et  en  bas  par  un  pied,  qu'il  reçoit  même  quelquefois  des 
mains  ou  des  ailes,  de  sorte  que  les  lignes  et  les  lettres  même  se  trans- 
forment en  hommes,  dragons,  oiseaux,  de  formes  fantastiques,  avec  un 
corps  atrophié  et  souvent  singulièrement  contourné.  Ils  donnent  surtout 
aux  figures  un  aspect  grimaçant.  Des  figures  isolées  se  rencontrent 
rarement,  surtout  dans  les  plus  anciens  manuscrits.  Mais  là  où  elles  se 
rencontrent,  elles  ont  également  un  aspect  grotesque.  Mais  ce  ne  sont, 
en  aucune  façon,  des  essais  grossiers  et  naïfs  de  représenter  des  êtres 
réels;  ces  figures  sont  exécutées  dans  un  style  traditionnel  et,  en  quelque 
sorte,  d'après  un  type  donné.  Quelques  unes  mêmes  sont  formées  par 
des  fioritures  calligraphiques  qui  ont  évidemment  pour  but  de  montrer 
l'habileté  du  dessinateur  et  de  prêter  au  dessin  un  attrait  tout  parti- 
cuher. 

On  a  appelé  les  miniatures  de  cette  espèce  tantôt  irlandaises,  tantôt 
anglo-saxonnes.  Les  plus  anciennes  proviennent  en  partie  d'Irlande, 
en  partie  de  la  Grande-Bretagne  septentrionale,  et  il  n'est  pas  douteux 
qu'elles  sortent  d'une  école  irlandaise  ou,  tout  au  moins,  celtique.  On  sait 
qu'en  $96  le  pape  Grégoire  le  Grand  envoya  saint  Augustin  en  Grande- 
Bretagne  pour  prêcher  l'Évangile  aux  Anglo-Saxons,  et  l'on  sait  aussi 
à  quelle  circonstance  la  légende  rapporte  cette  mission.  Le  Pape,  tra- 
versant à  Rome  le  marché  consacré  à  la  vente  des  esclaves,  y  avait 
remarqué  quelques  beaux  jeunes  gens  et,  apprenant  leur  nationalité, 
s'était  écrié  :  «  Anglisunt;  angell  forent,  si  christiani  essent.  » 

Augustin  vint  donc  en  Grande-Bretagne,  mais  dans  une  réunion 
d'ecclésiastiques,  il  rencontra  grande  résistance;  on  ne  reconnut  pas 
les  livres  sacrés  qu'il  avait  apportés,  et  on  ne  voulut  pas  se  soumettre  à 
quelques  unes  des  prescriptions  de  l'Eglise  de  Rome  ;  car  il  existait 
déjà  une  Église  Britannique  '  qui  s'était  conservée  du  temps  de  la  domi- 
nation des  Romains.  Déjà  vers  4^0,  peu  après  le  départ  des  Romains  de 
Grande-Bretagne,  saint  Patrice  avait  apporté  le  christianisme  en  Irlande; 
et  des  cloîtres  irlandais  qui,  isolés  comme  ils  étaient,  voyaient  fleurir 
en  paix  les  études  théologiques,  sortirent,  au  vi''  siècle,  de  nombreux 
apôtres  qui  parcoururent  le  continent.  Bien  avant  même  le  voyage  de 
saint  Augustin  en  Angleterre,  saint  Columba  avait,  en  565,  quitté 
l'Irlande  pour  la  Grande-Bretagne  septentrionale,  dans  le  but  de  prêcher 

I.  [Pour  éviter  la  confusion  qui  existe  en  français  lorsqu'on  parle  de  Bretons  ou  de 
choses  bretonnes,  à  moins  qu'on  ne  dise  si  l'on  a  en  vue  la  Grande-Bretagne  ou  la  Bretagne 
armoricaine,  nous  réserverons  dans  cette  Revue  le  nom  de  Bretons  aux  Bretons  de  France. 
Nous  désignerons  par  le  nom  de  Britannes  (forme  francisée  du  latin  Britannï)  les  Bretons 
d'outre-Manche,  et  nous  emploierons  Britannique  comme  adjectif  de  Britanne.  Que  les 
puristes  nous  pardonnent  ce  néologisme  pour  l'amour  de  la  clarté!  —  H.  G.] 


12  La  Miniature  Irlandaise. 

l'Évangile  aux  Pietés,  et  il  avait  fondé  dans  l'île  d'Hy'  un  monastère  plus 
tard  fameux.  On  attribuait  à  saint  Columba  un  évangéliaire  qui  venait 
de  la  cathédrale  de  Kells,  en  Irlande,  mais  dont  on  perd  la  trace  en 
1632.  Ce  qu'on  appelle  aujourd'hui  «  Manuscrit  de  Kells  »  ou  de  saint 
Columba*  est  un  Évangéliaire  qui  possède  les  plus  splendides  initiales 
que  l'on  connaisse  en  ce  genre.  Elles  sont  d'un  art  si  riche  que 
M.  Digby  Wyatt  a,  de  désespoir,  renoncé  à  les  dessiner.  Pour- 
tant M.  Westwood,  dans  sa  récente  publication',  a  rempli  quatre  pages 
de  reproductions  de  ce  manuscrit.  Il  est  fort  douteux  que  le  «  Manu- 
scrit de  Kells  »  remonte  au  temps  de  saint  Columba,  et  probablement 
il  n'est  pas  plus  ancien  que  le  célèbre  «  Manuscrit  de  saint  Cuthbert^,  » 
appelé  aussi  «  Manuscrit  de  Durham  »  parce  que,  dans  le  transfert  du 
siège  épiscopal  de  Lindisfarne  à  Durham,  il  a  été  transporté  dans  la 
cathédrale  de  cette  dernière  ville.  Après  le  «  Ms.  de  Kells,  »  c'est  ici 
que  nous  trouvons  les  plus  belles  et  les  plus  riches  initiales  de  cette 
espèce J.  Ce  manuscrit  provient  de  l'école  qu'avait  fondée  l'irlandais 
Aidanj  premier  évêque  de  Lindisfarne.  Saint  Cuthbert  fut  le  sixième 
évêque  de  Lindisfarne  (684-688)  et,  d'après  d'anciens  témoignages, 
était  aussi  un  Irlandais*^.  Mais  le  ms.  a  reçu  le  nom  d'évangile  de  saint 
Cuthbert  parce  qu'il  a  été  copié  en  l'honneur  de  Dieu,  de  saint  Cuthbert 
et  de  tous  les  saints  de  l'île  Lindisfarne.  C'est  ce  qui  résulte  d'une  note 
ajoutée  par  le  prêtre  Aeldred  qui  a,  entre  les  lignes  de  ce  texte  latin  des 
Évangiles,  écrit  une  traduction  anglo-saxonne.  D'après  le  même  témoi- 
gnage, ce  ms.  est  de  la  main  de  l'évêque  Eadfrith  ou  Egbert  (698-721) 
et  c'est  aussi  celui-ci  qui,  sans  nul  doute,  a  exécuté  les  miniatures,  car 
Aeldred  ne  nomme  comme  s'étant  occupé  aussi  du  ms.  que  l'évêque 
Aethiiwald  qui  en  fabriqua  la  reliure,  et  l'anachorète  Billfrith  qui  l'orna 


1.  [Cette  île  est  plus  connue  sous  le  nom  d'Iona,  mais  lona  est  une  forme  relativement 
moderne  et  sortie  d'une  erreur  paléographique.  Voyez  :  W.  Reeves  :  Adamnan's  Life  0/ 
St  Columba  (Dublin,  1857,  in-4'',  publ.  par  Vlrish  Archteological  Society),  pp.  258-262  et 
413.—  H.  G.] 

2.  Ce  ms.  se  trouve  dans  la  bibliothèque  de  Trinity  Collège,  à  Dublin. 

5.  Miniatures  and  Ornaments  of  Anglo-Saxon  and  trish  Manuscripts,  Oxford,  1868, 
fol. 

4.  Ce  ms.  se  trouve  au  British  Muséum  de  Londres  {Cotton.  mss.,  Nero,  D,  IV). 

$.  On  en  trouvera  des  fac-similé  dans  Westwood  :  P ald-ographia  sacra  pictoria  (Londres, 
1843),  pl-  '  ;  psr  le  même  auteur  :  Miniatures  and  Ornaments  of  Anglo-Saxon  and  Irish 
Manuscripts,  pl.  12;  Humphreys,  llluminated  Books,  pl.  2;  Digby  Wyatt,  The  art  of  lllu- 
minating  (Londres,  1860),  pl.  5  et  4;  The  Lindisfarne  and  Rushworth  Gospels  (Publica- 
tions of  the  Surtees   Society). 

6.  [Le  savant  Lanigan  {Ecclesiastical  History  of  Ireland,  vol,  III,  pp.  88  et  suiv.)  ne 
considère  pas  Cuthbert  comme  un  Irlandais.  Mais  la  nationalité  de  Cuthbert  importe  peu 
dans  la  question  présente  puisqu'il  avait  été  élevé  dans  des  couvents  irlandais  du  Northum- 
berland,etqu'àcetteépoquele  Northumberland subissait  dans  une  certaine  mesure  l'influence 
delà  civilisation  irlandaise.  —  H.  Cl 


La  Miniature  Irlandaise.  1 3 

d'or,  d'argent  et  de  pierres  précieuses'.  La  Bibliothèque  impériale  de 
Paris  possède  un  semblable  évangéliaire  que  l'apôtre  anglo-saxon  des 
Frisons,  saint  Willibrod  (-|-  730),  apporta  d'outre-Manche  ^ 

Des  miniatures  de  même  style  se  rencontrent  aussi  dans  les  mss.  des 
couvents  qui  ont  été  fondés  sur  le  continent  par  des  Irlandais  dans 
les  VI"  et  vue  siècles.  Mais  ces  miniatures  sont,  d'une  part,  exécutées 
avec  moins  de  soin  et  ont^  en  quelque  sorte,  dégénéré  (citons  celles 
du  cloître  de  St-Gall  publiées  par  M.  Keller  5);  d'autre  part  elles  trahissent 
déjà  une  influence  franque  (on  le  voit  par  exemple  dans  l'évangéliaire 
plus  récent  de  la  bibliothèque  de  WolfenbûtteU,  qui  vient  du  cloître  de 
Kronweissenburg,  en  Alsace).  Mais  la  parenté  de  ces  miniatures  avec 
les  miniatures  anglo-saxonnes,  qui  sont  plus  anciennes,  nous  permet  de 
désigner  comme  irlandais,  ou  au  moins  comme  celtique,  le  style  qui  s'y 
rencontre. 

Quand  on  se  demande  quelle  est  l'origine  de  cette  ornementation, 
rien  ne  semble  plus  invraisemblable  au  premier  coup-d'œil  que  la  pensée 
d'un  rapprochement  avec  l'art  des  Romains,  et,  en  fait,  des  connaisseurs 
anglais  jugent  qu'il  n'y  a  ici  aucun  élément  dont  l'origine  soit  dans 
l'antiquité  classique.  Et  pourtant,  on  ne  peut  entièrement  nier  que  cet 
art  n'ait  quelques  points  de  contact  avec  l'art  romain.  Des  rubans  entre- 
lacés auxquels  se  mêlent  des  figures  d'hommes  et  d'animaux  forment 
aussi  partie  intégrante  de  la  décoration  antique,  et  pouvaient  se  com- 
biner d'une  manière  fort  variée  ;  et  parmi  les  rubans  et  les  entrelacs 
des  mss.  irlandais  quelquefois  se  rencontre  une  ressemblance  frappante 
avec  les  formes  antiques  du  méandre.  L'histoire  des  lies  Britanniques 
justifie  la  supposition  que  le  goût  des  Romains  peut  avoir  laissé  quelques 
traces  chez  les  Britannes.  L'écriture  que  saint  Patrice  introduisit  en 
Irlande  était,  dans  ses  caractères  essentiels,  l'écriture  romaine  du  temps, 
et  la  coutume  d'orner  de  dessins  les  livres  d'Eglise  a  dû  probablement 
être  adoptée  de  bonne  heure  par  les  Romains.  On  attache  aussi  de 
l'importance  à  ce  fait  que  saint  Augustin  apporta  avec  lui  en  Angleterre 
des  livres  qui  peut-être  étaient  ornés  de  miniatures,  et  on  dit  que,  plus 

1.  Voyez  Tht  Lindisfarnt  and  Rushmrth  Gospels,  dans  les  Publications  of  tke  Surtees 
Society,  vol.  48,  i86j,  p.  XLIV.  —  Dugdale  s'est  trompé  lorsqu'il  a  dit  qu'Aethilwald 
avait  chargé  Billfrith  de  l'exécution  des  miniatures,  et  cette  erreur  a  été  répétée  par 
MM.  Westwood  et  Wyatt. 

2.  Suppl.  lat.,  n»  693.  —  [Il  n'est  pas  inutile  d'observer  que  saint  Willibrod  venait 
directement  d'Irlande,  où  il  avait  passé  douze  ans,  quand  il  se  rendit  chez  les  Frisons. 
—  H.  G.] 

; .  Ferd.  Keller  :  Bilder  und  Schriftzùge  der  Irischen  Manuscripten,  dans  les  Mittheilun- 
gen  der  antiquarischen  Gesellschaft  zu  Zurich,  Band  VII. 

4.  Mss.  Weissenb.,  n°  6i.  De  toutes  les  initiales  qu'on  a  publiées,  je  n'en  connais  pas 
qui  soient  aussi  caractéristiques  que  celles-ci. 


14  La  Miniature  Irlandaise. 

tard,  un  évêque  de  Canterbury,  le  savant  grec  Théodore  de  Tarse  (668- 
692)  peut  avoir,  au  moyen  de  mss.  byzantins,  répandu  en  Angleterre 
la  connaissance  de  l'ornementation  antique.  Nous  trouvons  en  effet  dans  les 
mss.  byzantins  comme  un  souvenir  de  l'ornementation  des  mss.  irlan- 
dais. Le  fameux  ms.  de  Dioscorides  conservé  à  Vienne,  qui  a  été  écrit 
vers  l'an  500  pour  une  parente  de  l'empereur  Justinien,  présente  quel- 
ques ornements  assez  simples  et  en  soi  insignifiants  dont  la  méthode  est 
aussi  mise  à  profit  dans  les  initiales  irlandaises;  elle  consiste  à  former 
les  lettres  avec  des  lignes  de  points  et  à  terminer  les  traits  de  l'écriture 
par  des  paraphes  en  forme  de  spirales.  On  trouve  des  rubans  entortillés 
qui  se  terminent  en  têtes  d'animaux  dans  un  ms,  grec  qui  contient  en 
outre  des  Lectiones  evangeliorum  '  et  que  l'écriture  nous  fait  rapporter 
au  vii^  ou  au  viiie  siècle.  Ce  ms.  a  généralement  dans  !'£  le  trait  hori- 
zontal en  forme  de  main;  et,  dans  le  T,  le  trait  perpendiculaire  est 
entouré  d'un  serpent,  ou  se  termine  en  haut  par  une  main  qui  saisit  et 
tient  le  trait  horizontal.  Sans  doute  ce  ne  sont  que  de  faibles  ressemblances 
qui  indiquent  tout  au  plus  une  source  commune  et  ce  n'est  que  dans  des 
mss.  byzantins  d'une  époque  beaucoup  plus  récente  que  s'est  développée 
davantage  la  composition  artistique  d'initiales  où  entrent  des  figures 
d'hommes  et  d'animaux.  Mais  le  ms,  de  saint  Cuthbert  renferme  aussi 
une  preuve  irréfutable  que  des  prototypes  byzantins  ont  été  mis  en  usage. 
Non-seulement  les  images  des  Evangélistes  sont  dans  le  style  byzantin, 
mais,  avant  leurs  noms,  se  rencontre  trois  fois  «  0  agios  «  et  une  fois 
«  0  agius,  «  transcription  du  grec  0  y.'(ioq. 

Les  plus  anciens  mss.  d'une  partie  du  continent  occidental,  les  mss,  des 
Wisigoths,  des  Burgondes  et  des  Francs,  méritent  de  fixer  notre  atten- 
tion. Tous  emploient,  aussi  bien  que  les  mss.  irlandais,  des  lignes  entre- 
lacées et  des  rubans  avec  des  formes  d'animaux;  ils  emploient  en  outre  des 
ornements  empruntés  au  règne  végétal,  ce  qui  manque  aux  mss,  irlan- 
dais. Mais,  d'un  autre  côté,  nous  ne  retrouvons  pas  ici  les  spirales 
irlandaises,  et  les  figures  d'animaux  se  bornent  presque  exclusivement 
aux  oiseaux  et  aux  poissons,  ce  qui  peut  s'expliquer  par  une  allusion  à 
l'Esprit-Saint  et  au  symbole  bien  connu  de  l'r/ôuç.  Mais  chaque  peuple 
a  développé  cette  ornementation  d'une  façon  différente,  bien  que  tous 
emploient  les  mêmes  éléments  antiques.  Les  initiales  des  Wisigoths 
que  le  comte  Bastard  et  après  lui  Wyatt  (pi.  8)  ont  publiées  d'après 
un  Ms.  qui  se  trouve  à  la  Bibliothèque  Impériale  de  Paris,  se 
distinguent  par  un  puissant  feuillage  et,  par  là,  se  rapprochent  le  plus 

I    Bibliothèque  de  Munich. 


La  Miniature  Irlandaise.  1 5 

de  la  décoration  antique.  Particulièrement  remarquables  sont  les  initiales 
Burgondes  dont  nous  ne  connaissons  qu'un  petit  nombre.  Des  spécimens 
en  ont  été  publiés  récemment  à  Genève'^  et  de  plus  remarquables  encore 
se  rencontrent  à  Wolfenbuttel  dans  un  des  mss.  de  Kronweissenburg. 
Ces  initiales  ne  renferment  ni  entrelacs  ni  rubans,  mais  retiennent  les 
poissons  et  les  oiseaux  au  moyen  de  couronnes  et  de  guirlandes.  Le 
dessin  et  le  coloris  en  sont  exécutés  à  la  légère  et  superficiellement;  et 
elles  ne  peuvent  se  comparer  aux  initiales  irlandaises,  tandis  qu'elles 
rappellent  davantage  et  d'une  façon  plus  directe  les  éléments  de  la 
décoration  antique.  Enfin,  les  plus  anciennes  initiales  franques  sont  plus 
simples  et  se  rapprochent  davantage  de  celles  des  Wisigoths,  mais  ont 
peut-être  aussi  subi  l'influence  de  l'art  des  cloîtres  irlandais. 

Si  donc  nous  reconnaissons  partout  un  fonds  commun  d'art  antique, 
nous  observons  pourtant  un  caractère  particulier  dans  l'ornementation 
irlandaise.  Ce  qui  distingue  cette  dernière,  c'est  d'abord  l'absence  de 
plantes,  puis  une  façon  de  traiter  les  figures  qui  témoigne  d'un  penchant 
particulier  à  l'extraordinaire,  au  grotesque  et  au  baroque,  et  enfin  deux 
éléments  dont  ailleurs  on  ne  rencontre  (et  bien  rarement  encore) 
que  de  faibles  traces,  à  savoir  la  spirale,  et  sinon  une  imitation  grossière, 
du  moins  l'indication  de  l'entrelacement  tressé  d'une  corbeille  ou  d'une 
natte,  que  les  scribes  emploient  quelquefois  pour  remplir  le  fonds.  Cet 
entrelacement  sai  generis  se  rencontre  assez  souvent  en  Irlande  sur  des 
croix  de  pierre  2  avec  d'autres  décorations  qui  ressemblent  à  celles  des 
mss. 

Les  spirales  et  l'entrelacement  tressé  forment  donc  l'élément  national 
dans  Pornementation  irlandaise  :  elles  remontent  jusqu'à  l'époque  payenne 
où  elles  étaient  en  usage  chez  les  Celtes  et  aussi  chez  les  Germains,  et 
formaient  presque  les  seuls  ornements  des  ustensiles  que  nous  trouvons 
dans  les  tombes  païennes  de  l'époque  de  bronze.  Là,  cet  entrelacement 
revêt  tout  particulièrement  les  urnes  funéraires,  accompagné  aussi  de 
spirales  et  de  cercles  concentriques.  Mais  la  spirale  domine  dans  les 
agrafes,  les  boucles  d'oreilles  et  autres  objets  de  parure,  formés  de  fils 
de  bronze,  et  surtout  dans  un  ornement  à  deux  spirales  bien  connu,  qui 
était  sans  doute  attaché  sur  la  cuirasse  et  servait  en  même  temps  à 
protéger  la  poitrine.  Les  deux  spirales  de  cet  ornement  sont  quelquefois 
disposées  en  forme  de  lunettes  ou  de  pince-nez,  quelquefois  en  forme 


1 .  Études  paliographigues  et  historiques  sur  des  papyrus  du  VI"  siècle,  en  partie  inédits, 
renfermant  des  homélies  de  saint  Avit  et  des  écrits  de  saint  Augustin.  Genève,  1866. 

2.  [Il  se  rencontre  souvent  aussi  sur  des  monuments  de  pierre  de  l'Ecosse,  de  l'île  de 
Man  et  quelquefois  du  pays  de  Galles.  —  H.  G.] 


i6  La  Miniature  Irlandaise. 

d'S'.  On  trouve  quelquefois  ces  doubles  spirales  dans  les  initiales 
du  ms.  de  saint  Cuthbert.  Le  fac-similé  du  signe  XP  dans  l'édition 
de  la  Surtees  Society  en  donne  l'exemple  le  plus  intéressant.  Un 
semblable  usage  de  ces  spirales  se  comprend  parfaitement  quand  on  pense 
qu'elles  constituaient  depuis  les  temps  les  plus  anciens  jusqu'à  l'époque 
d'Eadfrith  l'ornement  favori  sur  les  ustensiles  et  les  vêtements  des 
Britannes  et  des  Irlandais.  Il  faut  aussi  remarquer  les  énigmatiques 
cercles  concentriques  qu'on  rencontre  sculptés  sur  des  rochers  dans 
l'Irlande  du  Sud,  dans  l'Angleterre  du  Nord,  en  Ecosse  et  dans  les  Iles 
Orkneys.  Dans  le  Northumberland  seul,  on  a,  sur  $3  rochers  et 
pierres,  compté  environ  550  de  ces  figures*.  Leur  signification  est 
entièrement  inconnue,  mais  il  est  permis  de  supposer  qu'elles  ont  pu 
avoir  un  sens  religieux.  Elles  offrent  une  certaine  ressemblance  avec  les 
spirales,  et  si  elles  avaient  eu  autrefois  une  signification  mystique,  on  s'ex- 
pliquerait par  là  comment  elles  ont  pu  être  admises  dans  les  livres  sacrés 
des  chrétiens  d'Irlande. 

A  cette  hypothèse  on  peut  pourtant  objecter  que  les  spirales,  comme 
élément  décoratif,  ne  sont  nullement  étrangères  à  l'art  grec  et  romain. 
Mais  la  spirale  irlandaise  peut  tout  au  plus  se  comparer  à  la  volute  des 
chapiteaux  ioniques,  et  il  est  impossible  que  celle-ci  ait  donné  l'idée 
d'introduire  dans  le  système  de  l'ornementation  irlandaise  une  forme 
aussi  difficile  à  manier,  tandis  qu'aucun  des  peuples  qui  s'établirent  sur 
le  sol  romain  ne  pensa  à  en  faire  usage.  D'autre  part,  on  ne  peut  nier 
un  certain  rapport  entre  la  volute  ionique  et  la  spirale  irlandaise.  On 
sait  en  effet  que  la  décoration  propre  aux  temples  ioniques  vient  d'Asie 
et  qu'on  en  trouve  des  traces  dans  les  anciens  monuments  de  l'Assyrie 
et  de  la  Perse.  Bien  plus,  on  a  souvent  fait  remarquer  la  ressemblance 
frappante  qui  existe  entre  les  spirales  des  tombeaux  pa'iens  du  nord  et 
l'ornementation  que  W.  Gell  a  découverte  sur  les  fragments  d'une  demi- 
colonne,  près  de  ce  qu'on  appelle  «  la  chambre  du  trésor  d'Atrée  »  à 
Mycènes3,  Ce  monument  est,  au  plus  tard,  de  l'époque  héroïque  grecque; 
peut-être  même  appartient-il  à  l'antique  peuple  des  Pélasges,  et  la 
même  ornementation  se  retrouve  sur  quelques  monuments  d'un  âge  aussi 
reculé,  dans  les  musées  de  Paris  et  de  Leyde4.  On  pourrait  donc  croire 
que  la  décoration  qui  a  pour  principe  la  spirale  a  été  portée  aux  popula- 


1.  On  trouvera  un  exemple  de  la  combinaison  de  spirales  en  forme  d'S  dans  le  second 
fac-similé  qui  accompagne  plus  loin  l'article  de  M.  Wattenbach. 

2.  Anthropological  Review,  vol.  III  (Londres,  1865),  p.  295.  j 

3.  W.  Gell  :  Argolis  i Londres,  iSio). 

4.  Je  dois  la  communication  de  ce  fait  à  mon  savant  ami  M.  Fr.  Wieseler. 


La  Miniature  Irlandaise.  17 

tions  germaniques  et  celtiques,  avec  des  objets  de  toutes  sortes  en 
argile  et  en  métal,  par  des  marchands  phéniciens,  et  cette  opinion 
trouvera  faveur  auprès  des  personnes  qui  donnent  une  origine  asiatique 
aux  travaux  métallurgiques  chez  ces  populations.  Ce  serait  pourtant  un 
sujet  d'étonnement  que  justement  sur  les  côtes  de  la  Méditerranée  la 
spirale  joue  un  rôle  si  secondaire.  De  plus,  les  produits  de  l'industrie 
étrusque  qu'on  a  découverts  sur  plusieurs  points  de  l'Allemagne  four- 
nissent une  preuve  que  Germains  et  Celtes  n'ont  point  dessiné  et  orné 
leurs  ustensiles  d'après  des  modèles  étrangers. 

Il  faut  bien  plutôt  admettre  que  la  spirale  est  un  ornement  propre  à  la 
race  indo-celtique  et  spécialement  aux  Celtes,  aux  Germains,  aux  Pélasges 
et  aux  Perses;  que  cet  ornement  s'est,  après  la  séparation  des  races,  sur- 
tout conservé  chez  les  peuples  dont  la  civilisation  ne  s'est  guère  élevée 
au-dessus  de  l'état  primitif,  tandis  que  son  emploi  s'est  restreint  aussitôt 
que  chez  ces  peuples  en  particulier  se  développait  une  culture  plus 
élevée. 

Il  est  vrai  que  les  Assyriens,  chez  qui  nous  trouvons  des  traces  de  la 
volute  ionique,  paraissent  appartenir  à  la  race  sémitique  et  non  à  la  race 
indo-celtique.  Mais  la  race  sémitique  semble  avoir  manqué  d'originalité 
plastique,  et  les  monuments  de  Ninive  décèlent  partout  l'influence  des 
idées  religieuses  et  de  l'art  des  Perses.  Chez  d'autres  peuples,  tels  que 
les  Égyptiens,  les  Mexicains  et  les  Péruviens,  la  spirale  ne  semble  jouer 
aucun  rôle  notable  dans  la  décoration. 

L'emploi  prédominant  de  l'entrelacement  et  de  la  spirale  est  tout  ce 
qu'on  peut  rattacher  à  un  art  indigène  plus  ancien.  Car  si  étrangement 
dessinées  que  soient  les  figures  dans  les  mss.  irlandais,  on  cherche  en 
vain,  sur  les  monuments  païens  des  Celtes  et  des  Germains,  une  figure 
d'homme  ou  d'animal,  à  plus  forte  raison,  quelque  chose  qui  annonce 
ces  miniatures.  Au  contraire,  la  chute  complète  de  l'art  antique  et  l'état 
primitif  de  la  civilisation  des  Britannes  et  des  Irlandais  eurent  pour 
résultat  que  les  enlumineurs  en  furent  réduits  à  une  méthode  de  dessin 
qui  ne  reposait  que  sur  une  tradition  artistique  très-imparfaite.  Mais  là 
cii  Britannes  et  Iriandais  ont  inventé,  la  tendance  nationale  de  leur 
fantaisie  a  gardé  la  haute  main  et  imprimé  aux  dessins  et  aux  ornements 
ce  caractère  original  qui  distingue  le  style  irlandais  de  tout  autre.  Mais, 
à  un  sens  très-décidé  pour  des  formes  régulières  et  précises,  la  race  cel- 
tique joint  une  fantaisie  débordante  et  qui  incline  au  baroque,  tandis  que 
la  race  germanique  dédaigne  trop  facilement  la  forme  pour  la  poésie  et 
la  profondeur  du  fonds.  Cette  originalité  des  Celtes  se  rencontre  dans 
leurs  plus  anciennes  créations  poétiques,  dans  la  forme  presque  archi- 

2 


1 8  La  Miniature  Irlandaise. 

tecturale  des  triades  galloises,  et  dans  l'imagination  luxuriante  des  contes 
irlandais.  L'esprit  celtique  a  également  imprimé  sa  marque  aux  minia- 
tures irlandaises  ;  son  imagination  exubérante  et  primesautière  y  a 
répandu  ses  trésors  à  pleins  flots,  et  il  a  réussi  à  transformer  les  élé- 
ments les  plus  étrangement  combinés  en  un  style  d'une  merveilleuse  ré- 
gularité, comme  à  leur  donner,  à  force  de  soins,  la  forme  la  plus 
gracieuse. 

II. 

On  peut  à  peine  croire  qu'un  art  de  cette  nature  ait  pu  servir  de 
point  de  départ  au  développement  si  haut  d'un  système  d'ornemen- 
tation, tel  que  fut  le  système  roman  qui  régna  aux  xie  xiie  siècles, 
non-seulement  dans  les  miniatures,  mais  aussi  dans  les  autres  décora- 
tions de  l'architecture  et  de  la  peinture.  Il  en  a  pourtant  été  ainsi  et  il 
ne  sera  pas  sans  intérêt  de  considérer  dans  un  court  aperçu  les  différentes 
phases  que  les  miniatures  ont  parcourues  avant  d'arriver  au  sommet  de 
l'art  roman. 

Ce  qui  donna  l'impulsion  à  ce  développement,  ce  fut  la  fusion  du 
style  irlandais  avec  le  style  franc.  Nous  avons  remarqué  plus  haut  que 
les  initiales  franques  du  viii*  siècle  trahissent  déjà  en  partie  une  influence 
de  la  calligraphie  irlandaise,  influence  sortie,  sans  aucun  doute,  des 
cloîtres  qu'avaient  fondés,  surtout  dans  l'empire  des  Burgondes,  des 
missionnaires  tels  que  saint  Columban.  A  cette  époque,  comme  on  sait, 
les  traits  de  l'écriture  ont,  sur  le  continent,  pris  quelque  chose  de  la 
forme  des  lettres  irlandaises  et  anglo-saxonnes.  Mais  ce  n'est  qu'au 
temps  de  Charlemagne  qu'on  saisit  d'une  manière  certaine  la  fusion  des 
styles  irlandais  et  franc.  G.-F.  Waagen,  qui  était  peut-être  de  son 
temps  le  meilleur  connaisseur  des  miniatures  répandues  dans  toutes 
les  bibliothèques  d'Europe  ',  remarque  que  dans  les  miniatures  des  mss. 
qui  furent  exécutés  pour  Charlemagne,  l'élément  antique  a  été  fondu 
avec  l'art  irlandais  en  un  système  d'ornementation  manié  avec  une 
admirable  perfection  technique;  que  dans  ce  système  la  plus  grande 
magnificence  se  réunit  à  un  goût  aussi  original  qu'attrayant  et  que 
déjà  s'y  fait   remarquer  le  sentiment    du  style  architectural  qui,  plus 

I.  Il  les  a  décrites  dans  ses  livres  :  Kuntswerke  und  Kïmstler  in  Deutschland  (Leipzig, 
1843-j);  Kunstwerkc  und  Kùnstkr  in  England  und  Paris  (Berlin,  1837-9);  Treasures  of 
Art  in  Créât  Britain  (Londres,  1854).  Il  a  résumé  ses  travaux  sur  cette  matière  dans  son 
livre  :  Handbuch  der  Geschichte  dcr  Makrei  dont  il  existe  une  traduction  française  :  Manuel 
de  l'histoire  de  la  Peinture,  trad.  par  MM.  Hymans  et  J.  Petit  (Bruxelles,  1863).  Dans  ce 
dernier  ouvrage,  voir  tome  I,  pp.  1-20. 


La  Miniature  Irlandaise.  1 9 

tard,  s'est  développé  d'une  façon  si  brillante  dans  les  constructions  du 
Moyen-âge.  On  peut  admettre  que  ce  style  s'est  surtout  formé  dans 
l'école  de  l'anglo-saxon  Alcuin.  Alcuin  était  élève  de  l'archevêque 
Ecbert  d'York  et  d'Aelbert,  parent  d'Ecbert.  Lui-même  devint,  en  766, 
directeur  de  l'école  d'York,  en  remplacement  d'Aelbert,  quand  celui-ci 
s'assit  dans  la  chaire  épiscopale.  Charlemagne  fit  connaissance  avec  lui  à 
Parme,  commeAlcuinrevenait  d'un  voyage  à  Rome,  et  l'appela  à  sa  cour 
pour  développer  une  culture  intellectuelle  plus  élevée  dans  l'empire  des 
Francs.  A  partir  de  782,  non-seulement  il  créa  l'École  du  Palais  {schola  pa- 
latina),  bien  plus,  il  fonda  ou  réorganisa  des  écoles  monastiques  par  toute  la 
France  et,  après  qu'il  eut  quitté  le  service  de  la  cour,  en  801 ,  il  enseigna 
dans  l'école  de  l'abbaye  de  Saint-Martin,  à  Tours,  qu'il  avait  organisée 
en  796  sur  le  modèle  de  celle  d'York.  La  pratique  des  arts,  —  et  la 
miniature  comptait  parmi  les  premiers,  —  était  dans  ces  écoles  un 
objet  d'importance,  auquel  on  exerçait  particulièrement  les  jeunes 
ecclésiastiques.  Il  ne  fallait  pas  s'attendre  à  ce  qu'on  y  adoptât  sim- 
plement la  manière  irlando-anglo-saxonne  ;  car  l'enseignement  d'Alcuin 
ne  tombait  pas  sur  un  sol  sans  préparation,  et  il  y  avait  dans  le  peuple 
des  Francs  une  force  vive  qui  laissait  son  empreinte  à  ce  qu'elle 
touchait.  Le  fonds  indigène  et  l'élément  étranger  se  mêlèrent,  et  de  ce 
mélange  sortit  un  style  franc  particulier  qui,  à  la  cour  des  souverains 
francs,  prit  des  formes  non  moins  grandioses  qu'élégantes,  et  nous 
paraît  particulièrement  imposant  dans  les  mss.  écrits  pour  Charles  le 
Chauve,  par  exemple,  la  fameuse  bible  qu'il  donna  à  l'église  de 
Saint-Paul,  à  Rome,  et  qui,  depuis  l'incendie  de  cette  dernière, 
est  conservée  dans  une  autre  église  de  Rome,  celle  de  Saint-Callisto  ' . 
Là  se  montrait  déjà  cet  amour  des  formes  arrêtées  et  précises  qui 
devait  se  faire  jour  dans  la  littérature  française,  comme  dans  les 
triades  galloises.  Les  initiales  carolingiennes  en  ont  même  acquis  une 
certaine  sévérité  qui  les  distingue  aussi  bien  des  miniatures  irlandaises 
que  de  celles  des  âges  postérieurs.  Cette  sévérité  se  montre  tout  parti- 
culièrement dans  l'alphabet  que  Jorand^  a  publié  d'après  une  bible  de 
Charles  le  Chauve,  conservée  à  la  Bibliothèque  impériale  de  Paris.  Mais 
ce  style  n'est  pas  défiguré  par  la  tendance  au  baroque  et  au  grotesque 
qui  règne  à  un  si  haut  degré  dans  les  créations  irlandaises,  et  il  est 
adouci  par  l'influence  de  l'art  antique  qui  se  montre,  dans  l'imitation  du 
règne  végétal,  à  côté  des  rubans  entrelacés.  Les  enlumineurs  ont  plus 

1.  Une  magnifique  initiale  tirée  de  ce  ms.  se  trouve  dans  Seroux  d'Agincourt  :  L'Histoire 
de  l'art  par  tes  monuments.  —  Peinture  'table  4s). 

2.  B.  J.  Jorand  :  Grammatograpliie  du  neuvième  siècle,  Paris,  1837. 


20  La  Miniature  Irlandaise. 

de  goût  pour  un  arrangement  vraiment  pittoresque  de  l'ensemble  que 
pour  cette  exécution  patiente  et  laborieuse  des  détails  qui  fait  notre  admira- 
tion dans  les  initiales  irlandaises.  Aussi,  ce  qu'il  y  avait  de  baroque  et  de 
grotesque  dans  le  dessin  des  hommes  et  des  animaux  tombe  en  grande 
partie;  la  spirale  même  devient  rare  et  on  ne  l'emploie  plus  que  sim- 
plifiée à  l'extrême. 

Ce  style  carolingien,  à  son  tour,  a  lui-même  exercé  une  influence 
favorable  sur  l'art  anglo-saxon  et  l'art  irlandais.  Nous  avons  déjà  cité 
un  ms.  de  Kronweissenburg,  aujourd'hui  à  Wolfenbuttel,  où  le  style 
irlandais  apparaît  comme  ennobli.  Dans  ce  ms.,  nous  n'avons  pas 
l'élément  tiré  du  règne  végétal,  le  feuillage,  et  l'on  n'a  pas  encore 
réussi  à  se  défaire  de  l'élément  baroque;  néanmoins,  ces  initiales  sont 
d'une  forme  élégante  et  sévère  qu'on  peut  comparer  aux  initiales  caro- 
lingiennes. L'influence  carolingienne  se  montre  avec  plus  de  bonheur 
encore  dans  les  mss.  anglo-saxons  depuis  le  temps  d'Alfred  le  Grand. 
On  le  reconnaît  tout  d'abord  dans  le  Coronation  Book  '  qui,  par  l'exubé- 
rance de  la  fantaisie  et  le  fini  du  travail  se  rapproche  des  anciens  mss. 
britanniques,  tels  que  l'évangile  de  saint  Cuthbert,  mais  par  l'élégance 
de  la  forme  rivalise  avec  les  mss.  carolingiens.  Ici  a  déjà  pénétré 
l'élément  emprunté  au  règne  végétal,  et,  dans  les  mss.  anglo-saxons 
d'une  époque  postérieure,  cet  élément  prend  tellement  le  dessus  que  les 
autres  éléments  de  l'ancien  fonds  national  sont  mis  au  second  plan. 
Cependant  les  mss.  anglo-saxons  conservent  encore,  dans  le  dessin  des 
figures,  quelque  chose  de  poncif,  de  telle  sorte  qu'ils  ne  s'élèvent  pas  à 
une  véritable  représentation  de  la  nature  humaine.  Ils  dessinent  les 
hommes,  les  animaux,  les  arbres,  d'une  manière  qui  sent  l'école;  les 
doigts  ont  souvent  une  longueur  démesurée  ;  les  plis  sont  rangés  sans 
goût  et  peints  d'une  tout  autre  couleur  que  les  vêtements.  Beaucoup  de 
détails  ne  sont  qu'indiqués  et,  dans  l'ensemble  on  reconnaît  un  essai 
gauche  et  mal  réussi  de  représenter  la  réalité  plutôt  que  l'intention 
d'obtenir  par  les  fioritures  calligraphiques  un  ornement  contraire  à  la 
nature.  Le  style  baroque  irlandais  se  retira  en  quelque  sorte  de  l'Angle- 
terre. Nous  retrouvons  ses  traces  sur  des  croix  de  pierre  et  d'autres 
débris  d'ornementation  architecturale  en  Irlande,  et  nous  verrons  qu'il 
a  produit  comme  une  arrière-saison  en  Scandinavie  et  sur  les  côtes 
septentrionales  de  la  France. 


I .  Ce  ms.  se  trouve  au  British  Muséum  de  Londres.  Voir  Humphreys  :  llluminated  BooKs 
(pi.  4).  Humphreys  pense  que  ce  ms.  a  été  exécuté  en  Allemagne.  C'est  sur  ce  ms.  que, 
jusqu'à  Henri  VI,  paraît-il,  les  rois  anglo-saxons  ont  prêté  serment  dans  la  cérémonie  du 
sacre. 


La  Miniature  Irlandaise.  21 

Le  développement  que  prit  par  la  suite  le  style  carolingien  se  laisse 
surtout  étudier  en  Allemagne,  tandis  qu'en  France  il  se  dégrade  après 
la  disparition  des  Carolingiens.  Les  éléments  qui  servaient  à  former  les 
initiales  restent  encore  à  peu  près  les  mêmes  en  Allemagne,  mais 
l'exécution  perd  en  finesse,  en  élégance  et  en  grandeur,  en  même  temps 
qu'en  raideur  et  en  sévérité,  et  gagne  au  contraire  en  richesse  et  en 
variété.  Les  formes  sont  plus  grossières,  mais  développées  avec  plus 
d'ampleur.  L'antique  élément  emprunté  au  règne  végétal  regagne  du 
terrain  ;  les  rubans  entrelacés  se  terminent  souvent  en  feuilles  et  en 
fleurs,  ou  bien  serpentent  dans  des  feuilles  ou  dans  des  fleurs.  Dans 
l'arrangement  des  entrelacements  se  développe  sans  limites  une  fantaisie 
luxuriante  qui  ne  paraît  presque  jamais  reproduire  un  patron  ou  un 
modèle  donné,  mais  toujours  inventer  à  nouveau.  La  bibliothèque  de 
l'Université  de  Gœttingue  possède  un  missel  ',  écrit  vers  l'an  900;  cette 
date  résulte  de  la  forme  des  lettres  et  de  la  date  de  la  fête  de  Pâques  qui  se 
trouve  dans  le  calendrier  ajouté  au  ms.  Ce  ms.  abonde  en  initiales  dont 
quelques  unes  sont  parmi  les  plus  belles  qu'on  puisse  voir.  Comme  preuve 
de  l'inépuisable  force  d'invention  de  l'enlumineur,  disons  que  l'initiale  D, 
qui  se  rencontre  plus  de  j  50  fois,  est  variée  à  l'infini  et  ne  se  reproduit 
jamais  deux  fois  de  la  même  façon.  Çà  et  là,  on  voit  lignes  et  rubans  se 
terminer  en  feuilles  et  en  fleurs,  et  on  se  sert  de  petites  fleurs  pour 
remplir  les  espaces  vides. 

A  mesure  que  ce  style  se  développe,  les  initiales  gagnent  de  plus  en 
plus  en  aisance,  en  richesse  et  en  goût.  L'élément  végétal  règne  aussi 
davantage  :  les  feuilles  et  les  fleurs  se  rattachent  d'une  manière  plus  orga- 
nique aux  lignes  des  lettres;  les  rubans,  artistement  entrelacés,  forment 
un  ornement  qui  peut  se  comparer  à  un  cep  de  vigne  dont  le  branchage 
s'enroule  en  enlacements  gracieux  et  variés.  L'élément  animal  ne 
manque  pas  non  plus.  Des  animaux  de  toute  sorte  font  leur  apparition  : 
serpents  et  dragons  se  tordent  entre  les  branches  et  se  combinent  même 
d'une  façon  fantastique  avec  des  animaux  à  quatre  pieds  dont  la  queue 
se  termine  par  une  sorte  d'ornement  végétal.  Il  semble  que  deux  élé- 
ments nouveaux  et  étrangers  exercent  une  influence  heureuse.  D'abord 
les  modèles  que  fournissaient  les  tissus  orientaux.  Ces  tissus  furent  de 
bonne  heure  connus  dans  l'occident  par  le  commerce  de  Venise,  puis 
par  les  Croisades  et  aussi  par  les  Arabes  d'Espagne  et  de  Sicile  ;  et  sur 
ces  tissus  on  voyait  très-souvent  des  animaux  et  des  plantes  dont 
l'union  produit  les  arabesques  les   plus  originales.  Puis,  il  faut,  sans 

I.  MissaU  EccksU  S.  Salvatoris  Fuldensis.  —  Cod.  Theol.  251. 


21  La.  Miniature  Irlandaise. 

aucun  doute,  faire  une  certaine  part  d'influence  aux  antiques  modèles  d'ara- 
besques que  conservaient  maintes  ruines  antiques  d'Italie  et  de  France, 
et  auxquelles  on  recommençait  peu  à  peu  à  donner  quelque  attention. 
Ces  deux  éléments  se  mêlèrent  de  différentes  façons  avec  les  éléments 
anciens,  et  le  génie  de  la  race  germanique  se  plaisait  à  prêter  un  sens 
symbolique  aux  figures  employées  dans  la  décoration.  On  va  pourtant 
trop  loin  quand  on  croit,  malgré  tout,  devoir  trouver  une  signification 
symbolique  à  ces  combinaisons  fantastiques;  car  on  a  bien  certainement 
assez  souvent  employé  des  figures  d'animaux  dans  l'ornementation  sans 
avoir  d'autre  intention  que  de  les  faire  servir  à  une  simple  décoration. 

Les  anciens  et  les  nouveaux  éléments  ne  sont  pas  toujours  mêlés. 
Naturellement,  l'élément  antique  avait  gardé  la  prédominance  dans 
les  pays  où  le  souvenir  de  la  vie  de  l'antiquité  était  conservé  par 
des  monuments  et  des  ruines,  tandis  que  dans  d'autres  contrées  le  retour 
à  l'art  antique  ne  trouvait  pas  facilement  accès.  Même,  la  connaissance 
de  modèles  byzantins  n'a  pas  pénétré  également  partout.  On  peut  donc 
distinguer  deux  courants  qui,  sortis  de  sources  différentes,  coulent  l'un 
près  de  l'autre  sans  se  mêler.  Ici,  ils  semblent  s'unir,  là  se  séparer, 
comme  deux  fleuves  dont  les  ondes,  de  nature  diverse,  si  elles 
se  réunissent  pour  un  temps  dans  un  même  lit,  restent  plus  loin  diffé- 
rentes les  unes  des  autres.  Ce  n'est  que  dans  l'art  gothique  du  xiii''  siècle 
que  les  deux  courants  sont  tellement  mêlés  qu'on  ne  peut  plus  les  distin- 
guer. Bien  plus,  il  s'est  alors  formé  quelque  chose  de  nouveau  où  on 
ne  peut  plus  reconnaître  les  sources  génératrices. 

Le  premier  courant  qui  se  rattache  à  l'art  irlandais,  anglo-saxon  et 
carolingien  l'emporte  dans  le  nord  de  l'Europe  ;  le  courant  byzantino- 
roman  dans  le  sud  et  dans  l'ouest  de  l'Europe,  L'ancienne  ornementa- 
tion irlandaise  pénètre  en  effet  jusqu'en  Scandinavie  où  les  rubans  entre- 
lacés et  les  figures  grotesques  d'animaux  sont  très-répandus  dans  les 
sculptures  en  bois  destinées  à  l'ornementation  des  vieilles  églises  (égale- 
ment construites  en  bois)  et  dans  les  ornements  des  pierres  tombales. 
Les  inscriptions  runiques  de  ces  dernières  sont  généralement  gravées 
sur  de  semblables  rubans,  et,  d'ordinaire,  cette  ornementation  Scandi- 
nave ne  présente  pas  un  caractère  moins  baroque  que  les  mss.  irlandais 
et  anglo-saxons;  elle  est  même  exécutée  avec  moins  de  soin  et  avec  un 
moindre  sens  de  la  régularité  des  formes.  L'art  irlandais  atteint  ici  quel- 
quefois le  dernier  degré  de  l'abâtardissement.  Ce  courant  se  fait  aussi 
sentir  dans  le  nord  de  l'Allemagne  et  en  France,  et  dans  les  miniatures 
et  les  autres  monuments  d'art  dominent  les  formes  régulières  des  mss. 
anglo-saxons  d'une  période  plus  récente. 


La  Miniature  Irlandaise.  2  3 

Il  faut  encore  considérer  le  fameux  «  tapis  de  Bayeux'  «  comme  un 
ouvrage  anglo-saxon,  car  c'est  le  travail  d'une  princesse  anglaise  de  la 
maison  de  Normandie.  La  bataille  d'Hastings  y  est  représentée  tout  à 
fait  dans  le  style  de  l'art  anglo-saxon.  Dans  le  même  style  sont  aussi 
traitées  les  miniatures  de  quelques  mss.  qui  appartiennent  à  la  France 
du  nord  =.  Dans  le  nord  de  l'Allemagne,  je  signalerai  particulièrement 
deux  remarquables  monuments  dessinés  avec  un  égal  goût,  à  savoir  : 
le  grand  relief  taillé  dans  un  rocher  connu  sous  le  nom  de  «  pierre 
d'Eggester  »  ou  «  d'Egster?,  »  près  de  la  petite  ville  de  Horn,  en 
Westphalie,  et  les  portes  de  bronze,  dans  la  cathédrale  d'Hildesheim, 
fondues  par  l'évêque  Bernward.  Le  bas-relief  en  pierre  représente  une 
descente  de  croix,  et  la  figure  qui  soulève  de  la  croix  le  corps  du 
Seigneur  ne  repose  pas,  comme  c'est  ordinairement  le  cas,  sur  une 
échelle,  mais  sur  un  siège  tout  ornementé  qui  ressemble  presque  à  un 
palmier  courbé  à  terre.  Sous  la  descente  de  croix,  se  trouve  un  dragon 
qui  est  plus  encore  dans  le  caractère  de  l'art  irlando-anglo-saxon  ;  il 
enlace  un  couple  agenouillé  et  levant  les  regards  au  ciel.  Sa  langue  et  sa 
queue  offrent  une  forme  assez  bizarre  et  tout  à  fait  ornementale.  Dans 
les  portes  de  l'évêque  Bernward,  le  style  anglo-saxon  se  montre  en 
partie  dans  la  façon  dont  les  figures  sont  traitées  et  encore  plus  évidem- 
ment dans  les  formes  réguhères  des  accessoires,  surtout  des  arbres  qui 
ressemblent  beaucoup  à  ceux  du  tapis  de  Bayeux.  On  a  conservé  aussi 
à  Hildesheim  deux  candélabres,  fabriqués  de  la  main  de  Bernward,  dont 
le  pied  est  formé  d'artistiques  entrelacs  avec  des  figures  fantastiques. 
Je  rappellerai  en  outre  le  candélabre  de  la  cathédrale  de  Prague  qui  passe 
pour  le  candélabre  du  temple  de  Jérusalem,  et  celui  de  la  cathédrale  de 
Milan.  Des  formes  de  ce  genre  bizarre  et  fantastique  se  rencontrent  çà 
et  là  dans  la  décoration  des  monuments  dont  on  peut  prouver  les  rapports 
avec  les  Iles  Britanniques  ou  qui  du  moins  ont  subi  l'influence  du  voisinage 
de  cloîtres  irlandais  ou  anglo-saxons.  A  cette  classe  appartiennent  le 
«  Schottenkloster  )>  de  Ratisbonne4^et  le  «  Grossmùnster  »  de  Zurich  s. 

1 .  Ce  tapis  se  trouve  dans  le  trésor  de  la  cathédrale  de  Bayeux  et  a  été  publié  par 
Montfaucon,  Lancelot,  Seroux  d'Agincourt  et  Achille  Jubinal.  Voir  principalement  l'ouvrage 
de  ce  dernier  :  Les  anciennes  tapisseries  historiées;  gravures  d'après  les  dessins  de  Victor 
Sansonetti,  Paris,  183S. 

2.  Quelques  spécimens  tirés  de  la  bibliothèque  de  Rouen  ont  été  publiés  dans  Langlois: 
Calligraphie  du  moyen-âge. 

5.  On  en  trouvera  une  représentation  dans  H.  F.  Massmann  :  Der  Egstertein  in  IVest- 
falen,  1846. 

4.  Sur  ce  couvent  de  Ratisbonne,  qui  est  de  fondation  irlandaise,  voir  un  travail  de 
M.  Wattenbach  :  Z)/e  Schottenklœster  in  Deaîschland  dans  la  Zeitschrift  fur  christliche 
Archceologie  und  Kunsi  de  MM.  von  Quast  et  Otte,  tome  1  (traduit  en  Anglais  dans 
VUlster  Journal  of  Archaology}.  —  Le  remarquable  portail  septentrional  de  ce  cloître  a 
été  représenté  dans;  Gailhabaud  :  l'Architecture  du  V  au  XVl"  siècle,  tome  II, 

j.  Sur  le  «  Grossmùnster  »  de  Zurich,  voir  surtout  un  travail  de  M.  Vœgelin  dans  les 


24  La  Miniature  Irlandaise. 

Ce  courant  gagne  même  l'Italie.  En  Lombardie,  à  côté  du  candélabre 
de  Milan,  la  porte  de  bronze  de  S.  Zenone  maggiore,  à  Vérone,  mérite 
d'être  particulièrement  citée;  nous  trouvons  jusqu'en  Sicile,  dans  la 
cathédrale  de  Monreale,  une  porte  de  bronze  dont  le  style  a  la  plus 
grande  ressemblance  avec  celui  des  portes  de  Bernward  à  Hildesheim. 
Elle  a  été  fondue  en  1 186  par  le  pisan  Bonano.  La  grande  porte  de  la 
cathédrale  de  Pise,  qui  provenait  du  même  Bonano,  a  malheureusement 
été  détruite  dans  un  incendie  en  i  $96.  D'autre  part,  dans  l'aile  méri- 
dionale de  la  même  cathédrale,  on  voit  une  petite  porte  de  bronze, 
généralement  appelée  la  porte  de  Saint-Rainerio,  qui  a  été  évidemment 
fondue  à  l'aide  des  mêmes  moules  que  celle  de  Monreale.  Nous  rencontrons 
un  ruban  runique  sur  le  lion  que  les  Vénitiens  ont  enlevé  du  port  du 
Pirée  et  qui  a  été  placé  devant  la  Darsena  à  Venise.  Le  ruban  s'étend 
sur  le  dos  du  lion  et  se  termine  sur  l'omoplate  et  la  cuisse  postérieure 
en  enlacements  gracieux  et  assez  mêlés.  Il  semble  qu'un  Varègue,  qui 
servait  dans  l'armée  byzantine,  a  gravé  ce  ruban  sur  l'antique  monument 
comme  il  décorait  encore  l'entrée  du  port  d'Athènes. 

Le  courant  byzantino-antique  se  montre  bien  moins  en  Italie  que  ne 
l'aurait  fait  supposer  l'introduction  de  nombreux  monuments  byzantins. 
Les  sculptures  de  l'époque  romane  que  nous  rencontrons  en  Italie  sont 
pour  la  plupart  encore  si  grossières  qu'on  ne  peut  les  attribuer  à  aucun 
style  en  particulier.  Plus  tard  seulement,  la  peinture  prit  dans  ce  pays 
quelque  importance  ;  alors  s'était  déjà  développé  en  France  et  en  Alle- 
magne ce  style  gothique  qui  n'apparut  que  plus  tard  en  Italie.  En  Alle- 
magne le  courant  byzantin  se  fait  surtout  remarquer  dans  les  pays  rhé- 
nans où  les  traditions  antiques  avaient  conservé  quelque  vitalité.  Ce 
courant  se  reconnaît  également  dans  d'autres  parties  de  l'Allemagne. 
Même  dans  le  relief  d'Eggesterstein,  sa  trace  est  indiquée  par  la 
façon  dont  les  vêtements  sont  traités.  On  est  surtout  frappé  par  la 
valeur  de  quelques  sculptures  du  nord  de  l'Allemagne,  particulièrement 
la  porte  dorée  de  la  cathédrale  de  Freiberg,  dans  le  Erzgebirge,  le 
rétable  de  l'autel  dans  l'église  de  Wechselburg,  près  de  Chemnitz,  et  la 
tombe  d'Henri  le  Lion  et  de  son  épouse,  dans  la  cathédrale  de  Bruns- 
wick. Ces  monuments  décèlent  une  connaissance  de  travaux  antiques 
ou  byzantins  de  la  meilleure  époque.  Nous  ignorons  comment  cette 
connaissance  est  arrivée  aux  artistes.  Les  relations  qui  existaient  alors 
entre  les  différentes  parties  de  l'Europe  offraient  des  circonstances 
favorables.  On  peut  supposer  que  les  artistes  voyageaient,  et  nous 
savons   que   des   chefs-d'œuvre    de   l'art   étranger    ont    été   apportés 

Mittheilungen  der  Antiquarischcn  Gesdlschaft  zu  Zurich,  Baiid  1. 


1 


La  Miniature  Irlandaise.  25  * 

en    Allemagne,    surtout    sous    le    règne    des    empereurs    saxons'. 

L'effet  simultané  des  deux  courants  irlando- anglo-saxon  et  byzantino- 
antique  se  présente  d'une  façon  remarquable  dans  la  cathédrale  de 
Monréale,  où,  à  côté  de  la  porte  de  bronze  de  Bonano  que  nous  avons 
déjà  signalée,  se  trouve  une  plus  petite,  dans  le  portail  latéral,  qui  a 
entièrement  le  caractère  d'une  imitation  de  modèles  antiques  ou  byzantins. 
Elle  offre  les  mêmes  caractères  que  deux  portes  analogues  à  Trani  et  à 
RavellO;,  dans  l'Italie  méridionale.  Une  inscription  sur  l'une  de  ces 
dernières  nous  apprend  qu'elle  a  été  fondue  par  un  certain  Borisanus  de 
Trani,  et  il  semble  établi  que  celui-ci  florissait  à  peu  près  à  la  même 
époque  que  Bonano.  Deux  photographies,  dans  le  magnifique  ouvrage  de 
Gravina^sur  la  cathédrale  de  Monréale,  montrent  très-bien  la  différence 
dans  le  style  des  deux  portes,  et  fournissent  un  tableau  frappant  des 
différences  des  deux  courants. 

Du  mélange  de  ces  deux  courants  provient  la  richesse  de  l'ornemen- 
tation romane.  Le  style  roman  se  rapproche,  à  un  certain  point  de  vue, 
du  système  de  la  décoration  antique  ;  mais  s'il  n'atteint  pas  la  beauté  du 
dessin  que  la  feuille  d'acanthe  avait  atteinte  dans  l'art  grec  et  romain, 
il  a  pourtant,  sur  l'ornementation  antique,  l'avantage  d'une  plus  grande 
variété,  et  nous  rencontrons  quelques  exemples  isolés  où  il  s'est  déve- 
loppé avec  une  beauté  et  un  éclat  surprenants.  Parmi  les  initiales  des 
mss.,  on  peut  citer  comme  une  des  plus  riches  et  des  plus  délicates  le 
fameux  A  de  la  Mater  Verboram,  dans  la  bibliothèque  du  musée  Bohème, 
à  Prague.  Cette  lettre  a  été  plusieurs  fois  publiée?.  Mais  ces  diverses 
imitations  n'en  donnent  pas  une  idée  exacte,  parce  qu'on  a  employé,  en 
la  copiant,  des  contours  tranchés  et  élégants,  tandis  que  l'original  est 
esquissé  avec  abandon  et  laisser-aller.  Sur  l'âge  de  cette  œuvre  remar- 
quable plane  une  étrange  incertitude.  Dans  une  des  initiales  les  moins 
importantes  sont  représentés  deux  moines  agenouillés  qui  sont  désignés, 
l'un,  Waceradus,  comme  le  scribe,  l'autre  Mirozlaus,  comme  ^enlumi- 
neur du  ms.  A  côté  de  ce  dernier  nom  a  été  ajoutée  la  date  MCII,  et  la 
beauté  des  miniatures  donne  à  penser  que  le  trait  au  dessus  du  C,  dans 
cette  date,   équivaut  à  la  répétition  de  cette  lettre,  et  que  Mirozlaus  a 


1.  C'est  ainsi  qu'il  existe  dans  l'église  de  Saint-Géréon,  à  Cologne,  un  chapiteau  d'une 
composition  analogue  aux  chapiteaux  du  vi=  siècle  qui  se  trouvent  à  Ravenne,  et  lors  de 
la  construction  de  l'ancienne  salie  du  chapitre  à  Magdebourg,  de  semblables  chapiteaux 
ont  été  employés  pour  servir  de  base  aux  colonnes  de  granit  qui  supportent  les  voûtes. 

2.  Dom  Bened.  Gravina  :  //  duomo  di  Monréale,  Palerme,  18(9. 

).  Cette  lettre  a  été  publiée,  dans  des  proportions  réduites,  dans  la  Zeitschriftfiir  Christ- 
liche  Arch£ologie  und  Kunst  de  MM.  von  Quast  et  Otte  (Band  I).  Elle  a  été  publiée  dans 
les  dimensions  de  l'original  par  la  Société  archéologique  de  Saint-Pétersbourg,  dans  ses 
comptes-rendus  de  iSjy. 


26  La  Miniature  Irlandaise. 

exécuté  son  travail  en  l'an  1202.  Une  pareille  abréviation  n'est  pas 
ordinaire,  et,  si  on  n'avait  d'autres  raisons  pour  adopter  une  date 
aussi  récente,  on  pourrait  dans  le  trait  voir  seulement  un  signe  pour 
indiquer  que  les  lettres  sont  employées  comme  chiffres.  Du  reste,  les 
traits  de  1'^  majuscule  trahissent  déjà  certain  caractère  anguleux  dans 
les  lignes  et  montrent  un  penchant  pour  ce  goût  qui,  au  xiii'=  siècle,  a 
donné  à  l'art  gothique  son  caractère  tout  à  fait  nouveau. 

A  ce  monument  remarquable,  qui  se  place  comme  à  la  limite  entre 
l'époque  romane  et  l'époque  gothique,  nous  arrêterons  ces  observations. 
Dans  le  développement  postérieur  de  la  décoration,  il  n'y  a  plus  rien 
qui  se  rapporte  au  style  particulier  des  initiales  irlando-anglo-saxonnes. 
Ce  qui  règne  encore,  c'est  ce  sentiment  du  style  architectural  qui  s'est 
déjà  fait  jour  dans  les  initiales  carolingiennes  et  qui  atteint  sa  perfection 
dans  le  style  gothique,  style  que  la  France  peut  être  fière  d'avoir 
inventé,  et  l'Allemagne  de  l'avoir  porté  à  sa  dernière  conséquence 
dans  la  cathédrale  de  Cologne,  tandis  que  l'Angleterre,  en  s'appropriant 
ce  style,  a  montré  de  nouveau  qu'elle  savait  mieux  en  exploiter,  avec  sa 
fantaisie  luxuriante  et  exubérante,  le  côté  décoratif  qu'en  pénétrer 
l'esprit. 

F.-W.  Unger. 


ÉVANGÉLIAIRE  A  MINIATURES 

d'origine  irlandaise, 

DANS    LA    BIBLIOTHÈQUE    PRINCIÈRE    d'OETTINGEN-WALLERSTEIN  ', 


Aux  manuscrits  d'origine  irlandaise,  si  remarquables  par  leurs  minia- 
tures, que  l'on  connaît  déjà,  il  faut  ajouter  un  magnifique  évangéliaire 
qui  appartient  à  la  bibliothèque  des  princes  d'Oettingen-Wallerstein,  à 
Maihingen,  et  qui  a  été  déposé  pour  quelque  temps  au  Musée  Germa- 
nique de  Nuremberg  où  j'en  ai  pris  connaissance.  Aux  initiales  Q_et  I 
que  nous  reproduisons  et  qui  commencent  les  Évangiles  de  saint  Luc  et 
de  saint  Jean,  on  reconnaît  immédiatement  les  caractères  particuliers  de 
la  miniature  irlandaise  :  les  spirales,  les  têtes  d'oiseaux  et  l'entourage  de 
points  rouges.  Le  texte  montre  cette  belle  écriture  ronde  qui  se  rapproche 
encore  de  l'écriture  onciale,  mais  s'en  distingue  en  ce  que  les  lettres 
sont  plus  petites  et  liées  davantage.  Les  lettres  sont  même  liées  au  point 
que  la  clarté  en  souffre,  bien  que  l'œil  se  plaise  à  une  écriture  uniforme 
par  tout  le  ms.  La  lecture  est  surtout  rendue  difficile  par  l'extrême 
ressemblance  des  lettres  n  et  r.  Le  parchemin  est  excellent  et  fort,  sans 
être  trop  blanc,  l'écriture  brillante  et  d'un  noir  admirable.  Les  initiales 
présentent  les  couleurs  ordinaires  :  violet,  vert,  jaune  et  rouge  qui,  en 
quelques  endroits,  ont  gardé  leur  fraîcheur  première.  Un  détail  pour- 
tant ne  s'accorde   pas  avec  les  autres    caractères  de  l'écriture,  c'est 

I.  ["Nous  nous  proposons  de  ne  publier  dans  cette  revue  que  des  travaux  inédits:  nous 
avons  pourtant  cru  pouvoir  reproduire  la  présente  notice  de  M.  Wattenbach,  parce  que  le 
recueil  où  elle  a  paru,  VAnzeiger  fur  Kundc  dcr  Deutschen  Vorzcit  (n"  d'Octobre  1869), 
qui  s'occupe  spécialement  d'antiquités  germaniques,  est  peu  répandu  hors  d'Allemagne. 
Nous  espérons  que  nos  abonnés  nous  pardonneront  cette  infraction  à  la  règle  que  nous 
nous  sommes  posée.  —  Nous  saisissons  cette  occasion  pour  remercier  le  directeur  de  la 
revue  allemande,  M.  Essenwein,  qui  a  bien  voulu  mettre  à  notre  disposition  les  bois  dont 
cet  article  est  accompagné.  —  H.  G.] 


28  Un  Évangéliaire  à  Miniatures. 

l'emploi,  étranger  aux  Irlandais,  d'or  et  d'argent  dans  une  écriture  qui 
appartient  à  l'époque  carolingienne,  je  veux  dire  une  sorte  de  capitales 
ornées  très-aimées  au  ix"  siècle.  Mais  cette  énigme  se  résout  à  un  exa- 
men plus  approfondi.   Entre    les  lignes  qui  terminaient  l'évangile  de 


C(niden[i  mnlricDwan  8t^r~ 


saint  Luc  :  Expl.  evang.  secundum  Lucam  Deo  grat.  fdic,  on  a,  en  écri- 
ture d'argent,  intercalé  la  répétition  :  ExpUcit  liber  Sci.  Evangelii  secun- 
dum Lucam  Deo  gratias.  Le  titre,  en  écriture  d'or  :  Evangelium  secundum 
Lucam,  doit  aussi  être  une  addition  d'une  époque  postérieure,  et  nous 


Un  Évangéliaire  à  Miniatures.  29 

pouvons  conclure  que  l'or  qui,  contrairement  à  l'usage,  orne  les  initiales, 
est  un  prétendu  embellissement  de  l'époque  carolingienne.  Nous  pouvons 
dès  lors  attribuer  le  ms.  à  une  époque  ante-carolingienne,  disons  au 
vue,  sinon  au  vr  siècle. 


>0c  orvoirrMpnTncipio 
apudtiïh 


D'où  provient  ce  ms.  ?  Une  feuille  qu'on  y  a  collée  nous  renvoie  au 
couvent  de  Saint-Arnoul  de  Metz.  En  voici  le  texte  :  Lapidibus  con- 
îexti  codicis  scriptura  est  uncialis  Merovingica  de  sœculo  sexto  desinente;  alter 
de  eodem  circiter  tempore  scriptus  scriptura   Anglo-Saxonica  ad  uncialem 


30  Un  Ëvangéliaire  à  Miniatures, 

accedente;  uterque  codex  ingentis  raritatisac  valons  numerarii  si  venderentur. 
qui  valor  deberet  excedere  125  Ludovicos  aureos  pro  uno  quoque.  Doni 
Maugerard  in  Mon.  S.  Arnulphi  Magni  Francis  Ekemosinarii  bibllothecarius, 
régis  academis  Met.  socius,  in  caméra  Episcopali  Regularium  commissarius. 
L'auteur  de  cette  note  a,  par  une  confusion  assez  fréquente,  appelé 
«  anglo-saxonne  »  l'écriture  irlandaise  du  ms.,  mais  il  en  a  exactement 
donné  l'âge.  La  reliure  était  sans  doute  un  objet  de  prix,  si  même  elle 
n'était  pas,  comme  c'est  le  cas  pour  l'autre  ms.,  ornée  de  pierres 
précieuses.  Quoi  qu'il  en  soit,  elle  a  disparu,  et  le  précieux  ms.  est 
aujourd'hui  recouvert  d'une  simple  demi-reliure.  La  mention  :  Ex  libris 
A.  (ou  H.)  Gaeriler  a.  1809,  nous  mène  à  un  plus  récent  possesseur  du 
ms. 

Le  copiste  du  ms.  s'est  nommé.  A  la  dernière  page,  nous  voyons  un 
lion  grossièrement  peint  au-dessus  duquel  est  écrit,  en  caractères  plus 
récents  peut-être  :  Ecce  leo  stat  super  euangelium.  Au  dessous  du  lion, 
dans  un  encadrement  de  lignes  vertes,  se  trouvent  des  vers  ;  car  le 
second  est  bien  un  hexamètre,  et  les  autres  doivent  être  considérés 
comme  tels  : 

Lux  mundi  laeta  deus,  hœc  tibi  céleri  curs  U 

A\me  potens  scribsi  soli  famulatus  et  un  / 

Ul  te  vita  fruar  teque  casto  inveniam  cuit  U 

Rectaque  per  te  ad  te  ducente  te  gradiar  ui  A 

Excelse  cernis  deus  quœ  me  plurima  cingun  T 

iVota  et  ignota  tuis  maie  nata  zezania  sati  S 

Tu.  sed  mihi  certa  salus  spesque  unica  uita  E 

/mmeritum  licet  lucis  facias  adtingere  lime  N 

t/erba  nam  tua  ualida  imis  me  tolluat  avern  / 

Sola  haec  misero  mihi  te  vitam  dabunt  seruul  0 

Les  lettres  du  commencement  et  de  la  fin  des  vers,  écrites  en  rouge 
dans  le  ms.,  donnent  :  Laurentius  vivat  senio.  C'est  vraisemblablement 
le  nom  du  scribe,  nom  qui  n'est  pas  irlandais  :  c'est  probablement  un 
nom  pris  en  entrant  dans  le  cloître  ' . 

Je  laisse  aux  théologiens  le  soin  d'examiner  la  valeur  critique  de  ce 
texte  des  Évangiles,  et  je  continue  la  description  extérieure  du  ms.  Au 


I.  [Laurentius  se  rencontre  comme  forme  latinisée  du  nom  de  Lorcan,  archevêque  de 
Dublin,  au  xii°  siècle,  et  généralement  connu  sous  le  nom  de  Laurence  O'Toole.  Dans  la 
Martyrology  of  Donegal  [Printed  for  the  Irish  Arch<£ulogical  Society,  Dublin,  1864),  p.  202, 
il  est  fait  mention  d'un  «  Diacre  Laurentius»  probablement  un  Irlandais.  —  H.  G.] 


Un  Évangéliaire  à  Mini.Uures.  51 

verso   de  la  première   feuille,    sous  le  titre  :  Kanon  euangeliomm,  se 
trouvent  des  vers  sur  ce  canon  qui  commencent  ainsi  : 

Quam  in  primo  speciosa  quadriga 

Homo  leo  vitulus  et  aquila 

LXX  unum  per  capitula 

De  domino  conloquntar  paria 

In  secundo  subséquente  protinus,  etc. 

La  page  suivante  nous  représente  deux  oiseaux  merveilleux  sur  une 
table  qui  renferme  les  lettres  Euangelia  veritatis  dans  un  arrangement  plein 
d'art.  Le  verso  contient  les  mots  :  Prologvs  qvattvor  euangeliorum  bono 
lect.  felicit.  en  grands  caractères  d'une  écriture  onciale  très-pure  ;  les 
lignes  sont  alternativement  rouges  et  noires;  çà  et  là  on  les  a  ornées  de 
jaune.  Tous  les  titres  sont  également  écrits  dans  cette  antique  manière. 
Le  prologue  commence  par  une  ligne  (flures  fuisse)  ornée  d'une  façon 
tout  à  fait  irlandaise.  Le  texte  est  écrit  sur  deux  colonnes,  le  format  est 
grand  in-quarto.  Dans  tout  le  ms.  chaque  paragraphe  est  désigné  par 
une  initiale  ornée.  D'abord  vient  une  lettre  de  saint  Jérôme  à  saint 
Damase,  puis  les  Canones  evangeliorum,  par  colonnes,  comme  c'est 
l'usage,  et  enfin  les  évangiles  précédés  de  leur  sommaire.  Les  évangiles 
eux-mêmes  commencent  par  des  initiales  richement  ornées.  Avant 
l'évangile  de  saint  Jean  se  trouve  une  page  de  figures  pour  ainsi  dire 
mathématiques',  comme  il  s'en  rencontre  souvent  dans  les  mss.  irlan- 
dais, mais  celles-ci  ne  se  font  pas  remarquer  par  la  beauté.  Le  texte  est 
écrit  a  per  cola  et  commata,  »  c'est-à-dire  qu'au  lieu  de  ponctuation 
chaque  membre  de  phrase  remplit  une  ligne.  S'il  reste  quelque  part  un 
espace  vide  de  quelque  étendue,  il  est  rempli  à  l'aide  de  groupes  de 
points  rouges  qui  vont  trois  par  trois.  Les  passages  cités  ont  devant 
chacune  de  leurs  lignes  une  sorte  de  guillemet  avec  un  point  au  milieu, 
le  tout  en  rouge.  A  la  fin  du  quatrième  évangile  se  trouvent  les  mots  : 
Expl.  Evang.  Sec.  Johann.  Uiae  etfruere.  C'est  également  par  ce  souhait 
que  je  terminerai. 

W.  Wattenbach. 


I .  J'entends  par  là  ces  ornements  qui  remplissent  des  pages  entières  et  qui  se  com- 
posent de  spirales  et  d'autres  lignes  de  diflFérentes  couleurs,  diversement  entrelacées,  mais 
ne  représentant  aucun  objet  déterminé. 


THE  ANCIEN! 


IRISH   GODDESS   OF  WAR. 


The  discovery  of  a  Gallo-Roman  inscription,  figured  in  the  Revue 
Savoisienne  oî } ')Û\  November,  1867,  and  republished  by  M.  Adolphe 
Pictet  in  the  Revue  Archéologique  for  July,  1 868,  forms  the  subject  of  one 
of  those  essays  from  the  pen  of  the  vétéran  philologist  for  which  the 
students  of  Celtic  languages  and  archseology  cannot  be  sufficiently 
thankful  ». 


1.  The  substance  of  this  paper  was  read  before  the  Royal  Irish  Academy  on  the  2jth 

of  January,  1869.  il 

2.  I Nous  devons  à  la  bienveillance  de  la  Revue  Archéologique  de  pouvoir  reproduire  ici 
la  représentation  du  monument  original  qui  accompagnait  l'article  de  M.  Pictet.  Cette 
copie  est  une  réduction  au  dixième,  obtenue  par  le  pantographe  sur  un  estampage. —  H.  Cl 


The  ancient  Irish  Goddcss  oj  War.  3  j 

The  inscription,  the  initial  letter  of  which  has  been  destroyed  by  an 
injury  to  the  stone  on  which  it  is  eut,  reads  :  athubodu£  Aug[usU]  Ser- 
vilia  Terentia  [votum]  s[oh'it]  l[ibens]  ni[er'ito]. 

M.  Pictet's  essay  is  entitled  "  Sur  une  Déesse  Gauloise  de  la  Guerre  "; 
and  if  he  is  right  in  his  suggestion  ^(which  is  very  probable)  that  the 
letter  destroyed  was  a  c,  and  that  athvbodv^  should  be  read  cathv- 
BODV.E,  the  title  is  not  inappropriate  ;  and  in  the  cathvbodv^  of  the 
inscription  we  may  recognise  the  badb-catha  of  Irish  mythology. 

The  etymology  of  the  name  aîhubodua,  or  cathubodua,  as  we  may 
venture  to  read  it,  has  been  examined  with  great  industry  by  M.  Pictet, 
who  has  managed  to  compress  within  the  narrow  limits  of  his  essay  a 
great  mass  of  illustrative  facts  and  évidences  drawn  from  ail  the  sources 
accessible  to  him.  The  first  member  ofthe  name  {caîhu,  =  Irish  cath, 
«pugna»)  présents  but  little  difficulty  to  a  Celtic  scholar  like  M.  Pictet, 
who  would  however  prefer  fmding  it  writtenaz/u,  without  aspiration,  as 
more  nearly  approaching  the  rigid  orthography  of  Gaulish  names,  in 
which  it  is  very  frequently  found  as  the  first  élément;  but  the  second 
member,  bodua,  although  entering  largely  into  the  composition  of  names 
amongst  ail  the  nations  of  Celtic  origiii  from  the  Danube  to  the  islands 
of  Aran,  is  confessedly  capable  of  explanation  only  through  the  médium 
ofthe  Irish,  with  its  corresponding  forms  of  bodb  or  badb,  aspirated 
bodhbh,  badhbh  (pron.  bov  or  bav),  originally  signifying  rage,  fury,  or 
violence,  and  ultimately  implying  a  witch,  fairy,  or  goddess,  represented 
by  the  bird  known  as  the  scare-crow,  scald-crow,  or  royston-crow,  not 
the  raven,  as  M.  Pictet  seems  to  think. 

The  etymology  of  the  name  being  examined,  M.  Pictet  proceeds  to 
illustrate  the  character  of  the  Badb,  and  her  position  in  Irish  fairy 
mythology,  by  the  help  of  a  few  brief  and  scarcely  intelligible  références 
from  printed  books,  the  only  materials  accessible  to  him,  but  fmds  him- 
self  unable  to  complète  his  task,  "  for  want  of  sufficient  détails,  "  as  he 
observes  more  than  once.  The  printed  références,  not  one  of  which  has 
escaped  M.  Pictet's  industry,  are  no  doubt  few,  but  the  ancient  tracts, 
romances,  and  battle  pièces  preserved  in  our  Irish  MSS.  teem  with  détails 
respecting  this  Badb-catha  and  her  so-called  sisters,  Neman,  Mâcha,  and 
Morrigan  or  Morrigu  (for  the  name  is  written  in  a  double  form),  who  are 
generally  depicted  as  furies,  witches,  or  sorceresses,  able  to  confound 
whole  armies,  even  in  the  assumed  form  of  a  bird. 

Popular  tradition  also  bears  testimony  to  the  former  widespread  belief 
in  the  magical  powers  ofthe  Badb.  In  most  parts  of  Ireland  the  royston- 
crow,  or  fennèg  liath  na  gragarnaith  ("  the  chattering  grey  fennôg  "), 

3 


54  The  ancient  Irish  Goddess  of  War. 

assheis  called  by  the  Irish-speaking  people,  is  regarded  at  the  présent 
day  with  feelings  of  mingled  dislike  and  curiosity  by  the  peasantry,  who 
remember  the  many  taies  of  déprédation  and  slaughter  in  which  the 
cunning  bird  is  represented  as  exercising  a  sinister  influence.  Nor  is  this 
superstition  confined  to  Ireland  alone.  The  popular  taies  of  Scotland  and 
Wales,  which  are  simply  the  écho  of  similar  stories  once  current  and 
still  not  quite  extinct  in  Ireland,  contain  fréquent  allusion  to  this 
mystic  bird.  The  readers  of  the  Mabinogion  will  call  to  mind,  amongst 
other  instances,  the  wonderful  crow  of  Owain,  prince  of  Rheged,  a 
contemporary  of  Arthur,  which  always  secured  victory  by  the  aid  of  the 
three  hundred  crows  under  its  command  '  :  and  in  Campbell's  Popular 
Taies  of  the  West  Highlands  we  hâve  a  large  stock  of  legends,  in  most 
of  which  the  principal  fairy  agency  is  exercised  by  the  hoody  or  scare- 
crow. 

It  may  be  observed,  by  the  way,  that  the  name  hoody,  formerly 
applied  by  the  Scotch  to  the  hooded  crow,  or  scare-crow,  from  its 
appearance,  is  now  generally  applied  to  its  less  intelligent  relative  the 
common  carrion  crow.  But  the  hoody  of  Highland  fairy  mythology  is, 
nevertheless,  the  same  as  the  badb  or  royston  crow. 

I  hâve  referred  to  Neman,  Mâcha,  and  Monigu,  as  the  so  called  sisters 
of  the  Badb.  Properly  speaking,  however,  the  name  Badb  seems  to  hâve 
been  the  distinctive  title  of  the  mythological  beings  supposed  to  rule 
over  battle  and  carnage.  M.  Pictet  feels  a  difficulty  in  deciding  whether 
there  were  three  such  beings,  or  whether  Neman,  Mâcha,  and  Morriga 
are  only  différent  names  for  the  same  goddess  ;  but  after  a  careful  exa- 
mination  of  the  subject  I  am  inclined  to  believe  that  thèse  names  repre- 
sent  three  différent  characters,  the  attributes  of  Neman  being  like  those 
of  a  being  who  confounded  her  victims  with  madness,  whilst  Monigu 
incited  to  deeds  of  valour,  or  planned  strife  and  battle,  and  Mâcha 
revelled  amidst  the  bodies  of  theslain. 

The  popular  notions  regardingtheidentity  ofthe  battle  furies  with  the 
royston-crow  are  accurately  given  in  the  Irish  Dictionary  compiled  by 
the  late  Peter  O'Connell,  an  excellent  Irish  scholar,  who  died  some 
60  years  ago,  and  the  original  of  whose  excellent  vocabulary  ispreserved 
in  the  British  Muséum.  Thus  : 

Badb-catha  is  explained  by  "  Fionôg,  a  royston  crow,  a  squall 
crow". 

"  Badb,  i.  e.  bean  sidhc,  a  female  fairy,  phantom,  or  spectre,  sup- 

1.  See  the  Dream  0/  Rlionabwy,  in  the  Mabinogion,  part.  V,  pp.  385  and  410. 


The  ancienî  Irisli  Goddess  of  War.  ?  5 

posed  to  be  attached  to  certain  familles,  and  to  appear  sometimes  in  the 
form  of  squall  crows,  or  royston  crows  ". 

"  Mâcha;  i.  e.  a  royston  crow  ". 

"  Monighain;  i.  e.  the  great  fairy  ". 

"  Neamhan;  i.  e.  Badb  catha  nô  feannôg;  a  badb  catha,  or  a  royston 
crow  ". 

Similar  explanations  are  also  given  by  the  other  modem  glossarists. 

The  task  of  elucidating  the  mythological  character  of  thèse  fairy 
queens  has  not  been  rendered  easier  by  the  labours  of  the  etymologists, 
from  Cormac  to  O'Davoren.  Thus,  in  Cormac's  glossary  Nemain  is  said 
to  hâve  been  the  wife  of  Neit,  "  the  god  ofbattle  with  the  pagan 
Gaeidhel  ".  In  the  Battit  of  Magh-Rath  (O'Donovan's  éd.  p.  241)  she  is 
called  Be  nith  guhhach  Neid,  "  the  battle  terrifie  Be-NeUi",  or  "  wife  of 
Neid".  In  an  Irish  MS.  in  Trin.  Coll.,  Dublin  (class.  H,  3,  18,  p.  75, 
col.  1),  Neit  is  explained  ^' guin  duine  À.  gaisced;  dia  catha.  Nemon  a 
ben,  ut  est  Be  Neid;  "  i.  e.  "  man  wounding;  valour;  god  of  battle. 
Nemon  [was]  his  wife;  ut  est  Be  Neid  ".  A  poem  in  the  Book  of  Leinster 
(fol.  6,  32),  couples  Badb  and  Neinan  as  the  wives  of  Neid  or  Neit  :  — 

Neit  mac  Indui  sa  di  mnai, 
Badb  ocus  Nemaind  cen  gai, 
Ko  marbtha  in  Ailiuch  cen  ail, 
La  Neptuir  d'Fliomorchaibh. 

"  Neit  son  of  Indu,  and  his  two  wives, 
Badb  and  Nemain,  truly, 
Were  slain  in  Ailech,  without  blemish, 
By  Neptur  of  the  Fomorians  ". 

At  folio  5,  32,  of  the  same  MS.,  Fea  and  Nemain  are  said  to  hâve 
been  Neiî's  two  wives;  and  if  Fea  represents  Badb,  we  hâve  a  good 
notion  of  the  idea  entertained  of  her  character,  for  Cormac  st3tes  that 
Fea  meant  "  everything  most  hateful  ", 

But  in  the  poem  on  Ailech  printed  from  the  Dinnsenchus  in  the 
"  Ordnance  Memoir  of  Templemore  "  (p.  226),  Neman  only  is  mentioned 
as  the  wife  of  Neit,  from  whom  Ailech  was  called  Ailech-Neit;  3nd  it  is 
added  thst  she  was  brought  from  Bregia,  or  Meath. 

In  the  Irish  books  of  genealogy,  Fea  and  Neman  are  S3id  to  hâve 
been  the  two  daughters  of  Elcmar  of  the  Brugh  (Newgrange,  near  the 
Boyne),  who  was  the  son  of  Delbaeth,  son  of  Ogma,  son  of  Elatan, 
3nd  the  wives  of  Neid  son  of  Indae,  from  whom  Ailech-Neid  is  named. 


36  The  ancient  Irish  Goddess  of  War. 

Badb,  Mâcha,  and  Morrigan  (who  is  also  called  Ana,  are  described 
as  the  three  daughters  of  Delbaeth  son  of  Neid.  And  it  is  stated  that 
Ernmas,  daughter  of  Ettarlamh,  son  of  Nuada  Airged-lamh  (king  of 
the  Tuatha-de-Danann),  was  the  mother  of  the  five  ladies  '. 

In  other  authorities,  however,  Morrigan  is  said  to  hâve  been  Neit's 
wife.  For  instance,  in  the  very  ancient  taie  called  Tochmarc  Emhire, 
or  Courtship  of  Emir,  fragments  of  which  are  preserved  in  the  Lebor  na 
hUidhre  and  the  Book  of  Fermoy,  Morrigan  is  described  as  "  an  badb 
catha,  ocus  isfria  idberiur  Bee  Neid,  i.  e.  bandea  in  cathae,  uair  is  inan  Neid 
ocus  dia  catha;  "  i.  e.  "  the  badb  of  battle;  and  of  her  is  said  Bee  Neid, 
i.  e.  goddess  of  battle,  for  Neid  is  the  same  as  god  of  battle  ".  A  gloss 
in  the  Lebor  Buidhe  Lecain  explains  Machae  thus:  "  badb,  no  asi  an  très 
Morrigan;  mesrad  machs,  .i.  cends  doine  iar  na  nairlech;  "  i.  e.  "  a 
scald  crow  ;  or  she  is  the  third  Morrigan  (great  queen)  ;  Macha's  fruit 
crop,  /.  e.  the  heads  of  men  that  hâve  been  slaughtered  ".  The  same 
explanation,  a  little  amplified,  is  also  given  in  the  MS.  H.  3,  18.  Trin. 
Coll.,  Dublin(p.  82,  col.  2)  where  the  name  Badb  is  written  Bodb,  as  it 
is  elsewhere,  and  it  is  added  that  Bodb,  Mâcha,  and  Morrigan  were  the 
three  Morrigna.  In  the  same  glossary,  under  the  word  beneit,  we  hâve 
the  further  explanation  :  —  "  Neit  nomen  viri,  Nemhon  a  ben;  ba  neim- 
nech  in  lanomuin  ;  be  béni.  e.  in  badhb,  ocus  net  cath,  ocus  olca  diblinuib; 
inde  dicitur  beneit  fort  ".  /.  e.  "•  Neit  nomen  viri;  Nemhon  was  his  woman 
(wife);  venemous  were  the  pair;  be  a  woman,  /.  e.  the  badhb,  and  net 
is  battle;  and  both  were  evil;  inde  àichur  beneit  fort  Q'  evil  upon  thee"). 
Another  gloss  in  the  same  collection,  on  the  word  gudomain,  bears  on 
the  subject  under  considération.  It  is  as  foUows  :  —  Gudomain,  .i.  fennoga 
no  bansigaidhe ;  ut  est  glaidhomuin  goa,  .i.  na  demuin  goacha,  na  morrigna; 
no  go  conach  demain  iat  na  bansigaide  go  connach  demain  iffrinn  iat  acht 
demain  aeoir  na  fendoga;  no  eamnait  anglaedha  na  sinnaigh,  ocus  eamnait 
a  ngotha  na  fendoga;  "  i.  e.  "  gudomain,  i.  e.  scald-crows,  or  fairy 
women;  ut  tst  glaidhomuin  goa,  the  false  démons,  the  morrigna;  or  it 
is  false  that  the  bansigaidhe  are  not  démons  ;  it  is  false  that  the  fendoga 
(scald  crows)  are  not  hellish  but  aery  démons  :  the  foxes  double  their 
cries,  but  the  fennoga  double  their  sounds  ".  To  understand  this  curious 
gloss  it  is  necessary  to  add  that  in  a  previous  one  the  word  glaidomuin 
is  explained  as  signifying  sinnaig,  or  maie  tire  (foxes,  or  wolves),  because 
in  barking  they  double  the  sound  ;  ghùdomuin  being  understood  by  the 
glossarist  as  glaid-emain,  i.  e.  "  double  call  ",  from  glaid,  "  call  ",  and 

I.  Mac  Firbis,  Ceneal.,  p.  79. 


The  ancient  Irish  Goddess  of  War.  37 

emain,  "  double,  "  while  the  crow  only  doubles  the  sound,  guth- 
emain,  "  double-sound  ".  Cormac  explains  guidemain  as  uatha  ocus 
morrigna,  i.  e.  "  spectres  and  great  queens  ". 

Let  us  take  leave  of  thèse  etymological  quibbles,  and  examine  the 
mythological  character  of  the  badh,  as  portrayed  in  the  materials  still 
remaining  to  us. 

As  mostly  ail  the  supernatural  beings  alluded  to  in  Irish  fairy  lore  are 
referred  to  the  Tuatha-de-Danann ,  the  older  copies  of  the  Lehor 
Cabhala,  or  "  Book  of  Occupation  ",  that  preserved  in  the  Book  of 
Leinster  for  instance,  spécifies  Badb,  Mâcha,  and  Ana  (from  the  latter 
ot  whom  are  named  the  mountains  called  da  cich  Anann,  or  the  Paps, 
in  Kerry),  as  the  daughters  of  Ernmas,  one  of  the  chiefs  of  that  mythical 
colony.  Badb  ocus  Mâcha  ocus  Anand,  diataî  cichi  Anand  il-Luachair,  tri 
ingena  Ernbais,  na  ban  tuathige;  "  Badb,  and  Macha^  and  Anand,  from 
whom  the  "  paps  of  Anann  '  "  in  Luachair  are  [called],  thethree  daugh- 
ters of  Ernbas,  the  ban-îuathaig  ".  In  an  accompanying  versification  of 
the  same  statement  the  name  of  Anand  or  Ana,  however,  is  changed  to 
Morrigan  :  — 

"  Badb  is  Mâcha  met  indbâis, 
Morrigan  fotla  felbdis, 
Indlema  ind  âga  ernbais, 
Ingena  ana  Ernmais^  ". 

"  Badb  and  Mâcha,  rich  the  store, 
Morrigan  who  dispenses  confusion, 
Compassers  of  death  by  the  sword, 
Noble  daughters  of  Ernmas  ". 

It  is  important  to  observe  that  Morrigan  is  hère  identified  with  Anann, 
or  Ana  (for  Anann  is  the  gen.  form);  and  in  Cormac's  Glossary  Ana  is 
described  as  "  Mater  deorum  Hibernensium;  robu  maith  din  rosbiathadsi 
na  dee  de  cujus  nomine  da  cich  Anainne  iar  Luachair  nominantur  ut 
fertur  ;  "  /.  e.  "■  Mater  deorum  Hibernensium  ;  well  she  used  to  nourish 
the  gods  de  cujus  nomine  the  '  two  paps  of  Ana  '  in  west  Luachair 
are  named  ".  Under  the  name  Buanand  the  statement  is  more  briefly 
repeated.  The  historian  Keating  enumerates  Badb,  Mâcha,  and  Mor- 
righan  as  the  three  goddesses  of  the  Tuatha-de-Danann;  but  he  is  silent 

1.  It  is  rather  an  interesting  fact  that  near  the  mountain  called  Da-Cich-Anann, 
there  is  a  fort  called  Lis-Babha,  or  the  fort  of  Badb. 

2.  Book  of  Leinster  fol.  S,  ba! 


3  8  The  ancient  Irish  Goddess  of  War. 

as  to  their  attributes.  It  would  seem,  however,  that  he  understood 
Badb  to  be  the  proper  name  of  one  fairy,  and  not  a  title  for  the  great 
fairy  queens. 

In  the  Irish  taies  of  war  and  battle,  the  Badb  is  always  represented 
as  foreshadowing,  by  its  cries,  the  extent  of  the  carnage  about  to  take 
place,  or  the  death  of  some  eminent  personage.  Thus  in  the  ancient 
battle-story,  called  Bruidhen  da  Choga,  the  impending  death  of  Cormac 
Condloinges,  the  sonof  Conor  Mac  Nessa,  is  foretold  in  thèse  words  :  — 

"  Badb  bel  derg  galrfid  fon  tech; 
Bo  collain  betco  sirtech.  " 

"  The  red-mouthed  Badbs  will  cry  around  the  house. 
For  bodies  they  will  be  solicitous.  " 

And  again  — 

"  Grecfaidit  badba  banae.  " 

"  Pale  hadhs  shall  shriek.  ■" 

In  the  very  ancient  taie  called  Tochmarc  Feirbe,  or  the  "  Courtship  of 
Ferb  ",  a  large  fragment  of  which  is  preserved  in  the  Book  of  Leinster, 
the  Druid  Ollgaeth,  prophesying  the  death  of  Mani,  the  son  of  Queen 
Medb,  through  the  treachery  of  King  Conor  Mac  Nessa,  says  :  — 

"  Brisfid  badb, 
Bid  brig  borb, 

Tolg  for  Medb  ; 
Ilar  échî, 
Arforslùag, 

Trûag  in  deilm  ' . 

"  Ba^t  will  break; 
Fierce  power  will  be 
Hurled  at  Medbh; 
Many  deeds  — 
Slaughter  upon  the  host  — 
Alas!  the  uproar,  " 

In  the  account  of  the  battle  of  Cnucha  (or  Castleknock,  near  Dublin), 
preserved  in  a  I4th  century  MS.,  the  Druid  Cunallis,  foretelling  the 
slaughter,  says  :  —  "  Biadh  bàdba  os  bruinnibh  n*  bfear  "  ^'  Badbs 
will  be  over  the  breasts  of  the  men  *.  " 

1.  Book  of  Leinster,  fol.  1R9,  bi. 

2.  See  also  the  référence  to  badbs  and  furies  in  tlie  Battle  of  Magh-Lcna,  pp.  130-1,  sq. 


The  Ancient  Irish  Goddess  of  War.  Î9 

In  the  description  of  the  battle  of  Magh-Tuiredh  it  is  said  that  just 
as  the  great  conflict  was  about  to  begin,  the  "  hadbs,  and  bledlochtana, 
and  idiots  shouted  so  that  they  were  heard  in  clefts,  and  in  cascades, 
and  in  the  cavities  of  the  earth;  "  "  ro  gairsed  badba  ocus  bledlochtana, 
ocus  amaite,  go  clos  anallaib,  ocus  a  nesaib,  ocus  a  fothollaib  in  talman  '.  " 
In  the  battle  of  Magh-Rath  it  is  the  "  gray-haired  Morrigu  "  (scald- 
crow),  that  shouts  victory  over  the  head  of  Domhnall  son  of  Ainmire, 
as  Dubhdiadh  sings  (O'Donovan's  éd.  p.  198)  :  — 

"  Fuil  os  a  chind  ag  eigmigh 
Caillech  lom,  luaîh  ag  leimnig 
Os  eannaib  a  narm  sa  sciath, 
Is  i  in  Morrigu  mongliath.  " 

"  Over  his  head  is  shrieking 
A  lean  hag,  quickly  hopping 
Over  the  points  of  their  weapons  and  shields  — 
She  is  the  gray  haired  Morrigu.  " 

In  the  account  of  the  massacre  of  the  Irish  Kings  by  the  Aithech- 
tuatha,  preserved  in  the  Book  of  Fermoy,  it  is  stated  that  after  the 
massacre  "  ba  forbhailidh  badhbh  derg  dasachta,  ocus  ba  bronach  banchuire 
don  treis  sin;  "  "  Gory  Badb  was  joyful,  and  women  were  sorrowful,  for 
that  conflict.  " 

In  the  enumeration  of  the  birds  and  démons  that  assembled  to  gloat 
over  the  slaughter  about  to  ensue  from  the  clash  of  the  combatants  at  the 
battle  of  Clontarf,  the  badb'i?,  assigned  the  first  place.  The  description  is 
truly  terrible,  and  affordsa  painful  picture  of  the  popular  superstition  at 
the  time.  "  Ro  erig  em  badb  discir,  dian,  denmnetach,  dasachtach,  dur, 
duabsech,  detcengtach,  cruaid,  croda,  cosaiiech,  co  bai  ic  screchdd  ar  luamain 
os  a  cennaib.  Ro  eirgetar  am  bananaig,  ocus  boccanaig,  ocus  geliti  glinni, 
ocus  amati  adgaill,  ocus  siabra,  ocus  seneoin,  ocus  demna  admilti  acoir  ocus 
firmaminti,  ocus  siabarsluag  debil  demnach,  co  mbatar  a  comgresacht  ocus  i 
commorad  aig  ocus  irgaili  ko.  " 

"  There  arose  a  wild,  impetuous,  precipitate,  mad,  inexorable, 
furious,  dark,  lacerating,  merciless,  combative,  contentious  badb,  which 
was  shrieking  and  fluttering  over  their  heads.  And  there  arose  also  the 
satyrs,  and  sprites,  and  the  maniacs  of  the  valleys,  and  the  witches,  and 
goblins,  and  owls,  and  destroying  démons  of  the  air  and  firmament,  and 

I.  Ms.  Trin.  Coll.  Dublin,  H.  2,  17,  fol.  97,  a. 


40  The  Ancient  Irish  Goddess  of  War. 

the  demoniac  phantom  host;  and  they  were  inciting  and  sustaining 
valour  and  battle  with  them.  "  —  "  Cogadh  Gaedhel  re  Gallaibh,  "  Todd's 
éd.,  p.  174. 

So  also  in  the  account  of  the  battle  fought  between  the  men  of  Leinster 
and  Ossory,  in  the  year  870,  contained  in  the  Brussells  "  Fragments 
of  Irish  Annals,  "  the  appearance  of  the  badb  is  followed  by  a  greai 
massacre  :  "  As  môr  tra  an  îoirm  ocus  an  fothrom  baoi  etarra  an  uair  sin, 
ocus  ra  togaibh  badbh  cenn  eturra,  ocus  baoi  marbhadh  môr  etarra  san  cdn;" 
i.  e.  "  great  indeed  was  the  din  and  tumult  that  prevaiied  betwen  them 
at  this  time,  and  Badbh  appeared  among  them,  and  there  was  great 
destruction  between  themto  and  fro.  " 

But  the  Badbs  could  do  more  than  scream  and  flutter.  Thus  we  read 
in  the  first  battle  of  Magh-Tuiredh,  that  when  the  Tuatha-de-Danann 
had  removed  to  the  fastnesses  of  Connacht,  to  SHabh-Belgadain,  or 
Cenn-duibh-slebhe,  that  Badb,  Mâcha,  anà  Morrigu  exercised  their  magical 
powers  to  keep  the  Fir-bolgs  in  ignorance  of  the  westward  movement. 
The  textis  from  H.  2.  17,  T.  C.  D.,  fol.  93,  col.  2.  ''  Is  annsin  do 
chuaidh  Badhbh  ocus  Mâcha  ocus  Morrighu  gu  cnoc  gabala  na  ngial,  ocus 
gu  tulaig  îechtairechta  na  trom  sluag,  gu  Temraig,  ocus  do  feradar  cetha  dolfe 
draigechta,  ocus  cith  nela  cotaigecha  ciach,  ocus  frasa  tromaidble  îened,  ocus 
dortad  donnfala  do  shiltïn  asin  aeor  i  cennaib  na  curad,  ocus  nir  legset  scarad 
na  scailed  do  feraib  Bolg  co  cenn  tri  la  ocus  tri  naidche.  "  "■  Then  Badb, 
and  Mâcha,  and  Morrigu  went  to  the  hill  of  hostage-taking,  the  tulach 
which  heavy  hosts  frequented,  to  Temhair  (Tara),  and  they  shed  drui- 
dically  formed  showers,  and  fog-sustaining  shower-clouds,  and  poured 
down  from  the  air,  about  the  heads  of  the  warriors,  enormous  masses 
of  fire,  and  streams  of  red  blood;  and  they  did  not  permit  the  Fir-Bolgs 
toscatteror  separate  for  the  space  of  three  days  and  three  nights.  " 
It  is  stated,  however,  that  the  Fir-Bolg  druids  ultimately  overcame  this 
sorcery.  And  in  the  battle  of  Magh-Tuiredh  they  are  represented  as 
assisting  the  Tuatha-de-Danann.  Thus,  in  the  account  of  the  third  day's 
conflict  we  read.  —  "  /i  iad  taisig  ro  crgedar  re  Tuathaib  de  Danann  isin 
lo  sin  À.  Ogma  ocus  Midir  ocus  Bodb  derg  ocus  Diancecht,  ocus  Aengaba 
na  hiruaithe.  Rachmaitne  lib  ar  na  ingena  .i.  Badb  ocus  Mâcha,  ocus 
Morigan,  ocus  Danann;  "  /.  c.  "  The  chieftains  who  assisted  the  Tuatha- 
de-Danann  on  that  day  were  Ogma,  and  Midir,  and  Bodb  Derg,  and 
Diancecht,  and  Aengabha  of  Norway.  '  We  wili  go  with  you,  '  said  the 
daughters,  viz  :  —  Badb,  and  Mâcha,  and  Morrigan,  and  Danann  (or 
Anann).  "  H.  2.  17,  fol.  95,  col.  2. 

Another  instance  of  the  warlike  prowess  of  thèse  fairies  is  related  in  a 


The  ancient  Irish  Goddess  of  War.  41- 

curious  mythological  tract  preserved  in  the  Books  of  Lismore  and 
Fermoy.  I  refer  to  the  Hallow-eve  dialogue  between  the  fairy  Rothniab 
and  Finghen  Mac-Luchta,  in  which  the  fairy  enumerates  the  several 
mystical  virtues  attached  to  that  pagan  festival,  and  amongst  others  the 
following,  referring  to  an  incident  arising  from  the  battle  of  the  Northern 
Magh-Tuiredh,  or  "  Magh-Tuiredh  of  the  Fomorians.  "  "  Ocus  cidli 
buadli  aile,  for  Fingen.  Ni  ansam,  for  in  ben.  Ata  ann  ceîhrar  atrullaiset 
ria  Tuathaib  de  Danann  a  caîh  Muigi  tuiredh,  corrabaîar  oc  coll  etha  ocus 
blechîa,  ocus  messa,  ocus  murthorad  .1.  fer  dib  a  slemnaib  Maigi  Itha  ,i. 
Redg  a  ainmsidé;  fer  dib  a  sléib  Smôil  .i.  Grenu  a  ainmsidé;  fer  aile  a 
ndromannaib  Breg  À.  Bréaa  ainm ;  fer  aile  dib  hicrichaib  cruachna  A.  Tinel 
a  ainmsidé.  Indocht  rosruiîhéa  a  hErinn  .1.  in  Morrigan  ocus  Badli  Side 
Femin,  ocus  Migir  Brig  Leith,  ocus  Mac  ind  ôc,  cona  beth  foglai  Fomèir  for 
hErinn  eu  brath.  " 

"  •'  And  what  other  virtue,  '  asked  Finghen.  '  Not  difficult  to  tell,  ' 
said  the  woman.  There  were  four  persons  who  fled  before  the  Tuatha- 
de- Danann  from  the  battle  of  Magh-Tuiredh,  so  that  they  were  ruining 
corn,  and  milk,  and  fruit-crops,  and  sea  produce;  viz  :  one  of  them  in 
Slemna-Maighe-Itha,  whose  name  was  Redg;  one  of  them  in  Slaibh- 
Smoil,  whose  name  was  Grenu;  another  man  of  them  in  Dromanna- 
Bregh,  whose  name  was  Bréa;  and  another  of  them  in  the  territories  of 
Cruachan,  whose  name  was  Tinel.  This  night  [i.  e.  on  a  similar  night] 
they  were  expelled  from  Eriu  by  the  Morrigan,  and  by  Badh  of  Sidh- 
Femhin,  and  by  A/;J/r  of  Brig-leith,  and  Mac-ind-oig,  so  that  Fomorian 
depredators  should  never  more  be  over  Eriu.  "  Book  of  Fermoy,  24, 
b2. 

In  the  grand  old  Irish  epic  of  the  Tain  Bo  Cuailnge,  Badb  (or  Bodb) 
plays  a  very  important  part.  Neman  confounds  armies,  so  that  friendly 
bands  fall  in  mutual  slaughter;  whilst  Mâcha  is  pictured  as  a  fury  that 
riots  and  revels  among  the  slain.  But  certainly  the  grandest  figure  is 
that  of  Morrigu,  whose  présence  intensifies  the  hero,  nerves  his  arm  for 
the  cast,  and  guides  the  course  of  the  unerring  lance.  As  in  this  epic  the 
first  place  in  valour  and  prowess  is  given  to  Cuchullain,  the  Hector  of 
the  Gaeidhel,  it  is  natural  to  expect  that  he  should  be  represented  as  the 
spécial  favourite  of  the  supernatural  powers.  And  so  it  is;  for  we  read 
that  the  Tuatha-de-Danann  endowed  him  with  great  attributes.  In  that 
passage  of  the  Tain  where  Cuchullain  is  described  as  jumping  into  his 
chariot  to  proceed  to  fight  Firdia  Mac  Demain,  the  narrative  says  {Book 
of  Leinster,  fol.  57,  b2)  "  ra  gairestar  imme  boccanaig,  ocus  bandnaig, 
ocus  geniti  glinni,  ocus  demna  aeoir,  daig  daberîis  Tuaîha   de  Danann  a 


42  The  ancient  Irish  Goddess  of  War. 

ngasciud  immisinm,  combad  môîi  a  grain,  ocus  a  ecla,  ocus  a  urûaman  in 
cach  caîh  ocus  in  cach  cathrùi,  in  cach  comlund  ocus  in  cach  comme  i  tei- 
ged;  "  "  the  satyrs,  and  sprites,  and  maniacs  of  the  valleys,  and  démons 
of  the  air,  shouted  about  him,  for  the  Tuatha-de-Danann  were  wont  to 
impart  their  valour  to  him,  in  order  that  he  might  be  more  feared,  more 
dreaded,  more  terrible,  in  every  battle  and  battle-field,  in  every  combat 
and  conflict,  into  which  he  went.  "  So,  when  the  forces  of  Oueen 
Medb  arrive  at  Magh-Tregha,  in  the  présent  county  of  Longford,  on 
the  way  to  Cuailnge,  Neman  appears  amongst  them.  "  Dosjobair  tra  ind 
Nemain  A.  in  Badb  lasodain,  ocus  nipsisin  adaig  bd  samam  doib  la  budris 
ind  faihaigh  .i.  dubthaig  triana  chotlud.  Foscerdat  inna  buidne  focedoir, 
ocus  focherd  dirna  mor  dint  slôgh  conluid  Medbh  dia  chose  "  "■  Then  the 
Neman,  i.  e.  the  Badb,  attacked  them,  and  that  was  not  the  most  comfor- 
table  hight  with  them,  from  the  uproar  of  the  giant  Dubtach  through  his 
sleep.  The  bands  were  immediately  startled,  and  the  army  confounded, 
until  Medb  went  to  check  the  confusion.  "  Lebor  na  hUidhre,  fol.  46, 
ai. 

And  inanother  passage,  in  the  épisode  called  "  Breslech  Maighe  Muir- 
themhne,"  where  a  terrible  description  is  given  of  Cuchullain's  fury  at 
seeing  the  hostile  armies  of  the  south  and  west  encamped  within  the 
borders  of  Uladh,  we  are  told  (Book  of  Leinster,    fol.    54,  a2,    and 

bi); 

''  Atchonnairc  seom  uad gristaitnem  na  narm  nglan  arda  os  chind  chethri 
noll  choiced  nErend  refuiniud  nell  na  nona.  Do  fainig  ferg  ocus  luinni  mor 
icanaiscin  re  ilar  a  bidbad,  re  immad  a  namad.  Rogab  a  da  shleig,  ocus  a 
sciath,  ocus  a  chlaideb.  Crothais  a  sciath,  ocus  cressaigis  a  shlega,  ocus 
bertnaigis  a  chlaidcm,  ocus  do  bert  rem  curad  as  a  bragit  cororccratar  hana- 
naig  ocus  boccanaig,  ocus  geniti  glinni,  ocus  demna  aeoir,  re  uathgrain  na 
gare  dosbertatar  ar  aird,  co  ro  mesc  ind  Neamain  A.  in  Badb  forsint  slog. 
Dollotar  in  armgrith  cethri  choiced  hErend  im  rennaib  a  sleg  ocus  a  narm 
fadessin,  conerbaltatar  ced  laech  dib  d'uathbas  ocus  chridemnas  ar  lar  in 
dunaid  ocus  in  longphoirt  in  naidchisin.  "  "■  He  saw  from  him  the  ardent 
sparkling  of  the  bright  golden  weapons  over  the  heads  of  the  four  great 
provinces  of  Eriu,  before  the  fall  of  the  cloud  of  evening.  Great  fury 
and  indignation  seized  him  on  seeing  them,  at  the  number  of  his  oppo- 
nents  and  the  multitude  of  his  enemies.  He  seized  his  two  spears,  and  his 
shield  and  his  sword.  He  shook  his  shield,  balanced  his  spears,  and 
brandished  his  sword,  and  uttered  from  his  throat  a  warrior's  shout,  so 
that  sprites,  and  satyrs,  and  maniacs  of  the  valley,  and  the  démons  of 
the  air  responded,  terror-stricken  by  the  shout  which  he  had  raised  on 


The  ancient  Irish  Coddess  of  War.  4) 

high.  And  the  Neman,  i.  e.  the  Badh,  confused  the  army;  and  the  four 
provinces  of  Eriu  dashed  themselves  against  the  points  of  their  own 
spears  and  weapons,  so  that  one  hundred  warriors  died  of  fear  and 
trembling  in  the  middle  of  the  fort  and  encampment  that  night.  " 

Of  the  effects  of  this  fear  inspired  by  the  Badb  was  geltacht  or  lunacy, 
which,  according  to  the  popular  notion,  affected  the  body  no  less  than 
the  mind,  and,  in  fact,  made  its  victims  so  hght  that  they  flew  through 
the  air  like  birds.  A  curious  illustration  of  this  idea  is  afforded  by  the 
history  of  Suibhne,  son  of  Colman  Cuar,  king  of  Dal-Araidhe,  who 
became  panic-stricken  at  the  battle  of  Magh-Rath,  and  performed 
extraordinary  feats  of  agility.  Another  remarkable  instance  will  be  found 
in  the  Fenian  Romance  called  Cath-Finnîragha  (battle  of  Ventry  Harbour), 
where  Bolcan,  a  king  of  France,  is  stated  to  hâve  been  seized  with 
geltacht  at  the  sight  of  Oscur,  son  of  Oisin,  so  that  he  jumped  into  the 
air,  alighting  in  the  beautiful  valley  called  Glenn-na-ngealt  (or  "  the 
Glen  of  the  Lunatics  "),  twenty  miles  to  the  east  of  Ventry  Harbour, 
whither,  in  the  opinion  of  the  past  génération,  ail  the  lunatics  of  the 
country  would  go,  if  unrestrained,  to  feed  on  the  cure-imparting  water 
cresses  that  grow  there  over  the  well  called  Tohar  na  ngealt,  or  the 
"  well  of  the  lunatics  ".  In  the  same  taie  it  is  also  said  that  those  who 
heard  the  shouts  of  the  invading  armies  on  landing  were  surprised  that 
they  were  not  carried  away  by  the  wind  and  lunacy:  "ba  hiongna  le  gach 
dd  gcûalad  na  garrtha  sin  gan  dol  re  gaoith  agus  re  gealtachus  doib.  "  Per- 
sons  are  also  represented  as  frightened  to  madness  on  observing  the 
fight  between  Cuchulla'm  and  Ferdia,  which  forms  the  chief  épisode  in 
the  Tain  Bo  Cuailnge. 

Again,  in  the  battle  of  Almha  (or  the  Hill  of  Allen,  near  Kildare), 
fought  in  the  year  722,  between  Murchadh,  king  of  Laighen,  and 
Ferghal,  monarch  of  Ireland,  where  "  the  red-mouthed,  sharp-beaked, 
badb  croaked  over  the  head  of  Ferghal,  "  ("  ro  ko  badb  belderg  biorach 
iolach  um  cenn  Fergaile  "),  we  are  told  that  nine  persons  became  thus 
affected.  The  Four  Masters  (a.  d.  718)  represent  them  as  "  fleeing  in 
panic  and  lunacy,  "  {do  lotar  hi  faindeal  ocus  i  ngealtacht).  Other  anna- 
lists  describe  them  in  similar  terms.  Thus,  Mageoghegan,  in  his  trans- 
lation of  the  "  Annals  of  Clonmacnoise,  "  says  they  "  flyed  in  the  air 
as  if  they  were  winged  fowle.  "  O'Donovan  (in  notes  to  the  entries  in 
his  édition  of  the  Four  Masters,  and  Fragments  of  Annals)  charges 
Mageoghegan  with  misrepresenting  the  popular  idea;  but  Mageoghegan 
represented  it  correctly,  for  in  the  Chronicum  Scotorum  the  panic-stricken 
at  this  battle  are  called  "  volatiles,  "  ov  gealta.  May  we  not  therefore 


44  The  ancient  Irish  Goddess  of  War. 

seek,   in    this  vulgar  notion,  the  origin  of  the  word  "  flighty  "  as 

applied  to  persons  of  eccentric  mind  ? 

But  although,  as  we  hâve  seen,  the  assistance  given  to  Cuchullain  by 
Neman  was  both  fréquent  and  important,  the  intervention  of  Morrigu 
in  his  behalf  is  more  constant.  Nay,  he  seems  to  hâve  been  the 
object  of  her  spécial  care.  She  is  represented  as  meeting  him  sometimes 
in  the  form  of  a  woman,  but  frequently  in  the  shape  of  a  bird  —  most 
probably  a  crow.  Although,  apparently,  his  tutelary  goddess,  the 
Morrigu  seems  to  hâve  been  made  the  instrument,  through  the  decree  of 
a  cruel  fate,  in  his  prématuré  death.  The  way  was  thus  : 

In  the  territory  of  Cuailnge,  near  the  Fews  Mountains,  dwelt  a 
famous  bull,  called  the  Donn  Cuailnge  (or  Brown  [Bull]  of  Cuailnge), 
a  beast  so  huge  that  thrice  fifty  youths  disported  themselves  on  his  back 
together.  A  certain  fairy,  living  in  the  cave  of  Cruachan,  in  the  county 
of  Roscommon,  had  a  cow,  which  she  bestowed  on  her  mortal  husband, 
Nera,  and  which  the  Morrigu  carried  of  to  the  great  Donn  Cuailnge,  and 
the  calf  that  issued  from  this  association  was  fated  to  be  the  cause  of 
the  Tain  Bo  Cuailnge.  The  event  is  told  in  the  taie  called  Tain  Be  Aingen, 
one  of  the  prefatory  stories  to  the  great  epic,  which  thus  speaks  of  the 
Morrigan.'^  Berid  in  Morrigan  iarum  boin  a  mie  sium  cen  bai  seom  ina  cotlad, 
condarodart  in  Donn  Cuailgne  îair  i  Cuailgne.  Do  thaet  cona  boin  doridise 
anair.  Nostaertcnd  Cucullain  i  Mag  Murthemne  oc  tuidecht  îairis,  ar  ha  do 

gesaib  Conculaind  ce  teit  ban  as  a  thir  manib  urdairc  les 

Da  thairthe  Cuchullain  in  Morrigan,  cona  boin,  ocus  isbert  ni  berthar  in 
nimirce,  ol  Cuchullain,  "  /.  e.,  "  The  Morrigan  afterwards  carried  off 
his  [Nera's]  son's  cow,  so  that  the  Donn  Cuailnge  consorted  with  her  in 
the  east  in  Cuailnge.  She  went  westwards  again  with  the  cow.  Cuchul- 
lain met  her  in  Magh-Muirthemhne  whilst  crossing  over  it  ;  for  it  was 
of  Cuchullain's  prohibitions  that  even  a  woman  should  leave  his  terri- 
tory  unless  he  wished Cuchullain  overtook  the  Morrr 

gan,  and  he  said  :  the  cow  shall  not  be  carried  off.  "  But  the  Morrigan, 
whom  Cuchullain  probably  did  not  recognise  in  the  form  of  a  woman, 
succeeds  in  restoring  the  cow  to  her  owner. 

AU  the  while,  however,  Morrigan  seems  to  watch  over  the  interests 
of  the  Ultonians.  Thus  when,  after  the  death  of  Lethan  at  the  hands 
of  Cuchullain,  Medbh  endeavoured,  by  a  rapid  and  bold  movement,  to 
surround  and  take  possession  of  the  Donn  Cuailnge,  we  fmd  her  acquain- 
ting  the  Donn  Cuailnge  with  the  danger  of  his  position,  and  advising  him 
to  retire  into  the  impénétrable  fastnesses  of  the  Fews. 

"  Is  he  in  la  ceîna  tanic  in  Dond  Cuailnge  co  crich  margin,  ocus  coica 


J 


The  ancient  Irish  Goddess  of  War.  45 

samseisce  immi  do  samascib is  e  in  la  cetna  îanic  in  Morrigu,  ingen 

Ernmais  a  sidaib  [in  deilb  euin]  comboi  for  in  chorthi  i  Temair  Clnialnge  ic 
brith  rabuid  don  Dund  Chualnge  ria  feraib  liErend,  ocus  rogab  aca  acallaim\ 
ocus  maiîh,  a  thruaig,  a  duind  Cuailnge  ar  in  Morrigu,  déni  fatchius  daig 
ardoîroset  fir  liErenn,  ocus  noî  berat  dochum  longphoirt  mani  dena  faitchius ; 
ocus  ro  gab  ic  breith  rabuid  do  samiaid,  ocus  dosbert  na  briaîhrasa  ar  aird." 
—  "  It  was  on  that  very  day  the  Donn  Cuailnge  came  to  Crich-Margin, 

and  fifty  heifers  of  the  heifers  about  him It  was  the 

same  day  Morrigu,  the  daughter  of  Ernmas,  from  the  Sidhe,  came 
[in  the  form  of  a  bird  —  Lebor  na  hUidhre]  and  perched  on  the  pillar 
stone  in  Temair  of  Cuailnge,  giving  notice  to  the  Donn  Cuailnge  before 
the  men  of  Eriu  ;  and  she  proceeded  to  speak  with  him,  and  said, 
'  Well,  thou  poor  thing,  thou  Donn  Cuailnge;  take  care,  for  the  men 
of  Eriu  will  come  to  thee,  and  they  will  take  thee  to  their  fortress  if 
thou  dost  not  take  care.  '  And  she  went  on  warning  him  in  this  wise, 

and  uttered  thèse  words  aloud.  " [Hère  follows  a  short 

and  very  obscure  poem  to  the  same  efïect],  Book  of  Leinsîer,  fol. 
50,  ai. 

Immediately  after  the  foregoing  incident  the  narrative,  as  preserved 
in  the  Lebor  na  hUidhre,  represents  Cuchullain  and  Morrigu  as  playing 
at  cross  purposes.  I  hâve  suggested  that  Cuchullain  did  not  appear  to 
recognise  the  Morrigu  when  she  met  him  in  the  form  of  a  woman,  in 
the  scène  quoted  from  the  Tain  Be  Aingen.  He  seems  similarly  ignorant 
of  her  identity  on  other  occasions,  when  she  is  said  to  hâve  presented 
herself  before  him  in  female  shape.  Let  us  take,  for  example,  the  épi- 
sode entitled  "  Imacallaim  na  Morigna  fri  Coincullain,  "  —  "  Dialogue 
of  the  Morrigan  with  Cuchullain,  "  which  précèdes  his  fight  with  Loch, 
son  of  Ernonis. 

"  Conacca  Cu  in  nocben  chuci  conetuch  cach  datha  impe,  ocus  delb  ro 
derscaigthe  fuirri.  Ce  taisiu  or  Cu.  Ingen  Buain  ind  rig,  or  si;  do  deochadh 
cuchutsa;  rotcharus  ar  thairscelaib,  ocus  tucus  mo  seotu  lim,  ocus  mo  indili. 
Ni  maiîh,  em,  ind  inbuid  tonnanac,  nach  is  oie  ar  mblath  oinmgorti.  Ni 
haurusa  damsa  dana  comrac  fri  banscail  cein  nombeo  isind  niîh  so.  Bid  im 
chobairse  daitsiu  (.i.  do  gensa  congnom  latt)  ocsudiu.  Niar  thoin  mna  dana 
gabussa  inso.  Bi  ansu  daitsiu,  or  si,  in  tan  doragsa  ar  do  chend  oc  comrac 
fris  nafiru;  doragsa  irricht  escongan  fot  chossaib  issind  ath  co  taithis.  Dochu 
lim,  on,  oldas  ingen  rig;  notgebsa,  or  se,  im  ladair  commebsat  t^asnai,  ocus 
bia  fond  anim  sin  co  ro  sécha  brath  bennachtan  fort.  Timorcsa  in  cethri 
forsind  ath  do  dochumsa  irricht  solde  glaisse.  Leicfesa  cloich  daitsiu  as  in 
tailm  co  commart  do  suil  it  cind,  ocus  bia  fond  anim  co  ro  sécha  brath 


46  The  ancient  Irish  Goddcss  of  War. 

bennachtan  fort.  To  rach  dait  irricht  samaisci  maile  derce  riasindeit,  comensat 
forsnai  laihu,  ocus  fors  na  hathn,  ocus  fors  na  linn'm,  ocas  nimaircechasa  ar 
do  chend.  Tolecubsa  cloich  deitsiu  or  se,  commema  do  fergara  jot,  ocus  bia 
fo  ind  anim  sin  co  ro  sécha  brath  bennachtan  fort.  Lasodain  teit  iiad.  " 

"  Cu  saw  the  young  woman  dresscd  in  garments  of  every  hue,  and 
of  most  distinguished  form,  approaching  him.  *  Who  art  thou  ?  '  asked 
Cu.  '  The  daughter  of  Buan,  the  King,  '  said  she;  '  I  hâve  corne  to 
thee;  I  hâve  loved  thee  for  thy  renown,  and  hâve  brought  with  me  my 
jewels  and  my  cattle.  '  '  Not  good  is  the  time  thou  hast  corne,  '  said  he.  ' 
It  is  not  easy  for  me  to  associate  w^ith  a  v/oman  whilst  I  may  be  engaged 
in  this  conflict.  '  '  I  will  be  of  assistance  to  thee  therein,  '  replied  she. 
'  Not  by  woman's  favour  hâve  I  come  hère,  '  responded  Cuchullain. 
'  ^Twill  be  hard  for  thee,  '  said  she,  '  when  I  go  against  thee 
whilst  encountering  men.  I  will  go  in  the  form  of  an  eel  under  thy  feet, 
in  the  ford,  so  that  thou  shalt  fall.  '  '  More  likely,  indeed,  than  a  king's 
daughter;  but  I  will  grasp  thee  between  my  fingers,  '  said  he,  '  so  that 
thy  ribs  shall  break,  and  thou  shalt  endure  that  blemish  for  ever.  '  '  I 
will  collect  the  cattle  upon  the  ford  towards  thee,  in  the  shape  of  a 
grey-hound,  '  said  she.  '  I  will  hurl  a  stone  at  thee  fromthe  sling,' 
said  he,  '  which  will  break  thine  eye  in  thy  head  ;  and  thou  shalt  be 
under  that  blemish  for  ever.  '  I  will  go  against  thee  in  the  form  of  a  red 
hornless  heifer  before  the  herd,  and  they  shall  défile  the  pools,  and  fords, 
and  linns,  and  thou  shalt  not  fmd  me  there  before  thee  '  '  I  will  fling  a 
stone  at  thee,  '  said  he,  '  which  will  break  thy  right  leg  under  thee  ; 
and  thou  shalt  be  under  that  blemish  for  ever.  '  With  that  she  departed 
from  him.  " 

In  some  MSS.  the  foregoing  dialogue  forms  the  principal  feature  in 
a  romantic  taie  called  Tain  Bo  Regamhna,  which,  like  the  Tain  Be 
Aingen,  is  one  of  the  prefatory  stories  to  the  great  Cattle  Spoil.  Like  the 
Tain  Be  Aingen,  also,  it  introduces  the  Morrigu  in  the  character  of  a 
messenger  of  the  fate  that  had  decreed  the  death  of  Cuchullain  when  the 
issue  of  the  Donn  Ciiailnge  and  the  Connacht  cow  should  hâve  attained 
a  certain  âge.  But  the  Tain  Bo  Regamhna  is  further  important,  as 
Connecting  the  Morrigu  with  Cuchullain,  in  the  position  of  protector. 
The  taie,  which  is  too  longto  quote  in  extenso,  represents  Cuchullain  as 
one  morning  meeting  the  Morrigu  in  the  form  of  a  red-haired  woman, 
driving  a  cow  through  the  plain  of  Murthemne,  as  related  in  Tain  Be 
Aingen.  Cuchullain,  in  his  quality  of  guardian  of  the  border  district,  tries 
to  prevent  her  from  proceeding;  and  after  a  great  deal  of  argument, 
during  which  Cuchullain  seems  not  to  know  his  opponent,  the  woman 


The  ancient  Irish  Goddess  of  War.  47 

and  cow  disappear,  and  Cuchullain  perceives  that  she  has  become  trans- 
formed  into  a  bird,  which  perches  on  an  adjacent  tree.  Cuchullain,  as 
soon  as  he  becomes  aware  that  he  had  been  contending  with  a  super- 
natural  being,  confident  in  his  own  might,  boasts  that  if  he  had  known 
the  character  of  his  opponent,  they  would  not  hâve  separated  as  they 
did;  whereupon  the  following  exchange  of  sentiments  takes  place  :  — 

''  Cld  andarignisin,  ol  si,  rodhia  olc  de.  Ni  cuma  dam  ol  Cuchullain. 
Cumcim  eicin  ol  in  ben;  is  ac  [do]  diten  do  baissiu,  atusa  ocus  biad,  olsi. 
Do  fucus  in  mboinsea  a  sith  Cruachan,  condarodart  in  Dub  Cuailnge  lim  i 
Cuailnge  .i.  tarb  Dairi  mie  Fiachna.  Ised  aired  biasu  imbeathaid  corop 
darîaig  in  laeghfil  imbroind  na  bo  so,  ocus  ise  consaithbe  Tain  Bo  Cuailnge. 
Bid  am  ardercusia  de  din  tain  ishin,  ol  Cuchullain.  Gegna  a  nanrada,  brisfe 
a  mor  chatha,  bid  a  tigba  na  tana.  " 

"  '  What  hast  thou  done  ?  '  asked  she  ;  '  evil  will  ensue  to  thee  there- 
from,  '  '  I  care  not,  '  said  Cuchullain.  '  But  I  do,  '  said  the  woman  (/. 
e.  the  bird,  or  badb')\  it  is  protecting thee  I  was,  am,  and  will  be,  '  said 
she.  '  I  brought  this  cow  from  Sidh-Cruachna,  so  that  the  Dubh  Cuailnge, 
i.  e.  Daire  Mac  Fiachna's  bull,  met  her  in  Cuailnge.  The  length  of  time 
you  hâve  to  live  is  until  the  calf  that  is  in  this  cow's  body  will  be  a 
yearhng;  and  it  is  it  that  shall  lead  to  the  Tain  Bo  Cuailnge.  '  '  I  will 
be  illustrious  on  account  of  that  Tain,  '  observed  Cuchullain;  I  shall 
wound  their  warriors,  break  their  great  battles,  and  will  be  in  pursuit 
of  the  Tain.  '  "  (Lebor  Buidhe  Lecain  col.  648).  Then  the  Morrigu  threa- 
tens  to  act  to  Cuchullain  in  the  way  detailed  in  the  dialogue  which  I 
hâve  just  quoted;  and,  as  the  taie  concludes,  "  the  Badb  afterwards 
goes  away.  "  ("  luid  ass  in  Badb  ianim  "). 

The  Morrigu  puts  her  threats  into  exécution  during  Cuchullain's 
fight  with  Loch,  son  of  Ernonis.  The  narrative  in  Lebor  na  hUidhre 
describes  the  encounter  in  the  following  manner  :  — 

^'  0  ro  chomraicseî  iarom  ind  fir  for  sind  aih,  ocus  0  rogabsat  oc  gliaid 
ocus  oc  imesorcain  and,  ocus  0  ro  gab  cach  dib  for  truastad  a  chéli,  focheird 
in  escongon  triol  (.i.  tri  curu)  im  chossa  Conculaind  combbi  fâen  fotarsnu 
isind  dth  ina  ligu.  Dauautat  (.i.  buailis)  Loch  cosin  chlaidiub  combu  chro- 
derg  int  aîh  dia  fuilriud.  .  .  .  Lasodain  aîraig,  ocus  benaid  in  nescongain 
comebdatar  a  hasnai  indi,  ocus  comboing  in  cethri  dars  na  slûaga  sair  ar 
ecin,  combertaîar  a  puple  innan  adarcaib  lasa  torandcless  darigensat  in  dd 
lathgdile  isind  ath.  Tanautat  som  ind  sod  mactire  do  imairg  na  bûfair  siar. 
Léicid  som  cloich  as  a  tailm  co  mebaid  a  suil  ina  cind.  Téite  irrichî  samaisce 
mâile  derge,  muiîte  rias  na  buaib  forsna  linni  ocus  na  hàthu.  Is  and  asbert 
som  ni  airciu  (.i.  ni  rochim)  anâthu  la  linni.  Leicidsom  cloich  dont  samaisc 


48  The  ancicnt  Irisli  Goddess  of  War. 

mdil  déirg  comemaid  a  ger  gara  foi.  "  Lebor  na  hUidhre,  fol.  37,  ai. 

"  When  the  men  met  afterwards  in  the  ford,  and  when  they  com- 
menced  fighting,  and  assaulting,  and  when  each  man  began  to  strike 
the  other,  the  escongon  (eel)  made  a  triple  twist  round  Cuchullain's 
legs,  so  that  he  was  lying  down  prostrate  across  in  the  ford.  Loch  struck 

him  with  his  sword,  and  the  ford  was  gory-red  from  his  blood 

Thereupon  he  arose  and  struck  the  eel,  so  that  her  ribs  broke  in  her. 
And  the  cattle  rushed  violently  past  the  army,  eastwards,  carrying  the 
tents  on  their  horns,  at  the  sound  made  by  the  two  warriors  in  the  ford. 
He  (Cuchullain)  drove  to  the  west  the  wolf-hound  that  collected  the 
cows  against  him  ;  and  cast  a  stone  out  of  his  sling  at  it,  which  broke 
its  eye  in  its  head.  Thenshe(Momgu)  wentintheshapeofashort  hornless 
red  heifer  before  the  cows,  and  advanced  into  the  linns  and  fords  ;  when 
he  said  —  M  see  not  the  fords  with  the  pools.  '  He  cast  a  stone  at  the 
red  hornless  heifer,  and  broke  her  leg.  "  It  is  added  that  "  it  was  then 
truly  that  Cuchullain  did  to  the  Morrigu  the  three  things  which  he  had 
promised  to  accomplish,  in  the  Tain  Bo  Regamna;  "  (is  andsin  ira  do 
géni  Cucullainn  frisin  Morrigain  a  trédedo  rairngerîdihi  tain  bb  Regamna;'' 
ib). 

With  respect  to  the  instances  of  transformation  already  referred  to 
it  may  be  pertinent  to  quote  the  following,  which  is  given  in  an  account 
of  the  battle  alleged  to  hâve  been  fought  at  Tailte  between  the  Milesian 
forces  and  Eire,  queen  of  Mac  Greine,  king  of  the  Tuatha-de-Danann, 
who  acted  in  the  capacity  of  a  war  goddess.  The  Milesian  chiefs  are 
represented  as  having  advanced  as  far  north  as  the  hill  of  Uisnech,  when 
it  is  added  "  go  facadar  in  en  mnai  minderg  mon  malach  dhuibli  in  deilb 
desi  .  .  .  .  da  ninsaigidh.  Ingantaigsed  na  sluaigh  re  sirdechsain  ahinnell 
ocus  a  habaise.  In  dama  huair  ann  ba  rigan  roisclethan  ro  alainn;  ocus  in 

uair  aill .  .  .  .  na  baidb  biraigh  banghlais Suidhis  ar  inchaib  Eremoin; 

snaidmis  a  heinech  ar  Emir.  Ca  cricli  as  ar  cemnigis  ocus  cacele  ca  clcchtaidh 
do  comlaigi,  ocus  ca  hainm  is  raiti  rit  a  ingin,  ar  Eremon.  0  tuathaib 
digraisi  de  Danann  do  dechadhus  am,  bar  isi,  7  mac  gréni  gaiscedhach 
mfher  celé,  7  Eriu  mainmse,  bar  in  ingen.  "  ''  They  saw  the  one  woman, 

smooth-red,  large,  black-browed,  in  the  shape  of  two appro- 

aching  them.  The  hosts  wondered  with  constant  observation  of  her 
behaviour  and    changfulness.  At  one  moment  she  was  a  broad-eyed, 

most  beautiful  queen,  and  another  time a  beaked,  white-grey 

badb She  sits  down  in  the  présence  of  Eremon;  she  enjoins  her  protec- 
tion on  Emir.  '  What  country  hast  thou  come  from,  and  what  companion 
dost  thou  associate  with,  and  what  name  is  to  be  addressed  to  thee,  0 


The  ancient  Irisli  Goddess  of  War.  49 

woman,  asked  Eremon.  '  From  the  ardent  Tuatha  de  Danann  I  hâve 
corne,  truly,  '  said  she,  '  and  Mac  Greni,  warrior,  is  my  husband,  and 
Eriu  is  my  name,  '  said  the  woman.  "  Ms.  H.  4.  22.  p.  120. 

And  Aimhirgin  asks,  immediately  after  the  preceding  dialogue,  "  ca 
ni  chuingi  etir,  a  ingin  ilrechtach;  "  what  do  you  request,  0  woman 
of  many  shapes,  "  the  latter  epithet  being  used  in  allusion  to  the 
fréquent  transformations  referred  to  before.  The  account  further 
represents  her  as  fighting  a  battle  with  the  chiefs  in  question,  in  the  form 
of  a  badb. 

The  next  meeting  between  Cuchullain  and  the  Morrigan  is  very 
curious.  It  is  thus  related  in  the  Book  of  Leinster  fol.  54,  a2. 

"  Andsin  tank  in  Môrrîgu  ingen  Ernmais  a  sidaïb  irricht  sentainne,  cor- 
rabi  ic  blegu  ho  tri  sine  nafiadnaisse.  Is  immi  tainic  si  sin  ar  bith  a  forithen 
do  Choinchullaind;  daig  ni  gonad  Cuchullainn  nech  ara  térndd  combeth  cuit 
dô  fein  na  legus,  Conattech  Cuchullain  blegon  fuirri  iar  na  dechrad  diliaid. 
Do  brethasi  blegon  sini  dô.  Rop  Un  a  neim  damsa  so.  Ba  sLîn  a  lethrosc 
na  rigna.  Conattech  som  blegon  sini  fuirri,  do  brethsi  dô;  ineim  rop  slân  inti 
doridnacht.  Conaittecht  som  in  très  ndig,  ocus  dobrethasi  blegon  sine  dô. 
Bendacht  dée  ocus  ândee  fort  a  ingen  (batar  é  a  ndee  int  aes  cumachîa,  ocus 
andee  int  aes  trebaire)  ;  ocus  ba  slan  ind  rigan.  " 

"  Then  the  Morrigu,  daughter  of  Ernmas,  came  from  the  Sidhe,  in 
the  form  of  an  old  woman,  and  was  milking  a  three-teated  cow  in  his 
présence.  The  reason  she  came  was,  in  order  to  be  helped  by  Cuchul- 
lainn ;  for  no  one  whom  Cuchullainn  wounded  could  recover  unless 
he  himself  had  some  hand  in  the  cure.  Cuchullain  asked  her  for  milk, 
after  having  been  troubled  with  thirst.  She  gave  him  the  milk  of  one 
teat.  "  May  I  be  safe  from  poison  therefor.  "  The  queen's  eye  was 
cured.  He  asked  her  again  for  the  milk  of  a  teat.  She  gave  it  to  him. 
"  May  the  giver  be  safe  from  poison.  "  He  asked  for  the  third  drink, 
and  she  gave  him  the  milk  of  a  teat.  "  The  blessing  of  gods  and  men 
be  on  thee,  woman  (the  people  of  power  were  their  gods,  and  the 
wise  people  were  their  andée  ''non  divine '');  and  the  queen  was  cured." 

When  the  time  approached  in  which  Cuchullainn  should  succumb  to 
the  decree  of  fate,  as  previously  announced  to  him  by  Morrigan,  the 
impending  loss  of  her  favourite  hero  appears  to  hâve  afîected  her  with 
sorrow.  The  night  before  the  fatal  day  when  his  head  and  spoils  were 
borne  off  in  triumph  by  Ere  Mac  Cairpre,  Morrigan,  we  are  told,  disar- 
ranged  his  chariot,  to  delay  his  departure  for  the  fated  meeting. 

Thus  we  read  in  the  "  Aided  Conchullainn,  "  or  "  Tragedy  of 
Cuchullainn,  "  contained  in  the  Book  of  Leinster  (fol.  77,  ai)  that  when 

4 


50  The  ancicnt  Irish  Goddcss  of  War. 

he  approached  his  horse,  the  Liath  Mâcha,  in  the  last  morning  of  his 
existence,  this  faithful  companion  of  his  many  victories  "  thrice  turned 
his  left  side  -"  towards  his  master,  as  an  augury  of  the  doom  so  soon  to 
await  him;  and  he  found  that  "  the  Monigan  had  broken  the  chariot 
the  night  previous,  for  she  Hked  not  that  Cuchullainn  should  go  to  the 
battle,  as  she  knew  that  he  would  not  again  reach  Emain  Mâcha.  " 

"  Teite  Cuchullainn  adochum  [in  Leith  Mâcha],  ocus  ro  impa  int  cch  a 
chle  friss  fothri,  ocus  roscail  in  Morrigu  in  carpat  issind  aidchi  remi,  ar  nir 
bo  ail  le  a  dul  Conculainn  dochum  in  chatha,  ar  rofitir  noco  ricfad  Emain 
Mâcha  afrithis.  " 

Then  follows  a  curious  scène  between  Cuchullainn  and  the  Liath 
Mâcha,  or  "  grey  horse  of  Mâcha,  "  the  hero  reminding  his  steed  of 
the  time  when  the  Badh  accompanied  them  in  their  martial  feats  at  Emain 
Mâcha,  or  Emania  (jodonhai  hadb  in  Emain  Mâcha),  and  the  Liath^ 
becoming  so  affected  at  the  impending  fate  of  his  master,  "  co  tarlaic  a 
bolgdera  môra  fola  for  a  dib  traigîhib,  "  "  that  he  dropped  his  big  tears 
of  blood  on  his  (Cuchullain's)  two  feet.  " 

The  grief  of  the  Liath  Mâcha,  and  the  arts  of  Morrigu,  were  of  no 
avail;  Cuchullain  would  go  to  the  field  of  battle,  impelled  by  the  unseen 
power  which  ruled  his  destiny.  But  before  he  approaches  the  foe,  he 
meets  with  three  female  idiots,  blind  of  the  left  eye,  cooking  a  charmed 
dog  on  spits  made  of  the  rowan  tree  ;  créatures  of  hateful  aspect  and 
wicked  purpose. 

Cuchullain's  strength  must  be  annihilated,  or  the  fates  will  hâve 
decreed  in  vain  ;  and  this  can  only  be  done  through  his  partaking  of  the 
horrid  dish,  which  he  résolves  to  do  rather  than  tarnish  his  chivalrous 
réputation  by  refusing  the  request  of  the  witches,  although  aware  of  the 
tragic  results  about  to  ensue.  The  strenght  of  the  hero  is  paralyzed  by 
the  contact  with  the  unclean  food  handed  to  him  from  the  witch's  left 
hand;  and  Cuchullainn  rushes  headlong  to  his  doom.  But  still  the  Mor- 
rigan  does  not  abandon  him,  although  apparently  quite  powerless  to 
assist  him;  for  as  he  comes  near  to  the  enemy,  "  a  bird  of  valour  "  is 
seen  flying  about  over  the  chief  in  his  chariot  {en  blaith,  i.  e.  Ion  gaile, 
etarluamnach  uasa  erra  oen  charpait).  And  after  he  has  received  his  death- 
wound  she  perches  beside  him  awhile,  before  winging  her  flight  to  the 
fairy  palace  beside  the  Suir,  from  which  she  came.  The  following  is  the 
description  of  Cuchullainn's  proceedings  after  receiving  his  mortal  wound, 
extracted  from  the  Book  of  Leinster  (fol.  78,  32). 

"■  Do  dechuid  iarum  crich  môr  ond  loch  (Loch  Lamraith  in  Magh  Muir- 
themne)  siar,  ocus  rucad  a  rose  airi,  ocus  téit  dochum  coirthi  cloiche  fde 


The  ancient  Irish  Goddcss  of  War.  5 1 

isin  maig  coîarat  a  choimchriss  immi,  narahlad  na  suidia,  nach  ina  Ugu, 
conhad  ina  sessam  atbalad.  Is  iarsin  do  dechaîar  na  fir  immacuairt,  ocus  ni 
rolamsatar  dut  a  dochum.  Andarleo  ropo  beo.  Is  mebol  duib,  ol  Ere  Mac 
Cairpre,  cen  cend  ind  fhir  do  thabhairt  lib  in  digail  chind  m'atarsa  rucad 
leis  co  ro  adnacht  fri  airsce  Echdach  Niafer.  Rucad  a  chend  assaide  co  fil 
i  sid  Nenta  iar  nusciu.  .  .  .  Iarsin  tra  do  dechaid  in  Liath  Mâcha  co 
Coinculaind  dia  imchoimét  in  céin  robôi  a  anim  and,  ocus  ro  mair  in  Ion 
laith  ass  a  étan.  Is  iarum  bert  in  Liath  Mâcha  na  tri  derg  ruathar  iinmi  ma 
cuairt,  co  îorchair  l.  leis  cona  fiaclaib,  ocus  xxx  cach  crui  do  issed  romarb 
dont  sluag.  Conid  de  ata  nitaihe  buadremmend  ind  leilh  Mâcha  iar  marbad 
Conculainn.  Conid  iarsin  dolliud  ind  ennach  for  a  gualaind.  Nir  ho  gnàth  in 
corthe  ut  fo  enaib  ar  Ere  mac  Carpre.  " 

"  He  (Cuchullainn)  then  went  westwards,  a  good  distance  from  the 
lake  (Loch  Lamraith  in  Magh  Muirthemne),  and  loolced  back  at  it.  And 
he  went  to  a  piliar  stone  which  is  in  the  plain,  and  placed  his  sideagainst 
it,  that  he  might  not  die  sitting  or  lying,  but  that  he  might  die  standing. 
Afterthis  the  men  went  ail  about  him,  but  dared  not  approach  him,  for 
they  thought  he  was  alive.  '  It  is  a  shame  for  you/  said  Ere  Mac  Cairpre, 
'  not  to  bring  that  man's  head  in  retaliation  for  my  father's  head,  which 
was  borne  off  by  him,  and  buried  against  Airsce  Echdach  Niafer.  His 
head  was  taken  from  thence,  so  that  it  is  in  Sidh-Nenta....  Afterwards, 
moreover,  the  Liath  Mâcha  went  to  Cuchullain,  to  guard  him  whilst  his 
spirit  lived  in  him,  and  whilst  the  Ion  laith  (bird  of  valour?)  continued 
out  of  his  forehead.  Then  the  Liath  Mâcha  executed  the  three  red  routs 
about  him,  when  fifty  men  fell  by  his  teeth,  and  thirty  by  each  shoe, 
ail  of  the  enemy's  host;  and  hence  the  proverb  —  '  Not  more  furious 
was  the  victorious  rout  of  the  Liath  Mâcha,  after  the  killing  of  Cuchul- 
lain.' —  Thereupon  the  bird  went  and  perched  near  his  shoulder. 
"  That  piliar  stone  was  not  usually  the  resort  of  birds,  "  said  Ere 
Mac  Cairbre,  who  supposed  the  Morrigan  to  be  a  mère  carrion  crow 
awaiting  the  feast  prepared  by  his  hand.  Then  they  advance  and  eut  ofï 
Cuchullain's  head,  and  the  Morrigan  disappears  from  the  scène, 

The  exact  meaning  of  the  expressions  en  blaith,  and  Ion  gaile  f'called 
also  lôn  or  lûan-laith)  which  occur  in  the  preceding  sentences  hâve  not 
been  well  defmed.  Some  writershave  understood  en  blaith  as  a  véritable 
"  bird  of  valour,  "  whilst  others  deem  the  words  as  a  title  for  a  parti- 
cular  kind  of  frenzy.  I  hâve  not  met  with  any  statement  identifying  the 
bird  of  valour  with  the  scare-crow,  or,  indeed,  with  any  bird  in  parti- 
cular,  although  the  principal  heroes  in  the  Irish  battle  pièces,  from 
Cuchullain  to  Murchadh,  son  of  Brian,  hâve  each  his  "  bird  of  valour  " 


52  The  ancient  ïrish  Goddcss  of  War. 

flying  over  him  in  the  thick  of  the  fight.  In  the  account  of  the  battle  of 
Magh-Rath,  we  are  told  that  Congal  Claen,  excited  to  fury  and  madness 
by  the  exhortations  of  one  of  his  servants,  in  the  banquetting  hall  at 
Dun-na-ngedh,  "  stood  up,  assumed  his  bravery,  his  heroic  fury  rose, 
and  his  '  bird  of  valour  '  fluttered  over  him,  and  he  distinguished  not 
friend  from  foe  at  the  time'  ".  So  when  Murchadh,  son  of  Brian,  after 
the  repuise  of  the  Dal-Cais  by  the  Danes,  at  the  battle  of  Clontarf, 
prépares  to  assail  the  enemy,  it  is  said  that  "  he  was  seized  with  a 
boiling  terrible  anger,  an  excessive  élévation  and  greatness  of  spirit  and 
mind.  A  bird  of  valour  and  championship  rose  in  him,  and  fluttered  over 
his  head  and  on  his  breath,  "  But  this  Ion  laith,  en  gaile,  or  bird  of 
valour  (?)  which  hovered  about  Cuchullain,  not  only  excited  his  mind  to 
fury,  as  is  represented,  but  also  produced  a  strange  bodily  transforma- 
tion, from  which  he  obtained  the  sobriquet  of  the  Riastartha,  or  transfor- 
med.  Thus,  in  a  passage  in  the  taie  from  which  I  hâve  so  often  quoted 
already,  where  King  Ailill  deems  it  advisable  to  beg  Cuchullain's  permis- 
sion for  the  Connacht  army  to  retire  from  a  position  of  danger,  the 
following  account  of  the  effects  of  this  paroxysm  of  fury  is  given  : 

"  Denaid  comarll  for  Ailill.  Giidid  Conculainn  itnfor  leciid  asind  iniidsa 
ar  ni  ragaid  ar  ecin  îairis  uair  rodlebaing  a  Ion  laith,  ar  ba  bes  dosom  intan 
no  linged  a  Ion  laith  ind  imreditis  a  traigthi  iarma  ocus  a  escada  remi,  ocus 
muil  a  orcan  for  a  lurgnib,  ocus  in  dala  suil  inachend,  ocus  arailifria  chcnd 
anechîair  ;  do  coisedfer  chend  for  a  beolu.  Nach  findae  bid  fair  ba  hathithir 
delca  sciach,  ocus  banna  fola  for  cach  finnu.  Ni  aithgnead  coemu  na  cairdiu. 
Cumma  no  slaided  riam  ocus  iarma.  Is  desin  dober  fir  nolnecmacht  in  rias- 
tarthu  do  animm  do  Coinculainn.  (Lebor  na  hUidhre,  fol.  34,  bi.) 

"  '  Take  counsel  together,  '  said  Ailill;  '  entreat  Cuchullain  that  he 
may  permit  you  to  leave  this  place,  since  you  cannot  pass  by  him  forci- 
bly,  because  his  Ion  laith  has  sprung.  '  —  For  it  was  usually  the  case 
with  him  when  his  Ion  laith  started  in  him,  that  his  feet  turned  back- 
wards  and  his  hams  forward,  and  the  calves  of  his  legs  were  transfer- 
red  to  his  shins,  and  one  of  his  eyes  sank  deep  into  his  head,  whilst  the 
other  was  protruded,  and  a  man's  head  would  fit  in  his  mouth.  Every 
hair  on  his  head  was  sharper  than  the  thorns  of  whitethorn,  and  a  drop 
of  blood  stood  on  each  hair.  He  would  not  know  friends  nor  relations, 
and  he  slew  equally  backwards  and  forwards.  Hence  it  was  that  the 
men  of  Connacht  applied  the  name  of  '  Riastartha  '  to  Cuchullainn.  " 

It  has  been  already  observed  that  the  name  of  the  goddess,  or  fury, 

I.  Battle  of  Magh-Rath,  p.  35. 


The  Ancient  Irish  Goddess  of  War.  5  9 

whose  identity  we  hâve  been  endeavouring  to  connect  with  Caîhu-bodua, 
is  written  badb  and  bodb,  just  as  the  adjectives  derived  therefrom  are 
written  badba  and  bodba,  and  thederiv.  subst.  badbdacht  and  bodbdacht. 

The  term  bodba  (terrible)  is  applied  to  the  Morrigan  in  an  old  tract  in 
the  Book  of  Leinster,  where  Conor  Mac  Nessa  is  represented  as  directing 
Findchad  to  summon  auxih'aries  to  assist  Cuchullainn  :  "  ardoîrai  cosin 
nuathaig  mbodba,  cosin  Màrrigain  co  dûn  Sobnirche;"  "go  to  the  terrible 
fury,  to  the  Morrigan,  to  Dun-Sobairche  (Dunseverick,  co.  Antrim).  " 

The  name  Morrigan  is  also  varied,  as  we  hâve  seen,  to  Morrigu;  but 
as  the  genitive  form  is  Morrigna,  the  proper  nom.  would  seem  to  be 
Morrigan. 

In  the  Irish  mythological  tracts  a  well-marked  distinction  is  observable 
between  the  attributes  of  the  scald-crow  and  those  of  the  raven  ;  the 
scald-crow,  or  cornix,  being  represented  in  the  written  as  in  the  spoken 
traditions  of  the  country^  not  alone  as  a  bird  of  ill  omen,  but  as  an  agent 
in  the  fulfilment  of  what  is  *'  in  dono  "  in  dan,  or  decreed  for  a 
person,  whilst  the  raven  is  simply  regarded  as  a  bird  of  prey,  that  follows 
the  warrior  merely  for  the  sake  of  enjoying  its  gory  feast.  Just  as  the 
German  myths  describe  Odin  and  Zio  as  accompanied  by  ravens  and 
wolves,  which  follow  them  to  the  battle-field,  and  prey  upon  the  slain, 
so  the  Irish  poets,  in  their  laudations  of  particular  heroes^  boast  of  the 
numbers  of  ravens  and  wolves  fed  by  their  spears.  Odin,  especially, 
had  two  ravens,  wise  and  cunning,  which  sat  upon  his  shoulders  and 
whispered  into  his  ears,  like  Mahomet's  pigeon,  ail  thatthey  had  heard 
and  seen'.  Inthis  latter  respect  the  raven  of  German  myihology  stands 
in  the  same  relation  to  Odin  that  the  raven  of  Greek  mythology  does  to 
Apollo.  The  Scandinavians,  like  their  German  relatives,  considered  the 
raven  in  a  sacred  light. 

The  Anglo-Saxon  chronicle  (at  the  year  878)  records  the  capture  from 
the  Norse  of  a  banner  called  the  Raven,  of  which  a  more  particular 
account  is  in  Asser's  Life  of  Alfred,  at  the  same  year.  After  describing 
the  defeat  of  the  Pagan  Norse  before  Kynwith  castle,  in  Devonshire, 
the  writer  adds,  "  and  there  they  (the  West  Saxons)  gained  very  large 
booty,  and  amongst  other  things  the  banner  called  the  Raven;  for  they 
say  that  the  three  sisters  of  Hingwar  and  Hubba,  daughters  of  Lodbrok, 
wove  that  flag  and  got  it  ready  in  one  day.  They  say,  moreover,  that 
in  every  battle,  wherever  that  flag  went  before  them,  if  they  were  to 
gain  the  victory,  a  live  crow  would  appear  flying  on  the  middle  of  the 

I.  Grimm,  Deutsche  Mythologie^,  p.  134. 


54  The  ancient  Irish  Goddess  of  War. 

flag;  but  if  they  were  doomed  to  be  defeated  it  would  hang  down 
motionless  ;  and  this  was  often  proved  to  be  so.  "  Earl  Sigurd  also  is 
said  to  hâve  had  a  raven  banner  at  the  battle  of  Clontarf,  which  his 
mother  had  woven  for  him  with  magical  skill  ' . 

This  idea  of  the  raven  banner  is  probably  connected  with  the  tradition 
given  in  the  Vœlsûnga-Saga,  which  represents  Odin  as  sending  the 
Valkyria  Oskmey,  in  the  form  of  a  crow,  on  a  mission  to  Friga,  to 
entreat  that  the  wife  of  King  Reris  might  become  fruitful  ^  ;  and  the 
prayer  being  heard,  a  son  (Sigmund)  was  born,  whose  son  Sigurd 
married  Brunhilt,  a  Valkyria,  who  was  called  Kraka,  or  the  crow,  and 
who  was  the  wife  of  Ragnar  Lodbrok,  and  mother  of  Ivar  Beinlaus. 

The  Morrigan  has  some  dim  connection  with  the  pagan  festival  of 
Samhain,  or  Allhallowtide.  Mâcha  Mongruadh,  the  fabled  foundress  of 
Ard-Macha  (Armagh)  whose  sword  [daidhem  Mâcha  Moingruadh)  is 
described  as  a  very  powerful  weapon,  is  sometimes  called  Morrigan; 
as  is  also  Mongfmd,  a  great  queen  of  the  y^  cent.,  in  whose  honour  the 
festival  of  Samhain  was  anciently  called  "  Fcil-Moing,  "  "  when  the 
vulgar  and  women  asked  requests  of  her.  "  ÇBook  of  Ballymote.) 

The  name  of  the  Morrigan  is  found  connected  with  many  of  the 
fulachts,  or  Kitchen  Middens,  particularly  with  the  larger  ones,  which 
are  called  "  Fulacht  na  Morrigna,  "  the  "  Morrigan's  hearth,  "  whilst 
the  smaller  ones  are  named  "  Fulacht  Fian.  One  of  thèse  great  fulachts 
at  Tara  would  cook  three  kinds  of  food  at  the  same  time.  Some  account 
of  it  will  be  found  in  Petrie's  "  Antiquities  of  Tara,  "  pp.  213-14 
(where,  however,  Pétrie  should  hâve  considered  it  rather  a  cauldron 
than  a  spitj.  In  the  tract  called  the  Agallamh  heg,  or  "  Little  Dialogue,  " 
contained  in  the  "  Book  of  Lismore,  "  mention  is  made  (fol.  196  a2) 
of  another  Fulacht-na-Morrigna  which  existed  near  the  fairy  mound  oï  Sidh- 
Airfemhin,  in  the  présent  county  of  Tipperary. 

"  Ba  hiatfein  do  rinde  hoth  doibh  ind  oidchi  sin,  ocus  do  rinded  indeo- 
nadh  ko,  ocus  teid  Cailte  ocus  Findchadh  do  indlad  a  làmha  cum  int  srotha . 
Inad  fulachta  so  ar  Findchad,  ocus  iscian  0  do  rinded.  Is  fir  ar  Cailte,  ocus 
fulacht  na  Morrighna  so,  ocus  ni  denta  gan  uisce.  "  "  It  was  they  who 
made  a  hut  for  themselves  that  night;  and  indeonad  (cooking  places) 
were  made  by  them.  And  Cailte  and  Finchadh  went  to  the  stream  to 
wash  their  hands.  '  Hère  is  the  site  of  a  fulacht,  '  said  Finchadh  and  it 
is  a  long  time  since   it  was  made.  '  '  True,  '  said  Cailte;  '  and  this  is 


1.  Todd's  "  Danish  Wars,  "  introd.  p.  dxxxiij,  note 

2.  Fornaldar  Sœgur,  Copenhagen,  1825,  pp.  117-11S 


The  ancient  Irish  Goddess  of  War.  5  j 

a  fulacht-na-morrighna  which  is  not  to  be  made  without  water  '  "  {i.  e. 
there  should  be  a  supply  of  water  near  at  hand). 

The  name  of  the  Morrigan  enters  not  a  little  into  the  composition  of 
Irish  topographical  names.  In  the  présent  county  of  Louth  there  is  a 
district  anciently  known  by  the  name  of  Gort-na-Morrigna,  or  the  "  Mor- 
rigan's  field,  "  which  her  husband  ,  the  Dagda,  had  given  to  her 
("  Book  of  Fermoy,  "  fol.  125,  a2).  The  "  Book  of  Lismore"  (fol.  196, 
bi)  mentions  a  Crich-na-Morrigna,  as  somewhere  in  the  présent  county 
of  Wicklow.  Among  the  remarkable  monuments  of  the  Brugh  on  the 
Boyne  were  Mur-na-Morrigna  (the  mound  of  the  Morrigan)  ;  two  hills 
called  the  Cirr  and  Cuirrel  (or  comb  and  brush)  of  the  Dagda's  wife, 
which  Dr.  Pétrie  has  inadvertently  transformed  into  two  proper  names; 
and  Da  cich  na  Morrigna,  or  the  "  Morrigan's  two  paps.  •"  The  name 
of  the  Morrigan  is  also  probably  contained  in  that  of  Tirreeworrigan, 
in  the  county  of  Armagh. 

W.  M.  Hennessy. 


P.  S.  —  Mr.  Hennessy's  preceding  paper  is  a  valuable  contribution 
to  the  comparative  mythology  of  the  Germans  (chiefly  Scandinavians) 
and  Celts.  More  than  one  élément  of  the  Badhbh-story  is  common  to 
both  races.  I  mention  briefly  the  chief  coïncidences. 

I.  To  the  ancient  Irish  goddesses  of  war  correspond  the  Norwegian 
(and,  in  gênerai,  Germanie)  Valkyrias.  . 

II.  Thèse  Irish  goddesses  appear  either  by  themselves,  or(when  more 
than  one)  three  in  number.  In  a  similar  way  the  Noms  appear  three 
together,  and  the  youngest  of  them,  Skuld,  is  at  the  same  time  a  Val- 
kyria.  Very  often  too,  three  Valkyrias  fly  together  (Kœ/untfar^^'u/^/ztî,  i,  2). 

III.  One  of  thèse  goddesses  is  often  the  spécial  companion  ofo/zehero, 
assists  and  warns  him  and^  when  his  hour  has  come,  leaves  him 
with  a  cry.  Instances  of  love-stories  of  a  supernatural  character  are 
numerous  in  Germanie  mythology.  «  Sigurd  and  Brynhild  »  furnish 
one.  But  the  finest  of  thèse  stories  is  in  the  Older  Edda,  in  the  songs 


$6  The  Ancient  Irish  Goddess  of  War. 

of  Helgi.  I  do  not  find  however  that  in  Germanie  taies  the  approaching 
death  is  announced  by  the  divine  bride  leaving  her  husband  with  sor- 
row.  Perhaps  there  may  hâve  been  something  of  that  kind  in  Sigurd's 
murder  committed  at  the  instigation  of  Brynhild.  The  dying  Helgi  too 
says  to  his  Valkyrian  bride  :  «  Do  you  not  sorrow,  you  hâve  been  des- 
truction. »  Herein  seems  to  lurk  a  conception  more  stern  than  the  Irish, 
namely  that  the  Valkyrian  herself  is,  when  time  arrives,  the  instrument 
of  her  lover's  death.  The  simply  divine  Valkyrias  that  live  with  Odhinn 
and  are  not  attached  to  any  particular  man,  are  sent  by  him  for  the  spé- 
cial purpose  of  calling  the  heroes  «  home  «.  Hence  in  fact  the  name 
Valkyria,  «the  chooser  of  the  slain»  (Norse  val-r,  strages;  kiosa,  eligere). 

IV.  The  Irish  goddesses  appear  in  the  form  of  a  bird,  which  is  more 
especially  consideredasthe  «bird  of  valour»  ofthehero.  Itisnot  always 
easy  to  find  out  what  exact  form  they  assume,  but  it  is  generally  that  of 
a  scaldcrow.  The  Germanie  Valkyrias  generally  appear  as  swans.  Yet 
the  Vœlsunga  Saga  tells  of  love  between  one  of  Sigurd's  aneestors  and 
a  Valkyria,  who  assumed  the  figure  of  a  crow,  and  Aslaug,  daughter 
of  Sigurd,  who  accompanies  Ragnar  Lodbrok  after  the  fashion  of  the 
Valkyrias,  calls  herself  also  «  crow  »  (kraka). 

V.  The  names  of  the  Irish  goddesses,  as  far  as  can  be  ascertained,  are 
Badb  (or  Badb-eatha)  Fea,  Ana,  Morrigu  (or  Morrigan)  Mâcha,  Neman. 
Perhaps  we  might  he  justified  in  comparing  the  name  of  Mâcha  with  gr. 
[xà/;^.  As  far  as  the  first  of  thèse  names  is  concerned  it  is  certainly 
identical  with  M.  Pictet's  [C]aîhuhodua  and  it  has  its  counter-part 
in  Germany.  Tacitus  tells  us  (Ann.  IV,  73)  that,  in  the  eventful 
campaign  of  the  Romans  against  the  Frisians,  nine  hundred  Romans 
were  slain  «  apud  lucum  quem  Baduhenn<z  vocant.  )>  This  must  be 
understood  «  near  the  wood  which  is  consecrated  to  Baduhenna.  »  Now 
badii  is  a  Germanie  word  for  a  strife  »  (Anglo-Saxon  beado,  Old- 
Norse  hoedhr).  Indeed  it  does  not  appear  as  the  name  of  a  Valkyria; 
but  when  one  thinks  that  by  the  side  of  names  in  -hild  decidedly  deri- 
ved  from  the  Valkyrias  such  as  Mahlhild,  GundhiUi,  Svanhild,  there 
appears  an  Old-High  German  woman-name  Baduhild  which  indirectly 
confirms  the  statement  of  Tacitus,  it  becomes  most  probable  that  there 
was  an  ancient  Germanie  goddess  of  war,  named  Badu. 

Such  similarities  between  German  and  Celtic  traditions  cannot  be 
accidentai.  Not  even  the  historieal  connection  of  the  Seandinavians  and 
the  Irish  can  explain  them.  It  seems  that  we  must  go  much  further  back, 
to  those  times  when  along  the  Rhine  Celts  and  Germans  mixed  together, 
sometimes  as  friends,  sometimes  as  foes,  when  the  king  of  the  Mar- 


The  ancient  Irisli  Goddess  of  War.  57 

comans,  Marobodms,  a  German  by  birth,  assumed  a  Celtic  name,  in 
the  same  way  as  in  later  times  Cormac,  Niai,  went  over  to  the  Scan- 
dinavians  from  Celtic  iips.  The  old  Gaulish  names  Caturix,  Toutiorix, 
Segomaros,  Albiorix,  hâve  their  Germanie  corresponding  words  (some 
of  which  are  still  in  use)  in  the  names  Hedrich,  Dietrich,  Sigmar,  Alberich. 
Ail  thèse  instances  of  resemblance  indicate  a  long  intercourse,  and 
songs  and  traditions,  as  well  as  names  and  words,  may  hâve  been  inter- 
changed  from  one  side  of  the  Rhine  to  the  other  and  hâve  strengthened 
the  old  bonds  which, united  Celts  and  Germans  in  the  time  of  the 
Indogermanic  unity. 

G.    LOTTNER. 


MANUSCRIT  IRLANDAIS 

DE  VIENNE'. 


Le  manuscrit  de  la  Bibliothèque  Impériale  de  Vienne,  coté  :  Cod.  i6 
est  d'origine  irlandaise  et  il  renferme  trois  gloses  irlandaises 
anciennes.  Il  provient  de  la  bibliothèque  de  l'ancien  couvent  de  Bobbio, 
en  Piémont,  fondé  par  saint  Colomban.  Le  ms.  est  en  parchemin.  Il 
contient  un  texte  latin  de  «  Probus  et  Eutychius  ».  Les  feuilles  de  ce 
ms.  ne  sont  pas  d'une  égale  dimension  et  elles  ne  semblent  pas  écrites 
toutes  à  la  même  époque.  La  partie  qui  contient  «  Probus  »  paraît  être 
du  VIII*  siècle,  celle  qui  contient  «  Eutychius  »  du  ix«.  C'est  cette 
seconde  partie  qui  contient  les  gloses  irlandaises.  Très-probablement, 
chacune  des  deux  parties  formait  anciennement  un  livre  séparé,  et  elles 
ont  été  réunies  plus  tard  en  un  seul  corps.  Dans  quelques  feuilles,  au 
dessous  de  l'écriture  du  viii''  et  du  ix*^  siècle,  on  aperçoit  une  écriture 
plus  ancienne  en  lettres  capitales.  Grâce  à  la  courtoisie  de  la  Direction 
de  la  Bibliothèque  de  Vienne,  nous  pouvons  transcrire  ici  les  gloses  irlan- 
daises de  ce  ms. 

Cod.  i6.  —  Bibliothèque  Impériale  de  Vienne. 
Fol.  57  b. 
lin.     5.  baritona  (gl.  ettorsondi^) 

Fol.  58  3  . 
lin.     I .  quae  adhaerentia  nominibus  non  minus  trisyllabis  absque  pio 
pias  et  hio  hias  .i.  penultimam  nulla  sequen 
2.  te  consonante  semper  habentibus  in  omni  génère  ut  nuntius 
nuntio  .as.  socius  socio  .as.   saucius  saucio  .as.  curia  (gl. 
airect  *) 

*  (Un  romaniste  distingué  de  Montpellier,  M.  A.  Boucherie,  en  m'envoyant  son 
adhésion  à  la  Revue  Celtique,  avait  appelé  mon  attention  sur  un  passage  où  Lindemann, 
(Corpus  Gramm.  Lat.  Vet.,\o\.  I,  p.  152)  parlant  d'un  «  codex  bobiensis  in  quo  habetur 
Eutychius,  »  y  signalait  des  gloses  écrites  en  une  langue  à  lui  inconnue:  «  Comparent  in 
his  aliquot  monstra  verborum  qus  ad  quem  mortalium  sermonem  pertineant  non  habeo 
dicere.  »  Aux  exemples  cités  par  Lindemann,  je  reconnus  aussitôt  des  gloses  irlandaises, 
si  étrange  qu'il  puisse  paraître  que  cette  indication  ait  échappé  à  Zeuss  et  à  ses  disciples. 
Je  communiquai  immédiatement  ce  renseignement  à  M.  Nigra;  de  là  celte  notice.— H. G.] 


,i 


Un  Manuscrit  irlandais  de  Vienne.  59 

l.  decurio  .as.  fiducia  fiducicr  .aris.  repudium  répudie  .as.  tripu- 
dium  tripudio  .as.  radius  radio  .as.  consilium 

1$.  ambio  .bis.  (gl.  ambitus)   superbio  bis   (gl.   — bia  1.  — bus) 

sancio  sarcio  farcio  expedio  impedio  fastidio  condio  custodio 

erudio  oboedio  uagio 
16.  praesagio  salio  sepelio  stabilio  micturio    (gl.    mictus)  prurio 

(gl.   merbigim^i)  parturio    gl.   partus)  haurio  (gl.    haustus) 

inretio  sentio  gestio  uestio 

Notes. 

1.  —  ettorsondi  (baritona).  C'est  un  nominatif  ou  accusatif  pi.  neut.  ou 

bien  un  datif  sing.  fémin.  d'un  adjectif  en  ia,  composé  de  ettor 
0=^  etar,  inter)  et  de  son  (yox,  sonus),  avec  le  suffixe  de  (=^ 
the  =  orig.  tja). 

2.  —  airecî  (curia).  Cf.  airech  (gl.  primas)  Sg.  50  ^  ;  airechas  (princi- 

patus)  Wb.  1  b  ,  3  d  .  Sg.  174  a  ;  Gr.  C.  6-j,  233,  750,  778; 
Ir.  G/,  p.  147.  Ces  formes  sont  dérivées,  d'après  Zeuss  (Gr.  C. 
6-j)  de  air  (oriens,  /.  e.  regio  anterior). 
5.  —  merbigim  fprurio).  Ce  verbe  qui  présente  ici  la  forme  que  Zeuss 
appelle  dénominative,  mais  qui  a  souvent  la  signification  causa- 
tive,  est  très-probablement  un  déponent.  Je  crois  que  le  m 
radical  représente  un  b  et  que  merbigim  est  pour  *berbigim.  La 

(forme  active  simple  se  trouve  dans  le  ms.  de  Milan  :  mani  berba 
(gl.  nisi  decoxerit)  46  <:  ;  dans  le  glossaire  de  Cormac  :  oc  ber- 
bad  (smelting)  ad  v.  Prûll;  dans  Lh.  et  O'R.  :  bearbhaim  (I 
boil).  Les  formes  britanniques  présentent  le  changement  de  la 
seconde  labiale  en  v:  Gall.  b erw i  (tohoW)  Ow.,  Spur.;  Br. 
bervi,  birvi  (bouillir)  Le  Gon.  Les  dialectes  celto-italiques  ont 
conservé  cette  racine  :  Piém.  Can.  brilvar  (bollire).  Toutes  ces 
formes  supposent  une  racine  celtique  ancienne  'berv,  correspon- 
dant au  latin  ferveo.  Les  formes  celt.  berv,  lat.  ferv-,  semblent 
secondaires.  La  racine  originaire  simple  est  bhar,  scr.  bhar, 
frigere,  assare). 

C.   NiGRA. 

p.  s.  —  Un  autre  Manuscrit  irlandais  de  Vienne.  Le  savant  D''  E.  Birk,  premier 
conservateur  de  la  Bibliothèque  Impériale  de  Vienne,  a  eu  l'obligeance  de  nous  informer 
qu'on  vient  de  découvrir  des  gloses  irlandaises  sur  quatre  feuillets  en  parchemin  d'un 
manuscrit  du  xi"  siècle,  conservé  dans  la  dite  bibliothèque  et  contenant  des  fragments  de 
l'ouvrage  de  Bède  le  Vénérable  :  «  de  ratione  temporum.  »  Ce  manuscrit  est  coté  :  Ms. 
in-fol.  suppl.  2698.  C.  N. 


GLOSES  IRLANDAISES 


DU    MANUSCRIT    DE    MILAN 


La  Bibliothèque  Ambrosienne  de  Milan  possède  plusieurs  manuscrits 
d'origine  irlandaise  provenant  de  l'ancien  couvent  de  Bobbio  fondé  par 
saint  Colomban  au  commencement  du  vii'=  siècle.  Parmi  ces  manuscrits, 
celui  désigné  par  la  cote  C.  301  offre  le  plus  grand  intérêt  aux  celtistes 
par  le  nombre  considérable  de  gloses  écrites  dans  l'ancienne  langue 
irlandaise  et  insérées  entre  les  lignes  du  texte  latin  et  sur  les  marges. 
Ce  ms.  a  été  mentionné  et  décrit  par  Vallarsius  (dans  la  préface  à  l'ap- 
pendice du  tome  VII  de  son  édition  des  œuvres  de  saint  Jérôme),  par 
Muratori  ÇAntiq.  Ital.  III,  p.  858),  par  Peyron  (A/.  T.  Ciceronis  oratio- 
num  fragmenta  inedita,  etc.  p.  188),  et  par  Zeuss  dans  la  préface  de  sa 
Grammatica  Celtica,  p.  XXIX.  Tout  en  renvoyant  les  lecteurs  à  ces  diffé- 
rentes sources,  je  crois  utile  de  donner  ici  une  description  sommaire  de 
ce  précieux  document. 

Le  manuscrit  C.  301  delà  Bibliothèque  Ambrosienne  est  écrit  sur 
parchemin.  La  reliure  est  la  même  que  le  ms.  avait  lorsqu'il  a  été  décrit 
dans  l'inventaire  de  la  bibliothèque  de  Bobbio  au  xve  siècle.  Bien  qu'elle 
soit  en  mauvais  état,  elle  a  été  sagement  conservée  telle  quelle.  La 
dimension  des  feuilles  est  de  34  centimètres  de  hauteur  sur  23  centi- 
mètres de  largeur.  Toutefois  plusieurs  feuilles  ont  une  dimension 
moindre  soit  en  hauteur  soit  en  largeur.  La  feuille  52  n'est  composée 
que  d'un  fragment  de  parchemin  de  la  dimension  d'environ  14 
centimètres  de  largeur  sur  10  de  hauteur.  Mais  ce  fragment  con- 
tient, au  recto,  une  glose  irlandaise  de  1 1  lignes  au  psaume  XXXIII, 
écrite  avec  beaucoup  de  netteté,  que  M.  Stokes  a  publiée  (Goid.,  p.  20), 
très-fidèlement,  à  l'exception  du  premier  mot  latin  qui  est  I  p  s  1  et  non  p  s. 
Au  pied  de  cette  glose  une  main  du  xviie  siècle  a  écrit  «Lingua  Cambro 
britannica  ».  Une  main  moderne  a  ajouté  plus  bas  «  Charactere  ad  Anglo- 
Saxonicum  accedente  )).  Le  nombre  des  feuilles  est  de  146.  Les  feuilles 
n'ont    pas    de    numération.    Mais    une    main    récente  a   marqué  à 


Gloses  irlandaises  du  Manuscrit  de  Milan.  6 1 

l'encre  noire,  en  chiffres  arabes  très-menus  et  déliés,  une  feuille  sur 
dix,  depuis  le  commencement  jusqu'à  la  fm  du  ms.  Une  autre  numé- 
ration, au  crayon  noir,  et  aussi  en  chiffres  arabes,  a  été  faite  pour 
l'usage  de  la  bibliothèque  ;  cette  numération  est  faite  par  pages,  et 
elle  comprend  aussi  quelques  feuilles  écrites  sur  papier  par  des  mains 
récentes  et  ajoutées  entre  la  couverture  et  la  première  feuille  du  ms.  Il 
y  a  une  faute  dans  cette  dernière  numération.  Après  la  page  59  on  a 
inscrit  sur  la  page  suivante  le  chiffre  62.  Enfin  pour  faciliter  les  recher- 
ches et  les  comparaisons  des  gloses,  j'ai  dernièrement  marqué  la  numé- 
ration exacte  au  simple  crayon  rouge,  en  chiffres  arabes,  sur  chaque 
cinquième  feuille,  au  pied  des  feuilles  au  recto.  Chaque  feuille  est  com- 
posée de  quatre  colonnes,  deux  au  recto  et  deux  au  verso,  excepté  la 
première  feuille  qui  n'est  écrite  qu'au  recto,  et  la  feuille  52  précitée 
qui  n'étant  composée  que  d'un  fragment  de  parchemin,  n'a  qu'une  courte 
colonne,  en  irlandais,  au  recto,  et  une  colonne  égale,  en  latin,  au  verso. 
La  notice  suivante  est  écrite  sur  un  papier  adhérent  à  l'intérieur  de 
la  couverture  de  gauche  :  «  Hune  codicem  commentariorum  S.  Hie- 
»  ronymi  in  Psalmos,  longobardis  characteribus  conscriptum  ac  notis 
»  viri  docti  adspersum,  scito  ex  bibliotheca  Bobii  a  S.  Columbano  insti- 
»  tuta  prodiisse  ac  Rmo.  Cardinali  Federico  Borromaeo,  dum  Ambrosia- 
»  nam  bibliothecam  Mediolani  instrueret,  libros  manuscriptos  undique 
»  conquireret,  a  religiosissimis  S.  Benedicti  patribus  oblatum  fuisse  anno 
))  1606  Antonio  Olgiato,  qui  primus  eam  bibliothecam  tractavit,  prae- 
))  fecto  ».  Cette  notice  est  écrite  de  la  main  d'Olgiato,  qui  a  été  le  pre- 
mier préfet  de  l'Ambrosienne,  et  elle  indique  la  provenance  du  ms.  et  la 
date  de  son  admission  à  la  bibliothèque.  La  première  feuille  porte  l'ins- 
cription suivante  au  milieu  de  la  page,  au  recto  :  «  In  hoc  uolumine  con- 
»  tinetur  hieronymi  presbiteri  expositio  super  psalterium  non  tamen  a 
»  primo  psalmo  prius  sed  quosdam  alios  indirecte  prius  exponere  uide- 
»  tur.  deinde  ad  psalmorum  ordinem  id  est  a  primo  incipiens  et  demum 
»  subsequenter  procedens  usque  ad  finem  psalterii,  »  Cette  inscription 
est  de  beaucoup  postérieure  à  la  compilation  du  ms.,  mais  elle  ne  saurait 
être  en  tout  cas  postérieure  au  xv«  siècle,  époque  de  la  formation  du 
catalogue  de  la  bibliothèque  de  Bobbio,  publié  par  Peyron  (pp.  cit.  p.  26), 
et  portant  textuellement  cette  même  inscription.  Dans  cette  première 
page  de  la  première  feuille  se  trouvent,  en  deux  colonnes,  deux  compo- 
sitions iriandaises  en  vers  rimes,  dont  les  lettres  sont  tellement  effacées 
ou  raclées  que  la  lecture  en  est  extrêmement  difficile.  Deux  tentatives  de 
transcription  de  ces  pièces  curieuses  ont  été  faites,  l'une  par  Zeuss  {Gr.  C. 
p.  950),  l'autreparM.  Stok.es(Go/^.p.  17).  Dans  la  première  de  ces  com- 


62  Gloses  irlandaises  du  manuscrit  de  Milan. 

positions  est  racontée  la  naissance  miraculeuse  d'un  garçon  enfanté  par 
un  homme.  La  seconde  contient  la  description  d'une  maison  symbolique 
qu'une  glose  latine  explique  par  urbs  fortitudinis  nostrae. 
Le  verso  delà  première  feuille  ne  contient  que  ces  mots  sup[er]  psal- 
teriu[m].  En  tête  de  la  deuxième  feuille,  au  recto,  on  lit,  en  une 
écriture  qui  date  de  l'époque  de  la  compilation  du  ms.  :  Liber  scti 

COLUMBANI    DE    BOBIO    INCIPIT    PRAEFATIO    PSALMORUM    IN    XÏ50 

ihO  dno  nô.  Une  main  plus  récente  a  ajouté  après  praefatio  le 
mot  HiERONiMi,  En  tête  de  la  feuille  ^8,  au  recto,  on  lit  in  noe  ihu 
et  scae  brigitae  (in  nomine  Ihesu  et  sanctae  B.).  En  tête  de  la 
feuille  46  au  verso  on  lit  0  Emmanuel.  A  la  feuille  131^^,  dans  un 
endroit  que  le  glossateur  irlandais  semble  avoir  eu  quelque  difficulté  à 
lire  et  à  interpréter,  ce  dernier  a  ajouté  à  la  glose  irlandaise  ces  mots 
latins  suDET  qui  leget,  expression  que  l'on  trouve  également  dans 
le  ms.  dePriscien  de  Saint  Gall  (Gr.  C.  p.  XIII). 

Le  ms.  contient  i"  les  deux  pièces  irlandaises  en  vers  rimes  que 
j'ai  déjà  mentionnées,  au  recto  de  la  première  feuille;  2"  la  préface 
publiée  de  saint  Jérôme  sur  les  psaumes,  commençant  «  Psalterium 
Romae,  etc.  ».  3°  Le  prologue  «  David  filius  Jesse  »  publié  parmi  les 
œuvres  de  Bède;  4°  le  «  prologus  Hie.fonymi  ad  Sophronium  «  ;  5"  une 
espèce  d'exposition  sommaire  des  psaumes  XVII,  XVIII,  XXI,  XXV, 
XXVIII,  XXIX,  XXXIV,  XXXV,  XXXVI,  XXXIX;  6°  un  commentaire 
de  tout  le  psautier,  depuis  le  premier  psaume  jusqu'au  dernier.  Mais  le 
commentaire  sur  le  dernier  psaume  n'est  pas  complet.  La  dernière  ou  peut- 
être  les  deux  dernières  feuilles  manquent  au  ms.  Les  matières  indiquées 
ci-dessus  par  les  numéros  2,  3,  4  et  5  sont  contenues  en  treize  feuilles, 
depuis  la  deuxième  feuille  jusqu'à  la  quatorzième.  Le  commentaire  com- 
mence à  la  quatorzième  feuille  et  il  va  jusqu'à  la  cent  quarante- 
sixième,  qui  est  la  dernière  du  ms.  Les  gloses  irlandaises  sont  insérées 
dans  une  partie  des  feuilles  2  et  3 ,  et  ensuite  dans  toutes  les 
feuilles  du  ms.  à  partir  de  la  feuille  14.  Zeuss  a  publié  dans 
l'appendice  de  sa  Grammaîica  Celtica  les  gloses  des  feuilles  2  et  3, 
ainsi  que  celles  des  feuilles  14  et  15.  Il  en  a  cité,  en  outre, 
dans  le  cours  de  son  ouvrage,  un  certain  nombre,  principalement  choisi 
dans  la  première  partie  du  ms.  M.  Stokes  publia  de  son  côté  (Goid. 
p.  20  et  s.)  un  choix  de  gloses  extraites  pour  la  plupart  de  la  dernière 
partie  du  ms.  depuis  la  feuille  1 30'^  jusqu'à  la  fin. 

Le  commentaire  latin  sur  les  psaumes  qui  forme  le  fond  principal  du 
ms.  n'est  pas  de  saint  Jérôme  comme  il  est  faussement  indiqué  par 
l'inscription  ainsi  que  par  l'inventaire  de  la  bibliothèque  de  Bobbio  fait 


Gloses  irlandaises  du  manuscrit  de  Milan.  63 

en  1461  et  publié  par  Peyron  (op.  cit.'].  Ce  commentaire  est  attribué 
avec  raison  à  saint  Colomban  par  Muratori,  par  Vallarsius  et  par  Zeuss. 
Ce  qui  a  contribué  à  faire  croire  que  le  comm.entaire  était  de  saint 
Jérôme,  c'est  la  préface,  qui  est  placée  en  tête  du  ms.  à  la  deuxième 
feuille,  et  qui  est  de  saint  Jérôme.  Il  est  difficile  de  conjecturer  à  quelle 
époque  cette  erreur  peut  remonter.  Elle  existait  au  xv«  siècle,  ainsi 
qu'il  est  démontré  par  l'inscription  du  ms.  sur  l'inventaire  précité  de 
1461.  Mais  au  x*"  siècle  le  commentaire  était  encore  attribué  à  son  véri- 
table auteur  saint  Colomban,  et  voici  ce  qui  me  porte  à  le  croire.  Mura- 
tori a  publié  dans  le  tome  III  des  «  Antiqaitates  lialicae  »,  p.  818  et  s., 
un  «  Index  »  des  manuscrits  de  Bobbio,  compilé  au  xe  siècle.  Or  ce 
catalogue  du  x^  siècle  indique  parmi  les  manuscrits  existant  à  cette  épo- 
que dans  la  bibliothèque  du  couvent  les  livres  de  saint  Colomban  sur  les 
psaumes  «  Libros  sancti  Columbani  in  Psalmos  »,  ce  qui  ne  peut  s'ap- 
pliquer, selon  moi,  qu'au  manuscrit  de  Milan.  Si  cette  induction  est 
exacte,  nous  avons  ici  la  preuve  positive,  i"  que  le  commentaire  sur  les 
psaumes  du  ms.  de  Milan  est  bien  de  saint  Colomban  ;  2"  que  le  manus- 
crit de  Milan  est  antérieur  au  x"  siècle;  3°  que  l'attribution  du  commen- 
taire à  saint  Jérôme  est  postérieure  à  cette  époque.  Le  glossateur  irlandais 
qui  insérait  ses  gloses  dans  le  ms.  au  viiT  ou  ix''  siècle  ne  devait  pas  attribuer 
le  commentaire  à  saint  Jérôme,  parce  que  le  nom  de  ce  dernier  est  men- 
tionné dans  une  glose  de  façon  à  laisser  conjecturer  que  le  glossateur  le 
considérait  comme  un  auteur  différent  de  celui  dont  il  avait  l'ouvrage  sous 
les  yeux.  Voici  du  reste  les  mots  du  glossateur,  44^':  «  Ut  dicitur  in 

TRACTATU  LIBRI  MARCI  SECUNDUM  H  I  r[o  N  YM  U  m]  )).  Cette  cita- 
tion qui  se  réfère  au  commentaire  de  saint  Jérôme  sur  l'évangile  de 
Marc,  me  semble  exclure  dans  l'esprit  du  glossateur  la  persuasion  qu'il 
eût  sous  la  main  un  écrit  de  saint  Jérôme. 

Quant  au  contenu  et  au  style  du  texte  latin  du  commentaire,  Muratori 
en  porte  un  jugement  peu  favorable  et  il  n'hésite  pas  à  déclarer  que  cet 
ouvrage  est  bien  loin  du  goût,  du  savoir  et  de  l'élégance  de  saint  Jérôme 
et  qu'il  n'est  pas  digne  d'être  compris  dans  les  ouvrages  d'un  si  grand 
docteur'.  L'opinion  de  Vallarsius  est  bien  différente.  Cet  éditeur  de 
saint  Jérôme  croit  que  le  commentaire  n'est  pas  de  ce  Père  de  l'Eglise; 
mais  il  ajoute  qu'il  pourrait  fort  bien  figurer  avec  honneur  parmi  ses 
œuvres*.  Je  n'ai  pas  à  entrer  dans  ce  débat,  dont  la  solution  n'a  guère 


1.  n  Illud  quidem  statuo,  subséquentes  in  eo  Codice  Commentarios  longe  abire  a 
Sancti  Hieronymi  gustu,  doctrinâ  et  elegantiâ,  et  nil  continere  tanto  Doctore  dignum.  » 
Antiq.  Ital.,  III,  p.  8(8. 

2.  «  Est   igitur    in  toties  laudata  Ambrosiana   Mediolani  Bibliotheca   antiquissimus 


64  Gloses  irlandaises  du  manuscrit  de  Milan. 

d'importance  au  point  de  vue  des  études  celtiques.  Il  suffira  de  faire 
remarquer  à  ce  sujet  que  la  différence  très  réelle  entre  le  style  du  com- 
mentaire et  celui  de  saint  Jérôme,  confirme,  au  surplus,  d'une  façon 
indirecte,  l'attribution  de  cet  écrit  à  saint  Colomban.  Entre  saint  Jérôme 
et  saint  Colomban  il  y  a  la  distance  de  deux  siècles.  On  ne  doit  pas 
s'étonner  que  les  écrit:  de  saint  Colomban  portent  les  traces  de  plus  en 
plus  visibles  de  la  décadence  des  études  latines,  qui  à  la  fin  du  vi*  siècle 
et  au  commencement  du  siècle  suivant  avait  fait  partout  de  rapides  pro- 
grès. Il  ne  faut  pas  oublier  non  plus,  que  d'après  Jonas  de  Bobbio,  le 
biographe,  presque  contemporain,  de  saint  Colomban,  ce  dernier  aurait 
composé  le  commentaire  sur  les  psaumes  dans  sa  première  jeunesse  «  ut 
»  intra  adolescentiae  aetatem  detentus  psalmorum  librum  elimato  ser- 
»  mone  exponeret  »  (Mabill.  Acta  Bened.  saec.  2,  6.  cité  dans  Gr.  C. 
praef.  p.  XXX).  Néanmoins  le  commentaire  dénote  dans  son  auteur  une 
érudition  peu  commune  pour  les  temps  où  il  a  été  rédigé.  Evidemment 
l'auteur  ignorait  l'hébreu  ou  il  n'en  savait  que  quelques  mots.  Mais  il 
cite  assez  souvent  des  mots  grecs.  Il  devait  avoir  une  connaissance 
exacte  des  différentes  versions  de  la  Bible,  puisqu'il  a  soin  d'en  marquer 
constamment  les  divergences  par  la  formule  bien  souvent  répétée  «  debe 
tinîuda,  debe  canone  »  (discrimen  interpretationis,  discrimen  canonis). 

L'âge  du  ms.  est  fixé  par  Muratori,  par  Peyron  et  par  Zeuss  au 
VIII*  siècle  de  notre  ère.  Les  gloses  irlandaises  ont  été  ajoutées  un  peu 
plus  tard,  mais  elles  ne  peuvent  être  en  tout  cas  postérieures  au  ix*-'  siècle. 
Le  contenu  des  gloses  prouve  d'une  manière  évidente  que  le  glossateur 
n'est  pas  la  même  personne  qui  a  transcrit  le  texte  latin,  car  dans  plu- 
sieurs endroits  il  ne  lit  pas  bien  le  texte,  et  dans  d'autres  il  donne  une 
double  traduction  irlandaise  d'un  mot  latin,  lorsque  ce  mot  peut  être  lu 
de  deux  façons  différentes.  Ainsi,  par  exemple,  au  mot  du  texte  «  alli- 
gat  »,  qu'il  ne  sait  s'il  doit  lire  «  allegat  »,  le  glossateur  donne  une 
double  traduction  pour  indiquer  les  deux  significations  :  conrig.  .i. 
asindet,  23*^  (i.e.  alligat  vel  allegat). 

L'orthographe  du  texte  latin  transcrit  sans  doute  par  un  moine  irlan- 
dais d'après  un  manuscrit  antérieur,  prouverait  à  elle  seule  le  degré  de 
décadence  où  était  tombée  l'étude  de  la  langue  latine  au  viii"  siècle, 
même  dans  les  cloîtres  où  elle  avait  trouvé  alors  l'un  de  ses  principaux 


calamo  exaratus  liber,  qui  plane  aliam  ab  his,  quae  hactenus  innotuerunt,  eamque  sane 
elegantiorem,  sub  Hieronymi  nomine  Expositionem  in  Psalmos  contineat  :  ut  si  qua  alic 
inter  S.  Patris  opéra  locum  non  immerito  obtinere  visa  est,  li3sc  supra  esteras  etiam  cun- 
dignitate  stare  possit.  »  Vallars.  S.  Eus.  Hieronymi  op.,  Tom.  VU.  in  admonit.  ac 
append. 


Gloses  irlandaises  du  manuscrit  de  Milan.  65 

refuges.  Non  seulement  la  prononciation  irlandaise  appliquée  au  latin  a 
transfiguré  les  mots  dans  le  texte  presque  constamment  et  quelquefois 
d'une  façon  étrange,  ce  qui  est  du  reste  commun  aux  manuscrits  irlan- 
dais de  cette  époque  ',  mais  il  y  a  en  outre  beaucoup  de  fautes  de  gram- 
maire et  d'orthographe  et  plusieurs  omissions  qui  ne  doivent  pas  être 
mises  au  compte  de  la  prononciation  irlandaise.  En  outre  les  abré- 
viations sont  en  nombre  extrêmement  considérable,  ce  qui  ajoute  encore 
à  la  difficulté  de  la  lecture. 

Mais  ce  qui  rachète  largement  ces  défauts  du  ms.,  ce  qui  donne  à  ce 
vieux  livre,  dix  fois  séculaire,  une  valeur  inappréciable,  ce  sont  les 
gloses  irlandaises,  importantes  par  leur  nombre  et  par  leur  contenu, 
écrites  en  général  en  traits  nets  et  fins,  sans  ratures,  avec  peu  d'abré- 
viations, et,  sauf  plusieurs  endroits  malheureusement  maculés  ou  obli- 
térés, d'une  parfaite  conservation.  M.  Stokes  a  dit  avec  raison  (^Goid. 
p.  17)  que  ces  gloses  pourraient  à  elles  seules  fournir  la  matière  d'une 
grammaire  et  d'un  dictionnaire  suffisamment  complets  de  l'irlandais 
ancien. 

Je  suis  heureux  de  pouvoir  annoncer  aux  lecteurs  de  la  Revue  que  la 
publication  complète  de  ces  gloses  sera  faite  prochainement  par  le  savant 
professeur  de  Milan,  M.  G.  J.  Ascoli.  Cette  nouvelle  sera  accueillie, 
nous  n'en  doutons  pas,  avec  le  plus  vif  intérêt  par  tous  les  celtistes.  En 
attendant  la  publication  de  l'illustre  linguiste  milanais,  je  donne  ici  un 
premier  spécimen  de  celle  que  j'avais  l'intention  d'entreprendre  lorsque 
j'ignorais  le  projet  de  M.  Ascoli,  et  qui  n'aurait  pu  être  aussi  com- 
plète que  la  sienne. 


I.  Voyez  W.  Reeves,  Adamnan's  Life  of  St.  Columba,  p.  XVI;  Zeuss,  Gr.  C,  p.  XXI; 
et  Gl.  Taur.,  p.  XXV. 


GG  Gloses  irlandaises  du  manuscrit  de  Milan. 

Fol.  5  5^,  Psalm.  XXXV. 

'  temperasset..    sublato   lamen  scipho  >  et  5   has 

ta  pro  manifestatione   negotii  4  more 

suo   opus  s  ad  uerba   retulit.  c^  tere   cum 

Dixit^   iniustus  usque   ipso,,    pro  7   putat^   se  9  la 

peccat..  non   est  timor  dei   usque   eius..   pro   ne 

que  '°  est   timor  domini   ante  oculos   eius..    an   ita  non 

saltim  timorem    dei   ante   oculos   eius  '^  incre 

patorie  '5   legendum  est.,    ac  si  diceret 

fallat  licet  uniuersos  homines  de 

miens  *  est   tamen    qui   nec    timoré   dei   fre 

natur  '4  a   scelere    quem    nulla  potest 

latere   quamui's'S   sécréta  molestio  "5..  quoniam  dolo 

se   usque  odium.,    pro  '7  ut   desidiria   sua 

de   mé   interficendo  '^   impleat  '9.    sic   ait   es 

saias  in  ieiunis   uestrfs  inueniu 

ntur   uoluntates   uestrae  id   est  »°  copu 

lentur..    Uerba  oris   eius   usque   dolus..   cum 

filium^"    uocaret  quem   obtabat 

et    studebat  occidire..   noluit   in 

tellegere  usque   ageret..  absoluit 

profeta  ^^  cur  peccator  in   uirtutem 

non  adsurrexerit.   noluit  ^5    inquit   non 

potuit..    Iniquitatem  24  meditatus   est 

usque  suo..  id  est  augenter  ^s   etiam  tempus 

quieti  datum  prauis  et  noxi'is 

cogitationibus   occupabat..    adstet 

it  omni  uiae  non  bonae..  prauas  mol 

litiones  in  opus  ^^  aduxit..    maliti 

am  non  odiuit..    conséquentes  ^7  causas   in 


leg.  démens. 


Gloses  irlandaises  du  manuscrit  de  Milan.  67 

Fol.  5$c. 

1.  is  ed  scél  foraithminedar  is  indi  siu  diluid  dd.*   forlongais  resauL. 

luide  iarum  dia  thosansom  co  sluag  7  gabthe  dunad  les  fris  a  ri 
noillus.  dluid  dd.  iaf  aidchi  roboi  cucu  innan  dunad  7  luid  co  port 
imhôi  in  ri  ind  sainriud  7  ooscaig  eredig  ind  rig  7  ooscaig  in  gae.  7 
saidsi  lialalecùinn'"'  saul  hitalmain  7  luid  iarû  inti  dd.  hiîelaig 
banessam  dind  slog  7  aregart  doib  disui*"*  nant  maith  oroitatar 
arnrig  déccud  a  eredig  7  aarma  cia  indus  rundgabsat  in  aimsir  in 
îindnaculsin  dl  dunecomnacht  dia  inni  saûl  inna  lamasom  rogabsom 
in  salmso.. 

2.  ind  eridcch  .i.   as  in  magin  imbatar 

3.  .i.  sublata 

4.  .i.  operis 

5.  .i.  is  argnlm  an  dixit  asrubart  inti  dd.  sechis  darigni  int  anfirian 

6.  .i.  sechis  darigni  son  huagnim 

7.  taraesi 

8.  forsani  as  dilinquat  trachîaid  an'.siu 

9.  .i.  onach  fessed  dia 

10.  .i.  fo  diltud  inso 

1 1 .  inni  nadndignigedar 

12.  iniusti 

13.  .i.  inchuarsachthid  .i.  no  is  cursachad  fil   is  indi  as.   non  .i.  non 

est  .i.  ini  nadndixnigider  .i.  nate  ni  fil  homun  die  les  issuaichnid  7 
aîa  /ra  cid  diltud  is  indisin 

1 4.  nachidfrithgaib 

1 5 .  cid 

16.  nachtochrechad  .i.  ni  ofel  ni  dugditha  adi.. 

17.  forsani  as  iniquitas  7  odiuna  trachtid  sosis 

18.  bed  airdbidi 

19.  .i.  noch  is  co  farfia  son 

20.  uel  complenlur 

21.  .i.  ainm  maicc  asbered  saul  dû  dd. 

22.  dauid 

23.  sic  disponitur  ideo  non  potuit  .i.  peccator  quia  noluit  .i.  denum 

ndcgnima 

24.  .i.  cid  intan  nombith  innaligiu  ba  oc  imradud  chloine  nobiîh 

25.  .i,  intormachtid  .i.  doformaig  cech  peccad  foralaile  ndo  beus  intan 

asmbeir  iniquitatem 

26.  diaforbu  ingnim 

27.  uel  [consequenjter  .i.  in  chomimmaircid 

*  dd.  =  dauid 
**  leg.  lialalecùinn 
***  leg.  disiu? 


68  Gloses  irlandaises  du  manuscrit  de  Milan. 

Fol.  5J  '^.  Psalm.  XXXV. 

tulit.   quia  '   adstetit  omni  uiae  non 

bonae  quia  scilicet  non  fuerat^  auersatus  ma 

litiam  id  est  non  oderat'..  domine  usque   tua.. 

id  est  pro  usque  4  in  caelura..  altitudine  caelorum 

quantitatem  exaggerauit  5   mise 

ricordiae..  ad  laudes  dei  cum  ad 

meratione  conuertitur  6..  quo  et  in  7  saul  is^  mitis 

sit.  9  et  in  sua  defensione  sollici 

tus..  Et  ueritas  usque  ad  nubes..    more 

suc   '0  misericordiae   sociauit  "   ue 

ritatem  '^   ut  certam  circa  se  indul 

gentiam  dei  esse  mansuram  '5  adserat.. 

iustitia  tua  sicut  montes   dei..   pro  tui..   per  haec  '4 

quae  nouit.   alta  atque  m  magna  profundas  quo 

que  diuinas  uirtutes  "^  extulit..  iudicia 

usque  multa'7..  pro '^   incomprehensibilia.  haec  dicit  propter 

surgentem  de  superiori   uorsu   quaesitio 

nem  refferri  '9   enim  poterat  si   iustitia 

dei  reddens  singulis  pro   merito  tam  ^° 

magna  est  cur  contra  ^i    meritum   tii  aduersa 

perpeteris  **.   profundum  ^5  ergo  iudiciorum 

dei  se  ignorare  profitetur,.  homines 

usque  domine.,  ignorarem  ^4   Hcet  qua  libra  *s 

iudicii.    homanorum  actuum  concer 

tationes  ^^   et  inmeritas  erumnas  ^7 

dispensas  ^^  licet  *9  tamen  haec  te  facere  prouiden 

ter.,   cuius  erga  statum  rerum  3°  consulentia  si 

ab  hominibus  usque  in  pecudes   porre 

gitur32..  sicut  multiplicasti  misericordiam  tuam  deus..   non  est  ergo?' 

uerisi 
mile   ut  tu    homines  neglegas   qui  muti's 
animalibus   consules34..    filii   hautem    hominum. 


Gloses  irlandaises  du  manuscrit  de  Milan.  69 

Fol.  55  ^. 

1.  uel  quibus 

2.  air  ni  roadbartaigestar 

3.  .i.  saul 

4.  .i.  rosiacht  corrici  nem  atrocaire 

5.  rodumaigestar  A.  orudelc  son  7   roaitrùmaigestar 

6.  À.  dauid 

7.  .i.  malis 

8.  .i.  robôi  duchénsi  dd.    onarogaid  do   dia  digail  forsaul  innan  olc 

dorigeni  side  fris  acht  rogâid  ho  dia  oidnderoimed  di  lamaib  sauil. 

9.  uel  fuit 

10,  .i.  trocaire  dilgutha  dosom  fessin 
I i.  dauid 

12.  .i.  achomeîa   7   asoertha   di  lamaib   saulis 

1 3.  inforcometar   on 

14.  .i.  elimenta.. 

15.  uel  usque  ad 

16.  .i.  cotarodelc  7  roscosmailigestar  fris  na  duli  huaisli. 

17.  .i.  am  duberad  necfi   hi   ceisî  do  dd.   huare  is  moir    sleb  firinne 

dde  cid  arafodmaisiu  dd.  di  an  du  imnedaib  7  friîhoircnib 
fodaimi  air  it  firianu  icaid  som  di  anisin  anasmbeir  iudicia 
domini.  abisus  multa  .1.  ataat  mesai  due  nephchomîetarrachti 
am  abis  7  am  fudumain.  is  ed  insin  fodera  inn  erigim  cid 
arafodaim  inî  ais  firian  inna  fochaidi  7  cid  arambiat  in  pecthaig 
isnaib  soinmechaib 
i8.  tar  aesi 

19.  /.   is  medontestimin  inso 

20.  der 

21.  .i.  huare  nadnairillisiu   buith  hi    cotarsnaib  7  fochaidib 

22.  fodaimisiu 

23.  /.   is  iartestimin   inso 

24.  adit  licet  tamen 

25.  cio   thomus 

26.  uel  coartationes  .i.    inna  timmaircnea  .i.  inna  cathigthiu    .i.   inna 

immargala 

27.  .i.  huare  is  forais  firian  dobertar 

28.  adae 

2C).  is    adilmainsiu    .i.    adde    .i.    ata  dliged   remdeicsen    ar   andenisiu 
anuilese  fris  na  doini  cenidfetarsa  andliged  nisin 

30.  innan  dule 

31.  .i.    is  du  remdeicsiu  su  adde 

32.  roichthir 

33.  .i.  ni  fil  chosmailius  fir  do  neuch  asber  nadmbed  dliged  remdeicsen 

dde  du  doinib  sech  remideci  dia  dunaib  anmandib  amlabrib. 

34.  .i.  remideci 


70  Gloses  irlandaises  du  manuscrit  de  Milan. 

Fol.  J4^.  Psalm.  LV. 

uerba   mea   exacerbantur  ' . .   exacrabilia  »   fa 

ciebant  creminando  3  insidiosos  malos   ani 

mos  speculari   solitos   uerba  simplicia 

ut  in  execrationem  4  uertirent..   et  abhomi 

nabiles  s    facerent  sermones  innoceuos  ^ 

per  quae  haec  hodia  eorum   iurgiaque  inter 

hostes    augerent   et  inpugnationes  ac 

cenderent..  Aduersum  mé   omnia    consilia 

eorum   in   malum..  hostium  in  nés  7  ani 

mum  8  aspernabant  9..   Inhabitabunt  ut 

abscondant..   congregabuntur  oculte.. 

Et   uestigia  mea  custodiebant..    exspec 

tantes  animam  meam..  pro   eo    ut   di 

ceret  in   fraudes  mihi  quasi  ad  hoc  '°   conuenir 

ent.    occultissimas  instruebant  ".   ac 

tiones  speculando  meas..    sperantes  '^  que  '? 

ipsum   animae    meae  '4  exitium  possint 

uidere..   Ipsi  'S  cal[ca]neum   obseruabunt  sicut  exspec 

tauit  anima   mea..   Pro   nihilo  saluos..   id    est  non  saluabis.. 

Deus  uitam  meam  usque   tibi..  omne  sec 

retum   curarum  '^  mearum  tamquam 

potenti  auxiliatori  '7   commisi  '8,,    Po 

suisti  lacrimas   meas  usque  et  in  pro 

m[is]sione  tua.,   distinasli  '9   mé  lacrimis  ^o 

et  calamitatibus..    de   absalon..   Conuertan 

tur  inimici   mei  retrorsum..   quum 

igitur  uitam  3'    meam  tota  **  tibi  ^3   corn 

misi  deuotione   et  aduersa  nostra 

24  secundum  tuam   proniisionem   constant 

inpleta  iustum  est  iam   ut  et  inimici  nostri  sub 

eant  'S   ultionem  ^6  uel  sic  ^7    poterit  habere 

ad  superiora  ^^   contextum  tune   uidilicet  dis 

pertientur  *9  inimici   mei  retrorsum 

cum   ego   me   tibi  tota   mente  commis 

sero   et  ea  quae  praedixisti  circa   nés  futura 


Closes  irlandaises  du  manuscrit  de  Milan.  71 

Fol.  74C. 

1.  .i.  duacradat. 

2.  A.  adéitchidi   .i.  mea  uerba 

3.  .i.  lasse  nollochtaigtis   .i.    nolochtaigîis    7    nupectaigtis    7    aslenîis 

amenma  *  fadesin   tri  aitched    7    ingabail    innambriatliar    fidiut 
nurad   inse 

4.  in  adeiiched 

5.  adltchidi 

6.  nepherchoitecha 

7.  uel  [animjos 

8.  uel   aspirabant 

9.  duacratis 

10.  .i.  dungnim   inmraith 

11.  uel    instituebant 

12.  trachtad  lesom  anisiu  forsa  exspectantes  fil  riam 
1 }.  .i.  co 

14.  .i.  aptu  dûanim 

15.  ni  trachta  som  tra  forsanisiu 

16.  di  cech  fochaid 

17.  .i.  do 

18.  .i.  conrairleicius 

19.  .i.    deus 

20.  sechis  conûlctha   iarum 

21.  .i.  hi  foirbdetaid   7    noibi 
11.  adde 

23.  .i.  0/  dd. 

24.  .i.  /îuare    rocomallada    inna    imneda    7    fonairmed    cenn   forsnaib 

cotarsnaib   durairngirtsiu    is   firirien  **  fra   fuanindassin   tabart 
diglae  foraib  sô 
2$  .i.  in 

26.  a  deo 

27.  .i.  is  frisedlutair  7    /s5i    ciall  fil  and 

28.  .i.  in   ira   populus  ***  confringis 

29.  uel  patientur 


*  leg.  amenmana 
**  leg  f'irien 
'"  leg.  populos  confringes 


72  Gloses  irlandaises  du  manuscrit  de  Milan. 

Fol.  74  '^.  Psalm.  LV-LVI. 

finem   iam  suae  aduersitatis  acci 

perint..    In    quacumque   die   té   in 

uocauero..  ut  diceret  '    cognosca 

nt  rébus  ^   quoniam   tû  sis  5  meus  protec 

tor  potiarque    eo  adiutorio   quod 

sedulus   peccator  4  exambio  s..    Ecce 

agnoui  quoniam  deus   meus    usque  sermonem.. 

ipse  mihi   inquit   mirabiles   ostend 

it  sermones  cum  "^  petitionibus  7   me 

is  largilur  ^  effectum  9    laudumque 

suarum  praebebit  uberem   materiam..  In 

domino    sperabo.   Non   timebo   usque  home. 

qui  utique  sit  mortalis  fragilis 

que  mecum  'o   condicionis.,    in   me  sunt  deus 

uota   tua  usque   tibi..   non  abieci  "    eorum 

me[m]oriam  quae  promisi  neque  succiden 

te   securitate  '*  studium  tibi   de 

catae  '5    deuotionis    omisi    ut  scilicet  li 

bertatis   debitae  '4  te  gratulationis  '5 

conlaudem.,    quoniam    eripuisti  animam 

meam   a    morte.,    hoc  est  "^  quod   supra  dix 

erat..   In  mé  sunt  uota  tua  usque  tibi.. 

interiectis  '7  cœteris  quae  spectabant  '^ 

ad  bénéficia  praestita  ista  sunt  inquit  '9 

uota^o   complacere   deo.    sine   dubuio  * 

2'   probatae  ^z    uitae  bene  etiam  conuersa 

tionem  *'    et  emendationera  uitae  etiam 

uotum  uocauit  ^4  quasi  qui  ^s  sciret  se  pro 

pter  peccata  hostibus   traditum   et 

in   nulla  ré  magis   quam   correptionis 

promisione  indignationem  dei  pos 

se  ^^   molliri  ^7..    Pedes  meos  a  lapsu    us 

que  uiuentium..   ut  diceret  quandiu 

in   hac  uita  sim  semper   gratus   et 

emendatus  existam.    c^  inscriptio 

28  In  fmem   ne  disperdas   dauid  *9   tituli 


leg.  dubio. 


Gloses  irlandaises  du  manuscrit  de  Milan.  7J 

Fol.  74  'i. 

1.  .i.    homines 

2.  A.  operibus 

3.  deus 

4.  uel   precator    .i.   gessid 
$.  .i.   cupio 

6.  lam 

7.  .i.  afh  duntluchur  biid  sàlaid 

8.  .i.  deus 

9.  .i.  operis   boni 

10.  .i.  inunn  folud  techtmae  ni  daine  dï  infoluidsin  adnagursa  acht  is 

dia   ol  dd. 

11.  .i.  ar  rocomallus  duîhnae  *   cid  isna  foch- 

12.  .i.  post  persequtionem 

13.  cossecarthae 

14.  uel  [debijta 

15.  uel   [gratulation]es   uel  [gratulatiojne 

16.  .i.  iscd  inso   .i.  is   inunn   à  quoniam  eripuisti  ri.   asbersô  7  ani 

rcmiérhart  .i.  in  me  sunt  uota  ri.  .i.  is  inunn  inné  fil  indib 
diblinaib  .i.  is  follus  rundgabsat  îerchoiltisiu  indiumsa.  is  indi 
arndamroichlisse  hua   bas 

17.  .i.  alaili  degnimai 

18.  uel  [spec]tant 

19.  dauid 

20.  ;/  he  ind  aerchoilti  asbersom  îolîanugud  dô  7   buith  imbethid  noib 

foirbîhiu 

21.  uel  prauitate    uiuendi   uel   pro   breuitate  uel  inprobitate 

22.  .i.   sanctae  uitae 

23.  perfectam 

24.  dauid 

25.  intisin 

26.  dauid 

27.  nommoithiged 

28.  .i.  ni  bcrae  siu  hua  dd.  in  salmso  air  is  du  dd.  immeairic  insalmso 

is  cd'  tadbat  7  foilsigedar  intitul  mad  la  cirine  im.  issi  ciall 
dumber  side  assindisiu  .i.  ni  malartae  siu.  hua  inscribiunt 
îtituil  À.  ol  inspiurt  noib  irigium  infatho  fri  pont  p hélait,  ni 
derlegaesiu  intitul  roscribais  huas  in  chroich  du  dilsigud  cesta 
crist  .i.  hic  est  réx  iudeorum  .i.  dî  ni  derlegusiu  anitn  **  dd. 
as  intitul  sechis  ni  derlegae  anm  cr..  ut  praediximus  air  nanni 
immairc  du   dd.    immeairc  du  crist 

29.  titulus  i.  e.  psalmus 

30.  dati[uus] 

*  leg.  duthimnae. 
"  leg.  ainm. 


74  Gloses  irlandaises  du  manuscrit  de  Milan. 


TRADUCTION    ET   NOTES. 

Fol.  5  5"^. 
I.  (Est  haec  historia  quae   memoratur  ibi,   ex  eo  quod  ivit  Davides 
in  exilium  ante  Saulem;  ivit  iste  postea  ad  ejus  habitationem 

cum  exercitu  et  constitutum  fuit  castrum  ab  eo  adversum 

Ivit  Davides  postea  nocte,  fuit  ad  eos  in  eorum  Castro  et  ivit 
ad  locum  in  quo  erat  rex  separatim  et  amovit  scyphum  régis 
et  amovit  hastam;  et  fixit  eam  apud  alteram  genam  Saulis 
in  terra  et  ivit  postea  Davides  in  verticem  qui  erat  proximus 
exercitui  et  clamavit  eis  inde  :  non  bene  custodiverunt  nos- 
trum  regem;  videte  ejus  scyphum  et  ejus  arma;  quid  ea  sunt? 
In  tempore  igitur  gratiae  hujus  qua  tradidit  deus  Saulem  in 
ejus  manus  cecinit  ipse  psalmum  hune).  —  diluid  (littér. 
ex  quo  ivit).  —  luid-e,  prétérit  avec  le  pronom  suffixe,  —  dia 
thosansom  (ad  ejus  mansionem)  ;  îosan  =  do-fosan  ;  cf.  araossa 
(=  ar-a-fossa,  gl.  quae  manet)  Ml.  1 34'^  —  dunad  (castrum, 
locum  munitum)  Gr.  C  *,  24,  —  fris  a  ri  noillus  doit  répondre 
au  passage  de  la  Bible  «  et  castrametatus  est  Saul  in  Gabaa 
Hachila ,  quae  erat  ex  adverso  solitudinis  in  via  «  Reg.  I, 
XXVI,  3.  Mais  je  ne  sais  expliquer  ces  mots.  —  aidclii  (nocte) 
Gr.  C2.  253.  —  conoscaig  (amovit)  Gr.  C,  843;  cf.  connoscaigfesiu 
(gl.  ammoueris)  Ml.  61'';  lase  conroscaig  (gl.  submouendo) 
4^^.  —  in  gae  (hastam)  Gr.  G*.  52,  —  saidsi,  prétérit  avec 
le  pronom  suffixe.  Gr.  C».  463.  —  Uaklécainn  (apud  alteram 
genam)  cf.  lecco,  leconn  (gêna)  Corm.  Gl.  —  conroitatar 
(custodiverunt)  3''  pers.  plur.  du  prétérit  en  t.  cf.  connôi, 
cotaôei  (qui  servat,  qui  servat  illud)  Wb.  2Ç)d,  Gr.  C  *.  431. 
—  déccud  (videte),  2e  pers.  pi.  impératif  de  déccu  (video, 
specto)  Gr.  C^.  429.  —  cia  indas  (quid?  littér.  quis  status?) 
Gr.  C*.  }$7.  —  rondgabsat,  3e  pers.  pi.  prétérit  en  s  de 
gaibim  employé  comme  verbe  substantif,  avec  le  pronom  infixe. 
Gr.  C.  895.  —  inîindnacuhin  (gratiae  hujus),  forme  de  génitif, 
comme  plus  haut  saul  (Saulis),  remarquable  par  l'absence  de 
la  voyelle  de  la  terminaison. 
2.  ind  eridech  (scyphus),  thème  fém.  en  a;  accus,  sing.  eredig;  ace. 
pi.  inna  eirithcba  (gl.  pocula)  Ml.  loi''.  —  as  in  magin  imbatar 
(e  loco  in  quo  erant). 


Gloses  irlandaises  du  manuscrit  de  Milan.  75 

5 .  is  argnim  an  dixit  asrubart  inti  dd.  (est  pro  opère  -ce  «  dixit  »  quod 

protulit  Davides).  —  sech  is  darigni  int  anfirian  (id  est  quod 
fecit  injustus)  —  sech  is,  formule  très  fréquente  signifiant  «  id 
est,  nempe,  scilicet  ».  —  anfirian,  leg.  anfirian,  de  firian 
(justus)   avec  la   particule  négative.  Gr.  C.    998. 

6.  sechis  darigni  son  huagnim   (id  est  fecit  hoc  opère).  —  darigni  = 

do-an-ri-gni,  de  dogniu  (facio),  rac.  gen.  Gr.  C^.  428. 

7.  taraesi  (pro),  prép.  nominale.  Gr.  C,  6i6. 

8.  forsani  as  dilinquat  trachtaid  anisiu  (super  id  quod  est  «  delinquat  » 

tractât  hoc). 

9.  connach  fessed  dia  (ne  sciât  deus).  — fessed,  3^  pers.  sing.  conj. 

secondaire  en  s,  de  la  rac.  fid,  orig.  vid. 

10.  fo  diltud  inso  (in  negatione  hac),  —  diltud,  diltud  (negatio),  thème 

masc.  en  u.  Gr.  C.  768,  982;  Gl.  Taur.  IV.  I.  6. 

1 1.  inni  nadhdignigcdar  (an  id  non  est!'),  leg.  nadndixn  — ,  cf.  inf.  gl. 

13;  cia  hé  nundixnaigthersiu  (gl.  qui  sis)  Ml.  75^^;  cale  ndixnige- 
dar  (gl,  quae  est)  So'^. 
ij.  inchuarsachthid  etc.  (increpatorie;  i.  e.  vel  increpatio  est  in  eo 
quod  est  «  non  »  ;  i.  e.  «  non  est  «  ;  i.  e.  an  non  est  id  ?  i.  e. 
non  est,  non  est  timor  dei  in  illo,  est  significatio  et  est  igitur 
etiam  negatio  ibi).  —  Cf.  oca'irsagad  (gl.  corripientem)  Wb.  30^, 
Gr.  C.  1056.  —  nate  (non  est),  particule  négative  en  réponse. 
Gr.  C.  710.  —  issuaichnid,  cf.  Gr.  C.  looi. 

14.  nachidfrithgaib  (eum  non  frenat),  3^  pers.  sing.  prés.  act.  de  gabim, 

gabaini  (capio,  teneo,  th.  en  a)  avec  le  préf.  frith,  précédé  de  la 
particule  négative  et  du  pronom  infixe.  Cf.  Tr.  nephfrithgabthe 
(gl.  effrenata)  IV.  I.  27. 

15.  cid  (quamvis,  etsi,  etiam,  quamvis  sit)  Gr.  C.  672. 

16.  nachtochrechad  (nulla  molestia).  cf.  ônteclnechad  (gl.  molimine)  Ml. 

ic)^;  duchrecliat  (g\.  moliuntur)  :^o^;  an  durochrechsat  (gl.  men- 
titi  falsa)  47^.  —  ni  confel  ni  dugditha  adi  (nihil  est  quod  eum 
fallat;  littér.  non  est  res  quae  eum  fallat).  —  ni  (res,  aliquid) 
Gr.  C2.  364.  Exemple  curieux  de  cette  forme  au  dat.  sing.:  cia  er 
niu  (gl.  quam  ob  rem)  Ml.  47*^.  —  dugâitlia,  cf.  dogaitha  ^gl.  quae 
frustretur)  Ml.  31^;  it  hesi  dugaithatar  (gl.  qui  circumueniuntur) 
31^;  dugaiîhfiter  (gl.  fallentur),  dungaithar  (g\.  frustrentur)  54'''. 

17'.  forsani  etc.  (de  eo  quod  est  «  iniquitas  »  tractât  hoc  infra). 

«8.  hed  airdbidi  (gl.  interfic[i]endo).  Participe  de  nécessité;  rac.  be 
avec  les  préf.  air-di- 

19.  noch  is  co  farfia  son  (nempe  est   ut  perficiat  hoc).  Cf.  forfen  (gl. 


yô  Closes  irlandaises  du  manuscrit  de  Milan. 

perficiat)  Ml.  64=  ;  ani  forfenar  (gl.  quod  consummatur)  Tr.  II. 

I-  15- 

21.  ainm  etc.  (nomen  filii  dabat  Saul  Davidi).  —  ainm  (nomen)  est  un 
thème  neut.  en  n,  =  *  anmin,  Gr.  G*.  268,  que  M.  Stokes  rat- 
tache aux  formes  grecques  et  latines  par  la  forme  originaire 
â-gnâmant.  Ir.  Gl.,  p.  115. — asbered,  3*  pers.  sing.  prés, 
séc.  act.  de  biur  (fero),  rac.  ber,  avec  le  préf.  as. 

2j.  denum  ndegnima  (facere  bonum  opus.  Littéralement  :  actionem  boni 
operis).  — denum-n,  substantif  verbal  ou  infinitif  à  l'accus.  — 
Gr,  G.  461.  —  degnima  =  deg-gnima,  génitif  sing,  masc.  du 
composé  dag-gnlm,  deg-gnim  (bonum  opus,  benefactum)  Gr.  G. 
826.  988. 

24.  cid  inîan  etc.  (etiam  quum  erat  in  cubili  suc,  erat  in  meditatione 

iniquitatis  in  qua  erat).  —  nombiîh,  je  pers.  sing.  prés,  second, 
du  verbe  substantif,  avec  le  signe  de  relation  infixe.  —  inn-a- 
ligiu  (in  cubili  suo)  ;  ligiu,  dat.  sing.  de  lige,  thème  en  la,  'pro- 
bablement neutre,  qui  était,  d'après  M.  Stokes,  originairement 
un  thème  en  s  ;  Ir.  Gl.  p,  98.  —  imradud,  dat,  sing,  de  imrddud 
(cogitatio,  meditatio).  Gf.  imradim  (gl.  tracto,  i.  e.  cogito) 
Gr.  C.  996  ;  arh  immeradad  (gl.  quasi  deliberans)  Ml.  68^;  niradi 
ni  trithalmaddii  aih  dundchuirethar  inna  bculu  acht  asrochoili  7 
imradi  odib  sainemail  nanni  labrathar  (gl.  qui  loquitur  veritatem 
in  corde  suo  :  a  quo  abest  studium  fallendi  non  prout  fors  tulerit 
sed  ex  decreto  mentis  atque  propossito.  i.  e.  non  cogitât  quid 
repentine  prout  adsciscit  in  labia  sua^  sed  decernit  et  meditatur 
ut  sit  praeclarum  omne  quod  loquitur)  j  5  '^,  —  chloine  (iniqui- 
tatis), gén.  sing.  de  clôine,  thème  fera,  en  ia. 

25.  intormacliîid  etc.  (augenter  ;  i.  e.  auget  quodque  peccatum  super 

alterum  ei  etiam  quum  dicit  iniquitatem).  —  do-for-maig,  rac. 
mag,  avec  les  préf.  do-for-',  Gr.  G.  855.  Ir.  Gl.  p.  93. 

26.  diaforbu  ingnim  (ad  ejus  perfectionem,  complementum  in  opère). 

—  jorbu,  dat.  sing.  de  jorbe  (perfectio  executio),  Gr.  C,  1$, 
1068.  Ir.  Gl.  p.  156. 

27.  in  chomimmaircid  (consequenter).  Adverbe  en  forme  de  datif;  rac, 

arc  (stringere,  congregare,  cf  lat.  arc-to,  co-erc-eo)  avec  les 
préf.  com-imm- 

FOL.  55  ^. 

2.  air  ni  roadbartaigestar  (gl.  quia  non  fuerat  adversatus),  —  road- 
bartaigesîar,    3«  pers.  sing.  prêt,  en  s  déponent  ;  rac.  bart  = 


Gloses  irlandaises  du  manuscrit  de  Milan.  77 

*  vert  ;  cf.  ni  adbartaigedar  acht  cotautaing  7  arasmuinethar  feid 
(gl.  non  paupertatem  eorum  auersatur.  i.  e.  non  adversatur, 
immo  eam  protegit  et  eam  honorât)  Ml.  36^. 

rosiachî  etc.  (ascendit  usque  ad  cœlum  misericordia  ejus).  — 
rosiacht,  3e  pers.  sing.  prêt,  en  t.  Gr.  C^.  455.  —  trocaire 
(misericordia).  Cf.  îrèg,  truag  (miser)  Gr.  G».  23.  62.  Gr.  C. 
929.  On  trouve  des  traces  de  la  racine  de  ces  mots  dans  les 
dialectes  celto-italiques  :  Piém.  Can.  droga  (mendicité),  drogds 
(mendiant). 

(exaggeravit;  i.  e.  comparavit  hocet  aequiparavit).  —  rodumaigestar, 
cf.  rodiimagesîar  (gl.  exaggerauit).  Ml.  83'^  ;  3'-'  pers.  sing.  prêt, 
en  s  déponent.  —  coriidelc,  cf.  Gr.  G*.  61.  —  roaiîrummaigesîar 
(sequiparavit,  exaequavit),  3^  pers.  sing.  prêt,  en  5  déponent, 
dénominatif  de  tromm  (ponderosus,  onerosus).  Gr.  C.  585,  prêf. 
aitli ;  cf.  cutrummus  (similitude),  ciiirununi  (similes)  Gr.  C.  751, 
843  ;  co  chutrummaigidir  (gl.  ut.,  exaequet)  Ml.  25"^;  ni  chutram- 
maichtfiersa  (gl.  nullius  pretii  dignus  ap[p]endor)  44^. 

(fuit  propter  moderationem  Davidis  quod  non  petivit  a  Deo  ultio- 
nem  super  Saulem  malorum  quae  iste  fecit  ei;,  sed  petivit  a  Deo 
ut  ipsum  eriperet  de  manibus  Saulis,.  —  diichénsi  (propter 
moderationem),  dat.  sing.  de  cénse  (mansuetudo,  modestia, 
quies),  thème  fém.  en  ia.  Gr.  C  2.  42,  247.  Cf.  ar  incensai  (gl. 
propter  modestiam)  Ml.  31^.  —  conarogaid  (quod  non  petivit), 
rogaid,  3"  pers.  sing.  prêt,  redoublé  àe  guidim,  -giiidiu  (precor, 
oro)  Gr.  C^.  429.  449.  —  digail  (vindictam),  nom.  sing.  digal, 
gén.  digle.  Gr.  C  ^.  243  ;  cf.  tabair  digail  (gl.  ultor  adsiste.  i.  e. 
da  ultionem)  Ml.  27^.  —  innan  olc  (malorum),  gên.  pi.  de  olc 
(malus,  malum),  adj.  et  subst.  Gr.  C.  252,  457,  354,  676. 
Ir.  Gl.  p.  86.  La  racine  de  ce  mot  se  trouve  également  dans  les 
mots  latins  «  ulcus,  ulcer,  ulciscor.  «  —  conidnderoimed  (ut  eum 
eriperet),  3^  pers.  sing.  conj.  second,  avec  le  pronom  infixe  du 
verbe  arfoimim  (recipio);  cf.  arajoim  (quod  accipit)  Gr.  C. 
430;  arfemasiu  (gl.  accipito)  Ml.  68  ^. 

(misericordia  remissionis  ei  ipsi).  —  dilgutha,  gên.  sing.  de  dilguîh 
(remissio),  thème  masc.  en  u.  Gr.  C*.  239. 

(ejus  servationis  et  ejus  liberationis  de  manibus  Saulis).  —  cometa, 
gên.  sing.  de  coméiî,  thème  fém.  en  /.  Gr.  C^.  2$o.  —  soertha, 
gén.  sing.  de  sôeratli,  sôirad,  thème  masc.  en  u,  de  sôer,  soir. 
Gr.  C2.  31.  —  lamaib  (manibus),  dat.  pi.  de  lâm,  thème  fém. 
en  a.  Gr.  C'.  241. 


78  Gloses  irlandaises  du  manuscrit  de  Milan. 

13.  inforcomeiarôn.  Cï.  forcomét  (observatio,  conservatio) .  Gr.  C^.  250. 

16.  (eas  comparavit  et  eas  assimilavit  rébus  excelsis).  —  roscosmaili- 
gesîar,  3^  pers.  sing.  prêt,  en  s  déponent,  dénominatif  de  cosmil 
(similis)  Gr.  C.  5 1,  avec  le  pronom  infixe. 

ï-j.  afh  duberad  necli  hi  ceist  do  dd.  (ac  si  diceret  quis  in  quaestione 
Davidi).  duberad,  3=  pers.  sing.  conj.  second,  de  dobiur  (pro- 
fère), th.  en  â,  rac.  ber,  orig.  bhar.  —  huare  is  moir  sleb 
firinne  dâe  (quia  est  magnus  mons  justitiae  deij.  —  moir  (ma- 
gnus),  cf.  màr,  môr,  môor.  Gr.  G*.  16,  17.  —  sleb  (mons),  que 
l'on  écrit  aussi  sliab,  gén.  sleibe,  semble  être  un  thème  neutre 
originairement  terminé  en  s.  Gr.  G  2,  270.  — cid  arafodmaisiu 
(cur  pateris).  ci-d  ar-a,  littéralement,  quid  est  propter  quod.  — 
fodmai,  2^  pers.  sing.  prés.  ind.  de  la  rac.  dam,  th.  en  a,  avec 
le  préf. /o.  Gr.  G*.  430.  —  imnedaib  (tribulationibus),  dat.  pi. 
de  imne'd,  th.  neut.  en  a.  Gr.  G  2.  224.  —  friîiwircnib  (afflictio- 
nibus),  dat.  pi.  de  frithorcon,  gén.  friîiwircne,  th.  fém.  en  a. 
Gr.  G*.  242,  Gr.  G.  846,  1000^,  1006-7.  — ataat,  etc.  (sunt 
judicia  dei  incomprehensibilia  sicut  abyssus  et  profunditas  ;  est 
hoc  quod  efficit  querelam  :  cur  patitur  gens  justa  aerumnas  et 
quare  sunt  peccatores  in  prosperis .?).  —  mesai  (judicia),  nom. 
pi.  de  me^i,  de  la  rac.  niid  ;  ci.  midiur  (puto),  midithir  (dijudi- 
cat),  miasîar,  miasîir  (judicabit).  Gr.  G*.  438-9,  468;  ammiastar 
(gl.  examinans)  Ml.  56=;  coii  lae  messa  (donec  veniat  dies  judi- 
cii)  26a.  —  nephchomtetarrachti  (incomprehensibilia),  partie,  pas. 
de  nécessité,  de  la  rac.  arc,  avec  les  préf.  neph-chom-do-etar  ; 
cf.  doretarracht  (gl.  comprehensum)  Ml.  33'^.  —  fodera  (efficit), 
3*  pers.  sing.  prés,  ind.;  th.  en  â.  Gr.  G  2.  434.  —  soinmechaib 
(prosperis)  Gr.  G.  832  ;  cf.  ar  sôinmiche  (gl.  nostra  prosperitas) 
Ml.  43''  ;  nongaib  format  friu  dia  soinmichi  (gl.  aut  cum  aHorum 
certe  prosperitate  torquemur.  i.  e.  nos  capit  invidia  in  eos  de 
eorum  prosperitate)  43^  ;  inna  sôinmech  (gl.  rerum  ubertate)  45''. 

19.  /.  is  medontestimin  inso  (vel  est  in  medio  textus  hoc). 

20.  der  (tam).  Forme  souvent  employée  dans  le  ms.  de  Milan. 

21.  (quia  non  mereris  esse  in  adversis  et  passionibus).  —  airilli  (mere- 

ris),  2"  pers.  sing.  prés.  ind.  cf.  co  adroilHusa  (gl.  ad  meren- 
dum)  Ml,  75a;  indi  assidroilisset  (gl.  meriti)  61^.  —  buitli,  infi- 
nitif du  verbe  substantif.  —  cotarsnaib,  dat.  pi.  de  cotarsne 
(adversus,  contrarius)  Gr.  G.  740  ;  cf.  Iiuand  enartai  chotarsnai 
(gl.  adversa  ualitudine)  Ml.  43'^. 
23.  /.  iartestimin  inso  (vel  post  textum  hoc). 


Gloses  irlandaises  du  manuscrit  de  Milan.  79 

25.  cio  thomus  (quo  pondère),  ci-o,  pronom  interrogatif  avec  la  prépo- 

sition ô  entre  ce  même  pronom  et  le  substantif.  Cf.  cio  retaib  (gl. 
quibus  rébus)  MI.  35^.  ciho  fothaib  son  (gl.  quibus  facibus)  16''. 

—  tomus  (pondus),  dat.  sing.  th.  masc.  en  u.  Gr.  C^.  258. 

26.  inna  timmaircnea  (coarctationes),  rac.  arc;  cf.  //mm^rte (coartatus)  Gr. 

C^.  68;  duimmaircthese  (gl.  coartabar)  Ml.  73^.  —  inna  cathigthiu 
(concertationes)  ;  cf.  cath  (pugnai  Gr.  C^.  71.  —  inna  immargala 
(jurgia)  ;  cf.  in  immargail  (gl.  in  lite),  in  immar.  (gl.  in  iurgia) 
Ml.  i6b. 

27.  (quia  super  justos  feruntur).  — for  ais  firian,  littér.  super  aetatem 

justam. 

28.  a  dae  (0  deus),  vocatif  sing.  de  dia,  th.  masc.  en  a,  Gr.  C*.  222. 

29.  (est  hoc  quod  est  licitum  tibi,  i.  e.  0  deus;  i.  e.  est  lex  providen- 

tiae  ut  facias  omne  hoc  hominibus  quamvis  nesciamlegem  hancj. 

—  dilmain  (licitus),  Gr.  G.  25,733,739.  —  dliged  (lex,  régula, 
sententia),  th.  neut.  en  a.  Gr.  C^.  222;  cf.  duber  fudl  andliged  sa 
(gl.  iteratur  haec  sententia)  Ml.  77^.  —  remdeicsen  (providen- 
tiae),  gén.  sing.  de  rem-deicsiu,  th.  fém.  en  n.  Gr.  C^.  264.  — 

—  ar  an  (ut,  propter  hoc,  quod,  propter  quod)  Gr.  G.  679.  — 
déni  (facias,  litt.  facis)  2^  pers.  sing.  prés.  ind.  de  denim  (facio). 
Gr.  C2.  435.  —  an  uile  se  (omne  hoc)  Gr.  G».  229.  — 
fris  na  doini  (littér.  adversus  homines).  doini,  ace.  pi.  àe  duine 
(homo),th.  masc.  en  ia.  Gr.  G».  229.  —  cenidfetarsa  (etsi  non 
sdo).fetar  (littér.  scivi,  novi),  T^  pers.  sing.  prêt,  en  t  dépo- 
nent, de  la  rac.  fid  (=  orig.  vid).  Gr.  G*.  488. 

30.  innan  dule  (rerum),  gén.  plur.  de  dûil  (res  creatura),  th.  fém.  en  /. 

Gr.  G2.  249. 

31.  fest  tua  providentia,  0  deus). 

32.  roichthir  (porrigitur),    3^  pers.    sing.   prés.  ind.  pass.   de  roiccu 

fadeo).  Gr.  G».  429;  cf.  roichther  fgl.  exseri)  Ml.  44^. 

33.  ''non  est  verosimile  ut  quis  dicat,  littér.   cuiquam  qui  dicit,  quod 

non  est  lex  providentiae  dei  pro  hominibus,  dum  providet  deus 
mutis  animalibus).  —  remideci,  3^  pers.  sing.  prés.  ind.  de  décca 
(video,  specto^,  th.  en  a,  avec  le  préf.  remi-  (prae,  ante); 
cf.  remdeicsiu  fconsulentia,  providentia),  sup.  gl.  28. 

34.  remideci  (consuWs);  même  verbe  que  celui  de  la  gl.  précédente,  à 

la  2^^  pers.  sing.  prés.  ind. 

Fol.  74C. 
I.   duaccradaî  (exacerbant),    3''   pers.   pi.    prés.  ind.  cf.  infra  gl.  9  : 


8o  Gloses  irlandaises  du  manuscrit  de  Milan. 

duacratis  (gl.  aspernabant,  leg,  asperabant),  doaccradi  (gl.  exas- 
pérât) Ml.  18*^;  doracrdid  (gl.  exacerbauit)  28^. 

2.  adéitchidi   (execrabilia),   partie,   à    l'ace,    plur.;    cf.    inf.    gl.    4: 

in  adeitchcd  (gl.  in  exeerationem);  5  :  aditchidi  (gl.  abhomi- 
nabiles);  Corm.  Gl.  aidetchide,  ad  v.  Groma;  adeitchcthar  (g\. 
detestatur)  Ml.  ^0'^ \  ar  ind  adéitched  (gl.  detestatione)  Ml.  $0^; 
aideitcliide  (gl.  detestanda)  36^. 

3.  (criminando;  i.   e.  qui  criminabant  et  peccabant  et  inquinabant 

suos  ipsorum  animos  per  vituperationem  et  speculationem  ver- 
borum  simplicium  quae  loquitur  ipse).  —  lasse  nollochtaigtis  (litt, 
quum  criminabant),  î""  pers.  pi.  prés,  second,  de  *  lochtaigim 
(O'R.  lochdaigim  «  I  blâme,  reprove  )>),  précédée  de  la  conj.  lasse 
(quum)  Gr.  C.  683;  cf.  loigthiu  (gl.  perpetrato,  operi)  Ml.  48^^. 
—  aslentis  (inquinabant),  même  forme  que  la  précédente,  de 
aslenaimm,  asknnim  (gl.  luo,  gl.  ceno)  Gr.  C^.  434;  cf.  lase 
asrulensat  (gl.  profanando)  Ml.  74a.  —  menma,  leg.  menmana 
(animos),  ace.  pi.  de  menme  (mens,  animus),  th.  en  n.  Gr.  C*. 
264.  — fadcsin,  formule  pronominale.  Gr.  C^.  ^66.  —  innam 
briaîhar  (verborum),  gén.  plur.  de  brlathar  (verbum),  th.  fém. 
en  a,Gr.  C^.  241,  de  la  même  racine  que  le  lat.  verbum, 
le  goth.  vaurd,  le  lit.  warda.  —  diut  (simplicium),  adj.  au  gén. 
pi.,  th.  en  /  d'après  Gr.  C^.  233.  —  nurad  (quae  loquitur), 
3''pers.  sing.  prés.  ind.  de  raidim(l  say),  Stok.  Corm.  Gl.  16,  pré- 
cédée du  signe  de  relation  nu.  cf.  inna  briatbra  radas  (verba  quae 
dicit)  Ml.  42'^;  intan  radas  nech  insci  abelrai  fesin  frinech  nachide- 
targéuin  (gl.  quae,  oratio,  fréquenter  eum  sonauerit  ab  alienae 
ling[u]ae  hominibus  ignoratur.  i.  e.  quum  dicit  quis  orationem 
suae  ipsius  linguae  ad  aliquem  qui  eam  non  intelligit)  42*^. 
6.  nepherchoitecha  (innocuos),  ace.  pi.  de  l'adj.  erchoitech  (noxius) 
th.  en  ^,  précédé  de  la  particule  privative  neph.  cf.  erchoitig  (gl. 
nocentes).  Ml.  68^. 
10.  (ad  opus  meditationis). 

12.  (tractatio  apud  eum  ibi  super  16  «  exspectantes  «  quod  est  antea). 

1 3 .  co  (ut,  quo),  conj .  cf.  Gr,  C.  682 .  1131. 

14.  apîu  dumanim  (exitium  animae  meae).  aptu  (exitium),  nom.  sing. 

d'un  th.  fém.  en  n;  ace.  sing.  apthin  (perniciem)  Gr.  C^.  266.— 
du-m-anim  (animae  meae),  dat.  sing.  de  anim  (anima),  th.  en  n, 
Gr.  C  2.  264,  avec  le  pronom  possessif  infixe. 

1 5.  (non  tractât  ipse  igitur  de  hoc). 

16.  (de  omni  tribulatione) . 


Gloses  irlandaises  du  manuscrit  de  Milan.  81 

17.  do,  préposition  indiquant  le  datif. 

18.  conrairleicius  ■commisij,  1"-'  pers.  sing.  du  prêt,   en  s  de  '  léiccim, 

th.  en  ia,  avec  les  préf.  con-air-.  cf.  conairleicther  gl.  admitti;, 
conrairleic  'gl.  permisit)  Ml.  52^^,  32'';  conairleicter  (gl.  quae 
cum  dimittuntur)  62^  ;  ni  dia  dudgnî  son  acht  is  hé  oairleci  fgl. 
permis[s]ioni  ergo  eius  non  operi  inputat  factum.  i.  e.  non 
deus  id  facit,  sed  ipse  est  qui  permittit)  44  .  La  racine  irlan- 
daise est  identique  aux  racines  sscr.  rié,  lat.  linqu-o. 

20.  sechis   conumlctha   iarum   (id  est   ut  salvatus    essem  postea^.    — 

co-nu-m-ictha,  sing.  du  prés,  second,  conj.  passif,  avec  le  pron. 
de  la  1'-  pers.  sing.  infixe.  cf.  ic,  icc  fsalus),  gall.  iach  (sanus), 
iecliuit  sanitas'y  Gr.  C^  21;  /cca/^  (he  healed)  Fiacc's  Hymn,  34; 
iccfe  l'gl.  salvum  faciesj  Gr.  C^.  459;  /V/amr  (salvabantur;  Ml. 

2 1 .  in  perfectione  et  sanctitate  . 

22.  '0  deus^. 

23.  dixit  DavideSy. 

24.  quia  impletae  sunt  tribulationes  et  supputatus  est  finis  adversita- 

tibus  quas  promisisti  est  justum  igitur  nunc  ferre  vindictam 
super  eos  ipsos).  —  rocomallada  impletae  sunty,  pi.  du  prétérit 
primaire  passif,  de  la  racine  Lin,  avec  le  préf.  corn-  (implere;.  cf. 
rocomalnada  (gl.  inpleta,  omnia)  Ml.  44  '^.  -  fonairmed  (supputa- 
tus, enumeratus  est  ,  sing.  du  prétérit  primaire  passif,  àeairmim, 
airmiu  (enumero^  Gr.  C-.  435,  avec  le  préf. /o  et  le  signe  de 
relation  infixe.  —  cenn  'finis,  prop.  caputy.  —  durairngirî  siu 
quas  promisisti  ,  2^  pers.  sing.  du  prêt,  en  t,  de  la  rac.  gar, 
avec  les  préf.  do-air-con.  Ebel,  Beitr.  III.  280;  Gr.  C^.  455  ; 
Gl.  Taur.  p.  65.  — fu-an-indas-sin  littér.  in  hoc  statu;. 
27.  ^est,  hoc,  cui  connectilur  et  est  hic  sensus  qui  est  ibi.  — 
frisedlatair,  3'-  pers.  sing.  du  prés,  passif,  de  fris-dlùth-,  avec 
le  pron.  infixe.  cf.  dlùthsit  (gl.  infigerunt)  L.  Arm.  Ir.  gl.  166; 
rundlùth  'gl.  quas  densauerat)  Ml.  33%  co  dlulhit  (gl.  ut  stipent) 
69'';  tri  beulu  dlûtai  gl.  fixis  labris  Gr.  C.  1015.  —  ciali  'sensus 
intellectus,,,  thème  fém.  en  a.  Gr.  C  ^.  241. 

Fol.  74d. 

4.  gessid  (precatorj,  subst.  th.  masc.  en  /.  Le  verbe  est  guidim, 
-guidiu  (precor,  oro^.  Gr.  C^.  429.  cf.  Gl.  Taur.  p.  $2.  cf. 
diangessid  si  dia  arii  nundguidemni  (gl.  si  fueritis  consortes  officii. 

6 


82  Gloses  irlandaises  du  manuscrit  de  Milan. 

i.  e,  si  oraveritis  deum  sicut  nos  eum  oramus)  -,  cech  ôin  gessid 
À.  giges  dia  i'gl.  supplicem)  Ml.  $^'',  s"^^- 
6.  lain  (gl.  cum).  Cette  forme,  avec  la  signification  donnée  par  la 
glose,  m'est  obscure.  Au-dessus  de  la  lettre  ;n  il  y  a  un  point 
dans  le  ms.   Si  ce  point  est  ici  le  signe  ordinairement  employé 
pour  signifier  que  la  lettre  au-dessus  de  laquelle  il  est  placé  doit 
être  effacée,  on  devrait  lire  la.  La  préposition  la  signifie  en  effet 
«  cum,  apud  ».  Gr.  C.  602.  Peut-être  faut-il  lire  lase. 
7.  (sicut  peto,   sit  ita).   —  du-n-tluchur,    1'"  pers.  sing.  prés.   ind. 
déponent,  avec   le  signe  de  relation  infixe.    Cf.    todlaigthe  fgl. 
petitum)  Ml.  21^;  duîhluchedar  (g\.  postulare,  i.  e.  postulat)  58''. 
—  biid,  3^^  pers.  sing.  imp.  du  verbe  substantif. 

10.  inunn  folud  ('eadem  conditio).  cf.  isinnunn  fùad  folid  leu  (gl.  figura 

substantiae  eius.  i.  e.  est  eadem  figura  substantiae  apud  eos)  Wb. 
32^;  Gr.  C^.  223-4,  0^  /'^'''^  ^^^  traduit  moins  exactement, 
«  significationis  ».  Cf.  O'R.  Suppl.  folaidh  (conditions;  subs- 
tance;. —  duine  (homo),  th.  masc.  en  ia,  Gr.  C^.  229.  — 
ad-n-agur-sa  (quem  timeo),  i"'  pers.  sing.  ind.  prés,  .déponent, 
avec  le  signe  du  pron.  relatif  infixe.  cf.  niagetar  (gl.  nonuerentur) 
Ml.  7,c)^  \  adagainse  (gl.  uerebar;  65*^;  carcidadaichjer  sa  (gl.  ut  quid 
timebo)  G^^\  nadnagursa  (gl.  quod  neminem  me  timere...  pro- 
feteor),  nadnagatar  (gl.  non  timere;  j^^-;  ni  aichfetar  fgl.  non 
timebunt)  80^.  —  acht  is  dia  ol  dd.  (sed  est  deus,  dicit  Davides). 

1 1 .  (quia  implevi  tua  praecepta  etiam  in  tribulationibus j .  —  rocomallus 

(implevi),  T"  pers.  sing.  du  prêt,  en  i.  cf.  sup.  gl.  74^.  23.  — 
timne,  ace.  pi.,  ou  ace.  sing.  de  timne  (praeceptum),  th.  neut. 
en  ia.  Gr.  C^.  229. 

13.  cossecarthae  (dicatae),  adj.  ou  part.  fém.  enia.  La  forme  superlative 
offre  la  terminaison  en  mem  :  cossacarîhimem  (gl.  sacratissimae, 
apparationis)  Ml.  50*^. 

16.  (hoc  est;  i.  e.  est  idem  tô  «  quoniam  eripuisti,  etc.  »  quod  dicit 
ipse  et  id  quod  antea  dixit  ;  i.  e.  in  me  sunt  vota,  etc.  i.  e.  est 
eadem  significatio  quae  est  in  ambobus  ;  i.  e.  est  manifestum 
quod  sunt  vota  tua  in  me,  propterea  eripuisti  me  a  morte).  — 
inné  (significatio),  th.  fém.  en  ia.  Gr.  C  2.  247.  Gr.  C.  969.  — 
indib  dihlinaib  (in  ambobus,  in  utroque),  formule  pronominale. 
Gr.  C  2.  367.  —  t-erciwilti-siu  (tua  vota),  nom.  pi.  de  erchoiliud 
(decretum,  votum),  th.  masc.  en  u.  Gr.  C*.  238.  —  is  indi 
arndamroichlisse  (propterea  eripuisti  me),  2'"  pers.  sing.  du  prêt. 
en  s,  avec  le  pron.  de  la  i'"  pers.  infixe.  cf.  arcelim  (g\.  aufero 


Gloses  irlandaises  du  manuscrit  de  Milan.  83 

Gr.  G 2.  429.  —  hua  bas  fa  morte),  dat.  sing.  de  bds  (mors), 

th.  neut.  en  a.  Gr.  C^.  222. 
17.   (alla  bona  opéra). 
20.  (sunt  haec  vota  quae  dicit  ipse  :  complacere  deo  et  esse  in  vitâ 

sanctâ  perfectâ  .  —  toltanugud  (complacentia,  complacere,  litt. 

voluntatem  facere),  th.  masc.  en  u.  —  im-bethid  (in  vitâ),  dat. 

sing.  de  bethu  (vita),  th.  masc.  en  u.  Gr.  C^.   255;  =  sscr. 

givitâ,  lat.  vita  pour  "guivita.    —   noib  (sanctâ),  adj.  au  datif 

sing.  th.  masc.   en  a.   — foirbihiu  (perfectâ),  partie,  passif  au 

dat.  sing.  masc. 
25.  intisin  (gl.  qui).  Littér.  iste,  qui. 

27.  nommoiîhiged  {g\.   molh'ri.  Littér.  quod  molliretur)  ;  forme  second. 

passive  d'un  verbe  dénominatif  de  moith  l'mollis)  =  lat.  mîtis. 
Cf.  Corm.  Gl.  Stok.  ad  v.  Maoth. 

28.  ine  auferas  a  Davide  psalmum  hune,  quia  ad  Davidem  directus  est 

hic  psalmus  ;  hoc  est  quod  demonstrat  et  manifestât  titulus  si  sit 
etiam  a  Cyrenaeo.  Est  hic  sensus  quem  praebet  ipse  ex  hoc,  i.  e. 
ne  quid  mutes  ab  inscriptione  tituli,  i.  e.  dicit  spiritus  sanctus 
per  os  prophetae  Pontio  Pilato  ;  ne  deleas  titulum  quem  scrip- 
sisti  super  cruce  ad  certificationem  passionis  Christi,  i.  e.  hic 
est  rex  Judaeorum  ;  i.  e.  ergo  ne  deleas  nomen  Davidis  e  titulo, 
scilicet  ne  deleas  nomen  Christi,  ut  praediximus,  quia  omne  quod 
directum  est  ad  Davidem,  id  directum  est  ad  Christum).  —  ni 
berae  (ne  auferas,  ne  tollas),  ni  inalartae  (ne  mutes),  ni  derlegae 
'ne  deleas);  formes  du  conj.  2«  pers.  sing.  —  tadbat  =  do-aith- 
baî  (demonstrat),  j*"  pers.  sing.  prés.  ind.  act.  Gr.  C.  852.  — 
foilsigedar  (manifestât),  ]"  pers.  sing.  prés.  ind.  déponent,  déno- 
minatif de /o//(«  (apertus,  manifestus).  —  inspiurt  noib  (spiritus 
sanctus).  Dans  in-spiurî,  pour  in  spirut,  il  y  a  rétrocession  de  la 
voyelle  de  dérivation,  provoquée  par  la  pondération  de  l'accent. 
Cf.  .Gl.  Taur.  p.  48.  —tri  giun  (per  os).  Cette  forme  ferait 
supposer  un  thème  en  u.  Cf.  Corm.  Gl.  ad  v.  gin  et  urnaigthe ;  le 
génitif  sing.  se  trouve  dans  le  ms.  de  Ml.  :  î  geno  deeid  (gl.  per 
signitiem  securi  oris  82  c.  —  in  fatho  (prophetae  ,  gén.  sing.  de 
fâith,  th.  masc.  en  /.  Ir.  Gl.  p.  ]6.  Gr.  C^.  233.  Cf.  assain  ind 
flugor  fuandrogab  in  faith  7  ind  rûn  juantaibret  in  suuischelaichthi 

gl.  euangelista  hautem  in  deo  pro  rerum  similitudine  hoc  testi- 
monio  usus  est.  i.  e.  est  diversa  figura  de  qua  cecinit  propheta 
et  mysterium  de  quo  loquuntur  evangelistae)  Ml.  45'.  —  roscribais 

quem  scripsisti  ,  2«--  pers.   sing.  prêt,   en  s.  —  du  dilsigud    ad 


84  Gloses  irlandaises  du  manuscrit  de  Milan. 

certificationem),  dat.  sing.  d'un  thème  masc.  en  u,  dérivé  de 
dilcs  (proprius,  certus).  — cesta  (passionis,,  gén.  sing.  de  cessad, 
th.  n^.asc.  en  u.  Gr.  C*.  239.  Cf.  dintuidecht  dundechuid  crisî hitech 
innasacard  .i.  hitegdais  annae  7  cafae  7  ditecht  do  dochum  po[nt]felait 
iaf  is  in  matain  res  in  chessad  is  dac  rogah  dd.  insalmsa  7  dinchcsad 
roces  iar  sin  Iti  cr.  ut  dicitur  in  tractatu  libri  marci  secundum  hir[o- 
nymum]  ('gl.  infinem  pro  susceptione  matutina)  Ml.  44"^;  as  du  chesad 
ches  christ  rogad  dd.  inso  (gl.  domini  ultima  in  cruce  oratio  docuit 
ad  quem  debeat  hicpsalmus  refferri.i.  e.  propassionequampassus 
est  Christus  oravit  Davides  hoc  ib.  —  immairic  (refertur,  perti- 
net,  directus  est).  Cf.  intan  cita  roichet  insalmsa  is  immaircide  do 
dd.  oc  ergim  re  ahisolon  maddu  stoir  fgl.  qui,  psaimus,  tamen  suis 
temporibus  habuit  figuram  illius  historiae  quae  narrât  dauid 
coniuratione  abisolon  in  erumnas  coactum  in  quibus  possitus 
hoc  Carmen  uice  orationis  cecinit.  i.  e.  cum  primum  decantatus 
est  psaimus  hic  directus  fuit  ad  Davidem  querelantem  ante 
Absalonem  secundum  historiam)  Ml.  44^^ 

C.    NiGRA. 


ETUDE    PHONÉTIQUE 

SUR    LE    DIALECTE    BRETON    DE    VANNES. 


(premier  article.) 

Dans  le  breton  armoricain  on  distingue  quatre  dialectes  :  ceux  de 
Léon,  de  Tréguier,  de  Cornouailles  et  de  Vannes  '.  Le  dialecte  de  Léon 
est  le  mieux  connu,  celui  de  Vannes  le  moins.  Cette  inégalité  n'est  pas 
un  fait  nouveau.  Dès  1744  Larmery  s'en  plaignait  dans  la  préface  de 
son  Dictionnaire  français-breton  ou  français-celtique  du  dialecte  de  Vannes.  Il 
rappelait  qu'en  1732  on  avait  publié  aux  frais  des  états  de  Bretagne  un 
gros  dictionnaire  français-breton  (celui  de  Grégoire  de  Rostrenen),  et  il 
constatait  combien  ce  dictionnaire  était  insuffisant  pour  l'étude  de  l'idiome 
breton  parlé  dans  le  diocèse  de  Vannes.  Le  xix' siècle  n'a  pas  réparé  cette 
injustice  du  xviiie.  Je  ne  veux  pas  dire  que  Le  Gonidec  ait  dans  ses  dic- 
tionnaires négligé  le  breton  de  Vannes  :  mais  sa  grammaire  le  laisse 
à  peu  près  complètement  de  côté;  on  n'y  trouve  aucune  vue  d'ensemble 
sur  ce  dialecte,  si  différent  des  trois  autres  et  qui  constitue  presque  une 
autre  langue  :  comme  cette  grammaire  a  été  la  seule  base  des  travaux 
publiés  depuis  quinze  années  en  Allemagne  ou  dans  les  Iles  Britanniques 
sur  le  breton  armoricain  moderne,  ces  travaux,  qui  ont  créé  la  philologie 
celtique,  gardent  sur  le  dialecte  de  Vannes  un  silence  à  peu  près  absolu. 
Larmery  se  plaignait  du  dictionnaire  de  Grégoire  de  Rostrenen  il  y  a 
cent  vingt-six  ans.  Que  dirait-il  aujourd'hui  s'il  lisait  la  Grammatica  Cel- 
tica  de  Zeuss  ^ 

Il  est  cependant  possible  d'étudier  le  breton  de  Vannes,  sans  aller 
sur  les  lieux  l'apprendre  de  là  bouche  des  paysans.  Dès  1723  avait  paru 
le  Dictionnaire  breton-français  du  diocèse  de  Vannes,  composé  par  feu  Mon- 
sieur de  Châlons,  recteur  de  la  paroisse  de  Sarzeau,  grand  vicaire  de  feu  Mon- 

I .  Sur  les  circonscriptions  géographiques  auxquelles  correspondent  ces  dialectes,  voir 
une  notice  de  M.  Troude  dans  son  excellent  Nouveau  dictionnaire  pratique  français  et 
breton  du  dialecte  de  Léon,  Brest,  1869,  in-S",  p.  XXV. 


86  Étude  phonétique  sur  le  dialecte  breton  de  Vannes, 

seigneur  François  d'Argouges,  évêque  de  Vannes^.  Nous  venons  de  citer  le 
dictionnaire  français-breton  de  Larmery  ^  publié  vingl-et-un  ans  après. 
Une  partie  considérable  des  mots  contenus  dans  ces  vocabulaires  a  été 
insérée  dans  les  Dictionnaires  de  Le  Gonidec,  avec  une  orthographe  nou- 
velle qui  rend  la  prononciation  plus  claire  pour  les  étrangers;  on  retrouve 
la  plupart  de  ces  mots  et  quelques  autres  encore  écrits  suivant  le  même 
système  orthographique  dans  le  Nouveau  dictionnaire  pratique  français  et 
breton  du  colonel  Troude.  Le  libraire  Galles,  de  Vannes,  a  publié  en  1836 
une  Grammaire  française  bretonne  contenant  tout  ce  qui  est  nécessaire  pour 
apprendre  la  langue  bretonne  de  l'idiome  de  Vannes,  par  l'abbé  Guillome'. 
La  même  maison  a  fait  paraître  toute  une  collection  de  livres  de  piété 
écrits  dans  ce  dialecte.  Nous  citerons  aussi  quelques  chansons  dans  le 
Barzaz  Breiz  de  M.  de  La  Villemarqué,  la  traduction  de  Saint  Mathieu  en 
breton  de  Vannes,  Aviel  rêvé  St.  Maheu,  par  ChristoU  Terrien,  publiée  à 
Londres  par  le  prince  Louis-Lucien  Bonaparte  en  18574  et  les  «  Géor- 
giques  bretonnes  »,  ou  Livr  el  labourer,  par  l'abbé  Guillome  s. 

Nous  allons  dans  le  présent  travail  comparer  la  phonétique  du  dia- 
lecte de  Léon  à  celle  du  dialecte  de  Vannes. 

Afin  qu'on  puisse  apprécier  la  valeur  des  formes  du  dialecte  de 
Vannes,  nous  rapprocherons  autant  que  possible  des  formes  actuelles  de 
ce  dialecte  et  de  celui  de  Léon  celles  de  l'ancien  armoricain,  telles  que 
Zeuss  les  a  fait  connaître,  celles  du  moyen  armoricain  telles  qu'on  les 
trouve  dans  l'abrégé  du  Catholicon  de  Jean  Lagadeuc,  publié  par  M.  Le 
Men  en  1867  d'après  l'édition  de  1499,  enfin  celles  des  autres  dialectes 
néo-celtiques. 

Nous  donnons  les  mots  du  dialecte  de  Léon  d'après  le  dictionnaire  de 
M.  Troude.  Pour  ceux  de  Vannes  nous  reproduisons  autant  que  pos- 
sible, outre  l'orthographe  de  M.  Troude,  celle  de  Châlcns  et  celle  de 
Larmery.  Quand  pour  les  mots  des  autres  langues  néo-celtiques  nous  ne 
citons  pas  d'autorité,  nous  avons  pris  les  mots  gallois  dans  les  diction- 
naires de  Spurrel,  les  mots  comiques  dans  celui  de  Robert  Williams, 
les  mots  irlandais  modernes  dans  le  dictionnaire  d'O'Brien,  les  mots 
du  gaélique  d'Ecosse  dans  ceux  de  Macleod  et  Dewar. 


1.  Vannes,  chez  Jacques  de  Heuqueville,  in-12,   176  pages,  dont  les  six  dernières  ne 
sont  pas  numérotées. 

2.  Leide,  par  la  Compagnie,  in-8",  xx  et  466  pages,  dont  les  deux  dernières  ne  sont 
pas  numérotées.  Les  56  dernières  pages  contiennent  un  supplément. 

}.  In-i2,  149  pages. 

4.  In-i6,  127  pages. 

5 .  Livr  et  labourer  groeit  cire  en  catru  Guillom,  persan  Kergrist.  —  {Géorgiques  bretonnes, 
par  M.  Guillome,  recteur  de  Kergrist,)  Vannes,  Lamarzelle,  1849,  in-12,  229  pages. 


Étude  phonétique  sur  le  dialecte  breton  de  Vannes.  87 

Ce  mémoire  sera  divisé  en  deux  parties,  l'une  traitera  des  voyelles, 
l'autre  des  consonnes.  La  première  se  composera  de  deux  sections  con- 
sacrées l'une  aux  voyelles  proprement  dites,  l'autre  aux  diphthongues. 


PREMIÈRE  PARTIE. 

VOYELLES. 

le  Section,  voyelles  proprement  dites. 

On  a  souvent  déjà  disposé  les  voyelles  en  triangle  de  la   manière 
suivante. 


ou  —  u  —  1 

/  et  les  voyelles  qui  s'en  approchent  sont  les  sons  préférés  du  dialecte 
de  Vannes.  Il  change  les  voyelles  du  dialecte  de  Léon,  savoir,  e  et  u  en 
i,  a  en  e,  ou  en  0  et  en  u.  Quand  le  phénomène  contraire  se  produit, 
c'est  ordinairement  parce  que  le  dialecte  de  Vannes  conserve  une 
ancienne  voyelle  que  celui  de  Léon  a  perdue,  ou  c'est  que  la  voyelle 
du  dialecte  de  Vannes  subit  l'influence  d'une  consonne  voisine  qui, 
dans  ce  dialecte,  favorise  à  côté  d'elle  la  production  d'une  voyelle  plus 
pleine  et  plus  sonore  qne  la  voyelle  primitive.  Nous  ne  prétendons  pas 
présenter  cette  théorie  comme  absolue,  mais  on  trouvera  dans  ce 
mémoire  les  faits  sur  .lesquels  elle  s'appuie,  et  nous  ne  chercherons  pas 
à  soustraire  aux  regards  du  lecteur  les  faits  qu'elle  n'explique  pas. 

Nous  suivrons  l'ordre  alphabétique  des  voyelles  du  dialecte  de  Léon. 

§I.A. 

.4  du  dialecte  de  Léon  devient  e  dans  les  mots  suivants  du  dialecte  de 
Vannes  : 

1.  ^a  «  à  ))  —  en  vannetais  de  (Troude;  Larm.  ;  Guillome,  Gramm., 
p.  90)  de  (Le  Gon.).  La  plus  ancienne  forme  connue  de  cette  prépo- 
sition dans  les  langues  celtiques  est  do  (Gr.  C,  p.  597)  (slave  do, 
gothique  du)  qu'on  trouve  en  ancien  irlandais,  en  ancien  gallois  et  en 
ancien  armoricain  {ihid.  p.  627).  L'o  de  cette  préposition  est  devenu 
en  gallois  ancien  /,  en  gallois  moderne  y,  conformément  à  la  règle  qui 


88  Étude  phonétique  sur  le  dialecte  breton  de  Vannes. 

veut  que  Vo  primitif,  quand  il  n'est  pas  conservé,  devienne  en  gallois 
e  ou  y  =  i  {Gr.  C.^,  p.  90-91);  en  gallois  moderne  le  d  initial  ayant 
été  supprimé,  y  seul  est  resté  (^Gr.  C,  p.  628).  En  armoricain,  Vo, 
quand  il  n'est  pas  conservé,  devient  e  ou  eu.  Cette  règle  s'applique 
en  vannetais,  où  l'ancienne  préposition  do  se  prononce  aujourd'hui  de, 
comme  notre  préposition  «  de  ;  »  on  trouve  de  en  comique  comme  en 
vannetais.  Le  léonnais  da  ne  peut  s'expliquer  par  le  primitif  do;  l'expli- 
quer par  la  forme  plus  rare  de  l'ancien  irlandais  du  (Gr.  C,  p.  597)  est 
également  impossible,  car  u  ancien  devient  en  armoricain  moderne  ou, 
e,  i.  Peut-être  provient-il  d'une  source  plus  ancienne.  On  peut  consulter 
à  ce  sujet  un  travail  récent  de  M.  Bréal  dans  la  troisième  livraison  des 
Mémoires  de  la  Société  de  linguistique  de  Paris. 

2.  Tano  «  mince,  «  tanao  dans  Le  Pel.,  tanau  (Lag.)  —  en 
vannetais  teno  (Troude),  tenau  l'Larm.),  tenaû  'Châl.);  en  gallois 
moderne,  teneu.  Le  vannetais  et  le  gallois  semblent  avoir  adopté  la 
voyelle  du  latin  tenuis.  Le  comique  tanow,  l'irlandais  moderne  tanaidhe, 
le  gaélique  tana  ont,  avec  l'armoricain,  gardé  Va  primitif  qui  se  recon- 
naît aussi  dans  le  sanscrit  ï^nu  et  le  grec  -cavu-  (Ebel,  Beitr.,  U,  i6y^ 
Gr.  C.2,  p.  109;  cf.  Curtius,  Gr.  Etym.^,  p.  196). 

3.  Aneval  «  animal  »  (Troude  et  Lag.;.  —  en  vannetais  eneml 
(Troude),  énevale  :'Larm.)  — enéval  ^Châl.),  en  gallois  moderne  anifail, 
du  latin  animal  (Ebel,  Beitr.,  II,  140;. 

4.  Chatal  «  bétail  »  (Troude  et  Lag.)  —  en  vannetais  c/je/a/  '^Troude  , 
chétal  (Larm.),  chétat  (Châl.),  du  vieux  français  «  chatel,  «  aujourd'hui 
«  cheptel,  ))  en  latin  capitale. 

5.  Arar  ou  alar  «  charrue,  «  ararz,  lisez  arazr  'Lag.'j;  —  en  vanne- 
tais arer  (Troude),  araire  (Larm.),  arêre  ou  arraire  (Châl.);  gallois 
moderne,  aradr;  comique,  aradar{Voc.)  ;  latin,  aratrum. 

6.  Ozach  (Troude,  Lepcl.)  «  chef  de  famille,  n  ozecli  (Lag.);  en  vanne- 
tais ocV/êc'/î,  oec^h  (Troude),  ohec'li,  oheh  (Lepel.),  ohéeh  (Châl.). 

7.  Tra-ou,  pluriel  de  tra,  «  chose;  »  —  en  vannetais  tre-eu  (Troude), 
treu  (Larm.,  Châl.). 

8.  Darvoedenn,  «  dartre;  »  —  en  vannetais  derouidenn  (Troude), 
deerouideen  (Larm.),  derhouiden'c  (Châl.,. 

9.  Starda,  <(  serrer;  »  —  en  vannetais  sterdein  (Troude  ,  stecrdein 
(Larm.). 

10.  Gant,  «  avec  »  (la  même  orthographe  dans  Lag.);  —  en  vanne- 
tais ^f/  (Troude),  guet  (Guillome),  guett  (Larm.),  guet  (Châl.);  en  vieux 
gallois  cant  [Gr.  €.,  p.  648),  en  gallois  moderne  can  etgan,  en  comique 
gan  et  gans,  du  gaulois  com. 


Ëtude  phonétique  sur  le  dialecte  breton  de  Vannes.  89 

11.  Koumanand,  «  ferme,  »  coumannat  Lag.);  —  en  vannetais  kou- 
menand  (Troude). 

12.  Skiant,  «  esprit,  »  squient  (Lag.;;  — en  vannetais  skient  (Troude), 
squient  (Châl.  ,  squiènntt  'Larm.);  en  latin  scientia. 

1 3.  Balan,  «  genêt;  »  balaznen  'Lag.  ;  —  en  vannetais  bclan  (Troude), 
belann  (Larm.);  gallois  moderne  banadl,  comique  banathel  {Voc.)  ', 
gaélique  bealaidh. —  Diez,  IVœrterbuch^,  t.  II,  p.  208,  en  tire  le  français 
<(  balai.  »  M.  Littré  a  accepté  cette  étymologie;  elle  n'est  pas  sans 
difficulté  cependant,  comme  l'a  fait  observer  M.  Whitley  Stokes,  Beitr., 

V,  445-446. 

14.  Manac'li,  «  moine,  »  manach  (Lag.);  —  en  vannetais  menac'h 
(Troude),  menah  Larm.);  en  gallois  moderne  mynach,  du  latin  monachus 
(Ebel,  Beitr.,  t.  II,  p.  148). 

1 5.  Teral,  «  obscur;  »  —  en  vannetais  tiouel  (Troude),  tihouêle  (Larm.  , 
tiouele  Châl.^  ;  en  vieil  irlandais  teniel  «  obscurité  »  {Goid.,  p.  35  ;  Gl. 
Taur.,  p.  46);  en  gallois  moderne  tywyll;  cf.  n°  84. 

\ 6.  Ma  ou  va,  pronom  possessif  de  la  première  personne;  —  en 
vannetais  me  fGuillome,  Gramm.,  p.  54),  ancien  irlandais  mu,  ma  {Gr. 
C. -,  p.  336),  moyen  gallois  my,  moyen  armoricain  ma  [Gr.  C.^, 
p.  383),  comparez  le  sanscrit  marna,  génitif  singulier  du  pronom  de  la 
première  personne. 

17.  Ann,  ar,  «  le,  •»  article;  —  en  vannetais  enn,  er.  Le  thème 
paraît  avoir  été  en  vieil  irlandais 5;>2^  Gl.  Taur.,  p.  45  ;  Gr.  C.  ^,  p.  209^  ; 
la  plus  ancienne  forme  galloise  est  />=/«  [Gr.  C.^,  p.  217;.  On  trouve 
en  comique  an  ou  en,  en  moyen  armoricain  an  (jbid.,  p.  218-219)2. 

18.  Galloud,  «  puissance,  »  galloet,  «  pouvoir,  »  infinitif  (Lag.),  — 
en  vannetais  gellout  Troude),  guelleît  Larm.);  en  gallois  moderne 
galluedd,  comique  ga//o5,  lithuanien  galiu   Ebel,  Beitr.,  II,  178). 

19.  Pa  quand  ;  —  en  vannetais  pe  'Troude^,  pé  (Larm.,  Châl.); 
gallois,  comique  et  moyen  armoricain  pan  (Gr.  C,  p.  695-697),  com- 
parez le  latin  quando;  qu  =  p. 

20.  Ann  anaoun  «  les  trépassés  »,  anauon  (Lag.);  —  en  vannetais  enn 

1.  On  dit  aussi  en  Vannetais  banal,  bctial,  bonal,  sans  inétatliése. 

2.  Il  s'est  produit  ici  deux  phénomènes  dont  les  langues  romanes  nous  offrent  des 
exemples.  Le  d  final  de  sind  s'est  assimilé  à  l'n  précédent  {Oitz,  Grammatih'-,  p.  220,  c'est 
ce  que  Zeuss  appelle  infectio  nasalis,  2'  éd.,  p.  147  ;  il  est  resté  sinn  ou  sin.  L'n  final  de 
sin  s'est  changé  en  r  iDiez,  Gramm.,  p.  203  .  Cette  substitution  est  en  armoricain  de 
date  toute  récente.  Quant  à  la  suppression  deVs  initial,  bien  que  rare  en  irlandais,  elle 
n'y  est  pas  inconnue  Gr.  C. -,  p.  5 1  .  Dans  les  diverses  branches  du  breton  \'s  initial  se 
change  souvent  en  h  [Gr.  C.  -,  p.  122},  et  cet  h  se  conserve  ordinairement,  il  y  a  cepen- 
dant des  exemples  de  la  suppression  de  cet  h.  Ainsi  l'irlandais  amal  =  samal  «  instar  » 
a  pour  correspondant  en  armoricain  erel  =  'hevel  =  'sevel,  en  gallois  mal  ■=  'samal, 
en  comique  avel  [Gr.  C,  p,  694-69 j). 


90  Etude  pbonéticjue  sur  le  dialecte  breton  de  Vannes, 

enan  Troude  et  Larm  ).  C'est  un  pluriel  du  mot  qui  veut  dire  âme,  vieil 
irlandais  anani.,  anim,  gaélique  anam,  comique  encf,  gallois  moderne 
enaid  [Ir.  g/.,  p.  64,  no  288;  Goid.,  p.  47;  Ebel,  Beitr.,  II,  i$6). 

Peut-être  ces  faits  peuvent-ils  être  en  partie  expliqués  de  la  manière 
suivante  :  l'a  primitif  a  en  breton  une  tendance  à  fléchir  en  e  iCr.  C.  2, 
p.  84-85).  Une  tendance  inverse  se  produit  quand  /,  e,  0  sont  suivis 
à'n,  d'r,  d'/,  de  c'h  ;  les  mots  sur  lesquels  cette  tendance  a  exercé  son 
action  ne  sont  pas  les  mêmes  dans  le  dialecte  armoricain  de  Vannes  et 
dans  celui  de  Léon.  C'est  l'influence  de  la  nasale,  de  Vr  et  de  1'/  suivant 
qui  sont  cause  que  l'o  s'est  changé  en  a  dans  10  gant  pour  com,  14 
manac'h  pour  monachus  ',  Ve  en  a  dans  12  skiant  t^owv skient àt  scientia^, 
dans  15  îeval  pour  temeh,  Vi  en  a  dans  17  ann,  ar,  pour  sind^.  Les 
mots  correspondants  du  dialecte  de  Vannes  sont  plus  conformes  aux 
lois  générales  de  la  langue  :  0  =--  edans  lo get,  14  menac'h  (cf.  Gr.  C.  ^, 
p.  90-91),  e  est  conservé  dans  12  skient  et  dans  1  j  tiouel  (cf.  Gr.  C.  2, 
p.  87),  /  =  e  dans  17  er,  enn  (cf.  Gr.  C.  ^,  p.  89). 

L'a  primitif  s'est  conservé,  par  l'influence  de  Vn  suivant,  dans  les  mots 
du  dialecte  de  Léon  que  voici  :  3  aneval,  en  Vannes  eneval;  19  pain],  en 
Vannes  pe ;  20  anaoun,  en  Vannes  enan;  —  par  l'influence  de  Vr:  5  arar, 
en  Vannes  arer;  —  par  l'influence  de  1'/  :  1 3  balan,  en  Vannes  helan, 
\S  galloud,  en  Vannes  gellout. 

Mais  aucune  influence  de  consonne  ne  peut  expliquer  pourquoi  le 
premier  a  de  4  chatal  qui  s'est  conservé  en  Léon  est  devenu  c  en  Vannes, 
pourquoi  i  da,  7  traou,  sont  devenus  en  Vannes  de,  treeu. 

L^étude  que  nous  ferons  plus  loin  de  la  diphthongue  oa  nous  four- 
nira d'autres  exemples  de  l'emploi  de  Ve  par  les  Vannetais,  là  où  les 
Léonais  se  servent  de  Va. 

A  du  dialecte  de  Léon  devient  /  en  vannetais  dans  les  deux  mots 
suivants  : 

21.  Gwenanenn  «abeille»  guenanenn  (Lag.i;  —  en  vannetais gn'/n>2e/3/j 
(Troude),  guirinenn  (Larm.),  en  gallois  moderne  gwenynen.  Vi  me 
semble  être  ici  la  lettre  primitive.  Il  s'est  changé  d'abord  en  e,  et  cet  e 
est  resté  dans  le  comique  gucncnen  (^Voc.)  et  dans  le  dialecte  de  quel- 

1.  Comparez  le  français  u  dame  »  de  domina,  «  nennil  »  ('prononcez  nani)  de  non 
illud. 

2.  Comparez  le  français  «  jaloux  »  de  zelosum,  «  féal  »  de  fiddem. 

3.  Comparez  le  français  «  cent  »  (prononcez  çant)  de  ccntum,  «  viande  »  de  vivcnda. 
«  repentance  »  de  pœnitentia,  «  chance  »  de  cadentia,  «  ayant  »  d'habentcm. 

4.  Comparez  le  français  «  en  »  (prononcez  an)  de  in,  «  sans  »  de  sine,  n  langue  »  de 
lingiia,  «  quarante  »  de  quadraginta,  «  dans  »  de  deintus,  «  sangle  »  de  cingulum, 
«  dimanche  »  de  doniinica. 


I 


Étude  phonétique  sur  le  dialecte  breton  de  Vannes.  91 

ques  localités  vannetaises  où  l'on  dit  guinénene,  guerenene  (Châl.). 
22.  ranket  «  falloir,  »  rencout  (Lepel.);  —  —  en  vannetais  rikein 
(Troude),  riquein  Larm.y.  Je  pencherais  à  croire  que  1'/  est  la  lettre 
primitive.  L'a  du  léonnais  dans  ce  mot  comme  dans  le  précédent  serait 
dû  à  l'influence  de  Vn  qui  suit. 

.4  du  dialecte  de  Léon  devient  0  en  vannetais  dans  les  mots  que 
voici  : 

25.  Manac'h  a  moine,  »  manach  Lag.,;  en  vannetais fno/?(^c'/i  (Lepel., 
Le  Gon._,  Troude),  du  latin  monachus.  L'o  est  la  lettre  primitive. 

24.  Amanenn  «  beurre  »  (Troude  et  Lag.);  —  en  vannetais  amonenn 
(Troude;,  amoneen  Larm.  ,  amonen  (Chàl.^;  vieil  irlandais  imh,  vieux 
gallois  emmeni,  moyen  gallois  emenyn,  gallois  moderne  ymenyn,  comique 
amenen  {Gr.  C.  \  p.  82,  m;  Ir.  gi,  p.  96,  n"  784;  Tlir.  Ir.  gi,  p. 
XXX  .  Il  n'y  a  pas  d'obstacle  qui  nous  empêche  d'admettre  que,  comme 
dans  le  mot  précédent,  0  soit  primitif.  Toutefois,  la  preuve  manque. 

25.  Anezhan  «  de  lui  »  «  lui  »  (régime;,  anezaff  en  moyen  armoricain 
iGr.  C.2,  p.  382(1  — en  vannetais  aneZ/ow  «  de  lui  »  (LeGon.,  Troude). 
Ce  mot  se  décompose  ainsi  :  ["an,  préposition  signifiant  «  de  »  {Gr. 
C,  p.  623  ;  2°  eh,  en  léonnais  ez,  identique  au  pronom  infixe  et  suffixe 
irlandais  d,  id  (Gr.  C.  ',  p.  330,  334);  3°  hon  qui  serait  peut-être  le 
même  mot  que  l'irlandais  5om  [Gr.  C.  ^,  p.  326-327,  3  34-^3  5)-  Sur  la 
variante  hou,  anehou  (Guillome,  Gramm.,  p.  33,  Châl.,  cf.  Larm.,  p. 
122)  voir  plus  bas,  n°  97. 

§2.E. 

E  a  été  conservé  en  vannetais  à  Tinfinitif  de  deux  verbes  qui  l'ont 
perdu  dans  le  dialecte  de  Léon. 

26.  Dont  «  venir,  »  autrefois  donet  ''Lag.(  ;  —  en  vannetais  donet 
iToude),  don nétt  {Larm..,  donnét   Châl.  .  Sur  l'étymologie  de  ce  mot 

voir  Goid.,  p.  VII,  70,  et  Whitley  Stokes,  Middle  Breton  irregular  verbs, 

P-  54-5 5- 

27.  Mont  «  aller,  »  autrefois  monet  (Lag.;  ;  —  vannetais  monet 
(Troude^,  monétt  ^Larm.;.  Sur  l'étymologie  de  ce  mot  voir  Whitley 
Stokes,  Middle  Brçton  irregular  Verbs,  p.  41). 

E  du  dialecte  de  Léon  est  devenu  eu  par  l'influence  de  la  consonne 
suivante  dans  un  grand  nombre  de  mots  vannetais  : 

28.  Trenk  «  acide;  »  — en  vannetais  treank  (Troude),  tréang  (Larm.), 
tréantj  'Châl.);  en  comique  trenc. 


92  Etude  phonétique  sur  le  dialecte  breton  de  Vannes. 

29.  Ene  «  âme,  »  eneff  (Lag.);  en  vannetais  inean  (Troude,  Larm., 
Châl,)  ;  vieil  irlandais  anim,  anam,  gaélique  anam,  comique  enef  ^Ir.  gl., 
p.  64,  n°  288;  Goid.,  p,  47).  La  voyelle  primitive  de  la  seconde 
syllabe  est-elle  un  i  comme  dans  le  vieil  irlandais  anim  et  dans  le  latin 
anima?  Est-ce  un  a  comme  dans  le  vieil  irlandais  et  le  gaélique  anam? 
Le  léonnais  enaoui  «  animer  «  pour  anami  (m  =  ou)  nous  ferait  pencher 
pour  la  seconde  hypothèse;  cf.  n"  67. 

30.  Env,  mieux  nenv  «  ciel,  »  eff  pour  neff  (Lag.);  —  en  vannetais 
ean  (Troude),  nean  (Larm.),  can  (Châl.  ;  vieil  irlandais  nem,  comique 
et  gallois  nef.  La  voyelle  primitive  dans  les  langues  celtiques  parait  être 
e  comme  dans  le  grec  véçoç  «  nuage,  »  le  slave  nebo  «  ciel  ;  «  comparez 
le  sanscrit  nabhas  «  nuage,  poussière,  atmosphère.  »  Le  vannetais  n'est 
pas  la  seule  langue  néo-celtique  où  cet  e  soit  devenu  ea  :  on  dit  en 
irlandais  moderne  et  en  gaélique  ncamh  {Gr.  C.  *,  p.  88;  Ebel,  Beitr., 
t.  II,  p.  178;  Ir.  gl.,  p.  98;  Gluck,  K.  N.,  p.  75;  G/.  Taur.,  p.  IX;  Cur- 
tius,  Gr.  Etym.  =>,  p.  265). 

31.  Kre,\krev,  kren  «  fort,  »  creff  (Lag.);  —  en  vannetais  Krcan 
(Troude),  crean  (Larm.,  Châl.),  comique  crif  [Voc),  cref,  crev;  moyen 
gallois  craff  (Gr.  C.  2,  p.  165),  gallois  moderne  cryf. 

32.  Hen  «lui,  »  sujet,  e/(Lag.;  —  en  vannetais  ean  (Troude,  Larm., 
Châl.,  Guillome);  en  ancien  gallois  em,  plus  tard  ej,  en  comique  aussi 
e/(Gr.  C.^p.  371). 

33.  Prenv,  prev  «ver,  »  prcff  (Lag.);  en  vannetais /^rca/îv  (Troude), 
prean  (Larm.,  Châl.),  comique  prif  {Voc),  pref,  vieux  gallois  prem  [Thr. 
Ir.  gl.,  pp.  XVI,  9),  gallois  moderne  pryf,  vieil  irlandais  cruim  (Gr.  C.  -, 
p.  66);  latin  vermis,  grec  'é\\j.\z,  sanscrit  krmis  pour  karmis  (Ebel,  Beitr., 
II,  60;  Curtius,  Gr.  Etym."",  p.  485-486). 

Dans  les  mots  qui  précèdent,  la  diphthongue  ea  du  dialecte  de  Vannes 
doit  son  existence  à  la  nasale  qui  la  suit.  Dans  le  suffixe  eac^h  ou  eah 
suivant  l'orthographe  généralement  usitée  chez  les  Vannetais,  son  intro- 
duction est  provoquée  par  la  gutturale  spirante  c'h  ou  h  qui  s'appuie  sur 
elle.  Le  suffixe  vannetais  eac'h,  eah  est  identique  au  suffixe  léonnais  et 
pour  ed  étudié  par  Zeuss,  Gr.  C.,  p.  802-803  (cf-  7 $2,  753). 

Voici  quelques  exemples  empruntés  à  la  Buhe  er  smt  «  Vie  des 
Saints,  «  publiée  à  Vannes  chez  Galles  en  1839  : 

34.  Silvidigez  «  salut,  »  se  dit  en  vannetais  salvedigneah  (p.  III  . 
55.  Pinvidigez  «  richesse  »  ',  —  en  vaunelais pihuidigueah  (p.  IV;. 

I.  On  remarquera  que  dans  ces  deux  mots  le  suffixe  est  écrit  aez  par  Lagadeuc.  —  Le 
suffixe  -idig-  qui  précède  le  suffixe  ez  est  identique  au  suffixe  latin  -atico-  qui  a  donné  en 
français  «  -âge.  » 


Étude  phonéticjue  sur  le  dialecte  breton  de  Vannes.  9? 

36.  Tiegez  «  ménage;  «  —  en  vannetais  tyegueah  l'p.  IV,. 

37.  Madelez  «  bonté,  »  —  en  vannetais  madeleah   p.  6j. 
j8.  Santelez  «  sainteté  »  —  en  vannetais  santeleah  (p.  8  . 

Dans  la  diphthongue  ea  IV  spécial  au  dialecte  de  Léon  se  trouve  à 
côté  de  Va  que  l'influence  de  la  consonne  suivante  a  introduit  dans  le 
dialecte  de  Vannes.  Dans  les  mots  que  nous  allons  étudier  maintenant, 
on  remarquera  l'absence  complète  de  Vc  léonnais;  il  n'y  a  plus  dans 
ces  mots  de  diphthongue  en  vannetais,  Va  seul  y  existe. 

Ce  sont  d'abord  des  infinitifs  de  verbes  qui,  en  léonnais,  ont  assimilé 
l'a  primitif  de  la  racine  à  Ve  de  la  flexion.  Cette  assimilation  ne  s'est 
pas  produite  en  vannetais. 

39.  Genel  «  enfanter,  »  guenell  Lag.),  participe  ganet;  —  en  vanne- 
tais ga/zem  (Troude  ,  gannein  (Châl.),  gallois  moderne  genM<  naître^,  » 
gan  «  naissance,  »  irlandais  moderne  geinim  «  j'engendre,  »  comique 
geny  «  naître,  n  en  sanscrit  racine  g' an. 

40.  Sevel  «  lever,  »  sevell  (Lag.),  participe  savet;  —  en  vannetais 
saouein  'Troude,  Larm.^,  sauein  fChâl.);  en  gallois  moderne,  verbe  : 
sefyll,  substantif  :  saf;  comique,  verbe  :  sevel  ou  saval. 

41.  Gervel  «  appeler,»  guervell  ;Lag.),  participe  g^/ve/;  —  en  vanne- 
tais gj/ve/w  (Troude),  galhuein  iLarm.;,  galiïein  (Châl.);  comique  gelwel 
à  l'infinitif,  galwy  à  la  seconde  personne  de  l'impératif;  gallois  moderne 
galw.  Va  de  la  racine  a  été  aussi  conservé  dans  le  latin  garrio,  garrulus, 
gallus,  dans  l'anglais  to  call  (W.  Stokes,  Beitr.,  V,  223  ;  Mise,  p.  33, 
Curtius,  Gr.  Etym.^,  p.  162;.  Voir  plus  bas,  n»  8$. 

42.  Lemel  «  ôter,  »  lemmel  (Lepel.  ,  participe  lamet;  —  en  vannetais 
lamein  Troude,  Larm.,  Châl.  .  Ce  mot  dont  l'origine  est  incertaine 
est  peut-être  un  dérivé  de  lam  a  main,  »  en  vieux  gallois  lau  Gr.  G.  -, 
p.  114).  L'm  primitif  serait,  par  exception,  conservé  dans  ce  mot  comme 
dans  quelques  autres  {Gr.  C.^,  p.  1 1 1).  Lam  (c  main  »  s'explique  lui- 
même  par  la  racine  sanscrite  labh  «  prendre  »  dont  le  bh  serait  ici  devenu 
m  comme  dans  nem  «  ciel,  »  cf.  sanscrit  nabhas.  Peut-être  devrait-on 
supposer  pour  lemel  une  racine  renforcée  par  nasalisation  lamb,  cf.  le  grec 
Xa;j.civo).  Leb  se  serait  assimilé  à  l'm  antécédent  Gramm.  celt.  ^,  p.  147), 
qui,  étant  redoublé,  se  serait  conservé  suivant  la  règle  (Gramm.  celt.  2, 
p.  114). 

Dans  tous  ces  verbes,  la  voyelle  primitive  est  celle  du  dialecte  de 
Vannes, 

Dans  d'autres  mots  qui  ont  un  e  dans  le  dialecte  de  Léon,  le  dialecte 
de  Vannes  emploie  Va  à  cause  de  la  la  consonne  qui  suit  :  n,  r,  v. 


94  Étude  phonétique  sur  le  dialecte  breton  de  Vannes. 

43.  Kefnidenn  «  araignée,  »  queffnidenn  (Lag.);  —  en  vannetais  kani- 
vedenn  (Troude),  canivédenn  (Larmj  ;  gallois  moderne  cyffiniden. 

44.  Bemdez  «  chaque  jour,  »  pemdez  'Lag.);  —  en  vannetais  bamde 
(Troude,  Larm.),  de pep  «  chacun  »  {Gr.  C.^,  p.  404-405)  et  de  deiz, 
dez,  dé  <<.  jour;  »  en  moyen  %d\\o\s  peanyd  (Gr.  C,  p.  575}.  —  On 
dit  aussi  bemnos  «  chaque  nuit,  «  en  vannetais  bamnos  (Troude),  bamnoss 
(Larm.),  moyen  gallois  peunoeth. 

45.  Kenderv  «  cousin,  »  quenderv  (Lag.);  —  en  vannetais  kanderv 
(Troude),  candêrhué  (Larm.),  canderhu'é  (Châl.);  gallois  moderne 
cejnder. 

46.  Keniterv  «  cousine,  «  queniterv  (Lag.);  —  en  vannetais  kaniterv 
(Troude),  caniterhue  (Châl.,  Larm.  écrit  quenitêrhué),  gallois  moderne 
cyfnither. 

47.  Kleze  «  épée,»  clezeff(Lag.);  —  en  vannetais  klean  (Troude),  cléan 
(Larm.),   clean  (Châl.),   vieil    irlandais    claideh,  moyen  gallois  cledyf,  [ 
gallois  moderne  cleddyf  et  cledha,  comique  cledhe  et  cledha  ;  latin  gladius. 
M.  Ebel  se  trompe  quand,  Gr.  C.  ^,  p.  38,  il  présente  ce  mot  comme 
un  exemple  du  changement  de  la  moyenne  en  ténue  dans  les  langues 
celtiques.  Ce  sont  les  langues  celtiques  qui  ont  gardé  la  consonne  ini- 
tiale primitive  :  le  latin  a  changé  cette  consonne  en  moyenne  (Corssen,  , 
Kritische  Beitragezurlateinischen  Formenlehre,  p.  97  ;  Curlius,  Gr.  Etym.^,  ' 
p.    142),   De  la  forme  vannetaise  on  pourrait  conclure  que  le  suffixe 
armoricain  au  lieu  d'être  un  b  comme  en  irlandais,  était  un  m  (^Gr.  C.  S 
p.  139,  142,  cf.  116-117;. 

48.  Adre  «  derrière,  »  adren  (Lepel.),  adreff  (La^.)\  —  en  vannetais 
adran  (Troude,  Larm.,  Châl.). 

49.  Tersienn  «  fièvre  n  terzyenn  (Lag.);  —  en  vannelals  terc'hiann 
(Troude),  derhian  (Larm..  Châl.),    darhian,  terhian  (Chai.),   du  latin 
tertiana  (Lepel.,  Whitley  Stokes,  Beitr.,  V,  219).  Ici,  la  voyelle  qui,  • 
dans  le  dialecte  de  Vannes,  précède  Vn,  est  plus  ancienne  que  la  voyelle 
correspondante  du  dialecte  de  Léon.  1 

49.  Largentez  «  largesse,  »  larguentez  (Lag.)  ;  —  en  vannetais  largante  ; 
(Troude),  largante  (Larm.,  Châl.).    Comparez  le  même   suffixe  dans 
paourentez  «  pauvreté;  »  —  en  vannetais  peurante  (Troude),  peuranté 
(Larm.,  Châl.),  voir  sur  ce  suffixe  Gr.  C.,  p.  804. 

50.  Menez  «  montagne  »  (Lag.  donne  la  même  orthographe);  —  en  ' 
\anneta\s  mane  (Troude),  manné  (Larm.,  Châl.);  moyen  gallois  minid, 
gallois  moderne  mynydd,  moyen  comique  menit{yoc.],  gaélique  mo«^i//i,  ^ 
irlandais  moderne  moin,  gén.  monadh;  comparez  le  latin  mon[ti]-s  et  j 
minere  dans  prominere,  eminere,  irnminere  (Gr.  C.^,  p.  218;  Ebel,  Beitr., 


i 


Ëtude  phonétique  sur  le  dialecte  breton  de  Vannes.  95 

II,  158;  Ir.  gi,  p.  60,  n''  257;  Corssen,  Kritische  Nachtr£ge,  p.  79). 

51.  Arne,  aneo,  arnev  «  orage;  »  —  en  vannetais  aman  (Troude), 
harnan  (Larm.,  Châl.);  gallois  moderne  arnwyf  «  vigueur,  esprit,  » 
ernwy  «  vivacité.  « 

$2.  Dienez  «  pauvreté;  »  —  en  vannetais  dianez  (Troude),  dianness 
(Larm.). 

53.  Henvel  «  semblable;  »  —  en  vannetais  hanoual  (Troude),  hanval 
(Larm.),  hanual  (Châl.),  haval  (Larm.,  Châl.);  vieil  irlandais  samal, 
irlandais  moderne  samhail,  gallois  m.oderne  hajal,  comique  haval,  grec 
6lj,aXcç,  lat.  similis.  Ce  mot  se  trouve,  moins  le  suffixe  fmal,  dans  le  sanscrit 
samas  et  avec  un  suffixe  différent  dans  le  gothique  sama,  thème  saman, 
Gl.  Taur.,  p.  67;  Ir.  gi,  p.  83,  n°  609,  p.  108,  n"  904;  Curtius,  Gr. 
Etym.'^,  p.  288-289).  D^"S  ^^  ^^^  '^  vannetais  donne  l'exemple  de 
la  conservation  de  1'^  non-seulement  devant  une  nasale,  mais  aussi 
devant  /. 

54.  Trederenn  «  tiers  ;  »  —  en  vannetais  terderann  (Troude),  derderann 
(Larm.  ,  derderan'e  (Châl.);  moyen  gallois  trederran  (Gr.  C.  ^.  p.  323). 
La  forme  vannetaise  est  la  plus  ancienne,  car  ce  mot  est  un  composé 
déterminatif  dont  le  second  terme  est  le  substantif  armoricain  rann 
«  partie  »  (Lag.j  qui  se  trouve  avec  la  même  orthographe  en  ancien 
irlandais  {Gr.  C.  ^,  p.  40).  On  disait  en  ancien  gallois  rannam  a  je 
partage  »  (Gr.  C.  ^,  p.  81),  en  moyen  gallois  rhan  «  partie  »  (Gr.  C.  ^, 
p.  1 12).  La  forme  comique  de  ce  dernier  mot  est  ran  'd.  Ir.  gl.,  n»  6, 
p.  37-?8). 

Ve  léonnais  qui  est  remplacé  par  un  a  en  vannetais  est  suivi  d'un  r 
dans  : 

55.  Ere  «  lien  »  (Troude  et  Lag.);  —  en  vannetais  ari  (Troude  et 
Lag.);  —  en  vannetais  ari  (Troude  et  Châl',  arri  (Larm.).  Serait-ce  le 
vieux  gallois  rnim,  gallois  moderne  rhyn\,  qui  se  trouverait  ici  précédé 
d'un  préfixe  (cf.   Whitley  Stokes,  Beitr.,  IV,  404).? 

56.  Serch  «  serge  »  cerg  (Lag.);  —  en  vannetais  charj  (Troude), 
charge  (Larm.),  du  français  serge  qui  est  lui-même  issu  du  latin  serica 
(Diez,  Wœrterbuch^,  t.  I,  p.  364). 

Le  même  phénomène  s'observe  dans  les  mots  suivants  où  Ve  léonnais 
est  suivi  de  v  : 

56  A.  Evit  «  pour»  Troude,  Lag.);  —  en  vannetais  aveit  (Troude), 
aveitt  (Larm.).  Sur  l'origine  de  cette  préposition,  voir  une  hypothèse  de 
Zeuss,  Gr.  C.  ^  p.  6$  3-654. 

57.  Dievez  u  téméraire,  »  composé  possessif  formé  du  préfixe  négatif 
di  et  du  substantif  evez  «  attention  ;  »  —  en  vannetais  diaviz  (Troude), 


96  Étude  phonétitjue  sur  le  dialecte  breton  de  Vannes, 

diaviss  (Larm.),  diavis  (Châl.).  On  pourrait  croire  que  le  second  terme 
de  ce  composé  est  identique  au  français  «  avis,  »  La  comparaison 
avec  le  mot  léonnais  y  met  obstacle  :  Zeuss,  avec  raison,  recon- 
naît dans  le  breton  léonnais  evez  (en  vannetais  eueh)  un  dérivé 
du  gaulois  avi,  en  vieux  cambrien  egui,  mot  dans  lequel  l'a  initial 
s'est  assimilé  à  1';  de  la  seconde  syllabe  (Gr.  C.  ^,  p.  82  n,  128).  La 
forme  primitive  de  l'armoricain  evez,  eueh  serait  avid  dont  la  dentale  se 
serait  par  exception  changée  en  sifflante  en  vannetais  comme  dans  noz, 
nos,  «  Twih  n  àe  nocht  ;  et  dans.les  nombres  cardinaux  tiouzf  A,  «  douze;  » 
trizek,  «  treize,  »  etc.,  pour  daoudek,  tridek. 

L'ordre  alphabétique  nous  a  fait  arriver  aux  mots  dans  lesquels  Ve 
léonnais  devient  /  en  vannetais.  Nous  commencerons  par  une  obser- 
vation. Zeuss  a  remarqué  que  dans  un  nombre  de  cas  très-considérable  /'/ 
bref  primitif  s'est  changé  en  e  dans  l'armoricain  moderne.  Le  vannetais 
a  souvent  obéi  à  cette  tendance,  en  voici  des  exemples  : 

58.  Le  substantif  gaulois  bitu-s  u  monde  »  en  vieil  irlandais  /'///;,  en 
moyen  gallois  hyt  {Gr.  C.  ^-,  12,  88;,  en  léonnais  beth  (Lag.),  bed 
(Troude),  en  vannetais  beît,  bét  (Châl.,  Larm.). 

$9.  L'adjectif  gaulois  litano-s,  litana  («large,  »  en  moyen  gallois 
liîan,  en  vannetais  comme  en  léonnais  ledan  (Troude,  Larm.,  Châl.  , 
voir  Gr.  C.  \  p.  88. 

60.  Le  substantif  gaulois  vidu-s,  <c  arbre,  »  en  vieil  irlandais  yî^i,  en 
vieil  armoricain  guid,  en  moyen  comique  guid-en,  en  léonnais  guez-enn 
(Lag.") 'ygwez-enn  (Troude),  en  vannetais  giié-nn  (Larm.),  voyez  Gr.  C-, 
p.  12,  88;  Gluck,  K.  N.,  p.  11^;  Ebel,  Beitr.,  II,  178. 

61.  L'adjectif  gaulois  vindo-s,  <(  blanc,  »  en  vieil  irlandais  fin,  vieil 
armoricain  guin,  comique  et  gallois  moderne  gwyn  ;  en  léonnais  guenn 
(Lag.),  gwenn  (Troude),  en  \^nnetais  giicnn  (Larm.),  voyez  Gr.  C.  -, 
p.  53,  89;  Gluck,  K.  N.,  p.  74. 

62.  L'adjectif  gaulois  cintu-s  «  antérieur,  »  en  moyen  gallois  kynt, 
<•  avant,  »  moyen  armoricain  léonnais  quent,  léonnais  moderne  kent', 
vannetais  quennt  (Larm.),  quent  (Châl.),  voyez  Gr.  C.^,  p.  89,  507, 
308,  322,  cf.  Gluck,  K.  N.,  p.  60. 

63.  Le  thème  gaulois  itu  <(  froment,  »  en  vieil  irlandais  ith,  vieux 
gallois  /?,  gallois  moderne  v^;  léonnais  etli  (Lag.),  ed  (Vie  de  Sainte 
Nonne),  vannetais  ett  (Larm.\  et  (Châl,);  voyez   Gr.  C.  ^  p.  12,  89, 


1.  Dans  la  prononciation  nasalisée  d'aujourd'luii   :   Mainte,  Vi  primitif  a   reparu.  Voyez 
Troude,  p.  73. 


Etude  phonétique  sur  le  dialecte  breton  de  Vannes.  97 

147,  258;  Ebel,  Beitr.,  II,  157;  Stokes,  Beitr..  IV,  594;  Ir.  gi,  p. 
119,  n"  1058;  Mise,  p.  38.  Je  signalerai  comme  une  singularité  un 
passage  de  la  vie  de  saint  Gwenole  cité  par  Lepel.  au  mot  eus,  col.  291; 
an  yth  eus  an  grynol  «  le  blé  du  grenier.  »  La  forme  de  l'article  montre 
que  ce  passage  est  emprunté  à  un  texte  écrit  en  moyen  armoricain  et  en 
un  autre  dialecte  que  celui  de  Vannes,  et  Vi  primitif  est  conservé.  Enfin 
le  savant  archiviste  M.  Le  Men  nous  apprend  que  l'on  continue  à  pro- 
noncer it  aux  environs  de  Quimper. 

Il  résulte  de  ces  exemples  que  le  dialecte  de  Vannes  a  plus  d'une  fois 
changé  1'/  primitif  en  c.  Il  a  cependant  une  tendance  marquée  à  préférer 
1';  à  Vc  du  dialecte  de  Léon.  Les  exemples  suivants  le  démontreront. 
Nous  commençons  comme  plus  haut  par  les  mots  léonnais. 

64.  Beo  «  vif,  »  beu  (Lag.)  ;  —  en  vannetais  bihue  1  Larm.),  biv  (Châl.), 
vieil  irlandais  biu,  vieux  gallois  biu,  gallois  moderne  byw,  moyen  cor- 
nique  biu  (Voc],  comparez  la  racine  sanscrite  g'îv  «  vivre,  »  le  gothique 
quius  «  vif,  »  le  grec  [iioç  v  vie,  »  le  latin  vivus  (Gr.  C.^,  p.  35,  54, 
109;  Ebel,  Beitr.,  II,  160;  Curtius,  Gr.  Etym.  ^,  p.  418). 

65.  Gwcnanen  «  abeille,  )i  guenanenn  'Lag.);  —  en  vannetais  giv/r/nen 
(Troude),  guirinenn  (Larm.\  gallois  moderne  gwenynen,  comique  gue- 
nenen  (yoc.). 

G().  Ankenia  «  affliger,  »  anquen  «  douleur,  »  (Lag.),  —  en  vannetais 
ankinein  (Irouàç:  ,  anquinein  (Larm.;  Châl.  dit  anquenein  avec  un  e^ 
comme  en  léonnais  ). 

67.  Ené  «  âme,  »  eneff  (Lag.)  ;  —  en  vannetais  inean  (Troude,  Larm., 
Chai.),  vieil  irlandais  anam,  anim,  gallois  moderne  enaid;  cf.  n°  29. 

68.  Ebrel  <.<  avril,  »  ebiell  (Lag.);  —  en  vannetais  imbril  fTroude  et 
Buhé  er  sant),  embrill  (Larm.),  cmbril  (Châl.  )  ;  gallois  moderne  ebrill, 
comique  ebral,  du  latin  aprilis. 

69.  Steredenn  «  étoile,  »  sterenn  'Lag.:;  —  en  vannetais  stiren 
Troude,  Châl.),  stireen  (Larm.),  vieux  gaWois stirenn  (Gr.  C.  ^,  p.  1201, 

moyen  comique  steren  (Voc.')  pour  stiren.  Dans  les  langues  germaniques 
comme  dans  les  langues  celtiques,  la  voyelle  de  la  racine  a  été  primi- 
tivement un  ;  ;  Vai  du  gothique  stairno,  V'é  du  vieux  haut-allemand 
st'crno,  du  vieux  saxon  st'érro,  remplace  un  /  primitif  par  suite  du  phéno- 
mène que  Grimm  appelle  brechung  {Deutsche  Grammatik,  t.  I  >,  p.  50, 
77,  233.  Cet  /  celtique  et  germanique  est  lui-même  issu  d'un  a  plus 
ancien,  comme  le  prouve  le  thème  grec  a-s-sp,  le  latin  Stella  et  le 
sanscrit  védique  5far  (Curtius,  Gr.  Etym.  ^,  p.  187;  Bopp,  Grammaire 
comparée,  §,  87,  traduction  de  M.  Bréal,  I,  1 31;, 

70.  Kreski  «  croître;  »  cresquadur  «  accroissement  »  iLag.);  —  en 

7 


98  Etude  phonétique  sur  le  dialecte  breton  de  Vannes. 

vannetais  kriskein  ^Troude),  crissquein  (Larm.;  Châl.  écrit  cresquein  avec 
un  e  comme  en  léonnais);  du  latin  crescere  dont  le  second  c  est  resté  dur; 
ce  mot  peut  être  comparé  aux  mots  allemands  d'origine  latine  qui  ont 
conservé  le  c  dur  devant  e  et  i  (Corssen,  Aussprache^,  t.  I,  p.  45);  voir 
plus  haut  le  n"  12. 

71.  Kened  «  beauté,  »  qucnet  (Lag.);  —  en  vannetais  kinet  (Troude), 
quinaitt  (Larm.),  quinêt  ou  quenêt  (Châl  . 

72.  Ber  «  bierre,  »  —  en  vannetais  bir  (Troude  et  Châl.),  bire 
(Larm.).  Ce  mot  est  d'origine  incertaine  (Diez,  Warterbuch  ^,  t.  I, 
p.  69). 

73.  Eva  ((  boire,  »  evajf  (Lag.);  —  en  vannetais  ivein  (Troude, 
Larm.,  Châl.,  Guillome,  Grainm.,p.  60);  vieil  irlandais /l^ùnm  «je  bois,  » 
moyen  gallois  evet  «  boire,  >>  en  gallois  moderne  yfed;  le  p  initial  a  été 
retranché ,  comparez  le  védique  pibâmi,  le  latin  bibo  fpour  pipo),  le 
grec  m'-vo)  (Wh.  Stokes,  Thr.  Ir.  gl.,  p.  XXIX;  Beitr.,  II,  396;  Ebel, 
Beitr.,  III,  281  ;  Curtius,  Gr.  Etym.  '%  p.  252). 

74.  Gwadegenn  «  boudin;  >>  —  en  vânnelâls  gwedigenn  (Troude),  goai- 
digueenn  (Larm.),  goediguenn  (Châl.). 

75.  Evorenn  «  bourdaine,  »  —  en  vannetais  ivoenn  (Troude),  ivo 
(Larm.). 

76.  Beuzel  «  bouse  de  vache,  »  —  en  vannetais  boazil  (Troude, 
Chai.),  bouzile-  (Larm.). 

77.  Ber  «  broche  »  (Troude  et  Lag.  1  ;  —  en  vannetais  bir  (Troude, 
Châl.),  bire  (Larm.),  vieil  irlandais /)/>.  Vi  est  devenu  e  dans  la  plupart 
des  langues  néo-celtiques  :  moyen  comique  ber  (Voc.),  gallois  moderne 
bêr;  en  latin  veru  (Ir.  gl.,  p.  149,  n°  152;  Ebel,  Beitr.,  II,  156;  Gr. 
C,  2,  p.  $4)  que  M.  Corssen,  d'accord  avec  M.  Benfey,  tire  de  la  racine 
ghvar  «  tourner  »  {Krit.  Nacht.  p.  8  $-87)'. 

78.  Merenn  «  collation  »  (Troude  et  Lag.)  ;  —  en  vannetais  mirenn 
(Troude),  mireenn,  gallois  moderne  meryn  «  goutte,  particule;  »  du  latin 
merenda. 

79.  Redek  «  courir,  »  redec  (Lag.),  red  «  course;  »  —  en  vannetais 
ridek  «  courir  »  (Troude),  rideec  (Larm.,  Châl.)  ;  rid  «  course  »  'Larm.), 
rit  (Châl.),  gaulois  rito-,  dans  petor-ritum,  vieil  irlandais  rith,  gallois 
moderne  rhcd,  rhid.  —  Est  identique  le  gaulois  rito  «  gué,  ))  dans 
Augusto-ritum;  en  vieux  gallois  rit;  en  comique  rid  {Voc.j,  red;  en 
gallois  moderne  rliyd.  Ainsi  le  latin  vâdum  <(  gué,  »  et  vâdo  ((  je  vais,  » 

I.  La  consonne  initiale  de  ces  mots  celtiques  nous  donnerait  donc  l'exemple  d'un 
changement  de  g  en  b,  et  non  de  v  en  b,  comme  le  suppose  M.  Ebel.  M.  W.  Stokes  a 
déjà  fait  cette  observation. 


Etude  phonétique  sur  le  dialecte  breton  de  ViXnnes.  99 

sont  tous  deux  dérivés  de  la  même  racine  5a  [Gr.  C.  ^,  p.  12,  ^9,  63, 
71,  88;  Gl.  Taur.,  p.  40;  cf.  Corssen;,  Kritische  Beitr<£ge,  p.  59;  Cur- 
tius,  Gr.  Etym.2,  p.  415-416). 

80.  Enez  «  lie,  »  enesenn  (Lag.);  —  en  vannetais  iniz  'Troudej,  iniss 
Larm.;  Châl.  écni  enesen),  vieil  irlandais /«/5,  moyen  gallois  ynys  (Gr. 

C.  =,  p.  88,  89 >. 

81 .  Levenez  «  joie  ;  »  —  en  vannetais  lehuine  (Troude;,  léhuiné  Larm.), 
lehuiné  iChâl.),  vieux  gallois  leguenid,  gallois  moderne  llawenydd.  cor- 
nique  lawenez,  lawene,  irlandais  moderne  lainne  (pour  lavinne),  gaélique 
loinn  'Stokes,  Beitr.,  t.  IV,  p.  419,  Gr.  C.^,  p.  128). 

82.  Bevenn  «  lisière  «  'Troude  et  Lag.^  ;  —  en  vannetais  biliuen 
Troude,  Larm.  . 

85.  Begel  «  nombril,  »  beguel  (Lag.  '  ;  —  en  vannetais  begil  (Troude), 
beguil  (Larm.,  Châl.),  gallois  moderne  bogail,  comique  begel. 

84.  Teval  «  obscur,  »  tefflial  ;  Lag.)  ;  ■ —  en  vannetais  tiouel  (Troude), 
tihouêlc  Larm.  ,  tiouele  (Châl.  ,  gallois  moderne  tywyll,  moyen  comique 
tivulgou  «  tenebrae,  »  comique  moderne  îewal  «  obscur,  »  vieil  irlandais 
temel  «  obscuritas;  »  comparez  le  sanscrit  tamas  «  obscurité  «  (Ebel, 
Beitr.,  II,  165;  Stokes,  Beitr.,  IV,  405;  Gr.  C.  2,  p.  107;  Gl.  Taur., 
p.  40);  cf.  n^  15. 

85.  Ger  «  parole,  »  guer  fLag.i  ;  —  en  vannetais  gir  (Troude),  guirr 
(Larm.;,  gii/r  (Châl.)  «  cri,  »  gallois  moderne  ^a/V  «  parole,  «  moyen 
comique  ger  [Voc.  .  En  irlandais  moderne  et  en  gaélique  ga:>  signifie 
«  cri;  »  en  sanscrit  gir  «  voix,  »  racine  gar,  d'où  grnâmi  «  crier.  » 
Gervel  est  dérivé  de  la  même  racine,  voir  plus  haut,  n"  41. 

86.  Pcsk  u  poisson,  »  pesq  (Lag.  ;  —  en  vannetais  pisk  (Troude), 
pissque  Larm.;  Châl.  écrit  cependant  pes  que]  ;  gallois  moderne /Jj^g, 
moyen  comique  pisc  'Voc..,  comique  moderne  pysc  ou  pcsc]  irlandais 
moderne  et  gaélique  iasg,  latin  piscis,  gothique /Î5Â:[a]-5  (Ir.  gl.,  p.  ^8, 
no  13;  Ebel,  Beitr.,  II,  168;. 

87.  Mesk  «  mélange  ;  »  —  en  vannetais  misk  (Troude  ,  missque  (Larm., 
qui  écrit  aussi  comme  Châl.  mesquein  «mesler»);  gallois  moderne  mysgu 
«  mêler,  »  et  mysg  a  milieu,  »  comique  moderne  mysg  <f  milieu,  » 
irlandais  et  gaélique  moderne  measg  «  milieu,  »  measgadh  «  mélange,  n 
Comparez  les  verbes  suivants  :  sanscrit  miçrajâmi,  grec  [j.\t;<j},  latin 
misceo,  ancien  haut-allemand  miskiu  (Curtius,  Gr.  Etym.^,  p.  500,. 

88.  Bena  «  tailler  la  pierre,  »  benaff  Lag.);  —  en  vannetais  binein 
Troude,  Larm.,  Châl.;  ce  dernier  admet  aussi  benein). 

89.  Perenn   «  poire  »    1  Troude  et  Lag.  ;  ;  —  en   vannetais  pirenn 


100  Étude  phonétique  sur  le  dialecte  breton  de  Vannes. 

(Troude),  pirann  (Larni.j,  pireenn   Châl.   ,  comique  et  gallois  moderne 

perann,  latin  piruni. 

90.  Pebr  (c  poivre  »  (Troude  et  Lag.);  —  en  vannetais  pibr  (Troude, 
Larm.),  pibre  (Châl.);  gallois  moderne  pubyr;  latin  piper. 

91.  Kegeliad,  «  quenouille,  »  queiguel  (Lag.j;  —  en  vannetais  kegiliad 
(Troudej  quegile  'Larm.)  quegil  'Châl.)  ;  gallois  moderne  cogail,  moyen 
comique  cigel  voc),  moyen  irlandais  cuigel,  gaélique  cuigeal,  du  bas 
latin  conucula  pour  colucula,  diminutif  de  colus.  L'allemand  kunkel,  le 
français  «  quenouille  »  n'ont  pas  d'autre  origine  {/r.  gi,  p.  80,  n"  567; 
Diez,  Wœrterbuch^,  I,  138). 

91.  Kemener,  «tailleur,  »  quemener  (Lag.);  —  en  vannetais  keminer 
queminérr  (Troude),  queminér,  (Larm.),  quemener  (Châl.,  qui  admet 
aussi  l'orthographe  quemener  ,  gallois  moderne  cymmynwr  (tailleur  de 
pierre  ou  de  bois),  de  com  et  de  bena,  binein    Gr.  C,  p.  874;. 

92.  Tener,  «  tendre  «  (Troude,  Lag.);  —  en  vannetais  ?//2er  (Troude), 
tinerr  (Larm.),  tinér  (Châl.)  ;  gallois  moderne  tyner,  latin  tener. 

95.  Dena,  «  téter,  «  denaff  [Lag.;  ;  —  en  vannetais  dinein  Troude, 
Larm.,  Châl.);  gallois  moderne  dyfnu,  irlandais  moderne  dinim,  cor- 
nique  moderne  dena  probablement  pour  dina).  L'i  remplace  un  a  pri- 
mitif, sanskrit  dhajâmi,  gothique  daddja    Curtius,  Gr.  Etym.^  p.  227). 

94.  Gwener,  «  vendredi  »,  —  en  vannetais  ç;n'//2er  Troude),  guincrr 
(Larm.)  ;  gallois  moderne  didd  gwener  ;  comique  de  gwenar,  du  latin 
veneris. 

95.  Gwer,  M  verre,  »  guezr  (Lag.)  ;  —  en  vannetais  gwir  ^Troude  , 
guirr  (Larm.),  guir  (Châl.  qui  admet  aussi  guer)  ;  gallois  moderne  gwydr, 
comique  gweder,  du  latin  vitrum  lequel  paraît  dérivé  de  la  racine  rid 
«voir,  savoir»  (Curtius,  Gr.  Etym.~,  217;. 

96.  Lez,  «  cour,  »  les  (Lag.)  ;  —  en  vannetais  liss  iLarm.),  vieil 
armoricain  lis,  moyen  gallois  lys,  gallois  moderne  llys;  comique  lis  et 
les;  vieil  irlandais  Us;  comparez  le  français  u  lice,  »  «  lisière  »  et  le 
vieux  haut  allemand  lista,  «  bordure,  limite,  »  irlandais  moderne  lias, 
«  maison  »  ;  gaélique  lios,  «  jardin  »  'Gr.  C.^,  p.  89,  114,  1 57  ;  Mise., 
p.  28;  DieZ;,  Wœrterbuch^,  I,  251,  255;  Littré,  Dictionnaire,  t.  11, 
p.  298,  320;  Ducange,  v.  licia,  liciiZ,  éd.  Henschel,  IV,  105).  Suivant 
nous,  MM.  Diez  et  Littré  n'expliquent  pas  exactement  l'origine  des  mots 
français  lice  et  lisière  qui  nous  semblent  d'origine  celtique. 

97.  Eno,  «•  là  ))  (Troude,  Lag.)  ;  —  en  vannetais  inou  -  Troude, 
Larm.);  gallois  moderne  yno,  moyen  gallois  endau  <i  in  eo  »  {Gr.  C.^ 
p.  581);  comique  ynno  «  in  him  or  it  »  (Corn.  Dict.,  p.  389),  cf. 
Gr.  C.^,  p.  382^  Il  y  a  dans  cet  adverbe  deux  éléments  :   1°  la  prépo- 


Etude  phonétique  sur  le  dialecte  breton  de  Vannes.  loi 

sition  in  de  l'irlandais  et  du  vieux  gallois  Gr.  C,  p.  579,  635),  en,  enn 
en  léonnais  ;  2"  le  pronom  suffixe  de  la  troisième  personne  dau  en  moyen 
gallois,  do  en  comique,  dou  en  vannetais.  Dans  le  comique  ynno  le  d 
initial  de  ce  pronom  s'est  assimilé  à  Vn  final  du  pronom  voir  la  règle 
Gr.  C,  p.  147).  Dans  le  vannetais  inou,  mieux  innou,  il  y  a  eu  aussi 
nasalisation  de  la  dentale,  tandis  que  la  dentale  s'est  changée  en  guttu- 
rale spirante  ou  en  simple  aspiration  dans  les  mots  vannetais  de-lwu  «  à 
lui,  ))  ane-hou  «  de  lui  »  (Guillome,  Gramm.,  p.  33;,  suivant  une  loi 
spéciale  au  dialecte  de  Vannes.  Le  comique  a,  conformément  à  son 
génie  propre,  remplacé  la  dentale  par  z  ou  th  dans  dozo,  dotho  «  à  lui,  « 
anozo,  anotho  «  de  Ini  »  [Gr.  C.^,  p.  142,  382).  Le  pronom  suffixe  don 
aurait  en  léonnais  do  pour  correspondant  régulier.  On  ne  le  trouve  que 
dans  eno  pour  enno  =  en-do.  Ailleurs  il  est  remplacé  par  daff,  dan  ; 
exemple  dezaff,  dezhan,  «  à  lui  ;  anezaf,  anezhan,  «  de  lui  »  (Gr.  C.*, 
p.  382;  Troude,  p.  549),  Voir  plus  haut  n°  25. 

98.  Enep,  «  contre,  «  signifiait  «  face,  visage,  »  en  moyen  armori- 
cain ;  — en  vannetais  incp  Guillome,  Gramm.  p.  90,  Larm.  écnt  einep); 
vieux  gallois  enep,  «  face  )>  ;  moyen  comique  enep,  «  page  »  'Stok.es, 
Beitr.,  IV,  422  . 

99.  Enor,  «  honneur  »  (Troude,  Lag. ,;  —  en  vannetais  mour  (Larm., 
Châl.  ,  du  latin  honor. 

100.  Le  dialecte  de  Vannes  fait  en  it  et  non  en  et  les  participes  passés 
passifs  de  certains  thèmes  terminés  par  des  voyelles  :  ainsi  le  léonnais 
deuet,  <(  venu,  »  a  pour  équivalent  vannetais  deit;  roet,  «  donné,  »  reit; 
koveseet,  «  confessé,  )>  covesseit  (Guillaume,  Gramm.  p.  60,  68-70, 
86-87  .  Le  comique  fait  ses  participes  passés  passifs  en  is.  L'ancien 
irlandais  place  aussi  quelquefois  un  /  devant  la  dentale  du  suffixe  :  le 
gallois  n'employé  que  Vc  dans  cette  circonstance  'Gr.  C,  p.  472,  528- 
529;  Gr.  es  p.  479). 

Dans  un  certain  nombre  de  ces  exemples,  1'/  vannetais  est  plus  an- 
cien que  Ve  du  dialecte  de  Léon;  dans  d'autres  c'est  le  contraire  qui  a 
lieu;  en  plusieurs  cas  la  question  doit,  ce  nous  semble,  rester  indécise. 

E  du  dialecte  de  Léon  a  pour  équivalent  en  vannetais  la  voyelle  0 
dans  des  mots  où  cette  dernière  lettre  est  primitive,  savoir  l'infinitif  de 
certains  verbes  : 

ICI.  Terri,  «  briser,  »  terriff  iLag.),  part,  torret;  —  en  vannetais 
torrein  Troude,  Larm.,  Châl.)  ;  gallois  moderne /or/,  comique  ?orry  ; 
comparez  la  racine  grecque  et  latine  ter  dans  Tsipto,  tero,  et  la  racine 
sanscrite  tar  dans  tar-una-s  (Curtius,  Gr.  Etym."^,  p.  201). 


102  Étude  phonétique  sur  le  dialecte  breton  de  Vannes. 

102.  Rei,  «  donner,  »  reiff  (Lag.  ,  part,  roet;  —  en  vannetais  roein 
(Troude)  ;  moyen  gallois  rhodom  «  dederimus  »  ;  gallois  moderne  rhoddi 
«  donner  «  {Gr.  C.^,  p.  159. 

103.  Kregi,  «  saisir»;  creguiff  (Lag..,  part,  kroget,  —  en  vannetais 
krogein  (Troude),  croguein  (Larm.,  Châl.i. 

104.5^5/,  «  frapper  «;  5i5'ue/^(Lag.),  part,  scoet  ;  —  en  vannetais 
skoein  (Troude),  scoein  (Larm.). 

105.  Leski,  «  brûler,  »  lesquiff  Lag.),  pan.  losket;  —  en  vannetais 
loskein  {Troude),  lossquein  (Larm.j,  losquein  (Châl. i  ;  gallois  moderne 
llosgi,  comique  loscy.  Comparez  le  vieil  irlandais  loscad  et  le  moyen 
comique  losc.  (Voc),  mots  qui  signifient  <(  brûlement  »  [Gr.  C.^, 
p.  I2i;  h.  gi,  p.  9i,n°737,,. 

106.  Régi,  «  déchirer,  »  part,  roget,  roguet  (Lag.)  ;  —  en  vannetais 
rogein  'Troude  ,  ronguein  Larm.,  Châl.).  Peut-on  comparer  le  français 
«loque».''  Diez,  Wœrterbuch^,  II,  351,  donne  une  autre  étymologie. 

107.  Digeri,  «  ouvrir,  »  part,  digoret ;  —  en  vannetais  digorein 
(Troude,  Larm.)  ;  gallois  moderne  agori,  egori  ;  comique  agcri,  prétérit 
agores. 

108.  Seni,  «  sonner,  n  part,  sonct  ;  —  en  vannetais  soncin  (Troude), 
sonnein  (Larm.);  gallois  moderne  50/2,  «  bruit,  »  sonio,  «  faire  du  bruit, 
parler  »  ;  vieux  gallois  sain,  pi.  seiniau,  «  son,  »  gallois  moderne  scinio, 
«  faire  du  bruit  »  ;  comique  son,  «  bruit,  parole  »  ;  vieil  irlandais  son, 
<<■  son,  ;)  sen,  <(  faire  du  bruit,  »  senm,  «  son  »  (Gr.  €.-,  pp.  86,  181, 
228).  Comparez  le  latin  sonus,  sonare,  de  la  racine  svan  d'où  en  sans- 
crit svanâmi  «  je  fais  du  bruit,  »  svan-a-s  «  son.  » 

Viennent  ensuite  des  noms  dans  lesquels  la  voyelle  primitive  est  un  0 
suivi  d'une  nasale. 

109.  Ejenn,  «  bœuf  »  ;  —  en  vannetais  ejonn  (Troude),  eijonn 
(Larm.),  ejon,  ijônn  fChâl.);  moyen  comique  odion  {Voc.',  moyen  gal- 
lois eydyon,  gallois  moderne  eidion  {Gr.  C.^,  p.  90). 

1 10.  Drcmedal,  «  dromadaire  »  ;  —  en  vannetais  dromedal  (Troude*. 
Lag.  conserve  aussi  l'o  et  écrit  dromeder. 

111.  Merienenn,  «  fourmi,  »  meryenenn  (Lag.;;  —  en  vannetais 
merionenn  {Troude),  merionneenn  (Larm.),  merionncnc  (Châl.)  ;  moyen 
comique  menwionen  (Voc),  gallois  moderne  mywionen. 

1 12.  Kelienen  «  mouche,  »  quelyencnn  (Lag.  ;.  —  en  vannetais  kelionenn 
(Troude),  quelionnenn- {Larm.),  quclionen  (Châl.i,  gallois  moderne  cylio- 
nyn. 

113.  Le  suffixe /c//  est  un  de  ceux  au  moyen  desquels  on  forme  le 
pluriel  dans  le  dialecte  de  Léon  iLeGon.,  Granim.,  éd.  de  i8$o,  p.  18). 


Étude  phonétique  sur  le  dialecte  breton  de  Vannes.  loj 

La  désinence  correspondante  dans  tous  les  monuments  gallois  et  cor- 
niques  est  ion  ;  on  a  signalé  aussi  deux  exemples  du  suffixe  ion  dans  les 
monuments  du  dialecte  de  Léon  qui  représentent  pour  nous  le  moyen 
armoricain  Gr.  C.^,  p.  289-290.  C'est  le  suffixe /o/2  qui  est  usité  à 
l'exclusion  de  ien  en  vannetais   Guillome,  Gram.,  p.  lo-i  ij. 

E  léonnais  parait  avoir  pour  équivalent  ou  en  vannetais  au  singulier 
du  suffixe  léonnais  -cr,  -erien,  qui  est  en  vannetais  -our,  erion  dans  un 
grand  nombre  de  mots  1  Guillome,  Gramm.,  p.  lo-i  i). 

115.  Treic'her  «  passeur;  )>  —  en  vannetais  treic'hour  (Troude),  trei- 
hourr  (Larm.),  tréhour  'Châl.). 

1 16.  Arer  «  conducteur  de  charrue  «  (Troude  et  Lag.)  ;  —  en  van- 
netais arour  (Troude),  aroure  (Larm.). 

iij.  Kourrezer  «  corroyeur  »  (Troude  et  Lag.);  —en  vannetais 
korreour  'Troude),  correour  'Châl.). 

118.  Kigner  «  écorcheur;  »  —  en  vannetais  kignour  (Troude),  qui- 
gnour  ('Larm.). 

119.  Farser  «  farceur;  »  —  en  vannetais /czr^oî/r  (Troude),  farçour 
(Larm.). 

120.  Falc'honer  «  fauconnier;  »  —  en  vannetais /a/c'/zonour (Troude), 
falhannour   Larm.). 

121.  C'hoarier  «  joueur,  »  hoarier  Lag.;;  —  en  vannetais  c'Iioariour 
(Troude),  hoariourr  (Larm.),  hoariour  (Châl.). 

122.  Barner  «  juge  «  ('Troude  et  Lag.);  —  en  vannetais  barnour 
(Troude  et  Larm.). 

125.  Gourinner  «  lutteur;  »  —  en  vannetais  gourinnour  (Troude), 
gorinourr  'Larm.),  gourénour  (Chk\.  . 

124.  Debrer  a  mangQuv ;  »  —  en  vannetais  debrour  (Troude),  dai- 
brourr  'Larm.j. 

125.  Pécher  «  pécheur  »  'qui  commet  des  péchés),  pechezr  (Lag.)  ;  — 
en  vannetais  pec'hour  (Troude  ,  pehourr  (Larm.). 

126.  Pesketaer  a  pêcheur»  (qui  prend  du  poisson),  pesquezr  'Lag.); 
—  en  vannetais  pisketour  (Troude),  pisquour  ('Larm.),  pesquatour,  pes- 
quetuonr    Châl.), 

127.  Plunjer  «  plongeur,  »  pluncher  Lag.);  —  en  vannetais  plunjour, 
plujour  Troude  ,  plujourr  (Larm,). 

128.  Alc'houezer  «  serrurier,  »  alhuezer  (Lag.);  —  en  vannetais 
alc'huezour  -^Troude),  alhuéour  (Larm.). 

Zeuss  a  établi  que  la  voyelle  primitive  du  suffixe  léonnais  cr  est  un  a 
long.  Cet  a  long  est  devenu  au  en  gallois  ancien,  awen  gallois  moderne, 


1 04  Etude  phonétique  sur  le  dialecte  breton  de  Vannes. 

0  en  comique,  e  en  léonnais  iCr.  C,  p.  797-798].  Il  n'y  a  pas,  que 
je  sache,  d'exemple  que  1'^  long  primitif  soit  devenu  ou  en  vannetais. 
Doit-on  en  conclure  que  le  suffixe  du  dialecte  de  Vannes  soit  différent 
de  celui  qui  est  usité  dans  le  dialecte  de  Léon  ?  Le  suffixe  léonnais  peut, 
ce  semble,  s'expliquer  par  deux  suffixes  primitifs,  identiques  l'un  au 
latin  -ârius,  l'autre  au  latin  -âtor;  le  premier  serait  le  plus  fréquent, 
cependant  1 2  ^  pedher  «  pêcheur^  »  en  moyen  armoricain  pechezr,  suppose 
un  primitif /)ecC(îf[o]r.  Le  vannetais  aurait  donné  la  préférence  au  suffixe 
-ator  et  l'aurait  traité  comme  l'a  fait  la  langue  française,  en  supprimant 
les  deux  premières  lettres  et  en  faisant  d'o  une  longue  :  -atôrem  = 
«  -eur.  »  Or,  -eur  français  égale  «  -our  »  dans  le  vannetais  inour  ^  hon- 
neur. »  Nous  dirions  donc  :  1 16  arer,  léonnais  «  laboureur,  »  =  ara- 
rius;  arour,  vannetais,  =  ar[at]orem;  125  pec^lier,  léonnais,  =  pecca- 
[to]r;  pec'lwur,  vannetais,  =  pecc[at]orem. 

Cette  explication  du  suffixe  vannetais  n'est  qu'une  hypothèse.  Peut- 
être  le  suffixe  vannetais  est-il  tout  simplement  le  suffixe  gallois  ur,  ht, 
par  un  u  bref  {Gr.  C,  p.  796)  qui  se  prononce  ou  en  armoricain  {Gr. 
C,  p.  92). 


1 


E  léonnais  paraît  être  remplacé  par  oue,  oui,  dans  deux  mots  vanne- 
tais : 

1 29.  Grek  «  femme  ;  »  —  en  vannetais  groaek  î'Troude;,  grouic  (Châl.) 
Le  mot  léonnais  grek  est  une  forme  contractée  de  gruec  (Lag.  et  Gr.  C.  ^. 
p,  I  ^4)  dont  Vu  se  prononce  ou  en  vannetais.  La  présence  de  cet  u  = 
ou  après  l'r  est  le  résultat  d'une  métathèse  qui  s'était  déjà  produite  dans 
le  moyen  comique  grucc  (Voc).  Le  vieux  gallois  gurehic,  le  vieil  irlan- 
dais/race (Gr.  C.  ',  p.  5  3)  en  donnent  la  preuve.  Le  gu  initial  du  gallois, 
Vf  irlandais  remplacent  un  v  primitif. 

130.  Eet  «  allé;  »  —  en  vannetais  oueit  Guillome,  Gramin.,  p.  84  . 
Eet  se  dit  par  assimilation  pour  ^c/(Stokes,  Middle  breton  irregular  verbs, 
p.  41).  Je  ne  prétends  pas  essayer  une  explication  que  le  savant  celtiste 
n'a  osé  donner. 

E  léonnais  est  remplacé  en  vannetais  par  //  dans  les  mots  que  voici  : 

131.  Bugel  (C  berger,  »  buguel (Lag.);  —  en  vannetais  bugul  (Troude, 
Larm.,  Châl.),  gallois  moderne  bugail,  vieil  irlandais  bochail,  moyen   1 
comique  bugel  iVoc;.  dérivé  probablement  d'un  thème  gaulois  /'ou- iden- 
tique à  celui  du  grec  fioj;  ou  du  latin  bos  (Ebel,  Beitr.,  II,  1 56;  Stokes, 
Jr.  gl.,p.  81,  no  583;  Gr.  C.  ^  23). 

132.  Gleb  «  humide;  »  —  en  vannetais  glub  (Troude,  Châl.),  glubb  { 


Etude  phonétique  sur  le  dialecte  breton  de  Vannes.  105 

(Larm.).  Les  deux  formes  s'expliquent  par  une  plus  ancienne  glueb 
(Lag.)  dont  le  léonnais  moderne  a  gardé  Ve  tandis  que  le  vannetais 
préférait  Vu.  Il  y  a  eu  dans  ce  mot  métathèse  de  17  comme  dans  n"  1 29 
métathèse  de  IV.  On  dit  en  effet  en  vieux  gallois  gulip  et  en  irlandais 
fliuch  (Stokes,  Ir.  gi,  p.  87,  n"  675  ;  Beitr.,  IV,  495  ;  Gr.  C.  ^  p.  15?, 
,48). 

155.  Teurel  «  jeter,  »  teurell  (Lag.);  —  en  vannetais  turul  (Troude, 
Châl.),  îurull  (Larm.). 

1 34.  Em  dans  en  em  «  se;  »  —  en  vannetais  hum  (Guillome,  Gramm., 
p.  35).  C'est  une  préposition  qui  indique  la  réciprocité.  La  voyelle 
primitive  est  a;  elle  est  devenue,  1"  i  en  vieil  irlandais  et  en  vieux  gal- 
lois, 2°  0  en  vieux  gallois,  3°  y  en  gallois  moderne  (Gr.  C,  p.  847, 
870;  Gr.  C.  S  p.  90).  Cette  préposition  parait  identique  au  gaulois 
AMB!  {Gr.  es  p.  5  . 

La  présence  de  l'a  dans  le  premier  et  les  deux  derniers  mots  vannetais 
serait  probablement  due  à  l'influence  de  la  consonne  qui  suit. 

On  peut  expliquer  par  l'influence  de  la  consonne  précédente  la  diph- 
thongue  qui  se  remarque  en  vannetais  dans  le  mot  suivant  : 

135.  Pemp  «  cinq,  »  (Troude  et  Lag.);  —  en  vannetais  puemp 
(Troude,  Larm.;  Châl.  et  Guillome  àhent pemp),  gaulois  pempe,  vieux 
gaWohpimp  (Gr.  C.^,  p.  517;  Ir.  gi,  p.  95,  n^j-jS;  Cuno,  Beitr.,  IV, 
104). 

H.  d'Arbois  de  Jubainville. 


KONTADENNO    AR    BOPL    EN    BREIZ-IZEL. 


KOADALAN. 


lEZ   TREGER. 


Ur  wez  a  oa  daou  denig  hag  a  defoa  ur  mab  digwet  gant  he  bemzek 
pe  c'houezek  vloaz.  Ha  'velma  oant  paour  hag  ho  defoa  poan  braz  o  vewa,  un 
dez  a  larjont  d'ékan  :  —  Rèd  a  vo  did,  ma  faotr,  mont  un  tu  bcnnag  da 
c'honid  da  voued.  —  Mal  a  lâras  ar  paotr,  mont  a  rin. 

Ewenn  Koadalan  a  oa  he  hano,  ével  hé  dad. 

He  dad  a  ro  d'éhan  tric^houec'h  dîner,  he  vamm,  un  anter-dousenn  gram- 
poez,  hag  ec'h  a-kuit  ar  paotr. 

Pa  oa  0  vont  gant  ann  hent,  a  tigwezas  gant-han  un  aotro  gwisket  kaer, 
pini  a  laras  d'ehan  : 

—  Pelec'h  ec'h  ez  ével-se,  ma  faotr!' 

—  Da  vale-bro  ;  da  glask  da  c'honid  ma  boued. 

—  Mar  kares  dont  ganen  / 

—  la  a-walc'h,  na  ran  ket  a  forz  gant  pion. 

—  Goud  a  rez  lenn  ? 

—  Un  tammig,  met  nann  kalz. 

—  Neuzé  na  out  ket  ann  hini  a  glaskan,  mar  ouzoud  lenn. 
Hag  ec'h  eaz  ann  aotro  a-rok. 

—  Sell!  a  laras  neuzé  Koadalan  d'ehan  he-unan,  na  tléjenn  ket  bca 
lâret  a  ouzoun  lenn;  me  a  vije  bet  mad  gant  aotro-se.  Rèd  eo  d'in  trci  ma 
chupenn  war  ann  tu-gill  ha  mont  d'hen  diarbenn;  na  anaveo  ket  an-hon. 

Ober  a  ra  ével-se,  lakad  he  chupenn  war  ann  tu-gill,  redek  dré  ar  parko 
hag  em  gavoud  are  diarok  ann  aotro  war  ann  hent. 


i.  Ce  conte  est  un  de  ces  nombreux  récits  populaires,  transmis  par  la  tradition  orale,  et 
qui  font  le  charme  de  nos  chaumières  et  de  nos  manoirs  bretons  durant  les  veillées  d'hiver. 
11  a  été  recueilli  sous  la  dictée  du  conteur  et  traduit  avec  une  grande  fidélité  sur  le  texte 
authentique. 


i 


CONTES  POPULAIRES  DES  BRETONS  ARMORICAINS. 


KOADALAN 

DIALECTE    DE    TRÉGUIER. 


Il  y  avait  une  fois  deux  pauvres  gens  qui  avaient  un  fils  âgé  de  quinze 
ou  seize  ans.  Comme  ils  étaient  pauvres  et  qu'ils  avaient  beaucoup  de 
peine  à  vivre,  ils  dirent  un  jour  à  leur  enfant  :  —  Il  te  faudra,  mon  fils, 
aller  gagner  ton  pain  quelque  part. 

—  C'est  bien,  répondit  le  gars,  j'irai. 
Il  s'appelait  Yves  Koadalan. 

Son  père  lui  donna  dix-huit  deniers,  sa  mère,  une  demi-douzaine  de 
crêpes,  et  le  gars  partit. 

Comme  il  s'en  allait,  sur  la  route,  il  rencontra  un  seigneur  bien  mis, 
qui  lui  dit  :  —  Où  vas-tu  comme  cela,  mon  garçon  ? 

—  Voyager,  pour  chercher  à  gagner  mon  pain. 

—  Veux-tu  venir  avec  moi  ? 

—  Je  veux  bien;  peu  m'importe  avec  qui. 

—  Sais-tu  lire  ? 

—  Un  peu,  mais  pas  beaucoup. 

—  Tu  n'es  pas  celui  que  je  cherche,  si  tu  sais  lire. 
Et  le  seigneur  poursuivit  sa  route. 

—  Tiens!  se  dit  alors  Koadalan,  je  n'aurais  pas  dû  dire  que  je  sais 
lire;  j'aurais  été  bien  avec  ce  seigneur-là.  Il  faut  que  je  retourne  ma 
veste,  pour  aller  au-devant  de  lui  ;  il  ne  me  reconnaîtra  pas. 

Il  fait  ainsi  ;  il  met  sa  veste  à  l'envers,  court  à  travers  les  champs  et 
se  retrouve  sur  la  route  au-devant  du  seigneur. 


Le  nom  de  Koadalan,  traduit  en  français,  serait  Bois-Allain;  —  mais  je  doute  fort  que 
ce  soit  là  le  nom  primitif,  car  nos  conteurs  populaires  ont  \a  fâcheuse  habitude  de  chan- 
ger arbitrairement  les  noms,  ceux  des  personnages  comme  ceux  des  lieux,  et  de  leur  subs- 
tituer d'autres  noms,  généralement  connus  de  leur  auditoire. 


io8  Koadalan. 

—  Pekc'h  ec'h  ez  ével-sé,  ma  jaotr?  a  lâr  are  ann  aoîro  iVehan. 

—  Da  vale-bro,  da  glask  hara  da  c'honid. 

—  Dont  a  raes  ganen  ? 

—  la  a-walc'h. 

—  Goud  a  rez  lenn? 

—  Na  ouzoun  ket  da!  Ma  zud  a  zo  re-baour  ewlt  ma  c'hass  d\ir  skôl. 
Neuzé  a  krogas  ann  aotro  en-han  hag  a  savas  gant-han  en  er,  uhel,  uhel. 

Diskenn  a  eure  gant-han  e-kichenn  iir  c'hastell-kaer,  en  un  aie  vraz,  lec'h  ma 
oe  souezeî  o  welet  skrivet  war  delio  ar  gwez  :  —  Ann  hini  a  antre  aman,  na 
sorti  kén.  —  Ma  teuas  c'hoant  d'ehan  monî-kuit,  metpenoz?  Antrena  reont 
ho  daou  bars  ar  c'hastell;  debri  hag  eva  a  reont,  ha  goudé  koan,  a  kousk 
mad  en  ur  gwélé-plun. 
Ann  dewarlerc'h  ar  heure  a  lâr  ann  aotro  d'ehan  : 

—  Arsa  ma  faotr,  me  a  ha  hreman  en  hent,  wit  un  dro  am  euz  da  ober, 
hag  a  renki  chomm  da  unan  aman  épad  un  dez  hag  ur  bloaz.  Na  vanko 
netra  d'id  en  ti-ma  ;  sell  aman  ur  zerviedenn,  ha  p'as  bo  c'hoant  a  un  dra 
bennag  da  debri  pé  da  eva,  n'as  bo  netra  da  ober  nemet  lâret  d'ehi  :  —  Ser- 
viedenn,  gra  da  dever;  digass  d'in  ann  dra-ma-dra!  —  Ha  kerkent  a 
tigwezo  ar  ,pez  as  bo  goulennet.  —  Deuss  ganen  breman,  ma  tiskouezin  d'id 
da  labour  bemdé. 

Hag  hen  kassas  d'ar  geginn,  lec'h  ma  oa  ur  pot-houarn  braz-braz  war  ann 
tan  :  —  Sell  azé  ur  pot-houarn  hag  a  renki  dewi  indan-han  diou  gordenn- 
goad  bemdez;  ha  na  euz  forz  petra  a  glewi  en-han,  na  selaou  ket,  ha  gra 
tan  bépred.  Eomp  breman  d'ar  marchosi.  Sell  azé  ur  gazek  treut,  hag  ur 
fagodenn-spern  dira-z-hi,  cl  lec'h  mclchon.  Met  ur  pred-all  a  défé  c'hoaz. 
Sell  aman  ur  vaz  gargal  ewit  hi  dorna,  ken  a  c'houezi.  Kommcr  ar  vaz,  ha 
gwelomp  ha  te  a  oar  skei. 

Ha  Koadalan  da  skei  war  al  loen-paour  euz  he  wella. 

—  Mad,  mad,  na  sko'és  ket  fall.  —  Breman  a  weles  aman  un  eubeul 
iaouank,  hag  a  vo  rèd  d'id  rei  melchon  ha  kerc'h  d'ehan,  kement  ha  ma  karo 
debri.  —  Eomp  breman  d'ar  c'hambrjo.  Sell  aman  unan  ha  na  digori 
ket,  ha  hoinan-all  ken-neubeud.  Sell  mad,  rag  mar  tigwezfé  d'id  digori 
unan  ann  diou  gambr-se,  gwaleur  d'id!  Ar  re-all  holl  a  c'halli  da  digori  ha 
baie  dré  ar  c'hastell  ével  ma  kâri. 

Pa  hen  doe  lâret  kement-se  holl,  cc'h  eaz-knit. 

—  Arsa  en  ti  biou  on-mc  aman  iwcf'  En  ti  ann  Diaoul,  martézc.  Met 
gwelomp  da  genta  hag  a  ve  gwir  ar  pez  hen  euz  lâret  euz  he  zerviedenn. — 
Serviedenn,  gra  da  dever!  Digass  d'in  kig-moc'h,  ha  rost,  ha  gistr  mad  ha 
gwinn!  —  Ha  kerkent  a  cm  gavas  ann  trco-sc  holl  war  ann  daol. 


Koadalan.  109 

—  Où  vas-tu  comme  cela,  mon  garçon  ?  lui  dit  encore  celui-ci. 

—  Voyager,  pour  chercher  à  gagner  mon  pain. 

—  Voudrais-tu  venir  avec  moi .-' 

—  Volontiers. 

—  Sais-tu  lire  ? 

—  Non  certainement;  mon  père  est  trop  pauvre  pour  m'envoyer  à 
l'école. 

Le  seigneur  le  saisit  alors  et  s'éleva  avec  lui  en  l'air,  très-haut.  Il  des- 
cendit près  d'un  beau  château,  dans  une  grande  avenue,  où  Koadalan 
fut  bien  surpris  de  voir  écrit  sur  les  feuilles  des  arbres  :  —  Celui  qui 
entre  ici,  n'en  sort  plus.  Ce  qui  lui  donna  l'envie  de  s'en  aller  ;  mais 
comment.?  Ils  entrent  ensemble  dans  le  château;  ils  mangent  ensemble 
et,  après  le  souper,  Koadalan  dort  bien  dans  un  lit  de  plume. 

Le  lendemain  matin,  le  seigneur  lui  dit  : 

—  Or  ça,  mon  garçon,  je  vais  partir  maintenant  pour  un  voyage  que 
j'ai  à  faire.  Tu  resteras  seul  ici  pendant  un  an  et  un  jour.  Rien  ne  te  man- 
quera dans  cette  maison.  Voici  une  serviette  et,  quand  tu  voudras  man- 
ger ou  boire,  tu  n'auras  qu'à  lui  dire  :  «  Serviette,  fais  ton  devoir; 
apporte-moi  telle  ou  telle  chose  !  »  et  aussitôt  arrivera  ce  que  tu  auras 
demandé.  Maintenant,  suis-moi,  pour  que  je  te  montre  ton  travail  de 
chaque  jour. 

Et  il  le  conduisit  d'abord  à  la  cuisine,  où  il  y  avait  une  grande  marmite 
sur  le  feu.  —  Voilà  une  marmite  sous  laquelle  il  te  faudra  brûler  deux 
cordes  de  bois  par  jour,  et  n'importe  ce  que  tu  y  entendras,  n'écoute  pas 
et  fais  toujours  du  feu.  Allons  maintenant  à  l'écurie.  Voilà  une  jument 
maigre  qui  a  devant  elle  un  fagot  d'épine,  en  guise  de  trèfle.  Mais  on 
lui  donne  encore  un  autre  régal.  Voici  un  bâton  de  houx  avec  lequel 
tu  la  battras,  jusqu'à  ce  que  tu  sues.  Prends  le  bâton,  et  voyons  si 
tu  sais  frapper. 

Et  voilà  Koadalan  de  battre  la  pauvre  bête,  de  toutes  ses  forces. 

—  Bien,  bien!  tu  ne  frappes  pas  mal.  Tu  vois  ici,  à  présent,  un  jeune 
poulain  auquel  il  faudra  donner  du  trèfle  et  de  l'avoine  autant  qu'il  en 
voudra  manger.  Allons  maintenant  voir  les  chambres.  En  voici  une  que 
tu  n'ouvriras  pas;  ni  cette  autre  non  plus.  Regarde  bien,  car  si  tu 
venais  à  ouvrir  une  de  ces  deux  chambres,  malheur  à  toi!  Toutes  les 
autres,  tu  pourras  les  ouvrir  et  te  promener  partout  dans  le  château. 

Après  avoir  fait  toutes  ces  recommandations,  le  seigneur  partit. 

—  Or  ça,  chez  qui  donc  suis-je  ici  ^  se  dit  alors  koadalan;  chez  le 
Diable,  peut-être  ?  Mais,  voyons  d'abord  si  ce  qu'il  m'a  dit  de  sa  ser- 
viette est  vrai.  —  Serviette,  fais  ton  devoir!  apporte-moi  du  lard  et  du 


110  Koadalan. 

—  Hoïa!  a-vad,  a  laras  neuze,  mad  co  ann  dro!  Em  vczwi  a  reaz,  hag  a 
chommas  kousket  war  ann  daol.  Pa  dihunas,  en-bezr  :  —  Poent  braz  eo 
d'in,  éméhan,  ober  ma  labour! 

Ha  setu-han  da  ober  tan,  un  ian-ifern,  indan  ar  pot-houarn-braz.  Hag 
a  klewé  ebars  un  drouz  vraz  ével  huanado  ha  klemmo  ineo  en  poan.  Met  na 
rez  ket  a  galz  van,  hag  ec'h  eaz  neuzé  d'ar  marchosi.  —  Rei  a  ra  melchon 
ha  kerc'h  d'ann  eubeul  iaouank,  ha  goudé  a  km  he  chupenn,  a  krog  er  vaz 
gargal,  hag  a  em  laka  da  dorna  Théréza  euz  he  wella.  {Théréza  a  oa  hano 
ar  gazek  treut.) 

—  Paoues,  den-jall!  bez  truez  ouzin!  a  lâr  ar  gazek. 

—  Petra,  c'hui  a  gomz  iwé? 

—  la,  rag  me  na  on  ket  bel  a  bep-amzer  ur  gazek  eveî  ma  'z  on  breman, 
siouas  ! 

—  En  ti  biou  ec^h  on  aman  iwé  éta,  ma  komz  al  loened  ével  ann  dut? 

—  En  ti  brasa  majisian  a  zo  war  ann  douar,  ha  mar  na  gares  diwall,  a- 
benn  un  dezhag  ur  bloaz  a  cVwarvezo  ganid  evelganen,  ha  martéze  gwasoc'h 
clioaz. 

—  Ha  na  ve  ket  gallet  kavoud  ann  tu  da  em  dcnna  a-c'hanf' 

—  Diez  a  vé  ;  ha  koulzgoudé  ma  karfes  ober  holl  evel  ma  lârin  d'id,  ec^h 
halfemp  martézé  em  denna  c'hoaz  euz  a  grabano  ann  Diaoul-sé. 

—  Lâret  d'in  buhan,  rag  me  a  zo  prest  da  ober  holl  ewit  mont  a-c'hann. 

—  Ké  prim  d'ann  diou  gambr  a  zo  difennet  ouzid  ho  digori,  hag  a  kavi 
eno  tri  levr  ruz,  daou  en  unan,  unan  en  ében.  Digass  ganid  ann  tri  levr-se, 
hag  evel  ma  ouzoud  lenn,  a  vi  gant-he  brasa  majisian  a  zo  war  ar  bed,  ha 
mestr  ar  c'hastell-man  a  gollo  gant-hé  he  holl  c'halloud. 

Mont  a  ra  Koadalan  d'ann  diou  gambr  difennet,  hag  a  tigass  gant-han 
ann  tri  levr  ruz. 

—  Mad!  émé  Dereza;  lenn  breman  al  levrio. 

Lenn  a  ra,  ha  dre  ma  lenné,  a  wélé  treo  sponiuz,  heuzuz;  met  dcski  a  re 
iwe  a  bep-seurt  treo,  ha  dreist-lioll  ann  tu  da  em  drei  er  stumm  hag  en  doaré 
ma  karjé. 

—  Breman,  émé  Déréza,  a  zo  un  aigl  azé  war  ann  tour  brasa,  hag  hen- 
nés, pa  hon  gwelo  o  partia,  a  em  lako  da  ober  kement  a  drouz  gant  he 
diou-eskel,  ha  da  grial  ken  krenv,  ma  klewo  ar  majisian,  na  euzforz  pelec'h 
a  vo,  hag  a  teuio  d'ar  gèr  kerkent.  Rèda  vo  did  erre'i  d'ehan  he  diou-eskel 
hag  he  benn  être  he  diouskar.  Kousket  eo  breman. 


Koadalan.  1 1 1 

rôti,  et  de  bon  cidre  et  du  vin!  Et  aussitôt  tout  cela  se  trouva  sur  la 
table. — A  merveille!  dit-il  alors,  tout  va  bien.  Et  il  s'enivra  et  s'endormit 
sur  la  table.  Quand  il  se  réveilla  :  Il  est  grand  temps,  se  dit-il,  que  je 
me  mette  à  l'ouvrage! 

Et  le  voilà  de  faire  du  feu,  un  feu  d'enfer,  sous  la  grande  marmite. 
Et  il  y  entendait  un  bruit  étrange,  comme  des  soupirs  et  des  plaintes 
d'âmes  en  peine.  Mais  il  s'en  inquiéta  peu,  et  il  se  rendit  à  l'écurie.  Il 
donna  du  trèfle  et  de  l'avoine  au  jeune  poulain,  puis  il  ôta  sa  veste, 
prit  le  bâton  de  houx  et  se  mit  à  battre  Thérèse  de  son  mieux.  (C'était 
le  nom  de  la  jument  maigre. 

—  Arrête,  méchant,  aie  pitié  de  moi!  cria  la  jument. 

—  Comment,  vous  parlez  donc  aussi,  vous  ? 

—  Oui,  car  je  n'ai  pas  été  toujours  une  jument,  comme  je  le  suis 
maintenant,  hélas! 

—  Chez  qui  donc  suis-je  ici,  où  les  bêtes  parlent  comme  les  hommes? 

—  Chez  le  plus  grand  magicien  qui  soit  sur  la  terre,  ..et  si  vous  ne 
voulez  prendre  bien  garde,  il  vous  arrivera  comme  à  moi-même,  et  peut- 
être  pis  encore. 

—  Et  ne  peut-on  donc  sortir  d'ici  ? 

—  C'est  difficile  ;  et  pourtant  si  vous  voulez  faire  comme  je  vous 
dirai,  peut-être  pourrions-nous  échapper  tous  les  deux  à  la  griffe  de  ce 
démon. 

—  Dites-moi,  vite,  car  je  suis  prêt  à  tout  faire  pour  sortir  d'ici. 

—  Allez  aux  deux  chambres  qu'on  vous  a  défendu  d'ouvrir,  et 
vous  trouverez  là  trois  livres  rouges,  deux  dans  une  des  chambres,  un 
seul  dans  l'autre.  Prenez  et  emportez  ces  trois  livres,  et,  puisque  vous 
savez  lire,  avec  eux,  vous  serez  vous-même  le  plus  grand  magicien  du 
monde,  et,  en  les  perdant,  le  maître  de  ce  château  perdra  aussi  tout  son 
pouvoir. 

Koadalan  se  rendit  aux  deux  chambres  défendues  et  prit  les  trois 
livres  rouges. 

~  Bien!  dit  Thérèse;  lisez  à  présent  ces  livres. 

Koadalan  se  mit  à  lire,  et,  à  mesure  qu'il  lisait,  il  voyait  des  choses 
effrayantes,  horribles;  mais  il  apprenait  aussi  toutes  sortes  de  secrets, 
et  surtout  la  manière  de  prendre  telle  forme  et  telle  ressemblance  qu'il 
lui  plairait. 

—  Maintenant,  reprit  Thérèse,  il  y  a  là  un  aigle  au  sommet  de  la 
plus  grande  tour,  et  celui-là  en  nous  voyant  partir  fera  un  tel  vacarme 
avec  ses  ailes  et  poussera  des  cris  si  retentissants,  que  le  magicien  l'en- 


112  Koadalan. 

Mont  a  ra  Koadalan  da  glask  kerdenn  da  erreï  he  diou-eskel  hag  he  benn 
d'ann  aigl,  hag  a  teu  are  da  gavoud  Thérésa. 

—  Breman  a  vo  rèd  d'id  lakad  ann  tan  en  ur  bern-koad  a  seiz-ugent 
kordenn  a  zo  azé  bars  ar  porz. 

Lakad  a  ra  ann  tan  er  c'hoad,  ha  seîu  un  tan-if ern! 

—  Breman  a  zo  azé  ur  c'hloc'h,  hag  a  zôn  anehan  he  unan,  pa  c^hoarve 
un  dra-bennag  a  newez  er  cViastell,  hag  a  vo  rèd  d^id  hen  dideoda  hag  hen 
stoufa  neuze  gant  stoup. 

Dideoda  a  ra  Koadalan  ar  c'hloc'h,  hag  hen  stoufa  gant  stoup. 

—  Breman,  ewit  dont  da  vea  ur  Prinz  kaer,  kerz  da  walc'hi  da  benn  en 
ur  feunteun  a  zo  azé  en  traon  ar  porz. 

Gwalc'hi  a  ra  he  benn  er  feunteun,  ha  kerkent  he  vleo  a  deu  da  vea  alaouret 
holl. 

—  Breman  stag  d'in  plouz  ha  stoup  indan  ma  zreid,  'wit  na  rin  ket  a 
drouz  war  bave  ar  porz,  o  vont-kuit. 

Ober  a  ra  h  are. 

—  Tap  breman  ann  éponj,  ann  torch-plouz  hag  ar  skrivell,  —  ha  dreist- 
holl  na  ankouaz  ket  ann  tri  levr  ruz.  —  Gret  eo. 

Pign  war  ma  c'hcin  breman  hag  eomp-kuit  buhan. 
Ann  aigl  na  hell  ket  kriall,  ar  c'hloc'h  na  zôn  ket  iwé,  ha  setu-int  o  vont 
d'ann  daou-lamp  ruz! 

Pa  oant  et  ur  pennad,  a  lâr  Theresa  da  Koadalan. 

—  Sell  war  da  lerc'h;  na  weles  netra  o  tont? 

—  Eo;  ur  bagad  chass;  hag  a  réd,  hag  a  réd! 

—  Toi  buhan  ann  torch-plouzwa  da  lerc'h. 

Teurrel  a  ra  ann  torch-plouz,  hag  ar  chass  a  lamp  warnehan  hag  a  réd 
d'hen  kass  d'ar  gèr. 

—  Sell  war-da-lerc'h,  —  a  lâr  are  Thérésa  ur  pennadig  goudé,  na  weles 
netra  / 

—  Nann  sur,  met  ur  goummoulenn  a  deu  war-n-omp,  hag  a  zo  ker  du, 
ma  téféla  ann  dé  gant-hi. 

—  Ar  majisian  a  zo  en  kreiz  ar  goummoulcnn-se !  toi  buhan  ar  skrivel. 
Teurrel  a  ra  ar  skrivel,  hag  ar  majisian  a  ziskenn  euz  ar  goummoulenn,  he 

zap  hag  ec'h  a  d'he  c'hass  d'ar  gèr. 

—  Sell  c'hoaz  war  da  lerc'h,  a  lâr  are  Thérésa,  ur  pennadig  goudé,  na 
weles  netra  ^ 

—  Eo!  ur  bagad  brini,  hag  a  deu  war-n-omp  a  dcnn-askel! 

—  Toi  buhan  ann  éponj! 


Koadalan.  115 

tendra,  n'importe  où  il  sera,  et  il  accourra  aussitôt.  Il  faut  lui  lier  les  ailes 
et  la  tête  entre  ses  jambes.  Il  dort  à  présent. 

Koadalan  alla  chercher  des  cordes,  pour  lier  les  ailes  et  la  tête  de 
l'aigle,  puis  il  revint  vers  Thérèse. 

—  Maintenant  il  faut  mettre  le  feu  à  un  tas  de  bois  de  cent  quarante 
cordes  qui  est  là  dans  la  cour. 

Koadalan  mit  le  feu  au  tas  de  bois,  et  voilà  un  feu  d'enfer  ! 

—  Il  y  a  encore  là  une  cloche  qui  sonne  d'elle-même,  quand  il  y  a 
quelque  chose  de  nouveau  au  château  ;  il  faut  lui  enlever  la  langue  (le 
battant),  puis  la  bourrer  d'étoupe. 

Koadalan  enleva  la  langue  de  la  cloche  et  la  bourra  d'étoupe. 
'     —  Maintenant,  pour  devenir  un  beau  prince,  allez  vous  laver  la  tête 
dans  l'eau  d'une  fontaine  qui  est  là  au  bas  de  la  cour. 

Il  se  lava  la  tête  à  la  fontaine,  et  aussitôt  ses  cheveux  devinrent  d'or. 

—  Maintenant,  garnissez  mes  pieds  de  paille  et  d'étoupe,  pour  que 
je  ne  fasse  pas  de  bruit  sur  le  pavé  de  la  cour,  en  partant. 

Il  fait  encore  cela. 

—  Prenez  maintenant  l'éponge,  le  bouchon  de  paille  et  l'étrille,  et 
surtout  n'oubliez  pas  les  trois  livres  rouges.  —  C'est  fait.  —  A  présent, 
montez  sur  mon  dos,  et  partons,  vite. 

L'aigle  ne  peut  plus  crier,  ni  la  cloche  sonner,  et  ils  partent  au  triple 
galop  (littéralement  :  galop  rouge). 
Au  bout  de  quelque  temps,  Thérèse  dit  à  Koadalan  : 

—  Regardez  derrière  vous;  ne  voyez-vous  rien  venir? 

—  Si,  une  meute  de  chiens;  et  ils  courent,  ils  courent! 

—  Jetez,  vite,  le  bouchon  de  paille  derrière  vous. 

Il  jette  le  bouchon  de  paille,  et  les  chiens  sautent  dessus  et  courent  le 
porter  au  château. 

—  Regardez  encore  derrière  vous,  dit  Thérèse  un  moment  après;  ne 
voyez-vous  rien  ? 

—  Je  ne  vois  qu'un  nuage  qui  vient  sur  nous,  et  il  est  si  noir  que  le 
jour  en  est  obscurci  ? 

—  Le  magicien  est  au  sein  de  ce  nuage!  Jetez,  vite,  l'étrille  derrière 
vous. 

Il  jette  l'étrille;  le  magicien  descend  du  nuage,  la  prend  et  la  porte  au 
château. 

—  Regardez  encore  derrière  vous,  dit  encore  Thérèse  un  moment 
après,  ne  voyez-vous  rien  .? 

—  Si,  une  bande  de  corbeaux  qui  viennent  sur  nous  à  tire  d'aile. 

—  Jetez,  vite,  l'éponge  ! 

8 


114  Koadalan. 

Teurrel  a  ra  ann  cponj,  hag  ecli  a  ar  brini  d'hen  kass  d'ar  c'hastell. 
Skiiiza  a  ré  Thérésa  baour;  met  Icun  a  ou  a  galon. 

—  N^hon  eux  ken  nemet  c'houezek  lew  da  ober,  emehi,  ewit  tapout  ar 
sier,  ha  mar  gallomp  hi  zrémenn,  ez  oinp  zalwet,  rag  nVien  défo  galloud 
a-bed  neuzé  ar  majisian  war-n-omp;  met  sell  bepred  war  da  lerc'h;  na 
weles  nétra? 

—  £o,  ma  Doué!  m  c'hi-barbet  da  war  lion  zeulio  ! 

Pa  oa  Thérésa  o  lampad  bars  ar  ster,  a  oa  iwe  ar  c'hi-barbet  du  o  kregi 
en  hé  lost,  ken  a  chommas  gant-han  leiz  he  c'heno  a  reun.  Met  un  tammig 
re-divezad  a  oa  ! 

—  Un  toi  mad  eo  d'id,  eméhan,  o  skrigna  he  dent,  bea  et  diwar  ma 
douar! 

—  la,  met  breman  me  a  ra  goap  anout,  ha  da  dri  levr  ruz  a  zo  ganen! 

—  la,  siouas!  met  ar  re-se  a  deuio  c'hoaz  d\ir  gèr. 

—  Gwelet  a  vo  / 

Hag  ar  majisian  d'ar  gèr  neuzé,  fuloret  braz  hag  oc'h  ober  tan  ha 
kurun  ! 

Ann  daou-man  a  dalc'h  da  vont  bépred,  met  war  ho  jouez  breman,  hag 
hep  née' hamant  a-bed.  Pa  oent  digwêt  en  ur  c'hoad,  e-kichennurroc'hellvraz- 
vraz,  Thereza  a  gromzas  évelhenn  : 

—  Bréman  a  vo  rèd  d'id  ma  lac' ha. 

—  Jezuz!  petra  a  laret?  bikenn  n'am  bô  a  galon  da  ober-se. 

—  Rèd  a  vô  hen  ober,  pa  laran  d'id,  pé  na  àalveo  netra  holl  kement  hon 
euz  gret  bété  vréman.  Diwad  an-hon  dré  ma  gouk,  digor  neuzé  ma  c'hôf,  hag 
a  weli  petra  a  c'hoarveo. 

Lac'ha  a  ra  Koadalan  Thereza,  digcrri  a  ra  d'chi  he  c'hoj,  ha  kerkent  a 
well  0  tont  e-meaz  hag  o  sével  en  hé  gichenn  ur  brinses  ar  gaera. 

—  Mé,  éméhi,  a  zo  merc'h  d'ar  roue  Naplez;  met  mé  n'oun  kct  cwit-oud; 
kaeroc'h  ewit-on  a  tlé  bea  da  bried,  merc'h  ar  roue  Spagn.  Met  na  euz  forz 
pegoulz  as  po  ezomm  a  zikour,  deuss  aman  étal  arroc'hell-man,  lâr  ter  gwez: 
Théréza!  Théréza!  Théréza!  hag  a  teuin  kerkent. 

Kimiadi  a  reont  neuzé  ann  eill  euz  égilé,  en  ur  ocla.  Met  lezomp  breman 
ar  brinses,  ha  hcuillomp  Koadalan. 

—  Ar  pez  am  euz  da  ober,  a  laras  neuzé  d'ehan  he-unan,  eo  mont  étrézeg 
ar  Spagn,  pa  eo  gwir  eman  eno  danvez  ma  fried.  Met  dré  bélec'h  ?  pa  na 
ouzon  hent  a-bed. 

Hen  cm  wiska  a  ra  evel  ur  prinz  {gant  hé  dri  levr  ruz,  a  oa  chommet 


Koadalan.  115 

Il  jette  l'éponge  ;  et  les  corbeaux  vont  la  porter  au  château. 
Cependant   la  pauvre  Thérèse   était  bien  fatiguée;   mais  elle  était 
pleine  de  courage. 

—  Nous  n'avons  plus  que  seize  lieues  à  faire,  dit-elle,  pour  atteindre 
la  rivière,  et  si  nous  pouvons  la  passer,  nous  serons. sauvés,  car  alors  le 
magicien  n'aura  plus  aucun  pouvoir  sur  nous  ;  mais  regardez  encore 
derrière  vous,  ne  voyez-vous  rien? 

—  Si,  mon  Dieu  !  un  chien  barbet  noir  qui  est  sur  nos  talons  ! 

Au  moment  où  Thérèse  sautait  dans  la  rivière,  le  barbet  noir  mordait 
à  sa  queue,  si  bien  qu'il  lui  en  resta  des  crins  plein  la  bouche  !  Mais  il 
était  un  peu  trop  tard  ! 

—  Tu  es  bienheureux,  dit-il,  en  montrant  les  dents,  d'être  sorti  de 
mes  terres  ! 

—  Oui,  répondit  Koadalan,  mais  maintenant  je  me  moque  de  toi,  et 
j'ai  tes  trois  livres  rouges. 

—  Oui,  malheureusement;  mais  ces  livres-là  reviendront  à  la  maison. 

—  Nous  verrons  bien  cela. 

Et  le  magicien  partit  en  fureur,  faisant  feu  et  tonnerre  ! 

Koadalan  et  Thérèse  continuent  leur  chemin,  mais  tout  à  leur  aise 
maintenant,  et  libres  de  tout  souci.  Arrivés  près  d'une  grande  pierre, 
dans  un  bois,  Thérèse  parla  ainsi  : 

—  Maintenant  il  vous  faudra  me  tuer. 

—  Dieu!  que  dites-vous  là.?  Je  n'aurai  jamais  le  courage  de  faire 
cela. 

—  Il  faudra  me  tuer,  vous  dis-je,  ou  tout  ce  que  nous  avons  fait  jus- 
qu'à présent,  sera  peine  perdue.  Saignez-moi  au  cou,  ouvrez-moi 
ensuite  le  ventre,  puis  vous  verrez  ce  qui  arrivera. 

Koadalan  tue  Thérèse,  il  lui  ouvre  le  ventre  et  est  bien  surpris  d'en 
voir  sortir  une  princesse  d'une  beauté  merveilleuse! 

—  Je  suis,  lui  dit  celle-ci,  la  fille  du  roi  de  Naples;  mais  je  ne  vous 
suis  pas  destinée;  une  autre,  bien  plus  belle  que  moi,  sera  votre  femme, 
la  fille  du  roi  d'Espagne.  Mais  n'importe  en  quelle  occasion  vous  aurez 
besoin  de  secours,  venez  ici  et  dites  trois  fois  :  «  Thérèse  !  Thérèse  ! 
Thérèse!  et  j'arriverai  aussitôt. 

Ils  se  font  alors  leurs  adieux,  les  larmes  aux  yeux.  Mais  laissons 
maintenant  la  princesse,  et  suivons  Koadalan. 

—  Ce  que  j'ai  de  mieux  à  faire  à  présent,  se  dit-il  à  lui-même, 
c'est  de  me  diriger  vers  l'Espagne,  puisque  c'est  là  que  se  trouve  celle 
qui  doit  être  ma  femme.  Mais  quel  chemin  prendre  ? 

Il  s'habille  alors  en  prince  (avec  ses  trois  livres  rouges,  qu'il  avait 


ii6  Koadalan. 

gant-han,  a  ré  ével  ma  karê)  hag  a  tigwez  hep-dalé  er  Spagn.  Mont  a  ra 
raktal  d'ar  paies,  hag  a  c'houlenn  komz  gant  ar  roue.  Ar  roue  hen  digom- 
iner  mad,  dré  ma  sonjé  gant-han  a  oa  mah  ar  roue  Franz,  he  niz,  a 
hehini  hen  defoa  kommerret  ar  strumm  hag  ann  neuz. 

Daoïi  pe  dri  dé  goudé  ma  oa  oa  digwêt,  pa  oa  un  dez  o  valé  dre  ar  jar- 
dinn  gant  ar  Roue,  a  c'houlennas  diout-han  : 

—  Petra,  ma  eontr,  me  a  sonjé  d'in  penoz  ho  poa  ur  verc'h  iwé  ? 

—  Nann  a  vad,  ma  niz,  n'am  euz  merc'h  a-hed. 

Bea  hen  defoa  unan,  met  na  c'houlenné  ket  a  vijé  gouvéet,  hag  hen  defoa 
hi  dastummet  en  un  tour,  gant  ur  plac'h  ar  gamin.  Ur  wez  bemdez  ec'h  ee 
da  welet  he  verc'h,  met  na  ee  den  a-hed  nemet-han. 

Ann  dewarlec'h  pa  oa  Koadalan  o  valé  are  bars  ar  jardinn  gant  he  éontr, 
a  oe  souezet  o  welt  ur  voul-aour  o  ruillal  war  ann  aie  hag  o  tont  da  stoka 
euz  beg  he  votez. 

—  Petra  eo  ar  voul-aour-man,  éméhan? 

—  Netra,  eméar  roue. 

—  Boul  aour  he  verc'h  a  oa,  péhini  a  oao  c'hoari  war  lein  ann  tour  gant  hc 
flac'h  ar  gambr,  hag  a  defoa  tolet  he  boul  d'ann  traon,  pa  defoa  gwelet  ur 
prinz  kaer  o  vale  er  jardinn  gant  he  zad.  Koadalan  hen  defoa  gwelet  anchi 
iwé.  —  N'euzforz,  éméhan,  abred  pe  diwezad  me  a  gavo  ann  tu  da  gomz 
gant-hi. 

Sével  a  ra  ann  noz-se  da  anter-noz,  ha  gant  he  levrio  a  kav  ann  tu  da 
vont  béteg  he  dor,  hep  bea  gwelet  na  klevet  gant  nikun.  Skei  a  ra  war  ann 
or:  tok!  tok!  tok! 

—  Aman  na  ve  digoret  da  den;  piou  oc'h-c'hui? 

—  Mab  ar  roue  Franz. 

—  Mab  ar  roue  Franz,  ma  cVienderv!  ncuzé  a  vo  digoret  d'ac'h. 

Hag  a  tigoras  dchan,  hag  a  em  bokjont  evel  kenderv  ha  keniterv,  hag  a 
chommas  gant-hi  en  he  c'hambr  bete  ma  tarzas  ann  dé.  Hag  a  boe,  a  tcuc 
bebnoz,  bebnoz,  ha  den  na  wié  nctra.  Setu  ma  em  gav  dougéres  ar  brinscs. 
Ar  roue  ac'h  ée  bemdez  iwé  d'hi  gwelet  hag  evel  ma  kavé  a  wella'é,  a  lâras 
dehi  un  dé  : 

—  Vad  a  ra  ho  poued  d'ac'h,  ma  mercVi. 

—  la  sur,  ma  zad  ;  ha  neuzé  n'am  euz  more' lied  gant  netra. 

Dont  a  ra  ann  amzer  iwé  ma  renk  gwillioudi,  hag  a  c'han  ur  mab  bihan 
ar  c'haera.  Met  setu  pa  deu  a  roue,  evel  bemdez,  ha  pa  wel  ur  bugel  bihan 
en  ur  c'hawel,  hag  he  verc'h  klanv  en  hé  gwélé,  ez  eo  terrupl  fuloret,  hag 


Koadalan.  117 

conservés,  il  faisait  tout  ce  qu'il  voulait),  et  il-  se  trouve  sans  tarder -en 
Espagne.  Il  se  présente  aussitôt  au  palais  du  roi  et  demande  à  lui  parler. 
Le  roi  lui  fait  bonne  réception,  parce  qu'il  le  prend  pour  son  neveu,  le 
fils  du  roi  de  France,  dont  Koadalan  avait  pris  la  mine  et  les  manières. 
Deux  ou  trois  jours  après  son  arrivée,  comme  il  se  promenait  un  jour 
avec  le  roi  dans  son  jardin,  il  lui  demanda  : 

—  Comment,  mon  oncle,  je  croyais  que  vous  aviez  une  fille  ? 

—  Non,  mon  neveu,  je  n'ai  pas  de  fille. 

Il  en  avait  une,  mais  il  ne  voulait  pas  qu'on  le  sût,  et  il  la  tenait 
enfermée  dans  une  tour  avec  une  femme  de  chambre.  Il  allait  la  voir 
une  fois  par  jour;  mais  il  allait  toujours  seul. 

Le  lendemain,  quand  Koadalan  était  encore  à  se  promener  dans  le 
jardin  avec  son  oncle,  il  fut  tout  étonné  de  voir  une  boule  d'or  rouler  sur 
l'allée  et  venir  heurter  contre  son  pied. 

—  Qu'est-ce  que  cette  boule  d'or  ?  dit-il. 

—  Ce  n'est  rien,  répondit  le  roi. 

C'était  la  boule  d'or  de  sa  fille,  qui  jouait  aux  boules  avec  sa  femme 
de  chambre  sur  la  plateforme  de  sa  tour  et  qui  avait  jeté  cette  boule  à 
dessein  dans  le  jardin,  quand  elle  avait  vu  le  beau  prince  qui  s'y  pro- 
menait avec  son  père.  Koadalan  aussi  avait  remarqué  la  princesse.  — 
Tôt  ou  tard,  se  dit-il,  je  trouverai  moyen  de  lui  parler. 

Il  se  lève  à  minuit,  et,  grâce  à  ses  livres,  il  arrive  à  la  porte  de  la 
chambre  de  la  princesse,  sans  être  vu  ni  entendu  de  personne.  Il  frappe 
à  la  porte  :  tok!  toki... 

—  Ici  on  n'ouvre  à  personne.  Qui  êtes-vous  ? 

—  Le  fils  du  roi  de  France. 

—  Le  fils  du  roi  de  France,  mon  cousin  !  alors  l'on  va  vous  ouvrir. 

Et  la  princesse  lui  ouvrit,  et  ils  s'embrassèrent  comme  cousin  et  cou- 
sine, et  il  resta  avec  elle  dans  sa  chambre  jusqu'au  point  du  jour.  Et, 
dans  la  suite,  il  y  revint  chaque  nuit,  sans  que  personne  en  sût  rien. 
Mais  la  princesse  se  sentit  bientôt  mère.  Le  roi  continuait  de  la  visiter 
tous  les  jours  et,  remarquant  qu'elle  prenait  de  l'embonpoint,  il  lui  dit 
un  jour  : 

—  Votre  nourriture  vous  profite,  ma  fille. 

—  Oui,  sûrement,  mon  père;  et  puis,  je  n'ai  souci  de  rien. 

Le  temps  arrive  où  il  lui  faut  accoucher,  et  elle  donne  le  jour  à  un 
fils,  un  enfant  superbe.  Quand  vient  le  roi,  selon  son  habitude,  et  qu'il 
voit  l'enfant  dans  son  berceau,  et  sa  fille  malade  dans  son  lit,  il  entre 
dans  une  colère  terrible,   et  il  part  en  jurant.  Malgré  tout,  il  n'en  dit 


!i8  Koadakn. 

ec'h  a-kuit,  o  toui-Doué.  Na  lâr  netra  wit-sé  d'he  niz.  Met  vcl  ma.  oa  dent 

da  vea  trist  ha  morc^heduz,  heman  a  lâras  d'ehan  un  dé  : 

—  Perag  ma  eontr,  ma  ';  oc' h  evel-se  trist  ha  morc'heduz  ur  pennad  ':o? 

—  Allas!  urverc'h  am  euz,  hag  am  boa  hi  fhazet  cuz  ann  holl;  den  na 
wélé  anehi,  német-hon  hag  he  flac'h  argambr,  ha  kolzgoudé  a  deûz  ganetur 
mab  ! 

—  la,  ma  eontr,  ha  me  eo  tad  ar  bugel,  hag  a  c'hoidcnnan  diganac'h 
he  vamm  da  bried. 

—  Mal  pa  eo  gret  ann  toi,  gwella  am  euz  da  ober,  eo  hi  rei  d'id,  ha 
gwelloc'h  eo  ganen  a  ve  te  ewit  un-all. 

Ma  oe  gret  ann  eured  raktal.  Met  ar  roue  koz  na  rez  kenjoa  a-bed,  goude  se. 
Prestig  goudé  a  teuas  da  werwel,  hag  a  oe  laket  Koadalan  da  roue  en  he 
lec'h.  Met  hema  na  blije  ket  kaer  ar  vuhe-se  d'éhan,  hag  a-benn  ur  bloaz  a 
c'hoantaas  distrei  d'he  vro.  Evel  ma  oa  he  levrio  gant-han  bepred,  a  c'houlenn 
ur  c'haron:  kaer,  péhini  a  diskenn  kerkent  euz  ann  er.  Mont  a  reont  ho  zri 
ebars,  lie  vroeg,  he  vugel  hag  hen,  hag  ar  c'haronz  a  sav  are  en  èr,  uhel, 
evel  un  aigl.  Ma  tigwez  d'éhan  trémen  abiou  da  gastell  ar  majisian  braz 
Foukes.  Heman  a  oa  o  chomm  en  ur  c'hastell-aour  dalc'het  gant  péder  cha- 
denn  aour  ha  péder  chadenn  arc'hant  être  ann  env  hag  ann  douar.  Foukes  a 
oa  en  he  brennestr,  hapa  wel  Koadalan  o  trémen  en  he  garonz,  a  ped  anéhan 
da  diskenn  un  tammig.  Foukes  hen  defoa  esaét  iwé  kaout  merc'h  ar 
roue  Spagn,  met  n'hen  defoa  ketgallet,  ha  pa  hi  gwelas  o  trémen,  hen  defoa  hi 
anavéet  raktal.  Koadalan,  pehini  n'hen  defoa  disfianz  a  netra,  a  diskennas 
gant  plijaduren  kastell  Foukes,  hag  heman  hen  degommerras  mad.  Goudé  koan, 
a  oe  laket  da  gousket  gant  he  bried  en  ur  gambr  kaer,  hag  ar  bugel  a  oe  roét 
da  ur  vagéres.  Met  allas  !  a-rok  mont  en  he  wélé  ec'h  ankouaas  lakâd  he 
levrio  indan  he  bluek,  ha  pa  dihunas,  ann  dewarlec'h  ar  beure,  a  oant  laeret 
gant  Foukes!  setu-han  glac'haret,  ar  paour  kez.  Foukes  hen  tolaz  en  ur 
punz  don-don  (ouspem  ul  Icw  a  dondcr  hen  defoa),  hag  a  koucas  dre  eno  en 
kreiz  ur  c'hoad  braz. 

—  Arsa  ma  Doue,  a  lâras  ncuzé,  pclec'h  on-mé  aman!'  Ha  pctra  a  rin- 
mé  breman,  pa  eo  kollet  ganen  ma  levrio  ?  Hag  ar  pcz  a  togwasa,  ma  groeg  lui 
ma  bugel  a  zo  cliommet  invé  gant  Foukes, anntrubard  milligct!  kollet  sur  'on  ar 
wez-man.  Mar  am  bijè  gallet  c'hoaz  kavoud  ar  c'hoad  lec'h  ma  kimiadis 
euz  Thérésa!  Met  pelec'h  eman  ar  c'hoad-sé? 

Bâlé  a  ra  dre  ar  c'hoad,  ha  na  wcl  na  dcn  na  loen.  Digwezoud  a  ra  ann 
noz,  hag  a  kousk,  harp  hc  benn  cuz  ur  roc'hell-vraz  goloét  a  spoen.  Pa  deu 


Koadalan.  119 

rien  à  son  neveu.  Mais,  comme  il  était  devenu  triste  et  soucieux,  celui-ci 
lui  demanda  un  jour  : 

—  Pourquoi',  mon  oncle,  êtes-vous  ainsi  triste  et  soucieux,  depuis 
quelque  temps  ? 

—  Hélas!  j'ai  une  fille  que  j'avais  dérobée  à  tous  les  yeux;  elle  ne 
voyait  que  moi  et  sa  femme  de  chambre,  et  cependant  elle  a  donné  le 
jour  à  un  fils. 

—  Oui,  mon  oncle,  je  le  sais,  et  c'est  moi  qui  suis  le  père  de  l'en- 
fant, et  je  vous  demande  de  m'accorder  la  main  de  sa  mère. 

—  Eh!  bien,  puisque  la  chose  est  arrivée,  ce  que  j'ai  de  mieux  à  faire, 
c'est  de  te  la  donner;  et  j'aime  mieux  que  ce  soit  toi  qu'un  autre. 

Et  on  fit  la  noce  tout  de  suite.  Mais  le  vieux  roi  ne  donna  plus 
aucune  marque  de  joie.  Il  mourut  peu  de  temps  après,  et  Koadalan  lui 
succéda  sur  le  trône.  Celui-ci  ne  goûtait  guère  ce  nouveau  genre  de  vie, 
et,  au  bout  d'un  an,  il  voulut  retourner  dans  son  pays.  Comme  il  avait 
toujours  ses  trois  livres  rouges,  il  demanda  un  beau  carrosse;  et  aussitôt 
il  en  descendit  un  du  ciel.  Ils  y  montèrent  tous  les  trois,  sa  femme,  son 
fils  et  lui,  et  le  carrosse  s'éleva  avec  eux  en  l'air,  très-haut,  comme  un 
aigle.  Il  passa  par  hasard  devant  le  château  du  grand  magicien  Fouques. 
Celui-ci  habitait  dans  un  château  d'or,  retenu  par  quatre  chaînes  d'or  et 
quatre  chaînes  d'argent  entre  le  ciel  et  la  terre.  Fouques  était  à  l'une 
des  fenêtres  de  son  château,  et,  en  voyant  passer  Koadalan,  il  le  pria 
de  descendre  un  peu,  pour  lui  faire  visite.  Fouques  avait  aussi  essayé 
d'avoir  la  fille  du  roi  d'Espagne,  mais  il  n'avait  pas  réussi.  En  la  voyant 
passer,  il  l'avait  reconnue  tout  de  suite.  Koadalan,  qui  ne  se  défiait  de 
rien,  s'arrêta  avec  plaisir  au  château  de  Fouques,  et  celui-ci  lui  fit  bon 
accueil.  Après  souper,  il  le  conduisit,  avec  sa  femme,  dans  une  belle 
chambre,  pour  passer  la  nuit,  et  leur  enfant  fut  confié  à  une  nourrice. 
Mais,  malheureusement,  avant  'de  se  mettre  au  lit,  Koadalan  oublia  de 
placer  ses  trois  livres  rouges  sous  son  oreiller,  et  quand  il  se  réveilla, 
le  lendemain  matin,  Fouques  les  lui  avait  dérobés.  Le  voilà  perdu,  le 
pauvre  homme!  Fouques  le  précipita  dans  un  puits  très-profond  (il  avait 
plus  d'une  lieue  de  profondeur)  et  il  tomba  au  milieu  d'un  grand  bois. 

—  Où  donc  suis-je  ici,  mon  Dieu.?  se  dit-il,  et  que  ferai-je  maintenant 
que  j'ai  perdu  mes  trois  livres  rouges.''  Et,  ce  qui  est  encore  pis,  ma 
femme  et  mon  fils  sont  restés  aussi  au  pouvoir  de  Fouques,  le  maudit 
traître!  C'en  est  fait  de  moi,  cette  fois!  Encore  si  j'avais  pu  retrouver 
le  bois  où  je  fis  mes  adieux  à  Thérèse  !  Mais  où  est  ce  bois-là  ^ 

Il  se  met  à  parcourir  le  bois,  et  ne  rencontre  ni  homme  ni  bête.  La 
nuit  vient,  et  il  dort,  la  tête  appuyée  sur  une  grande  pierre  couverte 


120  Koadalan. 

ann  dez,  a  sell  en-dro  d'éhan,  hag  a  anvez  ar  rochell  e-kichcnn  pchini  a 

kimiadas  Théreza  diganî-han. 

—  Hola!  a  lâras  nciizc,  n'co  kct  kollet  holl  c'Iioaz! 

Hag  a  c'halvas  ter  gwez  :  Théréza!  Théréza!  Théréza!  Ha  kerkent  a  em 
gavas  Théréza. 

—  Ezomm  a  t'euz  an-hon,  emehi,  Koadalan  ? 

—  îa  sur,  prinses,  rag  néc'haniant  a-walc'h  am  euz  aman  ! 

—  Goûd  a  rann  holl  :  kollet  a  t'euz  da  levrio,  ha  da  vroeg,  ha  da  vugcl! 
Met  mar  kares  ober  penn-da-benn  evel  ma  lârin  d'id,  me  a  raio  d'id  ho 
c'haout  c'hoaz. 

Hen  kass  a  ra  da  gichenn  kastell  Foukes,  hag  a  lâr  d'ehan  neuzé  : 

—  Kousket  int  holl  bréman  bars  ar  c'hastell.  Kè  goustadig,  goustadig  da 
gambr  Foukes,  hag  a  weli  anehan  kousket  war  he  wélé,  hag  war  un  daol  vihan, 
étal  he  wele,  ann  tri  levr-ruz.  Tap  an-he,  ha  deus-kuit  gant-hé,  hag  e-kcit- 
sé,  me  a  gavo  d'id  da  vroeg  ha  da  vugel. 

Mont  a  ra  Koadalan  beie  kambr  Foukes,  pehini  a  diroc'hé,  astennet  war 
he  wélé;  tapout  a  ra  ann  tri  levr-ruz,  hag  a  teu-kuit  gaut-he  neuzé,  buhan- 
buhan.  Thérésa  a  oa  euz  hen  gortoz,  ha  gant-hi  he  vroeg  hag  hc  vugel.  Ma 
pokas  d'hè,  hag  a  oelé  gant  ar  joa. 

—  A-rok  mont-kuit,  a  lâras  neuzé  Thereza  :  Pétra  a  vo  gret  da  Foukes  ^ 

—  Ma  je!  p'am  euz  brema  ma  levrio,  ma  groeg  ha  ma  bugel,  na  ioullan 
drouk-abet  d'éhan  kén. 

—  Ma!  eomp-kuit  neuzé,  buhan. 

Pa  oent  digwêt  en  kreiz  ar  c'hoad,  a  lâras  c'hoaz  Théréza  d'éhan! 

—  Breman  a  kimiadan  ouzid  cwit  bikenn,  rag  na  em  welfomp  ken. 
Hag  a  savas  neuzé  en  er,  ha  prestig  a  kollas  ar  gwel  anehi. 

Koadalan,  he  vroeg  hag  he  vugel  a  bignas  neuzé  en  ho  c'haronz,  pehini 
a  deuas  kerkent  ha  ma  oe  goulennet,  hag  a  em  gavjont  hep-dâle  en  bro 
Koadalan,  en  Plouaret.  Ma  oe  souezet  braz  ann  holl  o  welet  ur  prinz  hag  ur 
brinses  ker  kaer,  rag  nikun  n'ho  anavéé,  zoken  tad  Koadalan  hag  he  vamm, 
péré  a  oa  deut  da  vea  koz,  ha  paour  bepred.  Ma  savjont  ur  c'hastell  kaer 
ar  c'haera.  Met  ann  daou  goz  a  chommas  en  ho  zi  bihan-plouz,  welloc'h  a 
em  gavent  eno,  hag  ho  mab  n'ho  lezé  en  ezomm  a  bed,  hagaro'éd'héarc'hant, 
kcment  ha  ma  karent. 

Un  dez  a  Liras  Koadalan  d'hc  dad  : 


Koaddan.  I2I 

de  mousse.  Quand  le  jour  revient,  il  regarde  autour  de  soi,  et  reconnaît 
le  rocher  près  duquel  il  avait  fait  ses  adieux  à  Thérèse. 

—  Hola!  se  dit-il  alors,  tout  n'est  pas  encore  désespéré! 

Et  il  cria  trois  fois  :  «  Thérèse!  Thérèse!  Thérèse!  «  et  aussitôt 
Thérèse  arriva  et  dit  : 

—  Vous  avez  besoin  de  moi,  Koadalan  ? 

—  Oui,  certainement,  princesse,  car  me  voici  bien  embarrassé! 

—  Je  sais  tout  :  vous  avez  perdu  vos  livres,  et  votre  femme  et  votre 
fils  ;  mais  si  vous  voulez  faire  exactement  ce  que  je  vous  dirai,  je  vous 
les  ferai  retrouver  encore. 

Puis  elle  le  conduit  devant  le  château  de  Fouques,  et  lui  dit  : 

—  Tout  le  monde  dort  en  ce  moment  dans  le  château.  Rendez-vous 
tout  doucement  à  la  chambre  de  Fouques,  que  vous  trouverez  dormant 
sur  son  lit,  et  sur  une  petite  table,  près  du  lit,  vous  verrez  les  trois 
livres  rouges.  Prenez- les,  revenez  vite,  et,  pendant  ce  temps,  je  vous 
retrouverai  votre  femme  et  votre  fils. 

Koadalan  se  rend  à  la  chambre  de  Fouques,  qui  ronflait,  étendu 
tout  de  son  long  sur  son  lit  ;  il  prend  les  trois  livres  rouges,  et  s'enfuit 
aussitôt.  Thérèse  l'attendait,  avec  sa  femme  et  son  fils.  Il  les  embrassa, 
en  pleurant  de  joie. 

—  Avant  de  partir,  dit  alors  Thérèse,  que  voulez-vous  que  je  fasse  à 
Fouques  ? 

—  Ma  foi!  à  présent  que  j'ai  retrouvé  mes  livres,  ma  femme  et  mon 
fils,  je  ne  lui  veux  plus  de  mal. 

—  Partons  alors,  et  vite. 

Quand  ils  furent  au  milieu  du  bois,  Thérèse  lui  dit  encore  : 

—  Maintenant  je  vous  fais  mes  adieux  pour  toujours,  car  nous  ne 
nous  reverrons  plus  jamais. 

Et  elle  s'éleva  en  l'air,  et  il  la  perdit  bientôt  de  vue. 

Koadalan,  sa  femme  et  son  fils  remontèrent  alors  dans  leur  carrosse, 
qui  revint  aussitôt  qu'il  le  redemanda,  et  ils  arrivèrent  sans  tarder  au 
pays  de  Koadalan,  à  Plouaret.  Tout  le  monde  y  fut  bien  étonné  de  voir 
arriver  un  si  beau  prince  et  une  si  belle  princesse.  Personne  ne  recon- 
naissait Koadalan,  pas  même  son  père  et  sa  mère,  qui  étaient  vieux 
alors,  et  toujours  pauvres.  Ils  firent  bâtir  un  château  magnifique.  Mais 
les  deux  vieux  le  père  et  la  mère)  continuèrent  d'habiter  leur  chau- 
mière; ils  s'y  plaisaient  mieux,  et  leur  fils  ne  les  laissait  manquer  de 
rien  et  leur  donnait  de  l'argent  autant  qu'ils  en  voulaient. 

Un  jour  Koadalan  dit  à  son  père  : 


122  Koadalan. 

—  Warc'hoaz,  ma  zad,  a  zo  ur  foar  gaer  en  Lanhuon,  hag  a  vo  rèd 
d'afk  mont  d'ehi. 

—  Da  hétra  mont  d'ar  foar,  pa  n'am  eiiz  na  marc' h,  na  bac' h,  na  por- 
c'hell? 

—  N'ho  pêt  morc'hed,  warc'hoaz  ar  heure  a  kavfct  un  ijcnn  kaer  en  ho 
kraou.  ît  gant-han  d'ar  foar  ha  goulennet  out-han  ar  pez  a  garfet,  hag 
a  ve  mill-skoed,  hag  a  vo  ro'ét  d'ac'h;  met  na  lest  ket  ann  nask  da  vont 
gant  ann  ijenn;  bêt  sonj  mad  a-zé,  pé  n'am  gwelfet  ken. 

—  Ma  !  émé  ar  paotr  koz. 

Ann  déwarlerc'h  ar  beuré  ec'h  a  da  welet  d'he  graou,  hag  ez  eo  souezet 
braz  0  welet  eno  un  ijem  ar  chaera,  ével  n'hen  defoa  gwelet  biskoaz,  Lakâd  a 
ra  un  nask  d'ehan  war  he  c'houk,  hag  ec'h  a  gaut-han  da  Lanhuon.  Ann 
hall  a  lâré,  penn-da-benn  war  ann  hent  :  —  Kaera  da  ijenn!  da  biou  eo? 
—  hag  a  oa  stad  cr  paotr-koz. 

Kerkent  ha  ma  'c'h  arruas  erfoar-lec'h,  a  teuas  ann  holl  en  dro  d'éhan. 

—  Pégement  aun  ijenn  ?  —  a  lâré  kigerrienn  Lanhuon  ha  Landreger. 

—  Mill-skoed!  —  a  lâré  Koadalan  goz.  —  Hag  ec'h  ent-kuit. 
Paotred  Montroulez,   ha  Léon,  memenz  ira.  Na  oa  den  'wit  sevel  ann 

ijenn. 

Ma  tigwezas  en-bezr  tri  varc'hadour  braz,  leun  ho^  godello  a  arc'hant,  ha 
na  anavéé  den  an-he  (Tri  diaoul  a  oant). 

—  Pégement  ann  ijenn  ? 
~  Mill-skoed! 

—  N'eo  ket  ewit  netra,  tad-koz;  met  na  euzforz,  ul  loen-kaer  eo,  plijout 
a  ra  d'imp,  lia  gret  è  ar  marc'had;  ha  setu  aman  arc'hant  raktal. 

Ar  paotr-koz  a  laka  ann  arc'hant  en  he  c'hodcll  hag  a  ro  ann  ijcnn  d'ann 
tri  varc'hadour,  met  a  vir  ann  nask. 

—  Ro'ét  iwé  ann  nask,  tad  koz. 

—  N'am  euz  goerzet  nemet  ann  ijenn,  ha  na  roïn  ket  ann  nask. 

—  Ann  nask  ac'h  a  atao  da-heul  ar  vuc'h  hag  ann  ijenn. 

—  N'am  enz  ket  goerzet  ann  nask,  ha  na  roïn  ket  anelian. 

—  Rèd  eo  d'imp  kaout  un  nask;  roét  anelian,  haghopô  mill-skoed  ail. 

—  Na  roïn  ket,  lia  pa  ve  ewit  de'.-mill. 

Hag  a  laka  ar  paotr  koz  ann  nask  en  he  c'hodcll,  hag  ec'h  a-knit. 
Ann  tri  marc'hadour  a  bign  neuzé  war  gein  ho  ijenn.  Hcinan  a  em  laka 
kerkent  da  vlcjal,  da  rcdck  ha  da  bcnnfolli,  hag  ho  stlcj  ho  :ri  d'ann  douar. 


Koadalan.  123 

—  Demain,  mon  père,  il  y  a  une  belle  foire  à  Lannion,  et  il  vous 
faudra  y  aller. 

—  Pourquoi  aller  à  la  foire,  puisque  je  n'ai  ni  cheval,  ni  vache,  ni 
pourceau  ? 

—  Ne  vous  inquiétez  point  de  cela;  demain  matin  vous  trouverez 
un  bœuf  superbe  dans  votre  étable.  Menez-le  à  la  foire,  et  demandez-en 
le  prix  que  vous  voudrez,  et  quand  ce  serait  mille  écus,  vous  les  aurez. 
Mais  ne  donnez  pas  la  corde  avec  le  bœuf.  Faites-y  bien  attention,  ou 
vous  ne  me  reverrez  plus. 

—  C'est  bien,  dit  le  bonhomme. 

Le  lendemain  matin  le  vieux  Koadalan  se  rend  à  son  étable,  et  est 
bien  étonné  d'y  trouver  un  bœuf  magnifique,  comme  il  n'en  avait  jamais 
vu.  Il  lui  passe  une  corde  au  cou,  et  se  rend  avec  lui  à  Lannion.  Tout 
le  monde  disait,  sur  le  chemin,  en  le  voyant  passer  :  «  Le  beau  bœuf!  à 
qui  est-il  ?  »  Et  le  vieillard  en  était  tout  fier. 

Dès  qu'il  arriva  dans  le  champ  de  foire,  la  foule  s'empressa  autour 
de  lui. 

—  Combien  le  bœuf?  demandaient  les  bouchers  de  Lannion  et  de 
Tréguier. 

,—  Mille  écus!  disait  le  vieillard.  Et  ils  s'en  allaient. 

De  même  pour  les  marchands  de  Morlaix  et  de  Léon.  Nul  n'enlevait 
le  bœuf. 

Arrivèrent  alors  trois  grands  marchands  inconnus,  les  poches  bourrées 
d'argent  et  que  personne  ne  connaissait  :  (C'étaient  trois  diables.) 

—  Combien  le  bœuf.f"  dirent-ils. 

—  Mille  écus! 

—  Ce  n'est  pas  pour  rien,  grand  père.  N'importe,  c'est  une  belle 
bête;  il  nous  plaît,  et  nous  sommes  d'accord.  Voici  de  l'argent  com.ptant. 

Le  vieillard  met  l'argent  dans  sa  poche  et  livre  le  bœuf  aux  trois  mar- 
chands; mais  il  garde  la  corde. 

—  Donnez  aussi  la  corde,  grand  père. 

—  Je  n'ai  vendu  que  la  bête,  et  je  ne  donnerai  pas  la  corde. 

—  La  corde  suit  toujours  la  vache  et  le  bœuf. 

—  Je  n'ai  pas  vendu  la  corde  et  je  ne  la  donnerai  point. 

—  Il  nous  faut  cependant  une  corde;  donnez-la  et  vous  aurez  encore 
mille  écus. 

—  Je  ne  la  donnerai  pas,  même  pour  dix  mille! 

Et  le  vieillard  met  la  corde  dans  sa  poche,  et  part. 
Les  trois  marchands  montent  alors   sur  leur  bœuf.    Mais    celui-ci 
commence  aussitôt  à  beugler,  à  courir,  comme  une  bête  affolée,  et  jette  les 


124  Koadalan. 

—  Ha  kerkent  a  tro  ann  ijenn  en  ki,  ha  da  redek  trezeg  ar  gèr.  —  Hag  ann 
tri  varc'hadour  war  he  lerc'h,  troït  en  tri  bleiz!  —  Ar  c'hi  a  arru  da  genta 
e-tonll-dor  ti  Koadalan,  hag  a  lamp  ebars.  Ha  kerkent  setu-han  en  den,  rag 
Koadalan  hc-unan  a  oa.  —  Ann  tri  bleiz,  dent  da  vea  are  tri  varc'hadour, 
a  chomm  e-kichenn  ann  or  : 

—  Re-diwezad  un  tammig  paotrcd!  a  lâr  d'he  Koadalan,  eut  he  di. 

—  Poent  a  oa  d'id  !  met  na  euz  forz,  kregi  a  reomp  cUioaz  en  da  golier  un 
de! 

—  Gwelet  a  vo  ! 

Hag  hi  kuit,  ho  zri,  ha  drouk  en-he! 
Pa  digwezas  Koadalan  goz  e  ger  : 

—  Ac'hanta!  ma  zad,  gret  oc'h  euzfoar  vad? 

—  la  vad!  Mill-skoed!  hag  ann  nask  a  zo  deutganen;  sell. 
Ur  pennadig  goudé  a  lâras  are  Koadalan  d'he  dad  : 

—  Warc'hoaz,  ma  zad,  eman  foar-ann-nec'h,  en  Montroulez,  ur  foar 
gaer,  hag  a  vo  rèd  d'ac'h  mont. 

—  Gantpetra^ 

—  Gant  ur  marc'h  a  gavfet  cr  marchosi  warc'hoaz  ar  beuré,  kacra  marc'h 
oc'h  euz  gwelet  biskoaz.  Daou-vill  skoed  a  c'houlennfet  out-han,  hag  ho  po 
an-he  are,  met  na  roctket  ar  c'habestr;  tolet-pled  mad  dase. 

Ann  dewarlerc'h  ar  beuré  a  kav  Koadalan  goz  ur  marc'h  ar  c'haera  en  he 
varchosi,  vel  m'hen  defoa  lâret  d'ehan  he  vab,  hag  ec'h  a  gaut-han  da 
Vontroulez.  Ann  holl  a  oa  souezet  o  welet  vel  ma  oa  kaer  ar  marc'h-se.  — 
Pégement?  pégcment?  a  c'houlenne  ar  varc'hadourienn.  Met  pa  glewcni  : 
daou-vill  skoed!  a  souzent  holl  adré. 

En-bezr  a  tigwezaré  tri  varc'hadour  Lanhuon. 

—  Pégement  ar  marc'h,  tad  koz  ? 

—  Daou-vill  skoed  ! 

—  Skoet  aze,  d'imp  eo.  —  hag  a  em  skojont  en  ho  daoudorn.  —  Eomp 
en  un  hostaleri  da  gonta  ann  arc'hant,  ha  da  eva  urbannacVi. 

Mont  a  reont  en  hostaleri  nesa  ;  ar  paotr  koz  a  ev  muioc'h  wit  neubeutoc'h, 
ha  setu-han  mezw,  ha  na  sonj  ket  goulenn  ar  c'Iiabestr.  Mont  a  ra  ar  marc'h 
gant  ann  tri  marc'hadour,  hag  he  gabestr  gant-han  en  he  benn.  Pignad  a 
reont  ho  zri  war gein  ar  marc'h;  ma  oa  souezet  ann  holl  euz  ho  gwelet.  — 
A  be-lec'h  è  ann  tri  diot-man  ?  a  lârent.  —  Mont  a  rcnt  war  gc  Lcon,  hag 
ar  ganfarded  a  griè  war-n-he,  ha  zokenn  a  stlapé  mein  gant-hè. 

—  Petra,  tri  genaouek,  a  lâras  un  dcn  koz,  sotoc'h  oc'h  cwit  ho  locn! 
Diskcnnit  daou  bépred;  n'oc'h  euz  ket  a  vcz  ? 


Koadalan.  la'j 

trois  marchands  à  terre.  Puis  aussitôt  le  bœuf  se  change  en  chien  ;  et 
de  courir  vers  la  maison!  Et  les  trois  marchands  de  courir  aussi  après 
lui,  sous  la  forme  de  trois  loups!  Mais  le  chien  arrive  le  premier  à  la 
porte  du  château  de  Koadalan,  et  y  saute  d'un  bond.  Et  aussitôt  il  rede- 
vient homme,  car  c'était  Koadalan  lui-même!  Les  trois  loups,  redevenus 
trois  marchands,  s'arrêtent  à  la  porte. 

—  Un  peu  trop  tard,  les  gars  !  leur  dit  Kaodalan  de  sa  maison. 

—  Il  était  temps!  mais  n'importe,  nous  te  prendrons  encore  au 
collet. 

—  C'est  ce  que  nous  verrons  bien  ! 
Et  ils  partirent,  fort  en  colère. 

Quand  le  père  Koadalan  arriva  à  la  maison  : 

—  Eh!  bien,  mon  père,  avez-vous  fait  bonne  foire? 

—  Oui  sûrement  :  mille  écus  !  et  j'ai  rapporté  la  corde;  la  voici. 
Quelque  temps  après,  Koadalan  dit  encore  à  son  père  : 

—  C'est  demain  la  foire-haute  à  Morlaix,  mon  père  ;  une  belle  foire  ! 
il  vous  faudra  y  aller. 

—  Et  avec  quoi  ? 

—  Avec  un  cheval,  que  vous  trouverez  dans  votre  écurie  demain 
matin,  le  plus  beau  cheval  que  vous  aurez  jamais  vu.  Vous  en  deman- 
derez deux  mille  écus;  et  vous  les  aurez  encore.  Mais  ne  donnez  pas  la 
bride  ;  prenez-y  bien  garde  ! 

Le  lendemain  matin,  le  père  Koadalan  trouve  un  cheval  magnifique 
dans  son  écurie,  comme  le  lui  avait  dit  son  fils ,  et  il  va  avec  lui  à 
Morlaix.  Tout  le  monde  admirait  le  cheval.  «  Combien  ?  combien  .?  » 
demandaient  les  marchands.  Mais  quand  ils  entendaient  :  «  Deux  mille 
écus  !  »  tous  se  retiraient. 

Tantôt  arrivèrent  encore  les  trois  marchands  de  Lannion. 

—  Combien  le  cheval,  grand  père? 

—  Deux  mille  écus! 

—  Topez-là;  il  est  à  nous!  Et  ils  se  frappèrent  dans  les  mains. 

—  Allons  à  l'auberge,  pour  compter  l'argent,  et  boire  un  coup.  Ils 
vont  à  l'auberge  la  plus  voisine.  Le  vieillard  boit  un  coup  de  trop,  et 
s'enivre,  si  bien  qu'il  oublie  de  retenir  la  bride. 

Les  trois  marchands  emmènent  le  cheval,  avec  sa  bride  en  tête.  Ils 
montent  tous  les  trois  dessus.  Tout  le  monde  les  regardait  avec  étonne- 
ment. 

—  D'où  sont  ces  trois  imbéciles?  se  disait-on.  Ils  longeaient  le  quai 
de  Léon,  et  les  gamins  criaient  dessus  et  leur  lançaient  même  des  pierres. 

—  Comment,  trois  imbéciles,  leur  dit  un  vieillard,  vous  êtes  plus 


126.  Koadalan. 

Diskenn  a  reont  o  zri.  Ar  marc' h  a  lamp  kerkent  bars  ann  dour,  ha  selu- 
han  tro'ét  en  zilienn.  —  Ann  tri  varc'hadour  a  lamp  war  he  lerc'h  hag  a  dea 
da  vea  tri  fesk  braz,  ewit  tapout  ar  zilienn.  —  Met  lioman  a  deu  neaze  dà 
vea  ur  goulm,  hag  a  nij  uhel,  dreist  tier  kèr. 

Ann  tri  fesk  braz  ac'h  a  neuzè  en  ter  sparfell,  hag  a  nij  war  he 
lerc'h. 

Ar  goulm,  skuiz  o  nijal,  ha  près!  da  vea  tapet,  pa  oa  o  tremen  a-uz 
d'un  noblanz,  a  wel  ur  vates  o  karga  dour  en  ur  varac'h  e-kichenn  ur  feun- 
teun.  Em  lezel  a  ra  da  goueza  er  varac'h,  ha  kerkent  ez  eo  tro'ét  en  goalenn- 
aour.  Ar  vatez  a  denn  ar  walenn-aour  euz  ar  varac'h,  haghe  laka  war  he 
biz,  hag  a  dired  d'ann  noblanz.  Ann  ter  sparfell  a  zo  tro'ét  kerkent  en  tri  zôner 
péré  a  ha  da  zon  gant  pep  a  violonz  dirag  ann  noblanz.  Aotronez  hag  itro- 
nezed  a  deu  d'ho  selaou  er  prennestro,  hag  a  dolarc'hant  d'he. 

—  Trugare!  a  lâr  arre-man,  na  c'houlennomp  ket  a  arc'hant. 

—  Petra  a  c'houlennet  eta  ! 

—  Ur  walenn-aour  a  zo  bet  kavet  gant  ar  vatez,  o  vont  da  gerc'had  dour 
d'ar  feunteun. 

—  Bea  ho  po  anehi. 

Klasket  eo  ar  vatez.  Homan  a  oa  et  d^he  c'hambr,  da  zellet  euz  he 
gwalenn-aour.  A  greiz-holl  a  oe  fromet  o  welet  ur  pr'inz  kaer  en  he  c'hichenn, 
hag  ar  walenn  et  diwar  he  biz. 

—  Na  spontet  ket,  a  lâras  d'ehi  ar  prinz;  me  eo  ar  walenn-aour  ho  poa 
war  ho  piz.  Ann  aotro  a  zo  o  tont  da  c'houlenn  diganac'h  ar  walenn-aour 
(rag  brema'ig  a  zistroin  are  en  gwalenn-aour  war  ho  piz').  Met  n'he  ro'ct  ket 
d'ehan,  ken  hen  defo  gret  ar  pez  ec'h  han  da  lâret  d'ac'h  :  Lâret  d'ehan  ohcr 
lakâd  ann  tan  en  ur  bern-koad  a  zo  er  porz;  pa  wo  krog  mad  ann  tan,  a  îolfct 
ar  walenn  en  he  greiz,  hag  a  lârfet  d'ar  zonerrienn  mont  d'he  c'hlask  ébars. 

P'hen  defoe  lâret  kement-se,  ec'h  eaz  are  en  gwalenn-aour  war  viz  ar  vatez. 

Ann  aotro  a  deuas  kerkent,  hag  a  lâras  : 

—  Pelec'h  eman  ar  walenn-aour  oc'h  euz  kavet  o  vont  da  gerc'had  dour 
d'ar  feunteun? 

—  Setu-hi  aman,  aotro. 

—  Ro'ét  d'in  anehi. 

—  Salv-ho-kraz,  lâret  a  zo  d'in  n'he  rojenn  ket  ken  ho  po  gret  ar  pez  ec'h 
an  da  lâret  d'ac'h.  Gret  lakâd  ann  tan  er  bern-koad  a  zo  en  ho  porz;  pa  vo 


Koadalan.  127 

dépourvus  de  raison  que  votre  bête;  descendez  au  moins  deux;  n'avez- 
vous  pas  de  honte  ? 

Ils  descendent  tous  les  trois.  Le  cheval  saute  alors  dans  la  rivière, 
et  se  change  aussitôt  en  anguille.  Les  trois  marchands  y  sautent  après 
lui,  et  se  changent  en  trois  grands  poissons,  pour  poursuivre  l'an- 
guille. Mais  celle-ci  s'envole  alors,  sous  la  forme  d'une  colombe,  et 
s'élève  très-haut  dans  l'air,  au-dessus  de  la  ville.  Les  trois  grands  pois- 
sons la  poursuivent  encore,  sous  la  forme  de  trois  éperviers.  La 
colombe,  fatiguée  de  voler,  et  se  voyant  sur  le  point  d'être  prise,  voit, 
en  passant  au-dessus  d'un  château,  une  servante,  près  d'une  fontaine, 
occupée  à  remplir  d'eau  un  baquet.  Elle  se  laisse  tomber  dans  ce  baquet, 
sous  la  forme  d'une  bague  d'or.  Aussitôt  la  servante  retire  la  bague  de 
l'eau,  la  met  à  son  doigt  et  court  au  château.  Alors  les  trois  éperviers 
se  changent  en  trois  musiciens,  et  vont,  portant  chacun  un  violon, 
faire  de  la  musique  sous  les  fenêtres  du  château.  Des  seigneurs  et  des 
dames  viennent  les  écouter  aux  fenêtres  et  leur  jettent  de  l'argent. 

—  Merci  !  disent  les  musiciens,  mais  ce  n'est  pas  de  l'argent  que  nous 
demandons. 

—  Que  voulez-vous  donc  .'' 

—  Une  bague  d'or  que  la  servante  a  trouvée,  en  allant  puiser  de 
l'eau  à  la  fontaine. 

—  Vous  l'aurez. 

On  cherche  la  servante.  Celle-ci  était  dans  sa  chambre,  occupée  à 
admirer  sa  bague.  Elle  fut  effrayée  de  voir  tout  à  coup  un  beau  prince 
à  côté  d'elle,  et  la  bague  disparue  de  son  doigt. 

—  Ne  vous  effrayez  pas,  lui  dit  le  prince,  je  suis  la  bague  d'or  que 
vous  aviez  au  doigt.  Votre  maître  vient  pour  vous  demander  cette  bague 
d'or  (car  je  vais  à  l'instant  redevenir  bague  d'or  à  votre  doigt).  Mais 
ne  la  lui  donnez  pas,  jusqu'à  ce  qu'il  ait  promis  de  faire  ce  que  je  vais 
vous  dire.  Dites-lui  de  mettre  le  feu  à  un  grand  tas  de  bois  qui  est  dans 
la  cour  ;  puis,  quand  le  feu  sera  au  plus  fort,  vous  y  jetterez  la  bague 
d'or,  et  direz  aux  trois  musiciens  de  l'y  aller  chercher. 

Quand  il  eut  dit  ces  paroles,  il  redevint  bague  d'or  au  doigt, de  la 
servante.  Le  seigneur  arriva  aussitôt,  et  dit  à  la  servante  : 

—  Où  est  la  bague  d'or  que  vous  avez  trouvée,  en  allant  puiser  de 
l'eau  à  la  fontaine  ? 

—  La  voici,  monseigneur, 

—  Donnez-la-moi. 

—  Sauf  votre  grâce,  on  m'a  bien  recommandé  de  ne  vous  la  donner 
que  lorsque  vous  aurez  fait  ce  que  je  vais  vous  dire.  Faites  mettre  le 


128  Koadalan. 

krog  mad  ann  tan,  a  tolin  en  hegreiz  ar  walenn-aour,  o  lâretd'arzonerrienn: 

itd'hic'hlask! 

Laket  eo  ann  tan  er  bern-koad,  hag  ar  vatez  a  dol  ar  walenn-aour  en  he 
greiz,  hag  a  lâr  d'ar  zonerrienn  :  it  d'hi  c'hlask!  Ar  re-man  a  lamp  kcrkent 
en  tan,  hag  a  glask,  evel  diaoulienn  a  oant. 

Met  ar  walenn-aour  a  zo  troït  neuze  en  ur  gorbonenn  e-touez  ur  bern-braz 
a  winiz  a  oa  en  zolier  ar  c'hastell,  hag  ann  tri  ail,  en  tri  c^hôg,  péré  a  eni 
laka  da  glask  ar  gorbonenn  er  bern-gwiniz.  Met  ar  gorbonenn  a  deu  neuze 
da  vea  ni  louarn,  pehinia  dagann  tri  c'hôg.^ 

Ha  setu  aze  vel  ma  trec'has  Koadalan  war  ann  tri  diaoul,  hag  a  chommas 
gant-han  he  dri  levr  ruz. 

Goudé  kement  a  boanio,  a  tistroas  are  d'ar  gèr.  He  dad  a  oa  manvet;  he 
vroeg  hag  he  vugel  a  deuas  iwé  da  venvell,  prestig  goudé,  hag  a  chommas  he 

unan;  met  hé  dri  levr-ruz  a  oa  gant-han  bépred.  Gant  arre-se  a  c'helle  ober  < 

holl  arpeza  garé,  nemettec'hel  diouz  ar  Maro.  Dent  a  oa  da  vea  koz,  hag  \ 

hen    defoa    aoun-braz    ouz    ar    Maro.    Bemdez   a   studie    mui-ouz-mui  \ 

he  levrio,  o  klask  penoz  ober  ewit  galloud  em  inkarni  ha  bewa  da  virwikenn.  ' 

Hag  un  dez  a  sonjas  hen  defoa  kavetann  tu,  ha  setu  penoz  i 

Dastum  a  ra  holl  duthe  di,  hag  a  lâr  d'he  :  Sentet  ouzin,  na  euz  forz  ; 
petra  a  lârin  d'ac^h,  arc'hant  ho  po  kement  ha  ma  karfet.  It  da  genta  da  glask  j 
d'in  ur  vagerez  gant  he  bugel  kenta  newe  ganct,  hag  ho  digasset  aman  buhan.  i 

Digasset  a  zo  d'éhan  ur  vageres  gant  he  bugel  kenta  newé-ganet,  ha  kalz  a  \ 
leaz  gant-hi.  Homan  a  tlee  chomm  c^houec'h  miz  er  c'hastell  hep  gwelet  den  i 
a-hed,  zokenn  he  fried.  Kant-skoed  ar  miz  a  vije  paeet,  lâret  a  ra  neuze  d^ehi: 
Me  a  vo  lac'het  breman,  draillet  munud  evel  kig-silzig,  ha  neuze  laket  en  ur 
boudez.  Ar  boudez-se  a  vo  laket  en-kreiz  ur  bern  teill-tomm,  ha  diou-wcz 
bemdez,  epad  c'houec'h  miz,  da  greiz-de  ha  da  der-heur,  a  renkfet  dont,  un 
antér-heur  bep  givez,  da  skuill  leaz  ho  pronno  a-uz  d'ar  boudez  lec'h  ma  vin  ■ 
a  bezio.  Met  diwallit  mad  a  kouskfac'h  epad  ma  véet  o  skuill  ho  leaz.  A-ben 
c'houec'h  miz,  mar  gret  mad  evel  ma  lâran,  a  savin  cm  fez  euz  ar  boudez,  ha 


I.  Cette  série  de  métamorphoses  du  héros  de  notre  conte  rappelle  la  poursuite  de  Gwion  < 
par  Keridwen  dans  le  Hanes  Taliesin  : 

u  Vraiment,  s'écria  Keridwenn,  c'est  Gwion  le  nain  qui  est  le  ravisseur.  »  Ayant  pro-  ' 
»  nonce  ces  mots,  elle  se  mit  à  sa  poursuite.  Gwion,  l'apercevant  de  loin,  se  transforma  ' 
»  en  lièvre,  et  redoubla  de  vitesse;  mais  Keridwenn  aussitôt  changée  en  levrette  le  ! 
»  dépassa  et  le  chassa  vers  la  rivière. 

»  Se  précipitant  dans   le  courant,  il  prit  la  forme  d'un  poisson;   mais  son  implacable 
»  ennemie,  devenue  loutre,  le  suivit  à  la  trace;  si  bien  qu'il  fut  obligé  de  prendre  la 
•    »  figure  d'un  oiseau  et  s'envola  dans  l'air. 

«      »  Cet  élément  ne  lui  fut  pas  un  refuge;  car  la  dame,  sous  la  forme  d'un  épervier,  j 
»  gagnait  sur  lui,  et  allait  le  saisir  de  sa  serre. 


Koadalan.  129 

feu  au  grand  tas  de  bois  qui  est  dans  votre  cour  ;  quand  le  feu  sera  au 
plus  fort,  je  jetterai  la  bague  d'or  au  milieu,  en  disant  aux  musiciens  : 
Allez  l'y  chercher  ! 

On  met  le  feu  au  tas  de  bois,  puis  la  servante  jette  la  bague  d'or  au 
milieu,  et  dit  aux  musiciens  :  Allez  l'y  chercher  ! 

Aussitôt  ceux-ci  se  jettent  dans  les  flammes,  et  se  mettent  à  y  cher- 
cher la  bague  d'or,  comme  de  vrais  diables;  ce  qu'ils  étaient  en  effet. 

Mais  la  bague  d'or  est  changée  alors  en  un  grain  charbonné,  dans  un 
grand  tas  de  froment  qui  était  dans  le  grenier  du  château.  Et  aussitôt 
les  trois  autres  deviennent  trois  coqs,  qui  se  mettent  à  chercher  le  grain 
charbonné  dans  le  tas  de  froment.  Mais  le  grain  charbonné  devient  aussitôt 
un  renard,  qui  croque  les  trois  coqs  ! 

Et  voilà  comment  Koadalan  remporta  la  victoire  sur  les  trois  diables, 
et  comment  ses  trois  livres  rouges  lui  restèrent. 

Après  tant  d'épreuves,  Koadalan  revint  chez  lui.  Son  père  était  mort; 
sa  femme  et  son  fils  moururent  aussi  peu  après,  et  il  se  trouva  seul.  Mais 
il  avait  toujours  ses  trois  livres  rouges.  Avec  eux  il  pouvait  faire  tout  ce 
qu'il  voulait;  tout,  excepté  éviter  la  m.ort.  Et  il  était  déjà  vieux,  et  il 
avait  grand'  peur  de  la  mort  !  Chaque  jour  il  étudiait  de  plus  en  plus  ses 
livres  et  y  cherchait  le  secret  de  devenir  immortel.  Un  jour  il  crut 
l'avoir  trouvé,  et  voici  comment. 

Il  assemble  tous  les  gens  de  sa  maison,  et  leur  dit  : 

—  Obéissez-moi  ponctuellement,  n'importe  ce  que  je  vous  comman- 
derai, et  je  vous  donnerai  de  l'argent  et  de  l'or  autant  que  vous  en 
voudrez.  Allez  d'abord  chercher  une  femme  allaitant  son  enfant  pre- 
mier né  et  amenez-moi  sur-le-champ  et  la  mère  et  l'enfant. 

On  lui  amène  une  mère  allaitant  son  enfant  premier  né,  et  ayant  du 
lait  en  abondance.  Celle-ci  devait  rester  six  mois  au  château,  sans  voir 
aucun  homme,  pas  même  son  mari.  Elle  aurait  cent  écus  par  mois.  Koadalan 
lui  dit:  —  Moi,jeserai  à  présent  mis  à  mort  et  haché  menu  comme  chair 
à  saucisses;  puis,  mon  corps,  ainsi  réduit  en  morceaux,  sera  mis  dans 
une  grande  terrine.  Cette  terrine  sera  enfouie  dans  un  tas  de  fumier 
chaud,  et,  deux  fois  par  jour,  pendant  six  mois,  à  midi  et  à  trois  heures, 
il  vous  faudra  venir,  une  demi-heure  chaque  fois,  répandre  le  lait  de 
vos  seins  sur  le  fumier,  à  l'endroit  où  se  trouvera  la  terrine.  Mais  prenez 


»  Tremblant  de  la  terreur  de  la  mort,  il  aperçut  un  tas  de  blé,  sur  une  aire,  et  se  glissa 
»  au  milieu,  semblable  à  un  simple  grain. 

»  Kéridwenn  prit  la  forme  d'une  poule  noire  à  la  crête  élevée,  ouvrit  en  grattant  le  tas 
»  de  blé,  distingua  le  grain  et  l'avala,  etc..  »  * 

Traduction  donnée  d'après  la  traduction  anglaise  d'Ed.  Davies  [Celt.  Myth..,p.  229  et 
suiv.),  par  Jules  Leflocq,  Etudes  de  mythologie  celtique,  p.  69. 


Ijo  Koadalan. 

iac'h  mad,  ha  krenvoc'h   ha  koantoc'h  ewit  biskoaz;  ha  neuze  na  vawin 

bikenn  ken.  Obéra  reet?  lâret  dHn.  Kanî-skoed  ar  mizho  po. 

—  la,  emehi,  ober  a  rin. 

Gerveia  ra  neuzé  he  vewelienn,  hag  a  lâr  d'he. 

—  Breman  a  vo  rèd  d'ac'h  ma  lac' ha,  ha  lakâd  ma  c'horfhoUa  bezio,  ker 
munud  ha  kig-silzig.  Neuzé  a  lakafet  ann  holl  bezio-se,  gant  ar  gwad, 
en  ur  boudez,  pehini  a  c'holofet  gant  ul  lienn  gwenn,  hag  ar  boudez-se 
a  lakafet  en  kreiz  ur  bern  teill-tomm,  lec'h  ma  renko  chomm  epad  c'houec'h 
miz.  Coude  ar  c'houec'h  miz-se,  ma  gwelfet  o  sevel  a-c'hané  em  fez,  beo  ha 
iac'h,  ha  krenvoc'h  ha  koantoc'h  ewit  biskoaz.  Ha  n'ho  pêt  nep  aoun,  rag 
pep-îra  a  c'hoarveo  ével  ma  lâran  d'ac'h.  Ober  a  reet? 

—  la,  a  lâras  ar  mewelienn. 

Holl  a  zo  gret  evel  m'hen  euz  lâret.  Lac'het  eo,  draillet-munud  evel  kig- 
silzig,  ha  laket  ann  tammo  holl,  gant  ar  gawd,  en  ur  boudez,  pehini  a  zo 
plantet  e-kreiz  ur  bern  teill-tomm. 

Mont  a  ra  ar  vageres  diou-wez  bemdez,  épad  un  anter-heur  bep-gwez,  ' 
da  skuill  leaz  he  bronno  war  ann  teill,  a-uz  d'ar  boudez.  Bet  eo  pemp  miz  ( 
oc'h  ober  evel-se,  bet  eo  pemp  miz  hanter;  na  vanké  kén  nemet  tri  dé  d'ar  j 
c'houec'h  miz,  pa  vanas  kousket  wr  ar  baern  teill,  épad  ma  oa  o  skuilla  j 
leaz  a-uz  d'ar  boudez.  Allas!  ha  neuzé  a  varwas  Koadalan!  Pa  oe  dizoloét  { 
war-n-ehan,  a  oe  kavet  he  gorf  en  he  bez,  ha  kazi  deut  e-meaz  ar  boudez  ;  j 
a  oa  0  vont  da  zével;  tri  de  c'hoaz,  hag  a  vije  deut  he  dol  da  vad.  Met  j 
allas!  marw  a  oa,  ha  manv  mad,  ewit  bea  c'hoantaét  na  varwjé  bikenn!      j 

I 

Kontet  gant  lann-Mari  Gwezennec,  i 

Kalvez  en  Ploiiaret, 

dastumet  gant  F.  M.  Ann  Huel. 
Gwenveur  1869. 


Koadalan.  IJI 

bien  garde  de  vous  endormir,  pendant  que  vous  répandrez  le  lait  de  vos 
seins  !  Au  bout  des  six  mois,  si  vous  faites  exactement  ce  que  je  vous 
recommande,  je  me  relèverai  tout  entier  de  la  terrine,  plein  de  vie  et 
de  santé,  et  plus  fort  et  plus  beau  que  je  ne  fus  jamais  ;  et  alors  je  ne 
mourrai  plus  jamais.  —  Ferez-vous  cela,  dites-moi  ?  Vous  aurez  cent 
écus  par  mois.  —  Oui,  dit-elle,  je  le  ferai. 
Alors  il  fait  venir  ses  domestiques  et  leur  dit  : 

—  Maintenant  il  vous  faudra  me  mettre  à  mort,  et  hacher  tout  mon 
corps  en  morceaux  menus  comme  chair  à  saucisses.  Puis,  vous  mettrez  tous 
ces  morceaux,  et  le  sang  aussi,  dans  une  grande  terrine,  que  vous  recou- 
vrirez d'un  linge  et  enfouirez  ensuite  dans  un  tas  de  fumier  chaud,  où 
elle  devra  rester  pendant  six  mois  entiers.  Les  six  mois  accomplis,  vous 
me  verrez  me  relever  de  là,  plein  de  vie  et  de  santé,  et  plus  fort  et  plus 
beau  que  je  ne  le  fus  jamais.  Et  n'ayez  aucune  crainte,  car  tout  arrivera 
comme  je  viens  de  vous  dire.  M'obéirez-vous? 

—  Oui,  répondirent  les  domestiques. 

On  fait  chaque  chose  comme  il  a  recommandé.  On  le  met  à  mort, 
on  le  hache  en  morceaux  menus  comme  chair  à  saucisses.  Puis  tous  les 
morceaux,  et  le  sang  aussi,  sont  mis  dans  une  grande  terrine,  que  l'on 
enfouit  dans  un  tas  de  fumier  chaud. 

Deux  fois  par  jour,  pendant  une  demi-heure  chaque  fois,  la  nourrice 
va  répandre  le  lait  de  ses  seins  sur  le  fumier,  au-dessus  de  la  terrine. 
Elle  l'avait  fait  pendant  cinq  mois,  cinq  mois  et  demi;  il  ne  s'en  fallait 
plus  que  de  trois  jours  que  les  six  mois  ne  fussent  accomplis,  quand 
elle  s'endormit  sur  le  tas  de  fumier,  en  répandant  le  lait  de  ses  seins  au- 
dessus  de  la  terrine. 

Hélas!  alors  mourut  Koadalan  ! 

Quand  on  découvrit  la  terrine,  on  retrouva  son  corps  tout  entier,  sorti 
du  vase  et  sur  le  point  de  se  relever.  Encore  trois  jours,  et  il  aurait  réussi  ! 

Mais,  hélas!  il  était  mort,  bien  mort,  pour  avoir  voulu  se  rendre 
immortel  ! 

Conté  par  Jean-Marie  Guézennec, 

charpentier  à  Plouaret, 

Janvier  1869.  Et  recueilli  par  F  .-M .  Luzel  . 


X 


(7 .  .-^^ 


OBSERVATIONS  SUR  LE  CONTE  PRÉCÉDENT. 


Ce  conte  est  en  grande  partie  composé  de  différents  contes  que  l'on 
rencontre  ailleurs  séparément.  On  peut  comparer  : 

I.  Le  conte  de  l'enfant  qui  sert  chez  le  Diable  dans  l'enfer,  et  doit 
attiser  le  feu  sous  les  chaudières  oili  se  trouvent  les  pauvres  âmes,  et  au- 
quel il  est  défendu  d'en  lever  le  couvercle.  Voyez  mes  observations  sur 
ce  conte  dans  le  Jahrbuch  fur  Romanische  iind  Englische  Literaîur,  tome 
VII,  p.  268; 

II.  Les  contes  que  j'ai  réunis  dans  le  même  recueil,  tome  VIII,  p.  2  56 
et  suiv.^  où  l'on  retrouve  la  chambre  défendue,  la  coloration  dorée  que 
revêtent  les  cheveux  du  héros  et  sa  fuite  à  l'aide  d'un  cheval  enchanté; 

III.  Le  conte  du  sorcier  et  de  son  apprenti  qui  après  différentes  méta- 
morphoses tue  son  maître  qui  s'était  aussi  diversement  transformé  : 
Siddhi-kûr,  trad.  allem.  d'Jùlg,  p.  i;  Benfey:  Pantschatantra,  tome],  p. 
410;  Les  Quarante  Vizirs,  trad.  ail.  de  Behrnauer,  p.  195;  von  Hahn: 
Griechische  Mxrchen,  n"  68;  Wuk  Stephanowitsch  Karadschitsch  :  Volks- 
mtzrchenderSerben,  n°  6;  Straparole:  Noîti,  VIII,  5;  Schott:  Walachische 
Marchen,  rf  1 8;  Grimm:  Kinder  und Hausmarchen,  n"  68;  Mùllenhoff:  Sagen, 
M(Zrchen  und  Lieder  der  Herzogtimmer  Schleswig,  Holslein,  und  Lauenburg, 
no  27  des  M<£rchen;  Prœhle:  M^rchen  fiir  die  Jugend,  n"  26;  Schœnwerth, 
Aus  der  Oberpfalz,  tome  III,  p.  211;  Waldau,  Bœhmisches  Mxrchenbuch, 
p.  116;  Polnische  Mdrchen,  traduit  de  Woycicki  par  Lewestam,  p.  1 10; 
Glinski:  Bajarz  Polski,  tome  I,  p.  188;  Etlar  :  Eventyr  og  Folkesagn  fra 
Jylland,  p.  56;  Grundtvig  :  Garnie  danske  Minder  i  Folkemunde,  tome  I, 
pp.  228  et  2^1;  Asbjœrnsen  et  Moë  :  Norske  Folkeeveniyr,  n"  57.  Dans 
tous  ces  contes,  à  l'exception  du  conte  kalmouck  du  Siddhi-kiir,  lors  de 
la  vente  du  bœuf  ou  du  cheval  dans  lequel  s'est  transformé  l'apprenti 
sorcier,  la  corde  ou  la  bride  ne  doit  pas  être  livrée  à  l'acheteur.  Dans 
le  conte  des  Quarante  Vizirs,  dans  les  contes  grec  et  serbe,  le  jeune  sor- 


observations  sur  le  conte  précédent.  i  jî 

cier  se  transforme  aussi  en  une  maison  de  bains  ou  en  une  boutique  dont 
l'acheteur  ne  doit  pas  recevoir  la  clef.  Un  des  contes  danois  (Grundtvig, 
tome  I,  p.  2ji)  commence  tout-à-fait  comme  le  conte  breton.  Le  gars 
qui  cherche  à  entrer  en  service  rencontre  un  seigneur  qui  lui  demande 
s'il  sait  lire.  Sur  la  réponse  affirmative  du  gars,  le  seigneur  lui  dit  qu'il 
ne  peut  le  prendre  à  son  service.  Le  gars  fait  alors  comme  Koadalan, 
retourne  sa  jaquette,  rencontre  de  nouveau  le  seigneur,  et  lorsque  celui- 
ci  lui  adresse  la  même  question,  il  répond  qu'il  ne  sait  point  lire.  Dans 
un  conte  allemand  (Grimm,  tome  III,  p.  117)  le  sorcier  demande  : 
«  Sais-tu  lire  et  écrire?  —  Oui,  dit  le  gars.  —  Alors,  fait  le  sorcier,  si 
tu  sais  lire  et  écrire,  je  ne  puis  t'employer.  —  Vous  parlez  de  lire  et 
d'écrire?  reprend  le  gars.  Je  vous  ai  donc  mal  compris,  je  croyais  que 
vous  me  demandiez  si  je  sais  manger  et  crier,  et  je  sais  le  faire  conscien- 
cieusement, mais  je  ne  sais  ni  lire  ni  écrire.  »  Dans  le  conte  bohème 
également,  le  sorcier  demande  au  gars  s'il  sait  lire,  mais  celui-ci  répond 
négativement.  Entre  le  conte  breton  et  celui  des  Quarante  Vizirs  existe 
sur  un  point  une  très-curieuse  ressemblance.  Dans  le  conte  breton  le 
diable  transformé  en  musicien  demande  au  seigneur  du  château  comme 
récompense  de  sa  musique  la  bague  que  la  servante  a  trouvée  :  Dans  le 
conte  des  Quarante  Vizirs  le  sorcier,  également  transformé  en  musicien, 
demande  au  roi  comme  récompense  la  rose  dans  laquelle  l'apprenti  s'est 
métamorphosé.  Le  conte  grec  mérite  aussi  quelque  attention.  Bien  que 
s'éloignant  fort  du  conte  breton  en  certains  endroits,  sur  d'autres  points 
il  s'en  rapproche  plus  que  tous  les  autres  contes.  Il  y  a  dans  la  chambre 
du  diable,  une  chambre  que  l'apprenti  ne  doit  pas  ouvrir  :  il  en  ren- 
contre par  hasard  la  clef  et  l'ouvre.  Il  y  trouve  une  jeune  fille  prison- 
nière qui  lui  donne  le  conseil  d'apprendre  par  cœur,  en  cachette,  le  livre 
magique  du  diable,  et  de  s'enfuir  avec  elle.  Ils  s'échappent  ensemble 
après  qu'elle  s'est  transformée  en  jument.  Sur  son  conseil  il  a  pris  un 
plat  avec  du  sel,  un  morceau  de  savon  et  un  peigne;  et  en  jetant  ces 
différents  objets,  il  retarde  le  diable  qui  les  poursuit;  car  le  sel  se  trans- 
forme en  un  vaste  incendie,  le  morceau  de  savon  en  fleuve,  et  le  peigne 
en  marais. 

IV.  En  ce  qui  concerne  l'essai  malheureux  fait  par  Koadalan  pour 
revivre  et  rajeunir,  on  peut  comparer  la  légende  de  l'enchanteur  Virgile. 
Voyez  Edelestand  Du  Méril  :  Mélanges  archéologiques  et  littéraires,  p.  433. 
Virgile  se  fait  hacher  en  morceaux  par  son  serviteur,  se  fait  saler,  mettre 
dans  un  tonneau  et  fait  mettre  ce  tonneau  sous  une  lampe,  de  sorte 
qu'elle  y  dégoutte  neuf  jours  et  neuf  nuits.  Le  septième  jour 
l'Empereur   demande   à  voir  Virgile ,  force    le   serviteur    à    le   con- 


1 J4  Observations  sur  le  conte  précédent. 

duire  dans  le  château  ,  et  lorsqu'il  voit  en  morceaux  le  ca- 
davre de  Virgile,  il  tire  son  épée  et  tue  le  serviteur.  ((  Tout  aus- 
»  sitôt,  devant  l'empereur  et  toute  sa  cour,  un  petit  enfant  nu  tourna 
»  trois  fois  en  courant  autour  du  tonneau  et  s'écria  :  Maudits  soient  le 
•>■>  jour  et  l'heure  où  tu  es  venu  ici! — Après  quoi  le  petit  enfant  disparut. 
»  Personne  ne  l'a  plus  revu,  et  Virgile  resta  mort  dans  le  tonneau.  »  On 
raconte  la  même  histoire  d'Albert  le  Grand,  de  Roger  Bacon,  et  d'Agrippa 
de  Nettesheim.  Voyez  Graesse  :  Der  Tannhmser  und  der  Ewige  Judc , 
2t  éd.  p.  112.  Il  court  encore  aujourd'hui  sur  Théophraste  Paracelse 
une  légende  d'après  laquelle  il  aurait  chargé  son  serviteur  de  le  hacher 
en  morceaux,  de  le  mettre  dans  un  tonneau,  de  le  saupoudrer  avec  une 
poudre,  ou  de  l'arroser  avec  un  baume,  et  de  n'ouvrir  le  tonneau  qu'au 
bout  de  neuf  mois.  Mais  le  serviteur  ouvrit  le  tonneau  après  sept  mois, 
et  y  trouva  un  enfant  de  sept  mois  qui  mourut  aussitôt.  (Voyez  :  Alpen- 
burg  :  Mythen  und  Sagen  Tirais,  p.  309;  Zingerle  :  Sagen,  Msrchen  und 
Gehrsuche  aus  Tirol,  p.  346;  Peter  :  Volksthiimliches  aus  Oesterreichiscli- 
Schlesien,  tome  II,  p.  29"), 

Reinhold  Kœhler. 


1 

\ 


MÉLANGES. 


THE  NAME  OF  THE  DANUBE. 

The  Danube  wasknown  tothe  Greekssince  the  daysof  Hesiod  [Theog. 
338),  but  not  under  the  name  of  Aavo6!toç  or  Aâvouêtç,  but  as  "laipoç. 
They  knew,  in  fact,  the  lower  Danube  only,  and  it  is  to  this  part  of  the 
river  that  the  name  of  hier  or  H/5/er  properly  belongs.The  upper  course, 
and  the  sources  of  the  Danube  did  not  become  known  before  the  second 
century  B.  G.  It  was  related  indeed  that  the  river  came  from  the  extrême 
West,  and  that  its  sources  were  among  the  Celts,  butnoancient  Living- 
stone  ever  traced  its  course  to  its  beginning.  Roman  armies  discovered 
the  upper  Danube,  and  through  them  the  name  of  Danuvius  was  first  in- 
troduced  to  the  knowledge  of  geographers.  Eventhen,  the  name  of  Ister 
continued  to  prevail.  Naevius,  Sallust  (except  in  a  fragment),  Varro,  ail 
speak  oï  Ister;  and  Cassar  (Bell.  Gall.  VI,  25)  seems  the  first  who  uses 
Danuvius  as  the  familiar  name  of  the  river.  Strabo  (VII,  304)  restricts 
the  name  of  Danuvius  to  the  river  as  far  as  the  cataracts,  leaving  to  the 
lower  Danube  the  name  of  Ister. 

If  then  Danuvius  was  originally  the  name  of  the  upper  Danube  only, 
and  if  it  received  that  name  in  a  country  then  inhabited  by  Celts,  itwas 
but  natural  that  Celtic  scholars  should  hâve  assigned  to  it  a  celtic  ety- 
mology.  Zeuss  {Gr.  C.  p.  994,  n.)  proposes  to  connect  it  with  «  hodiern. 
hibern.  gael.  adj.  Ddna  ,  dàn  (fortis,  intrepidus ,  audax)  et  subst. 
dânachd,  dânadas  (audacia)  ex  quo  ob  fortem,  citatum  cursum  facile  in- 
terpretationem  invenerit  Dânubius  ».  Cf.  Gluck  :  K.  N.,  p.  91. 

It  should  be  observed,  however,  that  the  ancients  themselves  hâve 
preserved  an  etymology  of  Danuvius,  and  Lydus  (De  Magistr.  P.  R.  III, 
32)  quoting  from  a  Roman  historian  Samonicus,  who  lived  at  the  time 
of  Diocletian,  says  that  it  was  the  Thracians  who  gave  that  name  to  the 
river,  and  that  in  their  language  Danuvius  meant  «  cloudy  »  (Aavo66'.ov 
Bk  -bv  vîçeXccpipov  è/.£Ïvci  y-aXcuci  Tiaipitoç).  Other  writers  déclare  Ister 


1 56  Mélanges. 

to  be  a  Celtic,  Danuvius  a  Thracian  word,  and  Jornandes  (De Rébus  Geticis 
1.  37,  c.  12)  affirmsthat  «  Danuvius  de  nive  nomen  accepit  ».  Hère  we 
may  also  recall  the  remarks  of  Herodotus  (IV,  50)  :  tou  \àv  yei\).m6(; 
è(jTi  ocoç  TUîp  èc;Tt,  oXi'yw  T£  [jit^wv  t^ç  eauToO  çûcioç  YiVcxai-  usTai  yàp 
Y]  Y"?!  aî^t'')  "^oîi  /£i[J.wvoç  TrajXTTav  oXi^w,  vtçs-w  oè  Tzavia  -/pèeTat.  If  then 
thenamewas  a  Thracian  name  and  meant  cloudy,  or  misty,  or  snowy, 
an  easier  dérivation  may  be  suggested.  The  Thracians  are  Aryans,  and 
their  consonantal  System  is  the  same  as  that  of  the  classical  languages. 
Now  in  the  Vedic  Sanskrit  danu  means  «  rain  »  or  «  moisture  » 
yâvam  nà  vrw/ît/h  divycna  dMunTi  {RV.,  X,  43,  7). 

«  As  the  rain  [increases]  the  corn  with  its  heavenly  moisture  ». 
Dànukilra,  as  applied  to  the  dawn,  means  «  bright  with  dew  or  mist  ». 
Danuvius  therefore  (for  this  is  the  right  reading  and  not  Danubius,  see 
Corssen's  Krit.  Beitr.  p.  158)  would  hâve  been  formed  like  Danava  or 
dânavya,  in  the  sensé  of  «  carrying  moisture  )>,  or  «  fed  by  clouds  or 
snow  ». 

In  Zend,  dânu  occurs  in  the  sensé  of  «  river  »;  the  Ossetic  don.  Asdânu, 
as  an  adjective,  means  «  flowing  rapidly  »  (see  Justi's  Handbuch  der 
Zendsprache,  s.  v.).  Professer  Bopp  identified  «5/;  in  as-dlnu  with  the 
Sanskrit  ati.  The  transition  of  Sanskrit  t  into  Zend  sh,  between  two 
vowels,  might  be  supported  by  mesha  =  mrita,  peshu  =  peretu,  asha  = 
rita.  Professor  Windischmann  identified  Zend  ash  with  Greek  àpt  and  èpt  : 
Professor  Kuhn  (Zeitschrift  fur  vergleichende  Sprachforschung,  I,  p.  368) 
identified  Sanskrit  ati  with  Greek  àpi  or  epu  Yet,  even  we  accepted  ail 
thèse  identifications,  we  should  only  arrive  at  a  Greek  form  èpioavoç,  as 
corresponding  to  the  Zend  asdânu,  «  the  rapid  river  »;  but  we  could 
hardly  venture  to  trace  the  sources  ofthe  mysterious  'Hp-.oavcç  back  to 
the  Zend  asdânu. 

Max   MÛLLER. 


LE  VRAI   NOM   DE  GARGANTUA. 

I.  Abhandlung  ûber  Roland,  von  Dr  Hugo  Meyer  iProgramm  der 
Hauptschule  zu  Bremen;  Brème,  1868,  22  p.  in-40.  —  Prix  :  2  fr. 

II.  Om  Çivaisme  i  Europa,  af  G.  A.  Holmboe  (Saerskilt  aftrykt  af 
Vid.  —  Selkskabets  Forhandlinger  for  1866;.  Christiania,  1866,  41  p. 
gr.  in-8°. 


Mélanges.  Ijy 

\U.  Gargantua;  essai   de  mythologie  celtique;  par   H.   Gaidoz. 

(Exirait  de  h  Revue  Archéologique  de  septembre  1868.)  Paris,  1868, 
20  p.  gr.  in-8".  —  Prix  :  i  fr.  50. 

Ces  trois  dissertations,  nées  sans  se  connaître  l'une  l'autre,  ont  pour- 
tant plusieurs  points  de  contact  qu'une  simple  analyse  va  montrer  au 
lecteur,  et  les  renseignements  divers  qu'elles  apportent  se  confirment  les 
uns  par  les  autres,  en  même  temps  que  leur  réunion  ouvre  des  perspec- 
tives nouvelles.  Écoutons  d'abord  M.  Meyer  : 

I.  Les  dieux  germaniques  Tyr,  Heimdall,  Freyr  et  Balder  sont  des  divi- 
nités solaires.  Le  rayon  de  soleil  étant  envisagé  comme  un  glaive,  ainsi 
qu'il  arrive  le  plus  souvent  dans  l'histoire  des  mythes,  ce  sont  en  même 
temps  des  dieux  armés  du  glaive  et  par  suite  des  dieux  de  la  guerre. 
Mais  les  trois  derniers,  Heimdall,  Freyr  et  Balder,  n'étaient  originaire- 
ment que  des  surnoms  de  l'antique  dieu  Tyr.  D'un  autre  côté  le  dieu 
bienfaisant  du  soleil  printanier  (et  ils  étaient  parfois  considérés  sous  cet 
aspect  spécial),  était  aussi  regardé  comme  un  dieu  de  l'amour  et  de 
l'hymenée.  Bien  plus,  il  est  très  vraisemblable  que  Tyr  eut  encore  un 
autre  surnom,  à  savoir,  dans  le  Nord  Hrodr^,  en  Allemagne  Hrodo,  Rode^. 
M.  Meyer  cherche  ensuite  à  prouver  que  les  symboles  de  Freyr  comme 
dieu  de  la  guerre  et  de  l'hymenée  (et  aussi  des  tribunaux),  de  même 
que  sa  disparition  finale  dans  «  le  crépuscule  des  dieux  »  furent  trans- 
portés plus  tard  à  Roland,  dont  le  nom  semblait  se  confondre  avec  le 
sien.  Ce  nom,  formé,  ce  semble,  de  hrôdr  gloire,  originairement 
Chrodoland,  Hruodland,  Hrodland,  est  déjà  au  x'^  siècle  Ruoland,  et  devient 
plus  tard  Roland  ou  Ruland.  Tel  est  en  résumé  le  travail  de  M,  Meyer; 
nous  y  reviendrons  tout  à  l'heure. 

IL  M.  Holmboe  qui  recherche  les  traces  du  culte  de  Çiva  en  Europe, 
montre  d'abord,  d'après  une  dissertation  de  M.  Gaujal  ?  qu'en  Gaule,  à 
Rodez  et  à  Rouen,  on  adorait  une  divinité  dont  le  nom  Roth  ou  Ruth  se 
laisse  peut-être  surprendre  dans  le  nom  de  ces  villes  Civhas  Rutenensis 
(Rhodez)  et  Rothomagus  (Rouen)  4.  En  Flandre  également,  à  Saint- 
Guislin,  on  trouve  les  traces  d'un  culte  analogue  à  celui  de  Ruth  s. 

1.  cf.  Hrôdsvitnir  «  le  persécuteur  ou  l'ennemi  de  Hrôdr,  »  c'est-à-dire  le  loup 
Fenris. 

2.  Cf.  Hrèdhe  (Beda  :  De  temporum  ratione,  XIII,  cité  par  J.  Grimm  :  Deutsche  My- 
thologie -,  p.  266),  sans  doute  aussi  une  divinité  masculine,  bien  que  Bède  en  parle 
comme  d'une  divinité  féminine. 

}.  Dans  les  Mémoires  de  la  Société  Royale  des  Antiquaires  de  France.  Tome  IX,  p.  91. 
et  suiv. 

4.   [Etymologies  douteuses.  —  H.  G.] 

S-  Je  remarquerai  en  passant  qu'il  y  3  dans  le  Brabant  septentrional  une  localité 
appelée  Roysd,c.-ï-A.  «la  demeure  de  Roy»,  et  dans  ce  Roy  M.  Meyer  croit  retrouver 


ijS  Mélanges. 

D'après  Gaujal,  le  dieu  gaulois  Roth  ou  Ruth  était  une  divinité  de  même 
espèce  que  Vénus ,  c'est-à-dire  était  une  divinité  masculine  de 
Pamour,  et  (s'il  ne  lui  était  identique)  il  se  rapprochait  du  moins  du 
Rudra  indou,  lequel  n'est  autre  que  Çiva.  M.  Holmboe  qui  se  range  à 
cette  opinion  de  M.  Gaujal,  tâche  d'apporter  de  nouvelles  preuves  et 
cherche  des  traces  du  culte  de  Rudra  dans  d'autres  pays,  surtout  en 
Allemagne  et  dans  le  Nord.  En  ce  qui  touche  le  nom  de  Roth,  Ruth, 
Ruda.  M.  Holmboe  remarque  que  la  chute  de  l'R  est  fréquente  en 
Prâcrit  ',  il  croit  en  outre  retrouver  ce  nom  dans  un  grand  nombre  de 
noms  de  lieu  de  l'Allemagne  et  du  Nord,  soit  simples  tels  que  Rhoden 
(rectè  Roden),  Rhode  (rectè  Rode),  Roda,  Roten,  etc.,  soit  composés  tels 
que  Rodheim,  Rodtland  (en  Allemagne),  Rotvold,  Rotnaes  (en  Norwège)-. 
C'est  aussi  l'opinion  de  M.  Meyer  :  «  Comme  non  loin  de  Rodesbrook, 
près  de  Visselhœvede  (en  Hanovre)  se  dressait  le  lodiitenbom,  qui  était 
dédié  à  Tio,  on  peut  de  même  voir  Hruodo  dans  Rodesbrook,  près  Rode  3.  » 
La  «  Mesnie  furieuse  4  «  du  Rothenthaler  dans  l'Argovie,  du  Rodenstei- 
ner  dans  la  Hesse,  et  de  Rods  en  Hanovre,  rappellent  à  M.  Holmboe  la 
course  furieuse  de  Rudra  à  la  tête  des  Marutss;  et  M.  Meyer  i^,  d'après 
J,  Grimm  7,  observe  que  Roland  porte  la  bannière  dans  la  «  Mesnie 
Furieuse  ».  D'après  M.  Holmboe,  Rudra,  comme  dieu  solaire,  est  aussi 
un  dieu  de  la  destruction  et  de  la  génération,  et  en  cette  dernière  qualité 
il  a  pour  organe  le //^gam  (çpaXXoç)si  universellement  adoré.  M.  Holmboe 
remarque  que  ce  symbole  ne  se  retrouve  pas  seulement  dans  la  statue 
de  Freyr  à  Upsal^,  mais  que  dans  le  Nord  son  culte  s'était  très-déve- 
loppé  :  là  il  s'appelait  sans  doute  rot  et  on  en  trouve  encore  de  nom- 
breuses représentations  9.  Chez  Roland  même  se  montrent  d'évidentes 
allusions  à  des  qualités  phalliques,  comme  l'indique  M.  Meyer  '°.  Comme 
dieu  delà  guerre  Freyr  apparaît  aussi  sous  le  même  jour  que  Rudra,  et 


Rod  (p.   10  de  son  essai). 

1.  Ex.  Inda  pour  Indra.  Holmboe,  p.  20. 

2.  Holmboe,  p.  19  et  suiv. 

3.  Meyer,  p.   10. 

4.  [On  a  donné  le  nom  de  mesnie  ou  armée  furieuse  (en  allemand  wuthendes  Heer) 
et  aussi  de  chasse  ou  chasseur  sauvage  (en  allemand  wilde  Jagd,  wilde  J^eger)  à  une 
bande  d'esprits  ou  d'êtres  fantastiques  qui  d'après  la  croyance  populaire  courait  de  nuit 
forêts  et  campagnes  avec  mille  cris  semblables  au  bruit  lointain  d'une  chasse.  L'ori- 
gine et  le  caractère  de  cette  tradition  ont  été  expliqués  dans  un  remarquable  essai  de 
M.  Liebrecht,  publié  à  la  suite  de  son  édition  des  Otia  Imperialia  de  Gervaise  de  Til- 
bury (Hanovre,   i8j6,  in-8").  —  H.  G.] 

j.  P.  21  et  2j. 

6.  P.  10. 

7.  Deutsche  Mythologie*,  pp.  895  et  894. 

8.  Cf.  J.  W.  Wolff  :  Beiirxge  zur  Dcuîschen  Mythologie,  1,  p.   106  et  suiv. 

9.  Holmboe,  pp.   34-J7. 
10.  Meyer  (p.  17). 


Mélanges.  i  ^9 

comme  ce  dernier  commande  à  l'orage  et  à  la  lumière  '.  Laissant  de 
côté  d'autres  analogies  entre  le  culte  de  Rudra  et  celui  de  Çiva,  je  ne 
citerai  encore  (d'après  M.  Holmboe)  que  l'adoration  de  vaches  sacrées 
en  Scandinavie,  tandis  que  d'autre  part  la  vache  est  l'animal  favori  de 
Çiva  et  paraît  toujours  en  relation  avec  le  îingam. 

III.  J'ai  déjà  parlé  ailleurs  de  la  dissertation  de  M.  Gaidoz  *;  mais  j'y 
reviens  parce  que  je  n'ai  reçu  que  plus  tard  les  deux  autres  essais  men- 
tionnés plus  haut  et  que  je  veux  relever  les  points  communs  de  ces  diffé- 
rents travaux.  M.  Gaidoz  croit  que  le  géant  Gargantua  était  originaire- 
ment un  dieu  celtique,  «  peut-être  un  dieu  solaire  »,  dieu  qui  dans  les 
inscriptions  gallo-romaines  paraîtrait  sous  le  nom  d'Hercule,  mais  dont 
le  nom  véritable  se  serait  perdu,  tandis  que  se  serait  conservé  son  sur- 
nom Gargant,  «  le  dévorant  »;  et  ce  surnom  aurait  pour  origine  les 
sacrifices  humains  qu'on  lui  offrait.  Des  réminiscences  de  ce  dieu  se 
trouvent,  entre  autres  endroits,  à  Rouen  et  dans  les  environs  de  cette 
ville.  Près  de  Rouen  se  trouve  un  Mont  Gargant  3,  et  sur  Rouen  même 
M.  Gaidoz  nous  communique  un  fait  très-curieux  :  «  J'apprends,  dit-il, 
»  de  M.  Fr.  Lenormant,  qu'à  Rouen,  le  jour  de  la  fête  de  saint  Romain 
»  (23  octobre),  on  vendait  de  petites  figures  (de  deux  ou  trois  centi- 
»  mètres  de  hauteur)  représentant  des  hommes  grotesques  pourvus  de 
«  l'insigne  de  Priape.  On  appelait  ces  figures  des  Gargans;  et  les  jeunes 
»  filles  en  achetaient  qu'elles  mettaient  dans  leurs  corsages  dans  l'espoir 
»  de  trouver  plus  facilement  un  mari.  Il  y  a  une  quinzaine  d'années,  la 
»  vente  de  ces  objets  indécents  a  été  interdite  par  la  police.  Dans  le 
»  louable  désir  de  conserver  aux  archéologues  le  souvenir  de  cette  cou- 

1.  Holmboe  (pp.  9  et  37). 

2.  Dans  les  Heidelberger  Jahrbiicher,  1869,  pp.  817-820. 

5.  Gaidoz,  p.  7.  [Aux  localités  du  nom  de  Mont  Gargant  que  j'ai  signalées  dans  l'essai 
en  question,  j'en  ajouterai  aujourd'hui  une  autre  située  à  Houdivillers,  arrondissement  de 
Beauvais  (Oise);  elle  est  signalée  comme  un  «  lieu  d'apparitions  »  dans  la  Notice  Arché- 
ologique sur  le  département  de  l'Oise  (i8s6,  in-8°,  Beauvais,  impr.  d'A.  Desjardins).  — 
La  même  Notice  mentionne  (pp.  12-15,  23)  deux  monuments  mégalithiques  auxquels  est 
encore  attaché  le  nom  de  Gargantua.  Ils  s'ajoutent  à  la  liste  que  j'ai  donnée,  op.  cit.  — 
Depuis  la  publication  de  mon  essai,  a  paru  dans  la  Revue  de  l'Aunis,  de  la  Saintonge  et 
du  Poitou  (25  juin  1869)  un  article  intitulé  Gargantua  en  Poitou,  où  l'auteur,  M.  L.  De- 
saivre,  a  rassemblé  les  traditions  gargantuines  du  Poitou.  La  plus  intéressante  est  celle- 
ci  :  «  Une  légende  chère  au  maraichins  nous  montre  sainte  Macrine  fuyant  devant  Gar- 
gantua, montée  sur  une  mule  ferrée  à  l'envers.  La  bête,  harassée  de  fatigue,  s'arrête 
dans  l'île  de  Magné,  près  d'un  champ  où  des  paysans  sèment  de  l'avoine.  Se  fiant  en  la 
miséricorde  divine,  Macrine  les  prie  de  dire  à  tout  venant  qu'elle  a  passé  le  jour  où  ils 
mettaient  leur  grain  en  terre.  Grand  étonnement  des  laboureurs  en  trouvant  le  lendemain 
leur  avoine  mûre;  ils  reconnaissent  à  ses  œuvres  l'envoyée  du  Seigneur;  et  quand  sur- 
vient Gargantua,  ils  se  hâtent  de  lui  apprendre  que  l'avoine  n'était  pas  née  lors  du  pas- 
sage de  sainte  Macrine.  Le  géant  abandonne  sa  poursuite;  mais  avant  de  revenir  sur  ses 
pas,  il  nettoie  ses  sabots;  alors,  le  tertre  de  la  Garette  et  celui  où  s'éleva  depuis  la 
chapelle  de  sainte  Macrine,  apparurent  pour  la  première  fois  au-dessus  de  la  vallée,  h 
L.  Desaivre,  loc.  cit.  p.   34s-  —  H.  G.] 


140  Mélanges. 

»  tume,  M.  Fr.  Lenormant  a  donné  un  exemplaire  de  ces  Gargans  au 
1)  musée  de  Saint-Germain.  —  Je  ferai  remarquer  en  outre  que  l'exem- 
»  plaire  qu'il  a  eu  l'obligeance  de  me  communiquer  était,  outre  l'appen- 
1)  dice  priapique,  muni  d'une  double  paire  d'yeux  »  '.  Cette  divinité 
phallique  adorée  à  Rouen  correspond  au  dieu  Ruth,  cité  plus  haut,  qui 
avait  également  un  temple  à  Rouen,  de  même  que  le  village  du  nom  de 
Mont  de  Roth  près  de  Rouen  ^  s'ajoute  au  Mont  Gargant.  En  ce  qui 
concerne  l'identité  de  Ruth  et  de  Çiva,  je  remarquerai  que  dans  l'Inde, 
dans  la  nuit  consacrée  à  ce  dernier  5,  on  vend  de  petits  lingams  comme 
amulettes,  de  même  qu'à  Rouen  on  vendait  des  Gargans  ;  ces  Gargans 
avaient  quatre  yeux  :  Çiva  a,  comme  on  sait,  trois  yeux.  On  peut  donc 
se  demander  si  le  moderne  Gargant  ne  serait  pas  sorti  du  Ruth  gaulois. 
Que  ce  nom  de  «  Gargant  »  qui  est  originairement  un  surnom,  fasse  sup- 
poser un  dieu  destructeur,  cela  ne  doit  pas  nous  arrêter,  car  nous  avons 
vu  que  la  destruction  et  la  génération  sont  souvent  représentées  par  la 
même  divinité.  Il  n'est  donc  pas  nécessaire  que  ce  nom  se  rapporte  à  des 
sacrifices  humains,  bien  qu'on  en  offrît  à  toutes  les  divinités  de  ce  genre. 
Ces  sacrifices  n'étaient  pas  non  plus  étrangers  au  culte  orgiastique  des 
dieux  de  l'amour  et  de  la  génération  ;  le  culte  d'Astarté  en  est  un 
exemple.  Comme  dieu  de  la  destruction  et  aussi  de  la  guerre,  le  Ruth 
gaulois  pouvait  facilement  être  conçu  comme  géant;  c'est  ainsi  qu'aux 
environs  de  Rouen  nous  trouvons  au  xii'^  siècle  une  cathedra  gygantis,  qui 
s'appelle  aujourd'hui  chaise  de  Gargantua  4,  et  dans  la  ville  de  Rhodez 
même  se  trouvait  une  statue  de  grandes  dimensions  comme  le  prouve 
un  ancien  chant  d'Eglise  : 

Stabat  ingentem  referens  colossum 
Saxeum,  tota  regione  sacrum, 
Numen,  etc.  s 

De  toutes  ces  recherches  il  semble  résulter  qu^autrefois  une  partie  de  la  race 
indo-celtique  a  adoré  une  divinité  solaire  qui  présidait  à  la  destruction  aussi 
bien  qu'à  la  génération,  et  dont  le  nom.  se  retrouve  dans  les  formes  Rudra 
(Ruda),  Hrodr,  Hrodo,  Rode,  Ruth,  Roth,  etc.  —  On  peut  peut-être 
y  ajouter  le  dieu  slave  Radegast,  dieu  de  la  lumière,  de  la  génération  et 
de  la  guerre  6. 

F.  LlEBRECHT. 

1.  Gaidoz,  p.  5.  n. 

2.  Holmboe,  p.   17 

3.  Au  mois  de  mars;  c'est  la  çivaràtri. 

4.  Gaidoz,  pp.  4  et  8. 

5.  Holmboe,  p.  i  J. 

6.  On  trouve  aussi  en  Angleterre  trace  de  l'adoration  d'une  divinité  phallique.  Je  laisse 


Mélanges.  141 

[P.  S.  —  Il  est  prudent,  pensons-nous,  d'éliminer  de  cette  discussion 
l'idole  de  Rhodez  renversée  par  saint  Amand,  car  aucun  texte  ne  nous 
en  dit  le  nom,  et  elle  n'a  été  identifiée  par  M.  Gaujal  avec  le  Roth  de 
Rouen,  que  par  suite  d'une  étymologie  fantaisiste  du  nom  de  la  ville  de 
Rhodez.  Bornons  donc  à  Rouen  le  champ  de  l'hypothèse.  Là  on  trouve 
en  effet  certaine  tradition  d'une  divinité  appelée  Roth,  divinité  dont 
l'image  aurait  été  renversée  par  saint  Mellon,  le  premier  apôtre  de  Rouen 
(y  vers  314).  Cette  tradition  nous  a  été  conservée  dans  la  Vie  de  saint 
Mellon  publiée  par  les  Bollandistes  22  octobre  .  Les  Bollandistes  placent 
la  composition  de  cette  vie  au  xi*"  siècle  et  portent  sur  elle  le  jugement 
que  voici  : 

«  Antiquam  imo  et  primaevam  iis  contineri  putamus  ecclesias  Rotho- 
))  magensis  traditionem,  sed  pluribus  vestitam  seu  potius  delibutam  et 
))  immersam  fabulosis  narratiunculis  quales  procudere  solebant  legen- 
»  darii,  nominatim  in  Britannia  Armorica  et  Normannia  saeculo  IX  et  X, 
»  ad  quod  satis  probabiliter  ex  notis  seu  characteribus  scriptionis  intrin- 
»  secis...  Vita  S.  Melloni  refertur  »'.  Le  «Templum  Rothi»  est  cité  deux 
fois  dans  la  vie  de  saint  Mellon.  Les  Bollandistes  font  suivre  cette  vie  de 
l'office  de  saint  Mellon  (probablement  composé  dans  la  seconde  moitié  du 
xiV  siècle  d'après  les  Bollandistes  2),  et  dans  cet  office  se  trouve  un 
hymne  dont  une  strophe  commence  par  le  vers 

Exstirpato  Roth  idolo.... 

Les  Bollandistes ,  suivant  en  cela  un  des  historiens  de  Rouen , 
Th.  Licquet,  ne  croient  pas  à  l'existence  de  Roth  :  <(  Ouid  sibi  vult 
n  idolum  Roth  ?  quod  profecto  nunquam  exstitit  nisi  in  phantasia  illius 


de  côté  les  noms  de  lieu  (Rutland,  Ruthwel,  Rudgede,  et  Ruthin;  cités  par  M.  Holmboe 
(p.  20^  et  aussi  cette  pierre  Rudston  haute  de  24  pieds,  située  près  de  l'église  dans  le 
village  de  ce  nom,  en  Yorkshire  fHolmboe,  p.  27.  —  Comparez  aussi  les  fioles  en  forme 
de  phallus  trouvées  dans  les  tombeaux  anglo-saxons,  ibid.  p.  32).  Mais  j'appellerai  l'at- 
tention sur  deux  passages  que  M.  Kuhn  (dans  ses  Wesîphœlische  Sagen,  II,  pp.  137  et 
suiv.)  emprunte  à  Kemble,  et  qui  montrent  le  culte  du  phallus  existant  encore  aux  pre- 
miers temps  du  Christianisme.  L'un  de  ces  passages  montre  même  qu'à  Pâques  le  prêtre, 
en  portant  ce  symbole,  ouvrait  la  danse  dans  un  chœur  de  jeunes  filles,  tradition  évi- 
dente de  l'époque  païenne.  Quelque  chose  d'analogue  se  rencontre  dans  un  conte  islan- 
dais ^Jôn  Arnason  :  Islenskar  Thjôdhsœgur  og  Aefintyri,  Leipzig,  1864,  II,  pp.  6  et  s.). 
A  la  veillée  de  Noël,  le  curé  et  sa  paroisse,  se  tenant  tous  par  la  main,  dansent  en  chan- 
tant autour  de  l'église  jusqu'à  ce  que  pour  leur  punition  la  terre  s'ouvre  sous  leurs  pas  : 
le  prêtre  pourtant  peut  échapper.  C'est  la  version  islandaise  qui  nous  présente  la  forme  la 
plus  ancienne  de  ces  danseurs  maudits  dans  laquelle  le  prêtre  chrétien  joue  plus  tard  un 
rôle  tout  différent  (cf.  Pauli  ;  Schimpf  und  Ernst,  chap.  388,  avec  la  note  de  M.  Œster- 
ley,  ainsi  que  mon  article  sur  cette  publication  dans  les  Heidelberger  Jahrbûcher,  1S67, 
P-  7I-) 

1 .  Acta  SS.  BoU.  Oct.  T.  IX,  p.   $  s  S ,  §  4. 

2.  Ibid.  p.   j66.  —  M.   Lever   (p.  14  de  l'opuscule  cité  page  suivante;  en  reporte  la 
composition  au  xr'  siècle. 


142  Mélanges. 

))  qui  illud  procudit;  nec  agnitum  fuit  nisi  a  credula  multitudine'.  «  Il  est 
en  effet  étrange  que  le  nom  de  Roth  ne  nous  soit  pas  connu  par  aucune 
autre  source  et  qu'il  soit  absent  des  monuments  épigraphiques.  Mais 
comment  ce  nom  aurait-il  été  introduit  dans  cette  ancienne  Vie  de  saint 
Mellon?  Serait-il  né  d'une  fausse  étymologie  du  nom  de  Rotomagus, 
bien  que  dans  la  Vie  de  saint  Mellon  on  ne  trouve  aucune  allusion  à 
cette  étymologie?  Aurait-il  été  apporté  de  Scandinavie  par  les  Normands, 
et  faudrait-il  l'attribuer  à  la  mythologie  germanique  au  lieu  d'y  voir  un 
reste  de  la  mythologie  gauloise?  Quoi  qu'il  en  soit,  dans  le  camp  opposé 
aux  BoUandistes  se  trouve  un  des  archéologues  les  plus  distingués  de  la 
Normandie,  M.  l'abbé  Cochet,  qui  ne  met  pas  en  doute  l'existence  du 
culte  de  Roth  2.  Il  hésite  sur  un  point  :  Est-ce  saint  Mellon,  ou  est-ce 
saint  Romain  qui  a  détruit  le  temple  et  Pidole  de  Roth  5  ?  La  confusion 
en  effet  est  ancienne  et  s'explique  facilement.  Saint  Mellon  avait  le  pre- 
mier prêché  le  Christianisme  à  Rouen;  mais  saint  Romain  porta  le  dernier 
coup  au  paganisme  et  fit  détruire  plusieurs  monuments  profanes  ou  mal 
famés  4.  Cela  nous  explique  comment  la  tradition  populaire  a  mêlé  les 
actes  des  deux  saints,  et  comment  les  Gargans  dont  il  est  question  plus 
haut  se  vendaient  le  jour  de  saint  Romain.  Remarquons  aussi  que  u  le 
dragon  symbolique,  que  le  moyen-âge  reconnaissant  a  donné  aux  con- 
quérants chrétiens»  et  que  d'après  la  légende  saint  Romain  aurait  vaincu, 
porte  à  Rouen  le  nom  particulier  de  Gargouille. 

H.  G.] 


1.  Ibid.^  p.  573,  note  g. 

2.  La  Seine-Inférieure  historique  et  archéologique,  par  M.  l'abbé  Cochet  (Paris,  1864, 
in-4°),  p.  506. 

3.  «  Tout  le  monde  a  parlé  de  l'Idole  et  du  temple  de  Roth,  que  les  uns  font  détruire 
par  saint  Mellon,  d'autres  par  saint  Romain.  Sans  pouvoir  donner  de  motifs  déterminants 
nous  penchons  pour  le  premier.  —  On  est  allé  jusqu'à  indiquer  la  place  du  temple  de  ce 
dieu  gallo-romain.  On  désigne  ordinairement  le  terrain  occupé,  au  moyen-âge,  par  l'église 
et  l'abbaye  de  Saint-Lô.  Ce  point,  en  effet,  est  couvert  de  débris  antiques  d'une  haute 
importance  et  d'une  grande  profondeur.  Parmi  ceux  qui  tiennent  pour  cette  tradition, 
nous  citerons  :  M.  Rondeaux,  Notices  et  extraits  des  manuscrits  de  la  Bibliothèque  du  Roi, 
t.  III,  p.  S9'-92.  —  Servin,  Histoire  de  la  ville  de  Rouen,  t.  I"',  p.  42-47.  —  Périaux, 
Dictionnaire-  indicateur  des  Rues  et  Places  de  Rouen,  p.  xiv-xv,  141,  275. —  [Lever]  Dis- 
sertation sur  l'abolition  du  culte  de  Roth,  in-8  ■  de  52  p.  Paris,  1829.»  Ibid,  p.  so6.  n.  i. 
—  Le  titre  complet  de  la  brochure  anonyme  publiée  par  le  marquis  Lever  est  :  Disser- 
tation sur  l'abolition  du  culte  de  Roth,  soit  par  saint  Mellon,  i"  êvêque ,  soit  par  saint 
Romain,  9*  évéque  de  Rouen. 

4.  Cochet,  ibid.  p.  m?- 


BIBLIOGRAPHIE 


La  Table  de  Peutinger,  d'après  l'original  conservé  à  Vienne  ;  précédée  d'une 
introduction  historique  et  critique  et  accompagnée  :  i"  d'un  index  alphabétique 
des  noms  de  la  carte  originale  avec  les  lectures  des  éditions  précédentes  ;  2"  d'un 
texte  donnant,  pour  chaque  nom,  le  dépouillement  géographique  des  auteurs 
anciens,  des  inscriptions,  des  médailles,  et  le  résumé  des  discussions  touchant 
son  emplacement;  y  d'une  carte  de  redressement  comprenant  tous  les  noms 
à  leur  place  et  identifiés,  quand  cela  est  possible,  avec  les  localités  modernes 
correspondantes;  4°  d'une  seconde  carte  établissant  la  conformité  des  indica- 
cations  générales  de  la  table  avec  les  connaissances  présumées  des  Romains 
(orbis  pictus  d'Agrippa);  par  Ernest  Desjardins.  Livraisons  i,  2,  5,  4  et  5. 
In-folio  à  3  col.,VI-84  p.  et  5  pi.  Paris,  lib.  L.  Hachette  etCie,  1869,  10  fr. 
la  livraison. 

L'antique  carte  de  VOrbis  Romanus  connue  sous  le  nom  de  Table  de 
Peutinger,  paraît  enfin  dans  une  édition  splendide,  correcte  et  défini- 
tive, qui,  confiée  aux  soins  de  M.  E.  Desjardins,  se  fait  aux  frais  du 
Ministère  de  l'Instruction  Publique  de  France.  L'édition  la  plus  récente 
comme  la  plus  autorisée  de  la  Table  de  Peutinger,  publiée  en  1 824  par 
le  célèbre  géographe  Mannert,  péchait  par  mainte  erreur  et  par  mainte 
omission.  Ainsi,  en  ce  qui  concerne  la  Gaule,  huit  tracés  de  voie  étaient 
omis,  et  plusieurs  noms  de  lieu  avaient  été  mal  lus.  Il  y  a  quelques 
années,  M.  A.  Maury,  comparant  l'édition  de  Mannert  avec  l'original 
de  la  Table  conservé  à  Vienne,  avait  découvert  un  bon  nombre  des 
erreurs  touchant  la  Gaule,  et  avait  consigné  ses  corrections  dans  la 
Revue  Archéologique  fjanvier  1864).  Continuant  et  poussant  plus  loin 
l'examen  commencé  par  M.  Maury,  M.  E.  Desjardins  releva  dans  l'édi- 
tion entière  de  Mannert  trois  cent  quatre-vingt-sept  erreurs  graves. 
Il  était  évident  qu'une  nouvelle  édition  de  la  Table  de  Peutinger  deve- 
nait nécessaire,  et  le  Ministre  de  l'Instruction  Publique  ne  pouvait  con- 
fier cette  tâche  à  une  personne  plus  compétente  que  M.  Desjardins.  Le 
titre  de  l'œuvre,  que  nous  avons  transcrit  en  entier,  en  dit  d'avance  le 
contenu  ;  ajoutons  qu'il  y  sera  joint  onze  cartes,  reproduisant  en  fac- 
simite  et  en  couleur  les  onze  segments  de  la  carte  originale. 

De  ce  grand  ouvrage  qui  ne  sera  peut-être  pas  complété  avant  quelque 


144  Bibliographie. 

temps,  cinq  livraisons  ont  paru.  Ce  sont  celles  qui  intéressent  le  plus  les 
lecteurs  de  cette  Revue,  car  ce  sont  celles  qui  renferment  la  Gaule.  Elles 
comprennent  :  le  rapport  au  Ministre  où  M.  D.  explique  la  nécessité 
d'une  nouvelle  édition  et  le  plan  qu'il  suivra  dans  son  travail  ;  les  plan- 
ches des  segments  I,  II,  III,  IV  et  V  de  la  carte  originale;  et  le  com- 
mentaire sur  la  nomenclature  de  ces  segments,  c'est-à-dire  qu'à  l'occasion 
de  chacun  des  noms  de  la  Table  de  Peutinger,  M.  D.  donne  le  dépouille- 
ment géographique  de  tous  les  textes  grecs  et  latins,  des  inscriptions  des 
monnaies  et  des  auteurs  du  moyen-âge  ;  puis  il  résume  les  discussions 
qu'a  provoquées  l'identification  du  nom  ancien  avec  un  nom  actuel; 
quand  l'identification  est  douteuse,  il  mentionne  les  diverses  opinions. 
On  trouve  là,  réunis  avec  une  patience  et  un  labeur  qu'on  ne  saurait 
trop  louer,  les  renseignements  les  plus  divers  sur  l'ancienne  topographie 
de  la  Gaule  et  sur  l'histoire  particulière  des  localités;  et  la  philologie 
fera  son  profit  de  toutes  les  formes  d'un  même  nom  groupées  et  chro- 
nologiquement disposées. 

Après  ce  commentaire  sur  les  noms  de  lieu  de  la  Gaule  donnés  par 
la  Table,  viennent  des  Observations  particulières  sur  la  Gaule  d'après  la 
Table  de  Peutinger.  Dans  cette  longue  et  intéressante  dissertation,  M.  D. 
étudie  «  les  vénérables  débris  de  la  géographie  celtique  «  et  les  rensei- 
gnements qu'on  peut  tirer  de  la  Table  pour  la  restitution  géographique 
de  la  Gaule  au  temps  d'Auguste.  Il  donne  une  liste  des  villes  et  des 
localités  dont  les  noms  sont  certainement  antérieurs  à  la  mort  d'Au- 
guste, et  un  tableau  comparatif  des  provinces  et  des  cités  de  la  Gaule, 
1°  à  la  mort  d'Auguste  (an  14  après  J.-C.)  ;  2°  au  milieu  du  11*  siècle  de 
notre  ère;  3°  à  la  fin  du  iv.  L'examen  auquel  M.  D.  soumet  la  partie 
gauloise  des  segments,  et  ses  recherches  sur  l'origine  de  la  Table, 
l'amènent  aux  conclusions  suivantes  :  «  On  voit,  dit-il,  que  le  dépouille- 
»  ment  de  la  Gaule  d'après  la  Table  de  Peutinger  étant  opéré,  de  telle 
>)  sorte  que  nous  puissions  attribuer  à  l'époque  d'Auguste  tous  les  noms 
»  qui  sont  antérieurs  à  cette  date  d'après  les  preuves  historiques, 
»  archéologiques  ou  philologiques  que  nous  avons  rapportées,  il  ne  res- 
»  tera  que  bien  peu  d'éléments  imputables  au  iV  siècle.  Sauf  le  réseau 
»  des  routes  dont  une  petite  partie  seulement  remonte  avec  certitude 
)>  au  temps  d'Agrippa,  on  peut  dire  que  les  provinces,  les  régions,  les 
»  peuples,  sauf  deux  noms  au  delà  du  Rhin,  tous  les  chefs-lieux  de  cité 
n  sans  exception,  presque  tous  les  oppida  et  les  vici  et  un  nombre  consi- 
))  dérable  de  localités  secondaires  sont  certainement  antérieurs  à  l'an  14 
))  de  notre  ère,  et  font  de  la  Table  de  Peutinger  le  monument  de  beau- 
))  coup  le  plus  précieux,  le  plus  authentique  et  le  plus  complet  que  nous 


Bibliographie.  145 

;>  possédions  pour  la  restitution,  et  de  notre  vieille  géographie  celtique, 
»  et,  à  la  fois,  de  l'organisation  de  la  Gaule  par  Auguste  au  lendenriain 
))  de  la  conquête  »  fp.  79,  col.  3). 

Il  est  à  désirer  que  M.  E.  Desjardins  détache  de  son  grand  ouvrage 
ce  qui  a  spécialement  trait  à  la  Gaule,  pour  que  le  public  archéologique 
ait  à  sa  disposition,  dans  un  format  plus  maniable  et  pour  un  prix  moins 
élevé,  un  travail  aussi  utile,  pour  ne  pas  dire  indispensable,  à  l'historien 
de  nos  origines  nationales. 

H.  G. 


De  Galatia  provincia  romana,  thesim  proponebat  Facultati  iitterarufn 
Parisiensi  G.  Perrot.  Lutetias  Parisiorum,  apud  E.  Thorin,  1867,  184  p. 
in-8*.  Prix  :  3  fr. 

On  peut  dire  sans  exagération  que  M.  Perrot  a  fait  sienne^  par  l'éru- 
dition, cette  partie  de  l'Asie  Mineure  que  nos  ancêtres  ont  autrefois 
conquise  par  les  armes.  Il  l'a  explorée  en  tous  sens  ',  et  il  a  eu  la  bonne 
fortune  d'y  découvrir,  sur  un  monument  d'Ancyre,  le  texte  le  plus  com- 
plet que  l'on  connaisse  du  testament  de  l'empereur  Auguste.  Sa  disser- 
tation De  Galatia  est  une  excellente  et  complète  monographie  de  l'his- 
toire politique  de  cette  province.  Elle  est  divisée  en  quatre  parties. 
Dans  la  première,  l'auteur  résume  les  événements  qui  se  sont  succédé 
dans  cette  partie  de  l'Asie  Mineure  depuis  l'invasion  des  Gaulois  jusqu'à 
sa  réduction  en  province  romaine.  Dans  la  seconde,  il  indique  les 
limites  et  les  divisions  de  la  province  de  Galatie;  les  inscriptions  et  les 
monnaies  lui  fournissent  ici  des  renseignements  certains.  La  troisième, 
consacrée  à  l'organisation  de  la  province,  repose  également  sur  les 
documents  épigraphiques  ;  et  c'est  principalement  à  l'aide  de  ces  docu- 
ments que  M.  P.  a  pu  reconstituer  aussi  complètement  que  possible  la 
série  des  légats  romains  en  Galatie.  La  quatrième  et  dernière  partie 
comprend  l'administration  de  la  Galatie  sous  l'Empire.  M.  P.  termine 
en  discutant  le  passage  souvent  cité  de  saint  Jérôme,  d'après  lequel  la 
langue  gauloise  aurait  subsisté  en  Galatie  jusqu'au  iv*^  siècle  de  notre 
ère.  M.  P.  avait  omis  de  citer  les  témoignages  ajoutés  par  M.  Diefen- 
bach  à  celui  de  saint  Jérôme.  Heureuse  omission!  dirions-nous  volon- 
tiers; car  elle  nous  vaut  une  communication  de  M.  Perrot  qu'on  trou- 
vera plusloin^,  et  qui,  nous  l'espérons,  mettra  fm  à  un  préjugé  accrédité 


1 .  Il  a  consigné  les  résultats  de  ce  voyage  scientifique  dans  son  livre  intitulé  :  Explo- 
ration archéologique  de  la  Galatie,  de  la  Bithynie,  etc. 

2.  Nous  nous  apercevons  au  dernier  moment  que  le  manque  d'espace  nous  force  à 
remettre  à  la  prochaine  livraison  la  lettre  de  M.  Perrot. 


146  Bibliographie. 

depuis  longtemps  sur  la  foi  de  saint  Jérôme.  —  N'oublions  pas  de  dire 
que  la  dissertation  de  M.  P.  est  écrite  dans  une  exquise  latinité  et  se  lit 
avec  autant  de  plaisir  que  de  fruit. 

H.  G. 


Gally  V  epochu  Kaïa  Julia  Cesaria.  Sotchinenie  Alexandra  Gedugieys- 
KAGO.  [Les  Gaulois  au  temps  de  César,  par  M.  Alexandre  Georgievsici.] 
X-525  p.  in-8*.  Moscou,  186^. 

Nous  ne  parlerions  point  d'une  œuvre  vieille  déjà  de  cinq  ans,  si  elle 
n'était,  malgré  son  ancienneté,  une  nouveauté  pour  l'Europe  Occiden- 
dentale.  Elle  n'a  point  été,  malgré  sa  haute  valeur,  signalée  par  la 
presse  savante  d'Europe;  c'est  un  peu  la  faute  de  l'auteur  ....Russiciun 
est,  non  legitur.  Longtemps  professeur  d'histoire  aux  universités 
d'Odessa  et  de  Charkow,  aujourd'hui  directeur  du  «  Journal  du 
Ministère  de  l'Instruction  publique  «  à  Saint-Pétersbourg ,  M. 
Georgie\^ki  apporte  dans  ce  livre  le  résultat  de  longues  et  conscien- 
cieuses recherches.  Joignant  à  l'étude  des  textes  anciens  la  connaissance 
des  travaux  modernes  sur  la  Gaule,  il  a  écrit  un  livre  qui  n'est  pas  seule- 
ment un  excellent  tableau  de  la  civilisation  et  de  l'histoire  des  anciens 
Gaulois,  mais  où  abondent  les  observations  originales  et  les  vues  nou- 
velles. La  partie  la  plus  originale  de  son  ouvrage  est  celle  qui  traite  de 
la  religion  des  Gaulois,  sujet  ardu  et  obscur  que  l'on  commence  à  peine 
à  étudier  d'une  façon  critique  par  l'examen  simultané  et  comparé  des 
monuments  figurés,  des  inscriptions  votives  et  des  traditions  populaires. 
L'opinion  de  M.  G.  est  que  les  croyances  des  Gaulois  tenaient  de 
plus  près  à  celles  des  Germains  qu'à  celles  de  tout  autre  peuple  de  l'unité 
indo-cehique,  et  il  s'appuie  surtout  sur  la  mythologie  germanique  pour 
expliquer  les  débris  mutilés  de  la  mythologie  gauloise.  Dans  un  sujet 
aussi  neuf,  l'hypothèse  est  chose  permise  —  et  ordinaire;  nous  croyons 
pourtant  qu'il  est  trop  hardi  d'admettre  a  priori  entre  les  mythes  cel- 
tiques et  germaniques  une  parenté  intime,  un  lien  fraternel  qui  en  fasse 
un  groupe  à  part.  Mais  si  la  thèse  de  M.  G.  nous  semble  exagérée 
dans  son  principe,  nous  devons  reconnaître  qu'il  y  a  dans  les  détails 
maint  rapprochement  ingénieux,  et  peut-être  serait-il  bon  de  publier  ici 
quelques  extraits  de  cette  partie  du  livre  de  M.  Georgievski. 

Nous  félicitons  la  littérature  historique  de  la  Russie  de  posséder  une 
oeuvre  aussi  remarquable,  mais  en  même  temps  nous  adjurons  les  savants 
slaves  d'écrire  en  français  ou  en  allemand  (langues  qu'ils  savent  tous), 
lorsqu'ils  traitent  de  matières  d'un  intérêt  général.  C'est  le  seul  moyen 
de  rendre  leurs  livres  accessibles  au  public  spécial  et  compétent,  en 


Bibliographie.  147 

même  temps  que  de  faire  profiter  la  science  de  leurs  recherches  et  de 
leurs  observations.  Nous  désirons  vivement  que  le  livre  de  M.  Geor- 
gievski  soit  traduit  en  français  :  il  ferait  bonne  figure  auprès  des 
meilleurs  ouvrages  que  l'on  ait  encore  consacrés  à  l'antiquité  gauloise. 


Pravek  Zeme  Czeske.    [La   Bohême  anté-historique,  par  M.  Jean-Erasme 

WocEL,  professeur  à  l'Université  de  Prague,  etc.]  Un  volume  in-8*  (en  deux 
parties)  de  576  pages  (avec  194  figures  et  une  cartej.  Ouvrage  publié  aux 
frais  de  la  Société  Royale  des  Sciences  de  Bohême.  Prague,  librairie  Tempsky, 
1866-68. 

M.  Wocel  a  déjà  publié  en  tchèque  et  en  allemand  d'importants  tra- 
vaux littéraires  et  historiques.  L'ouvrage  écrit  en  tchèque  que  nous 
annonçons  aujourd'hui  a,  ainsi  que  l'indique  le  titre,  l'honneur  d'être 
publié  par  la  Société  des  Sciences  de  Prague,  et  a  valu  à  son  auteur  le 
titre  de  docteur  de  l'Université  de  Saint-Pétersbourg.  Ce  sont  là  de 
sérieuses  recommandations.  Cet  ouvrage,  dit  M.  Wocel  dans  la  préface, 
est  le  résultat  de  plus  de  vingt  ans  de  recherches  archéologiques.  Il  se 
divise  en  deux  parties  :  l'une  comprend  la  période  antérieure  à  l'appari- 
tion des  Tchèques  dans  l'histoire;  l'autre  étudie  la  Bohême  slave  jusqu'à 
l'avènement  du  christianisme  (du  vi''  au  x"  siècle  après  J.-C).  Cette 
partie  est  fort  estimée.  Mais  la  première  seule  intéresse  les  lecteurs  de 
la  Revue.  On  sait  que  la  Bohême  a  été  pendant  un  certain  temps  occupée 
par  un  peuple  celtique,  les  Boïens.  Après  avoir  dans  les  chapitres  I  et  II 
signalé  les  monuments  que  l'âge  de  pierre  et  l'âge  de  bronze  ont  laissés 
en  Bohême,  M.  Wocel  s'occupe  dans  les  chapitres  III_,  IV,  V,  VI  et  VII 
de  la  période  cehique  de  l'histoire  bohème.  Ces  chapitres  occupent  près 
de  100  pages  in-8°.  Étudiant  l'époque  où  les  Celtes  ont  dû  occuper  le 
sol  de  la  Bohême  actuelle,  M.  Wocel  constate  ce  fait  que  partout  où  se 
rencontre  l'élément  cehique  les  objets  de  bronze  sont  fort  abondants  : 
il  démontre  que  les  Boïens  faisaient  partie  des  émigrants  gaulois  con- 
duits par  Sigovèse  et  qu'ils  ont  occupé  le  pays  depuis  l'an  600  avant 
J.-C.  jusqu'à  l'an  60  de  notre  ère.  —  Cette  thèse  est  contraire  à  l'opi- 
nion généralement  reçue  qui  fait  arriver  les  Celtes  en  Bohême  en  388  et 
leur  fait  quitter  ce  pays  en  l'an  1 2  de  notre  ère  ' . 

Le  chapitre  IV  expose  d'après  les  sources  connues  la  religion,  les 
mœurs,  les  usages  des  Gaulois. 


I.  [r^l.  Wocel  avait  déjà  développé  cette  thèse  avec  une  grande  force  d'argumentation 
dans  un  travail  écrit  en  allemand,  Ueber  den  Zug  der  Kelîen  nach  Italien  und  zum  hercy- 
nischen  Walde  et  publié  dans  les  mémoires  de  la  «  Société  Royale  des  Sciences  »  de 
Prague  pour  1865.  —  H.  G.] 


148  Bibliographie. 

■  Le  chapitre  V  traite  des  fortifications  celtiques  d'après  César  et 
recherche  les  traces  que  ce  genre  de  fortifications  a  laissées  en  Bohême. 
M.  Wocel  signale  des  fortifications  de  pierres  et  de  briques  en  plusieurs 
endroits  de  la  Bohême  et  en  reproduit  la  configuration.  Ces  dessins  qui, 
croyons-nous,  sont  pour  la  plupart  inédits,  ont  un  grand  intérêt  pour 
les  archéologues,  et  peut-être  la  Revue  aura-t-elle  l'occasion  d'en  repro- 
duire quelques-uns. 

Dans  le  chapitre  VI  M.  Wocel  étudie  les  noms  des  montagnes  et  des 
fleuves  bohèmes  que  l'on  trouve  dans  les  anciens,  les  oppida  celtiques 
que  Ptolémée  place  dans  le  Bojohemum  et  les  pays  environnants  ;  enfin 
les  noms  de  lieu.  Il  compare  lés  monuments  celtiques  des  différents  pays 
à  ceux  qui  se  trouvent  en  Bohême,  et  recherche  quelles  pouvaient  être 
les  voies  commerciales  des  Boiens.  M.  Wocel  signale  l'existence  en 
Bohême  de  quelques  monuments  mégalithiques,  etc. 

Le  chapitre  VII  étudie  les  monnaies  celtiques  trouvées  en  Bohême^,  et 
dont  un  grand  nombre  est  conservé  soit  au  musée  national  de  Prague, 
soit  dans  les  collections  particulières  du  pays.  De  nombreuses  figures 
donnent  un  intérêt  tout  particulier  à  cette  partie  de  l'ouvrage.  Signalons 
notamment  un  sanglier  de  bronze  qui  se  trouve  au  musée  de  Prague. 

Sans  être  compétent  pour  apprécier  les  interprétations  de  M.  Wocel, 
il  m'est  permis  de  dire  que  son  travail  me  paraît  consciencieusement 
fait.  Espérons  que  l'auteur  voudra  bien  communiquer  quelquefois  à  la 
Revue  Celtique  le  résultat  de  ses  doctes  recherches. 

Louis  Léger. 


Grammatica  Celtica  e  monumentis  vetustis  tam  hibernicae  linguas  quam  britan- 
nicarum  dialectorum  Cambricas,  Cornic?e,  Aremoricae,  comparatis  Gallica?  priscae 
reliquiis;  constru.xit  J.  C.  Zeuss.  Editio  altéra.  CuravitH.  Eiîel.  FasciculusI. 
Berolini  apud  Weidmannos,  MDCCCLXVIII.  480  p.  gr.  in-8.  Prix  :  4 th.  (  1 5  fr.). 

M.  Ebel  vient  de  publier  à  Berlin  la  première  partie  de  la  seconde 
édition  de  la  Grammaire  Celtique  de  Zeuss.  Cette  publication  doit  être 
reçue  avec  reconnaissance  non-seulement  par  ceux  qui  ont  fait  des 
langues  et  des  littératures  celtiques  l'objet  spécial  de  leurs  études,  mais 
aussi  par  tous  ceux  qui  s'occupent  de  linguistique  et  de  grammaire  com- 
parée. La  glossologie  celtique  ne  date  pas  de  bien  loin.  Elle  a  été 
inaugurée,  en  quelque  sorte,  il  y  a  un  peu  plus  de  30  ans,  par  la  publi- 
cation du  mémoire  De  l'affinité  des  langues  celtiques  avec  le  sanscrit,  par 
M.  Adolphe  Pictet,  qui  eut  le  mérite  de  signaler,  le  premier,  la  bonne 
voie,  et  de  deviner  pour  ainsi  dire  la  nouvelle  science.  Le  mémoire  de 
M.  Pictet  fut  publié  à  Paris  en  1857.  Deux  travaux  remarquables  sui- 


Bibliographie.  149 

virent  cette  première  et  heureuse  tentative  de  M.  Pictet,  un  de  M.  Bopp, 
publié  à  Berlin  en  1859,  sous  le  titre  de  Die  Celtischen  Sprachen,  l'autre 
de  M.  Diefenbach,  publié  à  Stuttgart  en  1859  et  1840,  sous  le  titre  de 
Celtica.  Mais  l'honneur  d'avoir  fondé  sur  une  méthode  rigoureuse  et  sur 
une  base  solide  la  glossologie  celtique,  appartient  incontestablement 
à  M.  Zeuss.  Après  de  longues  études  faites  sur  les  anciens  manuscrits 
irlandais  et  britanniques,  Zeuss  publia,  tout  à  coup,  en  1853,  à  Leipzig, 
sa  Grammatica  Celtica,  qui  fut,  je  n'hésite  pas  à  le  dire,  l'un  des  grands 
événements  philologiques  de  ce  siècle.  Ce  qu'il  fallut  à  cet  illustre  savant 
de  patience,  de  sagacité,  d'intelligence,  je  dirais  même  de  génie,  pour 
construire  cet  admirable  monument  qu'il  a  nommé  Grammatica  Celtica, 
ceux-là  seulement  peuvent  l'imaginer  qui  se  sont  trouvés  dans  le  cas  de 
consulter  les  vieux  parchemins  d'oi^  Zeuss  a  tiré  les  éléments  principaux 
de  son  ouvrage.  La  Grammaire  de  Zeuss,  écrite  en  latin,  embrasse  à  la 
fois  la  langue  irlandaise  et  les  dialectes  de  la  branche  britannique  ;  elle 
contient  la  phonologie,  les  flexions,  la  syntaxe,  et  de  précieux  spécimens 
des  langues  celtiques  des  deux  branches,  extraits  des  anciens  manuscrits. 
La  partie  phonétique  et  celle  concernant  la  composition  et  la  dériva- 
tion des  mots  sont  tout  spécialement  remarquables  et  on  peut  dire 
qu'elles  ont  été  une  véritable  révélation. 

Toutefois,  la  Grammaire  de  Zeuss,  comme  toute  œuvre  humaine,  avait 
des  défauts  et  des  imperfections.  Le  défaut  le  plus  grave  consistait  dans 
la  classification  des  déclinaisons  et  des  conjugaisons  irlandaises,  qui 
n'était  pas  faite  d'après  la  méthode  basée  sur  la  terminaison  des  thèmes 
primitifs.  La  distribution  des  temps  des  verbes  était  également  défec- 
tueuse et  bien  incomplète.  Peut-être,  s'il  avait  vécu,  Zeuss  aurait  corrigé 
lui-même  cette  partie  de  son  ouvrage  dans  une  seconde  édition  qu'il 
semblait  avoir  en  vue.  Mais  il  mourut  trois  ans  après  la  publication  de 
la  Grammatica  Celtica  ',  et  cette  tâche  échut  au  plus  illustre  de  ses  disci- 
ples, à  M.  Ebel,  qui  était  peut-être  le  seul  en  mesure  de  s'en  charger  et 
de  la  mener  à  bonne  fin.  M.  Ebel  s'y  était  du  reste  préparé  par  des 
travaux  considérables,  dont  plusieurs  ont  paru  successivement  dans  les 
différentes  livraisons  du  recueil  publié  par  MM.  Kuhn  et  Schleicher,  qui 
a  pour  titre  :  «  Beitr^ege  ziir  vergleichenden  Sprachforschung  auf  dem 
Gebiete  der  Arischen,   Celtischen  und  Slavischen   Sprachen.  »   Mettant  à 

I.  [La  vie  de  G.  Zeuss  a  été  racontée  par  son  ami  et  disciple  Chr.  W.  Gluck  dans 
une  biographie  qui  suit  une  republication  d'une  dissertation  de  Zeuss  :  Die  Herkunft  der 
Bayern  von  den  Markomannen,  Munich,  1857,  in-8".  Le  savant  irlandais  O'Donovan  a 
ajissi  consacré  à  Zeuss  dans  VUlster  Journal  of  Archieology,  vol.  Vil,  une  notice  que  rend 
encore  plus  intéressante  le  récit  d'une  visite  faite  à  Zeuss,  peu  avant  sa  mort,  par  Sieg- 
fried. —  H.  G.] 


1 50  Bibliographie. 

profit  ces  travaux,  et  tenant  compte  de  ceux  publiés  dans  le  même 
recueil  par  MM.  Schleicher  et  Lottner,  ainsi  que  des  publications  impor- 
tantes et  nombreuses  faites  avec  un  zèle  infatigable  par  M.  Whitley 
Stokes,  M.  Ebel  s'est  mis  à  l'œuvre  avec  courage  et  il  a  entrepris  atec 
une  attention  intelligente,  patiente  et  en  même  temps  respectueuse  pour 
l'œuvre  du  maître,  la  révision  et  la  correction  de  la  Grammatica  Celtica. 
C'est  la  première  partie  de  ce  vaste  travail  qui  vient  de  paraître,  sous  le 
titre  ci-dessus  indiqué,  dans  un  gros  volume  de  480  pages.  M.  Ebel  suit 
l'ordre  des  matières  qui  avait  été  fixé  par  Zeuss.  La  préface  n'a  pas 
encore  paru.  Cette  première  partie  comprend  : 

I.  Le  livre  1'^''  :  «  de  sonis  »  divisé  en  :  i'^''  chap.,  «  de  sonorum 
seriebus,  natura,  infectione;  2"  chap.  :  «  de  consonis  voces  inchoan- 
tibus,  earumque  infectione.  » 

IL  Le  livre  2"  :  «  de  nomine  et  pronomine  »  divisé  en  :  i"  chap., 
«  de  tribus  generibus  veteris  linguae  et  articulo  ;  »  2"  chap.  :  «  de  no- 
minis  flexione  ;  »  je  chap.  :  «  de  numerahbus  ;  «  4^  chap.  :  «  de  prono- 
minibus.  » 

IIL  Le  livre  3"  :  «  de  verbo,  »  divisé  en  :  i'^''  chap.,  «  de  systemate 
verbi  et  particulis  verbalibus  ;  »  2*^  chap.  :  «  de  verbi  flexione.  » 

Ce  chapitre  n'est  pas  terminé.  La  publication  s'arrête  au  présent 
secondaire  passif  du  verbe  irlandais. 

Je  voudrais  pouvoir  indiquer  ici  toutes  les  améliorations  et  toutes  les 
additions  faites  à  la  Grammaire  de  Zeuss  par  son  nouvel  éditeur.  Mais 
le  temps  et  l'espace,  et  j'ajoute  aussi  les  études  nécessaires,  me  man- 
queraient pour  cela.  Je  me  bornerai,  dans  les  limites  qui  me  sont  per- 
mises, à  donner  à  ce  sujet  quelques  indications  sommaires.  D'abord 
M.  Ebel  a  fait  dans  tout  le  cours  de  l'ouvrage  des  corrections  dans  la 
transcription  et  dans  la  traduction  des  gloses  citées  par  Zeuss.  Un  nom- 
bre considérable  de  nouvelles  gloses,  spécialement  dans  la  partie 
irlandaise,  a  été  inséré  dans  tout  l'ouvrage.  Nous  citons  particulièrement 
les  gloses  irlandaises  empruntées  aux  publications  de  M.  Stokes,  Three 
Irish  Glossaries  et  Goidilica.  Des  exemples  trop  douteux  de  transpositions 
de  lettres  dans  les  mots  celtiques,  que  Zeuss  avait  accueillis  sans  un 
fondement  suffisant  (V.  la  note  à  la  p.  45,  Gr.  C),  ont  été  éliminés  dans 
la  nouvelle  édition.  Les  gloses  nouvellement  ajoutées,  ainsi  que  celles 
citées  dans  la  première  édition,  que  Zeuss  laissait  quelquefois  sans  tra- 
duction, sont  accompagnées  ici,  presque  constamment,  de  la  traduction 
latine,  ce  qui  est  d'une  grande  utilité  pour  le  lecteur.  A  la  fin  du  premier 
chap.  du  premier  liv.,  M.  Ebel  a  ajouté,  sous  le  titre  de  avaria  quaedam,» 
des  remarques  intéressantes  sur  l'inconstance  des  accents  marquant  la 


Bibliographie.  1 5 1 

quantité,  sur  l'élision  et  l'interposition  des  voyelles  et  la  transposition  des 
consonnes,  sur  le  zétacisme,  sur  quelques  changements  de  consonnes, 
et  sur  les  syllabes  finales.  Peut-être  aurait-il  été  désirable  qu'il  fit  une 
plus  large  part  aux  recherches  sur  l'influence  que  l'accent  tonique  exerce 
sur  la  phonologie  irlandaise,  dans  la  composition  des  mots,  dans  l'élision 
et  la  transposition  des  lettres,  et  dans  les  phénomènes  de  prolongation  et 
de  diphthongaison  des  voyelles  qui  en  sont  la  conséquence. 

Mais  j'ai  hâte  de  signaler  l'amélioration  la  plus  importante,  celle  qui  fait 
de  la  nouvelle  édition  de  la  Grammatica  Celtica  un  ouvrage  presque  nouveau, 
et  qui  marque  un  véritable  progrès  dans  la  science.  M.  Ebel  a  distribué 
les  déclinaisons  des  noms  et  les  conjugaisons  des  verbes  irlandais  selon 
les  terminaisons  des  thèmes  primitifs,  ce  qui  n'avait  pas  été  fait  par 
Zeuss.  Les  déclinaisons  sont  divisées  en  deux  «  ordres,  »  l'un  pour  les 
thèmes  terminés  en  voyelles,  l'autre  pour  ceux  terminés  en  consonnes. 
Le  premier  «  ordre  »  contient  trois  séries  de  thèmes  masculins  et  neu- 
tres terminés  :  1°  en  ^  etya  ;  20  en  /;  3"  en  u,  et  deux  séries  de  thèmes 
féminins  terminés  :  4°  en  ^  et  ja;  50  en  /  '.  Le  second  «  ordre  »  contient, 
en  six  séries,  les  thèmes  terminés  en  consonnes.  Une  septième  série  est 
réservée  pour  les  thèmes  terminés  originairement  en  diphthongues,  mais 
M.  Ebel  en  a  trouvé  un  seul  exemple  dans  le  mot  bô  (bos).  Les  conju- 
gaisons des  verbes  ont  été  divisées  par  M.  Ebel,  conformément  à  la 
théorie  exposée  par  M.  Stokes  (Beitr.  III,  47),  d'après  les  thèmes  du 
présent,  en  trois  séries  :  1°  pour  les  thèmes  terminés  er\  à;  2°  pour  les 
thèmes  terminés  en  J;  30  pour  les  thèmes  terminés  en  ia.  Une  série 
spéciale  comprend  les  verbes  déponents.  M.  Ebel  a  judicieusement  dis- 
tingué les  formes  absolues  de  celles  qu'il  appelle  «  subjunctae  »  et  dans 
les  formes  redoublées  il  a  eu  soin  de  déterminer  celles  qui  ont  conservé 
la  réduplication,  celles  qui  l'ont  perdue  et  celles  qui  l'ont  remplacée  par 
la  prolongation  de  la  voyelle  radicale.  Il  a  en  outre  déterminé  les  temps 
composés,  c'est-à-dire  ceux  qui  sont  caractérisés  par  l'insertion  entre  la 
racine  et  la  terminaison  d'un  élément  nouveau  (t,  b  [f],  ou  s).  Cette 
partie,  qui  est  de  beaucoup  la  plus  importante  de  l'œuvre  de  M.  Ebel, 
mériterait  une  étude  spéciale  et  approfondie.  Il  serait  surtout  intéressant 


I.  L'auteur  ne  parle  pas  de  thèmes  féminins  en  u.  Ces  thèmes,  il  est  vrai,  sont  déjà 
rares  dans  la  langue  latine,  qui  souvent  fait  passer  dans  la  déclinaison  en  ('  les  thèmes 
originaires  en  u.  Toutefois,  comme  les  langues  grecque  et  latine  ont  conservé,  bien 
que  dans  une  mesure  différente,  des  thèmes  féminins  en  u,  il  serait  assez  naturel  que 
l'ancien  irlandais  ait  aussi  gardé  quelques  traces  de  cette  forme.  Peut-être  le  mot  deug, 
fém.  (potus),  gén.  sing.  dige,  que  l'auteur  place  parmi  les  thèmes  féminins  en  a,  en  est 
un  exemple.  M.  Stokes,  dans  une  lettre  qu'il  vient  de  m'adresser,  semble  se  prononcer 
en  faveur  de  cette  hypothèse. 


1^2  Bibliographie. 

d'examiner  si  le  cadre  des  paradigmes  des  verbes  irlandais,  tel  qu'il  a 
été  proposé  par  M.  Ebel,  est  assez  complet  pour  embrasser  toutes  les 
formes  que  présentent  les  textes  anciens.  Les  études  auxquelles  M.  Stok.es 
s'est  livré  sur  ce  sujet  ne  pourront  manquer  d'y  apporter  une  vive 
lumière  et  nous  en  attendons  les  résultats  avec  le  plus  grand  intérêt. 

Dans  une  œuvre  aussi  considérable  que  la  refonte  de  la  Grammaire 
Celtique,  il  était  presque  impossible  d'éviter  quelques  erreurs  de  détail. 
Je  hasarderai  à  ce  sujet  quelques  remarques,  surtout  pour  ce  qui  concerne 
les  citations  des  gloses  irlandaises  de  Milan,  que  j'ai  pu  vérifier  sur  le 
manuscrit  original. 

Aux  pages  $  et  412,  roadbartaigset  est  traduit  par  «  obtulerunt  »  et 
oc  adbartugud  par  «  in  ofïerendo.  Il  faut  traduire  «  adversati  sunt  »  et 
«  in  adversando.  »  Ce  verbe  dont  la  racine  est  barî,  orig.  VAR-T,  ne 
doit  pas  être  confondu  avec  le  verbe  aidbiur  (offero),  dont  la  racine  est 
ber,  orig.  BHAR.  Les  gloses  de  Milan  ne  laissent  aucun  doute  sur  le  sens 
des  mots  que  je  viens  de  citer.  Exemples  :  cianudadbartaigii  som  danisa 
(gl.  aduersantes  mihi)  19^  ;  honaib  adbartaib  (gl.  aduersariis)  24^  ;  co 
adbartaigid  (gl.  auersetur)  36^  ;  ni  adbartaigedar  igl.  non  auersatur  36^  ; 
adbarîaigfersa  (gl.  auersabor)  37^  ;  adbartaigther  .i.  frisorcaissiu  on  gl. 
auersaris,  44''  ;  innan  adbartaichîhe  (gl.  aduersorum)  44''  ;  annunadbar- 
îaigfesiu  (gl.  ausersato)  48-^  ;  air  ni  roadbartaigestar  (gl.  quia  non  fuerat 
auersatus;  55'^  ;  lia  adbartaiginnse  (gl.  auersabar)  1 32  =.  La  gloSe  entière 
d'où  ont  été  tirés  les  mots  cités  dans  la  Gr.  C.  *  est  ainsi  écrite  :  .i. 
dinaib  cumachtgaib  echtrannaib  roadbartaigset  don  popul  7  di  cacli  di 
suidib  immenetar.  oc  adbartugud  dialailiu  (gl.  unde  beatus  dauid  de 
utrisque  id  est  tam  externis  quam  domesticis  malis  in  hoc  loco  uel  suppli- 
cationes  populi  inserit  uel  querellas,  i.e.  de  potentibus  externis  qui 
adversati  sunt  populo,  etc.)  Ml.  26  ^. 

P.  278  :  le  superlatif  doirbem  n'a  pas  la  terminaison  en  bem,  mais  en 
em.  Le  b  appartient  à  la  racine,  comme  dans  la  forme  parallèle  soirhem 
(gl.  quonihil  estfacilius)  Ml.  $6  ^  Les  formes  du  positif  sont  doirb,  soirb. 
Cf.  tri  insci  redi  7  soirb  (per  sermonem  commodum  et  facilem)  Ml.  51^; 
soirbiu  (gl.  facilior)  74^. 

P.  336  :  le  mot  mathirse  de  la  poésie  du  ms.  de  Milan  est  traduit 
«  mea  mater.  »  Il  doit  être  lu  m-athir-se  et  traduit  «  meus  pater.  »  La 
phrase  entière  est  mathirse  a  mathirsem  et  elle  signifie  «  meus  pater 
[erat]  mater  ejus  »,  ce  qui  est  du  reste  conforme  au  sens  de  cette  étrange 
poésie  qui  raconte  l'enfantement  d'un  garçon  par  un  homme  «  sine 
matre,  sine  paternâ  generatione  »  cenmathir  cenathargein.  Je  trouve  cette 
même  explication  dans  une  note  manuscrite  de  M.  W.  M.  Hennessy  et 


Bibliographie.  IJJ 

dans  un  article  de  M.  J.  O'Beirne  Crowe  inséré  dans  «  The  Journal  of 
the  historical  and  archaeological  Association  of  Ireland  ».  3  Ser.  Vol.  I. 
No.  6.  p.  301. 

Pp.  434,  439  et  473  :  arachela  Ml.  jia,  focridigedar  ]f;  cochutrum- 
maigidir  25^^  et  dufuibniter  24^^,  sont  présentés  comme  des  formes  du 
présent  indicatif.  D'après  les  gloses  latines  correspondantes  dums.  «  quae 
frustretur  »,  «  accingat»,  «  ut...  exaequet  »,  «  incidantur  »,  ces  formes 
devraient  appartenir  au  conjonctif. 

P.  437  :  am  sluces  est  traduit  «  ut  patet  »  au  lieu  de  «  ut  obruit«. 
La  glose  entière  est  :  am  sluces  anadnacul  nersoilcthe  nitete  ind  7  dutét 
brentu  as  sic  est  gutor  [leg.  guttur]  eorum  (gl.  quia  rem  mortis  operan- 
tur  sepulcrorum  uice  longe  horrorem  foetoris  éructant  .i.e.  sicut  obruit 
sepulcrum  apertum  quidquid  it  in  illud  et  venit  foetor  ex  eo)  Ml.  22b.  La 
forme  ind  (in  eo:,  qui  se  trouve  dans  cette  glose,  n'est  pas  citée  par 
Zeuss. 

P.  445  :  dureised  (gl.  enudare)  semble  être  considéré  comme  un 
présent  secondaire  simple.  Cette  forme  appartient  au  conjonctif  secon- 
daire en  5.  La  racine  est  rach,  anc.  rac;  cf.  durig  ''gl.  nudat)  Ml.  28^;  ^iz- 
choimarraig  gl.  exuerit)  144'';  docomarraig  (gl.  nudauit)  48^^;  dundiring 
(gl.  ad  nuditatem)  28c.  Cf.  gr.  hiv.-oç,  lat.  lac-er. 

P.  457  :  la  forme  ni  conimruldatar  du  ms.  de  Turin  ne  saurait  être  con- 
sidérée comme  un  prétérit  en  î,  si  elle  renferme,  comme  c'est  probable, 
la  même  racine  que  les  formes  imluadad,  imluadi,  Ml.  33*^;,  33^,  cardans 
ce  cas  la  terminaison  est  -atar  et  non  -datar. 

A  la  p.  466  M.  E.  donne,  d'une  manière  douteuse,  il  est  vrai,  la  forme 
fosissetar  comme  3e  pers.  pi.  d'un  prétérit  en  s  et  il  traduit  «  confessi 
sunt  ».  Le  doute  de  l'auteur  était  très  légitime  et  j'ai  hâte  d'ajouter  que 
j'ai  donné .  moi-même  dans  les  Gl.  Taur.  fp.  32)  une  interprétation 
inexacte  de  ce  mot  que  j'ai  traduit  «  declaratur,  confitetur  »  dans  le  sens 
passif.  Cette  forme  est  la  3e  pers.  pi.  du  présent  indicatif  d'un  verbe 
déponent  et  signifie  «  confitentur  ».  Elle  se  trouve  avec  cette  signification 
évidente  dans  une  glose  de  Ml.:  fosissetar apectlhlu  ind  firien  7  asberat  etc. 
(confitentur  peccata  sua  justi  et  dicunt ,  132a.  La  3''  pers.  pi.  du  prétérit 
en  s  serait  'foroissetar  puisque  nous  avons  dans  le  ms.  de  Ml.  la  3"  pers. 
sing.  de  ce  temps:  afiiroissestar  ''gl.  confessus)  46*^;  cf.  fosisefar  mo  pecthu 
''gl.  ero  conpunctus  .  i.  e.  fatebor  peccata  mea)  Ml.  <)S'^  ;  fosisidersu  fgl. 
profetere)  66^. 

P.  473  :  mï  imroimser  (gl.  ne  tempteris  est  supposé  être  une  forme 
passive  du  conjonctif  présent.  Nous  avons  ici  par  contre  la  2"  pers. 
sing.  du  conjonctif  en  s  d'un  déponent,  et  na  imroimser  doit  être  traduit 
«  ne  delinquas  ».  Voir  la  note  2,  p.  i  $6. 


I  ^4  Bibliographie. 

P.  477  :  fondulso,  traduit  «  in  hoc  opère  »,  doit  être  traduit  «  in  hoc 
casu  ».  Cf,  fri  finxit  fochetoir  dotet  a  siuguhhm  fundul  nisiu.  air  is  corda 
dothetfris  is  naib  dolaib  ailib  gl.  aliter  qui  finxit  singulatim  operi  suo  nulle 
adstante  hominum  uel  praesente.  i.e.  tw  «  finxit  »  statim  convenit  xi 
«  singulatim  »  in  hoc  casu,  quia  tô  «  corda  »  convenit  ei  in  aliis  casibus) 
Ml.  53a  Plusieurs  exemples  de  ce  mot  sont  cités  dans  les  «  addenda  et 
corrigenda  »  aux  Gl.  Taur. 

Aux  pp.  215  et  239  :  comme  exemple  d'une  forme  irrégulière  de  l'ar- 
ticle génitif  sing.  masc.  et  du  génitif  sing.  d'un  thème  masc.  en  u,  est 
citée  la  glose  de  Ml.  24^^  :  estosc  innfine  fexpressio  vini).  C'est  là  une 
erreur  de  transcription.  Le  ms.  a  estosc  inna  fine  (expressio  vinorumi  au 
génitif  pluriel.  Le  génitif  sing.  de  ce  mot  dans  les  gloses  de  Milan  est 
régulièrement  ind  fino,  et  sans  article //no, /ï/7^,  77^. 

A  la  même  page  21$,  comme  exemple  d'une  forme  irrégulière  de  l'article 
féminin  à  l'ace,  sing.,  on  cite  la  gl.  de  Ml.  23^  :  trisindchomairli.  Il  faut 
lire,  d'après  le  texte  très  clair  du  ms.,  tris  in  drochomairli  (per  malum 
consilium),  et  l'article  se  trouve  ainsi  tout  à  fait  régulier. 

A  la  p.  347  :  M.  E.  hasarde  une  conjecture  sur  la  forme  aési  d'une 
glose  de  Ml.  ainsi  transcrite  :  aési  inceîhardaiseo.  Le  ms.  porte  tar  aési 
incethardaiseo  fprohis  quatuor)  36c,  avec  la  préposition  nominale  bien  con- 
nue tarési,  taraési,  tarhési,  qui  est  souvent  écrite  séparée  dans  le  ms.  de 
Milan  :  tar  aési. 

A  la  p.  466,  la  forme  jorodamassa  est  citée  deux  fois  comme  exemple 
d'un  futur  en  s.  La  citation  est  erronée.  Le  ms.  a  dans  les  deux  endroits 
22d  et  132^  jorodamarsa. 

Aux  pp.  13  et  165,  les  mots  cô  osnada  ont  pour  glose  «  ad  superiora». 
Le  ms.  a  par  contre  «usque  ad  suspiria»,  ce  qui  est  conforme  au  sens  et  à 
l'étymologie.  Voici  du  reste  la  glosé  entière,  31^  :  cb  osnada  (gl.  bene 
hautem  praemitens  miseriam  adiunxit  et  gemitum  ut  causam  non  tenuis 
sed  grauis  doloris  ostenderet  per  quem  usque  ad  suspiria  ueneretur,  leg. 
veniretur).  Cf.  Corm.  Stok.  1 32  :  osnad  (a  groan)  et  O'R.  ad  voc. 
J'ajoute  quelques  autres  rectifications  : 


Pag. 

Ms. 

8. 

na  erigmea 

— 

26  b. 

no  erigmea  fgl.  uel  querellas 

'3> 

326.  isé  gnithi 

— 

30b. 

.i.  gnithi 

M> 

70.  roithnech  (gl.  serenus^ 

— 

>?  '• 

roithinech  (gl.  sereno) 

22. 

doguilse 

— 

20  b. 

dogailse 

50. 

467.  cithes 

— 

23  1. 

ciathes 

50. 

immechomairsed 

— 

20  b. 

immechoimairsed 

212. 

ar  inaencai 

— 

3ï'- 

ar  incensai 

215 

cosindbrud 

— 

2}  a. 

cosindbiud 

15$ 


Pag. 

217,  270.  inna  cemmen 
234.  erdirc 

242.  innammraithemnachiae 
252.  ocduguidiusiu 
25$.  (gl.  adconversationemna- 
turae) 

»     a  esbatad 
265.  immehimgabam  son  huan- 
dinniiliugud  'gl.  ab  su- 
bita  tuitione) 

»     do  fichemain 
J05.  dognaith...  incoic 
}o8.  forsnasunu  cétn[u] 
326.  congenisom 
J28.  fodunsegaî 
m.  dusngnis 
342.  cid  aratadbaither 

»     huanerbermis 

344.  nadindbed 

345.  rondaberthar 

352.  forinni  dauid 

353.  terwr 

357,  461.  dofoirmfed 
362.  cennach  indlach 
(gl.  interceptione) 

365.  /î/  ^/u/c 

434.  gl.  frustratur 

439.  gl.  açcingit 

»  gl.  exaequat 

443.  corirsin 

445.  frithîarised 

455.  doretarnacht 


Ms. 

22   a. 

//2;2i3  ceimmen 

25   a. 

erdairc 

133a. 

innammraiîhemnechiae 

22  ^ 

acdugaidiusiu 

20  d. 

(gl.  ad  conseruationem  na- 

turae  nostrae) 

I30C. 

a  esbataid 

H''. 

immenlmgabam    son    huandi- 

nuilliugud   (gl.   ac   subita 

tutione) 

36  a. 

do  jeichemain 

16  c. 

dogni...  coic 

133  d. 

forsna  sunu  cétnal 

22  d. 

rongenisom 

27  c. 

fodansegat 

29  ^ 

dusngni 

32  a. 

cid  aratodlaither  ' 

13$   d 

huanerbirmis 

17  a. 

nadmbed 

134  c. 

nondaberthar 

52  ^ 

forsinnl  d. 

26  c 

berîair 

5$  ^■ 

dofoirmsed  l'gl.  adderet) 

32  a. 

cennach  nindlach 

^gl.   interreplione,    leg.    in- 

terrup-) 

24  a. 

ni  dû  aie 

31  ". 

gl.  frustrelur 

35^- 

gl.  accingat 

2^. 

gl.  ut...  exaequet 

134^ 

coririssiu 

34^ 

frithtaised^ 

3?  <^- 

doretarracht  5 

1.  gl.  quare  postolas.  Cf.  todlaigthe  (gl.  petitum)  Ml.  21b;  dotluichethar  (gl.  exigit) 
56a;  dathodlugud  igl.  petitione),  ciafiu  todlaigersa  (gl.  quam  iusta  postolem)  38c; 
duthluchedar  (gl.  postulare)  38  d;  codatlucher  (gl.  ut  efflagitem)  49d;  duthluchimse  (gl. 
efflagitoj  71  c. 

2.  Cf.  fristaissinn  .1.  dia  frecur  ceill  (g\.  sacros  ritus  obire)  Ml.  132a;  frist ait  fris om 
(gl.  aduersarii)  23  c. 

3.  Cf.  ar  in  chomtetracht  7  ind  fresngabûil  (pro  comprehensione  et  ascensione)  =. 
*  com-do-etar-racht,  MI.    56b;  ataat   mesai  daé  ntphchomtetarrachti  am.  abis  7  am. 


ij6 

Bibliographie. 

Pag. 

Ms. 

456.  ni  arroitsom  hisin 

— 

56  ^ 

/2/  arroitsom  insin 

457.  inrorthatar  fochosmarb  (?)  — 

55^- 

A.    inrorthatar   fochosmailius 

assar  ' 

458.  najetarsa 

— 

36  a. 

rafetarsa 

462.  dusrnle 

— 

23  c. 

dusrale 

464.  horacumachtaigset 

— 

28  a- 

honacumachtaigsct 

(gl.  potici) 

(gl.  quo  non  sint  potituri) 

46  5 ,  isindi  rondainmnigestar 

— 

17  ^ 

is  indi  rondnainmnigestar 

469.  (io  sain  [?) 

— 

32  a. 

do  sum 

470.  gl.  iudicare 

— 

17  d. 

gl.  indicare 

478.  istrimetar 

— 

30  a. 

is  tri  metur 

Les  «errata»  que  je  viens  de  signaler,  et  dont  quelques-uns  ne  sont, 
sans  doute,  que  des  fautes  typographiques,  ne  diminuent  en  rien  la  valeur 
du  livre  ni  l'importance  du  service  que  l'auteur  a  rendu  à  la  science 
par  sa  publication*.  Si  M.  E.  avait  eu  le  temps  et  la  faculté  d'aller 
consulter  le  manuscrit  de  Milan,  il  aurait  facilement  relevé  lui-même 
ces  quelques  inexactitudes,  et  il  aurait  trouvé  dans  cette  riche  source, 
de  l'ancienne  langue  irlandaise  des  formes  intéressantes  à  ajouter  à  celles 
qu'il  a  insérées  dans  son  ouvrage.  J'en  citerai  quelques-unes  en  guise  ; 


fudumain  (g\.  incomprehensibilia,  iudicia  domini)  ^^d.  La  racine  est  ûrc  (par  inversion 
rac),  signifiant  «  stringere  ».  Cette  racine,  qui  entre  dans  la  composition  d'un  assez  grand; 
nombre  de  mots  irlandais,  tels  que  terchomarc,  comtherchomrac  «  ecclesia,  congrega-; 
tio  »  etc.,  est  largement  représentée  aussi  dans  la  langue  latine  «  arc-to,  arc-eo,  co-erc-! 
eo,  arc-io,  arc-esso,  arc-a  »,  et,  avec  la  particule  négative,  «  e-rc-isco  ». 

1.  i.e.  instar  Assyriorum.  _         , 

2.  La  forme  des  lettres  de  l'alphabet  irlandais  des  temps  carlovingiens,  en  laissant! 
mémt  de  côté  la  difficulté  que  présentent  souvent  la  vétusté  et  l'oblitération  de  l'écriture,! 
rend  parfaitement  explicables  ces  fautes  de  transcription.  Les  lettres  n  et  r,  a  et  u,  c  etj 
t,  p  r  et  s,  m  in  et  ni,  i  et  /  offrent  respectivement  beaucoup  de  ressemblance  entre, 
elles.  D'autre  part,  quant  à  la  traduction,  il  n'est  pas  toujours  facile  de  saisir  la  signifi-' 
cation  d'un  mot  ou  d'une  phrase  de  la  langue  irlandaise  des  anciens  manuscrits,  lorsque' 
la  glose  latine  n'en  donne  pas  la  traduction  ou  ne  fournit  aucun  critérium  pour  en  devi-: 
ner  le  sens.  Ainsi,  pour  citer  des  erreurs  qui  m'appartiennent,  la  formule  irlandaise  madu. 
ruin,  que  l'on  trouve  deux  fois  dans  le  ms.  de  Turin,  et  que  j'ai  traduite  par  «si  est  ad 
meditationem  »  Cl.  Taur.  p.  S4,  doit  être  traduite  «  juxta  mysterium,  littér.  si  est  ad; 
mysterium  ».  La  formule  madu  ruin  se  trouve  opposée  à  maddu  stoir  dans  le  ms.  de  Milanj 
44b.  Ces  deux  formules,  à  l'endroit  que  je  viens  de  citer,  ne  sont  pas  glossées  parla 
traduction  latine  littérale.  Mais  elles  y  ont  la  signification  évidente  «  secundum  myste-' 
rium,  secundum  historiam,  quoad  mysterium,  quoad  historiam  ».  Dans  la  même  publica-; 
tion  (p.  3,  2 s)  j'ai  mal  séparé  et  mal  traduit  le  mot  immerumediar  du  ms.  de  Turin,- 
Gl.  II,  15.  Ce  mot,  soit  qu'il  doive  être  lu  comme  il  est  écrit  dans  le  ms.,  soit  qu'il  doivCj 
être  corrigé  par  immenimedair,  doit  en  tout  cas  être  traduit  «  peccavit  »;  cf.  les  gloses, 
de  Ml.:  inna  h'i  immeniimdeiar  (gl.  dilinquentes)  46  b;  intan  immeromastar  fquum  pecca-1 
verit),  ceni  imroimsitis  (quin  peccaverint)  51a;  imruimset  (gl.  peccabunti,  imroimset, 
(gl.  delinquent)  543;  que  l'on  compare  également  la  glose  de  Wurzbourg  :  na  imroimser' 
(gl.  ne  et  tu  tempteris.  i.e.  ne  delinquas)  20  c;  et  le  mot  souvent  répété  dans  les  mss. 
immarmus  (peccatum).  A  la  p.  58  des  Gl.  Taur.  les  mots  is\  bM,Ml.  n  c,  doivent  être  lus 
is  bés,  ce  mot  bés  étant,  non  pas  un  féminin,  mais  un  thème  masculin  en  u. 


Bibliographie.  1 57 

de  conclusion,  en  regrettant  que  l'espace  me  manque  pour  en  citer  un 
plus  grand  nombre.  Datif  pluriel  de  l'article  sans  la  terminaison  -ib,  -b  : 

■  huna  fochaidib  (a  tribulationibus)  54^;  honaigabalaib  l'gl.  captionibusj  54b; 
donahisin  (gl.  quibus)  57  <^;  donahi  diandrercboil  inti  dia  fgl.  quibus 
decreuerit;  46<=;  hona.  mainénaib  (^\.  monusculis)  69 '^.  Comparatif  en 
-ithir  :  dinnimidir  (facilius)  61^.  Superlatif  en  -mem  :  huaisiimem  (gl. 
altissimum)  28'^;  dirgimem  (gl.  equissima)  49^;  cmmrimem  fgl.  breuiculi, 
collis)  62  ^\  cossacarthimem  (gl.  sacratissimae,  apparationis)  <,o'^\du.- 
thuichsimem  (gl.  acceptissimi  tui)  7 1  '';  peut-être  aussi  forrcimem,foircimem. 
(gl.  obtimum;,  73  ^  Formes  du  pronom  possessif  de  la  2^  pers.  sing. 
io  devant  les  mots  commençant  soit  par  une  consonne,  soit  par  une 
voyelle,  qui  n'ont  pas  été  indiquées  dans  la  Gr.  C.  ^;  îô  eredig    gl.  po- 

,  culum  tuumj  4$  '^;  dia  roib  to  fortacht  su  lium  fgl.  tuum  habens  adiuto- 
rium  formidare  non  potero)  45  S   centabairt  domsa  to  fortachte  (gl.  ne 

i  suspendas  .  i.  e.  quin  des  mihiiuum  auxiliumi  55  ^.  Pronom  suffixe  de 
la  2'-"  pers.  sing.:  iarmut  (gl.  postte)  70^:.  Formes  verbales:  Prés.  Indic. 
Act.  :  nad  cumcusa  fgl.  nequeoj  18  '';  nosoe  l'gl.  auerti,  soles)  44^; 
ceine  nosoisiu  (gl.  donec  tu  auertisi  3^  ^j  riiguid  (non  petit)  42  ^  Relat.: 
nderbas  fgl.  adprobare)  3$  ^;  nglanas  {§\.  quae  purificare  solet)  28'^; 
indi  soas  fgl.  uersantisy  64'';  indi  prithchas  gl.  praedicantis)  1 3 1  '^  ; 
coines  gl.  deplorantem)  73'';  gudes  (gl.  periurantem)  39  *>•  oirdnes  39^; 
roithes  42  ^-j  radas  42  ^-j  rethes  42  '^•,  îechtas  37  ^  ;  sluindes  37  »;  re/^j  24^; 
tcr^s  27^;  dlomas  30^;  gu/^iei  32d;g<î/tei  101'^;  //2^a/2  riiberes  129*^;  techtae 
37^;  Dépon.:  follaithersu  (gl.  regis;  82  «•.  Conjonct.  Act.:  care^m  ("gl.  affi- 
ceris)  43  a;  imfolngaesiu  (gl.  efficeris)  43  a;  ^/  astaesiu  (gl.  ne  suspen- 

,dasj  55  a.  soirasiu  gl.  liberato  61^^;  arfemasiu  (gl.  accipito;  68''; 
conocaeba  (gl.  sublimet)  20'^;  co  ^uema  gl.  tuetur)  53  =;  doeprannat 
(gl.  afluant)  39  ''.  Dépon.  :  codaîlucher  fgl.  ut  efflagitem)  49  '^i  addéicider 
(gl.  respicies)  43  a  ;  con/  accadar  (gl.  qui  non  uideat  5  3  ^  Imp.:  comainse 
(gl.  iudica  22'';  imthimchellsa  'gl.  accingere)  28d;  /owc  (gl.  ure)  47  a; 
sérnn  fgl.  studé  56 '^;  escse  fgl.  intende)  65  i;foîhabair  fgl.  subde)  76d; 
eroimsiu  accepta)  132  ''•  ;  errenaid  (gl.  adpendite^  20^;  fj/f  fgl.  exite) 
343;  gudid  'orate;  68^.  Forme  emphatique:  sLinaigîhe  (gl.  osanna) 
17'',  25^^;  ruccaitgthe  (gl,  condemnaj  27 '^;  follaide  l'gl.  rege)  46  b; 
dianaigthe{g\.  cèlera)  49'^;  ollaigthe  'gl.  amplicâ,  leg.  ampliaf  70  ^.  Prés. 
Sec:  coa5/ô/;!5e  gl.  uteffugerem  593;  lase  atatgladainnse  'gl.  cum  te  conue- 
nirem  62^;  coni fodmainse  (^§\.né  perpeterer)  73*^;  manucomallainn  (siimple- 
vissem  1 3  H;  conulogad  .i.  co  adcotad  (gl.  ut  inpetraret)  39^;  an  dumbidced 
(gl.iaculatus)5  3'*;no/ora5n/gm;5^gl.fidebamus)43<^; /7oro/55ifw'gl.nutarent^ 
35^;  nudaerbtais  (gl.  qui  in  idulis  confidebant;  46  d;  nudianaigtis  (gl. 


158  Bibliographie. 

celerabant)  54^;  duemtis  (gl.  uelabant)   79 ».  Prêt.  red.   ou  simple  : 
eiirgénsa  (gl.   sum  expertus)  79  a;  rochualusu  (gl.  audisti)  50  d;  rogéni 
(gl.  peregerit)   48^;   dorochratar  (gl.  festinauerunt)    ^6'^;  focoimlactar 
(gl.  pertullerunt)  47^^;  conîorchratar  (gl.  conciderunt)  48  ^  ;  innarpatar  [ 
(gl.  depulerint)  23  ^.  Dépon.  :  co  rogenarsa  (gl.  ut  in  hanc  uitam  effun- 
derer)  44*^;  it  hesidi  dorumadirsi  (gl.  quae  fuerat  emensus)  16"^;  rumi- 
dar  (gl.  duxit)  72  '';  ni  rufrescachtar  (gl.  praeter  spem)  26^;  dorumenatar 
(gl.  crediderunt)  35^.  Fut.  red.  duema  son  (gl.  uindicabit)  67  ^  ;  daregaid  ' 
(venietis)  33'';  li'a/f  50^2  (gl.  hoc  potabunt)  30  '^  ;  dedait  fgl.  euanescent) 
79'';  etirgenaî  (gl.  experientur,  experituri  sunt)   73  a,   68 <^.  Dépon.: 
sechidù  denecaithersu  (gl.  quaquauersus  respexeris)  73 '^.   Prêt,  en  T: 
conaiiecht  an  (gl.  uoti  sum  compos  efïectus)  1 32  d;  danecomnacht  su  (gl. . 
[quem]  contulisti)  56  a;  ni  comtacht  su  (gl.  nihil  quessistiy  60'';  durairn- 
girîsiu  (gl.  secundum  tuam  promisionem)  -j^^;  conaicelt  fgl.  desimula-! 
uit)  49^;  doreî  (g\.  uelavit;  rac.  em)  16 '^;  rommaltsa  (gl.  educauit  me) 
45^;  roort  (delevit,  cecîdit)  48^^;  inrochoissecht    (consecutus  est)  43''; 
conaitechiat  (g\.  quesierunt)  44'';  affi  diindraingertar  fatlii  (gl.  repromi-. 
sione)  67 b.  Fut.  en  B  :  in  cumgubsa  (gl.  num  potero)  49^;  fudalibsea] 
(gl.  distribuam)  78  »  ;  noterdarcugub  (gl.  celebrabo  té)  55  a;  donesbe  (gl.  1 
despicies)  112  '^;  ceine  nosoifesiu  (gl.  donec  tu  auertis)  33  3;  lase  dona-\ 
talcfe  (gl.  cum  delenueris  animum)  69  <^;  contifea  (gl.  inredebit,  rac.  ?iè)  ! 
11  ^\  jonnitjea  (gl.  subsannabiti  17  3;  /2i  contuslifea  (gl.  nihil  elabitur, 
leg.  elabetur)  27'';  ni  cumsanfa  (gl.  non  desistet)  80 '^;  confodlaibidsi  {g\. 
eritis  participes)  53^^;  ni  cumgubat  (gl.  non  poterunt)   54 a.  Dépon.  : 
jrisailejarsa  (gl.  praestulabar)  38 a;  adaichfedar  (timebit)  46  c;  nudcomdl- 
nabadar  (qui  eam  implebit)  46  c.  Fut.  sec.  en  B  :  ni  cumcaibed  (gl.  ' 
nequisset)  42  «.  Prét.  en  S  :  arroîneithiussa  (gl.  te  sustenui)  46  ^  ;  an  i 
darunesus  igl.  spernens)  36<=;  ruradussa  jc^;  arromertus  7  arrudergus' 
(gl.  statui  et  proposui)  51  =>;  asringbus  (gl.  excedissem)  130*^;  rocloissiw 
(gl.  uicisti)  43  '*;  rorelais  (gl.  absoluisti)  50^;  adruirim  (gl.  computaue- 
rit)  28'^;  /uc  40  '^;  rauc  (gl.  hoc  usus  est)  4$  ^^  ra/Ze/c  ('gl.  dimisit  eum) 
^^^;  dorrubidc  (gl.  iaculatum  esse)  40 d;  daruicli  (gl.  uindicatus  est, j 
=  do-a-ru-fich)  4^ '^ ;  rorois  (gl.  nutauit)  84^;  roeirpset  (confisi  sunt)' 
43 '^l  rutuirset  (gl.  scrutati  sunt)  44 d-  Dépon.  :  arrondoichenelaigsiursa' 
(gl.  degenerans  sum)  44*^;  'oruthochaisgeisersu  (gl.  quam  es  consecutus) 
43  C;  rolethnaigser  (gl.  deletasti,  leg.   dilat-)    50^;  rofoirbihichser  (gl.  ; 
perficisti)  50^;  a/a/c/n'^e^f^r  (gl.  uideris)  59*^;  dorochuiristar{g\.  adsciue-| 
rit)  25 '^.  Fut.  Conj.  en  S  :  doroîhuusa  (gl.  decidarn)  23  '^;  dofonussa\ 
(gl.  lababo,  leg.  lav-)  47";  eu  dusésa  (gl.  ut  persequar)  61  ^;  gigsesa 
(gl.  supplicabo)  47'';  /zof«  (gl.   me  effugientem)  ic)'^;  arutaissiu  (g\. 


Bibliographie.  159 

reficies)  56  3;  coririssiu  (gl.  ligabis)  134'';  dufl  fgl,  uindicabit)  67^;  co 
arcôi  (gl.  ad  nocendum)  46 1^;  arna  o//?  'gl.  ne  detrectet)  42  a;  co  dufess 
(gl,  ad  ulciscendum)  443;  coremifoil  fgl.  anticipet)  23a;  a^nVi  fgl.  appen- 
dat)  30^;  dii  asindisem  (gl.  quod  adferemus)  55  2;  condesat  (gl.  exqui- 
rent)  46*^;  contotsat  (gl.  conruere)  16  a.  Dépon.  :  dummessarsa  (gl. 
metibor)  78*.  Conj.  sec.  en  S  :  ma  rufessinn  (si  scirem)  59  b;  doîodsinn 
(gl.  labi)  1 3 1  b;  fl'î  nutesed  (gl.  fugiens)  29  d;  ma/?/  /o/wei  'gl,  nisi  debel- 
lasset)40d;  dofestais  fgl.  uindicari,  cupiebant)  29^;  co  ingriastais  (^g\. 
ut  persequerentur)  38''.  Formes  passives  :  cotaîoscaigthersu  fgl.  commo- 
uere)  58'^;  armunter  jéid  (gl.  laudaturj  28  a;  co  atabsorchaither  'gl.  inlu- 
minamini)  53^;  co  dobemtharsi  fdefendamini)  5  3  ^  ;  imdaigetar  son  (gl. 
rerumque  afluentia)  39  d;  imdaigiîir  fgl,  afluant)  ^c)^;  nebtar  no  dunda- 
leîer  fg\.  exhauriri,  pocula)  101^;  nomlinfithersa  (gl.  expleborj  40  a; 
nobcloifether  (gl.  uincemini)  67  3;  co  dufessar  (gl.  ut  liindicetur)  32^^; 
ngwar  (gl.  orari)  51  a;  dudichestar  (gl.  duceturj  30'^; /or/î^/^55a^ar  (g! , 
opprimi,  rac.  ^ertg)  39''.  Participes  de  nécessité  dans  les  cas  obliques  : 
betis  fustib  .i.  adnachtib  (gl.  condendis,  cadaueribus)  33  d;  ^ona/'l?  déedib 
betis  chloithib  (gl.  ad  conuincendos  desides j  1 3  id;  riîhi  (gl.  uenalem,  iusti- 
tiam)  36  a.  Une  forme  remarquable  dont  on  trouve  plusieurs  exemples 
dans  le  ms,  de  Milan  est  celle  des  deux  participes  passifs  en  -se,  -si  au 
lieu  de  -the,  -thi,  lorsque  la  racine,  terminée  originairement  par  une 
dentale,  présente  une  désinence  en -es,  -is.  Dans  les  Gl.  Taur.  (p.  xix, 
54)  j'ai  indiqué  quelques  cas  du  changement  du  suffixe  originaire  -'tja 
en  -s,  ~ss.  Les  exemples  suivants  confirment  cette  induction  :  ambanin- 
drisse  (gl.  inuaso,  imperio)  i8<^,  dunaib  huilib  indirsib  {=  indrissib,  gl, 
omnibus  peccandi  amore  persuasis)  35  %  ind  indirsi  '  (gl,  uastati)  67^; 
airndrisse^  (gl,  erratam)  i38d;  impessi  (gl,  obesi)  20  a_,  innan 
impesse  J  (gl,  obse[s]sorum)  49  '';  claissi'i  (gl,  defossi)  24  C;  isgessi  (gl, 
adorandus)  26'';  mese  (gl,  probatum)  31^^,  indl  beîa  me«/ (gl,  iudi- 
candij7oa;  esnaissi  (gl.  inserta)  32  c,  esnaisse  (gl,  inserta)  33  C;  betis 
aisndisib  (gl.  dicendis)  27  ^,  betis  aisndisib  (gl,  ad  indicandos)  23  a,  is 
aisndissi  fgl,  inserendum)  34  b,  it  diasndisi  ara  lin  (gl.  plura  sunt  quam 
ut  narrari  queant,  .i.  inenarranda)  60'^.  Il  résulte  de  ces  exemples  que 


1.  cf.  inreith  (gl.  aggreditur)  19  d;  ind  indrid  (gl.  uastationis)  27  a,  48  d;  inrestais 
(gl.  inuadere,  nitebantur)  37d;  indred  (gl.  uastatioj  4}d;  inréith  (gl.  uastantem)  48d; 
arnaib  indredaib  (gl.  pro  uagationibus)  67  c. 

2.  Cf.  duairndrtdat  {g\.^trrtra'[\\.tts)%i'o, 

}.  =  '  imb-sed-the;  cf.  lat.  obsessus  =  *ob-sed-tus;  et  la  gl.  de  Ml.  :  an  impsuidt 
(gl.  obsidio)  4J  b.  Que  l'on  remarque  l'équation  :  impsuid-e  :  obsid-io  :  :  impess-e  : 
obsess-us. 

4,  Cf.  foroichlaid  (gl.  effodit)  24  c. 


i6o  Bibliographie. 

la  forme  aisndissi  fgl.  conserenda)  16  a,  citée  dans  la  Gr.  C.  ^  480,  ne 
doit  pas  être  corrigée  *aisndisti,  comme  Zeuss  l'avait  proposé,  mais 
qu'elle  doit  par  contre  être  conservée  intacte  selon  l'orthographe  du 
manuscrit  '. 

C.  NiGRA. 

The  origin   and   history   of  Irish   names  of  places,    by   P.    W. 

Joyce,  A.  M.,  M.  R.  A.  Dublin,  Me  Glashan  and  Gill;  London,  Whittaker 
and  G*  ;  XIV-530  p.  in-12,  1869.  Prix  :  6  s.  (7  fr.  50;. 

M.  Joyce  avait  déjà  publié  dans  les  Proceedings  de  l'Académie  d'Irlande 
différents  travaux  de  toponomastique  qui  avaient  été  accueillis  avec 
faveur;  aussi  était-il  préparé  mieux  que  personne  à  la  tâche  de  dire 
l'origine  et  Phistoire  des  noms  de  lieu  en  Irlande.  Le  sujet  n'avait 
encore  été  abordé  par  personne,  bien  que  les  matériaux  abondassent. 
D'une  part  l'index  topographique  publié  à  la  fin  du  Recensement 
de  1861  et  les  collections  manuscrites  du  Cadastre,  de  l'autre  les  nom- 
breux noms  de  lieu  fournis  par  les  anciennes  chroniques  donnaient  une 
base  certaine  aux  recherches  de  ce  genre.  M.  J.  a  mis  toutes  ces  sources 
à'  profit  avec  intelligence  et  sagacité.  Son  œuvre  se  distingue  à  la  fois 
par  la  sûreté  de  la  méthode  et  par  l'agrément  de  l'exposition.  Dans  la 
première  partie  de  son  livre  l'auteur  établit  les  principes  qui  l'ont  guidé 
pour  déterminer  la  forme  et  l'étymologie  des  noms  de  lieu  et  il  formule 
sommairement  les  règles  de  leurs  changements  phonétiques.  La  seconde 
partie  est  consacrée  aux  noms  d'origine  historique  ou  légendaire,  la  troi- 
sième aux  noms  qui  rappellent  des  constructions  de  toute  espèce  (forts, 
couvents,  routes,  etc.),  la  quatrième  aux  noms  descriptifs  du  caractère 
physique  des  localités.  Un  index  très-étendu  rend  les  recherches  faciles. 
La  façon  dont  M.  J.  a  groupé  les  noms  de  même  espèce  l'a  gardé  de  la 
sécheresse  dont  les  travaux  de  ce  genre  sont  rarement  exempts;  les 
noms  de  lieu  semblent  plutôt  venir  nous  renseigner  sur  l'histoire  et  les 
traditions  de  l'Iriande  que  raconter  leur  destinée  propre.  Nous  recom- 
manderons comme  particulièrement  intéressantes  les  pages  où  l'auteur 
montre  les  traces  que  l'ancienne  hagiologie,  les  superstitions,  les  tradi- 
tions et  les  coutumes  ont  laissées  dans  la  nomenclature  topographique. 
Il  n'est  qu'un  point  sur  lequel  M.  J.  ne  satisfait  pas  entièrement  la  curio- 


I.  Nous  signalons  à  l'attention  de  M.  E.  quelques  termes  grammaticaux  qui  ne  se  trou- 
vent pas  dans  Zeuss  :  ar  todochide  nindideto  frecndairc  comaccumuil  (gl.  non  tradat... 
pro  non  tradet.  more  suo  commotat  tempora.  i.e.  pro  future  indicativi  praesens  conjunc- 
tivi)  61  a;  comacumul  arindidit  (gl.  commotatio  modorum  est.  i.e.  conjunctivus  pro  indi- 
cative) 62  a;  todochide  ar  sechmadachtat  nanfoirbthe  (gl.  temporum,  commotatio.  i.e. 
futurum  pro  praeterito  imperfectoj  62  a.  — c.  N. 


Bibliographie.  i6i 

site  de  son  lecteur,  c'est  l'identification  des  noms  de  lieu  irlandais  men- 
tionnés par  Ptolémée.  Ptolémée  en  donne  une  cinquantaine;  M.  J.  ne 
peut  en  identifier  que  neuf  environ  :  et  encore  quand  il  voit  Dublin  dans 
l'antique  "EcAavx,  la  localité  peut  être  la  même,  mais  les  deux  appella- 
tions ne  peuvent  se  ramener  l'une  à  l'autre;  ses  identifications  deman- 
deraient aussi  à  être  accompagnées  de  preuves.  M.  J.  est  d'avis  que  les 
noms  de  lieu  irlandais  donnés  par  Ptolémée  sont  trop  corrompus  ou 
trop  fantastiques  pour  pouvoir  être  reconnus  et  expliqués.  Il  faut  certai- 
nement faire  une  part  à  l'inconnu;  mais  ne  pourrait-on  pas  faire  cette 
part  un  peu  moins  grande  ?  il  y  a  là  un  difficile,  mais  intéressant  sujet 
de  recherches. 

H.  G. 

Dicuili  Liber  de  mensura  orbis  terrae,  à  Gustave  Parthey  recognitus. 

Berolini,  in  aedibus  Friderici  Nicolai,  1870.  xv-96  p.  in-12.  Prix  :  25  sgr. 

(3  fr.  50). 

Voici  une  nouvelle  édition  d'une  œuvre  latine  d'un  moine  irlandais 
du  IX''  siècle.  Ce  traité  géographique  avait  été  publié  pour  la  première 
fois  par  C.  A.  Walkenaer  en  1807;  une  seconde  édition,  due  aux  soins 
d'A.  Letronne,  suivit  de  près  la  première  en  181 1.  Le  motif  qui  a 
décidé  M.  Parthey  à  en  donner  une  troisième  édition  est  la  découverte, 
à  Dresde,  d'un  ms.  négligé  jusqu'ici,  qui  donne  sur  bien  des  points  un 
texte  meilleur  que  les  mss.  suivis  par  Walkenaer  et  Letronne.  Dicuil 
dans  ce  traité  résume  les  connaissances  géographiques  de  son  temps.  Il 
est  malheureux  qu'en  parlant  de  <(  nostram  insulam  Hiberniam  »  il  ne  se 
soit  pas  laissé  aller  à  quelque  digression  qui  pour  nous  serait  instruc- 
tive '.  Il  lui  échappe  pourtant,  en  passant,  de  nous  fournir  deux  rensei- 
gnements intéressants.  L'un  touche  des  îles  qui  sont  probablement  les 
Iles  Shetland  -,  et  où  à  une  certaine  époque  s'étaient  retirés  des  ermites 
irlandais  :  c'était  chercher  bien  loin  un  endroit  écarté  pour  prier  Dieu. 
L'autre  renseignement  a  trait  à  l'Islande  'qu'il  nomme  Tliilej,  mais  c'est 


1.  H  se  borne  à  mentionner  la  fertilité  de  ses  pâturages  :  «  Multis  insulis  nec  ignobili- 
bus  circumdatur  [Brittania  insula],  quarum  Hibernia  ei  proximat  magnitudine,  alias  ita 
pabulosa  ut  pecora,  nisi  interdum  a  pastibus  arceantur,  ad  periculum  agat.  »  Ed.  Parthey, 
p.  74. 

2.  M  Sunt  aliae  insulae  multas  in  septentrional!  Brittanias  oceano,  quas  a  septentrionali- 
bus  Brittaniaj  insulis  duorutn  dierum  ac  noctium  recta  navigatione  plenis  velis  assidue 
féliciter  vento  adiri  queunt.  Aliquis  presbyter  religionis  mihi  retulit  quod  in  duobus  assti- 
vis  diebus  et  una  intercedente  nocte  navigans  in  duorum  navicula  transtrorum  in  unam 
illorum  introivit.  \\\x  insulae  sunt  alix  parvulï,  fere  cunctas  simul  angustis  distantes  fretis, 
in  quibus  in  centum  fere  annis  heremita  ex  nostra  Scottia  navigantes  habitaverunt.  Sed 
sicut  a  principio  mundi  desertae  semper  fuerunt,  ita  nunc  causa  latronum  Nortmannorum 
vacu<£  anachoritis,  plens  innumerabilibus  ovibus  ac  diversis  generibus  multis  nimis  mari- 
narum  avium.  »  Ibid,  p.  44. 

II 


i62  Bibliographie. 

malheureusement  d'une  façon  encore  sommaire.  Dicuil,  qui  est  avant 
tout  géograplie,  donne  sur  l'Islande  des  détails  qui  lui  avaient  été  four- 
nis trente  ans  auparavant^  dit-il,  par  des  clercs  qui  avaient  passé  la  belle 
saison  dans  cette  île  '.  Ces  clercs  étaient  probablement  des  Irlandais,  et 
les  paroles  jetées  en  passant  par  Dicuil  concordent  avec  le  témoignage 
de  chroniqueurs  norwégiens^.  —  Nous  avons  cité  ce  qui  dans  le  traité 
de  Dicuil  est  plus  particulièrement  du  domaine  de  cette  Revue  3.  Le  lec- 
teur que  cette  œuvre  intéresse  spécialement  trouvera  dans  la  courte  mais 
substantielle  préface  de  M.  Parthey  une  étude  sur  les  sources  auxquelles 
a  puisé  Dicuil,  et  l'indication  des  mss.  de  ce  traité.  Cette  édition  est 
faite  avec  le  soin  et  l'exactitude  qu'on  est  habitué  à  trouver  dans  les 
publications  de  M.  Parthey. 

H.  G. 


Merlin,  or  the  Early  History  of  King  Arthur  :  a  prose  romance  (about  1450- 
1460  A.  D.),  edited  from  the  unique  ins  of  the  University  Library,  Cam- 
bridge, by  Henry  B.  Wheatley.  Part  I,  with  an  introduction  by  D.  W. 
Nash,  Esq.  F.  S.  A.  1865,  XVr-128  p.  —  Part  II,  1866,  pp.  129-378.  — 
Part  III,  with  an  essay  on  Arthurian  Localities  by  J.  S.  Stuart  Gle.nme,  Esq. 
1869,  pp.  XVII'-CLVI  et  379-701 ,  in-8°.  London,  printed  for  the  Early 
English  Text  Society. 

Arthurian  Localities;  their  historical  origin,  chief  country,  and  fingalian 
relations;  with  a  niap  ot  Arthurian  Scotland,  by  John  S.  Stuart  Glexme, 
M.  A.,  etc.  VI-140  p.  in-8°.  Edinburgh,  Edmonston  and  Douglas,  1869. 
Prix  :  7  s.  6  d.  (9  fr.  40). 

L'ancienne  traduction  anglaise  du  roman  français  de  Merlin  est  au 
complet  dans  ces  trois  parties  ;  mais  une  quatrième  partie  doit  bientôt 
paraître,  et  donner  l'introduction  de  M.  Wheatley.  Quand  cette  publica- 
tion sera  entièrement  terminée  ce  sera  le  moment  de  parler  de  l'édition 
et  de  l'œuvre.  Nous  ne  voulons  aujourd'hui  que  signaler  son  apparition 
à  nos  lecteurs.  La  Société  pour  la  publication  des  anciens  textes  anglais, 
dont  on  ne  saurait  trop  louer  l'activité  et  le  zèle,  ne  néglige  rien  pour 
éclairer  les  textes  qu'elle  édite,  et  le  Merlin  de  M.  Wheatley  acquiert  une 
nouvelle  valeur  par  les  dissertations  qui  y  sont  jointes.  C'est  d'abord  en 


1.  '(  Trigesimus  nunc  annus  est  (Dicuil  écrivait  en  825)  a  quo  nuntiaverunt  mihi  cie- 
rici,  qui  a  kalendis  Februarii  usque  ad  kalendas  Augusti  in  illa  insula  manseriint....  » 
Ibid.,  p.  42. 

2.  Voir  Zeuss.  Cr.  C.  p.  xii.  n.  —  Cf.  Lanigan.  Eccl.  Hist.  of  Ireland,  vol.  III,  ch. 

XX,    §   IV. 

3.  Il  ne  sera  pas  inutile  de  mentionner  après  M.  Parthey  les  autres  œuvres  de  Dicuil  : 
«  Praeter  librum  de  mensura  orbis  terrae,  epistolam  composuit  de  quaestionibus  decem  artis 
grammaticae,  quain  ipse  memorat  (Prol.j;  edi  curavit  Prisciani  partitiones  duodecim  ver- 
suum  yEneidos  principalium  quae  continentur  codice  Leidensi  Vossiano  33.  (Priscian.  éd. 
Keil,  t.  II,  p.  389,  390.)»  Ibid.,  Praef.  p.  vi. 


Bibliographie.  165 

tête  de  la  première  partie,  une  introduction  où  M.  Nash,  bien  connu  par 
son  beau  livre  sur  Taliesin,  étudie  les  éléments  divers  dont  se  compose 
le  type  légendaire  de  Merlin.  Dans  un  long  essai  (environ  130  pages, 
avec  une  carte;,  joint  à  la  troisième  partie,  M.  Glennie  entreprend  de 
démontrer  que  le  théâtre  des  exploits  d'Arthur  a  été  ce  qu'il  appelle 
l'«  Ecosse  Arthurienne  »  c'est-à-dire  l'Ecosse  Méridionale  et  la  Marche 
Anglaise.  Il  faudra  dorénavant  tenir  compte  de  ses  ingénieuses  et  inté- 
ressantes recherches  qui  jettent  un  jour  nouveau  sur  l'histoire  (dirons- 
nous  la  légende  ?)  d'Arthur.  Mais  en  ce  qui  concerne  la  nationalité  des 
Pietés  et  l'origine  des  traditions  ossianiques  ou  fmgaliennes  auxquelles 
M.  Glennie  a  consacré  un  chapitre  de  son  travail,  il  nous  semble  diffi- 
cile d'admettre  ses  théories.  Le  travail  de  M.  Glennie,  publié  à  part  à 
Edimbourg,  forme  un  élégant  volume  qui  s'annonce  comme  le  premier 
essai  d'une  série  intitulée  Arîhuriana  et  dont  nous  souhaitons  vivement  la 
continuation.  L'essai  de  M.  Glennie  est  suivi  de  quelques  pages  où  M. 
Pearson  revendique  Arthur  pour  l'Ouest  de  l'Angleterre.  Si  nous  en 
croyons  VAthenxum  in°  du  12  juin  1869)  la  quatrième  partie  de  Merlin 
nous  apportera  un  nouvel  essai  sur  le  pays  d'Arthur  par  M.  Scott  Surtees. 
Mais  la  question  Arthurienne  trouvera-t-elle  jamais  une  solution  défini- 
tive et  certaine  ? 

H.  G. 

Éléments  de  la  grammaire  bretonne,  par  l'abbé  J.  Hixoant,  Tréguier, 
Le  Flem^  1868.  In-8,  255  p.  Prix  :  2  fr.  50  c. 

Dans  le  breton  armoricain  on  distingue  quatre  dialectes.  Ceux  qui 
s'éloignent  le  plus  l'un  de  l'autre,  et  quant  à  la  langue  et  géographique- 
ment,  sont  le  léonnais  et  le  vannetais.  Le  vocalisme  du  second  se  distingue 
de  celui  du  premier  par  sa  tendance  à  préférer  1'/,  Ve  et  Vu  à  l'e,  à  l'a,  à 
\'ou.  Le  second  supprime  certaines  consonnes  que  le  premier  a  gardées, 
et  souvent  se  sert  des  sourdes  là  où  le  premier  emploie  les  sonores.  On 
pourrait,  surtout  au  point  de  vue  du  vocalisme,  comparer  le  dialecte  de 
Léon  au  provençal  et  celui  de  Vannes  au  français,  bien  que  Léon  soit 
au  nord  et  Vannes  au  midi  du  petit  pays  qui  seul  sur  le  territoire  de  la 
Gaule  ait  conservé  la  tradition  de  la  langue  de  nos  aïeux. 

Les  dialectes  de  Cornouailles  et  de  Tréguier  tiennent  entre  les  deux 
autres  une  place  intermédiaire  et  par  leur  système  phonétique  et  par  la 
situation  topographique  des  populations  qui  les  parlent.  Ils  occupent  dans 
le  système  néo-celtique  de  notre  pays  le  même  rang  que  par  exemple 
le  poitevin  dans  notre  système  néo-latin. 

Le  Gonidec  a  écrit  avec  un  vrai  talent  la  grammaire  du  dialecte  de 


164  Bibliographie. 

Léon.  Nous  devons  à  l'abbé  Guillome  une  grammaire  de  celui  de  Vannes. 
Je  ne  sache  pas  que  les  dialectes  de  Tréguier  et  de  Cornouailles  aient 
jusqu'à  présent  été  l'objet  d'un  pareil  travail  :  mais  les  dictionnaires  de 
Le  Gonidec  et  de  M.  Troude  contiennent  sur  ces  deux  idiomes  une  foule 
d'indications  précieuses;  puis  on  peut  les  étudier  dans  les  livres  écrits 
par  des  auteurs  qui  se  sont  attachés  à  observer  les  formes  spéciales  de 
chacun  d'eux.  Ainsi  le  Barzaz  Breiz  de  M.  de  la  Villemarqué  contient 
nombre  de  pièces  composées  en  dialecte  de  Cornouailles  et  le  gracieux 
Bepred  Breizad  de  M.  Luzel  est,  comme  monument  du  dialecte  de  Tré- 
guier, un  document  philologique  plein  d'intérêt.  La  lecture  en  est  surtout 
attrayante  quand  à  côté  du  volume  de  M.  Luzel  on  tient  ouverts  les 
Eléments  de  la  grammaire  bretonne  de  M.  Hingant. 

M.  H.  a  voulu  nous  donner  les  lois  générales  du  breton  armoricain  et 
malgré  sa  bonne  volonté  il  ne  s'agit  guère  dans  son  livre  que  du  dialecte 
de  Tréguier.  Le  mal  ne  serait  pas  grand,  si,  quand  du  dialecte  de  Léon 
l'auteur  passe  à  celui  de  Tréguier,  il  prenait  la  peine  de  nous  en  informer  ; 
il  nous  rendrait  même  par  là  un  grand  service;  puisque,  comme  nous 
l'avons  dit,  il  n'existe  pas  de  grammaire  du  dialecte  de  Tréguier;  mal- 
heureusement l'auteur  a  la  plupart  du  temps  cru  inutile  de  distinguer 
dans  ses  paradigmes  et  dans  ses  exemples  ce  qui  appartient  à  l'un  ou  à 
l'autre  dialecte. 

P.  9.  Il  traite  de  la  «  formation  du  pluriel  »  des  noms;  il  commence 
par  s'occuper  du  «  pluriel  terminé  en  ou.  »  Il  dit  en  note  que  cette 
désinence  est  celle  des  dialectes  de  Léon  et  de  Cornouailles,  que  dans 
celui  de  Vannes  elle  est  remplacée  par  eu,  dans  celui  de  Tréguier  par  0. 
Puisque  c'est  la  désinence  des  dialectes  de  Léon  et  de  Cornouailles  qui 
figure  dans  le  titre,  vous  croyez  sans  doute  que  les  mots  donnés  comme 
exemple  appartiennent  tous  au  dialecte  de  Léon  ou  à  celui  de  Cor- 
nouailles :  il  n'en  est  rien;  un  des  exemples  est  iné,  âme,  pluriel  inéou. 
înc  est  la  forme  usitée  dans  le  dialecte  de  Tréguier;  âme,  anima  en 
latin,  anam  en  irlandais,  se  dit  enaid  en  gallois,  éné  en  léonnais  et  en 
cornouaillais,  c'est-à-dire  que  dans  ces  trois  dialectes  Va  initial  fléchit  en 
en  é;  il  fléchit  en  i  dans  le  vannetais  inéan  avec  un  anoiisvara  final  qui 
conserve  dans  sa  dernière  lettre  un  débris  de  \'m  latin  et  irlan- 
dais; le  dialecte  de  Tréguier  nous  donne  dans  la  forme  iné  une 
transaction  :  iné  a  1'/  initial  de  Vannes,  et  a  perdu,  comme  le  gallois, 
comme  les  dialectes  de  Léon  et  de  Cornouailles,  toute  trace  de  la  nasale 
que  le  vannetais  a  en  partie  gardée.  Le  pluriel  à'iné  est  inéo  comme 
comme  celui  à'éné  est  énéou.  Inéou  que  donne  M.  H.  n'appartient  ni  au 
dialecte  de  Tréguier  ni  à  celui  de  Léon,  c'est  une  forme  hybride  usitée 


Bibliographie.  165 

probablement  sur  la  limite  des  territoires  des  deux  dialectes  ;  mais  elle 
aurait  surtout  de  l'intérêt  à  une  condition,  ce  serait  que  nous  sussions 
le  nom  des  localités  où  elle  est  employée. 

Ce  n'est  pas  le  seul  mot  de  ce  genre  qu'on  puisse  citer  dans  le  livre 
de  M.  H. 

On  trouve  en  gallois  le  verbe  meddwi  dans  lequel  on  doit  reconnaître 
le  thème  sanscrit  madhu,  en  grec  ;j.eOj.  Le  dialecte  de  Léon  nous  offre 
une  forme  presque  identique  à  ce  mot  gallois  :  mezvi;  la  seule  différence 
est  qu'en  léonnais  1'»^  (ou)  du  gallois  s'est  consonantisé.  Dans  les  dia- 
lectes de  Tréguier  et  de  Vannes  la  voyelle  primitive  a  été  conservée, 
mais  la  dentale  a  disparu,  meoui,  meouin,  meouein.  M.  H.  nous  offre  la 
forme  intermédiaire  mévi  (p.  32)  où  la  dentale  a  disparu  comme  dans  le 
vannetais  et  dans  le  dialecte  de  Tréguier,  mais  dans  laquelle  la  consonne 
a  pris  la  place  de  la  voyelle  ou,  comme  en  léonnais  ;  l'infmitif  s'y  ter- 
mine aussi  comme  en  léonnais  sans  Vanonsvara  fmal  que  le  dialecte  de 
Tréguier  a  conservé. 

Les  mots  qui  appartiennent  complètement  au  dialecte  de  Tréguier 
sont  innombrables.  Tel  est  tic  ''maisons,  p.  19;,  en  léonnais  liez  ou  tier\ 
hec'h  pronom  possessif  féminin  suivi  d'une  voyelle  (p.  49,  en  léonnais 
/zf ';  honnez  (celle-là,  p.  $4),  en  léonnais  hounnez;  hirié  (aujourd'hui, 
p.  161,  en  léonnais  hirïo;  kresté  (m\di\,  p.  177),  en  léonnais  kresteiz; 
d'hé  (à  eux,  p.  174,  177),  en  léonnais  d'hezo;  treo  (choses,  p.  179),  en 
léonnais  traou. 

Mais  la  forme  usitée  dans  le  dialecte  de  Tréguier,  n'est  pas  toujours 
celle  que  M.  H.  préfère  :  c'est  ainsi  que  p.  $0  il  écrit  var  (sur),  au  lieu 
de  oar,  p.  161,  174,  divar  (de  dessus;,  au  lieu  de  dioar. 

Nous  avons  ailleurs  -  adressé  quelques  critiques  à  un  ouvrage,  de 
grande  valeur  du  reste,  le  Nouveau  dictionnaire  pratique  français  et  breton 
du  colonel  Troude.  Les  Bretons  qui  s'occupent  de  grammaire  et  de  lexi- 
cographie ne  sauraient  trop  méditer  les  sages  observations  de  ce  savant 
auteur  sur  la  nécessité  de  respecter  la  distinction  des  dialectes  (voir 
pp.  XXX  et  912'.  Il  est  fâcheux  que  M.  H.  n'ai  pas  tenu  plus  de  compte 
de  ce  principe.  Je  le  regrette  d'autant  plus  que  son  travail  dénote  une 
connaissance  approfondie  de  la  langue  qu'il  nous  enseigne,  et  que  sur 
bien  des  points  sa  grammaire  est  beaucoup  plus  complète  que  celle  de 
Le  Gonidec. 

Signalons  par  exemple  les  règles  que  M.  H.  donne  sur  l'application 

1.  En  gallois  moyen  y-ft.  Le  dialecte  de  Tréguier  a  conservé  la  gutturale  aspirée  finale 
que  les  autres  dialectes  armoricains  ont  perdue,  cf.  Gr.  C',  p.  386. 

2,  Revue  Critique,  du  23  janvier  1869. 


1 66  Bibliographie. 

des  lois  de  permutation  des  consonnes  initiales  et  finales.  Il  est  curieux 
de  voir  observer  qu'à  la  fin  des  mots  le  t  ei  \e  k  précédés  d'i  restent 
invariables  (p.  7).  Les  langues  germaniques  possèdent  une  loi  analogue, 
comparez  le  gothique  slandan  et  l'allemand  sîehen  issus  de  la  racine  indo- 
européenne STA. 

Le  §  13,  p.  12,  intitulé  :  pluriel  terminé  en  CHOU  aurait  fourni  à 
M.  Ebel  des  exemples  nouveaux  à  citer  dans  l'étude  sur  le  zétacisme 
dont  il  a  enrichi  la  nouvelle  édition  de  la  Grammatica  Celtica  (pp.  169- 
.7.). 

Le  Gonidec  n'avait  pas  dit  dans  sa  grammaire  que  1'/  initial  suivi 
d'une  voyelle  était  consonne  en  breton.  C'est  chez  M.  H.  que  j'ai  trouvé 
cette  observation  pour  la  première  fois.  Devant  cet  i  l'article  est  ar  et 
non  ann  comme  devant  les  voyelles  'p.  25,  voyez  aussi  p.  49,  n,). 
Le  Gonidec  respectait  ordinairement  cette  règle  qu'il  n'avait  pas  signa- 
lée fvoir  pp.  394  et  suiv.  de  son  Dictionnaire  breton-français'^.  Comparer 
le  dictionnaire  déjà  cité  de  M.  Troude  aux  mots  langue,  poule,  etc.). 

Le  futur  primaire  auxiliaire  figure  dans  les  paradigmes  du  verbe  et 
c'est  encore  la  première  fois,  si  je  ne  me  trompe,  qu'une  grammaire 
bretonne  le  signale. 

Je  ne  cite  que  quelques  exemples  :  Il  y  a  donc  dans  la  Grammaire  de 
M.  H.  une  foule  de  choses  à  apprendre  qui  ne  se  trouvent  pas  dans  les 
ouvrages  analogues  que  nous  avons  eus  jusqu'à  présent  à  notre  disposi- 
tion ;  c'est  la  raison  pour  laquelle  j'ai  tant  insisté  sur  le  défaut  capital 
de  ce  livre.  Si  l'on  a  soin  de  se  tenir  en  garde  contre  la  tendance  de 
l'auteur  à  confondre  les  dialectes,,  on  n'aura  qu'à  gagner  à  la  lecture 
de  son  livre. 

La  grammaire  comparée  n'a  guère  pénétré  en  Bretagne.  Mais  si  M.  H. 
est  resté  étranger  à  cette  science  encore  nouvelle,  il  a  du  moins  le  bon 
goût  de  ne  pas  fabriquer  d'étymologies.  Son  seul  faible  est  de  croire  à 
l'antiquité  de  sa  langue.  Son  plus  éminent  approbateur,  dans  une  lettre 
imprimée  en  tête  du  volume,  dit,  en  outre,  qu'il  considère  le  dialecte  de 
Tréguier  comme  plus  ancien  que  celui  de  Léon.  M.  Troude  l'a  observé  : 
Pep  hini  e  Breiz  a  veul  hc  icz  drcist  hini  ar  re  ail  ' . 

H.  d'ArBOIS  de  JUBAINVILLE. 

I.  «  Chacun  en  Bretagne  trouve  son  dialecte  supérieur  aux  autres.  »  Nouveau  diction- 
naire pratique  français  et  breton,  p.  280. 


CHRONIQUE. 


Mort  de  M.  Todd.  —  Souscription  de  la  Todd  Professorship.  —  L'université 
galloise  d'Aberystwyth.  —  Procès  «  Pike  versus  Nicholas.  »  —  Deux  confé- 
rences de  M.  Huxley.  -  Annonce  d'unCorpus  Inscriptionum  Hibcrnicanim .  — 
Création  d'une  chaire  de  langue  irlandaise  à  Notre-Dame. 

Les  études  celtiques  ont,  l'an  dernier,  perdu  un  de  leurs  plus  illustres  représentants 
en  Irlande,  M.  J.-H.  Todd.  11  est  inutile  d'énumérer  ici  ses  nombreux  travaux 
bien  connus  de  toute  personne  qui  s'est  occupée  de  l'histoire  et  de  la  littérature 
de  l'Irlande.  Si  on  a  pu  avec  justesse  dire  de  quelqu'un  «  nulla  dies  sine  linea  » 
c'est  bien  de  M.  Todd  ;  la  mort  l'a  surpris  travaillant  au  Liber  Hymnoram.  Le 
dernier  travail  qu'il  ait  publié  est  un  mémoire  On  the  Illumination  of  thc  ancient 
Irish  Manuscripls,  dans  le  sixième  volume  des  Vetusta  Monumenta  de  la  Société 
des  Antiquaires  de  Londres'.  Né  le  5  avril  1805,  M.  Todd  est  mort  le  28  juin 
1869.  Bien  que  professeur  d'hébreu  à  l'Université  de  Dublin,  c'est  comme 
irlandistc  qu'il  s'est  acquis  une  juste  et  durable  célébrité.  Il  a  brillé  au  premier 
rang  des  hommes  qui  dans  le  second  quart  de  ce  siècle  ont  donné  aux  études 
celtiques  en  Irlande  un  éclat  si  remarquable.  11  y  apportait  une  méthode  critique 
et  des  connaissances  générales  qui,  à  cette  époque,  manquaient  malheureusement 
quelquefois  aux  savants  des  pays  celtiques.  Aussi  les  études  irlandaises  sont-elles 
redevables  à  M.  Todd,  non-seulement  de  ses  publications  de  textes  et  de  ses 
travaux  originaux,  mais  aussi  de  la  légitime  influence  qu'il  exerçait  autour  de 
lui.  M.  Todd  a  été  un  des  premiers  à  encourager  notre  projet  de  fonder  cette 
Revue;  il  nous  écrivait  dans  les  premiers  jours  de  mai  1869  :  «  Dear  friend,  as 
far  as  my  health  permits,  you  may  reckon  upon  ail  the  help  I  can  give  you. 
Your  Revue  will  be  a  work  of  great  importance,  not  only  to  Celtic  studies,  but 
aiso  to  Comparative  Philology  in  gênerai.  »  Si  la  collaboration  de  M.  Todd  doit 
nous  manquer,  si  ses  conseils  doivent  nous  faire  défaut,  c'est  pour  nous  une  conso- 
lation  du   moins  de  pouvoir  mettre  cette  Revue  sous  le  patronage  de  son  nom 


Nous  parlerons  prochainement  de  ce  travail. 


i68  Chronique. 

Après  la  morl  de  M.  Todd,  ses  principaux  amis  se  réunirent  et  se  formèrent 
en  comité  pour  élever  par  souscription  un  monument  (mémorial),  à  celui  dont  ils 
voulaient  honorer  le  souvenir.  Que  serait  ce  monument?  une  statue  ?  une  fonda- 
tion pieuse?  ou  autre  chose  encore?  Dans  une  réunion  tenue  à  la  Molesworth 
Hall,  à  Dublin,  M.  J.-T.  Gilbert  proposa  de  fonder  une  chaire  de  philologie 
celtique  qui  porterait  le  nom  de  D'  Todd.  Cette  motion  fut  adoptée  et  le  meeting, 
presque  à  l'unanimité,  passa  la  résolution  : 

i(  Que  le  monument  national  à  élever  à  M.  J.-H.  Todd,  prendrait  la  forme 
«  d'une  chaire  de  langues  celtiques,  qui  serait  fondée  près  l'Académie  Royale 
«  d'Irlande.  » 

11  n'est  pas  en  effet  de  moyen  plus  délicat  de  rendre  hommage  à  la  mémoire 
de  M.  Todd;  ce  serait  continuer  l'œuvre  de  sa  vie  et  attacher  pour  toujours  son 
nom  aux  études  irlandaises.  Nous  félicitons  M.  Gilbert  de  sa  généreuse  initiative 
et  c'est  le  lieu  de  rappeler  le  mot  d'un  ancien  :  «  Non  hoc  prc-ecipuum  amicorum 
munus  est  prosequi  defunctum  ignavo   fletu,  sed  qus  voluerit   meminisse,   quse 

mandaverit  exsequi.  »  Nous   désirons  le  succès  de  ce  louable  dessein, sans 

pourtant  trop  y  croire.  Comme  l'a  fait  remarquer  M.  Jellet  dans  la  réunion  delà 
Molesworth  Hall,  les  appointements  attachés  à  cette  chaire  ne  pourraient  être 
inférieurs  à  200  I.  (  5,000  fr.).  Réussira-t-on  à  réunir  par  souscription  une  somme 
assez  forte  pour  que  les  intérêts  représentent  ce  traitement?  Je  suis  tenté  de  pen- 
ser avec  M.  Madden  que  cela  est  improbable.  L'entreprise  serait  possible  dans 
un  pays  où  le  sentiment  national  serait  plus  vif,  où  l'on  porterait  un  intérêt  plus 
direct  à  la  langue,  à  la  littérature  et  aux  antiquités  nationales.  Elle  serait  pos- 
sible, par  exemple,  dans  un  pays  slave.  C'est  ainsi  que  dans  ces  dernières  années 
le  petit  peuple  croate,  un  million  d'hommes,  a  donné  près  de  500,000  fr.,  pour 
une  œuvre  analogue.  De  cette  souscription  nationale  est  née  l'Académie  Jougo- 
Slave  d'Agram,  fondée  sous  le  patronage  de  Mgr  Strossmayer,  et  qui  publie 
ses  travaux,  non  dans  une  langue  étrangère  (comme  fait  l'Académie  de  Dublin, 
par  exemple)  mais  dans  la  langue  nationale,  en  serbo-croate.  On  ne  trouve  mal- 
heureusement pas  dans  les  pays  celtiques,  et  principalement  en  Irlande,  ce  patrio- 
tisme qui  caractérise  à  un  si  haut  degré  les  pays  slaves.  Fait-on  quelque  chose 
en  Irlande  pour  prévenir  l'extinction  prochaine  du  Gaélique?  Et  pourtant  si  l'on 
porte  quelque  intérêt  à  une  langue,  ne  doit-on  pas  d'abord  veiller  à  sa  conserva- 
tion? Les  sociétés  irlandaises  qui  s'occupaient  de  littérature  et  d'antiquités 
nationales,  meurent  l'une  après  l'autre  devant  l'indifférence  du  public.  La  Société 
Ossianique  n'existe  plus  ;  pour  ne  pas  avoir  l'air  de  disparaître,  la  Société  Celtique 
s'est  fondue  avec  la  Société  Archéologique  Irlandaise^  et  les  publications  de  cette 
dernière  sont  devenues  de  plus  en  plus  rares.  Le  sol  irlandais  ne  semble  pas 
favorable  à  la   semence  que  lui  confie  M.  Gilbert. 

Le  passé  nous  fournit  à  cet  égard  de  tristes  enseignements.  Par  une  louable 
mesure,  le  gouvernement  britannique  avait,  il  y  a  une  quinzaine  d'années,  fondé 

I.  Il  ne  faut  pas  confondre  cette  société  avec  V Association  royale  Archéologique 
d'Irlande,  appellation  que  vient  d'adopter  l'ancienne  Association  Archéologique  de 
Kilkenny. 


Chroni(]iie.  169 

une  chaire  de  langues  celtiques  dans  chacun  des  trois  Collèges  de  l'Université  de 
la  Reine  en  Irlande,  à  Cork,  à  Galway  et  à  Belfast.  On  les  supprima  au  bout  de 
quelques  années,  parce  que,  si  nous  sommes  bien  informés,  les  cours  restaient 
déserts.  Il  existe  aujourd'hui  une  chaire  de  langue  irlandaise  à  l'Université  de 
Dublin  (Trinity  Collège);  elle  est  occupée  par  M.  Th.  O'Mahony,  connu  dans  le 
monde  savant  par  la  publication  des  Brehon  Laws  qu'il  a  courageusement 
consenti  a  surveiller  après  la  mort  de  MM.  O'Donovan  et  O'Curry.  Ce  cours 
pourtant  est  à  peine  fréquenté.  J'ai  pu  y  assister  pendant  l'hiver  1866-67,  grâce 
à  la  bienveillance  du  professeur.  Il  m'est  arrivé  quelquefois  de  m'y  trouver  seul, 
ce  qui  me  valait  l'avantage  d'un  tête  à  tête  avec  M.  Th.  O'Mahony  ;  mais  je  ne 
pouvais  m'empêcher  de  regretter  l'indifférence  avec  laquelle  était  traité  l'ensei- 
gnement de  la  langue  nationale.  Les  précédents  ne  permettent  donc  guère  de 
bien  augurer  du  projet  de  fonder  une  chaire  de  philologie  celtique  près  l'Académie 
Royale  d'Irlande.  Il  faudrait  du  moins  promettre  des  appointements  aux  auditeurs 
aussi  bien  qu'au  professeur.  Le  système  de  ce  qu'on  appelle  en  France  des 
«  jetons  de  présence  »  pourrait  être  employé  avec  utilité. 

Nous  désirons  vivement  nous  tromper;  nous  souhaitons  que  l'avenir  donne  un 
démenti  à  nos  paroles,  mais  nous  ne  croyons  pas  au  succès  de  la  souscription 
de  la  «  Todd  Professorsbip  «  parce  que  l'esprit  national  n'est  pas  assez  vivace  en 
Irlande  ;  nous  sommes  du  reste  persuadé  que  les  organisateurs  de  ce  mouve- 
ment emploieront  dans  un  but  utile  aux  études  irlandaises  le  produit  de  la  sous- 
cription, s'il  ne  suffit  pas  à  fonder  une  chaire  de  philologie  celtique*. 


Nous  augurons  mieux  du  projet  de  créer  une  université  Galloise  à  Aberystwyth. 
Le  pays  de  Galles  est  jusqu'ici  resté  sans  université,  bien  qu'il  compte  1,200,000 
habitants;  et  l'on  s'imagine  facilement  que  c'a  été  un  grand  désavantagea  la  fois 
pour  la  culture  intellectuelle  et  pour  la  prospérité  matérielle  du  pays.  Une  partie 
seulement  de  la  jeunesse  galloise  pouvait  aller  chercher  en  Angleterre  ou  en 
Ecosse  l'instruction  qu'elle  ne  trouvait  pas  chez  elle.  Il  en  résultait  que  ce  petit 
pays  n'était  pas  représenté  comme  il  pouvait  l'être  dans  les  services  publics  et 
dans  les  carrières  libérales.  Pourquoi  la  Principauté  de  Galles,  unie  à  l'Angleterre 
de  sentiment  comme  de  fait,  ne  ferait-elle  pas  profiter  ses  enfants  des  avantages 
qu'un  grand  état  présente  à  leur  activité.?  L'Ecosse  ne  joue-t-elle  pas  dans  le 
Royaume-Uni  un  rôle  plus  important  que  ne  ferait  croire  le  petit  nombre  de  ses 
habitants  (3,000,000)  parce  que  l'intruction  non  seulement  primaire,  mais  secon- 
daire, y  est  très-répandue,  parce  qu'il  y  a  quatre  grandes  universités,  et  parce  que 

I .  Pour  ceux  de  nos  lecteurs  qui  désireraient  participer  à  la  souscription  nous  reprodui- 
sons le  passage  suivant  du  prospectus  :  «  Those  who  désire  to  join  in  ihis  effort,  will 
kindly  send  their  subscriptions  to  tlie  Honorary  Treasurers  of  the  Todd  National  Mémorial 
Fund  :  —  W.  H.  Hardinge,  Esq.,  Tr.  R.I.A.;  and  J.  T.  Gilbert,  Esq.,  F. S. A.  Royal 
Irish  Academy  House,  Dmrson-street  ;  or  lodge  them  to  the  crédit  of  "The  Todd  National 
Mémorial  Fund,"  at  the  Bank  of  Ireland,  or  the  London  and  Westminster  Bank,  or  at  any 
of  their  branches.  » 


lyo  Chronique.  ,f 

la  jeunesse  écossaise  est  admirablement  préparée  à  lutter  avec  succès  dans  les 
diverses  branches  de  l'activité  humaine  ? 

Dès  1854,  quelques  Gallois  éclairés  songeaient  à  demander  une  Université 
pour  la  Principauté;  mais  ce  n'est  guère  qu'en  1864  que  ces  désirs  prirent  corps 
et  qu'une  «  agitation  »  commença.  Un  comité  se  forma  qui  comprenait  les 
illustrations  de  la  Principauté,  et  il  s'adressa  au  public  gallois  dont  le  patriotisme 
ne  fit  pas  défaut.  15,000  I.  {^jf^^ooo  fr.)  ont  déjà  été  souscrites;  mais  on 
évalue  qu'il  faut  encore  une  somme  égale'.  Un  magnifique  bâtiment  a  déjà  été 
acquis  à  Aberystwyth,  au  prix  de  10,000  I.  {250,000  fr.};  on  ne  pouvait  choisir 
un  siège  plus  favorable  que  ce  point  central  de  la  Principauté.  L'Université  sera 
organisée  sur  le  modèle  de  l'Université  de  la  Reine  en  Irlande  et  il  y  a  lieu  de  croire 
que  le  gouvernement  britannique  n'attend  que  sa  fondation  pour  lui  accorder 
un  don  annuel  et  une  charte,  c'est-à-dire  le  droit  de  décerner  des  diplômes.  Une 
semblable  institution  contribuera  certainement  beaucoup  à  la  prospérité  de  la 
Principauté,  et  il  y  a  assez  de  patriotisme  en  Galles  pour  que  nous  puissions 
prévoir  l'ouverture  prochaine  de  l'Université  d' Aberystwyth.  Nous  ne  devons  pas 
pourtant  nous  dissimuler  qu'elle  aura  pour  effet  de  dèccltiser  la  principauté  Nous 
pensons  bien  qu'on  ne  manquera  pas  d'y  établir  une  chaire  de  langue  et  de  litté- 
rature Galloise  ;  mais  les  cours  doivent  s'y  faire  en  anglais.  La  Principauté  de 
Galles  est  le  seul  des  pays  celtiques  qui  ait  conservé  jusqu'à  nos  jours  sa  langue 
comme  langue  nationale,  politique  et  littéraire  ;  il  est  malheureux  qu'elle  aussi  soit 
en  voie  de  renoncer  à  sa  nationalité.  Ce  que  la  conquête  anglaise  n'a  pu  faire, 
la  communauté  d'intérêts  le  réalisera.  Les  relations  de  peuple  à  peuple,  et,  dans 
un  seul  pays,  de  province  à  province,  ont  pris  une  telle  extension  que  les  grandes 
nationalités  menacent  d'absorber  les  petites,  par  l'unique  pression  de  leur 
influence.  La  loi  brutale  de  l'attraction  gouverne  les  peuples,  hélas!  aussi  bien 
que  les  planètes. 


Un  procès  curieux  par  sa  nature  et  aussi  par  la  différence  des  verdicts  de 
première  instance  et  d'appel  a  été  jugé  l'an  dernier  à  Londres.  Il  s'agissait  d'une 
accusation  de  plagiat  portée  par  M.  L.  0.  Pike,  auteur  du  livre  The  Engllsh  and 
their  Origin^,  contre  M.  Th.  Nicholas,  auteur  de  The  Pedigree  of  thc  English 
peaple"^.  Que  deux  livres  traitant  le  même  sujet  et  arrivant  à  des  conclusions 
analogues  vissent  le  jour  en  même  temps,  cela  pouvait  étonner  le  public.  Mais 
c'étaientdeux  mémoires  refusés  au  même  concours,  que  leurs  auteurs,  désespérant  de 


1.  «  Subscriptions  and  Donations  may  be  forwarded  to  the  "Rev.  D.  Charles,  Univer- 
sity  Collège,  Aberystwyth."  » 

2.  The  English  and  their  Origin  ;  a  Prologue  to  authentic  English  History,  by  Luke 
Owen  Pike,  M.  A.,  Barrister-at-Law.  XXin-267  p.  in-8,  Londres,  Longmans  and  Co. 

}.  The  Pedigree  of  the  English  People  ;  an  Argument,  Historié  and  Seientifie,  on  English 
Ethnology,  showing  the  Progrès  s  of  Race  Amalgamation  in  Britain  from  the  Earliest  Times 
with  especial  referenee  to  the  Incorporation  of  the  Celtic  Aborigènes.  By  Thomas  Nicholas, 
M.  A.,  Pli.  D.,  F. G. S.  etc.  XUI-O06  pages,  in-8.  Londres,  Longmans  and  Co. 


Chronique.  •  171 

remporter  le  prix,  se  décidaient  à  publier.  Un  prix  de  cent  guinées  ("2,625  ^r.) 
avait  été  proposé  dans  l'un  des  EisUddfodau  du  pays  de  Galles  pour  le  meilleur 
essai  sur  «  l'origine  de  la  nation  anglaise  et  la  question  de  savoir  jusqu'à  quel 
point  cette  nation  descend  des  anciens  Britannes.  »  MM.  Pike  et  Nicholas  con- 
coururent en  1865  :  aucun  mémoire  ne  fut  jugé  digne  d'être  couronné  et  le  prix 
fut  remis  à  VEisteddfod  de  l'année  suivante.  M.  Pike  se  retira  alors  du  concours 
et  publia  son  travail  en  1866.  M.  Nicholas,  plus  obstiné,  concourut  de  nouveau 
en  1866  sans  être  plus  heureux  ',  et  ce  n'est  qu'après  ce  second  échec  qu'il  imita 
l'exemple  de  M.  Pike.  Inutile  de  dire  que  ni  l'un  ni  l'autre  ne  disait  au  public 
dans  quelle  circonstance  son  œuvre  était  née  :  la  Saturday  Review  en  fit  la  remar- 
que dans  un  compte-rendu  du  livre  de  M.  Nicholas*.  Je  ne  sais  si  cette  révéla- 
tion fut  du  goût  de  M.  Nicholas  ;  mais  il  est  certain  qu'elle  ne  plut  pas  à  M.  Pike, 
car  il  écrivit  à  la  Saturday  Review  pour  donner  à  entendre  qu'il  n'avait  pas 
concouru,...  sans  pourtant  nier  tout-à-fait  qu'il  eût  concouru.  «  Aucun  essai  de 
ma  plume,  disait-il,  n'a  jamais  été  déclaré  indigne  d'aucun  prix  à  aucun 
Eisteddfod^.  ))  Le  souvenir  de  cette  réclamation  a  dû  gêner  M.  Pike  pendant  le 
procès  de  l'an  dernier  dans  lequel  l'histoire  du  concours  si  malheureux  aux  deux 
auteurs  a  été  exposée  tout  au  long. 

L'affaire  c  Pike  iwiw  Nicholas  »  vint  le  27  avril  1X69  devant  le  Vice-Chancetlor 
James.  M.  Pike  se  plaignait  d'abord  que  la  troisième  partie  du  livre  de  M.  Ni- 
cholas fut  disposée  sur  un  plan  identique  au  sien.  M.  Nicholas  examinait  la 
question  de  l'origine  de  la  nation  anglaise  successivement  au  point  de  vue  de 
l'histoire,  de  la  philologie,  du  caractère  physique  et  du  caractère  moral  de  la 
race  anglaise;  M.  Pike  en  avait  fait  autant,  et,  comme  s'il  ne  voyait  pas  ou  ne 
voulait  pas  voir  que  cette  division  était  dans  la  nature  même  du  sujet,  il  criait 
au  plagiat.  Si  ridicule  qu'il  fut,  cet  argument  occupa  une  partie  des  débats.  Le 
plaignant  alléguait  ensuite  qu'il  y  avait  sur  certains  points  identité  de  citations 
et  identité  d'arguments,  comme  si  les  textes  et  les  faits  n'appartiennent  pas  à 
tout  le  monde,  et  comme  si  les  mêmes  arguments  ne  devaient  pas,  par  la  force 
même  des  choses,  se  rencontrer  dans  deux  ouvrages  écrits  en  vue  du  même 
concours  et  pour  soutenir  la  même  thèse.  En  troisième  lieu —  et  ici  avec  quelque 
apparence  de  raison  —  M.  Pike  soutenait  que  M.  Nicholas  avait  emprunté  à 
son  livre  quelques  renseignements  et  certains  titres  de  livres.  Les  débats  montrè- 

1.  Remis  d'année  en  année,  le  prix  a  enfin  été  décerné  à  VEisteddfod  de  Rhuthin  en 
1868.  Le  vainqueur  est  M.  Beddoe,  président  de  la  Société  Anthropologique  de  Londres.  Son 
travail  n'a  pas  encore  été  publié,  que  nous  sachions  du  moins. 

2.  N"  du  6  juin  1868,  p.  757. 

5.  «  We  hâve  received  a  letter  from  Mr.  L.  Owen  Pike  with  référence  to  a  passage  in 
our  article  of  last  week  on  Nicholas's  Pedigree  of  îhe  English  People.  Mr  Pike  says,  «  No 
Essay  of  mine  was  ever  dedared,  either  by  Archdeacon  Jone^  or  by  Lord  Strangford, 
unu'orthy  of  any  priée  at  any  Eisteddfod.  »  We  now  understand  that  no  Essay  of  Mr  Pike's 
was  ever  prono'unced  unworthy  of  an  Eisteddfod  pnze  by  Lord  Strangford  or  Archdeacon 
Jones,  but  an  Essay  bearing  the  initiais  "  L.  0.  P."  —  be  it  Mr  Pike's  production  or  not 
—  did  fail  to  obtain  a  prize  at  the  Eisteddfod  of  1865,  as  adjudicated  by  Mr  Jones  and 
his  two  colleages.  »  Saturday  rci'ieif  du  13  juin  i868,  p.  797,  col.  2.  —  Le  procès  de 
1869  a  montré  que  l'auteur  de  l'essai  signé  L.  0.  P.  était  effectivement  M.  Pike  ;  la 
Saturday  review  était  bien  informée. 


172  Clironicjue. 

rent,  en  effet,  que  M.  Nicholas  n'avait  probablement  point  vu  quelques-unes  des 
œuvres  qu'il  citait  :  mais  en  avait-il  pris  les  titres  dans  le  livre  de  M.  Pike,  ou 
dans  quelque  autre  ouvrage,  c'est  ce  qu'il  serait  difficile  de  dire.  Donner  pour 
originales  des  citations  faites  de  seconde  main,  est  un  procédé  blâmable  si  fré- 
quent qu'il  soit;  il  est  indélicat,  parce  qu'on  ne  doit  pas  se  donner  l'honneur  de 
recherches  qu'on  n'a  pas  faites;  il  est  également  dommageable  pour  la  science, 
parce  que  de  la  sorte  se  perpétuent  des  citations  fausses  et  des  erreurs  que 
l'examen  direct  des  textes  ferait  vite  sortir  de  la  circulation'.  Quoi  qu'il  en  soit, 
il  y  a  loin  d'une  indélicatesse  à  un  plagiat  et  les  personnes  qui  s'occupent  d'his- 
toire et  d'ethnologie  ne  furent  pas  peu  étonnées,  après  ce  procès  qui 
occupa  plusieurs  séances,  d'entendre  dans  celle  du  24  mai  le  Vice-Chancelier 
James  déclarer  M.  Nicholas  coupable  de  «  piraterie  littéraire  »  (litcrary  piraq) 
et  le  frapper  d'une  peine  ^tvhrt^. 

M.  Nicholas  appela  de  ce  jugement  à  la  juridiction  supérieure,  et  le  17  novem.- 
bre  de  la  même  année  l'affaire  vint  devant  le  Lord  Chancelier  et  Lord  Justice 
Gifïard.  Après  un  débat  de  plusieurs  jours,  ces  deux  magistrats  jugèrent  que 
s'il  y  avait  plagiat  sur  quelques  points  de  détail,  le  plagiat  n'était  pas  assez 
grave  pour  entraîner  une  condamnation  et  ils  renvoyèrent  M.  Nicholas  de  la 
poursuite  '. 

Après  ce  jugement,  un  écrivain  de  \'Athena:um  observa  avec  raison  (n°  du  4 
décembre  1869,  p.  737),  que,  si  le  jugement  du  Vice-Chancellor  James  avait 
subsisté  il  n'est  guère  d'écrivain  qu'on  ne  puisse  accuser  de  plagiat.  Comme  l'a 
dit  un  de  nos  poètes  : 

C'est  imiter  quelqu'un  que  de  planter  des  choux. 

L'écrivain  anglais  exprime  en  outre  son  regret  que  dans  une  affaire  où  des 
questions  d'ethnographie  et  d'histoire  étaient  le  fond  du  débat,  on  n'ait  pas 
appelé  des  savants  compétents  comme  experts  ou  comme  assesseurs.  Nous  allons 
plus  loin  que  lui  :  nous  croyons  qu'une  plainte  de  ce  genre  n'aurait  jamais  dû 
être  portée  devant  des  juges.  Un  plagiat  n'est  matière  légale  et  ne  peut  donner 
naissance  à  un  procès  que  lorsqu'il  est  palpable  et  notoire,  lorsque,  par  exemple, 

1.  Ainsi  (comme  l'a  fait  récemment  remarquer  M.  Le  Uen,  dans  \a  Revue  Archéologique 
de  mars  1869,  p.  172)  on  cite  souvent  comme  preuve  d'un  culte  que  les  Gaulois  (d'après 
Pline)  auraient  rendu  au  gui,  un  prétendu  vers  d'Ovide 

Ad  viscum  druidas,  druidae  cantare  solebant 
qui  ne  se  trouve  pas  dans  Ovide.  Ce  texte  imaginaire  n'aurait  point  trouvé  place  dans  un 
grand  nombre  d'ouvrages  si  les  écrivains  qui  s'en  servaient  s'étaient  souciés  de  remonter 
aux  sources. 

2.  M.  Nicholas  devait  supprimer  environ  quarante  pages  de  son  livre,  abandonner  à 
M.  Pike  le  profit  retiré  des  exemplaires  déjà  vendus,  et  payer  les  frais  du  procès. 

3.  Le  lecteur  curieux  de  connaître  les  détails  de  ce  procès  trouveront  le  compte-rendu 
des  débats  et  du  jugement  de  première  instance  dans  VAnthropological  Rcview  de  juillet 
1869,  pages  279-306.  Il  faudra  y  joindre  la  brochure  publiée  p^r  M.  Nicholas  sous  ce 
titre  :  An  examination  of  Vice-Chrjncellor  James's  Judgment,  with  nn  Account  of  its  dis- 
minai by  the  Court  of  Appenl^  in  Chancery,  in  the  case  of  thc  Book  entitled  "The  Pedigree 
ofthe  English  people,"  44  p.  in-8.  Londres,  Longmans  and  Co.  Pr.  i  sh.  — M.  Nicholas 
donne  à  la  fin  de  cette  brochure  un  résumé  de  la  sentence  portée  en  appel,  mais  on  en 
trouvera  un  compte-rendu  plus  détaillé  dans  les  feuilles  Londoniennes  du  2j  novembre,  et 
particulièrement  le  Times  de  cette  date. 


Chronique.  17} 

un  écrivain  sans  vergogne  prend  un  roman  écrit  dans  une  langue  étrangère,  le 
traduit  et  le  publie  sous  son  propre  nom,  ou  lorsqu'il  copie  des  pages  entières  dans 
l'œuvre  d'autrui;  mais  il  n'y  avait  rien  de  semblable  dans  l'affaire  «  Pike  versus 
Nicholas  »,  et  il  y  a  lieu  de  s'étonner  que  M.  Pike,  tout  homme  de  loi  qu'il  est, 
ait  cru  devoir  citer  en  justice  son  rival.  Quelque  respect  qu'on  ait  pour  la 
justice,  il  est  permis  de  penser  que  les  juges  n'ont  pas  toujours  des  connaissances 
très  étendues  en  ethnologie  et  en  histoire.  Une  cause  de  ce  genre  devait  se 
débattre  devant  des  hommes  de  science  choisis  d'un  commun  accord  pour 
arbitres;  la  dignité  des  lettres  y  était,  ce  me  semble,  intéressée. 

Le  but  de  MM.  Pike  et  Nicholas  était  de  démontrer,  contre  l'opinion  généra- 
lement reçue,  que  l'élément  britannique,  antérieur  à  la  conquête  saxonne,  est  le 
principal  facteur  de  la  nationalité  anglaise.  Cette  théorie  a  été  assez  mal  accueillie 
de  l'autre  côté  de  la  Manche,  et  pour  plusieurs  raisons.  D'abord,  il  était  de  tradition 
de  considérer  les  Anglais,  comme  descendant  à  peu  près  sans  mélange  des  Anglo- 
Saxons,  qui  auraient  exterminé  les  anciens  habitants  de  l'Angleterre  actuelle  '  ; 
d'autre  part  la  théorie  nouvelle  était  du  premier  coup  poussée  à  l'extrême.  Observons 
aussi  que  cette  théorie  n'avait  pas  dans  MM.  Pike  et  Nicholas  des  défenseurs 
d'une  érudition  éprouvée,  et  que  les  avocats  faisaient  tort  à  la  cause.  Le  livre  de 
M.  Nicholas,  si  supérieur  qu'il  soit  à  celui  de  M.  Pike,  est  gâté  par  une 
philologie  de  mauvais  aloi  et  des  assertions  erronées  sur  divers  points  d'histoire. 
Nous  croyons  pourtant  que  la  thèse  soutenue  par  eux  est  juste  dans  une  certaine 
mesure  :  et  au  lieu  qu'ils  aient  à  démontrer  que  les  envahisseurs  de  race  ger- 
manique n'ont  pas  supprimé  tout  élément  aborigène,  ce  serait  plutôt  à  leurs 
adversaires  de  prouver  que  les  envahisseurs  ont  réellement  détruit  la  population 
britannique  dans  cette  partie  de  la  Grande-Bretagne  qu'on  appelle  aujourd'hui 
Angleterre.  Et  en  effet,  l'extermination  complète  des  possesseurs  du  sol  n'est  pas 
la  conséquenee  obligée  d'une  conquête,  lorsque  conquérants  et  conquis 
ne  sont  pas  séparés  par  de  profondes  différences  de  race.  L'intérêt  des 
envahisseurs  est  de  laisser  vivre  une  population  de  serfs  qui  cultive  le  sol  et 
nourrisse  ses  maîtres.  Les  hommes  ne  le  voudraient  pas  que  la  force  des  choses 
s'imposerait  à  eux.  Citons  un  exemple  :  Cromwell  ne  se  proposait-il  pas  de  refouler 
toute  la  population  irlandaise  dans  la  province  de  Connaught,  et  ne  mettait-il  pas 
une  ardeur  impitoyable  dans  cette  politique  vraiment  exterminatrice.?  «  En  enfer 
ou  en  Connaught!  n  (To  hcll  or  to  Connaught!},  disait-on  à  la  population 
indigène  qu'on  voulait  (et  on  ne  s'en  cachait  pas)  extirper  du  sol.  S'il  fallait 
ajouter  foi  aux  mesures  de  Cromwell  et  aux  récits  contemporains  des  m.assacres 
et  des  évictions  qui  affligèrent  l'Irlande  à  cette  époque  néfaste,  on  aurait  lieu  de 
dire  qu'il  n'y  a  plus  d'Irlandais  qu'en  Connaught,  de  même  que,  dit-on,  il  n'y  a 
plus  de  Britannes  qu'en  Galles.  Mais  il  s'agit  ici  d'une  époque  rapprochée  de 
nous,  et,  malgré  les  témoignages  contraires,  nous  voyons  que  la  population  de 
l'Irlande  est  restée,  en  somme,  celtique  là  ou  elle  l'était  avant  Cromwell.  C'est 


1 .  Nous  prions  nos  lecteurs  du  continent  de  ne  pas  oublier  que  l'Angleterre  ne  forme 
qu'une  partie  de  la  Grande-Bretagne. 


174  Chronique. 

qu'on  ne  peut  réussir  à  transplanter  une  race  qu'avec  la  puissante  organisation 
administrative  des  états  modernes  (comme  fait  la  Russie  dans  le  Caucase)  ;  c'est 
aussi  que  les  aventuriers  auxquels  Cromwell  distribuait  la  terre  tenaient  à  con- 
server une  population  serve  qui  cultivât  le  sol  pour  eux-mêmes.  Malgré  de  nom- 
breux massacres  et  une  guerre  de  plusieurs  siècles  qui  diminua  le  nombre  de  la 
population  indigène,  les  choses  ont  di!i,  a  priori,  se  passer  de  la  sorte  en  Grande- 
Bretagne.  Remarquons,  en  outre,  que  les  envahisseurs  venaient  d'au-delà  les 
mers,  par  bandes  où  l'élément  féminin  ne  devait  guère  être  représenté;  ils  se 
mêlèrent  donc  à  la  population  conquise.  Dans  quelle  proportion,  c'est  ce  que 
nous  sommes  curieux  d'apprendre,  mais  ce  qu'il  nous  est  difficile  de  savoir. 
Invoquera-t-on  le  témoignage  de  l'anthropologie?  Mais  si  l'anthropologie  peut 
reconstituer  l'histoire  du  genre  homo  sur  le  globe  terrestre,  les  témoignages  dont 
elle  dispose  sont  trop  rares  et  trop  incertains  pour  qu'elle  puisse  intervenir  dans 
l'histoire  d'un  peuple.  L'historien  et  le  philologue  peuvent  parler  de  «  race  cel- 
tique »  et  de  «  race  germanique,  »  parce  que  pour  eux  la  communauté  de  lan- 
gue ou  la  fusion  politique  forme  une  certaine  unité;  mais  rien  de  pareil  n'existe 
pour  l'anthropologiste  puisqu'il  ignore,  et  ce  qu'étaient  les  Celtes  et  les  Germains 
primitifs,  et  à  quelles  populations  ils  se  sont  mêlés  sur  le  sol  de  l'Europe.  Lais- 
sons donc  l'anthropologie  ou  du  moins  ne  la  consultons  qu'avec  défiance.  Etu- 
diera-t-on  davantage  le  caractère,  les  dispositions  morales  et  intellectuelles.? 
M.  Mathew  Arnold  l'a  essayé  dans  un  beau  livre  dont  nous  recommandons  la 
\ect\ive  The  Study  of  Celtic  Literaturc  (Londres,  1867).  L'éminent  écrivain  vou- 
lant expliquer  la  genèse  du  caractère  anglais,  y  voit  la  réunion  de  trois  carac- 
tères, le  caractère  celtique,  le  caractère  saxon,  et  le  caractère  normand,  et  dans 
l'apport  de  ces  différents  éléments  au  caractère  anglais,  il  regarde  la  poésie 
anglaise  comme  un  produit  de  l'élément  celtique,  ce  qui  est  peut-être  faire  trop 
peu  de  cas  du  génie  individuel.  Les  recherches  du  genre  de  celles  de  M.  Mathew 
Arnold  sont  certainement  fort  séduisantes,  mais,  comme  elles  ne  reposent  sur  rien 
de  certain,  elles  ne  sont  pas  convaincantes.  Le  problème  n'est  donc  pas  résolu 
et  nous  ne  pouvons  arriver  à  connaître  la  proportion  de  l'alliage.  Il  ne  s'agit  en 
effet  que  d'une  question  de  degré.  N'oublions  pas  non  plus  que  les  qualités  mo- 
rales et  intellectuelles  ne  se  transmettent  pas  dans  la  même  proportion  que  le 
sang,  et  qu'un  élément  inférieur  parle  nombre,  mais  supérieur  par  la  civilisation  ou 
par  l'énergie  du  caractère,  peut  marquer  de  son  empreinte  l'élément  plus  nom- 
breux mais  plus  malléable.  II  y  a  lieu  de  croire  que  le  génie  absorbant  de  la 
race  anglo-saxonne  ne  lui  faisait  pas  défaut  dès  lors  :  la  victoire  de  la  langue 
anglaise  (victoire  qui  se  continue  tous  les  jours)  en  fournit  une  preuve  éclatante. 
D'un  autre  côté  l'élément  britannique  est  resté,  comme  sang,  un  des  éléments 
constitutifs  de  la  nation  anglaise.  La  langue  en  a  gardé  la  trace.  «  Vrai  Bri- 
tanne  »  (true  Briton)  est  le  nom  que  se  donne  l'Anglais  dans  ses  accès  de  fierté 
patriotique.  Dans  le  langage  officiel,  il  n'y  a  pas  de  «  sujet  anglais,  »  et  existât- 
il  un  insulaire  de  pure  descente  saxonne,  il  n'en  est  pas  moins  un  «  sujet  britan- 
nique »;  et  c'est  la  qualification  que  recevra  à  son  grand  regret  M.  Edward 
A.  Freeman  s'il  demande  jamais  un  passeport  au  gouvernement  de  la  reine  Vie- 


chronique.  175 

toria.  La  proportion  de  sang  britannique  dans  les  veines  du  peuple  Anglais,  loin 
de  diminuer,  ne  fait  qu'augmenter  par  l'absorption  progressive  du  pays  de 
Galles,  de  l'Ecosse  et  de  l'Irlande  et  par  le  nombre  considérable  de  Gallois, 
d'Ecossais  et  d'Irlandais  qui  s'établissent  en  Angleterre,  si  bien  qu'on  pourrait 
dire  que,  pour  le  sang  du  moins,  l'Angleterre  est  en  train  de  se  rcbr'uannistr . 


La  question  de  l'origine  de  la  nation  anglaise  a  de  nouveau  été  mise  à  l'ordre 
du  jour  par  une  conférence  de  M.  Huxley,  faite  le  9  janvier  dernier  à  Londres*. 
L'avis  d'un  savant  aussi  éminent  que  M.  Huxley  mérite  d'être  pris  en  con- 
sidération ;  aussi  sa  conférence  a-t-elle  fait  quelque  bruit.  Son  objet  principal 
était  de  combattre  l'opinion  qui  attache  une  importance  politique  à  la  distinction 
des  races  celtique  et  anglo-saxonne.  Toute  personne  qui  connaît  quelque  peu 
l'histoire  irlandaise  de  ces  derniers  siècles,  reconnaîtra  avec  M.  Huxley  que 
l'Irlande  serait  plus  «  loyale  »  (nous  prenons  le  mot  dans  son  sens  anglais)  si 
elle  n'avait  été  traitée  avec  une  véritable  barbarie.  Mais  M.  Huxley  arrivait  à  ce 
résultat  en  démontrant  ou  du  moins  en  voulant  démontrer  qu'il  n'y  a  aucune 
différence  physique,  intellectuelle  et  morale  entre  les  races  germanique  et  celtique; 
que  la  population  des  Iles  Britanniques  se  compose  d'un  fond  ibère  mêlé  aux 
celtes  et  aux  germains  (et  à  même  dose  en  Irlande  qu'en  Grande-Bretagne),  et  que 
s'il  existe  une  différence  physique  entre  les  races  Ibère  et  Aryenne  (caries  races  cel- 
tique et  germanique  ne  sont  que  des  branches  de  cette  dernière),  il  n'y  a  pas 
entre  elles  de  différence  intellectuelle  et  morale.  Tirer  les  conséquences  de  cette 
théorie,  c'est  arriver  à  nier  les  traits  caractéristiques  de  populations  différentes  ; 
aussi  M.  Huxley  en  est-il  venu  à  déclarer  «  qu'il  n'existe  pas  de  différence  entre 
un  homme  de  Tipperary  et  un  homme  de  Devon,  »  assertion  qui  a  soulevé  dans 
la  Pall  Mail  Gazette  une  assez  vive  polémique  entre  M.  Huxley  et  un  correspon- 
dant anonyme  *. 

L'espace  nous  manque  pour  examiner  les  nombreuses  questions  soulevées  par 
M.  Huxley  :  cet  examen  a,  du  reste,  été  fait  en  termes  excellents  par  M.  Hyde 
Clarke  dans  ÏAthenaum  ',  et  nous  renvoyons  le  lecteur  à  ces  articles,  ainsi  qu'à 
la  conférence  de  M.  Huxley.  Il  est  quelques  assertions  pourtant  que  nous  devons 
relever.  D'une  part,  M.  Huxley  affirme  que  «  le  sang  et  la  langue  des  romains 
ne  semblent  pas  avoir  produit  plus  d'impression  sur  la  population  britannique 
que  le  sang  et  la  langue  des  Anglais  n'en  produisent  sur  les  Hindous.  »  Il  serait 
difficile  de  dire  dans  quelle  proportion  il  y  a  eu  infusion  de  sang  latin  en  Grande- 
Bretagne  ;  mais  nous  trouvons  la  preuve  que  la  Grande-Bretagne  a  été  romaniséeà 
un  très  haut  degré,  non-seulement  dans  les  nombreuses  ruines  romaines  de 
Grande-Bretagne,  mais  (ce  que  néglige  M.  Huxley')  dans  la  proportion  élevée  de 

1.  Elle  a  été  publiée  dans  la  Pall  Mail  Gazette  du  10  janvier. 

2.  N'-  des  18,  21,  26,  et  31  janvier. 

3.  N"'  des  22  et  29  janvier.  Voir  aussi  la  Saturday  Review  du  29  janvier  (p.  145)  et  le 
Hpectator  de  même  date    p.  135)- 


176  Chronique. 

mots  latins  en  gallois.  D'autre  part,  M.  Huxley  croit  à  une  infusion  considérable 
de  sang  Scandinave  en  Irlande.  Il  est  hors  de  doute  que  les  Scandinaves  ont  joué 
un  rôle  important  en  Irlande;  la  plupart  des  villes  maritimes  ont  été  fondées  par 
eux.  Les  rapports  entre  les  Scandinaves  et  les  Irlandais  n'ont  pas  encore  été 
suffisamment  étudiés;  il  y  a  entre  les  anciennes  littératures  Nordique  et  Irlandaise 
des  rapports  qu'il  serait  intéressant  de  connaître  en  détail.  Mais  il  y  a  lieu  de 
penser  que  les  Scandinaves  n'étaient  établis  que  sur  les  côtes  de  l'Irlande  et  que 
s'ils  étaient  assez  nombreux,  réunis  en  bandes,  pour  piller  le  pays  et  garder 
quelques  villes,  ils  ne  l'étaient  pas  assez  pour  introduire  un  élément  de  grande 
importance  dans  la  population  irlandaise'.  M.  Huxley  semble  aimer  à  mettre  des 
Germains  là  où  il  y  en  a  peu  ou  point;  car  dans  un  autre  passage  de  sa  con- 
férence, à  l'instar  de  l'Antiquaire  de  Walter  Scott,  il  déclare  les  Pietés  de 
race  germanique.  Les  mots  qui  nous  restent  de  la  langue  des  Pietés  '  nous  mon- 
trent en  eux  une  population  celtique  et  même  britannique'. 

Mais  la  partie  la  plus  importante  de  la  conférence  de  M.  Huxley,  est  celle  où, 
distinguant  dans  les  Iles  Britanniques  deux  éléments,  l'un  blond,  l'autre  brun,  il 
déclare  le  premier  Aryen  et  le  second  Ibère.  Il  a  depuis  lors  repris  cette  thèse 
avec  plus  de  développements  dans  une  autre  conférence  faite  le  13  mars*.  A  sup- 
poser que  l'élément  Aryen  soit  blond  (et  est-ce  bien  démontré?)  il  ne 
s'ensuit  pas  que  l'élément  brun  soit  exclusivement  Ibère.  II  y  a  des  choses  qu'il 
faut  se  résigner  à  ignorer,  et  c'est  affirmer  ce  que  nous  ne  pouvons  savoir  que 
rapporter  aux  peuples  dont  l'histoire  a  conservé  le  souvenir,  toutes  les  races 
primitives  de  notre  Europe.  Les  Ibères  ont  pu,  tout  comme  les  Celtes,  trouver 
sur  le  sol  de  l'Europe  une  population  antérieure  ;  il  a  pu  se  succéder  plusieurs 
couches  de  races  successives  et  plus  d'une  population  a  pu  disparaître  de  l'his- 
toire sans  pourtant  disparaître  du  monde. 

Vixere  fortes  ante  Agamemnona 
Multi  ;  sed  omnes  illacrymabiles 

Urgentur  ignotique  longa 

Nocte 

Sans  même  remonter  aux  époques  anté-historiques,  M.  Huxley  passe  sous 
silence  les  Ligures  dont  M.  de  Belloguet  s'est  fait  le  savant  avocat  et  qui  récla- 
ment leur  place  dans  l'ethnographie  de  l'Europe.  Mettons  donc  «  prae-Aryen  » 
ou  «  prse-Celtique  »  là  où  M.  Huxley  met  «  Ibère,  n  Pour  démontrer  l'existence 
d'un  élément  non-aryen  dans  les  Iles  Britanniques,  M.  Huxley  emprunte  ses 
arguments  à  l'anthropologie;  nous  ajouterons  une  considération  d'ordre  diffé- 
rent. Les  renseignements  que  nous  fournit  l'antiquité  nous  montrent  que  les 
populations  des  Iles  Britanniques  étaient  quelque  peu  barbares,  il  n'y  a  pas  encore 


1.  La  langue  des  pirates  Scandinaves  n'a  pas  laissé  de  traces  appréciables  en  Irlandais, 
et  l'élément  Scandinave  de  la  toponomastique  irlandaise  est  à  peu  près  nul;  voir  Joyce's 
Irisk  Names  of  places,  pp.  97  et  suiv. 

2.  Voir  Stokes'  Three  Irish  Glossaries,  p.  XXVIII. 

3.  J'emploie  «  britannique  »  en  opposition  à  «  gaélique.  » 

4.  Elle  a  été  publiée  dans  la  Pall  Mail  Gazette  du  14  et  dans  la  Nature  du  17  mars. 


Chronique.  177 

deux  mille  ans;  et  pourtant  le  fond  commun  aux  langues  indo-celtiques  montre 
par  l'identité  des  mots  désignant  la  parenté,  l'industrie,  l'état  social  et  intellec- 
tuel, que  les  Aryens  possédaient  avant  leur  séparation  une  civilisation  déjà 
avancée.  Si  diverses  branches  de  la  race  aryenne  sont  descendues  à  un  degré 
inférieur,  c'est  qu'elles  se  sont  mélangées,  dans  une  proportion  qu'il  est  malheu- 
reusement difficile  de  déterminer,  aux  populations  peu  ou  point  civilisées  qu'elles 
avaient  subjuguées. 


Le  regrettable  Pétrie  avait  laissé  dans  ses  papiers  une  importante  collection 
d'anciennes  inscriptions  irlandaises  qu'il  avait  recueillies  pendant  ses  nombreuses 
excursions  archéologiques  dans  les  différentes  parties  de  l'Irlande.  Cette  collec- 
tion est  d'autant  plus  précieuse  que,  des  pierres  dessinées  par  Pétrie,  plus  d'une 
a  été  brisée  ou  a  disparu.  C'est  ainsi  que  lorsqu'il  visita,  en  1822,  les  ruines  de 
Clonmacnoise,  il  y  dessina  143  inscriptions;  il  n'en  existe  plus  aujourd'hui  que  86. 
Nous  apprenons  avec  plaisir  par  un  prospectus  récemment  publié  *  que  cette 
collection  verra  prochainement  le  jour.  On  y  joindra  les  inscriptions  réunies  par 
MM.  James  Graves  et  Henry  O'Neill,  et,  pour  que  cette  collection  soit  aussi 
complète  que  possible,  on  y  comprendra  également  les  inscriptions  gravées  sur 
les  reliquaires,  crosses,  etc.  On  laissera  de  côté  dans  cette  publication  les  ins- 
criptions en  caractères  oghamiques,  excepté  lorsqu'elles  sont  accompagnées  de 
transcriptions  en  caractères  romains.  Ce  Corpus  Inscriptionum  Hibernicarum  sera 
publié,  avec  la  collaboration  du  savant  M.Reeves,  par  M"°  Stokesàqui  l'archéo- 
logie irlandaise  est  déjà  redevable  de  belles  publications.  Ce  recueil  sera  utile  au 
philologue  par  les  formes  grammaticales  qu'il  révélera,  à  l'historien  par  les  faits 
nouveaux  qu'il  mettra  en  lumière;  il  sera  d'un  égal  intérêt  pour  l'histoire  de  l'art 
chrétien,  car  M""  Stokes  représentera  par  la  gravure  non  pas  seulement  les 
inscriptions  mais  aussi  les  monuments  qui  les  portent.  M.  Unger  y  trouvera  de 
curieux  exemples  de  la  riche  ornementation  et  des  dessigs  variés  de  la  miniature 
irlandaise.  Les  deux  gravures  jointes  au  prospectus  promettent  une  publication 
aussi  belle  qu'utile.  Ce  recueil  des  Inscriptions  chrétiennes  en  langue  irlandaise  est 
publié  aux  frais  de  1'  «  Association  Historique  et  Archéologique  d'Irlande  »  et 
par  volumes  annuels.  Le  premier  paraîtra  dans  le  courant  de  l'année  iSyo"'' 


1.  Christian  Inscriptions  in  the  Irish  Lancuage.  Chiefly  collected  and  drawn  by 
George  Pétrie,  LL.  D.  ediîed  by  M.  S.  with  notes  by  William  Reeves,  D.  D.  Dublin, 
Hodges,  Poster  and  Co.  1869,  11  p.  in-4  avec  une  planche. 

2.  Le  prix  de  chaque  volume  est  de  10  shellings  payables  d'avance.  Les  souscriptions 
doivent  être  envoyées  à  M.  James  Graves,  secrétaire  honoraire  de  l'Association  Historique 
et  Archéologique  d'Irlande,  à  Stoneyford,  comté  de  Kilkenny,  Irlande.  N'oublions  pas  de 
remarquer  que  le  nombre  d'exemplaires  auquel  l'ouvrage  doit  être  tiré  sera  réglé  sur  le 
nombre  des  souscriptions. 

12 


I  yS  Chronique. 

Dans  la  livraison  de  mars  du  très  intéressant  recueil  que  la  librairie  Trûbner 
publie  sous  le  titre  à' American  and  Oriental  Literary  Record,  je  lis  que  l'Université 
de  Notre-Dame  vient  d'établir  une  chaire  de  langue  irlandaise.  Notre-Dame  est 
une  ville  du  Comté  de  Saint-Joseph,  dans  l'Etat  d'Indiana,  aux  Etats-Unis.  Cette 
Université  (catholique),  bien  que  fondée  en  1844,  ne  manque  pas  d'importance; 
car  elle  compte  aujourd'hui,  me  dit-on,  45  professeurs  et  600  élèves.  Quoique 
l'élément  irlandais  entre  pour  une  forte  part  dans  la  population  des  Etats-Unis, 
la  langue  irlandaise  y  a  été  jusqu'ici  tout  à  fait  négligée.  Bien  différents  en  cela 
des  émigrants  gallois  qui  gardent  leur  langue  en  Amérique  et  en  Australie,  et  y 
publient  des  journaux  en  langue  galloise,  les  émigrants  irlandais  font  bon  mar- 
ché du  gaélique.  Leur  indifférence  à  cet  endroit  est  telle,  que  dans  le  livre  isi 
instructif  à  d'autres  égards)  publié  récemment  par  M.  Maguire  :  les  Irlandais  en 
Amérique^,  il  n'est  pas  même  fait  allusion  à  ce  que  devient  en  Amérique  la 
langue  nationale  des  émigrants  irlandais.  Nous  désirons  vivement  que  l'exemple 

donné    par    l'Université  de  Notre-Dame  se    propage  en  Amérique et  en 

Irlande! 

H.  GAIDOZ. 


LIVRES  DÉPOSÉS  AU  BUREAU  DE  LA  REVUE. 

D'  A.  Ebraud  :  Handbuch  der  mittelgaelischen  Sprache,  hauptsaechlich 
Ossian's  (Wien,  Braumùller).  —  M'"  B.  Palliser  :  Britanny  and  its  Byways 
(London,  Murray).  —  J.  Kenward  :  For  Cambria  :  thèmes  in  verse  and  prose 
(London,  Longmans).  —  Du  f/Iême  :  Finistère;  Sena;  Poems  (Birmingham, 
printed  for  the  author).  —  Lévèque  :  Recherches  sur  l'origine  des  Gaulois 
(Paris,  Durand  et  Pedone-Lauriel).  —  J.-P.-M.  Lescour  :  Telenn  Gwengam 
(Brest,  Piriou). 


The  Irish  in  America,  London,  lî 


BULLETIN   D'ANNONCES  DE  LA  REVUE  CELTIQUE. 
N°  I. 


Advertisements  are  received  by  Mons.  F.  Vieweg,  67, rue  de  Richelieu, 
Paris;  and  by  Messrs.  Trubner  and  C»,  8  and  60,  Paternoster  Row, 
E.  C,  London. 

Scale  of  Charges  : 

L.    s.    d. 


Per  line  across  the  page 10 

Half  a  page 100 

A  full  page I    10    o 


Just  published. 
In  one  volume,  super  royal  octavo,  price  2    L.  in  boards. 

THE  MYVYRIAN  ARCHAIOLOGY  OF  WALES.   —   By  William 
OWEN    PUGHE,    D.C.L.,    F. A. S.     (jdriSOn);     EDWARD     WILLIAMS     (Jolo 

Morgamvg);  owen  jones  (Myfyr). 

To  which  has  been  added  Additional  Notes  upon  the  "  Gododin,  " 
and  an  English  Translation  of  the  Laws  of  Howell  the  Good;  with 
a  Glossary  of  the  Terms  usedtherein.  Also,  an  Explanatory  Chapter  on 
Ancient  British  Music,  by  John  Thomas  (Pencerdd  Gwalia). 


The  présent  édition  contains  the  whole  of  the  original  Work;  and, 
as  will  be  seen  from  the  above,  several  important  and  interesting  addi- 
tions hâve  been  made  to  it. 

The  first  édition  was  published  in  Three  Volumes,  price  2  L.  10  s. 
—  And  it  has  been  for  the  last  twenty  years  so  scarce,that  from  12  L. 
to  1 5  L,  was  readily  obtained  for  a  copy  when  found  in  the  Market. 

The  Work  can  be  obtained  through  the  Booksellers,  or  from  the 
Publisher,  free  of  carriage,  to  any  address  in  the  United  Kingdom. 

Thomas  Gee,  Publisher,  Denbigh. 


In  the  press  : 

THE  POEMS  OF  OSSIAN;  the  Gaelic  text  with  a  new  and  literal 
English  translation,  by  the  Rev.  A.  Clerk,  Kilmallie.  2  vol.  Octavo 
handsomely  printed.  Blackwood  and  Sons,  Edinburgh  and  London. 


Il*  Bulletin  d'annonces. 

CELTIC  LANGUAGES.  —  A  Committee  has  been  formed  for  the 
Endowment  of  a  professorship  of  the  celtic  languages  in  con- 
nexion with  the  Royal  Irish  Academy,  and  as  a  mémorial  of  the  Rev. 
Dr.  TODD,  S.  F.  Trin.  Coll.,  Dublin,  F.  S.  A.,  sometime  Président  of 
the  R.  I.  Academy. 

This  foundation  is  intended  to  préserve  the  scientific  knowledge  of 
the  Irish  Language,  and  will  further  the  elucidation  of  Irish,  Welsh, 
Scottish,  and  other  Celtic  MSS. 

The  Subscriptions  already  amount  to  about  860  L.  Contributions 
received  by  Sir  William  Tite,  M.  P.  F.  R.  S.  V.  P.  S.  A.,  42, 
Lowndes-Square,  S.  W.,  and  William  Chappell,  Esq.,  F.  S.  A.,  Local 
Hon.  Treasurers  for  London  ;  by  the  Hon.  Treasurers,  W.  H.  Hardinge, 
Esq.,  Tr.  R.  I.  A.,  and  J.  T.  Gilbert,  Esq.,  F.  S.  A.  (addressed  as 
below)  ;  or  may  be  lodged  to  the  crédit  of  "  The  Todd  National  Mémo- 
rial Fund,  "  at  the  Bank  of  Ireland,  or  the  London  and  Westminster 
Bank,  or  at  any  of  their  branches.         By  order  of  the  Committee. 

WILLIAM    REEVES    D.D.    L.L.D..    M.R.I.A.  \  ,, 

'  Hon. 

HENRY    BROOKE    DOBBIN,    L.L.B. 

^  \Secs. 

JOHN    RIBTON    GARSTIN,    M.A. ,  M.R.I.A.,  F.S.A.  ,' 

Royal  Irish  Academy  House,  Dublin. 


LEABHAR    NA    H-UIDHRE. 

LEABHAR  NA  H-UIDHRE,  in  the  Library  of  the  Royal  Irish  Aca- 
demy, is  the  oldest  volume,  now  known,  entirely  in  the  Irish  lan- 
guage, and  is  regarded  as  the  chief  native  literary  monument  —  not 
ecclesiastical  —  of  ancient  Ireland.  The  historical  and  philological  value 
of  the  contents  of  this  manuscript  is  well  known;  and  to  meet  the 
désire  for  its  publication  in  its  integrity,  the  Royal  Irish  Academy  has 
had  an  exact  copy  of  it  executed  in  lithograph,  elaborately  collated  with 
the  original.  The  volume  will  be  accompanied  by  Professor  O'Curry's 
hitherto  unpublished  descriptive  catalogue  of  its  contents,  compiled  for 
the  Academy.  The  entire  édition  is  limited  to  two  hundred  copies,  which 
can  be  obtained  only  by  subscribers. 

Subscription,  3  L.  3  s.  per  Copy. 
Applications  from  Subscribers  are  to  be  addressed  to  the  Treasurer 
of  the  Royal  Irish  Academy,  19,  Dawson  Street,  Dublin;  or  to  the 
Academy's  Publishers,  Hodges,  Foster  and  C»,  Dublin;  and  Williams 
and  Norgate,  Henrietta  Street,  Covent  Garden,  London,  and  20,  South 
Frederick  Street,  Edinburgh, 


Bulletin  d'annonces.  m' 

Publications  récentes  de  la  librairie  Franck,  67,  rue  de  Richelieu,  à  Paris. 
T  E  CATHOLICON  DE  JEHAN  LAGADEUC,  dictionnaire  breton, 
1— 'français  et  latin,  publié  par  R.  F.  Le  Men,  d'après  l'édition  de 
M.  AuFRET  DE  Q^uoETQUEUERAN,  imprimée  à  Tréguier,  chez  Jehan 
Calvez  en  1499.  Un  vol.  in-8°.  Prix  6  fr. 

Ce  glossaire,  qui  est  un  des  plus  anciens  monuments  de  la  langue  bretonne,  était 
devenu  fort  rare.  M.  Le  Men,  le  savant  archiviste  du  Finistère,  a  fort  bien  fait  d'en 
donner  une  réimpression.  M.  Le  Mena  fait  précéder  cette  réimpression  d'une  intéressante 
préface  qui  contient  de  véritables  révélations  sur  l'histoire  de  la  littérature  bretonne. 

Revue  Archéologique  de  Mai  1869. 
This  is  a  valuable  édition  of  a  curions  Breton  dictionary  given  to  the  antiquarian  world 
by  M.  Le  Men,  one  of  our  active  Armorican  correspondants. 

Arch£ologia  Cambrensis,  for  April  '68. 

GLOSS^E  HIBERNIC/E  VETERES   CODICIS  TAURINENSIS,  — 
Edidit  CoNSTANTiNUS  Nigra.  Un  vol.  gr.  in-8°.  Prix  6  fr. 

This  book  of  Signor  Nigra  is  heartily  to  be  recommended,  not  only  to  Celtic  scholars, 
but  —  chiefly  the  Préface  —  to  the  literary  world  at  large. 

Athenaum,  for  Sept.  2$,  '69. 
This  valuable  reproduction  of  an  important  codex  will  be  very  acceptable  to  students 
of  Irish....  The  value  of  the  glosses  is,  moreover,  enhanced  by  the  elaborate  commentary 
appended  to  them  in  which  the  editor  endeavours,  often  with  nuich  learning  and  success, 
to  trace  each  Irish  word  to  its  primitive  form,  or  congener  in  the  Indo-European  family 
of  languages....  The  work  of  M.  Nigra  is  imbued  with  much  of  the  enthousiasm  attaching 
to  the  Celtic  character  and  is  altogether  very  creditable  to  its  author. 

Academy  for  March  12,  '70. 

GWERZIOU  BREIZ-IZEL.  —  Chants  populaires  de  la  Basse-Bre- 
tagne, recueillis  et  traduits -par  F.  M.  Luzel.  —  Un  vol.  in-8". 
Prix  8  fr. 

L'Académie  des  Inscriptions  et  Belles-Lettres  a  décerné  à  cet  ouvrage 
une  médaille  de  $00  francs  au  concours  des  Antiquités  Nationales  de 
1869. 

We_^have  at  last,  thanks  to  M.  Luzel,  a  collection  of  genuine  Breton  ballads  with  a 
literal  translation  in  French....  The  fact  is,  until  M.  Luzel  set  to  work,  the  subject  of  thèse 
ancient  poems,  handed  down  from  génération  to  génération  in  the  more  retired  districts 
of  Britanny,  has  never  been  properly  treated  ;  and  we'  are  only  too  glad  that  it  has  at 
last  been  taken  up  in  such  a  manner  and  by  such  a  Breton  scholar  that  no  suspicions 
concerning  their  genuiness  can  occur  even  to  the  most  cautions  of  critics. 

Arch<eologia  Cambrensis  for  April  '69. 
La  publication  de  M.  Luzel  est  certainement  une  des  meilleures  dont  les  langues  néo- 
celtiques aient  été  l'objet  depuis  longtemps. 

Revue  Critique  du  3  octobre  1868. 
Luzel  hat  ailes  Mœgliche  gethan,  um  seine  Arbeit  zu  einer  auf  jede  Weise  fur  die 
Wissenschaft  erspriesslichen  zu  machen,  was  ihm  auch  voUkommen  gelungen  ist. 
Cœttingische  gelehrte  Anzeigen  vom  7  april  1869. 

CONTES  BRETONS  recueillis  et  traduits  par  F.  M.  Luzel.  xiv-105 
p.  in-80.  Prix  1  fr.  50 

Contient  des  textes  bretons. 


IV*  Bulletin  d'annonces. 

Livres  d'occasion  en  vente  à  la  librairie  Franck,  6j,  rue  deRiclielieu,àParis. 

BARZAZ-BREIZ.  Chants  populaires  de  la  Bretagne,  recueillis  et 
publiés  avec  une  traduction  française,  des  arguments,  des  notes  et  les 
mélodies  originales,  par  Th.  Hersart  de  la  Villemarqué,  4e  édit. 
augm.  Paris,  1846,  2  vol.  in-i8  jésus,  br.  1 5  fr. 

BOXHORNIUS,  M.  L.  Originum  gallicarum  liber,  cui  acced.  antiq. 
linguae  britannicae  lexicon  britannico-latinum.  Amstelodami,  1654,  in-4'', 
br.  (Brunet  8  à  1 2  fr.)  5  fr, 

BUEZ  AR  PÊVAR  MAB  EMON,  duc  d'Ordon,  laqet  e  form  eun 
dragedi,  ha  reizet  en  urz  gant  A.  L.  M.  L.  Montroulez,  1844,  in-8», 
cart.  6  fr. 

DICTIONNAIRE  françois-breton  ou  françois-celtique  du  dialecte  de 
Vannes  enrichi  de  thèmes_,  par  Mons.  l'A"*.  Leide,  1744,  in- 12,  v.  mar. 

8  fr.  50 

LE  GONIDEC.  Dictionnaire  breton -français  et  français-breton, 
précédé  de  sa  grar^aire  bretonne,  enrichi  d'un  avant-propos,  d'addi- 
tions et  des  mots  gallois  et  gaels  correspondant  au  breton,  par  Th. 
Hersart  de  la  Villemarqué.  Saint-Brieuc,  1850.  Ensemble  2  vol. 
in-40,  br.  40  fr. 

LEO  H.  Die  Malbergische  Glosse,  .ein  Rest  alt-Keltischer  Sprache 
und  Rechtsauffassung.  Halle,  1842-45,  in-8%  2  cah.  4  fr. 

PRICHARD  J.  L.  The  eastern  Origin  of  the  Celtic  Nations,  éd.  by 
R.  G.  Latham.  London,  1857.  Gr.  in-8°,  toile.  10  fr. 

RADLOF  J.  J.  Neue  Untersuchungen  des  Keltenthumes  zur  Auf- 
hellung  der  Urgeschichte  der  Teutschen.  Bonn,  1822,  in-8'\  cart. 

7  fr.  $0 

ROSTRENEN  G.  de.  Grammaire  françoise-celtique  ou  françoise- 
bretonne.  Rennes,  1758,  in-8°,  v.  4  fr. 

ROSTRENEN  G.  de.  Dictionnaire  français-celtique  ou  français-bre- 
ton. Guingamp,  1834,  2  vol.  in-8",  d.  r.  20  fr. 

SCHOEPFLINI  J.  D.  Vindiciae  celtica2.  Argentorati.  1754,  in-4% 
cart.  2  fr.   $0 

ZEUSS  J.  C.  Grammatica  Celtica.  E  monum.  vet.  tam  hibernicae 
linguae  quam  britannicae  nec  non  e  gallicae  priscae  reliquiis  construxit. 
Lipsiae,  1853,  2  vol.  in-80.  20 fr. 


ABRÉVIATIONS. 

(Tout  chiffre  placé  après  un  titre  d'ouvrage  sert  à  désigner  l'édition.  Ainsi  Gr.  C* 
équivaut  à  Gr.  C,  deuxième  édition). 

Bcitr.  —  Beitrsege  zur  vergleichenden  Sprachforschung  auf  dem  Gebiete  der  Arischen, 
Celtischen  und  Slawischen  Sprachen,  herausgegeben  von  A.  Kuhn  und  A.  Schleicher.  Berlin, 
in-S".  'Paraissent  depuis  1858.) 

Br.  —  Breton. 

Celt.  anc.  —  Celtique  ancien. 

Châl.  —  Dictionnaire  breton-françois  du  diocèse  de  Vannes,  composé  par  feu  Monsieur 
de  Châlons....  Vannes,   1723,  in-12. 

Corm.  gl.  —  Cormac's  glossary,  publié  dans  les  Thr.  Ir.  Gl. 

Gall.  —  Gallois. 

Gl.  Taur.  —  Glossas  hibernicae  veteres  codicis  Taurinensis.  Edidit  Constantinus  Nigra. 
Lutetiae  Parisiorum,  1869,  in- 8°. 

Gluck.   K.  N.  —  Die  bei  C.  J.  Caesar  vorkommenden  Keltischen  Namen von  Chr. 

W.  Gluck.  Mûnchen,  18(7,  in-8". 

Goid.  —  Goidilica,  or  notes  on  the  gaelic  manuscripts  preserved  at  Turin,  Milan, Berne, 
Leyden,  the  monastery  of  S.  Paul,  Carinthia,  and  Cambridge,  with  eight  hymns  from  the 
Liber  Hymnorum,  and  the  old-irish  notes  in  the  Book  of  Armagh  edited  by  W[hitley] 
S[tokes],  Calcutta,  1866,  in-8». 

Goth.  —  Gothique. 

Gr.  Etym.  —  Grundzûge  der  Griechischen  Etymologie,  von  Georg  Curtius,  Leipzig, 
in-8.  —  l'Ont  eu  trois  éditions). 

Gr.  C.  —  Grammatica  Celtica.  E  monumentis  vetustis  tam  hibernicae  linguas  quam 
britannicae...  construxit  J.  C.  Zeuss.  Lipsiae,  1853,  ^  "^'o'-  '"-8. 

Ir.  Gl.  —  Irish  Glosses....  edited  by  Whitley  Stokes,  Dublin,  1860,  in-4°. 

Lag.  —  Le  Catholicon  de  Jehan  Lagadeuc,  Dictionnaire  breton,«français  et  latin  publié 
par  R.F.  Le  Men,  d'après  l'édition....  imprimée  à  Tréguier.  .  en  M.CCC.XCIX.  Lorient, 
1867,  in-S». 

Larm.  —  Dictionnaire  françois-breton  ou  françois-celtique  du  dialecte  de  Vannes.  .., 
par  M.  L'a[rmery],  à  Leide,  1744,  in-8°. 

Lat.  —  Latin. 

Le  Gon.  —  Dictionnaire  breton-français,  par  Le  Gonidec.  i'^  édition,  1821.  —  2'  édi- 
tion revue  par  M.  de  la  Villemarqué,  Saint-Brieuc,  1850,  in-4''. 

Le  Pel. —  Dictionnaire  de  la  langue  bretonne,  où  l'on  voit  son  antiquité,  son  affinité  avec 
les  anciennes  langues....  avec  l'étymologie  de  plusieurs  mots  des  autres  langues,  par  dom 
Le  Pelletier,  de  la  congr.  de  Saint-Maur.  Paris,  1752,  in-f°. 

Lh.  —  Archasologia  Britannica....  by  Edward  Lhuyd.  Oxford,  1707,  in-folio. 

Lith.  —  Lithuanien. 

0'  R.  —  An  Irish-English  Dictionary....  by  Edward  0'  Reilly.  Dublin,  1817,  in-4°. 
—  2"-' édition.  Dublin,  1864,  in-4''. 

0'  R.  suppl.  —  A  supplément  containing  many  thousand  Irish  words....  by  John 
C  Donovan.  (Publié  à  la  suite  d'O'  R.-.  1 

Ow.  —  A  Welsh  and  English  Dictionary....  by  William  Owen  [Pughe].  London,  179?- 
1803,  in-8".  —  2<^  édition  en  183 1. 

Piem.  Can.  —  Piémontais  Canavais. 

Scr.  —  Sanscrit. 

Spur.  —  A  Dictionary  of  the  Welsh  Language....  by  William  Spurrell.  Caermarthen, 
in-12.  l'A  eu  plusieurs  éditions;  la  première  est  de  1848.) 

Stok.  Corm.  Gl. —  Cormac's  Glossary,  translated  and  annotated  by  the  lateJohn  G'  Do- 
navan,  edited,  with  notes  and  indices,  by  Whitley  Stokes,  LL.  D.Calcutta,  1868,  in-4". 

Thr.  Ir.  Gl.  —  Three  Irish  glossaries,....  with  a  préface  and  index  by  W[hitley] 
S[tokes].  London,  1862,  in-8°. 

Troude.  —  Nouveau  Dictionnaire  pratique  français  et  breton  du  dialecte  de  Léon,.... 
par  A.  Troude....  Brest,  1869,  in-8'. 

Voc.  — Vocabularium  Cornicum,  publié  dans  Gr.  C,  pp.  1100-1124,  et  dans  The 
Ancient  Cornish  Drama  edited  and  translated  by  Edwin  Norris,  vol.  H,  pp.  311-435. 


ERRATA. 


Page  1,  ligne  24,  au  lieu  de  Prémeaux,  lire  Pernand. 

Page  5,  ligne  6,  —  — 

Page  5,  ligne  10,  —  — 

Page  56,  ligne  7,  au  lieu  de  Valkyrian,  lire  Valkyria. 

Page  7^,  ligne  37,  au  lieu  de  trigiam,  lire  trigiun. 

Page  79,  dernière  ligne,  au  lieu  de  duaccradat,  lire  duacradat. 

Page  80,  ligne  22^  nurad  est  peut-être  pour  nuradad  (quae  loquebatur), 

prés.  sec. 
Page  85,  ligne  7,  au  lieu  de  th.  masc.  en  u,  lire  th.  masc.  en  /. 


Nogent-le-Rotrou,  imprimerie  de  A.  Gouverneur. 


En  vente  à  la  librairie  A.  FRANCK  (F.  Vieweg  propriétaire: 


YR  î  AIT  H  G  Y  M  RA  EG 

yn   erchi   gan   duu ,    luLiant,   a   hyfryd 

gynnyi   meurt  gras,  anrhyded,  a 

gogoniài  ht  hanrhydeJ.ussaf 

bennadur,  ai  dibal  noded 

Viliam  Harbart 

larl  0  BenfrOy 

ag  Argluyd  o  Gaer  dyd. 

Rîh  fyngueled  fyhun,  er  ys- 
Mlauer  o  flynyadoed,  heb  bris 
^jgan  neb  arnaf  truy  dir  cy- 
mru,  na  chuaith  dim  genn- 
yf  meun  scrifen  a  phruyth 
yndo  i  hyphordi  meun  dysg,  a  daim  fyn 
gharedigion  bobl  :  mi  a  dybiais  (J'an- 
rhydedfaur  Bennacth)  mae  da  oed 
ymy,  fyned  truy  uledyd  Europa  i  edry- 
ch  ymysc  ieithoed  erail  a  gaid  yrû  cyn 
diystyred  i  chyflur  a  mi,  ag  mor  ailes 
a       ij       i'r 


[0 


I 


teurs  S'engage.. i  jj^ 


it  par 
ologie 
s,  tra- 
,  4fr. 
^ve  de 
5fr. 
hiteur 
fr.  50 

e,  par 

2fr. 

par  F. 

tudes. 

fr.  75 

in-8». 

10  fr. 

adaire 

fis.  — 


'étude 
isons 

oiogie 

laour, 

nte  de 

m  du 

ateur 

^x  M. 

tes  de 

iccom- 

égyp- 

lofr. 

e  et  1 0 

ndétermi- 

souscrip- 

vance. 


Pa^ 
Pa 
Pa, 
Paj 
Pai 
Pa 


a'ch  eîifedion  yn  y  hyd  yma,  a  thaï 
didranc  gan  duy  yn  y  hyd  sy'n  doyad. 
Yrhun  a  danfono  iuch  ruyddeb,  a  chyn 
nyrch  yinhob  layenyd  a  daioni  yrth 
fod  ach  caro. 

Ych     phydlonaf    lay    foryyn 
yr  iaith  gymraeg. 


En  vente  à  la  librairie  A.  FRANCK.  (F.  Vieweg  propriétaire). 


l AIT  H      G  AMB  R 

annerch  yr  hygar  darleyd. 


Y  N 


ARistoteles,  gur  o  ragoridth  meun 
dysc,  a  gyyhodaeth,  a  doyad  am  bob 
celfydyd,  mae  bychan,  ag  anrhefnus 
fyd  i  dechreuad;  ag  yna  bob  ychydig 
tyfy  ûg  ymdacclu  a  una,  nid  ar  vnya 
ith  ond  0  amser  i  amser  îryy  fod  erail, 
yn  gyeled,  ag  yn  byry  at  y  dechreuad, 
ryy  beth  nis  canfu  na'r  cyntaf,  na'r 
ail,  Er  bod  y  dechrau  fynychaf  yn  lai 
no'r  dam  a  roessyyd  yrtho  :  etto  mae^n 
galettach,  ag  yn  fyy  clod,  dychmygu 
ychydig  o  neyyd,  nog  yy  trefnu  hyny, 
ai  chyanegu  yn  helaethyych.  Am  hyn- 
ny  na  fid  diysîr,  na  diflas  gennyt,  fyn- 
gyeled  i  yn  ymdangos  mor  disas,  ag 
mor  àhylyybr,  canys  hôn  yu'r  ayr  gyn- 
taf  yr  amcanyyd  fynyyn  i  lyyhr  celfy- 
b       ij  dyd. 


I 


teurs  s'engagent  pour  un  volume  entier  sans  rien 


publiée  sous 

ique. 

traduit  par 

Chronologie 

Curtius,  tra- 

?tucles.  4  fr. 

on,  élève  de 

îfr. 

îf,  répétiteur 

1  fr.  50 

;n  arabe,  par 

5.  2  fr. 

;qués  par  F. 

ïutes  Études. 

4fr.  75 

grand  in-8". 

10  fr. 

lebdomadaire 

G.  Paris.  — 

17  fr. 

;  pour  l'étude 
lar  livraisons 

l'archéoiogie 

de  Pentaour, 
le  vicomte  de 

égyptien  du 
conservateur 
ques,  par  M. 
Préceptes  de 
)uvre,  accom- 

Musée  égyp- 
lofr. 
de  texte  et  1  o 
es  indétermi- 
..es  souscrip- 
payer  à  l'avance. 


scod  rhag  y  tes,  ag  yn  digrij  cloued  yr 
aijel  lion  o'r  gogleiiyynt  yn  chuyîhu  ta 
frig  y  gyynuyd  i'n  layenychy  yn  y  gy- 
res  anrhysymol  hyn,  syd  dry  m  yrth  ba 
yb  a  gafod  i  geni  ai  meithrin  meyn 
gylad  cyn  oered  ag  yy  tir  cymru  :  etto 
mae  arnaf  hiraeth  am  layer  o  betli- 
Pa,  au  a    gaid  ynghymru,    i  fyry^r  amser 

Paf  heibio  yn  difyr,  ag  yn  layen,  yrth  ochel 

P^  y  tes  hirdyd  haf.  Canys  yno,  er  poethed 

Pa 

fai'r  dymyr,    ef  a  gaid  esmyythdra,  a 

p  '  didanych  i  bob  bath   ar  dyn.   Os  bydai 

P2  vn  yn  chyennychu  digrifych,   e  gai  bu 

ror  ai  delyn  i  ganu    myyn    bynciau,  a 
P  datceiniad   peroslau    i   ganu  gida    îhàt, 

hyn  a  fynnychyi  ai  mayl  i  rinyed,  yn- 
îau  gogâ  i  drygcampau.  Os  mynnych 
chyithau  gloyed  arfer  y  y  lad  yn  am- 
ser yn  teidiau  ni,  chui  a  gaech  henaf- 
gyyr  briglyydion  a  dangossai  iych  ar 
dafod 


En  vente  à  la  librairie  A.  FRANCK  (F.  Vieweg  propriétaire). 

BIBLIOTHÈQUE  de  lÉcole  pratique  des  Hautes  Études,  publiée  sous 
les  auspices  de  S.  E.  M.  le  Ministre  de  l'Instruction  publique. 

1"  fascicule.  La  Stratification  du  langage,  par  Max  MùUer,  traduit  par 
M.  Havet;,  élève  de  l'École  des  Hautes  Études.  —  La  Chronologie 
dans  la  formation  des  langues  indo-germaniques,  par  G.  Curtius,  tra- 
duit par  M.  Bergaigne,  répétiteur  à  l'École  des  Hautes  Études,  4  fr. 

2"-'  fascicule.  Études  sur  les  Pagi  de  la  Gaule,  par  A.  Longnon,  élève  de 
l'École  des  Hautes  Études.  5  fr. 

j*"  fascicule.  Notes  critiques  sur  CoUuthus,  par  Éd.  Tournier,  répétiteur 
à  l'École  des  Hautes  Études.  1  fr.  50 

4''  fascicule.  Nouvel  Essai  sur  la  formation  du  pluriel  brisé  en  arabe,  par 
Stanislas  Guyard,  répétiteur  à  l'École  des  Hautes  Études.  2  fr, 

5*  fascicule.  Anciens  Glossaires  romans,  corrigés  et  expliqués  par  F. 
Diez.  Traduit  par  Alfred  Bauer,  élève  de  l'École  des  Hautes  Études. 

4fr.  75 

BLADÉ  (J,  F.).  Études  sur  l'origine  des  Basques.  1  vol.  grand  in-S". 

10  fr. 

REVUE  CRITIQUE  d'histoire  et  de  littérature,  recueil  hebdomadaire 
publié  sous  la  direction  de  MM.  P.  Meyer,  C.  Morel  et  G.  Paris.  — 
Prix  d'abonnement  :  un  an,  Paris,  i  $  fr.;  départements,  17  fr. 
La  cinquième  année  est  en  cours  de  publication. 

REVUE  DES  LANGUES  ROMANES,  publiée  par  la  Société  pour  l'étude 
des  langues  romanes.  Tome  i'^'",  r^'  livraison.  Paraît  par  livraisons 
trimestrielles.  Prix  d'abonnement:  jo  fr.  par  an. 

RECUEIL  DE  TRAVAUX  relatifs  à  la  philologie  et  à  l'archéologie 
égyptiennes  et  assyriennes. 

i*""  fascicule^  contenant  les  travaux  suivants:  i.  Le  Poème  de  Pentaour, 
accompagné  d'une  planche  chromolithographiée,  par  M.  le  vicomte  de 
Rougé,  de  l'Institut,  conservateur  honoraire  du  Musée  égyptien  du 
Louvre;  2.  L'Expression  Mdâ-Xeru,  par  M.  A.  Devéria,  conservateur 
adjoint  au  Musée  égyptien  du  Louvre;  3.  Études  démotiques,  par  M. 
G.  Maspero,  répétiteur  à  l'École  des  Hautes  Études;  4.  Préceptes  de 
morale  extraits  d'un  papyrus  démotique  du  Musée  du  Louvre,  accom- 
pagné de  deux  planches,  par  M.  P.  Pierret,  employé  au  Musée  égyp- 
tien du  Louvre.  Petit  in-4°.  10  fr. 
Ce  recueil  paraîtra  par  volumes  d'environ  30  feuilles  de  texte  et  10 
planches  in-4°,  divisés  en  fascicules  publiés  à  des  époques  indétermi- 
nées et  dont  le  prix  sera  fixé  suivant  l'importance.  —  Les  souscrip- 
teurs s'engagent  pour  un  volume  entier  sans  rien  payer  à  l'avance. 


La  Revue  Celtique  forme  par  an  un  volume  d'environ  520  pages. 
Prix  d'abonnement  :  Paris,  20  fr.;  Départements,  22  fr.;  Étranger,  le 
port  en  sus.  On  souscrit  :  Pour  la  France,  en  envoyant  un  mandat-poste 
payable  au  nom  de  M.  F.  View^eg,  propriétaire  de  la  librairie  Franck, 
67,  rue  de  Richelieu,  à  Paris; — Pour  l'étranger,  par  l'intermédiaire  d'un 
libraire. 

Une  liste  des  souscripteurs  sera  publiée  à  la  fin  de  chaque  volume. 

Il  est  tiré  quelques  exemplaires  sur  papier  de  Hollande  portant  sur  le  titre  le 
nom  imprimé  du  souscripteur.  Le  prix  d'abonnement  à  ces  exemplaires  est 
double,  c'est-à-dire  40  fr.  pour  Paris,  44  fr.  pour  les  départements. 

Toutes  les  communications,  correspondances,  etc.,  doivent  être 
adressées  franc  de  port  à  M.  H.  Gaidoz,  aux  soins  de  M.  F.  Viev^^eg, 
propriétaire  de  la  librairie  Franck,  rue  de  Richelieu,  67,  Paris. 

La  direction  de  la  Revue  ne  s'engage  pas  à  renvoyer  aux  auteurs  les 
manuscrits  non-insérés. 


To  ouR  British  subscribers  : 
The  subscribers  are  respectfuUy  requested  to  remit  the  amount  of 
L  1  subscription  for  the  Ist  volume  of  the  Revue  Celtique,  in  a  Post  Of- 
fice Order  payable  at  the  General  Post  Office  London  to 
Trûbner  and  C" 

8  and  60  Paternoster  Rov^.  E.  G. 
London. 

N.  B.  A  few  copies  are  printed  on  laid  paper  with  the  names  of  subscribers. 
The  termsof  subscription  fer  thèse  copies  is  double,  viz.  two  pounds  per  annum. 

A  list  of  the  subscribers  will  be  given  at  the  end  of  every  yearly  volume. 
Subscriptions  for  America  and  the  Colonies  are  received  by  : 
E.  Steiger,  New-York  (U.  S.) 
John  Wiley  and  Son,         à" 
J.  B.  Lippincott  and  Go.,  Philadelphia  (U.  S.) 
Moh'un  and  Bestor,  Washington  (U.  S.) 
Dawson  Brothers,  Montréal  (Canada). 
G.  Robertson,  Melbourne  (Australia). 
Ail  literary  communications  to  be  addressed,  post  free,  «  To  the  Edi- 
ter, care  of  Mons.  F.  Vieweg,  propriétaire  de  la  librairie  A.  Franck, 
67,  rue  de  Richelieu,  Paris.  » 

Books  for  revievy^  to  be  sent  «  To  the  Editor,  care  of  Messrs  Trûbner 
AND  G",  8  and  60,  Paternoster  Rov^,  E.  G.  London.  » 

The  Editor  cannot  undertake  to  return  communications  which  are 
not  asked  for. 


Nogent-le-Rotrou,  imprimerie  de  A.  Gouverneur. 


Les  Numéros  ne  se  vendent  pas  séparément. 


^>  y  PUBLIÉE  V^ 

Q^      AVEC     LE     CONCOURS     DES     PRINCIPAUX     SAVANTS         ^^ 
DES   ILES    BRITANNIQUES   ET    DU    CONTINENT 


DIRIGÉE    PAR 

H.    GAIDOZ 

Membre  de  la  Cambrian  Archceological  Association 
et  de  la  Royal  Archaological  Association  of  Ireland,  etc. 


N'  2~  Août  187©. 


LIBRAIRIE  A.  FRANCK  (f.  vieweg  propriétaire) 

67,  rue  de  Richelieu,  PARIS 

TRiiBNER  AND  C° 

8  and  60,  Paternoster  Row,  E.  C,  LONDON 


J[imbers^  are  not  sold  separately . 


SOMMAIRE  DU  PRÉSENT  NUMÉRO  : 

I.  De  la  disparition  de  la  langue  gauloise  en  Galatié,  par  M.  G.  Perrot,  un 
des  directeurs  de  la  Revue  Archéologigiie. 

II.  Fionn's  Enchantment  :  a  popular  taie  of  the  Highlands  of  Scotland,  with 
a  translation  by  J.  F.  Campbell,  Esq.,  of  Islay. 

III.  Welsh  Phonology,  by  the  Rev.  John  Peter. 

IV.  Étude  phonétique  sur  le  dialecte  breton  de  Vannes  (deuxième  article),  par 
M.  H.  d'Arbois  de  Jubainville,  correspondant  de  l'Institut. 

V.  Sainte  Tryphine  et  Hirlande,  par  M.  R.  Kœhler,  conservateur  de  la  bi- 
bliothèque grand-ducale  à  Weimar. 

VI.  Traditions  et  superstitions  de  la  Basse-Bretagne,  par  M.  R.  F.  Le  Men, 
archiviste  du  Finistère. 

VII.  Proverbes  et  dictons  de  la  Basse-Bretagne,  recueillis  et  traduits  par  M. 
L.  Sauvé. 

Mélanges  :  Mythological  Notes,  by  Whitley  Stokes,  Esq-;  —  Un  autographe 
de  Marianus  Scottus,  par  M.  Wattenbach,  professeur  à  l'Université  d'Heidelberg. 

—  Un  opuscule  grammatical  de  Sédulius,  par  M.  Ch.  Thurot,  membre  de 
l'Institut.  —  Le  nom  d'Abélard,  par  M.  É.  Renan,  membre  de  l'Institut.  — 
Zeuss  et  le  manuscrit  de  Cambrai  de  l'histoire  ecclésiastique  des  Francs,  par 
M.  d'Arbois  de  Jubainville,  correspondant  de  l'Institut.  —  Note  à  l'article  de 
M.  Hennessy. 

Bibliographie  :  L.  Revon  :  Inscriptions  antiques  de  la  Haute-Savoie  (H.  G.). 

—  R.  Mowat  :  Inscriptions  gallo-romaines  de  Rennes  (H.  d'A.  de  J.).  — 
L'Archéologie  Irlandaise  et  M"°  Stokes  (H.  G.).  —  Kennedy  :  Fireside  Stories 
of  Ireland;  Lageniensis  :  Irish  Folk  Lore  (H.  G.).  —  Mac  Coy  :  Miscellaneous 
Poems  (H.  G.).  —  Chr.  Terrien  et  Saxton  :  Libérien  hag  Avielen  (H.  d'A.  de 
J.).  —  Spurreil  :  Grammar  of  the  Welsh  Language  (H.  G.).  —  W.  Rowlands  : 
Llyfryddiaeth  y  Cymry  (H.  G.).  —  Gwaith  y  Parch.  W.  Davies  (H.  G.).  — 
Palliser  :  Brittany  and  its  Byways  (H.  G.). 

Chronique,  par  M.  H.  Gaidoz  (Lescour  et  Guillaume  Lejean.  —  Celtistes 
morts  au  champ  d'honneur.  —  L'Académie  Irlandaise  et  l'Association  Archéolo- 
gique d'Irlande.  —  Destruction  du  Musée  de  Strasbourg.  —  Incendie  du  Musée 
de  Nancy.  —  Une  poésie  de  M.  Luzel). 

Supplément  :  Dosparth  byrr  ar  y  rhan  gyntaf  i  ramadeg  cymraeg  [gan  Gruffydd 
Roberts,  1567.]  A  fac-similé  reprint.  (This  will  be  continued  in  regular  instal- 
ments,  v/ith  a  separate  pagination,  in  ail  subséquent  numbers,  until  the  work  is 
completed). 


A  NOS  ABONNÉS. 

Les  récents  événements  nous  ont  empêchés  pendant  un  long  temps  de 
publier  la  Revue  Cclticjue;  en  conséquence,  l'abonnement  à  la  première 
année  est  continué  jusqu'à  l'achèvement  du  premier  volume  que  nous 
tâcherons  de  fmir  avant  1872.  Dès  le  commencement  du  deuxième 
volume,  nous  ferons  notre  possible  pour  publier  la  Revue  tous  les  trois 
mois,  régulièrement,  comme  nous  l'avions  promis  dans  le  prospectus. 
Jusqu'à  ce  que  le  premier  volume  soit  fini,  nous  sommes  obligés  de 
demander  l'indulgence  de  nos  abonnés  pour  les  irrégularités  qui  se  sont 
présentées  et  peuvent  encore  se  présenter  dans  la  publication  de  nos 
numéros. 

See  next  page  of  the  cover. 


DE     LA    DISPARITION 


DE  LA  LANGUE  GAULOISE  EN  GALATIE. 


LETTRE  AU  DIRECTEUR  DE  LA  REVUE  CELTIQUE. 

Mon  cher  directeur, 

Vous  avez  bien  voulu,  après  avoir  lu  mon  étude  De  Galaîia  pro- 
vincia  Romana,  signaler  à  mon  attention  un  passage  de  Lucien 
qui  semble  contraire  à  la  théorie  que  j'énonce  sur  la  prompte 
disparition  de  la  langue  celtique  en  Asie  Mineure  '.  Après  avoir  examiné 
le  texte  du  Pseudomantis  que  vous  m'aviez  indiqué,  après  l'avoir  rattaché 
à  ce  qui  précède  et  à  ce  qui  suit,  j'ai  cru  pouvoir  en  tirer  une  conclusion 
toute  contraire  à  celle  qu'il  semble  suggérer  au  premier  abord  ;  j'y  ai 
vu  une  confirmation  précieuse  de  l'idée  que  je  soutiens.  Vous  avez  pensé 
que  cette  question  méritait  d'être  discutée  dans  une  revue  dont  les  fon- 
dateurs se  proposent,  avant  tout,  de  bannir  la  fantaisie  du  domaine  des 
études  celtiques  et  de  ramener  tous  ceux  qui  les  cultivent  à  l'observation 
des  règles  de  la  critique.  Enfants  perdus  de  la  grande  famille  celtique,  les 
Gaulois  qui  ont  ravagé  la  Grèce  et  qui,  jusqu'à  Manlius  Vulso,  ont  tenu 
tout  l'Orient  sous  la  terreur  de  leurs  armes  ont  fait,  sur  l'imagination  des 
Grecs  et  des  Romains,  une  trop  vive  et  trop  durable  impression,  ont 
trop  contribué  à  augmenter  le  prestige  et  le  renom  de  leur  race  pour 
que  vous  ne  leur  accordiez  pas,  ne  fût-ce  qu'une  fois  et  en  passant, 
quelque  place  dans  ce  recueil.  N'est-il  pas,  en  effet,  destiné  à  réunir 
tous  les  renseignements  épars  que  peuvent  encore  nous  fournir  l'histoire, 
la  philologie  et  l'archéologie  sur  ces  Celtes  dont  nous  avons  oubhé  la 
langue,  nous  Français  qui  sommes  leurs  héritiers  les  plus  directs,  mais 

I.  De  Galatia  provincia  Romana,  p.  87-90,  168-170.  —  Exploration  archéologique  de  la 
Galatie,  de  la  Bithynie,  etc.,  p.  197. 


i8o  De  la  disparition  de  la  langue  gauloise  en  Galaîie. 

dont  nous  possédons  encore,  à  un  si  haut  degré,  les  qualités  et  les 
défauts,  dont  le  sang,  si  peu  altéré  et  mélangé,  coule  encore  aujourd'hui 
dans  nos  veines  ? 

Permettez-moi,  pour  être  plus  clair,  de  commencer  par  la  fin.  Ce  que 
je  me  propose  de  démontrer,  c'est  qu'il  ne  me  paraît  pas  possible  d'ad- 
mettre, comme  l'ont  fait  jusqu^à  ces  derniers  temps  la  plupart  des  histo- 
riens, le  fait  que  saint  Jérôme,  dans  un  passage  bien  souvent  cité,  est 
seul  à  nous  attester,  la  persistance  de  la  langue  celtique  en  Asie  Mineure 
jusqu'au  quatrième  siècle  de  notre  ère. 

Voici  le  texte  de  Saint-Jérôme  :  '  «  Les  Calâtes  se  servent  de  la  langue 
))  grecque,  qui  est  la  langue  commune  de  tout  l'Orient;  mais  de  plus  ils 
»  ont  un  idiome  qui  leur  appartient  en  propre,  et  qui  est  à  peu  près 
)>  le  même  que  celui  que  parlent  les  Trévires  ;  il  n'y  a  point  d'ailleurs  à 
»  s'étonner  s'il  a  subi  quelques  altérations...  » 

Avant  que  nous  n'abordions  l'examen  de  l'histoire  des  Calâtes  et  de 
leur  langue,  une  première  observation  nous  vient  à  l'esprit  :  cette  persis- 
tance de  la  langue  galate  serait  un  fait  bien  extraordinaire,  et  qui 
s'accorderait  mal  avec  d'autres  faits  que  nous  offre  la  même  région.  On 
peut,  en  pareille  circonstance,  invoquer  l'analogie  ;  or  elle  est  ici  tout  à 
fait  contraire  à  la  thèse  de  ceux  qui  ont  admis  le  témoignage' de  Saint- 
Jérôme.  Nous  apprenons  en  effet  par  Strabon  que,  de  son  temps,  il  n'y 
avait  plus  en  Lydie  trace  de  la  langue  lydienne  2.  Le  phrygien,  à  ce  qu'il 
semble,  avait  aussi  disparu  pendant  le  temps  qui  sépare  l'expédition 
d'Alexandre  du  commencement  de  notre  ère,  car  il  n'en  est  plus  jamais 
question  à  l'époque  romaine.  C'était  pourtant  là  des  langues  parlées  par 
le  bas  peuple  des  villes  et  des  campagnes;  la  conquête  macédonienne  et 
l'introduction,  dans  toute  l'Asie  Mineure,  des  idées  et  de  la  civilisation 
hellénique  n'ont  pas  dû  faire  pénétrer  beaucoup  d'éléments  nouveaux  dans 
ce  fond  persistant  de  population  indigène,  ni  en  changer  d'une  manière 
sensible  le  caractère  et  les  habitudes.  On  sait  par  des  exemples  comme 
ceux  que  pourrait  fournir  la  durée  du  breton  en  France  et  des  dialectes 
congénères  dans  les  Iles  Britanniques,  combien  certains  idiomes,  parlés 
surtout  par  le  paysan,  peuvent  se  maintenir  longtemps  à  côté  d'une  autre 
langue  que  la  conquête  a  apportée  dans  une  contrée  et  qui  y  devient  la 
langue  de  l'administration  et  de  la  bourgeoisie  urbaine.  Pourtant  telle 

1.  Prol.  Comment.  II  in  cpist.  ad  Galatas  (p.  430)  :  «  Unum  est  quod  inferimus,  et 
promissuin  in  exordio  reddidimus,  Galatas ,  excepto  sermone  Gr»co,  quo  oiiinis  Oriens 
loquitur,  propriam  linguam  eamdein  pêne  liabere  quain  Treviros,  nec  referre,  si  aliqua 
exinde  corruperint,  cum  et  Afri  Phœnicum  linguam  nonnulla  ex  parte  mutaverint,  et  ipsa 
Laiinitas  et  regionibus  quotidie  mutetur  ef  tempore.  » 

2.  Strabon,  XIII,  4,  17. 


De  la  disparition  de  la  langue  gauloise  en  Galatie.  181 

avait  été  la  force  expansive  et  la  vertu  du  grec  qu'il  avait,  vers  le  pre- 
mier siècle  de  notre  ère^  partout  supplanté  les  anciens  dialectes  indigènes. 
Dans  de  telles  conditions,  est-i!  croyable  que  l'idiome  celtique  soit  resté 
en  usage  pendant  trois  siècles  encore  ?  Cet  idiome  n'était  pas,  comme  le 
lydien  ou  le  phrygien,  la  langue  de  toute  une  population  rurale,  attachée 
à  la  glèbe  et  par  là  même  obstinée  dans  ses  usages  et  lente  à  se  modifier  : 
il  était  parlé  par  une  bande  de  conquérants;  après  avoir  pris  pied  sur 
le  sol  de  l'Asie,  ces  hardis  aventuriers  passèrent  près  de  deux  siècles  à 
parcourir  en  tout  sens  l'Orient  hellénisé,  à  se  mettre,  par  petits  groupes, 
au  service  de  tous  les  princes  macédoniens,  de  Pella  à  Antioche  et 
Alexandrie.  Beaucoup  d'entre  eux,  dans  les  vicissitudes  par  lesquelles  ils 
avaient  passé  avant  de  franchir  l'Hellespont,  dans  les  désastres  par  les- 
quels se  termina  l'invasion  de  la  Grèce,  dans  les  fatigues  de  ces  longues 
routes,  avaient  dû  perdre  les  femmes  qui  avaient  quitté  la  Gaule  avec 
eux;  ils  les  remplacèrent  par  ces  belles  grecques  que  leur  livra  le  pillage 
des  villes  de  l'Asie  Mineure  et  de  la  Syrie  :  un  sang  mêlé  dût  couler  dans 
les  veines  de  la  plupart  de  ces  guerriers  dès  la  seconde  ou  la  troisième 
génération  qui  naquit  sur  le  sol  de  leur  nouvelle  patrie.  Quand,  après  le 
premier  élan  de  leurs  courses  et  de  ces  pointes  hardies  qu'ils  avaient 
poussées  en  tous  sens,  ils  s'établirent  dans  la  Phrygie  orientale  et  dans 
les  cantons  occidentaux  de  la  Cappadoce,  dans  le  pays  qui,  depuis  lors, 
prit  le  nom  de  Gallo-Grèce  ou  de  Galatie,  ils  y  formèrent  une  sorte 
d'aristocratie  militaire  groupée  autour  de  chefs  dont  chacun  avait  son 
château  fortifié  où  il  était  entouré  de  compagnons  d'aventure  et  d'hommes 
dévoués  à  sa  fortune  ;  il  y  gardait  aussi  son  butin.  Je  me  représente  la  vie 
d'un  chef  Galate  du  temps  de  Bogodiatoros  ou  de  Dejotaros  comme  celle 
d'un  déré-bey  turc  ou  albanais,  il  y  a  cinquante  ans,  en  Roumélie 
ou  en  Anatolie,  comme  celle  que  mènent  aujourd'hui,  dans  le 
Kurdistan,  tous  ces  petits  tyrans  auxquels  la  Porte  n'a  encore  imposé 
qu'une  obéissance  purement  nominale.  Les  anciens  habitants  cultivaient 
sans  doute  pour  les  maîtres  nouveaux,  à  titre  de  métayers,  une  partie 
du  sol  ;  c'était  pour  eux  aussi  que  des  pâtres  esclaves  conduisaient  l'été 
de  vastes  troupeaux  sur  les  pentes  vertes  et  boisées,  sur  les  hautes 
pelouses  de  l'Olympe,  et  que,  pendant  l'hiver,  ils  les  poussaient  à  travers 
le  steppe  herbeux  qui  s'étend  d'Ancyre  à  Iconium.  Dans  leurs  rapports 
avec  les  princes  au  service  desquels  ils  se  louaient,  avec  les  officiers  et 
soldats  des  armées  où  ils  entraient  comme  mercenaires,  avec  la  popula- 
tion des  pays  où  les  portaient  les  hasards  de  la  guerre,  avec  les  esclaves 
qu'ils  ramenaient  et  les  captives  dont  beaucoup  d'entre  eux  faisaient  leurs 
femmes,  avec  leurs  colons  et  leurs  bergers,  c'était  le  grec,  toujours  le 


i82  De  la  disparition  de  la  langue  gauloise  en  Galatie. 

grec,  qu'il  leur  fallait  employer;  tous  durent  donc  savoir  bientôt,  quitte 
à  le  parler  avec  plus  ou  moins  d'accent  et  avec  beaucoup  de  solécismes, 
le  grec  assez  corrompu  qui  était  alors  la  langue  courante  de  tout  l'Orient 
jusque  chez  les  Parthes.  La  langue  celtique  dut  se  conserver,  pendant 
un  siècle  ou  deux,  comme  un  souvenir  de  l'ancienne  patrie,  comme  un 
signe  de  race  et  de  noblesse,  comme  un  moyen  commode  de  se  recon- 
naître entre  gaulois  et  de  pouvoir  s'entendre  et  se  concerter  au  milieu 
même  d'étrangers,  dans  une  cour,  dans  une  embuscade  ',  sur  un  champ 
de  bataille. 

Ce  qui  montre  avec  quelle  facilité  les  Gaulois  d'Asie  Mineure  se  lais- 
sèrent pénétrer  par  l'hellénisme  comme  ceux  de  la  Gaule  propre,  après 
César,  par  la  civilisation  romaine,  c'est  l'empressement  avec  lequel,  dès 
le  siècle  qui  suivit  la  conquête,  ils  s'associèrent  aux  cultes  moitié  grecs, 
moitié  asiatiques  de  l'Asie  Mineure,  et  s'emparèrent  de  grandes-prêtrises 
comme  celles  de  Pessinunte  et  de  Comana  2.  Leurs  princes,  dès  qu'ils 
frappent  des  médailles,  n'ont  que  des  légendes  et  des  types  grecs.  Quoi 
qu'on  en  ait  dit  d'après  des  informations  inexactes,  on  n'a  retrouvé,  dans 
toute  l'étendue  du  territoire  jadis  occupé  par  les  Galates,  non  seulement 
aucune  inscription  celtique,  mais  même  aucun  monument  public  ou  privé, 
aucune  construction  qui  eût  à  aucun  titre  un  caractère  original,  et  qui 
rappelât  la  lointaine  patrie  occidentale.  Jusqu'au  temps  de  l'occupation 
romaine^,  le  caractère  national  et  un  certain  fonds  d'idées  religieuses 
propres  aux  Gaulois  se  trahit  encore  à  certains  signes  :  différentes  anec- 
dotes, comme  la  vengeance  de  la  femme  d'Ortiagon  et  celle  de  Gamma, 
comme  le  dévouement  des  deux  fils  d'Adiatorix,  nous  montrent  que  nous 
sommes  toujours  en  présence  des  fils  d'une  race  qui  avait  étonné  les  an- 
ciens par  sa  noble  hardiesse  et  son  tranquille  mépris  de  la  mort  5.  De 
nombreux  actes  de  cruauté  et  de  violence  nous  attestent  en  même  temps 
que  chez  ces  guerriers,  déjà  civilisés  en  apparence,  il  restait  encore 
beaucoup  du  barbare.  De  plus,  de  nombreux  noms  propres,  de 
formation  toute  celtique,  nous  témoignent  que  si  l'idiome  celtique  allait 
peut-être,  dès  le  temps  des  guerres  de  Mithridate,  tombant  en  désuétude, 
il  n'y  avait  point  encore  de  parti  pris  chez  les  chefs  de  renoncer  à  leur 
nationalité,  de  faire  oublier  ce  qui  rappelait  leur  origine  étrangère. 

Là,  comme  ailleurs  dans  les  provinces  orientales,  ce  fut  la  conquête 
romaine  qui  acheva  l'œuvre  commencée  par  l'influence  pénétrante  de 


1.  Voir  le   récit  que  font  de  la  vengeance  tirée  par  Chiomara  du  centurion  romain  qui 
l'avait  déshonorée,  Folybe  (XXU,  il)  et  Tite-Live  (XXXVlll,  24). 

2.  Exploration  archéologique  de  la  Galatie,  p.  i8s,  193. 
j.  Exploration  archéologique,  p.  I92,  19). 


De  la  disparition  de  la  langue  gauloise  en  Galatie.  183 

l'hellénisme.  En  2$  avant  Jésus-Christ,  après  la  mort  d'Amyntas,  Auguste 
annexait  la  Galatie  à  l'empire;  il  en  formait  une  vaste  province  qui  com- 
prenait, comme  nous  l'avons  démontré  ailleurs,  non  seulement  le  terri- 
toire des  Tolistoboiens,  des  Tectosages  et  des  Trocmes,  mais  tous  les 
territoires  qui  avaient  été,  dans  les  dernières  années,  réunis  sous  la  main  du 
successeur  de  Déjotare,  Amyntas'.  Cette  incorporation  de  la  Galatie  s'ac- 
complit, à  ce  qu'il  sem.ble,  sans  la  moindre  résistance  des  populations,  à  qui 
l'administration  juste  et  sensée  d'un  gouverneur  roma'm,  Icgatus  imperatoris 
pro  pr£îore,  assurait  des  biens  depuis  longtemps  perdus,  la  liberté  des 
routes  et  du  commerce,  la  paix  publique.  Sous  cette  autorité,  grâce  à  ce 
repos,  des  villes  nouvelles  naissent  en  Galatie,  celles  qui  existaient  déjà 
développent  leur  richesse  et  leur  population;  Ancyre  et  Tavium,  les 
capitales  des  Tectosages  et  des  Trocmes  cherchent  à  rivaliser  avec  cette 
cité  de  Pessinunte  autour  de  laquelle  s'étaient  groupés  les  Tolistoboiens. 
Ancyre  et  Tavium,  qui  n'étaient  jusque-là  que  des  marchés  et  des  forts 
de  refuge,  se  donnent  alors  ce  qui,  dans  les  idées  grecques,  constituait 
proprement  une  ville,  la  distinguah: des  bourgades  rurales;  elles  s'ornent 
de  somptueux  édifices  destinés  au  culte  des  Dieux  et  aux  assemblées  des 
hommes;  elles  se  construisent  des  temples,  des  forums,  des  cirques,  des 
théâtres.  Attirés  par  l'éclat  des  cérémonies  religieuses  et  des  jeux  publics, 
par  les  écoles  qui  se  fondent,  par  les  gymnases,  les  bains,  par  tous  les 
agréments  de  la  vie  urbaine  telle  qu'on  la  pratiquait  dans  les  villes 
anciennement  policées  de  la  province  d'Asie,  les  chefs  galates  quittent 
peu  à  peu  leurs  châteaux,  au  moins  pendant  une  partie  de  l'année;  ils 
s'accoutument  à  résider  dans  les  cités,  à  y  remplir  les  fonctions  munici- 
pales, à  s'associer  ainsi  aux  travaux  administratifs  du  gouverneur  romain  ; 
par  les  charges  provinciales,  ils  s'acheminent  à  la  bourgeoisie  romaine 
et  aux  honneurs  romains.  Ainsi  entraînés  dans  le  grand  courant  de  la 
civilisation  gréco-romaine,  n'ayant  plus  l'occasion  de  faire  la  guerre  que 
sous  les  drapeaux  romains,  désormais  rattachés  par  un  lien  étroit  aux 
villes  qui  sont  autant  de  foyers  d'hellénisme,  les  Galates  achèvent  de 
désapprendre  leur  langue  qui  ne  leur  est  plus  d'aucun  usage;  le  souvenir 
s'en  efface  avec  celui  des  temps  d'anarchie  militaire  et  d'aventures  dont 
Tère  est  désormais  close  sans  retour.  Ce  qui  le  prouve,  c'est  que  les 
noms  propres  celtiques  disparaissent  pendant  le  premier  demi-siècle  de 
l'occupation  romaine,  et  l'on  sait,  par  plus  d'un  exemple  analogue,  que 
les  noms  propres  survivent  en  général  aux  noms  communs,  qu'ils  restent, 

I .  Sur  l'étendue  du  territoire  soumis  au  gouverneur  de  Galatie  et  sur  les  différentes 
provinces  qu'il  réunit  sous  sa  main,  voir  le  ch.  U  de  notre  étude  De  Galatia  provincia  et 
VExploration  inchéologique,p.  194-196. 


184  De  la  disparition  de  la  lanc.ue  gauloise  en  Gaktie. 

pendant  plus  ou  moins  longtemps,  comme  le  dernier  vestige  d'une  langue 

sortie  de  l'usage. 

Grâce  à  une  précieuse  inscription,  celle  qui  est  gravée  sur  la  face  de 
l'ante  de  gauche  du  célèbre  temple  de  Rome  et  d'Auguste,  nous  pouvons 
déterminer  avec  assez  d'exactitude  le  moment  où  les  Galates  quittent 
leurs  noms  celtiques  pour  des  noms  grecs  ou  romains  '. 

Nous  n'avons  pas  besoin  de  remonter  au  temps  de  l'invasion,  et  des 
premières  luttes  soutenues  parles  Galates  contre  les  Attalides,  les  Séleu- 
cides,  les  Romains  :  tous  les  noms  de  chefs  galates  qui  nous  sont  alors 
transmis  par  les  auteurs  sont  purement  celtiques.  Au  premier  siècle 
encore  avant  notre  ère,  du  temps  des  guerres  de  Mithridate,  tous  les 
tétrarques  gaulois  qu'Appien,  Plutarque  et  autres  historiens  mentionnent 
comme  mêlés  aux  troubles  de  l'Asie  ont  encore  des  noms  celtiques  ;  au 
temps  des  guerres  civiles  de  Pharsale,  de  Philippe  et  d'Actium,  plusieurs 
ont  déjà  des  noms  grecs  ou  macédoniens,  comme  cet  Amyntas,  le  dernier 
roi  de  Galatie,  et  son  fils  Pylaeménès,  dont  on  ne  peut  guère  révoquer 
en  doute  l'origine  gauloise.  Parmi  ces-  princes  et  seigneurs  galates  qui 
s'inscrivent  sur  le  temple  de  Rome  et  d'Auguste,  comme  ayant  concouru 
par  leurs  libéralités  à  la  splendeur  des  fêtes  célébrées  en  l'honneur  de 
l'Empereur^  la  plupart  ont  déjà  des  noms  tout  grecs  ou  romains.  Dans 
les  nombreuses  inscriptions  de  la  fin  du  premier  siècle  ainsi  que  du 
second  et  du  troisième  siècle  de  notre  ère  que  nous  a  laissées  Ancyre,  à 
peine  rencontre-t-on,  au  milieu  de  centaines  de  noms  propres,  un  nom 
de  femme  auquel  on  puisse,  faute  d'en  trouver  une  explication  dans  le 
grec,  supposer  une  origine  celtique  -.  Ceux  mêmes  qui^,  dans  des  inscrip- 
tions composées  en  leur  honneur,  sont  signalés  comme  descendants  des 
anciens  rois  et  tétrarques  'liaa'.Xéwv  y.al  Ts-pap/wv  àzcYovc.)  n'ont  plus 
que  des  prénoms,  des  noms,  des  surnoms  romains  5. 

On  peut  même  apporter,  à  ce  qu'il  semble,  dans  cette  recherche  plus 
de  précision,  et  déterminer,  à  quelques  années  près,  le  moment  où  les 
noms  gaulois  cessent  d'être  en  usage  et  tombent  en  désuétude.  D'après 
l'avis  de  M.  Franz  4,  auquel  se  sont  rangés  tous  ceux  qui  se  sont  occupés 
de  la  question,  l'inscription  de  l'ante  nous  aurait  conservé  le  souvenir 
de  cinq  célébrations  des  jeux  quinquennaux  fondés  à  propos  de  l'inaugu- 


1.  C.  huer.  Grâce,  4039. 

2.  Il  s'agit  du  nom  de  Caracylaea,  femme  de  Julius  Severus,  qui  fut  consul  en  i  J  J  de 
notre  ère.  L'inscription  qui  la  mentionne  (C.  /.  Gr.  4030),  lui  donne  le  titre  d'aTCÔYOvo; 
paTOitov.  .Voir  sur  ce  nom  Diefenbach,  Celtica,  II,  première  partie,  p.  2J4. 

3.  On  trouve  ce  titre  d'honneur  accordé  à  Ti.  Severus  iC.  I.  Gr.  4033)  et  à  Ti.  Claudius 
Gentilianus  {ibid.,  4058). 

4.  C.  /.  Gr.  dans  le  commentaire  du  n"  4039. 


Delà  disparition  de  ta  langue  gauloise  en  Calatie.  185 

ration  du  temple  de  Rome  et  d'Auguste.  Nous  croyons,  avec  M.  Momm- 
sen  ',  que  cet  édifice  n'a  guère  dû  être  dédié  qu'après  Auguste,  tout  au 
commencement  du  règne  de  Tibère,  et  nous  admettrons  que  les  cinq  célé- 
brations des  jeux  qui  nous  sont  ici  rappelées  se  distribuent  dans  une 
période  de  vingt  ans  qui  irait  environ  de  l'année  1 5  à  l'année  5  <,  de  notre 
ère.  Dans  l'inscription  gravée  après  la  seconde  célébration,  c'est-à-dire 
dans  la  première  partie  du  règne  de  Tibère,  nous  rencontrons  encore 
des  noms  gaulois;  c'est  Albiorix  fils  d'Ateporix  ^,  c'est  Amyntas  fils  de 
Gaesatodiastès  5.  Après  les  troisièmes,  quatrièmes  et  cinquièmes  jeux, 
tous  les  noms  de  nobles  galates  qui  nous  sont  cités  ont  une  physionomie 
toute  grecque  ou  romaine,  aucun  n'a  rien  de  celtique  :  c'est  Métrodore 
fils  de  Menemachos,  Musanos  fils  d'Arctinos,  Seleucos  fils  de  Philodamos, 
Julius  Ponticus,  Aristoclès,  Q.  Gallius  Pulcher^  Philonide  fils  de  Philon, 
Akylas.  Sans  doute  nous  n'avons  là  les  listes  que  de  cinq  célébrations 
des  jeux,  et  une  partie  des  noms  a  péri;  il  serait  donc  téméraire  d'ap- 
puyer toute  une  théorie  historique  sur  ce  seul  fondement;  mais  le  témoi- 
gnage des  autres  inscriptions  postérieures,  dont  les  noms  celtiques  sont 
tout  à  fait  absents,  nous  indique  que  nous  ne  faisons  pas  fausse  route  ; 
ce  n'est  point  par  un  pur  effet  du  hasard,  nous  sommes  du  moins  autorisés 
à  le  supposer,  que  les  trois  dernières  listes  ne  contiennent  plus  de  noms 
gaulois  tandis  qu'on  en  voit  encore  dans  la  seconde.  Le  changement  qui 
s'accomplissait  alors  nous  est  révélé,  si  nous  ne  nous  trompons,  par  une 
mention  que  nous  fournit  la  seconde  liste  :  on  y  voit  le  père,  Gaesato- 
diastès,  porter  encore  un  nom  celtique,  tandis  que  le  fils  de  ce  tétrarque 
n'a  plus  qu'un  nom  tout  grec,  Amyntas. 

Une  révolution  analogue  s'accomplissait  d'ailleurs,  vers  la  même 
époque,  au  delà  des  mers,  dans  la  grande  Gaule  d'oii  étaient  issues  les 
tribus  celtiques  établies  en  Asie  Mineure.  Sous  Auguste  et  Tibère  , 
la  Gaule  ,  des  Cévennes  à  la  mer  du  Nord  et  au  Rhin,  se  latinisait 
aussi  rapidement  que  s'hellénisait  ici  la  Gaule  asiatique.  Pour  ce  qui 
est  de  cette  prompte  transformation  à  laquelle  nous  devons  tant  de  monu- 
ments aujourd'hui  encore  subsistants  sur  notre  sol,  les  témoignages 
abondent  ;  nous  ne  rappelerons  ici  qu'un  texte  épigraphique  commenté, 
il  y  a  quelques  années,  par  M.  Léon  Renier,  avec  sa  sagacité  ordinaire. 
Nous  y  observons  un  phénomène  analogue  à  celui  que  nous  venons  de 
signaler  dans  l'inscription  du  temple  de    Rome  et  d'Auguste.   Il  s'agit 


1.  Res  Gestae  Dm  Augusti,  ex  monumento  Ancyrano  et  Apolloniensi  l'Berlin,  Weidmann, 
1865,  gr.  in-8"),  p.  VI. 

2.  L.  24,  35. 
}.  L.  26. 


1 86  De  la  disparition  de  la  langue  gauloise  en  Galatie. 

d'une  inscription  de  Genabum,  que  M.  Renier  attribue  au  milieu  du  pre- 
mier siècle  de  notre  ère  '.  De  même  qu'à  Ancyre  le  fils  de  Gaesatodiastès 
s'appelle  Amyntas,  à  Genabum  le  père  a  un  nom  des  plus  gaulois,  Ate- 
pomarus,  tandis  que  le  fils,  L.  Cornélius  Magnus,  déguise  sa  nationalité 
sous  un  nom  tout  romain.  Ainsi,  par  une  curieuse  coïncidence,  la  vieille 
langue  des  ancêtres  et  les  noms  qui  en  perpétuaient  le  souvenir  auraient 
disparu  en  même  temps  dans  la  grande  Gaule  européenne  et  dans  la 
petite  Gaule  asiatique;  le  chêne  antique  et  puissant,  la  bouture  qui  en 
avait  été  détachée  et  qui  avait  pris  racine  dans  cette  terre  lointaine  et  y 
avait  poussé  de  verts  rameaux,  perdirent  en  même  temps  leur  feuillage. 

Ce  qui  dut  achever  de  faire  oublier  l'idiome  cehique,  s'il  en  restait 
encore  quelques  vestiges  à  la  fin  du  siècle  dans  quelques  cantons  plus 
isolés  que  d'autres  et  plus  éloignés  des  villes,  ce  furent  les  grands  tra- 
vaux de  voirie  qui  s'exécutèrent,  vers  la  fin  du  premier  siècle,  sous  l'im- 
pulsion des  gouverneurs  de  Galatie,  dans  toute  la  partie  orientale  de 
l'Asie  Mineure,  dans  toutes  les  provinces  qui  s'étendent  entre  l'Euphrate 
et  le  Sangarius,  entre  les  sommets  du  Taurus  et  les  rivages  de  l'Euxin. 
Par  l'exécution  de  ces  voies,  sur  lesquelles  j'ai  insisté  ailleurs  *,  les 
voyages  durent  devenir  bien  plus  aisés,  le  commerce  dut  augmenter 
singulièrement  dans  toute  cette  région,  et  par  là  même  les  hommes,  de 
plus  en  plus  mêlés  les  uns  aux  autres,  furent  amenés  à  se  servir  de  plus 
en  plus  du  grec  comme  de  la  seule  langue  qui  fut  usitée  dans  toute  cette 
région.  Beaucoup  de  négociants  italiens  s'étaient  aussi  sans  doute  établis 
dans  les  villes  de  cette  contrée  et  particulièrement  à  Ancyre,  ville  opu- 
lente et  très-peuplée,  capitale  d'une  province  des  plus  vastes,  ou  plutôt 
de  tout  un  faisceau  de  provinces  ;  la  suite  du  gouverneur  était  nom- 
breuse, ses  bureaux  renfermaient  beaucoup  d'employés.  La  connaissance 
du  latin  paraît  donc  être  devenue  assez  générale  à  Ancyre,  d'après  le 
grand  nombre  d'inscriptions  latines  qui  s'y  sont  retrouvées  ;  il  n'est  pas, 
à  ma  connaissance,  une  ville  de  l'Orient  qui  en  ait  fourni  un  pareil 
chiffre.  Ces  deux  grandes  langues  suffisaient  à  tous  les  besoins;  c'était 
assez  pour  qu'elles  enseignassent  à  se  passer  de  dialectes  particuliers  et 
locaux,  pour  qu'elles  les  fissent  désapprendre  et  oublier. 

J'arrive  au  texte  de  Lucien  que  vous  m'avez  indiqué,  texte  où  M.  Die- 
fenbach  a  cru  voir  la  preuve  qu'au  second  siècle  la  langue  celtique  était 
encore  parlée  en  Galatie  h  En  m'y  renvoyant,  vous  m'avez  fait  hre  un 


1.  Revue  Archéologique,  Nouv.  sér.  t.  XI,  p.  408-421. 

2.  De  Calatia  provincia,  p.  101-105. 

}.  ORIGINES  EUROPJEM,  die  alten  Vœlker  Europas  mit  ihren  Sippen  und  Nachbarn, 
-8°,  1861,  Franckfurt,  p.  158. 


De  la  disparition  de  la  langue  gauloise  en  Galatie.  1 87 

très-piquant  ouvrage,  ['Alexandre  ou  le  Pseudomanîis ,  portrait  peint 
d'après  nature,  spirituelle  étude  de  charlatan  par  un  homme  tout  à  fait 
«  déniaisé  et  guéri  du  sot,  »  comme  disait  Gabriel  Naudé.  Si  vous  aviez 
pris  vous-même  ce  ylaisir,  le  passage  de  Lucien  ne  vous  aurait  plus  paru 
embarrassant  pour  la  théorie  que  j'ai  essayé  de  soutenir  contre  saint 
Jérôme  lui-même. 

L'Alexandre  que  Lucien  persiffle  et  dont  il  démasque  les  ruses,  d'un  bout 
à  l'autre  de  cet  am.usant  récit,  était  établi  à  Abonoteichos,  petite  ville  de 
Paphlagonie  ;  la  Paphlagonie  est,  comme  vous  le  savez,  une  province  d'Asie 
Mineure,  limitrophe  de  la  Galatie.  Comme  je  l'ai  montré,  certains  dis- 
tricts autrefois  appartenant  aux  dynastes  paphlagoniens,  ceux  qui  étaient 
situés  au  Sud  de  l'Olympe,  avaient  été  annexés  à  la  Galatie  ';  mais  la 
ville  d'Abonoteichos,  comme  toute  la  Paphlagonie  maritime,  faisait  partie 
de  la  province  de  Bithynie  et  de  Pont  {Pithynia  et  Pontus,  Bitliynia  Pon- 
tus).  C'était  dans  cette  ville  que  l'on  venait,  de  toutes  parts,  consulter 
Alexandre,  comme  on  fait  aujourd'hui  les  magnétiseurs,  soit  pour  se 
guérir  de  maladies  contre  lesquelles  échouait  le  savoir  des  médecins, 
soit  pour  apprendre  quelque  secret  que  l'on  avait  intérêt  à  pénétrer  ou 
pour  être  instruit  de  l'avenir, 

La  forme  la  plus  ordinaire  de  ces  consultations,  c'était  un  billet  cacheté, 
des  tablettes  scellées  qu'on  remettait  au  devin;  la  question  y  était  écrite.  Au 
bout  d'un  jour  ou  deux,  il  vous  donnait  la  réponse  en  même  temps  qu'il 
vous  rendait  les  tablettes,  dont  le  sceau  semblait  intact.  Les  naifs  s'éton- 
naient qu'il  eût  ainsi  pu  répondre  à  une  question  qu'il  était  censé  ne  pas 
avoir  pu  lire,  au  moins  avec  les  yeux  du  corps  ;  on  voyait  là  une  preuve 
de  sa  science  surnaturelle.  Mais  Lucien,  qui  avait  étudié  de  près  le  pré- 
tendu sorcier,  nous  dévoile  ses  supercheries,  qui  n'exigeaient  pas  le  quart 
de  l'adresse  dont  ont  besoin  nos  prestidigitateurs  modernes.  Alexandre 
mettait  à  profit  le  temps  que  les  tablettes  passaient  entre  ses  mains.  Il 
avait  toute  sorte  de  moyens,  —  Lucien  nous  en  indique  quelques-uns, 
—  pour  ouvrir  les  tablettes  sans  que  le  cachet  semblât  avoir  subi  la 
moindre  atteinte  ;  il  ne  les  restituait,  intactes  en  apparence,  qu'après 
avoir  pu  prendre  tout  à  son  aise  copie  de  leur  contenu.  De  tous  les  cré- 
dules et  superstitieux  qui  le  consultaient,  aucun  ne  se  doutait  du  tour. 

Il  n'y  avait,  continue  Lucien,  qu'un  cas  où  la  chose  présentât  quelque 
difficulté  :  c'était  lorsqu'on  remettait  au  prétendu  devin  des  tablettes  sur 
lesquelles  la  question  était  écrite  dans  une  langue  barbare.  Alexandre 
ouvrait  bien  les  tablettes;  ce  n'était  pas  là  ce  qui  l'embarrassait;  mais  il 

I.  De  Galatia  provincia,p.  jo. 


i88  De  la  disparition  de  la  langue  gauloise  en  Galatie. 

ne  s'en  trouvait  point  beaucoup  plus  avancé ,  il  fallait  ensuite  déchiffrer 
et  comprendre  ces  mots  étranges.  Renoncer  à  répondre,  c'aurait  été 
compromettre  sa  réputation,  se  discréditer  aux  yeux  de  la  foule;  il  n'y 
songeait  donc  pas  ;  il  se  bornait  à  prendre  du  temps.  Sous  un  prétexte 
quelconque,  il  différait  sa  réponse  jusqu'au  moment  où  il  pourrait  mettre 
la  main  sur  quelque  voyageur,  sur  quelque  étranger  qui  sût  la  langue 
dont  s'était  servi  son  client.  La  chose  finissait  par  se  rencontrer,  et  alors, 
après  s'être  fait  traduire  la  question,  il  y  répondait  en  grec,  mais  parfois, 
par  coquetterie,  il  mêlait  dans  sa  réponse  des  mots  empruntés  à  la  langue 
dans  laquelle  était  rédigée  la  demande.  C'est  ainsi  que  Lucien  nous  cite 
sa  réponse  à  un  Scythe,  réponse  où  se  rencontrent  quelques  mots  inin- 
telligibles pour  nous  et  qui  sont  ou  qui  voulaient  être  du  Scythe. 

C'est  dans  ce  passage  que  se  trouvent  les  quelques  lignes  sur  les- 
quelles, d'après  M.  Diefenbach,  vous  avez  appelé  mon  attention,  je  les 
traduis  et  je  les  cite  '  :  «  Il  rendit  souvent  aussi  des  réponses  à  des  bar- 
bares  si  quelqu'un  d'entre  eux  l'interrogeait  dans  son  idiome  national, 

soit  en  langue  syrienne  soit  en  langue  celtique,  Alexandre  ne  rencontrait 
pas  aisément  dans  le  pays  des  compatriotes  de  ceux  qui  lui^avaient  remis 
ces  demandes  :  il  s'écoulait  alors  un  assez  long  temps  entre  la  remise 
des  tablettes  et  la  réponse  de  l'oracle.  Il  lui  fallait  tout  cet  intervalle 
pour  résoudre  tout  à  loisir  l'énigme  et  trouver  des  gens  qui  pussent  lui 
traduire  chaque  demande.  « 

Nous  n'avons  pas  à  chercher  ici  dans  quel  dialecte  sémitique  et  avec 
quel  alphabet  devaient  être  rédigées  les  questions  posées  à  Alexandre  en 
langue  syrienne,  1,'jpiG-î;  mais  quant  à  IvEA-ia-ïf,  en  langue  celtique, 
cela  ne  peut  désigner,  selon  moi,  que  la  langue  celtique  telle  qu'on  la 
parlait  bien  loin  du  séjour  habituel  de  notre  sorcier,  en  Occident,  sur  les 
rivages  de  l'Atlantique,  en  Gaule  et  en  Bretagne.  J'affirme  que  si  M.  Die- 
fenbach, au  lieu  de  citer  le  passage,  comme  il  l'a  sans  doute  fait,  d'après 
quelque  autre  ouvrage  qui  l'avait  détaché  du  contexte,  avait  lu  tout  le 
traité,  il  serait  arrivé  à  cette  même  conclusion.  Voici  mes  raisons. 

Trois  ou  quatre  fois,  dans  le  cours  de  cette  biographie,  il  est  question 
de  la  contrée  que  nous  appelons  aujourd'hui  la  Galatie  et  de  ses  habi- 
tants. Aux  chapitres  9,  18  et  30  il  est  dit  que  l'on  vient  sans  cesse,  de 
Galatie,  consulter  Alexandre  ;  la  Galatie  est  citée,  avec  la  Bithynie  et  la 
Thrace,  parmi  les  pays  qui  lui  envoient  le  plus  de  dupes.  Au  chapitre  44, 

I.  §  Ji:  'A>.)>à  xai  PapSàpoi;  TroÀ),à>ciç  I/priTEv,  sî  Ttç  ir\  iraTpi't.)  êpoiTO  9_wv^ 
l'jpiiTTt  Y]  KcXtittC,  où  paStwç  é^îupÎTXwv  Tivà;  èTcw-(i|j,oOvTa;  ôiAoeâvsïç  toï;  Ô5Swx6c7i  ' 
oià  TùÙTO  xal  TToXù;  6  èv  jAÉrTfo  yçovo^  ï)v  xyj;  xs  ôôffEO);  twv  piêXîwv  xat  x^ç  XP^H'^'W" 
oiaç,  (l)ç  èv  TorroÛTfo  xaxà  a^o^riv  Xùoivxô  x£  oî  /çy)(!\i.o\  à(7<paX(«);,  xai  eOpîffxotvxo  oi 
ép|j.Y)vEÛTa(  ôuvàjiEvot  2xa(Txa... 


De  la  disparition  de  la  langue  gauloise  en  Galatie.  189 

Lucien  parle  d'une  accusation  qui  fut  portée,  d'après  des  indices  fournis 
par  Alexandre,  devant  le  gouverneur  de  Galatie.  Partout  dans  ces  pas- 
sages, c'est  des  mots  FaXaTta  et  YxXi-on  que  se  sert  Lucien.  L'emploi 
de  KtK-i'j-i,  au  §  $1,  n'avertit-il  pas  tout  d'abord  qu'il  s'agit  ici  d'autre 
chose,  d'une  langue  parlée   par   des  gens  que   Lucien  aurait  appelés 

KÉATX'.  ? 

Ajoutez  à  cela  que  Lucien  n'en  vient  à  parler  de  ces  réponses  faites 
à  ceux  qu'il  appelle  des  Barbares  qu'après  avoir  mentionné,  au  chapitre  3 1 , 
ceux  qui  viennent  de  l'Italie  même  pour  consulter  Alexandre.  Il  semble 
qu'il  suive  là  un  certain  ordre  qui  s'est  présenté  de  lui-même  à  son 
esprit.  D'abord  figurent  les  gens  de  la  Paphlagonie  et  des  provinces 
voisines,  parmi  lesquels  sont  comptés  les  Galates,  qui  frappent  à  chaque 
instant  à  la  porte  du  devin,  puis  les  Italiens,  qui  font  tout  exprès  le  voyage, 
enfin  des  Barbares,  parmi  lesquels  il  place,  à  côté  des  Scythes,  ceux  qui 
parlent  Kt'kv.^-i.  Y  a-t-il  apparence  qu'il  ait  pu  songer  à  ranger  parmi 
les  barbares,  avec  les  Scythes,  les  habitants  de  Pessinunte,  Ancyre  et 
Tavium,  villes  qui,  dans  la  seconde  moitié  du  second  siècle,  ne  différaient 
point  par  leur  richesse,  leur  goût  pour  les  arts  et  les  lettres  grecques, 
leurs  habitudes  civilisées,  de  Pruse,  de  Pergame,  de  Smyrne,  de  Caesarée 
ou  de  Sinope  ? 

Il  y  a  plus  :  ce  passage,  loin  de  confirmer  l'assertion  de  saint  Jérôme, 
me  fournit  une  nouvelle  raison  de  la  révoquer  en  doute.  Lucien  nous 
montre  Alexandre  en  rapport  continuel  avec  les  Galates  d'Asie  Mineure, 
habitants  d'une  province  qui  touche  à  la  Paphlagonie  ;  or  il  va  de  soi 
qu'un  certain  nombre  de  Galates  devaient  s'être  établis  dans  les  villes 
paphlagoniennes,  que  beaucoup  d'entre  eux  devaient  voyager  sans  cesse 
en  Paphlagonie,  pour  leurs  affaires,  devaient  la  traverser  pour  gagner 
les  ports  de  la  côte.  En  même  temps,  Lucien  nous  cite  ceux  qui  «  posent 
la  question  en  langue  celtique  »  parmi  les  indiscrets  qui  embarrassent  fort 
le  charlatan  et  qui  le  forcent  à  prendre  de  longs  délais,  à  retarder  sa 
réponse  jusqu'à  ce  qu'il  ait  enfin  rencontré  en  Paphlagonie,  ce  qui  ne 
s'y  présentait  pas  aisément,  quelqu'un  qui  sût  cette  langue  barbare.  Je 
vous  le  demande,  si  l'on  eût  encore  parlé  celtique  de  Tavium  à  Pessi- 
nunte, Alexandre  n'aurait-il  pas  pu,  au  bout  de  quelques  heures,  s'être 
fait  traduire  la  demande  par  quelque  marchand  galate  du  bazar? 

Il  ne  peut  donc  être  question  ici  de  Galates  de  l'Asie  Mineure,  qui 
tous  savaient  le  grec,  posant  leurs  questions  en  celtique,  et  l'extrême 
difficulté  que  rencontrait  Alexandre  à  se  faire  traduire,  dans  une  ville  de 
Paphlagonie,  une  question  écrite  en  langue  celtique,  démontre  qu'au 
second  siècle  les  Galates  ne  savaient  plus  un  mot  de  leur  vieille  langue. 
Si  l'usage  s'en  était  conservé  quelque  part,  une  question  posée  par  un  de 


190  De  la  disparition  de  la  langue  gauloise  en  Galatie. 

ces  Celtes  occidentaux  que  Lucien  appelait  Kih-y.'.   et  qu'il  comptait 

parmi  les  barbares  aurait  tout  d'abord  trouvé  ici  un  interprète. 

On  se  rejettera  sur  la  différence  des  dialectes;  mais  d'après  ce  que 
l'on  sait  des  rapports  étroits  qui  unissent  entre  eux  tous  les  idiomes  de 
la  famille  celtique,  cette  différence  aurait-elle  pu  être  si  marquée  que 
quelques  lignes  écrites  par  un  Aquitain,  un  Belge  ou  un  Breton  fussent 
inintelligibles  pour  un  Celte  de  l'Asie  Mineure  tant  que  s'était  conservé, 
dans  cette  lointaine  colonie,  l'idiome  apporté  de  l'Occident  ?  D'ailleurs, 
l'assertion  de  saint  Jérôme  qu'acceptent,  comme  fondée  sur  les  faits,  les 
partisans  de  la  théorie  que  je  combats,  est  que,  de  son  temps,  les  Calâtes 
d'Asie  Mineure  parlent  une  langue  qui  ne  diffère  que  par  quelques  légères 
altérations  de  celle  qui  est  en  usage  chez  les  Trévires.  Deux  siècles  plus 
tôt,  personne  ne  le  niera,  ces  différences  auraient  dû  être  encore  moins 
sensibles  ;  le  rapport  entre  l'idiome  des  Trévires  et  celui  des  Calâtes 
aurait  été  encore  plus  étroit. 

Vous  admettrez  donc,  je  l'espère,  avec  moi,  que  ceux  qui  posaient  en 
langue  celtique  au  devin  paphlagonien  ces  questions  qui  lui  donnaient 
tant  d'embarras  ne  pouvaient  être  que  des  Occidentaux,  des  marchands 
ou  des  légionnaires  que  les  exigences  de  leur  commerce  ou  du  service 
militaire  avaient  conduits,  de  la  Caule  ou  de  la  Bretagne  oi^  ils  étaient 
nés,  sur  les  côtes  de  l'Euxin.  La  difficulté  avec  laquelle  on  trouve  un 
interprète  pour  leurs  élucubrations  prouve  qu'il  ne  se  parle  plus  alors,  en 
Asie  Mineure,  de  dialecte  qui  soit  frère  de  celui  que  ces  étrangers  appor- 
tent de  la  vieille  patrie  celtique. 

M.  Diefenbach  indique  encore,  parmi  les  textes  qui  peuvent  contenir 
des  mots  appartenant  à  un  dialecte  celtique  parlé,  vers  la  fin  de  l'empire, 
en  Asie  Mineure,  les  passages  des  auteurs  ecclésiastiques  relatifs  à  des 
hérétiques  du  quatrième  siècle,  qui  auraient  été  très-nombreux^,  vers  le 
quatrième  siècle,  à  Ancyre  et  dans  les  environs  '.  Ces  hérétiques  nous 
sont  cités  sous  les  noms  de  Tascodrougitae,  Ascodrogiîae,  Ascodrougoi  et 
autres  variétés  du  même  mot.  La  première  partie  du  nom  nous  est  donnée 
dans  les  manuscrits,  tantôt  sous  la  forme  Tasco,  tantôt  sous  la  forme 
Asco,  ce  qui  constitue  un  premier  embarras.  De  plus,  parmi  les  auteurs 
anciens  qui  nous  ont  transmis  ce  nom,  les  uns  disent  qu'il  appartiendrait 
à  la  langue  des  Calâtes,  les  autres  l'attribuent  à  celle  des  Phrygiens. 
Quant  aux  philologues  modernes  qui  ont  cherché  à  expliquer  par  ce  que 
l'on  sait  du  celtique  ces  deux  mots  tasco  ou  asco  et  drouggo,  ils  ne  sont 
arrivés  jusqu'ici  qu'à  des  conjectures  très-hasardées  et  dépourvues  de 
toute  valeur  scientifique.  Jusqu'à  nouvel  ordre,  nous  avons  autant  de  rai- 

I.  Die  alten  Vœlker  Eiiropas,  Lexique,  n'  310  ^p.  426). 


De  la  disparition  de  la  langue  gauloise  en  Galatie.  1 9 1 

sons  de  croire  à  l'origine  phrygienne  qu'à  l'origine  celtique  du  nom  porté 
par  ces  hérétiques.  Sans  doute,  et  nous  l'avons  marqué  plus  haut,  le 
phrygien  comme  le  lydien,  n'existait  plus,  après  la  conquête  romaine,  à 
l'état  de  langue  indépendante;  mais  dans  le  grec  vulgaire  de  ces  con- 
trées, parlé  par  des  gens  dont  l'immense  majorité  n'avait  pas  dans  les 
veines  une  goutte  de  sang  grec,  il  avait  dû  rester  un  assez  grand  nombre 
de  mots  empruntés  aux  anciens  idiomes  qui  se  parlaient  dans  le  pays 
avant  l'invasion  et  le  triomphe  de  l'hellénisme.  On  trouve  dans  les  ins- 
criptions funéraires  de  l'Asie  Mineure,  du  temps  de  l'Empire,  bien  des 
noms  propres  qui  ne  se  résolvent  pas  en  éléments  tirés  du  grec. 

Nous  avons  commencé  par  saint  Jérôme;  revenons  à  lui,  au  terme  de 
cette  discussion.  Comment  nous  expliquerons-nous  qu'il  ait  affirmé  d'une 
manière  si  positive  un  fait  que  nous  avons  prouvé  être  contraire  à  toutes 
les  vraisemblances  ?  Cela  étonne  d'autant  plus  que,  d'après  une  phrase 
voisine  de  celle  que  nous  discutons,  il  semble  avoir  été  à  Ancyre  '.  Mais 
ce  n'est  pas  à  Ancyre,  cette  grande  ville  toute  grecque  que  Libanius  et 
Themistius  représentent,  vers  cette  même  époque,  comme  une  sorte 
d'Athènes  orientale  ^  ce  n'est  pas  à  Ancyre  qu'il  a  entendu  parler  ce  qui, 
de  toute  manière,  n'aurait  plus  été  qu'un  patois  tout  au  plus  conservé 
dans  les  campagnes  reculées.  Pour  qui,  là  encore,  ne  se  contente  pas  du 
passage  cité  partout,  mais  va  le  chercher  dans  saint  Jérôme  lui-même, 
l'explication  se  présente  aussitôt,  très-simple  et  très-vraisemblable.  Tout 
ce  préambule  du  second  livre  de  son  Commentaire  à  l'épitre  aux  Calâtes 
forme  une  sorte  d'introduction  oij  il  a  capricieusement  réuni  des  rensei- 
gnements historiques  confus  et  des  étymologies  puériles.  Il  y  dit  lui- 
même,  vers  le  début ,  au  moment  de  citer  Varon  :  «  pour  l'avouer 
franchement,  il  y  a  déjà  bien  des  années  que  nous  avons  cessé  d'étudier 
ces  matières  »3.  Il  va  donc  un  peu  au  hasard,  puisant  dans  les  souvenirs, 
déjà  vagues  et  brouillés,  de  ses  lectures  profanes  d'autrefois,  puisant 
aussi  dans  de  nombreux  commentateurs  qui  se  sont  avant  lui  occupés  de 
cette  épitre  et  dont  il  a  les  ouvrages  sous  les  yeux;  il  cite  entre  autres 
cinq  livres  d'Origène.  Est-ce  à  sa  mémoire,  est-ce  à  quelqu'un  de  ces 
commentateurs  qu'il  a  emprunté  l'assertion  que  nous  combattons  ?  je 
l'ignore,  et  il  n'est  pas  probable  que  l'on  arrive  jamais  à  en  retrouver  la 
source.  Selon  moi,  sa  phrase  contient  un  renseignement  qui  a  dû  être 


1.  p.  429  :  «  Scit  mecum  qui  vidit  Ancyram  metropolim  Galatiaa  civitatem,  quot  nunc 
usque  schismatibus  dilacerata  sit,  quot  dogmatum  varietatibus  constuprata.  » 

2.  Liban.  Epist.  6i,  242,  640,  662,  668,  lUh  "OJ,  '322-  Remarquez  surtout  le 
curieux  portrait  que  Themistius  fait  des  Calâtes  dans  son  discours  XXIII,  intitulé  loçiTTr,; 
(p.  299,  éd.  Hardouin);  il  donne  une  très-haute  idée  de  leur  culture  et  de  leur  mouve- 
ment d'esprit. 

i.  «  Et,  ut  simpliciter  fatear,  multi  jam  anni  sunt  quod  hase  légère  desivimus.  » 


192  De  la  disparition  de  la  langue  gauloise  en  Galatie. 

exact  trois  ou  quatre  siècles  plus  tôt,  qui  ne  devient  faux  que  par  l'ap- 
plication qu'en  fait  saint  Jérôme  à  son  temps.  C'est  à  quelque  écrivain 
contemporain  de  Mithridate  ou  d'Auguste,  à  quelque  historien  grec  ou  à 
quelque  auteur  latin  du  dernier  siècle  de  la  république  ou  du  premier  de 
l'empire,  que  doit  être  empruntée  cette  observation  qui  avait  alors  sa 
vérité  et  son  intérêt.  Quelque  grec  voyageur  comme  Polybe,  Posidonius 
ou  Strabon,  quelque  officier  romain  intelligent  et  curieux  comme  Hirtius 
ou  LoUius,  put  être  frappé  des  rapports  que  présentaient  le  dialecte  gau- 
lois parlé  chez  les  Trévires,  les  noms  propres  que  portaient  leurs  chefs, 
et  cet  idiome  qu'il  entendait  encore  retentir,  autour  des  tétrarques  galates, 
d'un  Ortiagon,  d'un  Déjotare,  d'un  Amyntas.  Il  constata  cette  ressem- 
blance, et,  de  sa  relation,  le  fait  passa  dans  d'autres  livres  et  fut  répété 
bien  des  fois  sans  que  l'on  songeât  à  se  demander  si  les  choses,  depuis 
le  temps  où  avait  été  faite  cette  remarque,  n'avaient  point  changé.  Les 
exemples  d'erreurs  analogues  abondent  dans  l'histoire.  Saint  Jérôme  n'a 
eu  qu'un  tort,  c'est  d'employer  ici  le  présent  au  lieu  de  l'imparfait,  c'est 
d'appliquer,  à  son  temps,  par  irréflexion  et  par  manque  de  critique,  ce  qui 
ne  convenait  qu'au  premier  siècle  avant  notre  ère.  Que  lui  importait 
d'ailleurs?  Son  commentaire  est  une  œuvre  de  théologie.  Il  jette  en  pas- 
sant ce  renseignement,  sans  s'arrêter  à  en  vérifier  l'exactitude  ;  qu'il  soit 
vrai  ou  faux,  pourvu  que  les  chrétiens  trouvent  dans  ce  livre  de  quoi 
s'instruire  du  dogme  et  édifier  leurs  âmes,  son  but  sera  atteint. 

J'espère,  mon  cher  directeur,  que  cette  discussion  vous  paraîtra  con- 
cluante et  que  vos  lecteurs  partageront  cette  impression.  La  Revue  se  pro- 
pose de  déblayer  le  terrain  des  études  celtiques,  d'en  débarrasser  les  abords 
d'une  foule  de  préjugés  et  d'assertions  hasardeuses  qui  reposent  sur  des 
erreurs  de  date,  sur  des  attributions  fausses  et  des  enthousiasmes  irréflé- 
chis :  il  faut  qu'ici,  comm.e  en  toute  recherche  scientifique,  l'imagination 
cède  le  pas  à  la  critique.  Tout  étranger  que  je  sois  à  la  philologie  cel- 
tique, je  serai  heureux  si,  pour  ma  faible  part,  en  tirant  au  clair  cette 
question,  j'ai  pu  dissiper  une  illusion,  et  vous  donner  une  preuve  de 
l'intérêt  que  je  porte  à  votre  entreprise  et  du  succès  européen  que  je  lui 
souhaite.  Je  crois,  et  j'en  ai  donné  les  raisons,  que  l'idiome  gaulois  ap- 
porté en  Asie  Mineure  par  les  conquérants  a  dû  y  tomber  en  désuétude 
dans  le  courant  du  premier  siècle  de  notre  ère;  permettez-moi,  en  finis- 
sant de  vous  signaler  une  question  qu'il  appartient  à  vous  ou  à  l'un  de 
vos  collaborateurs  spéciaux  d'examiner  et  de  résoudre.  La  seconde  partie 
de  l'assertion  de  saint  Jérôme  est-elle  plus  vraie  que  la  première  ^  Parlait- 
on  encore  chez  les  Trévires,  au  quatrième  siècle,  un  idiome  celtique  ? 

Agréez,  etc. 

G.  Perrot. 


FIONN'S    ENCHANTMENT, 


The  following  short  story  is  part  of  the  so  called  history  of  the  Feinn,  now 
called  Fenians  in  Ireland  and  elsewhere.  As  the  history  now  exists  in  oral  tradi- 
tion in  the  Highlands  of  Scotland,  wild  mythical  adventures  are  told  in  prose 
over  the  fire  to  children  and  they  partai<e  of  the  nature  of  other  popular  taies. 
Having  set  a  man  above  ail  the  world  the  next  step  is  to  get  him  into  some 
grievous  strait  and  rescue  him  by  the  superior  prowess  of  an  inferior.  In  this 
form  the  Scotch  heroes  seem  to  be  related  to  Norse  demigods.  Like  them, 
Welsh  worthies  who  appear  in  the  Mabinogion  share  in  adventures  which  in 
the  Edda  are  attributed  to  Thorr,  and  probably  the  whole  northern  panthéon 
including  Thorr,  Arthur  and  Fionn  had  some  common  origin  in  Aryan  mytho- 
logy  or  in  some  other  early  source.  They  hâve  much  in  common  now  in  popular 
taies  and  in  old  writings  at  ail  events.  To  Fenian  prose  taies  as  they  now  exist 
belong  Ossianic  verses  which  are  sung  when  the  narrator  happens  to  know 
enough  of  them.  Thèse  are  c  Fenian  ballads  »  and  some  which  now  survive 
were  written  in  1 520  by  Dean  Mac  Gregor  in  Scotland.  Thèse  as  they  exist  in 
manuscript,  and  orally  amongst  the  peasantry,  correspond  to  the  Irish  popular 
poetry  of  which  a  great  deai  has  appeared  in  the  publications  of  the  «  Ossianic 
Society  d  of  Dublin.  The  6th  volume  contains  a  long  poem  on  the  enchantment 
of  Fionn.  On  ancient  ballads  and  upon  the  traditionary  history  of  the  Feinn  the 
fam.ous  epic  Ossian  was  probably  founded.  But  when  or  by  whom  it  is  impos- 
sible now  to  say.  In  1762  part  of  the  poem  of  Temora  was  printed  in  «the 
original  gaelic.»  Many  of  the  ballads  can  be  seen  through  the  epics,  but  the  epic 
Ossian  itself  has  not  been  found  in  any  ancient  writing  and  is  unknown  to 
modem  tradition.  Because  of  the  language  it  seems  probable  that  the  epic 
Ossian  is  more  modem  than  the  Ossianic  ballads  and  the  prose  taies  which  be- 
long to  them.  This  is  a  sample  of  a  prose  taie  with  two  lines  of  a  verse  atta- 
ched  (I  Fionn  in  the  house  of  the  yellow  face  —  unable  torise  or  to  sit  ».  The  gaelic 
was  written  by  Donald  Mac  Pherson,  a  Lochaber  man,  who  has  published  a 
volume  of  popular  poetry  and  gaelic  songs,  and  the  story  was  told  by  his 
grandmother  long  ago.  The  translation  is  close  and  the  gaelic  is  given  as  it 
came  to  me  in  iune  1870. 

J.  F.  C. 


194  Fionn's  Enchantment. 

FIONN    IN    THE    HOUSE    OF   THE    YELLOW    FACE, 
UNABLE    TO    RISE    OR    TO    SIT, 

On  a  day  when  Fionn  Mac  Chumhail  '  and  the  rest  of  the  Feinn  were 
in  the  mountains  of  the  chace,  there  came  on  snowing  and  drifting,  and 
before  they  had  got  the  game  gathered,  the  evening  came  upon  them. 
Tired  and  wearied  as  they  were,  they  took  to  their  way  to  go  down  to 
the  houses.  As  they  were  going  on  heavily  and  moodily  they  came  to  a 
gray  hut  in  the  top  of  a  glen  and  they  went  to  rest  in  it.  They  made 
a  fire.  The  lads  fell  into  a  noisy  mood  and  till  the  bird-stew  was  ready 
they  began  to  drive  the  drinking  horns  and  to  tell  taies  of  the  olden 
times.  The  memory  of  the  prowess  of  their  ancestors  made  them  exalt 
themselves  as  is  usual,  and  they  ail  said  together  that  the  man  or  beast 
was  to  be  pitiedthat  should  corne  to  trouble  the  Feinn  that  night,  or  that 
would  offer  to  insuit  Fionn.  In  the  very  middle  of  this  talk  in  cornes  a 
slender  brown  hare  and  without  care  or  fear  turns  a  turn  or  two  on  the 
embers  and  tosses  up  the  ashes  to  the  rafters  and  out  she  goes  *. 

But  if  she  did  so,  that  did  not  make  them  less  valiant.  They  made  a 
dark  leap  out  after  her  ;  but  they  went  into  a  mist  so  great  with  the  dark- 
ness  that  came  upon  them  that  they  could  not  see  each  other.  Fionn 
and  his  twelve  lads  foUowed  the  hare  over  stump  and  stone  over  the 
shoulder  of  the  glen  and  they  never  lost  sight  of  her  till  she  sprang  in  at 
the  window  of  a  rickety  house  that  came  in  their  way  at  the  side  of  a 
green  knoll.  And  what  house  should  this  be  but  the  house  of  the  Yellow 
Face,  a  giant  that  lived  upon  enchanted  boars  and  the  flesh  of  men. 
In  they  go  to  take  the  news,  but  they  found  no  trace  of  the  hare. 
There  was  within  a  woman  baking,  for  the  Yellow  Face  had  not  come 
home  from  the  mountain  chase.  She  gave  them  méat  and  drink  and 
said  that  now  they  had  best  begone,  before  the  Yellow  Face  came. 
Fionn  said  that  he  never  had  fled  from  man  and  that  they  would  not 
begin  with  the  Yellow  Face  and  they  came  farther  into  the  house. 

«  Stop  till  the  end,  »  said  the  wife.  If  it  be  true,  they  had  hardly 
settled  themselves  when  they  heard  clitter  clatter  at  the  door  and  who 
was  there  but  the  Yellow  Face  and  his  lads  with  a  great  big  deadly 
toothy  boar  on  his  back  !  He  gave  himself  a  great  big  bittle  shake  to 


I.  There  is  a  wide  field  for  investigation  in  this  name.  It  seems  to  mean  «  Pair  Son 
of  Subjection  »  but  that  ineaning  will  hardly  fit  tlie  commander  in  chief  of  the  Feinn  who 
conquered  the  whole  world  in  arms  according  to  many  legends  and  poems.  There  are 
names  in  Mythology  which  seem  more  appropriate,  but  on  them  I  will  not  venture. 


Fionns  Enchantment.  195 

FIONN  'AN  TAIGH  A'  BHLAIR-BHUIDHE 
GUN  CHOMAS  ÊIRIGH  NO  SUIDHE. 

Là  dh'an  robh  Fionn  mac  Chumhail  's  a'chuid  eile  de  Vz  Fhéinn  anns  a' 
bheinn-sheilg ,  dh'  'eirich  car  'us  cathadh;  's  mu  'n  d'  jhuair  iad  an 
î-sealg  a  chair  cruinn,  thàinig  an  t-anmoch  orra.  Sgitb,  airtealuch  mar  a  bhà 
iad,  thog  iad  orra  gu  téarnadh  gu  baile.  Mar  a  bha  iad  a'  gabhail  air  an 
aghart  gu.  trôm,  athaiseach,  thàinig  iad  air  boîhan  fàs  'am  bràighe  glinne; 
agus  ghabh  iad  gu  tàmh  ann.  Dh'  fhadaidh  iad  teine,  's  chaidh  nagillean  air 
sùrd  gréidheidh;  's  gus  am  biodh  an  t-eunbhruich  uilamh  thàisich  iad  air 
iomairt  nan  corn,  's  air  seanchus  mu'n  'am  bho  shean.  Chuir  cuimhn'  air 
cliu  an  sinnsire  togail  fôpa  mar  a  b'àbhaisî  ;  's  thuirî  iad  uile  cruinn-a- 
càmhluath  gu'm  b'  e  ma  thruaighe  daine  no  beathach  a  îliigeadh  a  chur  dragli 
air  an  Fhéinn  an  oidhche  sin  ;  no  a  theannadh  ri  îàir'  a  îhoirt  do  dh-Fhionn. 
'An  teis-meadhoin  na  bruidhne  seo,  thigear  maigheach  chaol,  ruadh  a's  taigli; 
agus,  gun  jhiamh  gum  umhail,  cuirear  car  no  dlià  dli'i  air  a'  chagailt,  's 
togar  an  luath  munasparran;  agus  thugar  a  mach  oirre  !  Ma  thug  cha 
deachaidh  sin  air  mh-thapadh  dhaibhsam;  thug  iad  daoidh-léum  a  mach  'as' 
a  deoghaidh;  ach  chaidh  iad  'n  am  bràth-cheb  cho  mor  le  dorchadas  a 
thàinig  orra,  's  nach  ba  leur  dhaibh  a  chéile.  Lean  Fionn  's  a  dhà  ghille 
dhiag  i  a  bhun  's  a  lorg  thar  guallainn  a'  ghlinne;  's  cha  do  chaill  iad  sealladh 
oirre  gus  'na  léum  i  's  taigh  air  sgùid  de  thaigh  ùdlaidh  a  thachair  orra  aig 
bun  slthein.  De'n  taigh  a  bha  'n  seo,  ach  taigh  a' Bhlàir-Bhuidhe,  famhair a 
bha  'tighinn  beo  air  tairc-nimhe  's  air  feèil  dhaoine!  Rachar  a's  taigh,  'us 
gabhar  sgial;  ach  cha  d'  fhuaras  forfhais  air  a'  mhaighich.  Cha  robh  's 
taigh  ach  a'  bhean  's  i  fuineadh.  Cha  d'  thàinig  am  Blar-Buidhe  dhachaigh 
'as  a'  bheinn-sheilg.  Thugi  biadh  'us  deoch  dhaibh;  'sthuirt  i  gu'm  b'  fhèarr 
dhaibh  a  nis  a  bhuth  'falbh,  mu'n  tigeadh  am  Blàr-Buidhe  dhachaigh.  Thuirt 
Fionn  nach  do  îheich  iad  romh  dhuine  riabh,  agus  nach  deanadh  iad  toiseach 
de'n  Bhlàr  ;  's  theann  iad  na  b'  fhaide  's  taigh.  Feith  ri  dheireadh,  os  a' 
bhean.  Mar  a  b'  fhior,  cha  d' jhuair  iad  iad  fhéin  a  shocruchadh  ach  gann, 
tra  a  dh'  fhairich  iad  stùirn-stàirn  aig  an  dorus.  Co  bha  'n  siod  ach  am 
Blàr-Buidhe  's  a  ghillean,  's  torc-nimhe  màr,fiaclach  aig  air  a  mhuin!  Thug 
e  crathadh  beag  mor  air  fhéin  a  chur  an  t-sneachda  dheth,  's  chuir  e  crith  fo 
'n  ursainn  'sfo  shuidheachan  an  taighe.   Tha  mi  'jaireachduinn  fàilidh  fhar- 


2.  It  is  common  to  suppose  that  witches  take  the  shape  of  hares  ;  but  in  this  case  the 
intention  is  to  rebuke  boasting.  A  hare  might  really  corne  into  a  turf  hut  on  a  hill  side 
and  run  out,  and  a  party  of  drunken  lads  might  chase  her  in  a  snow  storm. 

14 


,«)WV*MaK 


1 96  Fionn's  Enchantment. 

drive  off  the  snow  and  he  made  the  threshold  and  foundations  of  the 
house  tremble.  «  I  smell  the  smell  of  the  stranger  before  me,  wife  ! 
Whom.  hâve  you  hère  ?  »  said  the  Face.  The  wife  told  him  of  the  guests 
that  had  corne  to  visit  her  since  he  went.  «  Out  with  yourlads,  Fionn, 
to  take  off  our  burdens,  »  said  the  Face.  Fionn  never  gave  a  refusai  to 
man,  so  six  of  them  were  sent  out  to  the  Face.  But  scarce  had  they 
passed  the  threshold  when  the  Face  struck  them  with  his  rod  of  magie  5 
and  they  were  pillars  of  stone  and  he  set  them  at  the  north  side  of  the 
door  to  stop  the  sleety  wind.  There  he  left  them  and  he  and  his  lads 
took  in  the  boar  4.  They  did  but  wait  to  give  a  rough  scraping  over  him 
and  the  wife  put  him  on  in  the  great  kettle,  the  carcase  as  it  was. 
Before  it  got  a  boil  and  a  simmer  the  Face  stuck  the  flesh  sîake  into  it 
and  there  he  had  it  out  on  the  floor  and  without  more  delay  he  and  his 
/i^yi,  ^^'^^  ^^^  about  it.  Each  bone  as  they  picked  it,  that  they  threw  to  Fionn 
and  his  men.  It  was  bad  feeding  but  there  was  no  help  for  it.  Fionn"" 
was  silent  and  pondering  and  no  wonder.  When  the  tearing  was  donc 
and  that  was  not  long,  Yellow  Face  bade  his  wife  bring  out  the  golden 
apple  sothat  Fionn  might  pass  the  long  winternight.  She  brought  down 
the  apple  and  gave  it  to  him  s.  They  began  at  each  other  with  the  apple 
and  if  they  did  is  not  long  before  the  Face  put  an  end  to  ail  Fionn's 
lads.  Then  the  Face  perceived  that  he  could  not  manage  Fionn  with  the 
apple  and  he  said  that  they  must  wrestle.  To  grips  they  go;  but  though 
they  should  be  wrestling  till  now  he  could  notshake  Fionn  6. 

When  the  Face  saw  that  his  match  had  come^  he  bade  his  wife  put 
on  the  griddle  7  so  that  Fionn's  feet  might  be  warmed,  for  surely  he  was 
cold  in  this  cold  frosty  night.  The  griddle  was  put  on  till  it  was  a  glow- 
ing  red  blaze  and  they  ail  got  about  Fionn  (that  was  the  time  when 
he  said,  «A  man  is  no  man  alone  »),  and  they  set  him  on  the  griddle  till 
his  legs  were  burnt  to  the  hips.  Now  was  he  unable  to  sit.  The  Face 
gave  a  hoarse  laugh  and  he  stuck  the  flesh  stake  through  both  his  hams 
and  then  he  could  neither  rise  nor  sit. The  Face  thought  that  he  had  not  a 
gasp  of  breath  in  him  and  cast  him  aside  in  a  corner.  Fionn  never  was  in  a 
greater  strait  than  this  but  at  the  time  he  was  between  Want  and  Déniai^, 
and  he  remembered  that  he  had  the  horn^  ofthe  worthies  and  that  it  could 


3.  Hereis  another  word  which  may  set  Celtic  scholars  to  work.  It  looks  like  Druid's 
rod,  but  the  giant  is  exceedingly  like  a  frost  giant  or  a  hill  ogre  from  Scandinavia, 

4.  Is'this  the  boar  on  which  heroes  feasted  in  Walhalla  or  is  it  some  other?  In  any 
case  he  is  very  common  in  gaelic  stories. 

j.  This  is  another  bit  of  inachinery  whidi  greatly  needs  explanation,  for  it  constantly 
appears  in  this  class  of  stories.  If  thèse  be  solar  Aryan  heroes,  the  golden  bail  may  be  the 
sun,  according  to  modem  authors,  or  lightning;  but  it  seems  more  probable  that  some 


^"^ntiO*    ^i^rtA^yvxt^,^    tA4~-ClyL<,S^i^    C^cf^r-       ' 
'     VW<_  {C~fÙ!i:  -/vzc4  Cx/^    ^/vv<_  ^  ^K/J'Vt^  £û^2^^ 


Fionn's  Enchantmenî.  197 

bhalach  romham,  a  bhean;  cà  seo  îh'  agad  a  nochd,  os'  am  Blàr?  Dh' 
innls  a  bhean  na  h-aoidhean  a  thàinig  air  choimheadachd  oirre  bho  'na  dk' 
flialbh  e.  A  mach  do  ghillean,  'Fhinn,  a  thoirt  na  h-eallaiche  dhiam,  os'  am 
Blàr.  Cha  d'  thug  Fionn  an  t-'euradh  do  dhuine  riabh,  agus  cuirear  siathnar 
a  mach  dhiubh  far  an  robh  'm  Blàr.  Mu'n  gann  a  bha  iad  seach  an  stairs- 
neach  bhua'd  am  Blàr  slat-na-draoidheachd  orra,  's  bha  iad  'n  an  colbh- 
cloiche;  's  chuir  e  air  taobh-tuath  an  doruis  iad  a  chur  stad  air  a'  ghaoth- 
dheathaich  !  Dh'  fhàg  e  'n  sin  iad;  's  thug  e  fhéin  's  a  ghillean  a's  taigh  an 
tore.  Cha  d' fhuirich  iad  ach  ri  robladh  lomaidh  a  thoirt  air,  's  chuir  a' 
bhean  air  e  's  a'  choire-mhor,  'n  a  chlosaich  mar  a  bhà  e!  Mu'n  d' 
fhuair  e  ach  goil  'us  leth-goil,  spàrr  am  Blar  bior  na  feol'  ann, 
's  bha  siod  aig  air  an  ùrlar;  's  gun  îuille  dàlach  shuidh  e  fhéin  's 
a  ghillean  mu'n  cuairt  da.  Gach  cnàimh  mar  a  chreidhmeadh  iad  thilgeadh 
iad  siod  gu  Fionn  's  gu  'ghillean.  B'  olc  a'  bhiatachd  è,  ach  cha  robh  comas 
air.  Bha  Fionn  'na  thosd  's  'na  chuimhne  's  b'  ion  dà  sin.  An  uair  a  bha  'n 
roic  thairis,  's  cha  b'  fhada  chuige,  dh'  iarr  am  Blàr-Buidhe  air  a  mhnaoi  an 
t-ubhal-oir  a  thoirt  a  nuas  gus  an  oidhch' fhada  gheamhraidh  a  churseachad 
air  Fionn.  Thug  i  nuas  an  t-ubhal,  's  thug  i  dhà  e.  Thoisich  iad  air  a 
chéile  leis  an  ubhal,  's  ma  thoisich,  cha  h'  fhada  gus  'na  chuir  am  Blàr  as 
do'n  iomlan  de  ghillean  Fhinn.  Thuig  am  Blàr  nach  deanadh  e  'n  gnothuch 
air  Fionn  leis  an  ubhal,  's  thuirt  e  gu'm  feumadh  iad  dolaghleachd.'An  dro- 
mannan  a  chéile gabhar  iad;  ach,  ged  a  bhiodh  iad  fhathast  a'  gleachd,  cha 
tngadh  e  glideachadh  air  Fionn.  Tra  a  chunnaic  am  Blàr  gu'n  do  thachair  a 
sheise  ris,  dh'  iarr  e  air  a  mhnaoi  a'  ghreideal  a  chur  air  gus  an  rachadh 
casan  Fhinn  a  gharadh,  gu'r  cinnte  gu'n  robh  efuar,  's  an  oidhche  chruaidh, 
reodht'  a  bh'  ann.  Chaidh  a'  ghreideal  a  chur  air  gus  an  robh  i  'na  caoir 
dheirg  ;  's  dh'  iadh  iad  uile  mu  Fhionn  {sin  tra  a  thuirt  e  :  Cha  duine, 
duine'na  aonar),  agus  spàrr  iad  air  a  ghreidil  e gus'n  loisga  chasan  gu  ruig 
nan  sléisdean  !  Bha  e  nis  gun  chômas  suidhe.  Leig  am  Blàr  rochd  gàir'  'as, 
agus  spàrr  e  stol-na-feàla  tromh  chàrn  a  dhà  mhàis  ;  's  bhà  e  'n  sin  gun 
chômas  éirigh  no  suidhe.  Shaoilleis  a'  Bhlàr  gun  robh  e  gun  phlosg  analach, 
's  thilg  e  seachad  's  a  chàil  e. 

Cha  robh  Fionn  riabh  roimhe  'an  gaile  na  bu  mhutha  na  seo,  ach  an  uair 


earthly  projectile  was  meant.  Indra  slew  his  foes  with  a  wheel  taken  from  the  chariot  of 
the  sun. 

6.  So  Thorr  wresties  with  old  âge  in  the  house  of  Utgaard  Loki. 

7.  An  iron  plate  for  baking  oat  cakes. 

8.  This  siory  1  do  not  know. 

9.  This  is  another  article  that  needs  exptanation.  The  ordinary  meaning  is  a  bugle 
enlarged,  but  some  narrators  call  itthe  Hammer  of  Fionn  which  could  be  heard  over  ail 
Ireland.  That  looks  like  thunder. 


198  Fionn's  Enchantment. 

be  heard  in  the  five  fifths  of  Erin.When  the  housetook.  a  resthe  crawled 
out,  dark  dumbly  and  still,  to  the  top  of  a  hill  and  he  blew  the  hornthree 
times.  Ail  this  time  the  other  set  of  the  Feinn  were  tearful  and  sad  in 
search  of  Fionn.  They  left  neither  corner  nor  thought  unsought,  seeking 
himfor  dead.  At  last  when  they  had  given  yielding  and  black  yielding, 
Brown  Diarmaid  '°,  his  sisters'son,  heard  the  horn,  and  if  he  did  it  was 
not  unanswered.  He  knew  that  deadly  need  made  Fionn  sound  the 
horn.  He  understood  that  the  matter  was  ill  and  he  gave  a  word  and  a 
vow  upon  his  sword  that  méat  nor  drink  should  go  over  his  breath  till 
he  should  aid  the  brother  of  his  mother.  He  took  up  his  burden  he  and 
his  lads;  each  straight  was  bent  for  them  over  hill  and  plain  and  though 
il  was  far  away  they  were  not  long  going  there.  Fionn  they  found  in  a 
sad  case,  unable  to  sit  or  rise,  in  the  lee  of  a  bush. 

Diarmaid  asked  what  had  befallen  him.  «  No  matter,  »  said  Fionn, 
and  he  told  him  each  turn  as  it  happened  :  how  the  Yellow  Face  had  slain 
his  lads  and  the  ill  treatment  that  he  had  got  from  him,  and  he  counselled 
him  to  turn  home  before  the  same  should  happen  to  him.  He  was  as  he 
was  at  ail  events.  Diarmaid  vowed  and  said  that  he  would  not  turn  till 
he  took  out  the  shame;  and  without  saying  more  he  betook  him  to  the 
house  ofthe  Face.  In  the  house  was  but  the  woman  baking  and  she 
gave  them  méat  and  drink  and  took  their  taie.  She  told  them  that  the 
Yellow  Face  was  in  the  mountain  chase  and  that  they  had  better  begone 
before  he  came  home  or  that  it  might  happen  to  them  as  it  happened  to 
Fionn.  «  Be  that  as  it  may,  said  Diarmaid,  we  will  not  go  till  we  hâve 
taken  out  the  shame  »  and  they  sat  within.  <>  Stay  till  the  end  then  » 
said  she. 

They  were  but  a  short  time  thus  till  they  heard  clitter  clatter  at  the 
door,  Who  was  there  but  the  Face  and  his  lads  with  a  great  venomous 
toothy  boar  on  his  back.  He  gave  himself  a  little  big  lift  to  shake  off 
the  snow  and  he  shook  the  threshold  and  foundations  and  cried  :  «  I 
smell  the  smell  of  the  stranger  before  me,  wife  !  Whom  hâve  you  hère  to 
night.'*»  She  told  him  Diarmaid  and  his  set  of  lads.  «Out with  your  lads, 
Diarmaid,  to  take  off  cur  loads,»  said  the  Yellow  Face.  Diarmaid  himself 
went  out  and  before  the  Face  had  looked  hither  or  thither  he  slew  the  half 
of  his  lads  and  set  them  heap  on  top  at  the  south  side  of  the  door  opposite 
to  Fionn's  lads.  «  You're  an  ill  guest,  »  said  the  Face.  «  If  you  see  no 
worsefrommebeforedaycomes,  you  need  not  complain,»  said  Diarmaid; 
and  without  more  speech  he  took  in  the  boar.  They  dressed  it  well  and 

10.  In  ail  Fenian  stories  Diarmaid  plays  the  part  of  Launcelot  to  Fionn's  Arthur. 


Fionn's  Enchantmenî.  199 

a  bka  e  eadar  an  t-euradh  's  aimbeairî,  agus  cuimhnichear  e  gu'n  robh  corn- 
nam-fiùth  alge,  's gu'n  cluinnieadh  e  'an  côig  choigean  na  h-Eireann.  'Nuair 
a  ghabh  an  îaigh  gufois,  mhàgair  e mach  gu  dubh-balbh-sàmhach gu  mullach 
cnuic  'us  shéid  e  'n  corn  trï  uairean.  F  ad  an  ama  seo  bha  'chuid  elle  de'n 
Fhéinn  gu  dubhach,  déurach  air  îoir  Fhinn.  Cha  d'  fhàg  iad  cùil  no  cial 
gun  sireadh,  's  iarraidh-mhairbh  aca  air.  Mu  dheireadh  thall,  'nuair  a  thug 
iad  géill  'us  dubh-ghéill,  chuala  Di.irmad  Donn  mac  a  pheathar  an  corn  ;  's 
ma  chuala  cha  bu  rabhadh  gun  fhreagairt.  Bha  fias  aige  gur  h-'eiginn-bhàis 
a  bheireadh  air  Fionn  a  shéideadh.  Thuigegu'n  robh  an  gnothuch  gu  h-olc;'s 
thug  e  bôid  'us  briathar  air  a  chlaidheamh  nach  rachadh  biadh  no  deoch  îhar 
'anail  gus  an  coibhreadh  e  air  bràthair  a  mhàthar.  Thog  e  air  efhéin  's  a 
ghillean,  's  bu  cham  gach  dïreach  leotha  thar  chnoc  us  shloc;  's  ge  b'  fhada 
bhuap'  e,  cha  b'  fhada  ga  ruighinn  iad.  Fhuair  iad  Fionn  'na  dheoiridh 
îruagh  gun  chômas  éirigh  no  suidhe  am  fasgath  tuim.  Dh'  fharraid  Diarmad 
dheth  ciod  a  dh'  fhairich  e.  Is  coma  sin,  osa  Fionn;  's  dh'  innis  e  dha  gach 
car  mar  a  thachair:  mar  a  mharbh  am  Blàr  Suidhe  na  gillean,  agus  an  droch 
ghiullachd  a  fhuair  e  fhéin  bhuaithe;  's  chomhairlich  e  dhàsan  tilleadh  dha- 
chaigh  mu'n  'eireadh  an  cleas  ciadna  dha;  gu'n  robh  esan  mar  a  bhitheadh  e 
cia-dhiùbh.  Bhoidich  'us  bhriathraich  Diarmad  nach  tilleadh  e  gus  an  d'  thu- 
gadh  e  mach  an  aicheamhail;  's  gun  tuilleadh  a  ràdh  thug  e  taigh  a'  Bhlàir 
Bhuidhe  air. 

Cha  robh  's  îaigh  ach  a  bhean  's  i  'fuineadh.  Thug  i  biadh  'us  deoch 
dhaibh  ;  agus  ghabh  i  an  sgial.  Dh'  innis  i  dhaibh  gun  robh  am  Blàr  Buidhe 
's  a  bhéinn-sheilg  's  gu'm  b'  fhèarr  dhaibh  a  bhith  Jalbh  mun  tigeadh  e  dha- 
chaigh,  no  gun  'eireadh  dhaibh  mar  a  dh'  éirich  do  dh-Fionn.  A  roghainn 
b'iodh  dhà,  osa  Diarmad,  ach  cha  'n  fhalbh  s'inn  gus  an  toir  s'inn  a  mach  an 
aicheamhail;  's  shuuih  'iad  a'staigh.  Feith  ri  dheireadh,  ma  ta,  os  ise.  Cha 
robh  iad  ach  goirid  mar  sin  tra  a  dh'  fhairich  iad stuirn-stairn  a'ig  an  dorus. 
Co  bha  siod  ach  am  Blàr  's  a'  ghillean,  's  torc-nimhe  mor  fiaclach  aig  air  a 
mhuin.  Thug  e  togail  bheag  mhôr  air  fhéin  a  chrathradh  an  t-sneachda 
dheth,  s  chu'ir  e  crithfo'n  ursainn  'sfo  shuidheachan  an  taighe!  Ghlaodh  e: 
Tha  mi 'faireachduinn  fàilidh  fharbhalach  romham,  a  bhean;  Co  seo  'th' 
agad  a  nochda?  Dh'  innis  a  bhean  gu'n  robh  Diarmad  's  a  chuid  gillean.  A 
mach  do  ghillean,  a  Dhiarmaid,  a  thoirt  dhiam  na  h-eallaiche,  os  am  Blàr. 
Léum  D'iarmad  e  fhéin  a  mach;  agus  mu'n  d'  fhairich  am  Blàr  thall  no  bhos 
e,  mharbh  e  'n  dama  leth  dhe  ghillean,  s  chuir  e  turrach  iad  air  tao' h-deas 
an  doruis  mu  choinneamh  gillean  Flùnn!  Is  olc  an  t-aoidh  thu,  os  am  Blàr. 
Mur f aie  thu  nas  miosa  na  s'iod  dhiam  mu'n  t'ig  an  latha,  na  b'ith  'gearan, 
osa  Diarmad;  's  gun  tuilleadh  bruidhne,  thug  e  's  taigh  an  tore.  Ghréidh 
iad  an  tore  gu  math  gu  ro  mhath,  's  ghabh  e  fhéin  s  a  ghillean  an  leàr  dheth. 


200  Fionn's  Enchantment. 

right  well  and  he  and  his  lads  took  enough  of  it  :  each  bone  that  they 
picked  bare  they  cast  to  the  Face  and  to  his  lads.  «  You're  an  evil  guest  » 
said  the  Face.  «  If  you  see  no  worse  than  that  from  me  before  the  day 
cornes,  dont  complain,  »  said  Diarmaid,  and  heaskedfor  theappleto  pass 
the  long  winter  night  for  the  Yellow  Face.  The  wife  brought  down  the  apple 
and  the  game  began.  At  the  first  cast  that  Diarmaid  made  he  slew  two 
thatwere  on  the  right  hand  of  the  Face.  «  You  are  an  ill  guest  »  said  the 
Face.  «  If  you  see  no  worse  than  that  from  me  before  the  day  comes^ 
dont  complain,  »  said  Diarmaid.  The  Face  cast  the  apple  backbuthe  did 
no  harm  to  Diarmaid's  lads.  But  Diarmaid  made  the  next  cast  with  the 
apple  and  slew  two  on  the  left  hand  of  the  Face.  And  so  it  went  on 
till  he  had  slain  the  last  of  them  while  the  Face  kept  continually  saying, 
((  You  are  a  bad  guest  »  and  Diarmaid  as  constantly  answered  as  before. 
When  they  were  tired  ofthe  game  of  the  golden  apple,  Diarmaid  said 
to  the  Face  that  they  had  better  wrestle  a  turn  ;  and  if  they  did  the  fight 
did  not  hold  long  before  the  Face  was  on  the  ridge  of  his  back  on  the 
bare  flags  of  the  floor.  «  You're  an  ill  guest  »  said  the  Face  as  he  gave 
a  tortured  grunt.  «  If  you  see  no  worse  from  me  before  day,  dont  com- 
plain «  said  Diarmaid  and  he  bade  the  wife  put  on  the  griddle  for  him 
to  warm  up  the  Face,  for  surely  he  was  cold  newly  corne  from  the  moun- 
tain  chase.  The  griddle  was  made  red-hot  and  Diarmaid  gave  the  Face 
a  lift  and  there  he  was  at  the  next  turn  upon  the  griddle.  «  Oiteag,  oit, 
oit,  ))  said  the  Face  «  Take  it  easy,  said  Diarmaid,  your  yellow  bones 
would  burn  unless  I  helped  you  «  and  he  held  him  on  the  griddle  till  his 
legs  burned  to  the  hips.  Now  the  Face  was  unable  to  sit,  and  swift 
Diarmaid  stuck  the  spit  through  both  his  hams  and  then  he  was  without 
power  to  sit  or  rise  and  he  cast  him  on  his  side  in  the  corner.  When 
he  was  seven  times  tired  of  hearkening  to  the  groanings  of  the  Face^ 
Diarmaid  seized  him  by  the  hands  and  said  «  Death  is  upon  you,  old 
man!  What's  your  erici' 

Death  is  upon  you,  old  man,  and  what's  your  eric?  and  take  ofî  from 
me  the  worth  of  your  game.  »  «  Oh!  Oh!  alas!  said  the  Face,  I  hâve 
no  ransom  but  a  cup  of  balsam  that  is  at  the  foot  of  yonder  rock  and  it 
will  heal  Fionn.  »  When  Diarmaid  heard  of  the  cup  he  staid  to  seek  no 
other  ransom.  It  seemed  to  be  too  long  for  his  uncle  to  be  crouched  at 
the  lee  of  the  bush  and  so  he  went  to  the  cave.  He  laid  his  first  hand 
upon  the  cup  and  off  he  strikes  with  it  to  Fionn.  He  washed  his  wounds 
from  it  three  times.  The  first  time  his  legs  grew  to  the  knees;  the  second 
time  they  grew  to  the  ankles;  and  the  third  time  Fionn  was  unhurt, 


Fionn's  Enchanimeni.  201 

Gach  cnàimh  mara  lomadh  iad,  îhilgeadh  iad  siod  do'n  Bhlàr  's  dh'a  ghil- 
lean.  Is  olc  an  t-aoidh  thu,  os  am  Blàr.  Mur  faic  thu  nas  miosa  na  siod 
dhiatn  mu'n  tig  an  taîha,  na  bith  'gearan,  osa  Diarmad;  's  dh'  iarr  e  an  t- 
ubhala  thoirt  a  nuas  gus  an  oidhch'fhada  gheamhraidh  a  chur  seachad  a' 
Bhlàr-Bhuidhe.  Thug  a'  bean  a  nuas  an  t-ubhal,  agus  thàisich  an  cleas.  Air 
a'  chiad  tilgeadh  a  thug  Diarmad  don  ubhal,  mharbh  e  ditliis  de  na  bh'  air 
laimh-dheis  a'  Bhlàir.  Is  olc  an  t-aoidh  thu,  os  am  Blàr.  Mur  faic  thu  nas 
miosa  na  siod  dhiam  mu'n  tig  an  latha,  na  bith  'gearan,  osa  Diarmad.  Thilg 
am  Blàr  air  'ais  an  t-ubhal,  ach  cha  d'  rinn  e  dochunn  's  a  bith  air  gillean 
Dhiarmaid.  Thug  Diarmad  an  t-ath-thilgeadh  do'n  ubhal  's  mharbh  e  dithis 
de  na  bh'  air  làimbh-chlith  a  Bhlàir  agus  mar  sin  gus  'na  mharbh  e  am  fear 
mu  dheireadh  dhiubh  ;  's  am  Blàr  gun  tàmh  ag  ràdh  :  'sole  an  t-aoidh 
thu  ;  agus  amhuil  sin  Diarmad  'ga  fhreagairt.  Mu  'n  uair  a  bha  iad  sgith 
de  chluith  an  ubhail  oir,  thuirt  Diarmad  ris  a  Bhlàr  gum  b'  fhéarr  dhaibh 
dol  a  chur  car  gleachd.  Chaidh  nafir  a  ghleachd  ;  's  ma  chaidh,  cha  robh  an 
gleachd  fad  air  chumail,  ira  a  bha  'm  Blàr  air  claisneach  a  dhroma  air 
leacan  loma  'n  ùrlair.  Is  olc  an  t-aoidh  thu,  os  am  Blàr,  's  thug  e  cnead 
ghoint'  as!  Mur  faic  thu  nas  miosa  na  siod  dhiam  mun  tig  an  latha,  na  bi 
'gearan,  osa  Diarmad,  's  dh'  iarr  e  air  a'  mhnaoi  a  ghreideal  a  chur  air  gus 
an  rachadh  casan  a  Bhlàir  a  gharadh  gur  cinnte  gun  robh  e  fuar  an  deigh 
tighin  dachaidh  'as  a'  bheinn-sheilg,  Chaidh  a  ghreideal  a  dheanamh  dearg; 
's  thug  Diarmad  îogail  do'n  Bhlàr,  's  bha  e  an  siod  'na  sgug  buidhe  air  a  ghrei- 
dill  Oiteag,  oit,  oit,  os  am  Blàr!  Gabh  air  do  shocair  e,  osa  Diarmad,  crea- 
naidh  do  chnaimhean  buidhe  air  mu'n  cobhair  mis'  ort,  'schùm  e  air  a  ghreidil 
e  gus  'na  loisg  a  chasan  gu  bun  nan  sléisdean  !  Bha  'm  Blàr  a  nise  gun 
chômas  suidhe,  agus  ghrad-spàrr  Diarmad  stob  na-feola  tromh  chorn  a  dhà 
mhàis,  's  bha  e  'n  sin  gun  chômas  éirigh  no  suidhe;  's  thilg  e  air  shlisnich 
'sa'  chùil  e! 

Tra  bha  iad  seachd  sgith  ag  'eisdeachd  oiteagail  a'  Bhlàir,  rug  Diarmad  air 
sprogan  air,  's  thuirt  e  :  Am  bas  air  do  mhuin,  a  bhodaich,  ciod  è  t' 
éirig? 

Am  bas  air  do  mhuin,  a  bhodaich,  ciod  è  t'éirig?  'us  tog  dhiom  brigh  do 
chluith.  Oiteag,  oit  oit  !  as  am  Elàr,  cha'n  'eil  a  dh'  éirig  agams  ,  ach  cuach 
iocshlaint  a  tha  'm  bun  na  creig  ud  thall,  agus  leighisidh  i  Fionn  ! 

'Nuair  a  chuala  Diarmad  mu'n  chuaich,  cha  d' fhuirich  e  ri  tuille  chumhlaid 
iarraidh  bu  ro-fhada  leis  a  bha  bràthair  a  mhàthar  'ga  chuaradh  aig  bun  an 
tuim,  's  chaidh  e  do'n  uamha.  Thugar  a'  chiad  làmh  air  a'chuaich,  's  buai- 
lear  leatha  gu  Fionn.  lonnlaidear  a  cfiréuchdan  aisde  tri  uairean.  A'  chiad 
uair  dh' fhàs  a  chasan  gu  ruignan  glùn;  an  dàrna  h-uair  dh'fhàs  iad  gu 


:o2  Fionn  s  Enchantmenî. 

mig  nan  aobrunn  ;  's  an  treas  iiair  hha  Fionn  gun  cliron,  giin  chiothrom  cho 

beô,  slàn  's  a  bhà  e  riabh! 

Rinn  aon  bhoiseag  do  dh-uisgc  na  cualche  geasan  nan  gillean  a  bhristeadh, 
's  thug  e  am  Blàr  air.  A  chulaidh-thruais,  osa  Diarmad  ris,  boidich  nach 
iomir  thu  tuille  de  gheasan  no  'chleasan  air  an  Fheinn.  Bhoidich  am  Blàr  siod 
'us  ioma  rud  eile  bharrachd,  's  thug  Diarmad  gu  suairce  dha  jhéin  's  dha 
ghillean  an  diol  dh-nisge  na  cuaiche  's  ghabh  iad  an  cead  dheth  chéile.  A 
dheanamh  sgiala  goirid  dheth,  lean  a  chuach  ris  an  Fhéinn  'us  dh' fhàg 
mis'  ac'  il 

Donald  MACPHERSON. 

Instinlees  Cottage,  Dalkeith.  April  27,  1870. 


Note.  —  This  gaelic  has  some  of  the  dialectical  peculiarities  of  Sutherland,  such  as 
os  for  arsa  «  said  »,  cliiith  for  duich  «  play  »;  and  other  peculiarities  common  to  ail 
northern  gaelic  dialects,  such  as  sgial  for  sgeul  «  a  taie  ».  Thèse  are  uniinportant  diffé- 
rences. Hector  MAC  LEAN. 

Ballygrant,  Islay. 


unharmed,  whole  and  alive  as  he  ever  was.  One  palmful  of  the  water  of 
the  cup  was  enough  to  break  the  spells  of  the  lads.  Then  he  went  to 
the  Face  :  <(  Misérable  wretch,  said  he,  swear  thatyou  willnever  play  your 
tricks  or  lay  spells  on  the  Feinn.  »  That  the  Face  swore  and  many 
things  more,  and  Diarmaid  generously  gave  him  and  his  lads  their  fill  of 
water  from  the  cup,  and  then  they  took  leave  of  each  other.  To  make  a 
long  story  short,  the  cup  staid  with  the  Feinn  and  I  left  it  with  them. 

In  al!  the  P'enian  stories  inention  is  made  of  Fionn's  healing  cup  with  which 
he  cured  ail  ills  and  wounds.  It  is  the  same  as  the  Holy  Graal  of  course,  and 
al!  that  has  been  said  about  the  origin  of  that  Myth  applies  to  Fionn's  cup. 
According  to  other  stories,  Fionn's  cup  was  the  hollow  of  his  joined  pahns  held 
as  they  are  used  for  drinking  in  the  wilds.  Whosoever  drank  from  Fionn's  joined 
palms  was  healed.  According  to  Highland  traditions,  the  Campbell  Clan  are 
descended  from  Brown  Diarmaid  and  from  him  take  their  old  names  of  Clann 
Diarmaid  and  Clann  0'  Duibhne,  Many  historical  personnages  bore  the  name  of 
Diarmaid  in  Ireland  and  elsewhere,  but  this  legend  is  enough  to  prove  that 
Fionn,  Diarmaid  and  the  rest  of  the  family  are  as  mythical  as  king  Arthur  and 
his  knights.  They  are  Celtic  heroes  and  beiong  to  comparative  mythologists.  So 

there  I  leave  them. 

J.  F.  CAMPBELL. 


Niddry  Lodge,  Kensington,  London;  July  20,  1870. 


WELSH       PHONOLOGY, 


I  shall  confine  my  remarks  at  présent  to  that  branch  of  my  subject, 
which  has  been  called  «  the  Infection  of  Vowels.  » 

Although  this  term  may  sound  strange  to  the  English  ear,  I  adopt  it 
in  déférence  to  the  high  authority  of  the  Crammalicu  Ccltica  (Gr.  C.^, 
p.  5  and  s.^, . 

Infection  is  the  term  used  to  dénote  those  systematic  mutations  of 
consonants  and  vowels,  which  are,  to  a  great  extent,  peculiar  to  the 
Celtic  tongues  [Gr.  C.^,  p.  38). 

Vocalic,  as  well  as  consonantal  mutations,  hâve  necessarily  engaged 
the  attention  of  native  grammarians.  Accurate  and  comprehensive  (if 
not  exhaustive)  tables  of  them  hâve  been  made.  The  author  of  the 
Grammatica  Celtica  has  explained  the  causes  of  them. 

What  I  propose  is  a  new  classification,  based  upon  their  origin  and 
function.  In  conlrast  to  the  Grammatica  Celtica,  I  shall  base  my  observa- 
tions upon  the  authorized  pronunciation  ofthe  modem  Welsh;  conse- 
quently  I  shall  not  be  particular  in  referring  to  authorities  for  my 
examples. 

There  are  three  kinds  of  vowel  infection  in  the  Welsh  tongue,  and 
they  may  be  denominated  respectively.  —  i  Compensation.  2  Assimi- 
lation. 3  Harmonization.  Thèse  dépend  severally  upon  différent  influences 
and  follow  their  particular  rules. 

Compensation  is  the  modification  of  a  vowel  in  conséquence  of  a 
syllable  being  affixed,  e.  g.  llawr,  lloriau;  twr,  tyrau. 

Assimilation  is  that  kind  of  modification  which  a  vowel  undergoes, 
when  in  the  course  of  etymological  inflection,  it  actually  or  theoreti- 
cally  coalesces  with  another,  and  is  in  conséquence  assimilated  to  that 
other  in  sound,  e.  g.  brych,  brcch  ;  cwn,  cron  :  ffoi,  ffy  ;  angel,  engyl; 
canu  [canodd,,  cenais  (for  ''canasi),  cenaist  for  "canastij. 

Harmonization  is  an  infection  produced  in  certain  vowels  by  the 
proximity  of  certain  others,  e.  g.  cam,  ceri  ;  malu,  nielin  ;  llamu, 
llanwch. 


204  Welsh  Phonology. 

Before  proceeding  to  investigate  the  spécial  rules  applicable  to  each 
kind  of  infection,  I  shall  first  endeavour  to  clear  some  points  which  may 
cause  misapprehension,  and  to  state  a  few  principles  wich  apply  to 
vocalic  infection  in  gênerai. 

There  is  one  point  which  has  been  considerably  mystified  by  the 
contrivance  of  those  who  invented  our  présent  Welsh  orthography. 
I  refer  to  that  arrangement  by  which  two  distinct  vowel  sounds  hâve 
been  represented  by  one  character  y.  This  letter  has  its  proper  sound 
in  the  alphabet,  and  in  the  language  ;  and  the  other  sound  attributed  to 
it  is  properly  represented  by  the  character  u.  The  simplest  way  of 
avoiding  the  perplexity  caused  by  this  arrangement  is  to  ignore  its  exis- 
tence, and  stick  to  the  orthography.  But  since  I  apprehend  that,  in  this 
case,  the  sound  is  the  substance  and  the  written  character  the  shadow, 
I  shall  endeavour  to  clear  the  matter,  without  altering  the  established 
orthography  on  the  one  hand,  and  without  sacrificing  the  substance  to 
the  shadow  on  the  other. 

The  Welsh  sounds  of  /,  u  are  similar  to  the  French  sounds  of  the 
same  letters  ;  y  has  two  sounds  in  Welsh  ;  the  one  like  the  sound  of  the 
French  diphthong  eu,  and  the  other  exactly  like  u  ;  the  former  being 
called  its  proper,  and  the  latter  its  borrowed  sound.  Lhuyd,  in  his 
Archaeologia,  represented  the  borrowed  sound  of  y  by  an  undotted  i. 
This  is  merely  a  mechanical  contrivance,  I  allow,  to  suggest  the  real 
truth  ;  but  I  can  do  no  better  than  adopt  it,  with  this  small  modifica- 
tion; I  shall  use  u  instead  of  /  to  represent  the  borrowed  sound  of  y. 
Moreover,  I  shall  confine  the  use  of  l;,  in  that  capacity,  to  the  examples. 
The  character  u,  therefore,  will,  in  my  examples,  represent  the  letter  y 
with  the  sound  of  u  ;  but  in  the  dissertations  y  and  a  will  always  keep 
their  proper  sound. 

It  may  be  interesting  to  observe  that  the  three  sounds  i,  u,  y,  are 
continually  confounded  together  in  some  parts  of  Wales,  and  especially 
of  South  Wales.  In  Cardiganshire,  the  three  are  commonly  pronounced 
as  i,  80  that  the  phrase  «  Du  yw  dy  dy  di.  »  (Black  is  thy  house)  would 
be  there  sounded  «  Di  hv  di  di  di  ».  To  make  matters  worse,  in  other 
places,  /  is  sometimes  pronounced  u,  e.  g.  Tur  for  tir,  and  sometimes 
y,  e.  g.  Pryfair  for  Prifair;  u  is  pronounced  y,  e.  g.  Rhyfain  for  Rhufain, 
and  y  is  improperly  sounded  u,  e.  g.  dunion  for  dynion. 

Welsh  Grammarians  hâve  enunciated  a  very  arbitrary  rule,  namely  : 
—  that  u  is  absolutely  immutable.  The  fact  is  that  the  sound  u  is  one 
of  the  most  changeable  in  the  language.  It  was  in  order  to  make  their 
theory  consistent  with  fact  that  orthographists  hâve  been  cbliged  to  use 


Welsh  Phonology.  20 5 

)'  to  represent  u,  which  they  hâve  done  in  every  instance  where  the 
Sound  of  the  latter  is  mutable. 

Perhaps  there  is  another  reason  for  using  two  characters  to  represent 
this  one  sound,  viz,  its  double  origin.  This  would  hâve  formed  a  pretty 
strong  reason,  had  it  been  more  clear  and  certain.  The  immutable  u 
seems  to  be  derived.  i).  From  long  u,  e.  g.  funen,  fr.fûnis;  pur,  fr. 
pUrus;  Llun,  fr.  LUna;  2).  From  0  long,  e.  g.  Rlmfain,  fr.  Rcma;ffurf, 
fr.  forma  ;  Sul,  fr.  Soi  ;  pechadur,  fr.  peccator.  The  mutable  u  is  derived; 
—  1).  From  e,  e.  g.  celfjdd,  fr.  celmed  ;  Powjs,  fr.  poues;  rlmch,  fr.  rec\ 
2).  From  /,  e.  g.  p'jg,  fr.  pix\  dusg,  fr.  disco;  S'jch,  fr.  siccus;  Ibfr,  fr. 
liber  ;  pbg,  fr.  plico  ;  rlud,  fr.  rit.  The  numerous  exceptions  to  thèse 
rules  make  them  too  inconstant  to  base  any  theory  upon  them. 

The  following  are  some  of  the  gênerai  laws  which  govern  vowel 
infection. 

I.  It  does  not  extend  to  phrases  like  consonantal  infection  ;  but  is 
confmed  to  single  words,  roots  and  compounds  ;  and  in  the  modem 
language  mostly  to  the  ultima  and  penult  of  those  words.  See  the 
exceptions  under  the  spécial  rules. 

II.  It  is  neither  produced  nor  prevented  by  the  influence  of  any 
consonants. 

III.  The  efïect  précèdes  the  cause.  The  cause  works  backwards.  The 
infected  vowel  therefore  précèdes  the  infectant  power.  See  the  examples 
already  given,  and  the  exceptions  under  Harmonization. 

IV.  Vowels,  in  regard  to  infection,  are  of  three  classes.  In  order  to 
avoid  using  too  many  new  terms,  I  shall  call  them  active,  passive  and 
neuter.  By  «  active  »  vowels  I  understand  those  which,  under  spécial 
circumstances,  produce  infection;  by  <(  passive  »  vowels,  I  mean  those 
which  undergo  infection;  and  by  «neuter m  vowels,  I  mean  those  sounds 
which  are  produced  by  infection.  For  simplicity's  sake  I  shall,  for  the 
présent,  ignore  the  diphthongs. 

Perhaps  the  following  modified  triangle  will  represent  the  system  of 
Welsh  vowels. 

a 

y    e 

0  i 

\v  u 

As  some  vowels  belong  to  more  ihan  one  class,  they  cannot  be  conve- 

niently  distributed  under  différent  orders.   But  taking  them  singly,  we 

may  observe  that  a  is    passive,   /  active,  and  y  neuter  ;  e  and  0  are 


2o6  Welsli  Phonology. 

both   passive  and  neuter  ;   w  is  passive  and  active  ;  and  u  is  active, 

passive  and  neuter. 

Active  :  /.  w.  u. 

Passive  :  a.  e.  o.  w.  u. 

Neuter  :  y.  e.  o.  u. 

More  particularly,  and  with  examples,  a  is  changed  into  e  and  u, 
e.  g.  can,  ceni;  cadarn,  cedurn  (and  ai,  dafad,  defaid); 

e  and  o  are  changed  into  u,  e.  g.  caled,  cehd\  corn,  cjrn  {gosod, 
gesud); 

w  is  clianged  into  y,  e.  g.  bwnt,  bryntion; 

u  is  changed  into  u  and  e,  e.  g.  con,  cynion;  bruch,  brech\ 

i  is  passive  in  briîh,  hraith  and  perhaps  bretivjn  ;  tri,  îryd'jdd  ;  chwi, 
chwychwi;  mi,  myfi,  and  a  few  others. 

We  shall  now  proceed  to  discuss  the  différent  kinds  of  infection 
separately. 

I.   HARMONIZATION. 

This  kind  of  Infection  is  confined  to  the  vowel  a.  It  changes  it  into  e, 
and  takes  place  when  /  follows  in  the  succeeding  syllable,  e.  g.  par,  péri; 
gwan,  gwendid;  gardd,  gerddi.  Exe.  can,  canig;  and  préfixes,  trist, 
aîhrist,  amliw,  anfri,  anwir  (sometimes  enwir  ;  and  prepositional  pronouns, 
ati,  arni,  and  certain  names  and  nicknames.  Mari,  Mali,  Siani,  Cadi.  In 
a  few  instances  o  is  changed  into  e  before  u.  e.  g.  gosod,  ges'jd  ;  camog, 
cameg'jdd. 

The  change  or  infection  is  very  gênerai,  but  not  so  constant,  before 
w,  y  and  the  diphthong  ai.  e.  g.  cd.r,  cerwch  ;  rlian,  rhenwch  ;  carcg, 
cer\>g\  arf,  erfjn;  dafad,  defaid;  can,  cenaist.  Exe.  words  that  hâve  li--, 
as  a  part  of  the  root;  cadw,  manv  ;  préfixes,  adf-jd;  adyn;  irajhvnc, 
anair. 

a  is  not  affected,  when  /  follows  in  the  same  syllable,  in  modem 
Welsh,  e.  g.  rhai,  liai,  bai,  naill,  paid  ;  nor  in  compounds,  e.  g.  rhan- 
dir,  cad-hs,  tal-grjf.  Exe.  cem-lyn. 

Infection  is  originated  only  in  the  penultimate,  but  is  sometimes 
continued  in  the  antepenult,  e.  g.  call,  callineb;  hacli,  bachig-jn.  Thèse 
do  not  change  the  root  vowel  a,  because  the  dissyllable  affixes  incb,  and 
igjn,  throw  it  into  the  antepenult.  Similarly,  verbs  of  the  class  having 
-au  or  -han  in  the  Infinitive,  do  not  change  the  radical  a,  but  change 
the  ci  oftheultima,  e.  g.  casiiau,  cashci,  cashcir;  gwaghau,  gwaghcwch, 
gwagheid.  Only  one  syllable  is  infected,  e.  g.  calan,  calenig;  cadarn, 


Welsli  Plionology.  207 

cadernid;  Exe.  llafar,  llefenvch,  Ueferjdd.  This  ruie  does  not  hold  in 
ancient  and  middle  Welsh. 

Harmonization  works  backwards,  seldom  forwards.  It  is  the  latter 
of  two  vowels  that  infects  the  former,  and  not  the  former  the  latter,  e.  g. 
trigaf,  llinach,  Uithricaf. 

There  seem  to  be  many  rather  obscure,  but  interesting,  exceptions  to 
this  gênerai  rule.  Let  us  notice  a  few. 

In  the  démonstrative  pronouns.  hwnw,  hono,  hywj,  derived  from  hwn, 
hon,  Ivjii,  the  terminations  ))',  0,  y  seem  to  perform  precisely  the  same 
office  ;  they  change  the  idea  of  présence  into  that  of  absence.  It  is  pro- 
bable, therefore,  that  the  three  are  really  the  same  affix,  but  that  the 
inflectional  vowel  is  harmonized  with  that  of  the  root. 

May  not  this  principle  account  also  for  the  différent  forms  in  which 
the  pronominal  part  of  the  prepositional  pronouns  appears  ?  e.  g.  arnaf, 
ataf,  tanaf  ;  imi  ;  ohonof,  îrosof,  trwof,ynof,  rhyngof,  erof;  wrtivjf.  But 
geri'jf  from  gan  appears  against  the  supposition,  and  is  quite  anomalous, 
as  we  hâve  also,  sing.  fem.  ganddi,  but  masc.  ganddo. 

Perhaps  we  may  also  suggest  that  this  law  of  harmonization  may 
account  for  the  différent  terminations  of  Nouns,  formative  und  inflec- 
tional ;  and  for  the  numerous  Infmitive  endings  of  Verbs,  e.  g.  Verbs 
having  0  or  e  in  the  root  or  penult  as  tor,  med,  agor,  or  w  after  the 
root,  as  meddw,  take  i  rather  than  u  as  their  Infmitive  endings,  e.  g.  tori, 
medi,  agori,  meddwi  (cf.  Latin,  -ibilis,  -ab'disj. 

There  is  a  class  of  words  in  Welsh,  ending  in  two  consonants,  the 
latter  of  which  is  l,  n,  or  r.  From  ancient  orthography  it  appears  that 
thèse  two  consonants  were  originally  separated  by  a  short  vowel,  and 
the  vulgar  pronunciation  still  adhères  to  that  orthography.  Now,  the 
vowel  supplied  is  always  either  the  same  as  that  of  the  root,  or  nearly 
related  to  it.  e.  g.  cafan,  casgal,  gwadan\  chwedel,  eger  ;  rhigil,  migin; 
dog'jn,  gogor,  pobol  ;  budur  ;  gwjd-jn,  llyfjr.  The  reason  for  dropping  this 
short  vowel  is,  that  it  is  elided  in  the  course  of  inflection,  e.  g.  cafnaa, 
casgUad,  gwadnu,  dnvedleiia,  egrach,  rhiglo,  mignedd,  dognedd,  gogrynu, 
pobloedd,  budreddi,  gwydnach,  llyfrau.  Exe.  ainul  and  amai 

Although  i  changes  a  preceding  a  into  e  there  is  no  infectional  power 
that  can  change  e  into  a,  e.  g.  medi,  medaf,  medom,  There  is  no  disin- 
fecting  power.  Exe.  lleidr,  lladron;  neidr,  nadrodd;  gwraig,  gwragedd; 
chwain,  chwanen. 

The  same  remarks  will  apply  to  j  as  to  ;,  e.  g.  adar,  aderjn  ;  llanerch, 
lleri'jrch;  nant,  nentjdd;  iacli,  ieckjd;  cadarn,  cedjrn-,  aîul,  et'J  \  aro$, 
epjs'y  caru,  cerjm,  cerjch,  cerunt. 


2o8  Welsh  Phonology. 

In  the  case  of  w,  the  harmonization  is  more  uncertain,  and  takes 
place  only  in  Verbs,  and  that  not  quite  constant,  e.  g.  barnwr,  camvr  ; 
cadw;  but  cenwch,  cenvch,  in  préférence  to  canwch,  canrch  ;  and  canwn 
or  cenwn;  carwn  or  cerwn  optionally. 

The  influence  of  the  diphthong  ai  is  more  constant,  especially  in 
Nouns;  —  e.  g.  car,  ceraint;  dafad,  defaid;  arall,  eraill;  in  Verbs, 
taflu,  teflais;  caru,  ceraist;  amlhau,  amlheaist.  Exe.  Cdrai,givanaidd,  carrai. 

It  is  remarkable  that  e  has  no  influence  on  the  foregoing  vowel  ; 
although  ai  is  its  équivalent  as  aw  is  the  équivalent  of  o.  We  bave  a 
great  number  of  double  forms  oscillating  between  ai  and  e,  e.  g.  dar- 
llain,  darllen;  ychain,  ychen;  and  in  most  parts  of  Wales  both  ai  and  au, 
when  suffixes,  are  pronounced  e,  e.  g.  pêne,  dyrned,  for  penau,  dyrnaid. 

The  diphthong  ae  is  in  a  few  cases  infected  :  saer  maen  ;  seiri  meini. 

We  shall  now  consider  the  second  kind  of  Infection. 

II.  ASSIMILATION. 

Assimilation  afïects  certain  vowels  in  the  course  of  the  inflection  of 
différent  parts  of  speech.  Itis  as  wide  in  its  influence,  as  Harmonization, 
and  at  the  same  time  more  obscure  in  its  rationale,  and  more  impor- 
tant in  its  functions,  than  that  délicate  kind  of  infection. 
The  mutations  produced  by  assimilation  are  the  following: 

g.  bran,  train;  dafad,  defaid  ; 

g.  bardd,  beirdd  ;  iar,  ieir  ; 

g.  cadarn,  ced'jrn  ;  alarch,  ebrch  ; 

g.  caled,  celud;  bachgen,  bechg'jn. 

g.  pared,  parwududd. 

g.  corn,  cjrn  ;  gosod,  ges\jd;  ffoi,fy,  aros,  erus  ; 

g.  bor,  ber;  soch,  sech  ;  trydudd,  trydedd  ; 

g.  asgwrn,  esgurn; 

g.  llwm,  llom  ;  crwn,  cron; 

g.  gadael,  gedu. 

The  function  of  the  modification  a  -  ai  is  to  form  the  plural  of  nouns, 
and,  in  a  few  instances,  the  Fut.  Ind.  3  p.  sing.  of  verbs  e.  g.  sefJl,  saf, 
saif.  The  change  of  a  into  ei  serves  the  same  purpose;  e.  g.  Hall,  lleill; 
dal,  deil.  The  modification  a  -  y  forms  the  plural  of  nouns  and  adjec- 
tives,  as  above;  e  -y  also  forms  the  plural  of  nouns  and  adjectives  as 
above,  in  one  instance  comparison,  e.  g.  Un,  lun,  and  derivatives  from 
ancient  forms,  and  from  cognate  languages  :  e.  g.  celmed,  celfodd  ;  e  - 
^vy  in  dérivation,  EglwMS,  fr.  ecclesia  ;  cwur,  fr.  cera  ;  ffrwun,  fr.  frenum  ; 


a  ml 

0   ai;  —  e. 

— 

ei;  —  e. 

— 

u  ;  —  e. 

e 

u;   —  e. 

— 

wu? —  e. 

0 

y;  ~  e. 

y 

e;  -  e. 

w 

u?;  —  e. 

-~ 

0;  —  e. 

ae 

u.^;  —  e. 

Welsh  Phonology.  209 

0  -  u  forms  the  plural  of  nouns,  and  the  future  of  verbs  as  above  ;  u  - 
e  distinguishes  the  féminine  from  the  masculine  of  adjectives;  w  -  u 
shows  the  plural  in  one  instance  as  above  ;  w  -  0  \s  a.  common  sign  of 
gender  inflection,  and  ae  -  y  is  an  exceptional  formative  of  the  future. 
There  are  other  anomalous  mutations,  such  as,  w  -  ei:  dwfr,  deifr;  a  - 
0 :  cadw,  gwarchod;  a-  y  -  e:  bach;  bychan,  hechan;  lied,  llydan;  oe  -  ae  : 
troed,  traed;  i-w:  ci,  cwn;  u-ue:  cudd,  amgueddfa;  wu-o,  cwjd,  codi 
(cLcyfjd,  cyfodf);  oe-wu:  croen,  cnvjn. 

Some  of  thèse  changes  may  be  accounted  for  upon  the  principle,  that 
internai  inflections  are  produced  by  the  absorption  of  external  suffixes, 
and  the  rest  are  presumed  to  be  theoretically  effected  by  the  same  cause. 

To  illustrate  this  theory  we  will  consider  a  few  instances  of  vowel 
transposition.  From  Maria  we  hâve  M  air,  where  we  observe  the  /  of 
the  original  termination  transposed  into  the  body  of  the  word.  Similarly, 
in  the  first  and  second  persons  singular  of  the  past  tense,  active  voice, 
the  /  of  the  pronominal  termination  seems  to  be  absorbed  by  the  sign 
as  of  the  tense,  e.  g.  cerais,  ceraist,  are  equal  to  *caresi,  "caresti,  and 
appear  to  have^been  formed  from  them.  So  also  the  féminine 
braith  is  derived  from  the  masculine  brith  through  the  intermediate 
theoretical  form  *britha  (and  tri,  tria  ^=^  tair);  A  being  the  Îndo-Celtic 
sign  of  the  féminine.  Upon  the  same  principle,  the  masc.  brwnt  becomes 
{brwnta,  brawnt  =)  fem.  bront  ;  and,  brjch  {brycha,  brandi  =)  fem.  brech. 
We  hâve  many  plurals  formed  by  the  affix  /;,  e.  g.  trefi,  celfi,  blwuddi, 
llw'jni,  which  is  generally  joined  to  stems  in  e  and  its  cognate  wy  as  will  be 
observed.  This  will  accountîorp\ura\ssuchassaint, bychain;geifr,  heirdd. 

The  case  of  a,  e,  0  changing  to  u,  to  form  plurals  of  nouns  and 
adjectives,  and  the  future  of  verbs,  is  not  so  easily  explained.  Thèse 
mutations  are  exceedingly  numerous  in  the  language,  and  must  be  accep- 
ted  as  facts  however  they  may  be  explained.  They  are  produced  by 
dérivation  as  well  as  inflection.  Dérivation  of  sounds  is  a  kind  of  deve- 
lopement,  rather  than  any  amalgamation.  Perhaps  some  of  thèse  inflec- 
tions were  produced  by  analogy  from  developement.  e.  g.  rec  has 
developed  into  rhjch,  and  from  analogy  gwared  is  inflected  into  gwerjd; 
caled  into  cehd;  and  cadwen,  cadwjni^ 

Perhaps  it  will  be  objected  that  my  Harmonization  should  not  be 
separated  from  my  Assimilation,  since  both  may  be  accounted  for  upon 
the  same  principle,  i.  e.  the  amalgamation  ofvowels;  e.  g.  ceni  may 
hâve  undergone  an  intermediate  change  by  the  insertion  of  i  in  the  stem 
to  harmonize  with  the  /  of  the  affix,  thus,  can  -  caini  =  ceni;  car-  cai- 
raint  =  ceraint. 


210  Welsh  Phonology. 

But,  not  to  distinguish  between  an  inserted  and  a  transposed  /,  1 
base  my  classification  upon  the  fonctions  of  the  différent  changes,  and 
maintain  that  the  observance  of  this  classification  tends  to  simplify  the 
rules  for  inflection.  It  is  assimilation  alone  that  has  anything  to  do  with 
inflection  ;  while  harmonization  and  compensation  are  merely  euphonie. 
The  rules  for  the  declension  of  nouns  and  verbs  are  numerous  and  com- 
plicate  enough  in  Welsh,  but  grammarians  hâve  unwittingly  made  them 
much  more  so  by  confounding  the  différent  kinds  of  consonant  und 
vowel  inflections. 

III.   COMPENSATION. 

Although  this  kind  of  mutation  is  very  common  and  gênerai  through- 
out  the  language,  it  is  the  simplest  of  the  three,  and  may  be  disposed 
of  in  a  very  few  lines. 

Compensation,  like  harmonization,  has  nothing  to  do  with  etymology, 
and  that  distinguishes  it  from  assimilation.  It  does  not  dépend  on  the 
quality  or  class  of  the  succeeding  vowel,  and  that  distinguishes  it  from 
harmonization. 

Compensation  takes  place  in  the  vowels  w,  ii,  and  most  of  the 
diphthongs. 

w  is  infected  by  compensation  into  y,  e.  g.  iwr,  lyrau;  dwrn,  dyrmvr; 
dwjr,  dyfroedd;lln'gr,  llygredig;twm,  tryimxf;  twrf,  tyrfii;  tnvrn,  îrymhau, 
cwsg,  cysgwn. 

Exe.  cwrw,  bwrw,  bwgan,  Iwlen,  bwriaf. 

Final  w  is  not  considered  to  form  a  separate  syllable,  as  it  coalesces 
with  affixes,  e.  g.  marw,  mawol,  garw,  ganvach. 

In  some  instances  compensation  is  double,  e.  g.  cwlwm,  cylymu;s]rmbn'l, 
symbylir;  cwmwl,  cymylog;  inwdwl,  mydylau. 

u  is  infected  by  compensation  into  y,  e.  g.  d'jn,  dynion;  cruf,  cryfach; 
prm,  prynu  ;  hn,  Ay/iuC?)  —  and  into  o,  e.  g.  un,  onen  ;  ci»//,  collen. 

The  changes  of  the  diphthongs  are  numerous  and  constant;  ai  becomes 
e/,  e.  g.  trai^  irelo;  liai,  lleiaf;  bai,  beiau;  au  becomes  eu,  e.  g.  cnau, 
cneuen  ;  gau,  geudeb  ;  eau,  ceubren;  ceudwll;  hau,  heuodd;  aw  becomes  o, 
e.  g.  brawd,  broder;  anffawd,anffodion;  llawd,  dodi  ;  tnawl,  moli\  nawdd, 
noddfa. 

Exe.  cnawdol,  gwawdio,  cawgiau. 

John  Peter. 
Bala,  North  Wales. 


ÉTUDE    PHONÉTIQUE 


SUR    LE    DIALECTE    BRETON    DE    VANNES. 


(deuxième  article  '.) 


Le  vannetais  a  dans  les  trois  mots  suivants  un  /  qui  manque  dans  le 
dialecte  de  Léon. 

136.  Ugent,  «  vingt  »  (Troude,  Lag.);  —  en  vannetais  uigent 
(Troude),  huiguênnt  (Larm.),  uîgent  (C\\k\.;  Guillome,  Gramm.,  p.  27, 
écrit  toutefois  uéguend).  Cet  /,  conservé  par  le  vieil  irlandais  fichet,Tpar  le 
latin  viginti,  le  grec  ei-Ax-i,  elV.oct,  le  sanscrit  vïçati,  a  disparu  dans  les 
documents  gallois  les  plus  anciens,  où  l'on  trouve  uceinî,  mais  on  ren- 
contre le  comique  igons  (Gr.  C.  2,  p.  319;  Ebel,  Beitr.,  I,  432-,  II,  161; 
Cuno,  Beitr.,  IV,  105). 

137.  Mouarenn,  «  mure;  »  —  en  vannetais  mouwrenn  (Troude),  mou- 
yarenn  (Larm.),  mouyarenn  (Châl.);  gallois  moderne  mwyar,  comique 
moyar.  Le  latin  morum,  le  grec  [j.cpcv  ne  contiennent  pas  d'r,  mais,  malgré 
leur  ressemblance,  les  mots  néo-celtiques  ne  peuvent  être  issus  de  ces 
mots  latin  et  grec  ;  les  lois  du  vocalisme  s'y  opposent.  L'o  bref  primitif 
donne  en  armoricain,  0,  e,  eu  {Gr.  C.  ^,  p.  90-91). 

138.  Goanv,  «hiver;»  —  en  vannetais  gouian  (Troude,   Larm.), 

1.  Voir  le  numéro  précédent  pp.  85-105. 


2 1 2  Etude  phonétique  sur  le  dialecte  breton  de  Vannes, 

gouihian  (Châl.).  Vi  appartient  à  la  racine  qui  est  ghi  d'où  le  sanscrit 
[gyii-ma,  «  neige,  «  le  grec  -/iwv,  qui  a  le  même  sens,  le  latin  [g]hicms, 
et  avec  renforcement  de  Vi  le  grec  -/sTixa,  le  latin  hîbernus  pour  ghci- 
bernus,  le  vieil  irlandois  gaiin,  le  vieux  gallois  gaein  pour  ga/'m,  le  moyen 
gallois  gajfl/,  le  moyen  comique  goyf  {Gr.  C.^,  p.  37,  104;  Stokes, 
Beitr.,  V,  4$o). 

Au  lieu  de  1'/  léonnais  on  trouve  quelquefois  dans  les  mots  vannetais 
correspondants  un  a  qui,  primitif  ou  non,  paraît  avoir  été  conservé  ou  pro- 
duit par  l'influence  de  la  consonne  suivante,  /  ou  n. 

139.  Silvidiguez,  «  salut,  »  silvidigaez  (Lag.);  —  en  vannetais  salve- 
digueah  (voir  plus  haut  no  34),  dérivé  du  latin  salvus. 

140.  Grignol,  «  grenier;  «  —  en  vannetais  gragnel(Trouàe), granniéle 
(Larm.)  qui  conserve  la  voyelle  primitive  de  la  racine  sanscrite  g^ar,  gr, 
gàr,  d'où  le  latin  granum,  granarium,  en  français  «  grenier  «  (Curtius, 
Gr.  Etym.2,  p.  161). 

141.  Inoui,  «ennuyer,  »  enoeiff  (Lag.);  —  en  vannetais  anneein, 
ehanneein  (Troude),  annaiein,  ehannaiein  (Larm.),  du  français  «ennui  « 
sur  l'étymologie  duquel  on  peut  voir  D\ez  (Wœrterbuch^,  I,  291-292)  et 
Littré  (Dictionnaire,  s.  v.) 

142.  Hini  dans  ann  hini,  «  celui-ci,  »  hon-hini,  «  le  nôtre,  «  pc-hini, 
«  qui,  »  etc.  ;  en  vannetais  hani,  en  moyen  armoricain  hcni,  dont  Ve 
remplace  probablement  un  u  primitif  (Gr.  C.  2,  p.  395). 

Vi  léonnais  a  e  pour  équivalent  dans  un  certain  nombre  de  mots 
vannetais  ;  savoir  : 

i)  Des  infinitifs  de  verbes  qui  ont  en  léonnais  assimilé  leur  voyelle 
radicale  à  la  désinence. 

143.  Birvi,  «  bouillir,  »  birviff  (Lag.),  part,  bcrvct;  —  en  vannetais 
berc^houein  (Troude),  beruein  (Troude,  Larm.,  Châl.);  vieil  irlandais 
bervad,  gallois  moderne  berwi,  latin  fervêre  ;  comparez  fermentum  de  la 
racine  bhar  (Corssen,  Kritische  NachlrcCge,  p.  226-229,  d'accord  avec 
Stokes,  Beitr.,  V,  221);  voir  pourtant  Pott,  Wurzel-Wœrterbuch,  I,  1203. 

144.  Dibri,  «  manger,  «  dibriff(].ag.),  part,  debreî;  —  en  vannetais 
debrein  (Troude),  daibrein  (Larm.,  Châl.);  vieux  gallois  diprim,  «  je 
mange,  »  moyen  comique  diberi  (Voc.'),  plus  tard  debry,  dibry  (Stokes, 
Beitr.,  IV,  393). 

2)  Des  pluriels  qui  en  léonnais  ont  assimilé  la  voyelle  radicale  à  celle 
de  la  désinence. 

145.  Irvi,  «  sillons,  «  pluriel  d'ero;  —  en  vannetais  crri  (Troude), 
arhui  (Larm.  ;  Châl.  admet  irvî);  gallois  moderne  erwau,  pluriel  d'erw. 


Étude  phonétique  sur  le  dialecte  breton  de  Vannes.  2 1  ? 

146.  Biniou,  «  musette,  »  pluriel  de  benvek,  «  outil,  instrument;  «  — 
en  vannetais  benieu  (Troude,  Châl.;  benieu  et  banieu  suivant  Larm.). 

5)  Les  mots  suivants  où  1'/  du  dialecte  de  Léon  est  encore  produit  par 
l'assimilation  de  la  voyelle  radicale  à  celle  d'un  suffixe  ou  du  second 
terme  d'un  composé. 

147.  Milin,  «moulin;  »  —  en  vannetais  melin  (Troude  et  Châl.), 
melein  f'Larm.),  gallois  moderne  et  moyen  comique  melin,  Lagadeuc  dit 
encore  melin.  Les  formes  irlandaises  s'expliquent  par  un  primitif  molina 
(Stokes,  Thr.  Ir.  gi,  p.  xxiv;  cf.  Ir.  gi,  p.  88,  n^yoi  ;  Ebel,  Beitr.,  II, 
163). 

148.  Tignouz,  «  teigneux,  »  tingnous  (Lag.)  ;  —  en  vannetais  tegnous 
(Troude),  teignouss  (Larm.j,  du  français  «  teigneux.  » 

149.  Binniga,  «  bénir,  »  binniguet,  «  béni  »  (Lag.);  —  en  vannetais 
benigein  (Troude),  béniguein  (Larm.),  beniguein  (Châl.),  pour  bennigein  =-- 
bendigein,  du  latin  benedicere  dont  le  c  est  resté  guttural  et  n'est  pas 
changé  en  sifflante.  On  trouve  encore  dans  la  «  Vie  de  sainte  Nonne  ;> 
Ve  de  la  première  syllabe  beniguet  (Gr.  C.  -,  p.  147. 

Ve  vannetais  est  dû  à  l'influence  d'une  spirante  gutturale  qui  suit 
dans  : 

150.  Skuiz,  «fatigué,))  iCU}'z(Lag.);  —  en  vannetais iAuec'/^  fTroude), 
squeh    Larm.),  scueh  (Châl.),  comique  squyh. 

151.  Striz,  «  étroit  ))  (Troude^,  Lag.)  ;  en  vannetais  streih  (Troude), 
streh  (Larm.,  Châl.),  du  latin  strictus. 

I  du  dialecte  de  Léon  devient  ei  dans  quelques  cas. 

152.  Histrenn,  «  huitre;  ))  en  vannetais  eistrenn  (Troude,  Larm.,  Châl.), 
moyen  comique  estren  (^Voc.).  Ce  mot  ne  peut  venir  du  latin  ostreum 
puisque  Vo  primitif  donne  en  armoricain  0,  e,  eu  {Gr.  C.  ^,  p.  90-91).  Il 
s'explique  par  un  primitif  ostrin-,  la  voyelle  initiale  s'est  assimilée  plus  ou 
moins  complètement  à  la  voyelle  du  suffixe;  comparez  147  milin. 

153.  Nij,  «  vol,  »  nig  (Lag.);  —  en  vannetais  neij  (Troude),  neige 
(Larm.),  neig  ou  nége  (Châl.);  comique  nyge,  «  voler.  )) 

1 54.  Evit,  «  pour  ))  (Troude  et  Lag.);  —  en  vannetais  aveit  (Guillome, 
Gramm.,  p.  90). 

/  léonnais  est  remplacé  par  u  dans  : 

155.  Sizun,  «semaine»  (Troude  et  Lag.);  —  en  vannetais  suhun 
(Troude  et  Châl.},  suhunn  (Larm.)  du  latin  septimana.  Vu  vannetais  est 
dû  à  une  assimilation  qui  ne  se  trouve  ni  dans  le  moyen  comique  seithum 


2  14  Étude  phonétique  sur  le  dialecte  breton  de  Vannes. 

(Foc),  ni  dans  le  comique  plus  récent  scithun;  vieil  irlandais  sechtmaine 

«  septimanag  »  (Gr.  C.  2,  p.  68). 

§4-0. 

0  léonnais  est  remplacé  par  a  dans  les  exemples  que  voici  où  il  est 
suivi  d'une  nasale. 

156.  Kompez  ou  kampoez,  «  uni,  »  compoes  (Lag.);  —  en  vannetais 
kampoez  (Troude),  campouiss  (Larm.)^  campouizein,  «  unir  »  (Châl.); 
comique  compas,  gallois  moderne  cymhwys.  Le  préfixe  est  com,  par  con- 
séquent la  voyelle  la  plus  ancienne  est  celle  de  Léon. 

157.  -omp,  suffixe  de  la  première  personne  du  pluriel  du  présent  de 
l'indicatif;  —  en  vannetais  amb.  La  forme  primitive  paraît  avoir  été  um, 
om  (Gr.  C.,  p.  $00;  cf.  Guillome,  Gramm.,  p.  57^  63,  64,  66,  69,  73, 
8$,  87;  le  verbe  bout,  m  être,  »  conserve  l'o  :  omb,  p.  45,  77).  —  amb 
est  aussi  employé  comme  pronom  suffixe  de  la  première  personne  du 
pluriel  (Guillome,  Gramm.,  p.  30). 

Zeuss  a  établi  que  l'o  primitif  fléchit  en  e  dans  un  grand  nombre  de 
mots  bretons  (^Gr.  C.  ^,  p.  90-91).  Cet  affaiblissement  de  la  voyelle 
originaire  s'est  produit  en  vannetais  dans  le  mot  suivant  qui  y  a  échappé 
dans  le  dialecte  de  Léon  : 

158.  Kostezenn,  «  côte,  «  costenn  et  costcz  (Lag.);  —  en  vannetais 
kestad  (Troude),  questatt  (Larm..),  qucstat  (Châl.),  du  latin  costa.  On  dit 
aussi  en  vannetais  costeen  (Larm.)  ou  costene  (Châl.). 

Il  y  a  d'autres  mots  qui  ont  un  0  dans  le  dialecte  de  Léon  et  un  e  en 
vannetais;  mais  il  n'est  pas  toujours  aisé  de  déterminer  quelle  est  dans 
ces  mots  la  voyelle  primitive  : 

1 59.  Garmelod,  «  fresaie,  »  gannelot  (Lepel.);  —  en  vannetais,  gar- 
melet  (Lepel.),  garmeled  (Troude,  Le  Gon.). 

160.  Hogen,  «mais,  «  hoguen  (Lag.);  —  en  y  annelâis  h  ego  n  (Troude); 
moyen  gallois  hagen  {Gr.  C,  p.  694). 

161.  Omp,  «  nous,  «  pronom  suffixe  de  la  première  personne  du 
pluriel;  —  en  vannetais  emp  (Troude),  emb  (Guillome),  concurremment 
avec  omh  et  amb.  L'ancien  irlandais  a  deux  formes  de  ce  pronom  :  i"m, 
2"  un,  qui  fléchit  quelquefois  en  on  (Gr,  C.  ^,  p.  333,  cf.  p.  14).  Nous 
rattachons  à  la  première  le  léonnais  imp,  à  la  seconde  le  léonnais  omp,  et 
les  trois  formes  vannetaises  omp,  amb,  emp  (Gr.  C.  2,  p.  90-91);  toute- 
fois on  pourrait  considérer  omp  vannetais  comme  une  forme  affaiblie  du 
léonnais  imp,  en  vieil  irlandais  in  (Gr.  C.  2,  p.  88-89). 


Étude  phonétique  sur  le  dialecte  breton  de  Vannes.  2 1 5 

162.  Fron,  (.(  narine,  »  froan  (Lag.);  —  en  vannetah  frenn  (Troude), 
frênn  (Larm. ),  fren  (Châl.);  en  gallois  moderne /ro^n.  La  forme  galloise 
et  celle  que  donne  Lag.  établissent  que  Vn  final  de  ce  mot  a  d'abord  été 
précédé  de  la  diphthongue  oe,  oa  dont  ici  l'origine  n'est  pas  connue  d'une 
manière  certaine  (Gr.  C.  *,  p.  103);  comparez  :  iMe  moyen  comique 
fruc  (Voc)  et  le  comique  moderne  frig  qui  permettent  de  supposer  la 
suppression  d'une  gutturale,  2°  l'ancien  irlandais  srôn  (Gr.  C.  ',  p.  23, 
80;  Stokes,  Beitr.,  V,  223  ;  Curtius,  Gr.  Etym.  ',  p.  317)  qui  se  dirait 
par  conséquent  pour  srocn  (?). 

Vo  du  dialecte  de  Léon  devient  ou  dans  les  mots  suivants  : 

163.  Heor,  «  ancre;  »  —  en  vannetais  heour,  hiour  (Troude),  chour 
(Larm.),  iour  (Châl.);  —  on  dit  aussi  en  vannetais  heor,  hivor  (Troude), 
ivor  (Larm.).  En  gallois  moderne  angor,  du  latin  anchora. 

164.  Zo,  «  est,  ))  en  moyen  armoricain  so  (Stokes,  Middk  breton  irrcg. 
Verbs,  p.  8-9);  en  vannetais  zou  (Troude,  Larm.). 

16  j.  Kroc'henn,  «  peau,»  crochenn  (Lag.); — en  vannetais  kourc'henn 
(Troude)  crohenn,  crouhenn  (Larm.),  courehen,  crouhen  (Châl.);  on  dit 
aussi  crohenn  (Larm.);  vieil  irlandais  crocenn,  moyen  gallois  croen,  croyn 
{Gr.  C.  ^,  p.  103),  comique  crochen,  croin  (Voc). 

166.  Ho,  «  leur;  »  —  en  vannetais  ou  (Troude,  Larm.;  Guillome, 
Gramm.,  p.  34,  écrit  hou  et  ou);  vieil  irlandais  an,  a;  moyen  gallois  eu, 
comique  aga{Gr.  C.^,  p.  337,  340,  387). 

167.  Ho,  hoc'h,  «  votre,  »  plus  anciennement  hoz  (Gr.  C.  ^,  p.  58$); 
—  en  vannetais  hou,  houç  (Troude,  Larm.,  Châl.;  Guillome,  Gramm., 
p.  34);  moyen  gallois  an'ch ,  moderne  gallois  eich,  ych,  comique  as 
(Gr.C.^  p.  385). 

168.  Eno,  «là»  (Troude  et  Lag.);  —  en  vannetais  inou  (Larm.), 
ancien  et  moderne  gallois  yno,  comique  y  no  (Gr.  C.,  p.  574). 

169.  Enor,  ((  honneur  «  (Troude,  Lag.);  —  en  vannetais  inourr 
(Larm.),  inour  (Châl.),  du  latin  honor. 

On  remarquera  qu'il  s'est  produit  ici  un  phénomène  contraire  à  celui 
qui  s'observe  souvent  quand  du  dialecte  de  Léon  on  passe  à  ceux  de 
Cornouailles  et  de  Tréguier.  Souvent  en  effet  Vou  de  Léon  devient  0  en 
Cornouailles  et  dans  le  pays  de  Tréguier,  exemple  kaloun,  «  cœur,  «  kalon; 
doun,  «  profond,  «  don;  dourn,  «  main,  »  dorn.  Nous  parlerons  plus 
en  détail  de  cette  substitution  de  lettre  en  nous  occupant  de  la  voyelle  ou. 

0  du  dialecte  de  Léon  devient  u  dans  les  mots  suivants  du  dialecte  de 
Vannes. 


2 16  Étude  phonétique  sur  le  dialecte  breton  de  Vannes. 

170.  Solier,  «  galetas,  »  solyer,  alias  suler  (Lag.);  —  en  vannetais 
suler  (Troude),  sukrr  (Larm.);  moyen  comique  soler  (Voc);  du  latin 
solarium  (Jr.  g/.,  p.  91,  n"  740). 

171.  Lano,  «marée,  plei-ne  mer;  »  — en  vannetais  Ivm  (Troude), 
lannhué  (Larm.);  gallois  moderne  llanw,  ce  mot  paraît  un  dérivé  de 
l'adjectif  leun,  «  plein,  »  primitivement  lân  forme  qu'on  trouve  en  ancien 
irlandais  (Gr.  C.  ^,  p.  16,  93,  94,  96).  En  irlandais  moderne  lâin  mara 
veut  dire  «  marée,  haute  mer,  «  et  lain,  «  plénitude,  »  est  un  substantif 
dérivé  de  l'adjectif  lân,  «  plein.  »  Llanw  serait  une  exception  à  la  règle 
qui  veut  que,  dans  les  dérivés,  l'a  soit  représenté  en  gallois  par  ô  (Gr. 
C.  2,  p.  94).  La  consonne  du  suffixe  de  lano,  lanu,  llanw,  aurait  été 
primitivement  un  m  ou  un  i»  (Gr.  C,  p.  751-734,  788;  75 1-752,  802). 

172.  Maro,  «  mort;  «  —  en  vannetais  maru  (Troude),  nmrhuc  (Larm. 
et  Châl,  qui  écrit  aussi  marv);  dans  Lag.  et  la  Vie  de  sainte  Nonne,  on  lit 
maru;  en  vieil  irlandais  marb,  moyen  gallois  maru  (Ebel.  Bcitr.,  II,  163  ; 
Gr.  C.2,  p.  84,  129;  Mise,  p.  33). 

173.  Hano,  «  nom,  »  en  moyen  armoricain  hanu  ou  hanv  (Lag.);  — 
en  vannetais  /za/zu  (Troude),  hanhue  (Larm.),  haniiein,  «nommer  «  (Châl.), 
vieil  irlandais  ainm,  moyen  gallois  enw  (Gr.  C.  2,  p.  4,  41,  115  ;  Ir.  gi, 
p.  1 1  $,  no  991  ;  Gl.  Taur.,  p.  68;  Ebel,  Beitr.,  II,  1 5  $,  1 59).  La  voyelle 
finale  0,  u  tient  lieu  d'un  m,  lettre  initiale  d'un"  suffixe  qu'on  ne  peut 
restituer  que  par  hypothèse. 

174.  Ero,  «  sillon,  »  en  moyen  armoricain  erv  ou  eru  (Lag.);  —  en 
vannetais  eru  (Troude),  arliuë  (Darm.),  erii  (Châl,);  moyen  comique 
eru,  gallois  moderne  env,  moyen  irlandais  arba  (Ir.  gl.,  p.  119,  n»  1038; 
Gr.  C.  2,  p.  131). 

175.  Baro,  «  barbe,  »  barff  (Lag.);  —  en  vannetais  baru,  barhu 
(Troude),  barhuï  (Larm.),  barix  (Châl.);  moyen  comique  barj,  barefCVoc); 
gallois  moderne  barf,  du  latin  barba  (Ebel,  Beitr.,  II,  141). 

176.  Treo,  «  église  succursale,  »  treff(Lag.y,  —  en  vannetais  trclm 
(Troude),  trxhu  (Larmery)  du  gaulois  treba  dâus  A-treba-tcs;  comparez  le 
vieil  irlandais  atreba,  «  habitant,  possident  «  ;  vieil  armoricain  trcb, 
moyen  gallois  et  gallois  moderne  trcf,  comique  trev,  «  village,  habitation  «; 
irlandais  moderne  treabh,  «tribu»,  gaélique  treubh,  même  sens  :  on  croit 
reconnaître  le  même  mot  dans  le  latin  tribus  et  le  gothique  thaurp  {Gr.  C.*, 
p.  10,  137;  Gluck,  K.  N.,  39-40;  Ir.  gi,  p.  68,  n"  315), 

177.  Hon,  tior,  hol,  «  notre;  »  hon  (Lag);  —  en  vannetais,  hun,  hur 
(Troude,  Larm.,  Guillome,  Gramni.,  p.  34);  en  vieux  gallois  et  en  cor- 
nique  an,  en  vieil  irlandais  arn  {Gr.  C.  ^,  p.  336,  384). 

178.  Beo,  «  vif,  »  beu  ou  bev  (Lag.);  —  en  vannetais  biliuc  (Larm.); 


Étude  phonétique  sur  le  dialecte  breton  de  Vannes.  2 1 7 

vieil  irlandais  biu,  vieux  gallois  biu,  gallois  moderne  biw,  sanscrit  g'tvas, 
gothique  quius,  grec  |iio;  pour  "h'.Fcç,  latin  vivus  (Gr.  C.  ^^  p.  35,  37, 
Ebel,  Beitr.,  II,  160;  Curtius,  Cr.  Etym.  ^,  p.  418). 

L'o  du  dialecte  de  Léon  qui  devient  u  en  vannetais  est  un  0  primitif 
dans  l'article  170,  un  b  ou  un  m  dans  les  articles  171-176,  un  v  dans 
l'article  178.  Dans  l'article  177  la  voyelle  primitive  paraît  être  un  a. 

A  l'o  léonnais,  ut  correspond  en  vannetais  dans  : 

179.  Tomm,  «  chaud;  »  lomder,  «  chaleur,  »  autrefois  fofm,  toemder 
(Lag.);  — en  vannetais  tuemm,  tuemder  (Troude);  tuêm,  tuemdér  (Larm.); 
tuem,  tuemdér  (Châl.);  gallois  moyen  et  moderne  twym,  moyen  comique 
toim  (Koc).  Dans  ce  mot  une  longue  a  précédé  la  diphthongue,  c'est  un 
ê.  Or  \'è  devient  régulièrement  en  breton  armoricain  oe,  oa,  dialecte  de 
Léon,  oe,  ue,  dialecte  de  Vannes.  Le  dialecte  de  Vannes  a  conservé  pour 
ce  mot  une  forme  plus  complète  que  le  léonnais  moderne  (Gr.  C.  2, 
p.  97-98,  cf.  W.  Stokes,  Beitr.,  IV,  390  et  V,  226,  qui  compare  avec 
raison  le  thème  sanscrit  îigma-,  a  chaud,  »  «  chaleur  »  et  le  vieil  irlan- 
dais tinwii  pour  'tigmi.  La  longue  ê  serait  donc  issue  d'/  par  allongement 
compensatif.  L'irlandais  timmi  est  le  dernier  mot  du  vers  32,  p.  72  du 
recueil  intitulé  Goidilicà): 

§  $.  OU  voyelle. 

Ou  léonnais  devient  e  dans  : 

180.  Louzaoucn,  «  herbe,  légume,  »  lousouenn  (Lag.),  —  en  vanne- 
tais lezeuenn  (Troude),  lézeuenn  (Larm.),  lézéiienn  (Châl.).  La  voyelle 
primitive  est  un  u  qu'on  trouve  dans  l'irlandais  et  le  gaélique  lus,  et  dans 
le  pluriel  comique  lusow.  Cet  u  s'est  affaibli  en  y  dans  le  gallois  moderne 
llysiaw,  en  e  dans  le  moyen  comique  les  {Voc)  et  dans  le  mot  vannetais 
que  nous  venons  de  citer  (/r.  gi,  p.  98,  no  810;  Gl.  Taur.,  p.  59;  cf. 
Gr.  C.  ^  p.  92). 

Ou  devient  eu  en  vannetais  dans  : 

181.  Dour,  «  eau  »  (Troude,  Lag.);  —  en  vannetais  deur  (Troude), 
deure  (Larm.,  Châl.);  gaulois  dubron,  vieux  gallois  dubr,  gallois  moderne 
dwfr,  moyen  comique  dur  ou  dour  (^Voc),  vieil  irlandais  dobur,  dobhar 
{Gr.  es  p.  109,  136,  138;  Ir.  gi,  p.  70-71,  n°  375;  Thr.  !r.  gl, 
p.  xvj;  Gluck,  K.  N.,  p.  51), 

182.  Soûl,  «  chaume,  »  soulenn  (Lag.);  —  en  vannetais  seul  (Troude), 
seule  (Larm.,  Châl.);  gallois  moderne  sofl,  comique  soûl,  le  même  mot 


2 1 8  Élude  phonétique  sur  le  dialecte  breton  de  Vannes. 

que  le  latin  stipula,  comparez  le  grec  gtéç^vs;  (W.  Stokes,  Middlc  breton 

irregular  Verbs,  p.  9  note  :  Curtius,  Gr.  Etym.^,  p.  194). 

183.  Deoa,  «  droit,  »  opposé  à  gauche;  en  vannetais  deeu  (Troude), 
déheu  (Larm.,  Châl.);  vieux  gallois  dehou,  gallois  moderne  deheu,  moyen 
comique  dehou  (Gr.  C.^,  p.  107,  12$). 

184,  Poultr,  «  poussière  »  (Troude  et  Lag.);  —  en  vannetais  peudr 
(Troude),  peudre  (Larm.,  Châl.),  du  vieux  français  «  pouldre»  aujour- 
d'hui «  poudre  »  qui  vient  lui-même  du  latin  pnlverem. 

18$,  Ankou,  «  mort,  »  ancou  (Lag.);  en  vannetais  ankeu  (Troude), 
anqueu  (Larm.),  «  fantôme;  »  comique  ancow;  moyen  gallois  angheu, 
gallois  moderne  angeu,  «  mort  »  {Gr.  C.  ^,  p.  107,  129). 

186.  Genou,  «bouche,»  guenou  (Lag.);  —  en  vannetais  geneu 
(Troude),  guineu  (Châl.);  gaulois  Genava,  moyen  comique  gf/j^a  (Voc), 
vieux  gallois,  genou,  gallois  moderne  ge/jau  (Ebel,  Beitr.,  II,  167;  Gluck, 
K.  N.,  p.  104-107;  Gr.  C.  2,  p.  129,  1^1). 

187.  Bizou,  «  bague;  «  —  en  vannetais  t/zeu (Troude),  biseu (Larm.), 
bizeii  (Châl.);  moyen  comique  bisou  (Foc),  comique  moderne  besaw, 
gallois  moderne  byson  (en  français  «  bijou  «);  dérivé  de  bis,  ((  doigt  » 
ÇGr.  C.  ^,  p.  1 109;  Diez,  Wœrterbuch^,  II,  219;  Stokes,  Beitr.,  V,  446), 

188.  Goulou,  «lumière,  »  golou  (Lag.);  — en  vannetais  go/ru  (Troude, 
Larm.),  vieux  gallois  lou-ber,  «  splendor,  «  di-goleu-ichetic,  «  ad  lucem 
editus;  »  gallois  moderne  go/eu,  moyen  comique  golou  {Vocj,  comique 
moderne  golow  {Gr.  C.  ^,  p.  106). 

189.  Argourou,  «dot»  (Troude,  Lag.);  — en  vannetais  argouvreu 
(Troude,  Larm.,  Châl.). 

190.  -ou  suffixe  du  pluriel;  —  en  vannetais  eu;  vieux  gallois  ou, 
moyen  gallois  eu,  gallois  moderne  au;  moyen  comique  ou,  comique  mo- 
derne ow  {Gr.  C.  2,  p.  284-288),  Dans  ce  suffixe,  comme  dans  les  mots 
qui  précèdent,  sauf  181  Dour  184  Poultr  et  peut-être  182  Sonl ,  ou 
léonnais,  eu  vannetais  remplacent  une  ancienne  diphthongue,  la  diph- 
thongue  gauloise  ou  que  les  inscriptions  romaines  écrivent  ordinairement 
au{Gr.  C.  2,  p.  32,  106), 

Dans  les  mots  suivants  le  vannetais  a  conservé  Vo  armoricain  qui  se 
trouve  dans  le  Catholicon  de  Lagadeuc  et  que  le  dialecte  moderne  de 
Léon  a  changé  en  ou. 

191.  Hou-man,  «celle-ci,»  houn-nez,  «celle-là;»  homan,  honnez 
(Lagadeuc,  cf.  Gr.  C.  *,  p.  297);  en  vannetais  ho-nan,  hon-nec'h  (Troude), 
hona,  honeh  (Larm.,  Châl.),  hon  en  gallois  et  en  comique  {Gr.  C.  ^  394- 
39$)- 


Étude  phonétique  sur  le  dialecte  breton  de  Vannes.  219 

192.  Goulaouen,  «chandelle,»  golou,  «lumière»  (Lag.);  —  en 
vannetais  goleuenn  (Troude,  Larm.),  comparez  le  vieux  gallois  digoleui- 
cheîic  «  dilucidatus  »  (Gr.  C.  ^,  p.  106). 

193.  Kourreza,  «corroyer,  »  corrccu,  «courroie»  (Lag.);  —  en 
vannetais  korreein  (Troude),  correyein  (Larm.),  corréein  (Châl.),  du  fran- 
çais «  corroyer  »  dont  l'étymologie  est  discutée  par  Diez,  Wœrterbuch  2, 

I,  34?- 

194.  Choum,  «  rester,  »  chom  (Lag.);  —  en  vannetais  chom  (Troude); 
chomm  (Larm),  chommein  (Châl.),  du  français  «  chômer  »  dont  l'étymo- 
logie a  été  étudiée  par  Diez,  Wœrterbuch  ^,  I,  loi. 

195.  Kounnar,  «  rage,  »  connar  (Lag.);  —  en  vannetais  konnar 
(Troude),  gonare  (Larm.),  connar  (Q\k\.)\  en  gallois  moderne  cynddaredd, 
de  ovn  autrefois  cun  pluriel  de  ci  «  chien  »  {Gr.  C.  '•,  p.  293)  et  de 
daredd,  «  bruit  tumultueux  »  dérivé  de  dâr,  «  bruit;  »  Vu,  w  du  premier 
terme  s'est  changé  en  y  suivant  la  règle  (Gr.  C.  ^,  p.  92).  L'armoricain 
connar  vient  de  con,  pluriel  de  ci,  «  chien  »  {Gr.  C.  ^,  p.  294)  et  de  dâr, 
«  bruit  »  qui  n'existe  plus  en  armoricain  que  dans  ce  composé  et  dont  le 
d  initial  s'est  assimilé  à  Vn  précédent. 

196.  Ploum,  «  plomb,»  plom  (Lag.);  —  en  vannetais  plomm  (Troude, 
Larm.),  plom  (Châl.);  comique  plom,  gallois  moderne  plwm.  Le  mot  cor- 
nique  et  le  mot  gallois  vient  du  htm  plumbum.  L'armoricain /)/om  peut  être 
issu  ou  du  français  «  plomb  »  ou  du  mot  latin  {Gr.  C.  2,  p.  91-93). 

Le  mot  suivant  a  dans  Lagadeuc  un  ou  qui  tient  lieu  d'un  0  primitif 
que  le  vannetais  a  gardé. 

197.  Koulm,  «  pigeon,  couhn  (Lag.);  —  en  vannetais  klomm  (Troude), 
clomm  (Larm.),  clom  (Châl.),  avec  une  métathèse  de  1'/;  vieil  irlandais 
colum,  comique  colom,  gallois  moderne  colomen,  en  latin  columba  (Stokes, 
Ir.  gi,  p.  56,  n"  203). 

Voici  encore  un  mot  écrit  avec  on  par  Lag.;  cet  ou  conservé  en  léon- 
nais  moderne  provient  d'un  u  primitif  et  il  est  devenu  0  en  vannetais. 

198.  Houc'h,  «  porc,  »  houch  (Lag.);  —  en  vannetais /îoc'/i  (Troude), 
hoh  (Larm.,  Châl.,  au  mot  morhoh),  moyen  gallois  hucc,  gallois  moderne 
hwch,  moyen  comique  hoch.  Vh  initial  remplace  un  s  primitif.  Comparez 
le  latin  sus,  le  grec  Iq,  le  sanscrit  sùkara  {Gr.  C.  ',  p.  91  ;  Ebel,  Beitr., 

II,  175;  W.  Stokes,  Ir.  gl.,  p.  118;  Curtius,  Gr.  Etym.  2,  p.  343). 

En  voici  deux  où  les  deux  dialectes  armoricains  sont  dans  le  même 
rapport  sans  que  nous  sachions  quelle  est  la  lettre  primitive. 

199.  Tousek,  «  crapaud,  »  toucec  (Lag.);  —  en  vannetais  tosek 
(Troude),  tossêg  (Larm.). 


220  Étude  phonétique  sur  le  dialecte  breton  de  Vannes. 

200.  Poulc^henn,  «  mèche,  »  pourchenn  (Lag.);  —  en  vannetais  por- 
c'henn  (Troude),  porhenn  (Larm.,  Châl.). 

Dans  celui-ci  Vou  léonnais  devient  indifféremment  soit  o  soit  eu  en 
vannetais;  mais  la  forme  écrite  avec  o  est  commune  au  vannetais  et  aux 
autres  dialectes  armoricains  ;  la  forme  en  eu  est  seule  propre  au  vanne- 
tais. 

201.  Doun,  «profond;  »  —  en  vannetais  don  (Troude),  deun  (Le 
Gon.),  donne,  deune  (Larm.),  done,  deiïne  (Châl.,  qui  écrit  aussi  donne); 
gaulois  dumnos,  «  profond  »,  vieil  irlandais  domun,  a  le  monde  »,  moyen 
gallois  dwfyn,  gallois  moderne  dwfn,  «  profond  »,  comique  down,  «  pro- 
fond ».  Ce  mot  est  écrit  don  dans  la  «  vie  de  sainte  Nonne  j)  {Gr,  C.  ^, 
p.  1 14,  1 16;  Gluck,  K.  N.,  p.  68-74;  Cuno,  Beitr.,  IV,  220). 

Ou  léonnais  devient  u  en  vannetais  dans  : 

202.  Aotrou,  i(  seigneur,  monsieur  »,  autrou  (Lag.);  —  en  vannetais 
eutru  (Larm.,  Châl.).  Troude  et  Le  Gon.  écrivent  eutreu,  êutrêu;  en  moyen 
comique  altrou,  «  beau-père  »,  gallois  moderne  altraw,  «  parrain  », 
irlandais  moderne  altra,  «  père  nourricier  »,  gaélique  altrach,  «  celui  qui 
nourrit,  élève  ».  De  la  racine  al  qui  se  trouve  dans  le  latin  ah,  le  gothique 
alan,  l'allemand  ait  {Gr.  C.^,  p.  108,  note.  Cf.  l'anglais  lord,  Max  Mul- 
1er,  Lectures^,  p.  126). 

Ou  léonnais  devient  aussi  u  en  vannetais  dans  les  diphthongues  iou, 
oue,  oui,  dont  il  sera  question  plus  loin. 

§6.  U. 

Vu  léonnais  se  conserve  ordinairement  en  vannetais.  Cependant  il 
devient  ê  dans  : 

205,  Bruzuna,  «  émietter;  »  —  en  vannetais  brec'honcin  (Troude), 
berhonenein  (Larm.),  brchonnein  (Châl.),  morzeel  (Châl.). 

U  devient  0  dans  le  même  mot  et  dans  : 

204.  Muzel,  «  museau,  »  musell  (Lag.);  —  en  vannetais  moje,  morzell 
(Troude),  moge,  morzell  (Larm.).  L'o  est  la  lettre  primitive,  car  ce  mot 
n'est  autre  que  le  bas-latin  morscllus  diminutif  de  morsus  (Diez,  Wœrîcr- 
buch  ^,  I,  287;  Ducange,  edit.  Henschel,  IV,  551). 

U  devient  /  dans  : 

205.  Lugernuz,  k  brillant;  »  lugerni,  «  briller,  »  luguacrniff  (Lag.);— 
en  vannetais  ligernuz,  Ungernuz,  ligcrncin  (Troude),  ligucrnuss,  ligncrncin, 
linguêrnein  (Larm.,  qui  admet  aussi  higucrncin  ;  Châl.  ne  donne  que 
luguernein  et  luguernus),  gallois  moderne  Uygorn,   «lampe,»  moyen 


Ëtude  phonétiejue  sur  le  dialecte  breton  de  Vannes.  22 1 

comique  liigarn  {Voc),  même  sens.  La  forme  liiacharn  du  vieil  irlandais 
(Gr.  C,  p.  23)  s'explique  par  un  thème  plus  ancien  lôcarno  dont  l'ô  est 
devenu  ua  en  irlandais,  u  en  comique  et  en  armoricain  suivant  la  règle 
{Gr.  C.  2,  p.  22,  99-100).  Vy  gallois  s'explique  par  un  u  bref,  celui  du 
latin  lucerna  (Gr.  C.  ^,  p.  92),  1'/  vannetais  par  l'w  long  d'un  hypothétique 
liicerno  (sur  /  =  ù  voir  Gr.  C.  2,  p.  100). 

La  conclusion  de  cette  partie  de  notre  travail  sera  celle  que  nous  avons 
annoncée.  Quand  la  voyelle  vannetaise  est  différente  de  celle  du  dialecte 
de  Léon,  cela  tient  ordinairement  à  l'une  ou  à  l'autre  des  trois  causes 
suivantes  :  1°  le  dialecte  de  Vannes  a  conservé  une  voyelle  ancienne  que 
le  léonnais  a  modifiée;  2"  la  voyelle  vannetaise  a  subi  l'influence  de  la 
consonne  qui  suit;  3"  le  dialecte  de  Vannes  a  subi  la  tendance  propre  à 
son  vocalisme  qui  est  de  préférer  la  voyelle  /  ou  une  voyelle  qui  s'en 
rapproche.  De  là  la  substitution  fréquente  de  Ve  à  Va,  de  Vi  à  Ve,  de  \'e 
et  de  Von  à  l'o,  d'eu  et  d'n  à  ou. 

H.  d'Arbois  de  Jubainville. 


SAINTE  TRYPHINE  ET  HIRLANDE. 


Il  me  semble  qu'on  n'a  pas  encore  remarqué  la  ressemblance  qui  existe 
entre  le  Mystère  Breton  de  «  Sainte  Tryphine  et  le  roi  Arthur  '  •»  et 
l'histoire  de  la  duchesse  Hirlande  de  Bretagne  telle  que  l'a  racontée 
le  Père  René  de  Ceriziers  ^  dans  son  livre  les  Trois  Estais  de  l'Innocence, 
souvent  réimprimé  depuis  1640  ?. 

Cette  histoire  est  racontée  par  Ceriziers  avec  de  grands  dévelop- 
pements, et  dans  un  style  alambiqué.  La  voici  en  résumé  : 


1.  Sainte  Tryphine  et  le  roi  Arthur,  mystère  Breton  en  deux  journées  et  huit  actes,  tra- 
duit, publié  et  précédé  d'une  introduction  par  F.  M.  Luzel,  texte  revu  et  corrigé  d'après 
d'anciens  manuscrits  par  M.  l'abbé  Henry.  Paris,  Schulz  et  Thuillié,  1863,  in-8°.  Prix 
5  fr. 

2.  Né  a  Nantes  en  1603,  mort  en  1662. 

3.  Je  me  suis  servi  de  l'édition  suivante  :  Les  trois  Estais  de  l'Innocence,  contenant 
l'histoire  de  la  Pucelle  d'Orléans,  ou  l'Innocence  Affligée.  De  Geneviève,  ou  l'Innocence  Reconnue. 
D'Hirlande,  ou  l'Innocence  Couronnée.  Par  le  sieur  de  Ceriziers,  aumônier  du  roi,  à  Paris,  chez 
Estienne  Loyson,  au  Palais,  au  nom  de  Jésus.  M.  DCC.  VI.  Avec  approbation  des  doc- 
teurs. In-8°.  Ce  livre  a  été  traduit  en  Anglais  par  W.  Lower  en  16J4  et  a  été  traduit  en 
allemand  «  par  un  Père  de  la  Société  de  Jésus  »  sous  le  titre  de  Die  Unschuld  in  drey 
unterschidlichen  St£nden.  Dillingen,  1685.  Cf.  J.  Zacher  :  Die  Historié  von  der  Pfalzgrdefin 
Genovefa.  Kœnigsberg,  1860,  pp.  10  et  12.  —  Il  existe  aussi  une  traduction  italienne 
d'Hirlande,  qui  porte  le  titre  suivant  :  L'Irlanda,  ouero  l'Innocenza  Coronata,Del  Signore 
di  Cerisiers,  Limosiniere  del  Rè,  autore  dell'  Innocenza  Riconosciuta.  Tradotta  dalla  lingua 
Francese  nell'  Italiana  dal  Sig.  Capitano  Lodovico  Cadamosto.  Bologna,  Gio.  Batt.  Va- 
glierini;  sans  date,  in-12.  L'avant-propos  de  l'éditeur  nous  apprend  qvie  cette  traduction 
avait  été  précédée  d'une  traduction  italienne  de  «  Geneviève  ou  l'Innocence  reconnue  » 
qui  avait  eu  plusieurs  éditions. 

De  même  que  l'histoire  de  Geneviève,  l'histoire  d'Hirlande  (sous  forme  abrégée)  est 
devenue  livre  populaire  en  Allemagne.  J.  Gœrres  dans  son  livre  Die  Teutschen  Volks- 
biicher  (Heidelberg,  1807)  cite  (p.  146)  une  édition  qui  porte  le  titre  suivant  :  Die  iiher 
die  Bosheit  triumphirende  Unschuld,  das  ist:  Hirlanda  eine  gebohrne  Hcrzogin  von  Britanien, 
jganzerJahre  als  eine  Dienstmagd  nnter  dem  Vick,  nachmalen  u'iedernach  Hofberufen,  doch 
durch  Verlceumdung  Unes  Scinragers  zum  Scheiterhauf  verdanimt,  von  ihrem  Sohn  unbekann- 
ter  Weise  errettet.  Vorgestellt  in  einer  anmuthigen  Historié,  gezogen  aus  des  Herrcn  Renatus 
Cericius  franzœsischer  Geschichte,  au/s  neue  ûbersehen,  vermehrt  und  zum  Drucke  befcerdert 
von  einem  Liehhabcr  der  Historien.  Kœln.  La  bibliothèque  de  Weimar  possède  une  édition 
du  dernier  siècle  dont  le  titre  concorde  avec  celui  que  je  viens  de  citer,  à  cela  près  qu'il 
se  termine  par  les  mots  :  «  Vorgestellt  in  einer  anmuthigen  Historié,  gezogen  aus  einem 
franzœsischen  Geschichtschreiber.  Gedrukt  zu  Kœln  am  Rhein.  »  M.  Karl  Simrock  a  repu- 
blié le  livre  populaire  d'Hirlanda  dans  sa  collection  de  livres  populaires  allemands,  tome 
XII,  pp.  27-82  (Francfort-sur-le-Mein,  1865). 


Sainte  Tr^iphine  et  Hirlande.  22  j 

Le  roi  d'Angleterre  '  est  malade  de  la  lèpre,  et,  d'après  l'avis  d'un 
médecin  juif,  ne  peut  guérir  que  s'il  se  lave  avec  le  sang  d'un  enfant 
de  haute  naissance  non  encore  baptisé  et  s'il  en  mange  le  cœur.  Gérard, 
frère  du  duc  Artus  de  Bretagne,  se  trouve  justement  à  la  cour  du  roi 
Anglais.  Il  sait  que  sa  belle-sœur,  la  femme  du  duc  Artus,  touche  au 
moment  de  sa  délivrance,  que  son  frère  est  absent  et  parti  pour  la 
guerre  avec  le  roi  de  France;  il  prend  la  résolution  de  dérober  l'enfant 
qui  va  naître  et  de  s'en  servir  pour  guérir  le  roi  d'Angleterre.  Il  se 
rend  en  Bretagne  et  corrompt  la  sage-femme  et  la  nourrice.  Hirlande 
donne  le  jour  à  un  fils,  et  comme  elle  est  sans  connaissance  après  les 
douleurs  de  l'accouchement,  la  nourrice  prend  l'enfant  et  s'enfuit,  et  la 
sage-femme  dit  plus  tard  à  la  mère  qu'elle  a  mis  au  monde  un  enfant 
mort. 

La  nourrice  doit  passer  secrètement  en  Angleterre  avec  l'enfant  ; 
mais  elle  tombe  au  pouvoir  d'un  abbé  Bertrand  de  Saint-Malo,  auquel 
un  ange  a  ordonné  de  se  rendre  à  la  côte  et  de  sauver  l'enfant.  Gérard 
reproche  à  la  duchesse  .après  son  accouchement  d'avoir  été  «  homicide 
de  son  fruit  «;  «  il  disait  que  si  elle  eût  eu  autant  d'amour  pour  son 
mari  qu'elle  en  avait  pour  un  certain  gentilhomme  voisin,  elle  n'eût  pas 
si  mal  ménagé  les  espérances  de  sa  maison.»  Une  chambrière,  corrompue 
par  lui,  doit  confier  à  la  duchesse  que  Gérard  a  été  chargé  par  le  duc 
de  la  tuer.  Hirlande  s'enfuit  et  se  réfugie  dans  un  château  de  Nor- 
mandie (f  où  elle  avait  soin  de  tout  le  ménage  de  la  basse-cour.  »  Au 
bout  de  sept  ans,  un  noble  breton,  le  seigneur  d'Olive,  vient  par  hasard 
voir  la  maîtresse  du  château  qui  est  sa  tante,  et  il  reconnaît  la  duchesse 
dans  la  servante.  Hirlande  retourne  auprès 'de  son  mari  et  ils  vivent 
heureux  pendant  sept  ans.  Au  bout  de  ces  sept  ans,  Hirlande  met 
au  jour  une  fille.  '<  Gérard,  voyant  que  la  succession  de  son  frère 
lui  échappait  par  la  naissance  de  cette  héritière,  entreprit  d'en 
rendre  la  conception  suspecte.  »  Il  corrompt  un  chevalier  et  accuse 
la  duchesse  auprès  du  duc  de  liaison  intime  avec  le  seigneur  d'Olive. 
Hirlande  est  condamnée  au  bûcher  si  un  combattant  ne  se  pré- 
sente pour  défendre  son  innocence  et  ne  défait  son  accusateur  en 
combat  singulier.  On  allait  au  jour  fixé  mettre  le  feu  au  bûcher,  quand 
tout  à  coup  un  jeune  chevalier  se  présente,  combat  le  faux  accusa- 
teur,  le  blesse  mortellement,  et,  avant  qu'il  expire,  lui  fait  confesser 


I  Ceriziers  ne  le  nomme  pas.  Il  dit  (p.  208  de  mon  édition)  :  «  Mon  Lecteur,  ne  vous 
estonnez  pas  si  je  vous  cele  son  nom,  je  n'ay  pas  moins  de  honte  que  d'horreur  à  le  sçavoir, 
et  pleust  à  Dieu  que  jamais  il  n'eust  esté  connu  de  l'histoire.»  Le  livre  populaire  allemand 
donne  au  roi  d'Angleterre  le  nom  de  Richard,  le  Mystère  Breton  l'appelle  le  roi  Abacarus. 


2  24  Sainte  Tryphine  et  H  Irlande. 

l'innocence  de  la  duchesse.  Cet  adolescent  est  le  fils  du  duc  et  de  la 
duchesse  auquel  l'abbé  de  Saint-Malo  a  donné  au  baptême  son  propre 
nom  de  Bertrand,  et  qu'il  a  élevé.  Un  ange  a  ordonné  à  l'abbé  d'armer 
son  filleul  et  de  l'envoyer  défendre  sa  propre  mère.  L'adolescent  se  fait 
reconnaître  de  ses  parents  remplis  de  joie  ;  l'abbé  et  la  nourrice  expli- 
quent son  histoire.  On  saisit  le  perfide  Gérard,  on  lui  coupe  pieds  et 
mains,  et  on  le  jette  dans  un  cachot  où  il  meurt  bientôt. 

A  cette  analyse  le  lecteur  du  Mystère  Breton  reconnaît  l'histoire  de 
sainte  Tryphine.  Tryphine  est  une  princesse  d'Irlande',  Ceriziers  ne 
dit  rien  de  l'origine  d'Hirlande,  mais  ce  nom  même  ne  semble  pas  autre 
chose  qu'  «  Irlande  »  ^  Au  duc  Artus  de  Bretagne  3  correspond  dans 
le  Mystère  le  roi  Arthur  de  Bretagne;  à  Gérard,  Kervoura  qui  n'est 
pourtant  pas  comme  Gérard,  frère  d'Artus,  mais  bien  de  Tryphine;  à  l'abbé 
de  Saint-Malo,  l'évêque  de  Saint-Malo;  au  seigneur  d'Olive  qui  découvre 
la  duchesse  chez  sa  tante  en  Normandie,  le  gouverneur  qui  retrouve  la 
reine  chez  sa  tante  la  duchesse  Jean  à  Orléans.  Kervoura  apprend  d'une 
sorcière  que  le  roi  Abacarus  d'Angleterre  guérira  de  la  lèpre  s'il  mange 
la  chair  et  boit  le  sang  d'un  dauphin  âgé  de  six  mois.  Kervoura  détermine 
le  roi  Abacarus  à  inviter  le  roi  Arthur  à  sa  cour.  Pendant  son  absence 
Tryphine  accouche  ;  l'enfant  est  dérobé,  mais  tombe  ainsi  que  sa  nour- 
rice entre  les  mains  de  l'évêque  de  Saint-Malo  auquel  un  ange  avait 
ordonné  de  se  rendre  à  la  côte  et  d'élever  un  enfant  qu'il  y  trouverait 
avec  sa  nourrice.  Kervoura  écrit  d'Irlande  au  roi  Arthur  que  Tryphine 
a  tué  son  enfant  et  machine  contre  la  vie  du  roi.  Arthur  le  croit  et 
prend  la  résolution  de  faire  juger  sa  femme  ;  une  chambrière  qui  a  vent 
de  la  chose,  l'apprend  à  Tryphine  qui  s'enfuit.  Elle  se  rend  à  Orléans, 
et  pendant  six  ans  sert  chez  la  duchesse  Jean,  d'abord  comme  fille  de 
cuisine,  puis  comme  gardeuse  de  vaches  et  de  pourceaux,  et  enfin 
comme  fille  de  chambre.  Dans  le  récit  de  Ceriziers,  Hirlande  unie  de 
nouveau  à  son  mari  passe  avec  lui  sept  heureuses  années,  et  alors  seu- 
lement a  lieu  la  nouvelle  trahison  de  Gérard.  Dans  le  Mystère  c'est  au 
bout  d'un  an  que  Kervoura  trouble  le  bonheur  des  époux  réunis,  après 
que  Tryphine  a  donné  le  jour  à  une  fille.  Soupçonnée   d'adultère  à 


1.  Dans  un  des  prologues  (pp.  222-3)  Tryphine  est  appelée  Islantez  dans  le  texte 
breton  et  Islandaise,  dans  la  traduction  française.  C'est  évidemment  une  erreur  pour 
Irlantez  et  Irlandaise;  cf.  pp.  2  et  5. 

2.  Ceriziers  dit  (p.  183).  «  Hirlande  duchesse  de  Bretagne  (à  la  façon  que  je  conjec- 
ture dans  mon  Avant-propos)...  »  Dans  l'avant-propos  de  mon  édition  je  n'ai  rien  trouvé 
qui  éclaire  ces  paroles. 

3.  Ceriziers  (p.  184)  dit  d'Artus  ;  «  Je  veux  ainsi  nommer  un  inconnu,  puisque  ce 
nom  est  ordinaire  dans  la  maison  de  Bretagne.  » 


Sainte  Tryphine  et  Hirlande.  225 

l'instigation  de  Kervoura,  Tryphine  passe  un  an  au  cachot  et  comparaît 
ensuite  devant  le  parlement  de  Rennes  qui  la  condamne  à  être  déca- 
pitée. Un  ange  apparaît  à  l'évêque  de  Saint-Malo,  et  lui  ordonne  d'équi- 
per en  chevalier  le  jeune  Malouin,  fils  d'Arthur  et  de  Tryphine,  et  de  se 
rendre  avec  lui  à  Rennes.  Ils  arrivent  au  moment  où  Tryphine  va  être 
décapitée.  Le  jeune  Malouin  — ■  qu'il  faut  se  représenter  ici  comme  un 
enfant  d'environ  neuf  ans,  tandis  que  le  Bertrand  de  Ceriziers  en  a 
quinze  '  —  provoque  son  oncle  en  duel  et  le  blesse  mortellement.  Avant 
d'expirer,  Kervoura  avoue  son  crime. 

Le  Mystère,  sinon  dans  sa  rédaction  actuelle,  du  moins  dans  une 
rédaction  antérieure,  est  probablement  plus  ancien  que  le  livre  de  Ceri- 
ziers, et  comme  Ceriziers  est  né  en  Bretagne  (à  Nantes),  il  n'est  pas 
impossible  qu'il  ait  connu  le  Mystère  et  qu'il  en  ait  tiré  l'histoire  d'Hir- 
lande.  D'un  autre  côté  si  l'on  admet  que  le  Mystère  est  de  date  plus  récente, 
son  auteur  aurait  pu  mettre  à  profit  le  livre  très  répandu  de  Ceriziers. 
L'auteur  du  Mystère  et  le  Père  Ceriziers  peuvent  aussi  ne  se  rien  devoir 
l'un  à  l'autre  ;  dans  ce  cas  le  savant  auteur  des  Trois  Estats  de  l'Inno- 
cence aura  mis  à  profit  une  oeuvre  plus  ancienne  qui  nous  est  inconnue  ; 
l'auteur  du  Mystère  en  aura  fait  autant,  ou  aura  peut-être  puisé  à  la 
source  d'une  tradition  orale  répandue  dans  le  peuple. 

Weimar.  Reinhold  Kœhler. 


I.  Dans  un  poème  anglais  un  adolescent  monté  sur  un  cheval  blanc  combat  contre  sir 
Aldingar  qui  a  faussement  accusé  d'adultère  la  reine  Elinor  et  la  sauve  ainsi  du  bûcher. 
Cet  adolescent  est  un  ange  envoyé  de  Dieu  qui  disparaît  immédiatement  après  le 
combat.  On  raconte  également  qu'une  princesse  danoise,  Gunild,  femme  de  l'empereur 
allemand  Henri,  ayant  été  faussement  accusée  d'adultère,  son  accusateur,  homme  vigou- 
reux et  de  haute  taille,  est  vaincu  par  un  enfant  ou  un  nain.  Voyez  Sv.  Grundtvig  :  Danske 
Garnie  Folkeviser  t.  1.  pp.  177  et  seq.  où  M.  Grundtvig  traite  particulièrement  des  femmes 
qui,  innocentes,  ont  été  accusées  d'infidélité,  et  cite  (p.  189)  le  livre  populaire  allemand 
d'Hirlanda. 


TRADITIONS  et  SUPERSTITIONS 


DE    LA    BASSE-BRETAGNE. 


La  Bretagne  conservera  plus  longtemps  qu'on  ne  pense  ses  mœurs, 
ses  coutumes  et  son  langage.  Il  n'en  est  pas  de  même,  hélas!  de  ses 
traditions  qui  disparaissent  avec  une  désolante  rapidité.  Le  moment  est 
venu  de  rechercher  les  derniers  débris  de  ces  naïves  et  poétiques 
légendes  du  passé,  qui  peuvent  fournir  à  l'histoire  de  précieux  éléments. 
Des  écrivains  de  talent  ont,  il  est  vrai,  recueilli  il  y  a  déjà  bien  des 
années  quelques  traditions  bretonnes,  mais  au  lieu  de  les  publier  telles 
qu'on  les  leur  avait  racontées,  ils  les  ont  fait  servir  de  thèmes  à  des 
fantaisies,  fort  gracieuses  sans  doute,  mais  sur  lesquelles  la  critique 
historique  ne  saurait  s'exercer.  Les  renseignements  qui  suivent  sont  de 
simples  notes  de  carnet  recueillies  dans  mes  longues  pérégrinations  à 
travers  la  Bretagne  bretonnante.  Je  les  donne  telles  qu'elles  ont  été 
écrites,  sans  y  joindre  de  commentaires.  C'est  seulement  lorsque  l'on 
sera  parvenu  à  réunir  toutes  les  traditions  existant  encore  chez  les 
peuples  de  race  celtique  qu'il  sera  possible,  en  les  comparant  à  celles 
des  autres  pays,  d'en  tirer  des  déductions  qui,  à  mon  avis,  seraient 
aujourd'hui  prématurées. 

LES  NAINS. 

Les  traditions  les  plus  populaires  de  la  Bretagne  sont  celles  qui  se 
rapportent  aux  Nains.  On  peut  dire  qu'elles  sont  répandues  dans  toutes 
les  communes  où  l'on  parle  le  breton,  mais  ces  êtres  mystérieux  y  sont 
désignés  sous  des  noms  différents  suivant  les  localités.  Ainsi,  dans  les 
départements  du  Finistère  et  du  Morbihan,  on  les  nomme  généralement 
Corrikêt,  pluriel  de  Conik,  diminutif  de  Corr,  «  Nain  '  ;  »  féminin  Cor- 

I.  Corr.,  g.  corre,  1.  nanus.  —  J.  Lagadeuc,  Catholicon. 


Traditions  et  Superstitions  de  la  Basse-Bretagne.  227 

rigan,  «  petite  Naine  »S  pluriel  Corriganed,  et  par  abus,  sur  la  limite  sud 
du  Finistère,  Corniganed,  et  même  Torriganed.  La  forme  féminine  Corri- 
ghez,  pluriel  Corrighczcd,  est  moins  usitée.  Dans  tout  l'ancien  évêché  de 
Tréguier,  dans  le  Haut-Léon  et  dans  une  partie  des  Montagnes-Noires, 
surtout  à  l'est  de  la  ville  de  Châteauneuf-du-Faou,  on  les  appelle  Corran- 
doun  ou  Corrandon  ^,  «  Nain  des  (lieux)  profonds»,  pluriel  Corrandouned 
ou  Corrandoned,  par  abus  Cornandoned  ;  féminin,  Corrandounez  ou 
Corrandonez,  «  Naine  des  (lieux)  profonds  «  ;  pluriel  :  Corrandounezed  ou 
Corrandonezed,  par  abus  Cornandonezed.  On  les  désigne  encore  sous  le 
nom  de  Paotred-ar-zabbat,  «garçons  du  sabbat»,  dans  le  Léon  ?,  et  sous 
celui  de  Boudiked,  dans  une  partie  des  montagnes  d'Are  4.  H  existe, 
tout  près  du  bourg  de  Brennilis,  en  la  commune  de  la  Feuillée  (Finis- 
tère), une  belle  allée  couverte  que  M.  René  de  Kerret  a  achetée  récem- 
ment pour  la  préserver  de  la  destruction  et  que  l'on  nomme  dans  le 
pays  Ty-ar-Boudiked,  maison  des  Nains  s.  Je  ferai  observer  toutefois 
que  le  nom  de  Boudiked  s'applique  dans  d'autres  parties  du  Finistère, 
comme  on  le  verra  plus  loin,  à  une  catégorie  d'Esprits  entièrement 
différents  des  Nains.  J'ajouterai  que  l'on  attribue  assez  souvent  à  ces 
derniers  des  méfaits  que  l'on  doit  mettre  à  la  charge  des  lutins. 

Les  Nains  forment  en  quelque  sorte  la  transition  entre  l'homme  et 
les  êtres  surnaturels.  Comme  lui  ils  naissent  et  meurent  sur  la  terre  où 
"ils  vivent  en  société  sous  l'autorité  d'un  chef  unique.  Ils  sont  conformés 
comme  les  hommes  dont  ils  ne  sont  cependant  que  la  caricature.  En 
effet,  sur  un  corps  noir,  très-petit  et  mal  fait,  ils  portent  une  tête  énorme 
et  hideuse,  mais  ils  sont  doués  d'une  force  sans  limites.  Leurs  demeures 
sont  placées  le  plus  souvent  sous  les  Dolmens  que  l'on  nomme  presque 
partout  en  Basse-Bretagne  Ty-Corriked,  «  maison  des  Nains,  »  ou  Loch- 
Corriganed,  «loge  des  Naines  »,  demeures  qu'ils  balayent  toutes  les  nuits 


1.  Pour  éviter  la  confusion  je  traduis  littéralement  Corrigan  par  Naine  au  lieu  de  le 
traduire  par  le  mot  Fée,  comme  on  le  fait  ordinairement.  Il  y  a  entre  ces  deux  classes 
d'êtres  surnaturels  une  différence  essentielle.  La  Corrigan  est  toujours  une  affreuse  créa- 
ture, tandis  que  la  Fée  est  souvent  douée  d'une  beauté  surhumaine. 

2.  Corrandon,  g.  cornandon,  ou  nain;  1.  antipos,  nanus.  —  J.  Lagadeuc,  Catholicon. 

3.  Cette  dénomination  paraît  mieux  convenir  aux  lutins.  Dans  le  Léon  et  dans  le  pays 
de  Tréguier,  les  traditions  relatives  aux  Nains  ont  disparu  ou  sont  très-altérées.  On  les 
confond  souvent  avec  les  Viltansed  et  avec  d'autres  esprits. 

4.  J'écris  ^rc  et  non  Arrès  ni  Arhés,  comme  on  le  fait  communément,  parce  que  c'est  ainsi 
que  ce  mot  est  écrit  dans  les  titres  du  XV  et  du  XVl''  siècle,  et  parce  que  c'est  ainsi  que 
le  prononcent  les  habitants  de  ces  montagnes. 

5.  Ce  mot  peut  venir  de  Pot,  forme  cornouillaise  de  Paotr  «  garçon,  »  et  dont  le 
diminutif  est  Potik.  Le  pluriel  de  ce  mot,  s'il  était  usité,  serait  Potiked,  et  l'on  dirait 
avec  l'article  ar  Botiked,  comme  l'on  dit  ar  Botred  îles  garçons).  Si  cette  étymologie  était 
admise  Bodiked  ou  Boudiked  signifierait  les  petits  garçons  et  serait  à  peu  près  synonyme 
de  Corriked. 


16 


228  Traditions  et  Superstitions 

avec  le  plus  grand  soin  '.  D'autres  ont  leurs  habitations  dans  les 
cavernes  naturelles,  sous  les  Menhirs  et  sous  les  larges  pierres  plates 
que  l'on  rencontre  fréquemment  dans  les  landes  isolées.  Ils  y  vivent 
dans  la  terre  «  comme  les  lapins  dans  leurs  terriers.  »  On  ne  les  voit 
ordinairement  que  le  soir  sur  la  lisière  des  bois  sombres,  au  milieu  des 
bruyères  désertes  ou  au  sommet  de  rochers  élevés.  Ils  redoutent  le 
froid  et  ne  sortent  guère  de  leurs  demeures  souterraines  pendant  l'hiver. 
Un  refrain  que  l'on  chante  souvent  en  berçant  les  enfants  mentionne 
cette  habitude  : 

Bin,  ban,  Coniganan,  Bin,  ban,  Naine, 

Pelec'h  e  moc'h  epad  ar  goan  ?  Où  es-tu  pendant  l'hiver  ' 

—  'Ban  un  toullic,  'ban  an  douar  —  Dans  un  petit  trou,  dans  la  terre,       | 
Da  gortoz  an  amzer  douar.  Pour  attendre  le  temps  tiède. 

Quoique  la  plupart  des  Nains  se  tiennent  pendant  le  jour  à  distance 
des  lieux  habités,  il  en  est  un  bon  nombre  qui  ont  des  rapports  directs 
avec  certaines  personnes  dont  ils  réclament  au  besoin  les  services;  et, 
dans  ces  circonstances,  ils  leur  adressent  toujours  la  parole  en  vers  ou 
plutôt  en  bouts-rimés.  Plusieurs  même,  abandonnant  ceux  de  leur  race, 
viennent  s'établir  au  milieu  des  hommes  dont  ils  adoptent  plus  ou  moins 
imparfaitement  les  mœurs.  Quelques  uns  se  marient  parmi  eux  et 
apprennent  souvent  un  métier.  Mais  d'autres,  ne  pouvant  vaincre  leur 
nature  rebelle  à  la  civilisation,  gardent,  tout  en  vivant  dans  les  villes  et 
dans  les  bourgs,  une  grande  partie  des  coutumes  de  leur  nation.  Dans 
tous  les  cas,  ils  conservent  toujours,  dans  leur  nouvelle  condition, 
certains  traits  caractéristiques  qui  permettent  de  les  reconnaître  à 
première  vue. 

Voilà  par  quels  côtés  imparfaits  les  Nains  se  rapprochent  de  l'huma- 
nité. Ils  s'en  éloignent  par  des  facultés  qu'ils  tiennent  d'un  pouvoir 
occulte  et  qui  sont  une  sorte  de  compensation  à  leur  infériorité  physique. 
Ainsi,  ils  ont  le  pouvoir  de  se  rendre  invisibles,  ils  comprennent  le 
langage  des  oiseaux;  paiens  et  sorciers  eux-mêmes,  ils  sont  constamment 
en  rapport  avec  les  sorcières  de  race  humaine,  et  c'est  par  leur  inter- 
médiaire qu'elles  possèdent  l'art  des  enchantements  et  de  la  divination. 


I.  D'après  dom  Le  Pelletier  (Did.  breton-français,  verbo  Liac'h),  ces  monuments  étaient 
désignés  dans  l'évêché  de  Léon,  au  commencement  du  XVIII^'  siècle,  sous  le  nom  de 
Liac'h  ou  Leac'h.  Quelques  habitants  des  communes  d'Argol  et  de  Trégarvan  (arrond.  de 
Châteaulin,  Finistère)  les  appellent  encore  aujourd'hui  Liaven  (en  trois  syllabes),  et  l'on 
trouve  assez  fréquemment  dans  ces  communes  le  nom  de  Parc  Liaven  et  de  Coareni  Liaven 
appliqué  à  des  pièces  de  terre  qui  renferment  un  de  ces  monuments.  Pour  la  signification 
des  mots  Liac'h  et  Liaven,  voir  Owen  Pughe's  Welsh  and  English  Did.,  verb.  Llech  et 
Llechfaen.  Dans  les  communes  que  je  viens  de  citer,  les  Dolmens  sont  aussi  appelés  Dol- 
ar-C'horriket,  «table  des  Nains». 


de  la  Basse-Bretagne.  229 

Les  Nains  ont  parfaitement  conscience  de  la  supériorité  physique  des 
hommes  sur  eux.  Ils  en  ressentent  une  jalousie  extrême  qui  se  traduit 
par  des  vexations  de  toutes  sortes  qu'ils  font  éprouver  à  ceux  que  le 
hasard  fait  tomber  entre  leurs  mains,  ou  qui  ont  le  malheur  d'exciter 
leur  rancune.  Celui  qui  veut  se  venger  d'un  ennemi  peut  se  rendre  le 
soir  près  de  la  demeure  d'une  famille  de  Nains,  et  là,  exposer  à  haute 
voix  ses  griefs.  Les  Nains,  engeance  maudite  dont  le  seul  plaisir  est  de 
faire  le  mal,  s'empresseront  de  répondre  à  son  appel,  et  la  personne 
dénoncée  ne  tardera  pas  à  ressentir  les  effets  de  ce  pacte.  Une  seule 
chose  les  effraie  et  les  met  en  fuite,  sans  qu'on  en  puisse  exphquer  la 
cause.  C'est  la  petite  fourche  de  bois  dont  les  cultivateurs  se  servent 
pour  nettoyer  le  soc  de  leur  charrue  du  fumier  et  de  la  terre  qui  s'y 
attachent  et  que  l'on  nomme  Carspren  dans  le  Léon,  Caspren  en  Cor- 
nouaille  et  Capren  dans  le  pays  de  Vannes  '.  Cet  instrument  porte  aussi 
en  Bretagne  le  nom  de  Baz-an-Arar,  bâton  de  la  charrue.  Ils  joignent  à 
leurs  malices  et  à  leurs  actes  de  cruauté  un  raffinement  de  sarcasme  et 
d'ironie  qui  dénote  la  joie  qu'ils  éprouvent  à  tourmenter  les  hommes. 
S'ils  sont  assez  heureux  pour  attirer  dans  leurs  rondes  infernales  un 
voyageur  imprudent,  ils  lui  laisseront  un  moyen  d'en  sortir.  Mais 
comme  ce  moyen  est  une  énigme  à  deviner,  il  arrivera  que  leur  victime 
succombera  presque  toujours.  On  les  verra  parfois  la  nuit  labourer  un 
champ  avec  tant  de  soin  qu'il  semble  qu'après  le  travail  il  n'y  ait  plus 
qu'à  y  semer  le  grain,  mais  le  lendemain  toute  trace  de   culture  aura 

I .  Lorsque  l'on  n'avait  en  Bretagne  que  des  charrues  très-courtes  à  un  seul  manche  ter- 
miné par  une  fourche  à  son  extrémité  libre,  le  Carspren  était  fixé  à  ce  manche,  à  portée 
de  la  main  du  laboureur  qui  pouvait  s'en  servir  lui-même  pour  nettoyer  le  soc,  et  au 
besoin  pour  aiguillonner  les  bœufs.  Le  Carspren  de  bois  est  aujourd'hui  remplacé  presque 
partout  par  une  petite  fourche  de  fer  qui  est  ordinairement  manœuvrée  par  un  enfant.  Le 
Carspren,  ou  Baz-an-Arar,  qui  met  l'homme  à  l'abri  des  malices  des  Nains,  le  protège 
également  contre  les  entreprises  de  tous  les  Esprits  malfaisants,  à  quelque  catégorie  qu'ils 
appartiennent.  Aussi,  en  Cornouailles^  lorsque  plusieurs  personnes  doivent  se  rendre  le 
soir  à  une  «  veillée  de  mort  »,  le  garçon  de  ferme  a-t-il  soin  de  prendre  en  sortant  le 
Carspren,  ordinairement  placé  derrière  la  porte  de  la  maison.  Muni  de  cette  sauvegarde, 
il  se  met  hardiment  en  route  en  disant  à  ses  compagnons  :  «  Nous  n'avons  rien  à  craindre 
maintenant,  le  bâton  de  la  charrue  est  avec  nous,  n  Les  chevaux  sont  souvent  tourmentés 
pendant  la  nuit  par  une  sorte  de  lutin  appelé  Boudik,  dont  il  sera  question  plus  loin.  Il 
suffit,  pour  les  garantir  contre  ses  attaques,  de  placer  le  soir  le  Carspren  dans  leur  râtelier. 
On  ne  doit  jamais  frapper  un  animal  du  Carspren,  car  les  blessures  qu'il  occasionne  sont 
mortelles,  ou  ne  guérissent  que  très-lentement.  Il  est  bien  difficile  d'émettre  une  opinion 
sur  l'origine  de  cette  croyance  à  la  vertu  du  Carspren.  Si  cet  instrument  était  fait  d'une 
essence  de  bois  particulière,  on  pourrait  à  la  rigueur  supposer  que  sa  vertu  réside  dans 
cette  essence  de  bois.  Mais  il  n'en  est  rien  ;  car  on  fait  indifféremmient  des  Carspren  en 
saule,  en  noisetier,  en  châtaignier,  etc.  Cette  croyance  n'aurait-elle  pas  pris  son  origine 
dans  cette  idée  morale  que,  par  une  permission  divine,  l'homme  occupé  d'un  travail  indis- 
pensable à  son  existence,  tel  que  celui  de  la  culture  de  la  terre,  ne  pourrait  être  inquiété 
par  l'Esprit  du  mal  ?  Dans  cette  hypothèse,  l'idée  de  protection  attachée  primitivement  à 
l'œuvre  elle-même  aurait  fini  par  s'appliquer  à  l'un  des  instruments  servant  à  l'accom- 
plir. 


230  Traditions  et  Siiperstitions 

disparu.  S'il  leur  arrive,  dans  un  moment  de  joyeuse  humeur,  de  rendre 
un  service  à  un  honnête  homme,  ce  service  ne  sera  jamais  complet  ;  la 
griffe  du  diable  y  apparaîtra  presque  toujours.  Je  dois  dire  cependant 
qu'ils  sont  très-accessibles  à  la  vanité  et  que  l'on  peut,  en  les  flattant, 
en  tirer  quelques  services.  Il  suffit,  par  exemple,  de  se  rendre  près  de 
leurs  tanières,  et  d'implorer  humblement  de  leur  bienveillance,  soit  une 
charrue,  soit  une  paire  de  bœufs,  ou  toute  autre  chose  dont  on  peut 
avoir  besoin,  pour  qu'ils  s'empressent  de  mettre  ce  qu'ils  possèdent  à 
la  disposition  de  la  personne  qui  a  recours  à  eux.  On  est  sûr  de  trouver 
le  lendemain  matin  à  sa  porte  l'objet  demandé.  Mais  il  faut  le  leur  rendre 
avant  le  coucher  du  soleil,  ou  l'on  s'expose  aux  plus  grands  malheurs. 
Une  de  leurs  habitudes  est  d'enlever  les  enfants  dans  leurs  berceaux  et 
de  mettre  à  leur  place  leurs  affreux  rejetons,  dans  l'espoir  d'améliorer 
leur  race  et  de  faire  dégénérer  celle  des  hommes.  Le  pouvoir  qu'ils  ont 
de  se  rendre  invisibles  leur  permet  de  vivre  sans  travail,  car  ils  pénètrent 
partout,  dans  les  foires,  dans  les  maisons,  et  prennent  tout  ce  qui  est  à 
leur  convenance.  Aussi  se  nourrissent-ils  comme  des  «  rois  »  et  sont- 
ils  vêtus  comme  des  «  princes.  » 

L'origine  des  Nains  est  complètement  inconnue,  mais  l'opinion  géné- 
rale en  Bretagne,  en  raison  de  leur  propension  au  mal,  est  qu'ils  sont 
les  suppôts  du  diable,  et  que  c'est  de  lui  qu'ils  tiennent  leurs  facultés 
surnaturelles.  Un  couplet  d'une  chanson  que  j'ai  recueilli  dans  la  com- 
mune du  Trévoux  (Finistère),  et  que  l'on  chante  en  dansant  le  bal, 
mentionne  un  pays  des  Corriganed,  sans  indiquer  où  il  est  situé  : 

Hon-man  '  zo  ur  balic  a  zo  cz,  Voici  un  petit  bal  qui  est  facile, 

Ha'n  ve  ket  canet  goall  allez,  Et  qui  n'est  pas  chanté  bien  souvent, 

Deut  euz  ar  vro  ar  C'horriganed  II  est  venu  du  pays  des  Naines, 

Gant  ar  marc'hadourien  ronseed.  Avec  les  marchands  de  chevaux*. 

On  croit  encore  fermement  en  Bretagne  à  l'existence  des  Nains.  J'ai 


1 .  Le  Bal  est  la  danse  qui  termine  la  gavotte  bretonne.  Ce  mot  est  indiqué  dans  le 
dictionnaire  de  Le  Gonidec,  comme  étant  du  masculin.  Je  l'ai  écrit  au  féminin  sous  la 
dictée  du  paysan  qui  m'a  chanté  ce  couplet  au  bourg  du  Trévoux  (Finistère)  en  1858. 

2.  Les  marchands  de  chevaux  qui  fréquentent  aujourd'hui  les  foires  de  Bretagne,  viennent 
pour  la  plupart  de  la  Normandie  ou  de  l'Espagne.  Les  rapports  entre  les  Bretons,  les  Basques 
elles  Espagnols  ont  été  fréquents  au  moyen-âge;  M.  Luzel  a  publié  un  chant  {Cwcrziou 
Breiz-Izel,  p.  121)  où  il  est  question  d'un  saint  Jacques  de  Turquie.  J'ai  découvert  depuis 
dans  la  petite  église  de  Pouldavid,  près  Douarnenez  (Finistère),  un  saint  Jacques  de  Tur- 
quie (sant  Jakez  an  Turkez),  placé  en  regard  d'un  saint  Jacques  d'Allemagne.  Ce  saint 
Jacques  de  Turquie  tient  un  bourdon  à  la  main  et  est  revêtu  d'une  robe  de  pèlerin  garnie 
de  ces  coquilles  que  l'on  nomme  vulgairement  coquilles  de  saint  Jacques  [Pccten  Jacobœus 
Lam.).  Ce  sont  là  évidemment  des  souvenirs  qui  datent  de  l'époque  de  la  domination 
des  Maures  en  Espagne.  La  statue  que  je  viens  de  mentionner  présente  une  particularité 
curieuse.  Elle  porte,  en  effet,  au-dessus  de  sa  tête,  un  fer  à  cheval  fixé  à  l'extrémité  d'une 
tige  de  métal;  ne  serait-ce  pas  une  réminiscence  du  croissant  turc? 


de  la  Basse-Bretagne.  2  3 1 

rencontré  bien  souvent  des  vieillards  qui,  non-seulement,  prétendaient 
en  avoir  vu,  mais  qui  affirmaient  avoir  été  enlevés  par  eux  dans  leur 
enfance,  et  n'avoir  dû  leur  salut  qu'à  la  prompte  intervention  de  leurs 
parents.  Cependant,  si  !a  plupart  des  Bretons  sont  convaincus  que  cette 
race  a  existé,  ils  pensent  maintenant  que  bien  qu'il  se  trouve  encore 
quelques  Nains  disséminés  dans  les  villes  et  dans  les  bourgs  de  la  Bre- 
tagne, la  masse  de  la  nation  a  émigré,  depuis  bien  des  années  déjà, 
pour  une  contrée  aussi  inconnue  que  celle  dont  ils  sont  originaires.  On 
verra  ci-après,  dans  les  récits  destinés  à  développer  quelques-uns  des 
faits  mentionnés  dans  ce  préambule,  de  quelle  manière  on  les  obligea  à 
quitter  le  pays. 

La  Pierre  merveilleuse.  —  Une  Corrigan  se  trouvant  sur  le  point 
de  donner  le  jour  à  un  enfant  fit  chercher  une  vieille  sage-femme  de  sa 
connaissance  à  la  ville  la  plus  voisine  de  sa  demeure.  Après  la  naissance 
de  l'enfant,  et  lorsque  la  sage-femme  l'eut  emmaillotté  à  la  manière 
ordinaire  et  se  fut  assise  au  coin  du  foyer  pour  le  chauffer,  la  mère  lui 
dit,  aussitôt  qu'elle  put  recouvrer  la  parole  : 

Claskit  aze,  Gommer,  e  cornik  an  arbel,  Cherchez   là,   ma  commère,    au  coin   de 

Hag  e  cafot  ur  vilien  ;  l'armoire, 

Frotit  anezhi  deuz  daoulagat  va  hiigel.  Et  vous  y  trouverez  une  pierre  ronde  ; 

Frottez-en  les  yeux  de  mon  enfant. 

—  Que  signifie  ceci .?  se  dit  la  sage-femme,  cette  pierre  aurait-elle 
donc  quelque  propriété  m.erveilleuse .''  Elle  l'appliqua  sur  les  yeux  de 
l'enfant  et,  pour  s'assurer  si  elle  possédait  quelque  vertu,  elle  s'en 
frotta  aussi  l'œil  droit.  Elle  ignorait  que  cette  pierre  précieuse,  qui 
était  parfaitement  polie  et  dont  la  forme  était  celle  d'un  œuf,  avait  la 
propriété  de  donner  aux  personnes  dont  elle  avait  touché  les  yeux  la 
faculté  de  voir  les  Nains  lorsqu'ils  se  rendaient  invisibles.  A  quelque 
temps  de  là,  il  advint  que  la  sage-femme  fut  à  une  grande  foire  qui  se 
tenait  dans  un  bourg  voisin.  Le  nom  de  ce  bourg  varie  suivant  les  loca- 
lités où  l'on  raconte  cette  histoire.  Quelle  fut  sa  surprise  en  y  arrivant 
d'apercevoir  sa  commère  la  Corrigan,  furetant  dans  les  boutiques  les 
plus  richement  garnies,  et  prenant  parmi  les  marchandises  celles  qui  lui 
plaisaient  le  plus,  sans  que  les  marchands  parussent  en  être  surpris.  Le 
soir,  en  s'en  retournant  chez  elle,  la  sage-femme  rencontra  en  chemin 
la  Corrigan,  portant  un  lourd  panier  rempli  d'étoffes  de  la  plus  grande 
richesse.  «Ah!  commère,  lui  dit-elle  en  l'abordant,  vous  avez  fait 
aujourd'hui  une  rude  brèche  aux  étalages  et  aux  boutiques  d'étoffes,  et 
pourtant  elles  ne  vous  ont  pas  coûté  bien  cher.  »  —  Oh  !  oh  !  lui 
répondit  la  Corrigan  : 


2  3  2  Traditions  et  Superstitions 

C'houi  peuz  va  guelet  oc'h  ho  fea  .'  Vous  m'avfu.  vue  les  payer, 

Ha  gant  pe  lagat  em  gouelet-hu  brema  ?        Et  de  quel  œil  me  voyez-vous  maintenant  ? 

—  «  De  l'œil  droit,  lui  dit  la  sage-femme.  «  C'était  celui  qui  avait 
été  en  contact  avec  la  pierre  mystérieuse.  Aussitôt  la  Corrigan  enfonçant 
un  de  ses  doigts  dans  l'œil  que  sa  malheureuse  commère  venait  de  lui 
désigner,  l'arracha  de  son  orbite  en  lui  disant  avec  un  ricanement  dia- 
bolique : 

N'emguelfot  mui  brema!  Vous  ne  me  verrez  plus  à  présent! 

Obs.  —  Cette  tradition  était  répandue  autrefois  dans  toute  la  Cor- 
nouaille  où  je  l'ai  entendu  raconter  souvent  dans  mon  enfance.  Il  est 
aujourd'hui  assez  difficile  de  l'y  retrouver  complète.  Dans  une  autre 
version,  qui  paraît  n'être  qu'une  altération  de  celle-ci,  les  personnages 
du  récit  sont  une  femme  dont  la  condition  sociale  n'est  pas  indiquée  et 
un  Corrik  qui  ont  nommé  ensemble  un  enfant  et  qui  sont  par  suite  com- 
père et  commère.  D'après  cette  version,  le  don  de  seconde  vue  dont 
jouit  la  femme  serait  la  conséquence  du  lien  de  compérage  existant  entre 
elle  et  le  Corrik. 

Les  enfants  volés.  —  On  commence  ordinairement  ce  récit  par  un 
conseil  qui  s'adresse  aux  mères  :  «  Il  n'est  pas  bon  de  laisser  les  enfants 
seuls  à  la  maison  pour  aller  voir  les  feux  de  la  Saint-Jean  et  de  la 
Saint-Pierre.  »  —  Une  femme  qui  avait  les  deux  plus  beaux  garçons 
du  monde  commit  un  jour  l'imprudence  d'aller  voir  le  feu  de  la  Saint- 
Jean,  abandonnant  les  pauvres  petites  créatures  seules  dans  leurs 
berceaux.  A  son  retour,  elle  remarqua  avec  effroi  qu'un  grand  change- 
ment s'était  opéré  en  eux  pendant  son  absence.  A  la  place  des  deux 
charmants  enfants  qu'elle  avait  quittés  un  instant  auparavant,  elle  trouva 
deux  petits  êtres  difformes,  à  la  figure  vieillotte  et  renfrognée.  Elle  ne 
pouvait  se  rendre  compte  de  cette  métamorphose.  Cependant  elle 
attendit  quelque  temps  sans  se  plaindre.  Mais  voyant  que  les  mois  se 
succédaient,  que  plus  d'une  année  s'était  écoulée,  et  que  malgré  cela 
ses  enfants  ne  grandissaient  pas  et  ne  prononçaient  pas  même  une 
parole,  elle  s'en  fut  toute  désolée  raconter  ses  peines  à  une  de  ses 
voisines.  Cette  voisine  était  une  femme  de  bon  conseil  et  qui  avait  vu 
bien  des  choses  depuis  qu'elle  était  dans  le  monde.  —  «  Pauvre  com- 
mère! lui  dit-elle  quand  elle  lui  eut  fait  connaître  la  cause  de  ses  cha- 
grinS;,  vos  enfants  ont  été  volés  par  quelque  Corrigan.  —  Que  faire 
alors  pour  qu'ils  me  soient  rendus  ?  reprit  la  mère.  —  Retournez  bien 
vite  chez  vous,  et  dès  que  vous  serez  arrivée,  ayez  l'air  de  vous  plaindre 
de  n'avoir  pas  le  temps  dç  préparer  à  dîner  pour  les  douze  hommes  qui 


de  la  Basse-Bretagne.  2J5' 

font  l'écobue  dans  votre  village  (an  daouzek  maref).  Pendant  ce  temps 
nous  irons,  moi  et  deux  ou  trois  amies,  vous  porter  du  lait  et  nous 
vous  demanderons  si  votre  dîner  n'est  pas  encore  préparé.  Vous  pren- 
drez alors  une  coque  d'œuf  et  vous  y  mettrez  de  la  pâte  en  disant  à 
haute  voix,  après  l'avoir  mise  sur  le  feu  :  Il  faut  que  je  me  hâte,  car  je 
suis  en  retard.  Quand  votre  bouillie  sera  cuite,  faites  mine  de  vous 
rendre  à  la  garenne  où  travaillent  les  écobueurs,  en  ayant  soin  de  fermer 
derrière  vous  la  porte  de  votre  maison.  Mais  gardez-vous  de  vous  éloi- 
gner, demeurez  sur  le  seuil  et  écoutez  avec  la  plus  grande  attention 
ce  que  diront  les  enfants.  »  La  mère  se  conforma  ponctuellement  aux 
recommandations  de  sa  voisine,  et  voici  ce  qu'elle  entendit  les  Nains  se 
dire  entre  eux  lorsqu'elle  fut  sortie  de  sa  maison  : 

Nin   hor  beuz  guelet  hada  dervennou  Coat-    Nous  avons  vu  semer  les  chênes  du  bois  de 

ar-zal,  la  Salle, 

Dansai  da  hanUrnoz  ellcc'h  maknn  Brezal,  Danser  à  minuit  au  lieu  où  est  l'étang  de 
Hogen  en  hor  huez   n'hor  beuz  guel't  ke-  Brezal'. 

mend  ail.  Mais  dans  notre  vie  nous  n'avons  vu  pareille 

chose. 

—  «  Ah  !  vous  parlez  maintenant,  dit  la  mère  en  rentrant  aussitôt,  je 
vous  reconnais,  maudits  Nains,  à  votre  voix  cassée.  »  Puis,  prenant  une 
branche  de  genêt  vert,  elle  les  fouetta  de  toutes  ses  forces  jusqu'à  ce 
que  la  Corrigan,  accourant  à  leurs  cris,  lui  rendît  ses  enfants  en  lui 
disant  : 

Dal,  rounflezi,  n'am  euz  ket  gret  kemend  ail  da'z  re. 

Tiens,  ogresse,  je  n'en  ai  pas  fait  autant  aux  tiens. 

Obs. —  De  toutes  les  traditions  relatives  aux  Nains, celle-ci  me  paraît  avoir 
été  la  plus  répandue  en  Bretagne.  Je  ferai  cependant  ici  la  même  obser- 
vation que  pour  celle  qui  précède.  Il  est  aujourd'hui  assez  difficile  de  la 
trouver  complète.  Dans  la  plupart  des  communes  on  n'en  retrouve  que 
des  fragments,  mais  ils  suffisent  à  démontrer  combien  elle  a  dû  être 
populaire  autrefois.  Il  en  est  des  traditions  du  peuple  comme  de  ses 
chants;  elles  ne  disparaissent  pas  brusquement  d'un  pays.  Leur  souvenir 


1.  La  seigneurie  et  le  château  de  Brezal  (colline  de  la  Salle),  étaient  situés  dans  la 
paroisse  de  Plouneventer  (arrondissement  de  Morlaix,  Finistère).  Ce  château  a  dû  être 
fondé  sur  les  ruines  d'un  établissement  romain,  car  on  trouve  neuf  fois  sur  dix  des  ruines 
romaines  dans  les  localités  appelées  la  Salle  (ar  Zal)  ou  les  Salles  (ar  Zalou).  Le  mot 
Buzit,  en  français  la  Boissiere  ou  la  Boixière,  a  la  même  valeur  comme  indication  archéo- 
logique. Le  .mot  Breon  Bren  qui  signifie  colline,  éminence,  n'existe  plus  en  breton  dans  le 
langage  usuel,  mais  on  le  trouve  fréquemment  en  composition  comme  dans  les  mots 
Bre'nhanvec,  Bre'ngal,  Brehoulon,  Bre'nilis.  etc. 

2.  Les  Bretons  prononcent  ordinairement  Ronfez.  Ils  appliquent  cette  épithète  aux 
femmes  d'une  forte  corpulence,  et  douées  d'un  grand  appétit,  et  aussi,  au  figuré,  aux 
femmes  brutales  et  méchantes.  Ce  mot  me  paraît  être  le  féminin  de  Rounfl,  ogre.  C'est  le 
Ronfle  des  vieux  contes  français. 


2J4  Traditions  et  Superstitions 

s'y  maintient  au  contraire  très-vivace,  et  lors  même  qu'elles  sont  assez 
effacées  pour  qu'on  n'en  puisse  plus  reproduire  le  récit  que  d'une 
manière  très-incomplète,  on  se  rappelle  les  avoir  entendu  raconter  dans 
son  enfance  à  des  vieillards  morts  depuis  longtemps.  On  sait  fort  bien 
maintenant  le  cas  que  l'on  doit  faire  de  ces  prétendus  chants  populaires 
aussi  parfaits  dans  la  forme  qu'ils  sont  remarquables  par  leur  intégrité, 
et  dont  on  ne  peut  retrouver  un  seul  vers  quelques  années  seulement 
après  l'époque  où  l'on  prétend  les  avoir  recueillis.  Une  version  plus 
connue,  peut-être,  que  celle-ci  en  diffère  en  ce  qu'il  n'y  est  question 
que  d'un  enfant  volé.  D'après  cette  version,  lorsque  la  mère  place  sur  le 
feu  la  coque  d'œuf  pour  préparer  le  repas  des  laboureurs,  le  Nain  surpris 
lui  adresse  la  parole,  et  une  conversation  s'engage  entre  eux'.  Mais 
cette  conduite  du  jeune  Nain  me  semble  en  contradiction  avec  la  prudence 
ordinaire  à  ceux  de  sa  race,  car  malgré  la  curiosité  que  doivent  lui 
inspirer  les  préparatifs  du  singulier  dîner  dont  il  est  le  témoin,  il  est  trop 
rusé  pour  se  hasarder  à  faire  entendre  sa  voix  cassée  qui  le  trahirait 
aussitôt.  On  comprend  fort  bien  au  contraire  que,  suivant  la  version  que 
je  donne  ici,  les  deux  Nains,  croyant  leur  prétendue  mère  bien  loin,  s'en- 
tretiennent en  toute  sécurité  des  choses  extraordinaires  qu'ils  viennent 
de  voir. 

La  danse  et  la  chanson  des  Nains.  —  Un  des  grands  divertisse- 
ments des  Nains  est  de  danser  la  nuit  au  clair  de  lune,  autour  d'un  grand 
feu.  C'est  dans  les  landes  désertes  qu'on  les  voit  se  livrer  avec  une  sorte 
de  frénésie  à  cet  exercice,  en  chantant  les  premières  paroles  d'un  cou- 
plet qu'ils  n'achèvent  jamais  eux-mêmes.  Il  semble,  au  reste,  qu'il  y  ait 
dans  ces  paroles  plus  de  rimes  que  de  raison,  car  elles  consistent  unique- 
ment dans  l'énumération  des  premiers  jours  de  la  semaine.  Les  voici 
telles  qu'ils  les  chantent  : 


I,  M.  Tranois,  ancien  proviseur  du  lycée  de  Saint-Brieuc,  a  encadré  cette  version  dans 
un  récit  d'une  lecture  fort  attachante  publié  en  1834  dans  le  tome  IV'  de  la  Revue  de 
Bretagne,  recueil  devenu  très-rare  aujourd'hui  et  dont  l'existence  a  été  de  courte  durée. 
Comme  les  paroles  qu'il  place  dans  la  bouche  du  jeune  Nain  diffèrent  de  celles  que  j'ai 
données  plus  haut,  je  les  reproduis  ici  en  modifiant  légèrement  l'orthographe  du  texte  qui 
me  paraît  incorrecte  : 

Me  am  euz  guel't  coat  Brezal;  J'ai  vu  le  bois  de  Brezal, 

Me  am  euz  ho  guel't  t  mez  hag  e  guial;  Je  l'ai  vu  en  glands,  je  l'ai  vu  en  gaules  ; 

Me  am  euz  ho  guel't  e  soliou  e  maner  Brezal;    Je  l'ai  vu  servir  de  poutres  au  château  de 
Ha  biscoaz  n'am  euz  guel't  kemend  ail.  Brezal  ; 

Et  jamais  pourtant  je  n'en  ai  vu  autant. 

Je  crois  que  c'est  sur  le  récit  de  M.  Tranois  que  repose  le  pastiche  qui  figure  dans  le 
Barzaz-Breiz,  sous  le  titre  de  V Enfant  supposé.  Ceux  qui  sont  assez  lieureux  pour  posséder 
la  Revue  de  Bretagne,  pourront  comparer  les  deux  pièces. 


de  la  Basse-Bretagne.  2J5 

Dissul,  Dimanche, 

Dilun,  Lundi, 

Dimeiirs  ha  dimerc'her,  Mardi  et  mercredi, 

Diriaou  ha  dirgucner.  Jeudi  et  vendredi. 

Si,  pendant  qu'ils  dansent  ainsi,  un  passant  attardé  a  la  mauvaise 
fortune  de  traverser  la  lande  où  ils  font  leurs  ébats,  ils  l'appellent  par  son 
nom,  et  s'il  a  l'imprudence  de  répondre,  il  est  entraîné  dans  le  tourbillon 
de  leur  ronde,  jusqu'à  ce  qu'épuisé  de  fatigue,  il  tombe  mourant  sur  le 
sol.  Il  a  cependant  trois  moyens  de  se  soustraire  au  sort  qui  lui  est 
réservé.  Le  premier  est  d'achever  le  couplet  que  chantent  les  Nains,  en 
y  ajoutant  un  ou  deux  vers.  (Cette  tradition  est  répandue  dans  toute  la 
Cornouaille).  Ils  ne  sont  pas  exigeants  pour  la  rime;  de  simples  asson- 
nances  suffisent  à  les  mettre  en  gaieté.  Le  second  consiste  à  placer  ses 
sabots  en  entrant  dans  la  ronde,  de  telle  façon  qu'après  le  premier  tour 
de  danse,  il  puisse  y  mettre  à  la  fois  les  deux  pieds.  S'il  ne  réussit  pas 
au  premier  tour,  ce  moyen  lui  échappe,  il  ne  peut  plus  recommencer  '. 
Le  troisième  est  de  planter  un  bâton  en  terre,  à  l'endroit  où  il  commence 
à  danser,  et  de  le  saisir  de  la  main,  en  finissant  le  premier  tour.  (Com- 
munes des  environs  de  Saint-Pol-de-Léon  et  de  Quimper  et  commune  du 
Trévoux,  Finistère.) 

Les  histoires  que  l'on  raconte  en  Bretagne  des  rencontres  de  voya- 
geurs avec  les  Nains  ne  sont  pas  très-variées.  En  voici  quelques-unes 
qui  donneront  une  idée  des  autres. 

Un  habitant  de  la  commune  de  l'Hôpital-Camfront  (Finistère)  s'en 
revenait  un  soir  du  bourg,  portant  sur  la  tête  une  grande  tourte  de  pain 
de  seigle  2,  lorsqu'en  traversant  une  lande  il  fut  arrêté  par  les  Nains  qui 
l'obligèrent  à  danser  et  à  chanter  :  —  Dissul,  Dilun,  Dimeurs  Im  Dimer- 
c'her, Diriaou  ha  Dirguencr!  disait-il  avec  eux.  —  Après  !  lui  criait-on  ; 
—  ha  Dissadorn,  ha  Dissul!  répondait-il  —  Après  !  après  !  cela  ne  rime 
pas.  Il  suivait  haletant  les  mouvements  de  la  danse  portant  toujours  sur 
la  tête  sa  tourte  pesante,  sans  qu'il  lui  vînt  à  la  pensée  que  ce  que  les 
Nains  exigeaient  de  lui  était  une  rime  au  mot  Dissul.  On  le  fit  danser  si 


1.  D'après  une  version  que  j'ai  recueillie  dans  la  commune  de  Saint-Eloi  (^Finistère), 
c'est  après  le  troisième  tour  que  l'on  doit  sortir  de  la  danse. 

2.  La  grande  tourte  de  pain  de  seigle  que  l'on  trouve  dans  toutes  les  fermes  bretonnes, 
enveloppée  dans  un  linge  et  recouverte  d'un  panier  à  un  des  bouts  de  la  table,  pèse  quel- 
quefois près  de  quarante  kilogrammes.  On  emploie  pour  la  couper  un  coutelas  long 
d'environ  soixante  centimètres,  muni  d'un  manche  court  et  terminé  par  un  anneau  qui 
sert  à  l'accrocher  à  la  muraille.  Pour  en  faire  usage  on  appuie  le  pain  contre  la  poitrine, 
et  tenant  le  couteau  à  deux  mains,  on  enlève  en  le  tirant  à  soi  des  tranches  minces  ou 
épaisses  selon  les  besoins.  Dans  quelques  communes,  entre  autres  dans  celle  de  Clohars- 
Carnoët  (Finistère),  ce  grand  coutelas  est  remplacé  par  un  instrument  à  lame  recourbée, 
ayant  à  peu  près  la  forme  d'une  faucille  et  tranchante  des  deux  côtés. 


2  j6  Traditions  et  Superstitions 

longtemps  et  faire  tant  de  bonds  désordonnés  que  la  tête  du  pauvre 
patient  finit  par  passer  à  travers  le  pain,  qui  lui  tomba  comme  un  collier 
sur  les  épaules.  On  s'imagine  bien  quelle  piteuse  mine  il  devait  faire 
dans  cet  état.  Les  Nains  le  firent  tourner  encore  pendant  quelque  temps 
en  riant  aux  éclats,  et  finirent  par  le  chasser  hors  de  leur  cercle,  en  le 
poursuivant  de  leurs  huées. 

Cette  aventure  avait  mis  les  Nains  en  trop  joyeuse  humeur  pour  qu'ils 
ne  cherchassent  pas  l'occasion  de  la  renouveler.  Ayant  réussi  peu  après 
à  attirer  dans  leur  danse  un  autre  homme  qui  portait  aussi  sur  la  tête  une 
tourte  de  pain  de  seigle,  ils  s'imaginèrent  qu'ils  en  auraient  aussi  bon 
marché  que  de  leur  première  victime.  Ils  se  trompaient;  car  à  peine 
étaient-ils  arrivés  au  quatrième  vers  de  leur  chanson,  que  le  nouveau 
venu  s'écria  : 

Dissadornik*  ha  Dissul  Samedi  et  dimanche, 

Vo  laket  an  tonik  var  ar  mul !  On  mettra  la  tourte  sur  le  mulet! 

Ils  virent  alors  qu'ils  avaient  affaire  à  un  homme  d'esprit  et  ils  le  con- 
gédièrent sans  lui  faire  aucun  mal.  J'ai  recueilli  cette  tradition  dans  les 
communes  de  Hanvec,  de  Saint-Eloi  et  d'Argol  (Finistère). 

Une  autre  histoire  bien  plus  populaire  que  la  précédente  est  celle  de 
ce  vieux  tailleur  bossu  qui,  surpris  la  nuit  par  les  Nains  et  forcé  de  danser 
avec  eux,  compléta  ainsi  leur  chanson  : 

Diriaou  ha  Dirguener  Jeudi  et  vendredi 

Oa  arfoar  'bars  e  Kemper!"  U  y  avait  foire  à  Quimper! 

Les  Nains,  émerveillés  de  son  talent  de  rimeur,  prièrent  leur  chef  de 
lui  enlever  sa  bosse.  Ce  qui  fut  fait.  Dans  la  même  soirée,  il  arriva  qu'un 
jeune  homme  fort  bien  mis  et  paraissant  avoir  une  haute  idée  de  sa  per- 
sonne, rencontra  cette  même  bande  de  Nains.  S'il  avait  des  avantages 
physiques  que  le  tailleur  ne  possédait  pas,  il  était  du  côté  de  l'esprit 
moins  bien  doué  que  lui.  Longtemps  il  dansa,  longtemps  il  chanta  sans 
pouvoir  trouver  une  rime  pour  terminer  la  chanson.  Les  Nains  le  puni- 
rent de  sa  sottise  en  l'affublant  de  la  bosse  qu'ils  avaient  enlevée  au  vieux 
tailleur.  (Communes  de  Châteauneuf-du-Faou,  de  Laz,  de  Saint-Goazec, 
etc.,  Finistère.) 

Il  existe  plusieurs  versions  de  ce  conte.  D'après  l'une  de  ces  versions. 


1.  Diminutif  de  Dissadorn,  dimanche,  employé  ici  pour  la  mesure. 

2.  Une  autre  manière  de  terminer  la  chanson  des  Nains,  qui  m'a  été  indiquée  dans 
les  communes  d'Argol  et  de  Tregarvan  (Finistère),  est  celle-ci  : 

Diriaou  ha  dirguener,  Jeudi  et  vendredi, 

Pephini  a  ia  d'ar  ger!  Chacun  s'en  va  chez  soi! 


de  la  Basse-Bretagne.  2J7 

les  deux  personnages  étaient  tailleurs  et  bossus  tous  deux  ;  de  sorte  que 
la  victime  sortit  de  la  danse  le  dos  chargé  de  deux  bosses  au  lieu  d'une. 
Une  autre  version  diffère  des  précédentes  en  ce  que  les  deux  héros  du 
conte  sont  tailleurs  et  que  le  vieux  bossu,  au  lieu  de  finir  la  chanson  des 
Nains  par  les  mots  Oa  ar  foar  'bars  e  Kemper,  la  termine  ainsi  : 


Ha  dissadorn  ha  dissul, 
Setu  ma  achu  ar  zun  ! 


Et  samedi  et  dimanche, 
Voilà  la  semaine  finie! 


Selon  M.  Tranois,  qui  a  le  premier  publié  cette  version  ',  les  Nains 
sont  condamnés  par  une  puissance  inconnue  à  une  longue  pénitence  qui 
ne  doit  finir  que  lorsqu'un  passant  surpris  par  eux  ajoute  à  leur  chanson 
les  mots  setu  ma  achu  ar  zun,  «voilà  la  semaine  finie«.  Je  n'ai  nulle  part 
rencontré  cette  tradition.  Les  exemples  que  je  viens  de  citer  prouvent 
que  l'on  peut  terminer  de  différentes  manières  le  couplet  que  chantent 
les  Nains  pourvu  qu'on  ne  néglige  pas  la  rime,  quelle  que  soit  d'ailleurs 
l'insignifiance  du  fond.  Il  y  a  peu  de  communes  en  Bretagne  où  l'on  ait 
conservé  l'air  de  la  chanson  des  Nains.  On  la  chante  cependant  encore 
dans  les  Montagnes-Noires,  entre  Châteauneuf-du-Faou  (Finistère)  et  la 
limite  de  ce  département.  Cet  air  est  des  plus  simples.  La  première 
mesure  se  chante  piano  ;  puis  la  voix  s'élève  jusqu'à  la  fin,  par  un  crescendo 
si  rapide  que  les  dernières  notes  ressemblent  plus  à  des  cris  qu'à  un  chant. 
En  voici  la  musique  telle  qu'un  ami  a  bien  voulu  la  noter  pour  la 
Revue  Celtique. 


Dis-sul,  Di  -  lun,         Di  -  meurs  ha    Di-merc'h- 


fe^^i-^^^^^^^ 


—  er,         Di   -  ziaouha  Dir-gue-ner,        ha  Dis-sa-dorn  ha  Dis- 

É—     --      -~-rr  p^Dacapo. 

-  sul,  se -tu       ma    a-chu  ar     zun.      Dis    -    sul,    Di.etc 


I.  Sous  le  titre  de  Histoire  de  Coulotimer  et  de  Gu:lchand.  dans  le  tome  IV  de  la 
Revue  de  Bretagne,  publié  à  Rennes  en  i8^?  et  1854-  E.  Souvestre  en  a  fait  le  sujet 
d'un  conte  intitulé  Les  Korils  de  Plauden,  inséré  dans  son  Foyer  Breton.  Je  ferai  observer 
en  passant  que  je  n'ai  jamais  entendu  dans  la  Bretagne  bretonnante  désigner  les  Nains  par 
les  mots  Korils,  Poulpilcets  ou  Poulpicans. 


2j8  Traditions  et  Superstitions 

Le  chapelet  bénit.  —  Une  bande  de  nains  s'amusait  depuis  quel- 
que temps  à  prendre  les  chevaux,  les  bœufs  et  la  charrue  d'un  fermier 
et  à  labourer  ses  champs  pendant  la  nuit.  Cela  plut  d'abord  au  fermier 
qui  voyait  déjà  dans  ses  greniers  la  récolte  que  les  nains  lui  préparaient 
ainsi.  Il  fut  bien  vite  désabusé  ;  car  quoique  le  travail  parût  fort  bien 
fait  au  moment  où  il  s'exécutait,  le  lendemain  non-seulement  il  n'en 
restait  plus  de  traces,  mais  les  champs  paraissaient  n'avoir  pas  été  cul- 
tivés depuis  de  nombreuses  années.  «  Bleud  an  diaoul  a  ia  da  vrcn  ',  « 
se  dit  le  fermier,  et  comme  il  était  bon  chrétien  et  qu'il  voulait  se  venger 
de  ces  ouvriers  du  diable,  voici  l'expédient  qu'il  imagina  pour  les  con- 
traindre à  faire  pour  lui,  d'une  manière  utile  et  sans  danger  pour  son 
salut,  la  besogne  qu'ils  avaient  si  souvent  faite  dans  l'unique  but  de  se 
moquer  de  sa  crédulité.  Un  soir,  à  l'heure  où  les  nains  commençaient 
leur  travail  habituel,  il  se  glissa  derrière  eux,  muni  d'un  chapelet  bénit, 
et  aussitôt  que  la  charrue  eut  atteint  l'extrémité  du  premier  sillon,  il 
posa  son  chapelet  sur  le  sol  fraîchement  remué.  Il  recommença  cette 
opération  après  le  labourage  de  chaque  sillon,  et  le  lendemain  tout  le 
champ  se  trouva  parfaitement  cultivé,  au  grand  contentement  du  fermier 
et  à  la  confusion  des  nains,  qui  renoncèrent  pour  toujours  à  ce  genre 
d'amusement.  (Arrondissements  de  Brest  et  de  Morlaix,  Finistère). 

Le  nain  cordonnier.  —  Il  était  une  fois  un  veuf  qui  avait  épousé 
une  veuve.  Chacun  d'eux  avait  une  fille,  et  celle  du  mari  était  chargée 
de  la  garde  des  vaches  de  la  ferme.  Un  jour  qu'elle  les  avait  menées 
paître  dans  une  lande  et  qu'elle  se  reposait  sur  une  pierre,  elle  aperçut 
tout  à  coup  à  ses  côtés  une  vieille  femme  qui  filait.  «  Il  y  a  déjà  bien 
des  années  que  je  suis  morte,  lui  dit  la  vieille,  mais  avant  de  m'ouvrir  la 
porte  de  son  paradis,  le  bon  Dieu  m'a  imposé  pour  pénitence  de  revenir 
sur  la  terre  pour  y  filer  autant  de  chanvre  que  j'en  ai  volé  pendant  ma 
vie.  Ma  pénitence  va  bientôt  finir;  mais  comme  vous  ne  paraissez  avoir 
aucune  occupation  pour  vous  distraire,  si  vous  le  voulez,  je  vous  appren- 
drai à  filer.  ■)■)  La  jeune  fille  accepta  cette  offre  avec  empressement,  et 
un  jour  que  les  deux  femmes  travaillaient  assises  l'une  près  de  l'autre, 
un  nain  s'approcha  d'elles  et  invita  la  jeune  fille  à  danser.  Elle  y  con- 
sentit, ce  qui  fit  grand  plaisir  au  nain  ;  et  comme  il  était  cordonnier  de 
son  état,  il  fit  pour  elle  une  paire  de  souliers,  et  lui  donna  en  pré- 
sent un  beau  Justin  ^  tout  neuf.  Il  fut  ensuite  la  demander  en  mariage  à 

1.  Farine  du  diable  tourne  en  son.  —  On  croit  dans  les  communes  d'Argo!  et  de  Tre- 
garvan  (Finistère)  que  les  Nains  sont  des  enfants  morts  sans  baptême,  qui  ne  pouvant 
voir  Dieu,  sont  condamnés  à  demeurer  sur  la  terre. 

2.  Sorte  de  gilet  à  manches  à  l'usage  des  femmes. 


de  la  Basse-Bretagne.  239 

son  père,  qui  n'eût  voulu  pour  aucun  prix  donner  sa  fille  à  un  être  de 
cette  espèce.  Cependant  craignant  la  vengeance  du  nain,  il  feignit  d'agréer 
sa  demande;  mais  le  jour  du  mariage  il  substitua  à  sa  propre  fille  celle  de  sa 
femme.  Tout  allait  fort  bien,  lorsqu'en  faisant  la  toilette  de  la  fiancée  on 
s'aperçut  que  les  vêtements  qu'elle  devait  porter  et  qui  étaient  ceux  qui 
avaient  été  donnés  par  le  nain  étaient  trop  étroits  pour  elle.  Il  fallut  donc, 
pour  qu'elle  pût  les  mettre,  couper  les  talons  de  ses  souliers  et  fendre  son 
Justin  dans  toute  la  longueur  du  dos.  Pendant  que  les  deux  futurs  époux 
se  rendaient  au  bourg  pour  se  marier,  les  pies,  les  merles  et  d'autres 
oiseaux  chantaient  tout  le  long  de  la  route,  pour  se  moquer  du  nain: 
«  Son  dos  est  coupé!  ses  talons  sont  coupés!  —  Comprenez-vous, 
lui  demanda  la  jeune  fille,  ce  que  disent  ces  oiseaux.''  —  Oui,  dit  le 
nain,  en  regardant  les  vêtements  de  sa  compagne,  ils  disent  que  vous 
n'êtes  pas  celle  que  je  veux  épouser.»  Puis  lui  ayant  fait  ôter  les  souliers 
et  l'habit  qu'elle  portait,  il  s'en  retourna  à  la  ferme  et  exigea  qu'on  lui 
donnât  pour  femme  la  jeune  fille  qu'il  avait  demandée  en  mariage.  L'his- 
toire ajoute  que  la  noce  fut  très-gaie  et  que  les  nains,  qui  y  furent  in- 
vités en  grand  nombre,  y  dansèrent  beaucoup,  en  chantant  leur  chanson 
ordinaire.  (Commune  de  Pluguffan,  Finistère.) 

La  vache  du  pauvre  homme.  —  Quelques  nains,  après  avoir  dansé 
une  partie  de  la  nuit  au  clair  de  lune,  se  sentant  en  appétit,  entrèrent 
dans  la  maison  d'un  pauvre  journalier  qui  ne  possédait  d'autre  bien 
qu'une  vache.  Us  y  allumèrent  un  grand  feu,  et  après  avoir  dépecé 
l'animal  et  l'avoir  fait  rôtir,  ils  commencèrent  à  le  dévorer  avec  leur 
gloutonnerie  habituelle.  —  «  Donnez-m'en  au  moins  un  morceau,  leur 
dit  le  pauvre  homme,  qui  voyait  de  son  lit  disparaître  rapidement  les 
débris  du  seul  bien  qu'il  eût  au  monde,  et  dont  la  faim  était  peut-être 
aiguisée  par  l'odeur  du  rôti.  —  Ah!  tu  veux  être  de  la  fête,  s'écrièrent 
les  nains  en  riant,  tiens,  voici  ta  part  du  festin,  mange,  et  si  tu  es  un 
joyeux  convive,  nous  te  promettons  de  te  rendre  ta  vache  vivante.  )>  Le 
pauvre  diable  ne  se  fiait  pas  trop  à  la  promesse  de  ses  hôtes  ;  toutefois 
faisant  contre  fortune  bon  cœur,  il  parut  manger  de  bon  appétit  la  part 
qu'il  avait  reçue  des  nains.  Dès  qu'il  fit  jour,  il  courut  à  sa  crèche,  et 
grande  fut  sa  joie  d'y  apercevoir  sa  vache.  Elle  ne  fut  pas  de  longue 
durée.  Sa  vache  était  bien  vivante,  mais  il  lui  manquait,  hélas!  le  mor- 
ceau qu'il  avait  mangé  pendant  la  nuit  ' .  (Commune  de  Beuzec-Cap- 
Sizun,  Finistère.) 

I.  M.  Ducrest  de  Villeneuve  a  inséré  dans  son  roman  intitulé  Le  Bandoullier,  une  tra- 
dition recueillie  par  lui  dans  l'arrondissement  de  Lannion  (Côtes-du-Nordl   et  qui  a  avec 


240  Traditions  et  Superstitions 

Les  nains  du  Torghen-de-Laz.  —  Au  village  du  Merdy,  dans  la 
commune  de  Laz^,  quand  on  voulait  servir  la  soupe  pour  douze  personnes, 
il  fallait  mettre  treize  écuelles  sur  la  table,  car  l'une  d'elles  disparaissait 
toujours  sans  que  l'on  pût  savoir  ce  qu'elle  devenait.  Une  famille  de 
nains  avait,  il  est  vrai,  fixé  sa  demeure  dans  des  rochers  au  sommet  d'un 
Torgen  ',  à  peu  de  distance  du  village,  mais  elle  paraissait  vivre  en 
bonne  intelligence  avec  les  voisins,  qui  n'avaient  jamais  eu  à  s'en  plaindre. 
Il  y  avait  déjà  longtemps  que  les  gens  du  Merdy  subissaient  cet  impôt 
forcé,  lorsqu'un  jour  le  fermier,  en  passant  pour  se  rendre  chez  lui,  à 
peu  de  distance  de  la  demeure  des  nains,  entendit  une  voix  qui  sortait 
du  milieu  des  rochers  lui  crier  ces  paroles  : 

Pa  viot  arru  e  penn  ar  roz,  Quand  vous  serez  arrivé  au  bas  du  coteau, 

Lavarit  da  Bipi  bihan  eo  maro  Pipi  goz.        Dites  à  petit  Pierre  que  le  vieux  Pierre  est 

mort. 

A  partir  de  ce  moment,  on  ne  remarqua  plus  à  la  ferme  d'irrégularités 
dans  le  service  des  repas,  et  l'on  en  conclut  que  l'invisible  mangeur  de 
soupe  était  le  fils  du  nain  du  Torghen;  que  chassé  de  la  maison  paternelle  ■ 
pour  une  faute  inconnue,  il  s'était  réfugié  au  village  du  Merdy,  où  il 
vivait  à  l'aise,  et  qu'enfin  son  père  étant  mort,  sa  mère  l'avait  fait  pré- 
venir de  rentrer  dans  sa  famille  dont  il  devenait  naturellement  le  chef. 
(Commune  de  Laz,  Finistère.) 

Le  BATON  DE  LA  CHARRUE.  —  Un  fermier  de  Plemeur  possédait  un 
troupeau  de  petites  vaches  jaunes  et  blanches  dont  il  était  très-fier,  car 
elles  étaient  les  plus  belles  et  les  meilleures  de  la  paroisse.  Il  paraît 
qu'elles  furent  du  goût  d'une  tribu  de  nains  qui  rôdaient  dans  les  envi- 
rons, car  un  soir,  en  entrant  dans  la  prairie  où  il  les  avait  conduites  le  ■ 
matin,  le  fermier  vit  qu'elles  étaient  entourées  d'un  grand  nombre  de  petits 

celle-ci  un  rapport  éloigné.  En  voici  la  substance  :  Un  fermier  a  perdu  ses  bœufs,  ou  : 
plutôt  les  Nains  les  lui  ont  volés.  Il  va  près  de  leurs  terriers  et  leur  dit  :  «  Rendez-moi  , 
mes  bœufs.  »  Le  lendemain,  il  trouve  ses  bœufs  à  sa  porte,  mais  ils  n'ont  plus  de  cornes,  i 
Il  retourne  à  la  demeure  des  Nains  et  les  prie  de  nouveau  de  lui  rendre  ses  bœufs  , 
avec  toutes  les  parties  de  leur  corps,  dont  il  fait  l'énumération  en  oubliant  cependant  de  , 
mentionner  la  queue.  Le  lendemain,  ses  bœufs  sont  encore  à  sa  porte,  mais  ils  sont 
dépourvus  de  queue.  Il  fallut  l'intervention  du  curé  pour  faire  rendre  au  fermier  ce  qu'il 
avait  perdu. 

I.  Ce  mot  signifie  tertre,  butte,  éminence,  soit  naturelle  soit  artificielle.  Il  sert  géné- 
ralement avec  le  mot  Run,  à  désigner  les  tumulus  et  les  mottes  féodales.  Peu  d'e-xpres-  i 
sions  varient  autant  que  celle-ci  dans  la  manière  de  les  écrire  et  de  les  prononcer.  En  l 
voici  les  principales  formes  :   Torgan,  Torgen,  Torchai,  Tosken,  Tossen,  Turchen,  Tusken, 
Tuchen,  Tussen.  On   trouve  dans  le   Catholicon  de   J.  Lagadeuc,    Touchai,  g.  gazon,  1.  , 
cespes.  C'est  le  mot  français  la  Touche.  On  donne  souvent  par  erreur  le  nom  de  Torche  de 
Penmarc'h  à  une  anfractuosité  de  rocher  oîi  la  mer  se  brise  avec  fracas.  La  véritable  Torche 
de  Penmarc'h  est  un  grand  tumulus  situé  à  peu  de  distance  de  ce  rocher,  à  l'extrémité 
d'une  pointe  qui  s'avance  dans  la  mer.  ^ 


de  la  Basse-Bretagne.  241 

êtres  dont  il  n'eut  pas  de  peine  à  reconnaître  la  nature.  A  son  approche, 
nains  et  vaches  disparurent  dans  un  trou,  et  le  fermier  n'eut  plus  devant 
les  yeux  que  l'herbe  verte  de  la  prairie.  Après  avoir  attendu  vainement 
pendant  plusieurs  heures,  il  s'en  retourna  chez  lui  tout  désappointé,  mais 
avec  l'espoir  de  ramener  son  troupeau  le  lendemain.  Il  n'en  fut  rien 
malheureusement,  et  toutes  les  tentatives  qu'il  fit  pour  recouvrer  ses 
vaches  furent  inutiles.  De  loin  il  les  voyait  paître  comme  à  l'ordinaire, 
mais  dès  qu'il  s'en  approchait  elles  disparaissaient  aussitôt.  Il  se  décida 
enfin  à  aller  consulter  un  savant  du  pays  qui  lui  dit  :  «  Cessez  de  lutter 
avec  les  nains  comme  vous  l'avez  fait  jusqu'ici,  vous  succomberez  tou- 
jours. Si  vous  voulez  rentrer  en  possession  de  vos  vaches,  vous  n'avez 
qu'un  moyen  de  vaincre  les  nains,  c'est  de  les  combattre  avec  le  Baz- 
an-Arar  (le  bâton  de  la  charrue).  »  Il  suivit  le  conseil  du  savant,  et  dès 
qu'il  entra  dans  la  prairie,  les  nains  à  la  vue  de  l'instrument  dont  il  était 
armé  s'enfuirent  épouvantés  en  criant  : 

Lez  hi,  lez  hen,  Laissez-la,  laissez-le, 

Baz  an  arar  zo  gant  hen;  Le  bâton  de  la  charrue  est  avec  lui; 

Lez  hen,  lez  hi,  Laissez-le,  laissez-la, 

Baz  an  arar  zo  gant  hi.  Le  bâton  de  la  charrue  est  avec  elle. 

Le  fermier  victorieux  ramena  joyeusement  son  troupeau.  Quant  aux 
nains  ils  avaient  disparu,  et  depuis  ce  moment  on  ne  les  a  jamais  revus 
dans  la  paroisse.  (Communes de  Plemeur,  Guidel,  etc.,  Morbihan. —  On 
connaît  aussi  le  pouvoir  du  bâton  de  la  charrue  dans  plusieurs  communes 
de  la  Cornouaille.) 

Mariages  et  migration  des  nains. —  Les  actes  de  cruauté  commis 
par  les  nains  avaient  rendu  si  timides  les  populations  des  campagnes,  que 
ces  païens,  ne  mettant  plus  de  bornes  à  leur  insolence,  prirent  l'habitude 
d'entrer  pendant  la  messe  dans  les  églises  chrétiennes,  et  d'y  célébrer 
leurs  mariages,  suivant  le  rite  de  leur  nation.  Voici  comment  se  prati- 
quait cette  cérémonie.  Au  moment  où  le  prêtre  publiait  les  bans,  le  nain 
qui  voulait  se  marier  prenait  sur  ses  bras  sa  fiancée,  comme  un  enfant, 
et  faisait  trois  fois  le  tour  de  l'église  en  criant  : 

Gan-en  'ma  ma  flandrik,  Avec  moi  est  ma  bien-aimée, 

Piou  na  lavaro  grik?  Qui  dira  mot? 

On  se  gardait  bien  de  rien  dire,  car  on  savait  que  celui  qui  eût  fait 
une  seule  observation  aurait  eu  les  yeux  crevés  par  le  nouveau  marié. 
Cependant  le  nombre  des  nains  augmentant  de  jour  en  jour,  et  avec  eux 
leurs  vols  et  leurs  rapines,  la  Bretagne  était  entièrement  ruinée,  et  ses 
habitants  plongés  dans  la  consternation.  Les  Bretons  s'adressèrent  alors 
à  leur  évêque,  pour  le  prier  de  délivrer  le  pays  de  ce  fléau.  Il  y  parvint 


242  Traditions  et  Superstitions  de  la  Basse-Bretagne. 

de  la  manière  suivante  :  Plusieurs  personnes  avaient  remarqué  à  la  messe, 
que  pendant  la  lecture  de  l'évangile,  les  nains  perdaient  une  grande 
partie  de  leurs  forces,  et  semblaient  s'affaisser  sous  l'action  d'une  puis- 
sance supérieure.  On  fit  part  de  cette  observation  à  l'évéque,  qui  ordonna 
aux  prêtres  de  toutes  les  paroisses  de  faire  lire  une  seconde  fois  l'évan- 
gile, à  la  fm  de  la  messe.  Les  nains  ne  purent  résister  à  cette  épreuve. 
Plusieurs  d'entre  eux  y  succombèrent,  mais  la  masse  de  la  nation  aban- 
donna le  pays  et  n'y  reparut  jamais  C'est  depuis  cette  époque  que  s'est 
établie  la  coutume  de  lire  l'évangile  à  la  fm  de  la  messe.  (Commune  de 
Pluguffan,  Finistère.) 

En  terminant  ces  récits,  reproduits  dans  toute  leur  simplicité,  je 
voudrais  soumettre  au  lecteur  une  observation  qui  s'est  plusieurs  fois 
présentée  à  mon  esprit  et  qui,  si  elle  n'explique  pas  l'origine  de  la 
croyance  à  ces  êtres  surnaturels,  peut  cependant  faire  comprendre  pour- 
quoi les  traditions  qui  s'y  rapportent  se  sont  mieux  conservées  en  Bre- 
tagne que  dans  les  autres  pays. 

On  sait  combien  sont  nombreux  en  Bretagne  les  monuments  funéraires 
appelés  Dolmens  ou  allées  couvertes.  Lorsque  ces  monuments  sont  restés 
enfouis  sous  l'éminence  factice  qui  les  enveloppe,  les  paysans  y  attachent 
généralement  l'idée  d'une  sépulture,  mais  quand  par  suite  de  la  dispari- 
tion des  terres  qui  les  recouvraient,  ils  se  trouvent  visibles  en  tout  ou  en 
partie,  ils  ne  représentent  plus  pour  eux  la  même  idée.  A  leurs  yeux  ce 
sont  des  maisons,  et  certes  plusieurs  sont  des  palais,  si  on  les  compare  aux 
tanières  gauloises  et  à  beaucoup  d'habitations  du  moyen-âge.  Or  ce  premier 
fait  admis,  voici  les  conséquences  qui  pour  eux  en  découlent  nécessai- 
rement. Ces  maisons  étant  très-basses  ne  peuvent  être  habitées  que  par 
des  gens  de  petite  taille.  Comme  elles  sont  formées  d'énormes  matériaux, 
les  petits  êtres  qui  les  habitent  et  qui  les  ont  sans  doute  construites, 
doivent  être  malgré  leur  petite  taille  doués  d'une  force  extraordinaire. 
D'un  autre  côté,  comme  on  ne  voit  jamais  dans  ces  maisons  ceux  qui  y 
demeurent,  ils  doivent  avoir  la  faculté  de  se  rendre  invisibles.  De  plus 
le  nombre  de  ces  maisons  étant  très-considérable,  leurs  habitants  sont 
nécessairement  fort  nombreux  et  constituent  une  véritable  peuplade.  Je 
ne  voudrais  pas  tirer  de  cette  observation  une  conséquence  trop  absolue. 
Mon  intention  est  seulement  de  montrer  qu'il  n'est  pas  impossible  que 
les  gens  de  la  campagne  soient  arrivés  par  ce  simple  travail  de  synthèse 
à  se  former  un  canevas  sur  lequel  l'imagination  a  pu  ensuite  broder  ses 
plus  riches  fantaisies. 

R.  F.  Le  Men. 


PROVERBES    ET    DICTONS 

DE 

LA    BASSE    BRETAGNE 


Les  travaux  consacrés  à  faire  connaître  les  proverbes  des  Bretons  Armori- 
cains ont  été  peu  nombreux  jusqu'à  ce  jour.  Le  seul  recueil,  digne  de  ce  nom, 
que  possède  la  Bretagne,  est  le  livre  de  Brizeux,  intitulé  Fiirne:  Breiz,  Sagesse 
de  Bretagne,  ou  Recueil  de  proverbes  bretons  par  A.  Brizeux,  suivi  d'une  notice  sur 
Le  Gonidec,  par  le  même; —  i  vol.  in- 12  de  108  et  18  pages,  Lorient,  Gousset, 
1855.  — Le  même  ouvrage  a  été  réimprimé  dans  les  œuvres  complètes  de 
Brizeux,  2  vol.  grand  in- 12,  Paris,  Michel  Lévy,  1861.  Il  occupe  la  fin  du 
premier  volume  (pages  541-412).  —  C'est  un  travail  sérieux,  fait  avec  une 
entière  bonne  foi,  mais  qui,  de  l'aveu  même  de  son  éminent  auteur,  est  fort 
incomplet.  Il  ne  renferme  guère  que  deux  cents  proverbes,  puisés  tant  aux  sources 
orales  qu'aux  sources  écrites.  Parmi  ces  dernières,  il  faut  citer  au  XVIII'  siècle, 
les  Dictionnaires  de  Grégoire  de  Rostrenen  et  de  Larmery,  le  Buguel  Fur,  et  le 
Voyage  dans  le  Finistère  de  Cambry;  au  XIX',  le  Dictionnaire  de  Le  Gonidec, 
les  livres  de  Souvestre  sur  la  Bretagne  et  le  Barzaz-Breiz. 

Avant  le  recueil  de  Brizeux  avait  paru  (à  Morlaix,  chez  Guilmeri,  sans  nom 
d'auteur  et  sans  date,  mais  vraisemblablement  vers  1830,  une  petite  brochure 
dont  le  titre  peu  exact  est  Proverbou  Spagnol,  troet  e  Verzou  Brezonnec,  gant 
M'""  (in-12  de  12  pages,  renfermant  156  proverbes).  Dans  cette  brochure  de- 
venue très-rare,  et  que  Brizeux  n'a  pas  dû  connaître,  se  trouve  un  certain 
nombre  d'adages  plus  populaires  à  coup  silir  en  Bretagne  qu'en  Espagne.  Quel- 
ques-uns même  ont  été  empruntés  presque  littéralement  au  dictionnaire  de  Gr. 
de  Rostrenen,  et  au  Buguel  Fur.  D'autres  appartiennent  à  la  tradition  bretonne, 
et  il  ne  serait  pas  impossible  de  les  retrouver  presque  tous.  Telle  était  aussi, 
sans  aucun  doute,  l'opinion  de  M.  LeMoal,  ancien  curé  de  la  paroisse  de  Saint- 
Martin,  à  Morlaix,  qui  en  a  donné  une  édition  sous  le  titre  de  Meur  a  lavarou 
koz  ha  talvoudec,  à  la  suite  d'un  Chemin  de  Croix  {Hcnt  ar  Groaz,  gant  prede- 
rennou  var  ann  ene,  in-8',  Morlaix,  Lédan,  1843).  M.  Le  Moal  ne  dit  mot  des 
Proverbou  Spagnol,  bien  qu'il  n'ait  fait  que  les  reproduire,  en  les  paraphrasant 
quelquefois.  Je  dois  ajouter,  pour  être  exact,  qu'il  en  a  refait  complètement  le 
texte,  exilant  sans  pitié  les  mots  français,  et  enjolivant  le  tout  d'une  orthographe 
barbare  qui  est  à  elle  seule  une  véritable  curiosité. 

Depuis  quinze  ans  la  parémiologie  bretonne  ne  s'est  enrichie  d'aucun  travail 
important.  Il  convient  toutefois  de  citer  parmi  les  publications  qui  ont  fait  une 
place  aux  proverbes,  YAlmanach  de  Quimperlè,  pour  1862,  et  le  Dictionnaire 
français-breton  de  M.  Troude. 


244  Lavarou  Koz  a  Vreiz  Izel. 

LAVAROU  KOZ  A   VREIZ  IZEL. 

KENTA   STROLLAD. 
I. 

1  Kaout  choant  a  zo  galloud. 

2  Neb  na  oar  a  gavo  da  ziski. 

î  Kassid  ann  ero  da  benn. 


Seul  gentoch, 
Seul  welloch. 

Ar  c'henta, 
Ar  gwella; 
Na  zale-ta 
D'ober  da  dra. 

Red  eo  gouzanv  da  gaout  skiant, 
Labourât  tenn  da  gaout  arc  liant. 

Red  eo  d'ann  den  n'Iien  eux  netra 
Labourât  tenn,  ha  nanngouela. 

Ann  den  iaouank  en  diegi 

A  zastum  poan  war  benn  kozni. 

Ar  gwella  bara  da  zibri 
A  vez  gounezet  o  cliouezi. 

IL 

Deuz  da  glevcd  ann  alc'houedez 
'Kana  he  zon  d'ar  goulou-deiz. 

Evit  paka  louarn  pe  gad 
Ez  eo  red  sevel  minîin  mad. 

Da  louarn  kousked 
Na  zeu  îainni  boed. 

Labourit  pa  gousk  ann  dibreder, 
Ho  pezo  ed  leun  ar  zolier. 


■ 


Proverbes  et  Dictons  de  la  Basse-Bretagne.  245 


PROVERBES  ET  DICTONS  DE  LA  BASSE  BRETAGNE. 

PREMIÈRE  SÉRIE. 
I. 

1  Vouloir  c'est  pouvoir. 

2  Qui  ne  sait  trouvera  à  apprendre. 

5  Menez  le  sillon  à  bout.  (C'est-à-dire  :  n'interrompez  pas  l'ouvrage 
commencé.) 

4  Tant  plus  tôt, 
Tant  meilleur. 

5  Le  plus  tôt 
C'est  le  mieux  ; 
Ne  tarde  donc  pas 
A  faire  ta  besogne. 

Il  faut  souffrir  pour  acquérir  science, 
Travailler  d'ahan  pour  acquérir  argent. 

Il  faut  à  l'homme  qui  n'a  rien 
Travailler  d'ahan,  et  non  se  lamenter. 

Jeune  homme  qui  vit  dans  la  paresse 
Amasse  tourments  sur  la  tête  de  sa  vieillesse. 

Le  pain  le  meilleur  à  manger 
C'est  en  suant  qu'on  le  gagne. 

II. 

Viens  entendre  l'alouette 

Chanter  sa  chanson  au  point  du  jour. 

Pour  attraper  renard  ou  lièvre 
Il  faut  se  lever  de  grand  matin. 

A  renard  endormi 

Ne  vient  point  morceau  de  viande. 

Travaillez  quand  dort  le  fainéant, 
Vous  aurez  du  blé  plein  le  grenier. 


246  Lavarou  Koz  a  Vreiz  Izel. 

14  'Nn  hini  n'eus  ket  c'hoant  kaout  naon 
Na  chomm  ket  re-bell  war  lie  skaon. 

1 5  Neb  na  laka  poan  hag  akeî 
N'hen  devezo  madou  na  boed. 

16  0  c'hortoz  ar  ieod  da  zevel,  e  varv  ar  zaout  gand  ann  naon. 

1 7  Red  eo  terri  ar  graouenn 
Evit  kaout  ar  voedenn. 

18  Ann  hini  vezoch  aoza  iod 

'N  euz  ann  tamm  kenta  'vid  he  Iod. 


ni. 


19  Ar  pez  a  zo  gr et  gant  va  zad 

A  zo  gret  mad. 

20  Lagad  ar  mestr  a  lard  ar  mardi 
Hag  a  laka  ed  barr  ann  arc' h. 

21  Ar  mestr  mad  a  ra  ar  mevel  mad. 

22  Ann  hini  na  oar  ket  senti 
Na  oar  ket  komandi. 

2  ^  Na  gemerit  evit  merour 

Nag  eur  char  nag  eur  tràitour. 

24  Kaz  maneget  na  dalv  netra  da  logoia. 

25  Ki  besk  ha  kaz  diskouarnet 
N'int  mad  nemet  da  zibri  boed. 

26  Laerez  he  amzer  hag  he  voed, 
Brasa  peched  a  zo  er  bed. 


27 

Gwell  eo  eun  obérer 

Evit  kant  lavarer. 

28 

Dibaod  ar  c'balvez 

A  labour  heb  danvez 

29 

Gant  netra 

Na  reer  ira. 

Proverbes  et  Dictons  de  la  Basse-Bretagne.  247 

14  Qui  ne  veut  avoir  faim 

Ne  demeure  trop  longtemps  sur  son  banc. 

1 5  Pour  qui  ne  met  peine  et  attention, 
Point  d'argent  et  point  de  pain. 

16  En  attendant  que  l'herbe  pousse,  les  vaches  meurent  de  faim. 

17  II  faut  briser  la  noix 
Pour  en  avoir  l'amande. 

18  Celui  qui  prépare  la  bouillie 

A  la  première  portion  pour  son  lot. 


Ce  qu'a  fait  mon  père 
Est  bien  fait. 

L'œil  du  maître  engraisse  le  cheval 
Et  comble  la  huche  de  blé. 

Le  bon  maître  fait  le  bon  serviteur. 

Celui  qui  ne  sait  pas  obéir 
Ne  sait  pas  commander. 

Ne  prenez  pour  fermier 
Ni  un  parent  ni  un  traître. 

Chat  ganté  ne  vaut  rien  à  chasser  souris. 

Chien  sans  queue  et  chat  sans  oreilles 
Ne  sont  bons  que  pour  manger. 

Voler  son  temps  et  sa  nourriture, 

Le  plus  grand  péché  qui  soit  au  monde. 

Mieux  vaut  un  faiseur 
Que  cent  diseurs. 

Rare  est  le  charpentier 
Qui  travaille  sans  matériaux. 

De  rien 

On  ne  fait  rien. 


248 

Lavarou  Koz  a  Vreiz  Izd. 

IV. 

30 

Bepred  dïdalvez 
A  gav  digarez. 

Heb  ar  skodou  hag  ar  c'hoat-tro 
'Ve  muloc'h  kllvlzlen  hag  a  zo. 

Meur  a  hlnl  a  gav  mad  pesket  dizreinet. 

Anez  labourât,  breac'h  dldorr. 

Falla  hlbll  a  zo  er  char  a  wlgour  da  genta 

Klanv  hep  glac'har, 
Kamm  kl  pa  gar. 

î6 

Da  zadorn  ez  eo  bet  ganet, 
Ebad  gant-han  al  labour  gret. 

?7 

Ma  c'hoan  em  c'hof  me  garfe  ve  noz, 
Ar  zul  warc'hoaz,  ha  gouel  antrônoz. 

38 

Meurlaje  !  Meurlaje  ! 

Î9 


Me  garfe  'badje  bemde, 
Ann  eost  ter  gwech  ar  bla, 
Gouel  Mikel  bep  seiz  via. 

Eat  war  vloaz, 
Emoc'h  en  noaz. 


40  Pa  vo  ho  roched  oc'h  ar  bod, 
E  vo  dlzolo  ho  sac'h-iod. 

41  Dldalvedlgez 
Mamm  ar  baourenlez. 


42  Dioc'h  he  labour 
Ar  mlcherour. 

43  Hanter-douget  eur  bec'h  gret-mad. 
N'euz  labour  nheller  da  verrad 
En  eur  gemer  dre  ar  penn-mad. 


Proverbes  et  Dictons  de  la  Basse-Bretagne.  249 

IV. 

50  Toujours  fainéant 

Trouve  prétexte. 

]  I  N'étaient  les  nœuds  et  le  bois  tordu, 

Il  y  aurait  plus  de  charpentiers  qu'on  n'en  voit. 

32  Plus  d'un  trouve  bon  le  poisson  sans  arêtes  (mot  à  mot  désarêté). 

]]  Si  ce  n'est  pour  travailler,  bras  infatigable. 

54  La  plus  mauvaise  cheville  du  char  fait  du  bruit  la  première. 

5  5  Malade  sans  affliction, 

Chien  boiteux  quand  il  veut. 

56  C'est  un  samedi  qu'il  est  né. 

Il  se  réjouit  de  la  besogne  faite. 

57  Mon  souper  dans  mon  ventre  je  voudrais  qu'il  fût  nuit. 
Que  dimanche  vint  demain  et  fête  après  demain. 

38  Carnaval!  Carnaval! 

Je  voudrais  qu'il  durât  toujours. 
Que  la  récolte  vint  trois  fois  l'an, 
La  Saint-Michel  tous  les  sept  ans'. 

L'an  écoulé 
Vous  êtes  à  nu. 


Î9 


40  Quand  votre  chemise  pendra  au  buisson. 
Découvert  restera  votre  sac  à  bouillie. 

41  Paresse 

Mère  de  pauvreté. 


42  D'après  l'œuvre 
L'ouvrier. 

43  Fardeau  bien  fait  est  à  demi  porté.  — 

Il  n'est  travail  que  l'on  ne  puisse  abréger 
En  le  prenant  par  le  bon  bout. 

I.  C'est  à  la  Saint-Michel  que  se  paient   ordinairement   les  fermages   et   que  l'on 
change  de  serviteurs. 


2^0 


Lavaroii  Koz  a  Vreiz  Izel. 


44  Ann  hini  a  ia  jounnuz  a  ia  pell; 
Ann  hini  a  ia  difounn  a  ia  well. 

45  •  Kanig  a  dro 

A  denn  bro; 
Karrig  a  red 
Na  bad  ket. 

46  Na  hiskoaz  den  na  ente  re 
Na  rafe  re  neubeud  goudc. 

47  Etre  re  ha  re  neubeud  eman  ar  muzul  jiist. 

48  Kentoc^h  e  skuiz  ar  freill  evit  al  leur. 

49  Ann  hini  na  zecli  ket  he  bal 
'Tle  bep  mare  sec' ha  he  dal. 

50  Ann  hini  a  cViouitell  bepred  a  zizec'h  he  veg. 

5 1  Na  dalv  ket  ar  boan  sutal,  pa  na  fell  ket  d'ar  marc'h  staotat. 
j2  Ho  labour  a  ielo  da  labour  wenn. 

5  3  Eur  poent  a  zo  evit  pep  tra. 


54 


Pa  weler  diouskouarn  ar  cliad, 
N'e  ket  re  abred  he  vazata. 


5  5  Pep  tra  hen  euz  he  gentel. 

56  Gant  kolo  hag  ainzer 

E  teu  da  eogi  ar  mesper. 

57  Neubeut  tra,  neubeud, 
Hinkin  a  ra  neud. 

58  Gand  ar  boan  hag  ann  amzer 
A-benn  a  l  ep-tra  e  teuer. 

59  Eun  dra  gret  na  tle  neîra  d'eun  dra  da  obcr. 

60  Warlerc'h  ar  mercVier  ema  r  iaou  : 
Paket  ar  zizun  cr  c'hraou. 

61  Nep  a  gign  he  vaout  er  bloa-ma 
A  ve  kuit  da  vloa  d'hen  touza. 


Proverbes  et  Dictons  de  la  Basse-Bretagne.  25 1 

44  Qui  va  vite  va  loin  ; 

Qui  va  lentement  va  mieux. 

45  Petit  char  qui  tourne 

Tire  du  pays  (c.  à  d.:  fait  du  chemin); 
Petit  char  qui  court 
Ne  dure  point. 

46  Jamais  homme  ne  fit  trop 
Qui  plus  tard  ne  fit  trop  peu. 

47  Entre  trop  et  trop  peu  est  la  juste  mesure. 

48  Le  fléau  se  fatigue  plus  tôt  que  l'aire  ' . 

49  Qui  n'essuie  sa  pelle 

Doit  à  chaque  instant  essuyer  son  front. 

50  Qui  siffle  toujours  se  dessèche  la  bouche. 

5 1  Ce  n'est  pas  la  peine  de  siffler,  quand  le  cheval  ne  veut  pas  pisser. 

52  Votre  travail  tournera  en  travail  blanc.  (C.  à  d.:  Vous  travaillerez  en 

pure  perte.) 

55  II  y  a  temps  pour  tout. 

^4  Quand  on  voit  se  dresser  les  oreilles  du  lièvre, 

Il  n'est  pas  trop  tôt  de  l'assommer. 

5  5  Chaque  chose  porte  son  enseignement. 

56  Avec  de  la  paille  et  du  temps 
Les  nèfles  mûrissent. 

57  Petit  à  petit 
Fuseau  fait  fil. 

58  Avec  de  la  peine  et  du  temps 
On  vient  à  bout  de  tout. 

59  Chose  terminée  ne  doit  rien  à  chose  à  faire 

60  Après  le  mercredi,  le  jeudi  : 

Voilà  la  semaine  dans  l'étable.  (C.  à  d.:  Ne  vous  découragez 
pas;  plus  que  deux  jours  de  travail,  et  dimanche  viendra.) 

6 1  Qui  écorche  son  mouton  cette  année 
Sera  quitte  de  le  tondre  l'année  prochaine. 

I.  Se  dit  surtout  des  rapports  conjugaux. 


252 

Lavarou  Koz  a  Vreiz  Izel 

62 

Prena  keuneud  'zo  re  zivezad 

Pa  vez  red  c'houeza  er  hiziad. 

63 

Allez  euz  a  furnez 

A  zen  ar  gonegez. 

64 

En  noz  e  kemerer  ar  ziliou, 

Dale  a  ra  vad  a-wesiou. 

VI. 

65  Va  mab,  re  goz  ann  douar  evid  ohcr  goah  anezhi. 

66  Beg  ar  zoiic'h,  beg  ar  vronn, 
Gand  ho  daou  e  vevomp. 

67  Tri  beg  'zo  0  soutenn  ar  bed  : 
Beg  ar  vronn,  beg  ar  zoc'h, 
Hag  ar  beg  ail  'vel  ma  ouzoc'h. 


68 

Diwar  breac'li  al  labourer  'ma  ar  bed  holl  0  veva 

69 

En  douar  f ail  'mafall  ann  éd. 

70 

Al  louzoufall  a  drec'h  atao. 

7« 

Gwell  eo  ijin  eget  nerz. 

72 

Dre  balat  sounn 

Ez  a  ar  c'hlaz  dounn. 

7Î 

Douar  askol,  —  douar  ed; 
Douar  raden  ne-d-eo  ket. 

74 

Douar  treaz,  —  douar  ed; 
Douar  brulu  ne-d-eo  ket. 

7i 

Douar  meinok, 
Douar  greunok. 

76 

Diwar  ann  treuz-ieod  e  vez  ed, 
Diwar  ann  onkl  na  vez  ket. 

77 

Gand  ar  prajou  ez  eo  a  vager  al  loened, 
Al  loened  a  ro  teill  hag  ann  teill  a  ro  ed. 

78 

Pa  vez  ker  ar  bleud 

A  vez  kezek  treud. 


Proverbes  et  Dictons  de  la  Basse-Bretagne.  2  $  ) 

62  C'est  trop  tard  acheter  fagots 

Quand  il  faut  souffler  dans  ses  doigts. 

6j  Souvent  de  sagesse 

Vient  lenteur. 

64  C'est  la  nuit  qu'on  prend  les  anguilles, 

Attendre  est  bon  quelquefois. 


VI. 


65  Mon  fils,  trop  vieille  est  la  terre  pour  qu'on  se  gabe  d'elle. 

66  Pointe  du  soc,  pointe  du  sein, 
Toutes  les  deux  nous  font  vivre. 

67  Trois  pointes  soutiennent  le  monde  : 
La  pointe  du  sein,  la  pointe  du  soc, 
Et  l'autre  pointe  que  vous  savez. 

68  Sur  le  bras  du  laboureur  s'appuie  le  monde  entier  pour  vivre. 

69  En  mauvaise  terre  mauvais  blé. 

70  Mauvaises  herbes  l'emportent  toujours. 

7 1  Mieux  vaut  adresse  que  force. 

72  En  bêchant  verticalement 

On  enfonce  la  motte  de  gazon. 

75  Terre  à  chardons^  —  terre  à  blé, 

Terre  à  fougères  ne  l'est  pas. 

74  Terre  mêlée  de  sable,  —  terre  à  blé  ; 
Terre  à  digitales  ne  l'est  pas. 

75  Terre  pierreuse. 
Terre  graineuse. 

76  Où  pousse  chiendent  poussera  blé, 

Où  pousse  avoine  à  chapelets,  blé  ne  poussera. 

77  Avec  les  prairies  on  nourrit  le  bétail, 

Le  bétail  donne  du  fumier,  le  fumier  donne  du  blé. 

78  Quand  la  farine  est  chère 
Les  chevaux  sont  maigres. 


254 

Lavarou  Koz  a  Vreiz  Izel. 

79 

Bezin  louet  ha  teill  brein 

Ra  d'ar  c'houer  sevel  he  gein; 

Bezin  brein  ha  teill  louet 

Lak'  ar  c'houer  da  giask  he  voed. 

8o 

Na  espern  teill  met  espern  had  ; 
Ha  mar  feuz  hadet  eun  dournad, 
Te  hen  àevezo  eurfalsad. 

8i 

Teill  denved  hag  hada  dioc'h-tu 
A  lak'  ann  heiz  da  veza  dru. 

82 

Teill  a  grogadou, 
Segal  a  bochadou. 

83 

Pa  hadi  kass  had, 
Pe  losk  dihad. 

84 

Hada  lann  e  pep  mi:, 
Nemet  e  miz  eost  ha  pa  vez  avel  viz. 

8$ 

Ann  hini  'ved  hag  'had  soudenn 
'Goll  eur  bar  a  war  bep  ervenn. 

86 

Ar  falla  gounid  euz  a  Vreiz 
A  zo  gwiniz  warlerch  heiz. 

87 

Coude  gwiniz  gounid  heiz 
Gwella  gounid  a  zo  e  Breiz. 

88 

Heiz  dibell  ha  gwiniz  pellek 
A  lak'  ann  arc' h  da  veza  barrek. 

89 

Ne  deuz  netra  0  paea  ann  dud  e  par  ann  amzer 

90 

Dioc'h  a  reot, 
E  kavot. 

9' 

Etouez  ar  muia  drein 

Eman  W  gaera  rozen. 

92 

Sotoc'h  evit  ann  den 
A-wesiou  her  c'helenn. 

93 

Pa  vez  avel  krenv,  niza  ; 
Pa  vez  kalm,  tamoeza. 

94 

E  peb  amzer  kelenn, 
A-wesion  goure  hemenn. 

Dasiiimcl  ha  troct  c  gallck  gant  L.  ¥ .  Salvet. 


Proverbes  et  Dictons  de  la  Basse-Bretagne.  2  ^  5 

79  Goémon  moisi  et  fumier  pourri 
Font  que  le  laboureur  se  redresse  ; 
Goémon  pourri  et  fumier  moisi 

Mettent  le  laboureur  à  chercher  son  pain. 

80  N'épargne  pas  le  fumier  mais  épargne  la  semence; 
Et  si  tu  as  semé  une  poignée, 

Tu  récolteras  une  brassée.  (Mot  à  mot  :  une  faucillée;  c.àd. 
tout  ce  que  peut  abattre  un  coup  de  faucille.) 

81  Engraisse  avec  du  fumier  de  mouton  et  sème  aussitôt, 

Tu  auras  de  l'orge  à  foison. 

82  Fumier  à  pleines  fourches, 
Seigle  à  pleins  sacs. 

8^  Quand  tu  sèmes,  porte  de  la  semence. 

Ou  laisse  en  jachère. 

84  Sème  l'ajonc  en  tout  mois, 

Si  ce  n'est  au  mois  d'août  et  quand  le  vent  souffle  du  nord-est. 

85  Qui  moissonne  et  sème  aussitôt 
Perd  un  pain  sur  chaque  sillon. 

86  La  plus  mauvaise  culture  de  Bretagne, 

Froment  après  orge. 

87  Après  le  froment  semer  de  l'orge, 
La  meilleure  culture  de  Bretagne. 

88  Orge  sans  balle  et  froment  à  balle 
Font  que  la  huche  devient  comble. 

89  il  n'est  rien  à  l'égal  du  temps  pour  payer  les  hommes. 

90  Comme  vous  ferez, 

Vous  trouverez. 

91  Oià  il  y  a  le  plus  d'épines 
Sont  les  plus  belles  roses. 

92  Plus  sot  que  l'homme 

Lui  donne  quelquefois  des  leçons. 

9^  Quand  le  vent  est  fort,  vanne  ton  blé  ; 

Quand  il  est  calme,  tamise-le. 
94  En  tout  temps  enseignement. 

Quelquefois  commandement. 

Recueilli  et  traduit  par  L.  F.  Sauvé. 


MÉLANGES 


MYTHOLOGICAL   NOTES. 

The  following  brief  notes  are  hère  published  in  continuation  of  those 
printed  in  the  préface  to  Three  Irish  Glossaries,  pp.  xxxu-xli,  and  in  my 
édition  of  0'  Donovan's  version  of  Cormac's  glossary,  pp.  19,  35,  63, 
71,  107. 

I.  The  Lnchorpàn. 

This  meaningofthisname  «  parvumcorpusculum  n,  — from  hir=ilaghu., 
s-Aay6,  and  corpàn,  a  diminutive  of  corp  =  corpus,  —  appears  clearly 
from  the  commentary  on  the  Senchas  Mâr  (I,  70.  71)  where  abac 
«  dwarf  ))  is  thrice  used  as  its  équivalent  : 

Fecht  naen  ann  iarsin  liiid  Fergus  ocus  a  ara  Muena  a  ainni  dochum  mara. 
seicis  ocus  rocoîailsit  for  bru  in  mara.  Dolotar  immorro  luchorpain  cusin  rig 
conambertaiar  asa  carpat  ocus  rucsaî  a  cloidem  uad  i  tosach.  Ronucsat 
iaram  corainic  a  muir  *  ocus  rosnairig  Fergus  iarsin  à  rdncatar  a  chosa  a 
muir.  Dofiuclitradar  lasodain  ocus  rogab  îriar  dib  .i.  fer  cechtar  a  dâ 
Idm  *"  ocus  fer  for  a  bruinnib .  Anmain  in  anmain  [.i.  anacal].  Tartar  ma 
tri  drinnroisc  [.i.  roga]  ol  Fergus.  Rotbiah  ol  int  abac  acht  ni  *"  bcs 
ecmacht  duind.  Rochuinne  Fergus  fair  eolus  foberta  fo  lochaib  ocus  iindaib 
ocus  muirib.  Rotbiah  ol  int  abac  acht  aen  urchuillim  airiut  ni  deochais  fo 
loch  Rudraidhe  fd  it  crich  feisin.  Tobertatar  na  lucuirp  luibe  do  iarsin  ina 
cluasa  ocus  imteged  ko  fo  muirib.  Atberat  araile  is  int  abuc  atbert  a  brat  do 
ocus  atcartad  Fergus  fo  cenn  ocus  imteghed  fo  muirib  samhlaidh. 

i(  One  time  then  thereafter  Fergus  and  his  charioteer  (Muena  his  name) 
set  out  to  the  sea,  reached  it,  and  they  slept  on  the  sea-shore.  Now 
luchorpain  came  to  the  king  and  bore  him  out  of  his  chariot  and  they  first 
took  his  sword  from  him.  They  afterwards  took  him  as  far  as  the  sea 

*  Printed  muire 
**  Printed  da  lai  m 
'"  Printed  ni 


Mélanges.  257 

and  Fergus  perceived  them  when  his  feet  touched  the  sea.  Whereat  he 
awoke  and  caught  ihree  of  them,  to  wit,  one  in  each  of  his  two  hands, 
and  one  on  his  breast.  <(  Life  for  life  «  (i.  e.  protection)  say  they.  «  Let 
my  three  wishes  (i.  e.  choices)  be  given  «  says  Fergus.  «  Thou  shalt 
hâve,  says  the  dwarf,  save  that  which  is  impossible  for  us  ».  Fergus 
requested  of  him  knowledge  of  passing  under  loughs  and  linns  and  seas. 
«  Thou  shalt  hâve,  says  the  dwarf,  save  one  which  I  forbid  to  thee:  thou 
shalt  not  go  under  Lough  Rudraide  (which)  is  in  thine  own  country  ». 
Thereafter  the  luchuirp  (littlebodies)  put  herbs  into  his  ears  and  he  used 
to  go  with  them  under  seas.  Others  say  it  is  the  dwarf  that  gave  his 
cloak  to  him  and  that  Fergus  used  to  put  it  on  his  head  and  thus  go 
under  seas.  » 

The  origin  of  the  luchorpàin  is  thus  stated  in  the  Lehor  na  huidrc, 
p.  2  a  : 

De  senchas  na  îorothor  .i.  na  lucrupan  7  najomorach  insâ  sis. 

Fechtas  rohoi  nôl  intabernacuil  ina  choîlud  arnôl  fhlna  y  ishé  lomnocht 
cotdnic  a  mac  adochom  .i.  cam  conaca  amal  rohdi  7  conderna  gdri  imhi  7 
coroinnis  diabrdîhrib  .i.  do  iâfeth  7  do  sém  7  dodeochatarside  7  a  ail  rempo 
arnaictls  féli  anathar  7  doraisat  a  étach  taris.  Atracht  noi  iarsin  asachotlud 
7  rojallsiged  de  cam  diafochaitbiud  [7  romallach  cam']  iarsin  7  robennach 
indis  aile.  Conid  hé  cdm  deside  cetduni  romallachad  iarnilind  7  conidhé 
comarba  câin  iarnilind  7  conid  huad  rogenatar  luchrupain  7  fomôraig  7 
goborchind  7  cecli  ecosc  dodelbda  archena  fil  fordoinib. 

V  Of  the  history  of  the  Monsters,  /.  e.  the  Lucrupdin  and  the  Fomôraig, 
this  below  : 

On  a  time  was  Noah  in  the  tabernacle  asleep  after  drinking  wine,  and 
he  was  stark  naked,  and  his  son  came  to  him,  to  wit,  Ham,  and  saw 
how  he  was,  and  made  laughter  at  him  and  related  to  his  brethren,  to 
wit,  to  Japhet  and  to  Shem,  and  they  came  backwards  that  they  might 
not  see  their  father's  shame  and  they  put  his  raiment  over  him.  Noah 
arose  thereafter  from  his  sleep  and  it  was  shewn  to  him  that  Ham  had 
mocked  him  [and  he  cursed  Ham]  thereafter  and  blessed  the  other  two, 
so  that  Ham  is  the  first  person  who  was  cursed  after  the  déluge;  and 
so  that  he  is  Cain's  successor  after  the  déluge;  and  so  that 
of  him  were  born  Luchrupain  and  Fomôraig  and  Goborchinn  (horse- 
heads?)  and  every  unshapely  appearance  moreover  that  is  on  human 
beings.  » 

The  name  has  been  strangely  corrupted,  lucharban,  luracdn,  lupracân 
(whence  the  Anglo-Irish  leprechaun')  and  in  the  Highlands  luspardan. 


258  Mélanges. 

II.  The  Rosualt. 

This  sea-monster  is  called  Ruasuall  in  O'Clery's  Glossary  s.  v. 
Rochûaid,  where  it  is  stated  that  it  has  a  hole  through  its  head.  In 
Lebor  na  huidre,  p.  1 1,  we  find  the  old  form  of  the  name  : 

Rosualt  .i.  ainm  do  beist  bis  isindairci  7  isiat  so  a  airde  side  .i.  intan 
sceas  j  a  aged  fritir  domma  7  terca  isintir  sin  cocend  .uii.  mbliadan  no 
isinbliadainsin  namma.  Mad  si'ias  domma  7  mortlaid  isind  aeor  sin.  Mad  sis 
domma  7  mortlaid  for  mi  la  in  mara.  Noinnised  iarum  runa  ind  anmannaisin 
dodoinib  combetis  innafoimtin. 

«  Rosualt,  to  wit,  a  name  for  a  monster  that  is  in  the  sea  (Jairce)  and 
thèse  are  his  characteristics  :  when  he  vomits  and  his  face  to  land, 
poverty  and  scarcity  in  that  land  to  the  end  of  seven  years,  or  in  that 
year  only.  If  it  be  up,  poverty  and  mortality  in  that  air.  If  it  be  down, 
poverty  and  mortaHty  on  the  beasts  of  the  sea.  He  [Columbcille]  used  to 
relate  the  secrets  of  that  animal  to  men  so  that  they  might  be  expecting 
him.  » 

A  fuller  notice  of  this  monster  is  found  in  the  Dinnscnclias  of  the  Bock 
of  Leinster,  fo.  118  a. 2. 

Mag  murisci  unde  nomen?  NinsQ.  Muriasc  mbr  dianid  ainm  rosualt  joch- 
eird  in  muir  and  jotiiir.  7  isi  ari'iin  indanmannaisin  noaisnided  colum  cille 
docliâch  .i.  trisceitlii  dognid  .  et  ba  inairddi  cecli  sceith  dib  .i.  sceith  immuir 
7  a  etliri  inardda  .  7  bddud  curacfi  7  bdrc  7  âr  joranmanna  inmara  sindbh- 
adain  sin.  Sceith  in  aér  7  aerr*  sis  .  7  adcuired  suas  asceith  âr  joranmanna 
foluamnacha  indaéoir  sinbliadain  sin  .  Sceitli  dan  aile fothir  combrenad  intlr . 
7  drfor  daine  j  forcethri  sinbl'iâàam  sin. 

«  Magh  Murisci,  unde  nomen  ?  Not  difficult.  A  great  sea-fish,  named 
Rosualt,  the  sea  flung  there  ashore.  And  it  is  the  secret  of  that  animal 
that  Columcille  used  to  déclare  to  every  one.  To  wit,  three  vomitings 
which  it  would  make,  and  aloft  was  every  vomiting  of  them,  to  wit,  a 
vomiting  in  sea,  and  his  tail  on  high,  and  drowning  of  boats  and  ships, 
and  slaughter  on  the  beasts  of  the  sea  in  that  year.  A  vomiting  in  air, 
and  his  tail  below,  and  his  vomiting  used  to  put  slaughter  above  on  the 
flying  animais  ofthe  air  in  that  year.  Another  vomiting,  then,  ashore,  so 
that  the  land  stinks,  and  slaughter  on  men  and  on  cattle  in  that  year.  » 

Like  notices  are  found  in  the  Liber  Hymnorum,  fo.  27  a.  and  in  H.  2, 
16,  col.  693.  The  name  seems  unceltic,  and  is  probably  identical  with 
the  German  wall-ross,  English  wal-rus. 

*  cf.  Ohg.  ars,  Gr.  ôp^o;. 


Mélanges.  259 

III.  Names  for  «  God». 

In  a  glossary  called  Dihl  Laithne,  of  which  a  copy,  in  the  handwriiing 
of  Dudley  Mac  Firbis,  is  preserved  in  the  library  of  Trinity  Collège, 
Dublin,  (H,  2,  i  $,  p.  116)  appears  the  foUowing  entry  : 
Teo  no  tiamud  no  daur  .i.  dia. 

Teo  seems  formed  like  Skr.  tavas  «  strong  )>,  by  gunation  from  the 
root  TU  «to  be  powerful»,  whence  by  vriddhi  the  Irish  tuath  «people». 
Tiamud  has  perhaps  lost  initial  s  and  may  be  connected  with  Skr. 
stimita  «  immoveable  ». 

Daur  is  possibly,  as  Siegfried  thought,  borrowed  from  the  Old-Norse 
Thôrr.  But  I  should  prefer  to  regard  it  as  a  derivative  from  the  root  dhar, 
whence  Skr.  dharaiia  «  preserving  »,  dhartri,  dharitn  «  supporter  ». 
Dia,  the  old-Welsh  duiu,  is  of  course  =  deva,  deus. 
Other  Celtic  words  for  «  god  )>  are  1)  the  Irish  f-stem  com-diu,  gen. 
coimded,  ace.  coimdith-n,  Gr.  C.^,  257,  which  is  perhaps  cognate  with 
the  Latin  Dis,  Ditis;  2)  the  Irish  ant-stem  fiada,  gen.  fédot,  fîadat,  which 
seems  to  mean  «  the  Knower  »,  from  the  root  vm;  3)  the  old-Welsh  su 
(in  su-ccat  gl.  deus  belli,  Fiacc's  hymn),  now  Hu,  which  (as  the  diph- 
thong  oi  regularly  becomes  u  in  Welsh)  may  be  =  Gaulish  Soius  (Beitr. 
III,  197),  from  the  root  si  «  to  bind  »,  whence  also  the  Welsh  hud 
«  magie  »  =  0.  Norse  seidhr  «  incantatio  magica  ». 

The  most  interesting,  perhaps,  of  Celtic  godnames  is  the  u-stem  Ësus, 
which  M.  d'Arbois  de  Jubainville  (Revue  Archéologique,  Juin  1870)  has 
rightly  referred  to  the  root  is,  Skr.  ish  «  desiderare,  velle  ».  The  pri- 
mary  meaning  of  the  word  would  seem  to  be  simply  «  a  wish  »  (cf.  tar-u 
«  arbor  »,  dâr-u  «  lignum  »,  vs7.u-ç,  acu-s,  etc.).  That  a  god  should  be 
called  by  a  word  meaning  «  wish  »  will  not  surprise  any  one  who  remem- 
bers  the  following  passage  from  the  Deutsche  Mythologie  2  1 26  :  «  Hiermit 
zusammenhaengend,  also  ùberrest  altheidnisches  Glaubens,  scheint  mir 
nun,  dass  unsere  Dichter  des  13.  Jh.  den  Wunsch  personificieren  und 
als  ein  gewaltiges,  schœpferisches  Wesen  darstellen  ». 

But  possibly  Êsus  may,  like  Osci  (one  of  the  Eddaic  names  for  Odin) 
mean  «  der  die  Menschen  des  Wunsches,  der  hœchsten  Gabe  theilhaftig 
machende  ». 

IV.  Cenn  Cruaich. 

Dochôid  patricc  iarsin  tarsinusce  do  maig  slécht  hali  iraibi  ardidal  nahcrend 
.i.  cend  crùaich  cuindachta  0  ôr  ~  argat  7  dû  idal  deac  aili  cumdachta  0 


200  Mélanges. 

umai  imme.  Oîconnairc  patricc  inidal  on  uisciu  dianid  ainm  guthard  (.i. 
gabtha  a  guth)  7  0  rochomaicsigh  dond  idal  conuargaih  a  lâim  do  chur 
bachla  Isa  fair  7  nocorala  acht  dorairbert  siar  doninniuth[?]  fora  leith  ndeis 
arisi(^n)dess  robdi  a  agald  à.  do  temraig  7  maraidli  slicht  inna  bachla  ina 
leith  dm  béos.  7  araidi  nochoroscaig  in  bachall  a  lâim  paîncc  7  rolluicc  in 
talam  inna  di  arracht  déac  aili  conici  a  cinnu  7  atdtfonindus  sin  i  comardugud 
indferta  7  romallach  don  deomon  7  ronindarb  ind  ijernd  7  dorogart  patricc 
inna  huili  cum  rége  lôegairi.  it  hésidi  roaidraiset  ind  idal  7  atconnarctar  in 
na  hule  hé  (.i.  démon)  7  roimeclaigset  anepiltin  mane  chuireth  patrkc  hé  (in 
iffernd).  Rawl.  505,  p.  171,  col.  b  '. 

(f  Thereafter  went  Patrick  over  the  water  to  Mag  Slecht,  a  place 
wherein  was  the  chief  idol  of  Ireland,  to  wit,  Cenn  Cruaich,  covered 
with  gold  and  silver,  and  twelve  other  idols  about  it,  covered  with 
brass.  When  Patrick  saw  the  idol  from  the  water  whose  name  is 
Guth-ard  (/.  e.  elevated  its  voice)  and  when  he  drewnigh  unto  the  idol, 
he  raised  hishand  to  put  Jésus'  crozier  upon  it  and  did  not  reach  [it], 
but  it  bowed  westwards  to  turn  on  its  right  side,  for  its  face  was  from  the 
south,  to  wit,  to  Tara.  And  the  trace  of  the  crozier  abides  on  its  left 
side  still,  and  yet  the  crozier  moved  not  from  Patrick's  hand.  And  the 
earth  swallowed  the  twelve  other  images  as  far  as  their  heads,  and  they 
are  thus  in  sign  of  the  miracle,  and  he  cursed  the  démon,  and  banished 
him  to  hell,  and  Patrick  called  them  ail  cum  rege  Loegaire;  thèse  are  they 
who  adored  the  idol.  And  they  ail  saw  him  (i.  e.  the  démon)  and  they 
feared  their  destruction,  should  not  Patrick  put  him  into  Hell.  « 

IV.  Spirits  speaking  from  weapons. 

Babés  leu  dan  diag  inna  comraime  ferthain  indôenaig.  rind  aurlabra  cechfir 
nomarbtais  do  thabairt  innambossân.  7  dobertis  aur'labrai  nacethra  doilugud 
nacomram  hisudiu  7  dobered  càch  achomram  and  sin  ôsaird  acht  bd  càch 
arùair.  7  isamlaid  dognitis  sin  7  aclaidib  forasUastaib  intan  dognitis 
incomram.  Arimsbitis  aclaidib  friu  intan  dognitis  gùchomram.  Deithb'w 
on  arnolabraitis  demna  friu  dianarmaib  cowidde  bâtir  comarchiforro  anairm. 

«  It  was  a  custom  with  them  (the  Ulstermen)  then,  after  thetrophies, 
to  hold  the  assembly.  The  point  of  the  tongue  of  every  man  they  siew  to 
bring  in  their  pouch  ;  and  they  used  to  bring  the  tongues  of  the  cattle  to 
multiply  the  trophies  therein,  and  every  one  then  openly  used  to  produce 
his  trophy,  but  it  was  every  one  in  turn.  And  it  is  thus  they  used  to  do 
that,  and  their  swords  on  their  thighs  when  they  used  to  make  the 

I.  Anothercopy  from  Egerton  93  in  O'Curry's  Lectures,  p.  538. 


Mélanges.  261 

trophy,  for  their  swords  used  to  turn  against  them  when  they  made  a 
false  trophy.  Reasonable  (was)  this;  for  démons  used  to  speak  to  them 
from  their  arms,  so  that  hence  their  arms  were  safeguards.  »  Seirglige 
Conculainn,  Leb.  na  huidre,  p.  4^3. 

For  talking  swords  see  the  fine  Danish  ballad  Hxvnersvxrdct  (Grund- 
tvig,  Danmarks  Garnie  Folkeviser,  I,  350),  Schiefner's  Kalcvala,  runo  36, 
and  Proc.  R.  I.  Academy,  Mss,  séries,  I,  198. 

V.  The  Bull-feast. 

Dognither  iarom  tarbfes  leo  andsin  cofîastais  esti  cia  diatibertais  rigi. 
ISamlaid  dognithe  inîarbfessin  .i.  tarb  find  domarbad  7  benfer  docathim 
asatha  dia  (f)éoil  7  da  enbruthi.  7  cotlud  dô  fônsaithsin  7  ôrfirindi  do 
cantain  docethridrudib  fair  7  atchiîhe  dô  inaslingi  innas  indfir  norigfaide  and 
asadeilb  asatuarascbail  j  innas  indoprid  dognith.  Diuchtrals  infer  asachotlud 
7  adfiadar  ares  donarigaib  .i.  mbethodach  s£r  sonairt  condacris  derca  tairis 
7  se  osadart  fir  isirc  inemain  mâcha. 

«  Then  a  Bull-feast  is  made  by  them  there,  so  that  they  might  know 
thereout  unto  whom  they  should  give  (the)  kingdom. 

rt  Thus  used  that  Bull-feast  to  be  made ,  to  wit,  a  white  bull  to  kill 
and  one  man.  to  eat  his  fulness  of  his  (the  bull's)  flesh  and  of  his  broth, 
and  sleep  to  him  under  that  fulness,  and  an  6r(?)  of  truth  to  say  over  him 
by  four  druids,  and  by  him  in  vision  used  to  be  seen  the  kind  of  man 
who  should  be  made  king  there,  from  his  shape  and  from  his  description, 
and  the  kind  of  work  he  was  doing. 

The  man  awoke  from  his  sleep  and  makes  known  his  dream  1  to 
the  kings.  To  wit,  a  young  champion,  noble,  strong,  with  two  red 
girdles  over  him,  and  he  above  (the)  pillow  of  a  man  in  sickness  in 
Emain  Mâcha.  »  Ib.,  ib.,  p.  46. 

Compare  the  poet's  mode  of  divination,  Imbas  forosnai,  Cormac's 
glossary,  p.  94. 

VI.  Man  octipartite. 

In  Three  îrish  Glossaries,  p.  xl,  is  printed  from  an  Irish  codex  in  the 
British  Muséum,  a  myth  which  tells  how  Adam  was  madeof  eight  parts  : 
his  flesh  of  the  earth,  his  blood  of  the  sea,  his  face  of  the  sun,  his 
thoughts  ofthe  clouds,  his  breath  of  the  wind,  his  bones  of  the  stones, 
his  soûl  of  the  Holy  Ghost,  his  piety  of  the  Light  ofthe  World.  The 

1.  kes.  Hence  rcsaigthiu  fgl.  somniato),  Tur.  Mr  Hennessy  would  connect  the  French 
rêve,  resve,  as  to  which  Diez  {Etym.  Wcert.  ij,  400")  is  not  very  satisfactory. 


iGi  Mélanges. 

mythographer  goes  on  to  state  the  results  of  excess  in  each  of  the  eight 
components.  I  hâve  lately  found  in  the  Deu/sc/^e  Mythologie,  1218,  the 
foUowing  citation  from  a  Parisian  ms.  of  the  1  ^th  century,  which  reads 
like  a  literal  translation  of  the  Irish  myth.  Both  are  probably  versions  of 
one  original  to  me  unknown. 

{(  Adam  fu  forme  ou  champ  damacien  [=  ager  damascenus],  et  fu  fait 
si  comme  nous  trouuons  de  .viii.  parties  de  chosez.  La  première  partie 
fu  du  limon  de  la  terre,  la  seconde  de  la  mer,  la  tierce  du  soleil,  la 
quarte  des  nues,  la  quinte  du  vent,  la  sisiesme  des  pierres  de  la  terre, 
la  vu"  du  sainct  esprit,  luitiesme  de  la  clarté  du  monde.  La  première 
partie  qui  fu  du  limon  de  la  terre  fu  la  chair,  de  la  seconde  qui  fu  de  la 
mer  fu  le  sangc,  de  la  tierce  qui  fut  du  soleil  furent  les  yeux,  de  la 
quarte  qui  fu  des  nues  furent  les  pensées,  de  la  v°  qui  fu  du  vent  furent 
les  allaines,  de  la  sixte  qui  fu  des  pierres  furent  les  os,  de  la  viit  qui  fu 
du  sainct  esprit  fu  la  vie,  de  la  viii''  qui  fu  de  la  clarté  du  monde  signifie 
crist  et  sa  créance.  Saichiez  que  sil  y  a  en  lomme  plus  du  limon  de  la 
terre  il  sera  paresceux  en  toutez  manières,  et  se  il  y  a  plus  de  la  mer 
il  sera  sage,  et  se  il  y  a  plus  du  soleil  il  sera  beau,  et  se  il  y  a  plus  des 
nues  il  sera  pensifz,  et  se  il  y  a  plus  du  vent  il  sera  yreux,  et  sil  y  a  plus 
des  pierres  il  sera  dur  auer  et  larron,  et  se  il  y  a  plus  du  sainct  esprit 
il  sera  gracieux  et  remply  de  la  divine  escripture,  et  se  il  y  a  plus  de  la 
clarté  du  monde  il  sera  beaux  et  amez.'  » 

Whitley  Stores. 


UN   AUTOGRAPHE  DE   MARIANUS  SCOTTUS. 

Marianus  Scottus  n'est  pas  un  nom  inconnu.  Un  moine  Irlandais  de 
ce  nom  dont  le  nom  véritable  était  Maclbrigte  «  servus  Brigitse  «  vivait 
au  Xle  siècle  à  P'ulda  et  plus  tard  à  Mayence.  Il  écrivit  une  chronique 
fort  estimée  de  ses  contemporains. 

Vers  la  même  époque  un  de  ses  compatriotes  qui  était  son  homonyme 
vint  également  en  Allemagne.  Il  avait  quitté  son  île  en  1067  pour  aller 
en  pèlerinage  à  Rome  :  mais  il  s'arrêta  à  Ratisbonne  où  il  fonda  un 
couvent  sous  l'invocation  de  Saint-Pierre,  couvent  d'où  sortirent  plus 
tard  les  fondateurs  d'autres  couvents  Irlandais.  Nous  trouvons  quelques 
renseignements  sur  ce  Marianus  dans  une  légende  que  nous  ont  con- 

I.  See  Paulin  Paris,  Manuscrits  françois  de  la  Bibliothèque  du  Roi,  IV,  207.  —  |Ms. 
de  l'anc.  fonds  fr.  n"  7044,  fol.  130,  verso.  Ce  passage  est  cité  d'une  façon  incomplète  et 
incorrecte  par  Griinin  et  par  M.  Paulin  Paris.  Nous  le  citons  d'après  le  Ms.  —  H.  G.J 


Mélanges.  26} 

servée  les  Acta  Sanctorum  (Febr.  vol.  II,  pp.  365  et  s.)  où  on  loue 
avant  toute  chose  son  habileté  calligraphique  et  le  zèle  qu'il  mettait  à 
copier  des  manuscrits.  La  légende  raconte  même  qu'une  fois,  la  lumière 
s'étant  éteinte^,  les  doigts  de  sa  main  gauche  brillaient  tellement  qu'il 
put  continuer  d'écrire. 

Quelques-uns  des  mss.  copiés  par  ce  Marianus  nous  ont  été  con- 
servés. L'un  d'entre  eux  se  trouve  à  la  Bibliothèque  Impériale  de 
Vienne,  coté  :  cod.  1247  (olim  Theol.  287).  Denis  l'a  décrit  avec  exac- 
titude dans  son  très-estimable  ouvrage  Codices  manuscripti  theobgici 
bibliothecx  palatins  Vindobon.  Vol  I,  pp.  127-131;  mais  il  commet 
l'erreur,  ainsi  qu'avant  lui  Lambecius,  de  considérer  ce  Marianus  et  le 
chroniqueur  comme  une  seule  et  même  personne.  Ce  ms.  renferme  les 
épitres  de  saint  Paul  avec  gloses  et  commentaire  ;  il  s'y  trouve  quelques 
gloses  Irlandaises  que  Zeuss  a  expliquées  et  traduites  dans  sa  Gramma- 
tica  Celtica  (p.  XXIV).  Denis  a  publié  les  paroles  finales  du  copiste  : 
«  In  honore  indiuiduae  trinitatis  Marianus  Scottus  scripsit  hune  librum 
»  suis  fratribus  peregrinis.  Anima  eius  requiescat  in  pace.  propter  deum 
»  deuote  dicite.  Amen.  XVI.  Kl.  iunii  hodie  feria  VI.  anno  domini. 
))  M.LXXVIIII  j). 

Denis  ne  dit  rien  du  caractère  particulier  de  l'écriture  et  comme 
j'étais  curieux  de  voir  l'écriture  de  ce  calligraphe  Irlandais  si  vanté,  je 
me  fis  à  Vienne  montrer  ce  ms.  Il  est  en  effet  très-bien  écrit  en  une 
minuscule  grande,  pure  et  distincte  oiî  ne  se  rencontrent  pas  les  particu- 
larités bien  connues  de  l'écriture  Irlandaise  employée  pour  les  gloses 
Irlandaises  du  même  ms.  De  ces  gloses,  Denis  en  a  passé  une,  qui  se  trouve, 
dans  la  phrase  que  je  viens  de  citer,  au-dessus  du  nom  de  «  Marianus 
Scottus  ».  Les  caractères  en  sont  quelque  peu  effacés  et  la  glose  en  est 
par  là  devenue  indistincte.  Je  ne  l'avais  même  pas  lue  exactement  du 
premier  coup  lorsque  M.  Gaidoz  me  suggéra  une  correction  dont  un 
nouvel  examen  du  ms.  me  fit  reconnaître  la  justesse.  La  glose  commence 
par  le  signe  .i.  pour  «  id  est  »  et  nous  fait  attendre  le  vrai  nom  Irlan- 
dais de  Marianus.  Le  voici  en  effet  : 

mniredach  trog  macc  robartaig 
c'est-à-dire  :  «  Marianus  miser,  filius  Robartaci».  Cette  qualification  de 
«  miser  »,  Marianus  se  la  donne  aussi  dans  les  gloses  latines  du  ms., 
et  elle  est  assez  fréquente  chez  ces  moines  Irlandais  qui  parcouraient  le 
continent. 

Comme  me  le  fait  remarquer  M.  Gaidoz,  le  nom  Muiredach  est  formé 
du  thème  muir=  gaul.  mori,  lat.  mare.  On  l'a  traduit  en  latin  tantôt  par 
«  Pelagius  »,  tantôt  par  «  Marianus  »  (Martyrology  of  Donegal,  p.  456). 


264  Mélanges. 

«  Marianus  »  est  également  la  forme  latinisée  de  Maelmuire  «  servus 
Mariae  »  (^op.  cit.  p.  186.  n.  1).  Mais  le  nom  de  Muircdach  n'a  rien  de 
commun  avec  celui  de  la  Vierge  Marie,  bien  que  sans  auCun  doute  une 
apparence  de  rapport  avec  «  Maria  »  fit  préférer  le  nom  latin  de  «  Maria- 
nus  ».  Le  nom  de  Muiredach  existe  encore  aujourd'hui  sous  la  forme  angli- 
cisée Murray,  et  le  nom  du  père  de  Marianus,  Robarîach,  se  rencontre 
encore,  anglicisé  en  Rafferty. 

W.  Wattenbach. 


UN  OPUSCULE  GRAMMATICAL  DE  SEDULIUS'. 

Sedulius,  abbé  de  Kildare,  mort  en  829(Lanigan,  Ecdesiastical  History 
of  Ireland,  III,  255)  est  un  auteur  irlandais  auquel  on  attribue,  entre 
autres  ouvrages,  des  commentaires  sur  les  seize  premiers  livres  de 
Vinstitutio  grammatica  de  Priscien,  sur  l'ar^  major  de  Donat  et  sur  Vars 
d'Eutychius.  Le  Commentaire  sur  Eutychius  se  trouve  dans  le  manuscrit 
de  la  Bibliothèque  Nationale  78^0  (xii''  siècle)  :  f"  17.  «  Incipit  com- 
mentariolum  Sedulii  in  artem  Eutitii  Çsic)  grammatici.  Quoniam  in  arte 
Euticis  grammatici  que  de  discernendis  coniugationibus  practiculatur  — 
f"  50,  liquide  patet  quod  ipsa  verba  de  nominibus  sint  traducta.  Explicit. 
Deo  gratias.  «  Un  manuscrit  de  Tours  ^  contient  un  commentaire  de 
Sedulius  sur  Vars  ininor  de  Donat,  que  le  copiste,  qui  paraît  être  du 
XII''  siècle,  n'a  pas  achevé  :  fol.  7$.  «  Incipit  tractatus  Sedulii  scotti  in 
arte  Donati  de  octo  partibus  orationis.  Septem  sunt  species  peristaseos, 

id  est  circumstantie,   sine  quibus  nulle  questiones  proponuntur id 

est  persona,  res  vel  factum,  causa,  locus,  tempus,  modus,  materia  vel 
materies  sivefacultas...  f°  75  v°  Partes  orationis  quot  sunt?  hec  oratiun- 
cula  peusis  est,  —  f"  101,  varie  dictiones  per  quas  magistri  tradunt 
veteres  Romanorum  iurare  (cf.  Grammatici  Latini(Kei\),  IV,  ^62,  30).  » 
Sedulius  fait  parade  de  ses  connaissances  en  grec.  Il  emploie  des  mots 
grecs  sans  nécessité  :  il  traduit  en  grec  une  partie  de  la  définition  du 
pronom  (fol.  8^  v")  :  a  In  quibusdam  codicibus  kgiiur  pcrsonam  inter- 


1.  [Avec  l'autorisation  de  M.  Thurot  nous  empruntons  cette  notice  d'un  opuscule 
jusqu'ici  inconnu  de  Sedulius,  à  son  travail  intitulé  :  Documents  relatifs  à  l'histoire  de  la 
Grammaire  au  Moyen-Age  et  publié  dans  les  Comptes-rendus  de  l'Académie  des  Inscriptions 
et  Belles-Lettres,  i"  série.;  t.  VI,  1870]. 

2.  Ce  manuscrit,  qui  est  aujourd'hui  à  la  Bibliothèque  de  la  Ville  de  Tours  sous  le 
n°  416,  et  qui  a  appartenu  autrefois  au  chapitre  de  Saint-Gatien  de  Tours,  est  formé  de 
six  opuscules  grammaticaux  écrits  du  xi"  au  xiv°  siècle. 


Mélanges.  265 

dum  recipit,  tumque  nulla  generis  inconsequentia  apparet.  Unde  hic  locus 
melius  in  greco  legitur  Kat  IIPcCcoNsCoo  ~t  alIAAcsye-ai  (c'est-à-dire 
y.ix\  TcpcffioTTov  £v(oT£  àîrooé/sTat) ,  quod  interpretatur  et  perso nam  interdum 
recipit.  »  Il  adopte  la  théorie  du  pronom  donnée  par  Priscien,  le  seul 
des  grammairiens  latins  qui  ait  suivi  sur  ce  point  Apollonius  Dyscole, 
et  Tattribue  à  Donat  qui  suivait  une  tradition  toute  différente  (f"  85  v")  : 
«  ïàeo  pêne  dixit  (cf.  Donat  3  57_,  2  (pronomen  est)  pars  orationis  quae 
pro  nomine  posita  tantundem  pœne  significat)  quia  substantiam  tantum 
significat,  non  tamen  qualitaten,  quomodo  nomen.  «  Cette  interpréta- 
tion du  texte  de  Donat  a  généralement  prévalu  au  moyen-âge. 

Ch.  Thurot. 


SUR  L'ETYMOLOGIE  DU  NOM   D'ABÉLARD  '. 

Dans  le  n"  830  des  manuscrits  latins  de  Sorbonne  (Bibliothèque 
Nationale,  mss.  latins,  n"  15451),  se  trouve  le  traité  de  Guibert  de 
Tournai,  auteur  du  xiii«  siècle,  intitulé  De  modo  addiscendi^.  A  la  p.  227 
dudit  manuscrit,  nous  lisons  ce  qui  suit  :  «  Habetis  enim  et  habere 
potestis  ad  manum  Boecium  de  Disciplina  scolarium^  Quintilianum  de 

Institutione  oratoria, Petrum  filium  Alardi  quem  Abaelart  vocant  Ad 

filium,  etc.  » 

Cette  explication  étymologique  n'est  pas  un  fait  isolé  au  xiii*  siècle. 
J'ai  souvenir  que,  quand  j'étais  employé  au  département  des  manuscrits 
de  la  Bibliothèque  Nationale,  M.  Paulin  Paris,  dont  la  table  était  voi- 
sine de  la  mienne,  me  montra  un  jour  un  glossaire  de  ce  temps,  à  la 
première  page  duquel^,  on  lisait  «  Ahdardus,  id  est  filius  Alardi.  «  M.  Paris 
a  le  même  souvenir.  Mon  savant  confrère  n'a  pu  me  retrouver  le 
numéro  du  manuscrit.  Je  consens  donc  à  ce  qu'on  tienne  ce  texte 
pour  non  avenu;  mais  en  voici  un  autre,  quia  été  découvert  par  M.  Hau- 
réau,  et  qui  rapproché  du  passage  de  Guibert  de  Tournai,  est,  on  peut  le 
dire,  décisif. 

Ce  nouveau  texte  est  d'Alexandre  Neckam ,  philosophe  et  poète 
anglais,  né  vers  1150^,  huit  ans  par  conséquent  après  la  mort  d'Abélard, 
et  qui  enseigna  à  Paris  de  1 180  à  1 186  5.  Dans  le  manuscrit  latin  376 

1.  [M.  Renan  avait  envoyé  le  texte  principal  qui  fait  l'objet  de  ce  mémoire  au  Congrès 
celtique  de  Saint-Brieuc,  tenu  en  1867.  Dans  les  Comptes-rendus  de  ce  Congrès,  p.  55, 
le  résultat  est  indiqué,  mais  les  sources  étant  alléguées  sans  précision,  la  note  des 
Comptes-rendus  est  à  peu  près  sans  valeur.  —  H.  G.J 

2.  Voir  Hist.  lin.  de  la  Fr.,  t.  XIX,  p.  138-142. 

3.  Hist.  lin.,  XVUI,  p.  521-523. 


266  Mélanges. 

de  Saint-Germain,  se  trouve  un  ouvrage  bizarrement  intitulé  :  Suppletio 
dcfccîmim  operis  mag.  Alexandri  Neckami  quod  deservit  Laudi  sapientm 
divine.  Rappelant  en  vers  les  noms  des  plus  illustres  docteurs  du 
xii"  siècle^  Neckam  s'exprime  ainsi  : 

Et  Porretanus,  Albricus,  Petrus  Alardi. 

Nul  doute  parle  contexte  que  ce  Petrus  Alardi  ne  soit  Abélard.  Par 
conséquent,  Neckam  regardait  Abslardus  comme  signifiant /î//!i5  Alardi. 
Qu'on  ne  dise  pas  que  ce  peut  être  là  un  écourtement  de  mots  comme  en 
font  souvent  les  versificateurs  latins  du  moyen  âge  (par  ex.  Vitalis  Blcsis 
pour  Vitalis  Blesensis,  etc.)  Si  telle  eût  été  l'intention  de  Neckam,  il  eût 
écrit  Petrus  Alardus. 

La  philologie  est  tout  à  fait  d'accord  avec  les  textes  qui  viennent  d'être 
cités.  Ab  en  gallois  signifie  «  fils  »  et  entre  dans  la  composition  d'un 
très-grand  nombre  de  noms  gallois  du  moyen  âge  ' .  Quoique  la  forme 
basse-bretonne  pour  «  fils  »  soit  mab,  Ab  se  trouve  encore  en  Bretagne 
au  commencement  de  beaucoup  de  noms  propres.  Je  ne  me  rappelais 
qu'un  seul  exemple  dans  ma  ville  natale,  Tréguier;  c'est  le  nom  à'Abgrall 
(fils  de  Grallon).  Je  m'adressai  à  mon  ami,  M.  Luzel,  qui  m'écrivit,  à 
la  date  du  1 1  décembre  1 869  : 

<(  Vous  désirez  savoir  si  je  connais,  dans  le  pays,  d'autres  noms 
commençant  par  Mab  ou  Ab.  —  Je  n'en  connais  pas  qui  commencent 
par  Mab;  du  moins,  je  n'en  ai  aucun  présent  à  la  mémoire,  bien  que  je 
sois  persuadé  qu'il  en  existe,  en  petit  nombre  pourtant. 

«  Quant  aux  noms  commençant  par  Ab,  rares  dans  le  pays  de  Tréguier 
et  la  Cornouaille,  ils  sont  très-communs  dans  le  Léon,  le  Bas-Léon  sur- 
tout. Je  me  rappelle  encore  que  ce  qui  m'étonna  le  plus  en  visitant  la 
petite  ville  de  Lesneven,  il  y  a  quatre  ans,  ce  fut  la  fréquence  de  cette 
syllabe  précédant  les  noms  propres  sur  les  enseignes  de  cette  localité. 
Voici  ceux  de  ces  noms  que  j'ai  retenus  : 

Abalea, 

Abalan, 

Abiven,  i 

Abeven, 

Abolier, 

Abgrall. 
«  Ce  dernier  nom  est  très-répandu.  Il  existe  aussi  des  Alard  et  des 
Hellart  dans  le  Finistère;  j'en  connais  )>. 


I .  Voir  les  listes  de  Gallois  au  service  de  la  France  données  par  Augustin  Thierry, 
la  suite  de  son  Histoire  de  la  Conquête,  parmi  les  pièces  justificatives. 


Mélanges.  26j 

Le  2  janvier  1870,  M.  Luzel  m'écrivait  encore  : 
«  Un  ami  qui  habite  en  Léon  et  à  qui  je  m'étais  adressé  pour  avoir 
les  noms  du  pays  commençant  par  Ab,  vient  de  m'adresser  la  liste  sui- 
vante, que  je  m'empresse  de  vous  faire  parvenir. 

Abarnou,  commune  de  Plouguerneau. 

Appriou  (Ab-Riou),  — 

Aprioual  (Ab-Riwal),  — 

Abgrall^  — 

Abjean,  — 

Abguillerm,  — 

Abiven,  — 

Abiliou,  .  — 

Abernot,  — 

Abautret,  — 

Abalea,  — 

Abily.  — 

Abhamon,  en  Cléder. 

Abeguile.  — 

Abhervé,  Plouniventer. 

«  Je  vous  ferai  remarquer  que  tous  ces  noms  appartiennent  au  Bas- 
Léon.  Mon  ami  me  dit  aussi  que  le  nom  Allard  est  fort  répandu  dans 
tout  le  Finistère.  « 

Cet  ensemble  de  faits  concordants  nous  paraît  établir  avec  certitude 
que  le  nom  d'Abélard  est  bas-breton,  et  signifie  «  fils  d'Alard  o.  A  cela, 
pourtant  s'opposent  des  objections  tirées  des  écrits  mêmes  d'Abélard. 
M.  Hauréau  les  a  très-bien  exposées  dans  un  essai  encore  inédit  sur 
diverses  particularités  relatives  à  Abélard.  Mon  savant  confrère  me 
permet  de  citer  ici  textuellement  sa  précieuse  monographie  : 

«  Dissertant  lui-même  sur  la  valeur  des  noms,  qu'il  considère  comme 
d'institution  humaine,  Abélard  s'exprime  en  ces  termes  :  «  Hoc  voca- 
«  bulum  Abxlardus  mihi  in  eo  coUocatum  est  ut  per  ipsum  de  substantia 
«  mea  agatur  »  ' .  Dans  l'épître  célèbre  où  il  fait  le  récit  de  ses  mal- 
heurs 2  le  triste  amant  d'Héloïse  nomme  son  père  et  sa  mère:  son  père, 
châtelain  du  Pallet,  s'appelait  Béranger,  et  sa  mère  Lucie. 

«Suppose-t-on,  pour  se  tirer  d'embarras,  Bérangerfils  ou  petit-fils  d'Alard, 
et  transmettant  lui-même  à  son  fils  aine  le  surnom  patronymique  d^ Abé- 
lard^ C'est  une  supposition  démentie  par  notre  docteur,  qui,  dans  son 
traité  des  Divisions  et  définitions,  parlant  des  mots  employés  pour  désigner 

1.  Cousin,  Ouvr.  inédits  d'Abélard,  p.  212. 

2.  Œuvres,  t.  I,  p.  7,  édit.  Cousin. 


208  Mélanges. 

une  seule  substance  singulière,  cite  cet  exemple  :  Ut  Abalardus,  quod 
mihi  uni  adliuc  convenire  arbitrer  '.  Personne,  il  le  déclare,  n'avait,  à 
sa  connaissance,  arbitrer,  porté  le  nom  d'Abélard  avant  lui,  adhuc.  Ce 
n'est  donc  pas  un  surnom  patronymique.  » 

Si  l'objection  se  bornait  au  passage   de   VHistoria   calamitatum ,  je 
ferais  observer  que  plus  d'un  indice  porte  à  considérer  cet  ouvrage, 
ainsi   que   la   correspondance    d'Héloise    et    d'Abélard ,    comme    un 
roman.  Quoi  qu'il  en  soit  de  cette  question,  les  deux  autres  passages 
prouvent  bien  qu'Abélard  ne  regardait  pas  son  nom  comme  renfermant 
celui  de  son  père.  Nous  ne  prétendons  nullement,  en  effet,  qu'il  résulte 
du  nom  ù'Ahélard  que  le  père  du  célèbre  philosophe  s'appelât  Alard. 
On  n'a  jamais  parlé  breton  à  Nantes,  ni  surtout  au  Pallet.  Il  n'est  pas 
admissible  qu'un  enfant  naissant  au  Pallet  au  xi''  siècle  ait  porté  le  nom 
de  son  père  précédé  de  Vab  breton.  Telle  n'est  pas  notre  thèse.  Nous  \ 
disons  seulement  que  le  nom  d'Abélard,   quand  il  a  été  formé,  a  été  , 
composé  de  Ab  et  de  Alard,  et  que  cette  formation  a  eu  lieu  primitive-  ' 
ment  en  basse  Bretagne.  Il  n'est  pas  rare  que  l'origine  de  tels  noms  \ 
soit  avec  le  temps  totalement  oubliée  ;  on  s'en  sert  alors  comme  de  i 
simples  appellatifs  sans  égard  pour  leur  étymologie.   Il  en  fut   sans  | 
doute  ainsi  dans  le  cas  de  notre  philosophe.  Son  père  Béranger  l'appela  i 
Petrus,  et  comme  déjà  vers  la  fin  du  xi«  siècle,  l'usage  des  surnoms  j 
était  établi,  il  y  ajouta,  pour  une  raison  que  nous  ne  savons  pas,  le  sur-  ; 
nom  é.'Abdardns.  Alexandre  Neckam,  qui  savait  cette  étymologie  et  i 
qui  n'avait  pas  lu  VHistoria  calamitatum,  en  a  conclu  que  le  père  d'Abé-  ! 
lard  s'appelait  Alard.    C'est   là  de  sa  part  une  conclusion  erronée. 
Barthélémy  signifie   «  fils   de   Ptolémée  »   (Bar-Tolmaï),  et  cependant 
parmi  les  nombreuses  personnes  qui  de  nos  jours  s'appellent  Barthélémy,  , 
il  n'y  en  a  pas  une  seule  dont  le  père  se  soit  appelé  Ptolémée. 

Il  s'en  faut;,  du  reste,  que  le  nom  diAbélard  ait  été  porté  par  le  seul  ' 
philosophe  du  Pallet.  M.  de  Rémusat  et  M.  Hauréau  ont  montré  que  '■ 
l'usage  de  ce  nom  s'est  conservé  jusqu'à  nos  jours.  On  peut  se  demander,  \ 
il  est  vrai,  si  l'usage  de  donner  aux  enfants  des  noms  tirés  des  romans  à  j 
la  mode,  usage  qui  a  si  fort  répandu  le  nom  d'Héloise,  n'a  pas  propagé  ! 
aussi  le  nom  d'Abélard,  d'abord  comme  prénom,  puis  comme  nom  de  ' 
famille.  Je  ne  crois  pas  cependant  que  cette  explication  suffise  ;  car  la 
grande  vogue  romanesque  des  noms  d'Héloise  et  d'Abélard  est  d'une 
époque  trop  moderne  pour  que  de  tels  noms  aient  eu  le  temps  de  devenir 
noms  de  famille.  Ernest  Renan. 

I.  Ouvrages  inédits,  p.  480. 


Mélanges.  269 

ZEUSS    ET    LE    MANUSCRIT    DE    CAMBRAI 
DE  l'histoire  ecclésiastique  des  francs. 

Zeuss  a  signalé  la  présence  d'un  ch  dans  quelques  noms  armoricains 
rapportés  par  Grégoire  de  Tours  aux  livres  IV,  V  et  IX  de  ['Histoire 
ecclésiastique  des  Francs.  Il  n'a  pas  hésité  à  déclarer  que,  suivant  lui,  \'h  qui 
suit  le  c  avait  été  introduite  par  erreur  et  était  dépourvue  de  toute 
valeur  phonétique  ÇGr.  C,  p.  90;  Gr.  C.^,  p.  78). 

Les  érudits  qui  se  sont  occupés  d'histoire  mérovingienne  savent  en 
quelle  haute  estime  les  paléographes  tiennent  le  manuscrit  de  l'Histoire 
ecclésiastique  des  Francs,  conservé  à  la  bibliothèque  de  Cambrai. 

Malheureusement  ce  manuscrit,  dont  un  fac-similé  a  été  donné  par 
D.  Bouquet  dans  le  tome  II  de  son  Recueil  des  historiens  des  Gaules,  n'a 
pas  été  sérieusement  utilisé  jusqu'ici.  M.  le  D''  Arndt,  collaborateur  de 
M.  Pertz  pour  la  publication  des  Monumenta  Germanie,  a  collationné  ce 
manuscrit  avec  l'édition  publiée  au  nom  de  la  Société  de  l'histoire  de 
France.  Il  a  relevé  d'innombrables  variantes  qui  rendent  à  Grégoire, 
défiguré  par  les  inintelligentes  corrections  des  éditeurs,  la  langue  du 
temps  où  il  vivait.  Il  a  eu  l'obligeance  de  me  communiquer  son  travail  ; 
j'ai  remarqué  trois  cas  où  l'/z  admis  jusqu'ici  dans  le  texte  et  repoussé 
par  Zeuss  ne  se  trouve  pas  dans  le  manuscrit  :  Winnocus  au  lieu  de 
Winnoclms,  V,  22;  Warocus  au  lieu  Warochus,  V,  16;  Warocoin  au  lieu 
de  Warochum,  V,  27. 

Il  n'est  donc  pas  téméraire  d'émettre  l'hypothèse  que  les  h  rejetées 
par  le  savant  celtiste  auront  été  introduites  dans  le  texte  par  l'ignorance 
des  scribes,  postérieurement  à  la  rédaction  primitive. 

Signalons  aussi,  IV,  3,  l'orthographe  Bn/f^î^zi,  par  deux  t,  au  lieu  de  la 
leçon  Britanni  par  un  seul  /,  forme  démentie  par  les  mots  Breiz,  Breizad, 
brezounek  qui  supposent  un  double  t  [Gr.  C.^,  p.  1 51). 

H.  d'Arbois  de  Jubainville. 


NOTE  A  L'ARTICLE  DE  M.   HENNESSY. 

En  relisant  récemment  l'intéressant  ouvrage  d'Emile  Souvestre  inti- 
tulé Les  derniers  Bretons,  j'ai  trouvé  une  tradition  relative  aux  corbeaux 
qui  tient  de  près  à  celles  que  M.  Hennessy  a  rapportées  dans  son  récent 
travail  The  ancient  Irish  goddess  of  war.    «   C'est,    dit    Souvestre, 


270  Mélanges. 

une  opinion  généralement  répandue  que  deux  corbeaux  président  à 
chaque  maison.  Tous  deux  sont  liés  à  l'existence  des  chefs  de  la  famille, 
et  si  la  mort  menace  l'un  de  ces  chefs,  vous  voyez  l'oiseau  sinistre  per- 
ché sur  le  toit  et  jetant  son  appel  lugubre.  Il  y  restera  jusqu'au  moment 
où  le  cadavre,  placé  dans  sa  bière,  aura  dépassé  la  porte;  alors  on  le 
verra  s'envoler  pour  ne  plus  revenir,  car  c'était  le  génie  attaché  à  la 
destinée  de  celui  qui  vient  de  trépasser.  »  (Ed.  de  1866,  tome  I,  p.  60.) 
Comme  Souvestre,  généralement  vrai  au  fond,  exagère  quelquefois  pour 
embellir  et  poétiser  son  sujet,  je  m'informai  auprès  de  M.  Luzel  de 
l'authenticité  de  cette  tradition.  Il  me  répondit  qu'elle  est  parfaitement 
exacte  et  qu'il  se  rappelle  l'avoir  souvent  entendu  mentionner  dans  son 
enfance.  Il  y  a  là  un  intéressant  point  de  rencontre  entre  la  mythologie 
irlandaise  et  la  mythologie  armoricaine.  —  Sur  une  tradition  d'un  autre 
genre  relative  au  même  oiseau,  voir  Luzel  :  Chants  populaires  de  la  Basse- 
Bretagne,  p.  94,  note. 

H.  G. 


BIBLIOGRAPHIE, 


Inscriptions  antiques  de  la  Haute-Savoie;  épigraphie  gauloise, 
romaine  et  burgonde,  par  Louis  Revo.n,  conservateur  du  musée  et  de  la 
bibliothèque  d'Annecy,  etc.  50  pages  gr.  in-4%  1870.  Annecy,  Thésio;  Paris, 
Franck.  —  Prix  :  10  fr. 

Il  serait  à  désirer  qu'on  fit  pour  chacun  de  nos  départements  ou  tout 
au  moins  chacune  de  nos  provinces  un  recueil  semblable  à  celui  qu'un 
savant  zélé  a  publié  pour  la  Haute-Savoie,  l'ancien  pays  des  Allobroges. 
Des  travaux  de  ce  genre  où  sont  classées  topographiquement  les  reliques 
épigraphiques  du  passé  sont  de  la  plus  grande  utilité  pour  l'étude  de  nos 
antiquités  nationales.  Conservateur  du  musée  d'Annecy  et  directeur  de 
la  Revue  Savoisienne,  une  des  bonnes  publications  archéologiques  de 
France,  M.  Revon  était  parfaitement  préparé  à  ce  travail  par  ses  études 
et  par  ses  occupations.  Toutes  les  inscriptions  qui  existent  dans  le 
département  ont  été  estampées  par  lui  pour  arriver  plus  sûrement  à  une 
complète  exactitude.  Quelques-unes  des  inscriptions  de  son  recueil  sont 
encore  inédites  :  la  plupart  avaient  été  publiées  de  différents  côtés,  mais 
souvent  avec  de  fausses  leçons.  La  publication  de  M.  Revon  en  fixe 
définitivement  le  texte  en  représentant  par  la  gravure  les  monuments 
eux-mêmes  qui  les  contiennent.  Les  réductions  ont  été  opérées  à  l'aide 
du  pantographe,  et  les  planches,  gravées  avec  un  grand  soin,  sont  au 
dixième  de  la  grandeur  réelle.  M.  Revon  a  divisé  son  recueil  en  trois 
parties.  Il  donne  dans  la  première,  classées  par  arrondissements  et 
cantons,  les  inscriptions  encore  existantes;  dans  la  seconde  les  inscrip- 
tions transportées  à  l'étranger,  détruites  ou  incertaines;  dans  la  troisième 
les  noms  et  marques  sur  poteries,  sur  métal  et  sur  pierre.  Chaque 
inscription  est  suivie  d'une  description  du  monument,  de  renseigne- 
ments sur  sa  provenance,  d'une  discussion  du  texte  quand  la  lecture 
peut  donner  lieu  à  contestation,  de  notes  archéologiques  et  topogra- 
phiques et  d'une  bibliographie.  On  ajoutera  avec  profit  au  commentaire 
de  M.  Revon  quelques  notes  de  M.  Mommsen  publiées  dans  la  Prévue 
Savoisienne  ' . 

1.  Note  sur  les  inscriptions  de  la  Haute-Savoie,  par  M.  Th.  Mommsen,  dans  la  Revue 
Savoisienne  du  ij  janvier  1870. 


272  Bibliographie. 

Deux  inscriptions  seulement  de  ce  recueil,  les  n"*  27  et  87,  se  rap- 
portent à  l'époque  burgonde  ;  toutes  les  autres  sont  gallo-romaines  ou 
romaines.  Sous  le  no  47  nous  trouvons  l'inscription  de  [cyithubodua  que 
nos  lecteurs  connaissent  par  le  récent  article  de  M.  Hennessy.  D'autres 
inscriptions  contiennent  bon  nombre  de  noms  gaulois  d'hommes  et  de 
divinités;  certains  sont  nouveaux  et  viennent  enrichir  le  domaine  de 
l'onomastique  gauloise.  Quelques  unes  apportent  d'utiles  renseignements. 
Ainsi  l'inscription  no  44,  découverte  en  1853,  donne  d'une  façon  pré- 
cise (CEVTRONAS,  à  l'accusatif)  le  nom  d'un  peuple  des  Alpes  dont 
l'orthographe  était  incertaine  dans  les  manuscrits,  et  que  les  éditeurs  de 
César  et  de  Pline  écrivaient;,  les  uns  Ceutrones^,  les  autres  Centrones. 
M.  Gluck  s'était  rallié  à  cette  dernière  forme  parce  qu'il  lui  trouvait  plus 
facilement  une  étymologie  (K.  N.,  p.  62).  L'inscription  savoisienne  a 
fourni  à  M,  L.  Renier  l'objet  d'une  dissertation  (Revue  Archéologique, 
'^59>  P-  3  53"364)  qui  ferme  la  controverse  sur  le  nom  de  ce  peuple, 
et  après  laquelle  on  est  surpris  de  voir  M.  Ebel,  dans  la  nouvelle 
édition  de  la  Grammatica  Celîica  (p.  42),  écrire  Centrones  et  rapprocher 

ce  nom  du  gaélique  cinteir,  «  calcar  ». 

H.   G. 


Etudes  philologiques  sur  les  inscriptions  gallo-romaines  de  ' 
Rennes,  —  Le  nom  de  peuple  «  Redones,  »  —  par  Robert  Mowat,  , 
Paris,  A.  Franck,  1870,  in-8°,  25  pages  et  2  planches.  —  Prix  :  2  fr. 


Ce  mémoire  est  consacré  à  l'étude  de  deux  fragments  d'inscriptions 
romaines  et  d'une  inscription  romaine  complète,  conservés  dans  la  ville 
de  Rennes.  La  sixième  ligne  du  second  de  ces  fragments  consiste  en 
huit  lettres  ITASRIED.  M.  Mowat  restitue  [CIV]ITAS  RIED[ONUM], 
cité  de  Rennes.  Si  l'on  avait,  dans  cette  inscription,  suivi  l'orthographe 
généralement  reçue,  on  aurait  écrit  RED[ONUM]  au  lieu  de  RIED 
[ONU M].  Mais  M.  Mowat  fait  observer  avec  raison  que  Ve  de  Redones 
était  long  (comparez  rhëdd),  et  qu'en  irlandais,  Vê  long,  gaulois  ou 
latin,  a  pour  équivalent  le  groupe  ia.  On  peut  ajouter  que  l'("  long  gaulois 
étant  ordinairement  une  contraction  du  gouna  de  1'/  (c.  à  d.  d'ai,  d'c/),  ia 
et  ie  employés  au  lieu  de  cet  r  long  nous  offrent  une  métathèse  et  non 
un  développement  du  son  primitif.  On  a  déjà  cité  un  autre  exemple  de 
l'emploi  du  groupe  ie  au  lieu  d'e  dans  une  inscription  de  la  Gaule. 
Le  nom  de  Sens,  Agcdincuni  ou  Agedicum,  est  écrit  AGIED  dans  une 
inscription  signalée  par  M.  de  Longpérier.  Le  savant  M.  Gluck  (K.  N. 
p.    16',  note)  trouve  cette  leçon  étrange.   Le  groupe  ie,  dit-il,    était 


Bibliographie.  27^ 

inconnu  aux  Gaulois.  L'exemple  de  RIED[ONUM]  établit  le  contraire'. 
Suivant  M.  Gluck  \'e  à^Agedincum  était  bref,  ce  qui  contredirait  notre 
système  sur  le  rapport  du  groupe  ie  avec  1'?  long.  Mais  M.  de  Longpérier 
a  trouvé  une  monnaie  avec  la  leçon  AFIIA  ;  c'est  une  autorité  supérieure, 
quoi  qu'en  dise  M.  Gluck,  à  celle  des  éditions  de  Ptolémée  où  le  nom 
de  Sens  est  écrit  'Ay£C'.-/.ov,  et  cela  montre  que  Wilberg  a  eu  raison  de 
préférer  'AYr,oi-/.:v. 

Le  groupe  ie  existe  en  français,  il  tient  lieu  de  \'e  bref  accentué  :  c'est 
un  phénomène  moderne  qu'il  ne  faut  pas  comparer  à  celui  dont  nous 
parlons  ici,  où  il  s'agit  bien  de  Ve  accentué,  mais  de  Ve  long.  Je  dis  ac- 
centué :  en  effet  \'c  de  Rcd'ônes *  était  accentué,  puisqu'il  a  donné  «  Rennes  ■»  ; 
Vc  d^Agcdicum,  Agedinciim,  l'était  aussi  probablement,  comparez  Vapincum 
qui  a  donné  «  Gap  ».  En  breton  armoricain  moderne  Vë  long  accentué 
donne  ordinairement  la  diphthongue  oa,  et  Roazon,  accentué  sur  la  pre- 
mière de  ses  deux  syllabes,  est  le  nom  breton  de  Rennes.  Le  même 
phénomène  se  produit  souvent  en  français  :  comparez  «  toile  »  de  tela, 
«  roi  »  de  regem. 

Je  termine  par  une  observation.  C'est  avec  raison  que  M.  Gluck 
préfère  pour  l'ancien  nom  de  Sens  la  forme  Agedincum  à  la  leçon  ordi- 
nairement reçue  Agendicum.  Les  Gaulois  ont  dû  à\reAgedincon,Agiédincon, 
avec  accent  sur  l'antépénultième  bien  que  la  pénultième  fût  longue  par 
position  :  c'était  contraire  aux  lois  de  l'accentuation  latine  de  l'époque 
classique  et  des  bas  temps,  et  la  métathèse  de  l'n,  l'orthographe  Agen- 
dicum, a  eu  probablement  pour  objet  de  soumettre  ce  mot  aux  lois  de 
l'accentuation  latine.  H.  d'à.  de  J. 

[P. -S.  —  Nous  croyons  être  agréable  au  lecteur  en  donnant  ici 
quelques  additions  à  la  brochure  de  M.  Mowat  que  nous  communique 
M.  Mowat  même  ; 

Page  13,  I.  13.  —  Le  collationnement  de  divers  manuscrits  a  fourni  à  M.  L 
Renier  les  variantes  qui  suivent  (voir  Géographie  de  Claude  Ptolcmce. 
dans  l'Annuaire  de  la  Société  des  Antiquaires  de  France,  année  1848, 
page  264,  note  14)  : 

'Ptr,5ovE?,  Biblioth.  Nation.,  mss.  1401;  1 19,  du  Supplément;  1402: 
337,  du  fonds  Coislin;  2413;  ms.  Palatin  n''2  ; 

'P-otoôvEç,  Bibl.  Nat.,  mss.  1404;  1403;  Palat.  n°  i. 

1.  On  peut  encore  citer  d'autres  exemples,  comme  Vienna,  Adietuanus,  Vetienus,  Bitieu; 
mais  dans  ces  mots  la  valeur  phonétique  du  groupe  ie  serait  difficile  à  déterminer. 

2.  M.  Mowat  constate  très-justement  l'existence  en  Gaulois  d'un  suffixe  -ïin-  par 
p  bref;  il  donne  avec  raison  comme  exemples  Rïd'6nes,Turones,  Lingoies,  mais  c'est  par 
inadvertance  qu'il  cite  Suessiones,  Soissons. 


274  Bibliographie.  « 

Sous  des  formes  diverses,  la  transcription  grecque  a  évidemment 
cherché  à  reproduire  la  diphthongaison  indigène  que  César,  tout  puriste 
qu'il  était,  a  été  inhabile  à  rendre  ;  les  manuscrits  qui  nous  restent  de 
ses  écrits,  ne  portent  en  effet  que  Redones  ou  Rhedones,  suivant  les  uns 
ou  les  autres. 

P.  1 5.  ligne  10.  —  Ajoutez  encore  les  mots  forensis,  circcnsis,  amnensis,  osdensis, 
portuensis,  de  forum,  cirais,  amnis ,  ostium,  Ostia,  portas,  tous  appel- 
latifs  qui  présentent  à  l'esprit  une  notion  de  lieu. 

P.  23,  ligne  1 1  en  remontant.  —  Mais  il  est  une  objection  plus  décisive  encore; 
toutes  les  personnes  qui  ont  habité  ou  visité  la  Haute-Bretagne,  et 
particulièrement  les  environs  de  Rennes,  savent  que  tout  ce  pays 
est  trop  accidenté  pour  qu'on  ait  jamais  songé  à  le  qualifier  de 
plaine. 

P.  26,  ligne  5  en  remontant.  —  Cet  exemple  n'est  pas  isolé;  Dom  Morice 
mentionne  des  documents  du  XIV°  siècle  dans  lesquels  on  trouve  les 
noms  de  Pierre  de  Morzelle  (ann.  1301),  Guillaume  de  Morselle  (ann. 
1351),  Olivier  de  Morzelles  (ann.  1553).  Voir  les  «  Preuves  de  l'Hist. 
de  Bretagne,  tome  I,  col.  1138,  1469,  1487.] 


L'Archéologie  Irlandaise  et  Mlle  Stokes. 

L'intéressant  mémoire  de  M.  Unger  ayant  familiarisé  nos  lecteurs 
avec  l'histoire  de  la  miniature  irlandaise,  nous  voulons  signaler  à  leur 
attention  les  beaux  travaux  que  Mlle  Stokes  a  consacrés  à  cette  branche 
de  l'histoire  de  l'art.  Mlle  Stokes  n'a  pas  moins  bien  mérité  de  l'art 
irlandais  que  M.  Whitley  Stokes  de  la  philologie  celtique,  et  on  pourrait 
croire  que  le  frère  et  la  sœur  se  sont,  de  propos  délibéré,  partagé  entre 
eux  les  trésors  de  l'antiquité  irlandaise.  Ce  sont  ses  goiâts  d'artiste  qui, 
amenant  d'abord  Mlle  Stokes  à  reproduire  par  le  crayon  et  par  le  pin- 
ceau les  plus  belles  pages  des  manuscrits  à  miniatures,  l'ont  peu  à  peu 
poussée  à  en  étudier  l'histoire.  Le  talent  avec  lequel  sa  main  habile  et 
exercée  reproduit  les  enchevêtrements  les  plus  délicats  de  la  fantaisie 
irlandaise  a  été  loué  par  les  juges  les  plus  compétents,  et  le  D'  Stuart 
a  pu  dire  sans  exagération  que  «  le  manteau  des  anciens  enlumineurs 
irlandais  est  tombé  sur  les  épaules  de  Mlle  Stokes  '.  » 

La  première  en  date  de  ses  publications  est  le  Cromlech  de  Howth  *. 

1.  Sculptured  Stones  of  Scotland,  t.  Il,  p.  Lxxxn,  n. 

2.  The  Cromlech  on  Howth,  a  poem  by  Samuel  Ferguson,  Q^  C,  M.  R.  1.  A.,  with 
illuminations  from  the  Bocks  of  Kells  and  of  Durrovk',  and  drawings  from  nature,  hy  M. 
S.  [Margaret  Stokes].  With  notes  on  Celtic  Ornamental  Art,  revised  by  George  Pétrie, 
LL.D.  London,  Day  and  Son.  31  p.  gr.  in-4  avec  15  planches  chromo-lithographiées  et 
sept  aquarelles. 


Bibliographie.  275 

Ce  magnifique  volume  est  une  édition  du  poème  de  M.  S.  Ferguson, 
sur  planches  chromo-lithographiées,  où  chaque  strophe  commence  par 
une  initiale  ornée,  empruntée  par  Mlle  Stokes  au  célèbre  manuscrit  de 
Kells  ou  à  celui  de  Durrow.  Quelques  aquarelles  représentant  le  crom- 
lech et  divers  paysages  de  Howth  accompagnent  le  poème  et  lui  servent 
d'illustrations  dignes  de  lui.  A  la  suite  du  poème  vient  une  notice  étendue 
sur  l'ornementation  irlandaise  où  Mlle  Stokes  décrit  les  principaux 
manuscrits  à  miniatures  d'origine  irlandaise  (p.  9-19),  et  analyse  le 
système  d'entrelacs  propre  à  ces  miniatures  (p.  20-3 1).  Cette  dernière 
partie  de  son  travail  est  une  des  études  les  plus  approfondies  qu'on  ait 
écrites  sur  les  détails  de  cette  ornementation. 

Quelque  temps  après,  Mlle  Stokes  reproduisait  des  pages  entières  du 
manuscrit  de  Kells,  du  manuscrit  connu  sous  le  nom  de  «  Guirlande  de 
Howth  »  et  du  Psautier  de  Ricemarch,  pour  accompagner  un  travail  de 
M.  le  D''  Todd  sur  ces  manuscrits^  publié  par  la  Société  des  Antiquaires 
de  Londres  '. 

Parmi  les  pages  reproduites  par  Mlle  Stokes  avec  une  admirable 
patience  et  une  remarquable  fidélité,  se  trouve  celle  du  manuscrit  de 
Kells  qui  renferme  le  monogramme  du  nom  du  Christ.  Quand  on  a  vu 
cette  page  si  riche  en  dessins  harmonieux,  en  coloris  variés,  où  l'habileté 
la  plus  exercée  se  mêle  à  l'imagination  la  plus  luxuriante,  telle  enfin  que 
la  plume  d'un  Th.  Gautier  pourrait  seule  en  donner  l'idée,  on  est  saisi 
d'admiration  à  la  fois  pour  un  art  aussi  accompli  à  une  époque  aussi 
barbare  et  pour  le  talent  de  l'artiste  qui,  en  quelque  sorte,  crée  un  pareil 
chef-d'œuvre  à  nouveau. 

Le  même  art  d'ornementation,  dont  Mlle  Stokes  suit  l'histoire  avec 
une  sollicitude  presque  affectueuse,  s'appliquait  avec  le  même  soin  à 
tout  ce  qui  servait  au  culte.  Deux  objets  de  ce  genre,  le  reliquaire  de 
Saint  Moedoc  et  l'évangile  de  Saint  Molaise,  lui  ont  récemment  fourni 
l'objet  d'un  mémoire  publié  dans  le  recueil  de  la  Société  des  Antiquaires 
de  Londres  2.  Ces  objets  n'ont  sans  doute  pas  appartenu,  comme  le 
voudrait  la  tradition,  aux  saints  dont  ils  portent  le  nom,  mais  ils  étaient 
conservés  dans  des  églises  placées  sous  le  patronage  de  saint  Moedoc  et 
de  saint  Molaise  :  de  là  l'erreur  de  la  tradition.  Après  avoir  rappelé  en 

1.  Descriptive  remarks  on  illuminations  in  certain  ancient  Irish  manuscripts,  by  the 
Rev.  J.  H.  Todd.  D.D.,  etc.  London,  1869,  16  p.  gr.  in-folio  avec  quatre  planches 
chromo-lithographiées.  —  Extrait  du  tome  VI  des  Vetusta  Monumenta  de  la  Société  des 
Antiquaires. 

2.  On  two  Works  of  ancient  Irish  art,  known  as  the  Breac  Moedog  (or  shrine  of  St. 
Moedog';  and  the  Soiscel  Molaise  (or  gospel  of  St.  Molaise).  Communicated  to  the  Society 
of  Antiquaries  by  Miss  Stokes.  London,  1871,  20  p.  in-4  avec  8  planches.  —  Extrait  de 
The  Arch<£ologia,  vol.  xliu,  pp.  1 31-150. 

»9 


2^6  Bibliographie. 

peu  de  mots  l'histoire  des  deux  saints,  Mlle  Stokes  décrit  les  deux 
objets  en  détail.  Le  reliquaire  de  Saint  Moedoc,  qui  a  conservé  le  sachet 
de  cuir  dans  lequel  on  le  portait,  est  fait  de  bronze  pâle  ;  il  affecte  la 
forme  d'un  édifice  aux  proportions  élémentaires  et  il  n'est  pas  improbable 
qu'il  représente  l'église  primitive  à  laquelle  il  était  destiné.  Il  est  couvert 
de  figures,  au  nombre  de  vingt-et-une,  qu'il  est  difficile  d'identifier 
toutes,  mais  qui  offrent  les  caractères  communs  aux  personnages 
sacrés  que  l'ancien  art  irlandais  aimait  à  représenter  dans  ses  œuvres. 
—  Le  nom  d'évangile  de  Molaise  désigne  un  coffret,  fait  de  plaques  de 
bronze  de  différentes  couleurs,  destiné  à  renfermer  une  copie  des  évan- 
giles. Une  inscription  qu'il  porte  encore,  quoique  à  demi  effacée,  nous 
donne  la  date  de  sa  fabrication  (fin  du  x«  siècle  ou  commencement  du 
xi*^).  Le  nom  de  l'artiste  y  est  conservé  :  Gillabaithin  '.  Les  entrelacs  de 
l'ornementation  de  ces  objets  leur  donne  un  caractère  tout  irlandais. 

L'accueil  favorable  fait  aux  travaux  de  Mlle  Stokes  l'a  encouragée  à 
marcher  dans  la  voie  des  études  archéologiques.  Nous  avons  déjà 
annoncé  (p.  177)  le  recueil  qu'elle  préparait  des  inscriptions  chrétiennes 
de  l'Irlande.  Nous  apprenons  avec  plaisir  que  le  premier  volume  de 
cette  importante  collection  a  paru  pendant  le  siège  de  Paris  et  que  le 
second  est  sous  presse.  H.  G. 

The  Fireside  Stories  of  Ireland,  by  Patrick  Kennedy.  xij-i74p.  in- 12. 
Dublin,  Me  Glashan  ;  London,  Simpkin;  1870.  —  Prix  :  i  sh.  6  d. 

Irish  Folk  Lore  :  traditions  and  superstitions  of  the  country  ;  with  humo- 
rous  taies,  by  Lageniensis.  x-3 12  p.  in- 12.  Glasgow,  Cameron  and  Fer- 
guson  [1870]. 

Ces  deux  publications  témoignent  de  l'intérêt  éclairé  que  les  écrivains 
irlandais  prennent  aujourd'hui  à  l'étude  des  traditions  populaires.  Aucun 
pays  n'est  plus  riche  que  l'Irlande  en  antiques  légendes  et  en  curieuses 
superstitions,  mais  bientôt  peut-être  on  en  trouvera  malaisément  la  trace. 
L'Irlande  de  nos  jours  n'est  déjà  plus  l'Irlande  de  Crofton  Croker  et  de 
Carleton.  Les  anciens  usages  s'effacent  en  même  temps  que  disparait 
l'ancienne  langue.  Les  écoles  primaires,  les  nécessités  de  la  vie  et  de 
l'émigration  répandent  de  plus  en  plus  l'usage  de  l'anglais  qui  amène 
après  lui  des  idées  plus  modernes  et  plus  pratiques  :  les  chemins  de  fer 
créent  une  circulation  plus  favorable  aux  intérêts  matériels  qu'à  la  poésie 
des  souvenirs,  et  les  Celtes  d'Irlande  perdent  insensiblement  l'antique 


1.  Et  non  Gillubaithin,  comme  lit   M"''  Stokes;  l'a  n'est  pas  douteux,  du  moins  dans 
le  dessin  qu'elle  donne. 


Bibliographie.  277 

patrimoine  de  leur  langue,  de  leurs  usages  et  de  leurs  traditions.  Aussi 
verrons-nous  toujours  avec  plaisir  apporter  de  nouveaux  matériaux  à 
l'étude  encore  peu  tentée  de  la  mythologie  celtique.  —  M.  Kennedy, 
à  qui  nous  devons  déjà  un  fort  intéressant  volume  sur  ce  sujet  '  nous 
donne  aujourd'hui  un  recueil  de  contes  populaires  fait  avec  soin  et  accom- 
pagné de  quelques  rapprochements,  principalement  avec  les  contes 
écossais  de  M.  Campbell  et  les  contes  allemands  des  frères  Grimm.  Sa 
préface  promet  un  troisième  volume  consacré  aux  légendes  relatives  aux 
saints  et  aux  héros  ossianiques.  —  L'ouvrage  de  Lageniensis  (pseudo- 
nyme sous  lequel  se  cache  un  ecclésiastique  distingué  de  Dublin)  a 
surtout  pour  but  de  faire  apprécier  au  grand  public  le  côté  poétique  et 
pittoresque  des  traditions  irlandaises.  L'auteur  les  passe  toutes  en  revue 
dans  des  récits  d'une  lecture  agréable  et  qui  donnent  une  idée  assez 
fidèle  de  l'ensemble  du  Folk  Lore  irlandais,  mais  qui  n'approfondissent 
pas  le  sujet. 

H.  G. 


Miscellaneous  Poems  translatée!  into  Gaedhiic,  by  the  Rev.  Edward  Mac 
CoY.  Dublin,  Fowler,  1869,  xj-206  p.  in- 12. 

Les  productions  littéraires  dans  la  langue  nationale  sont  trop  peu 
nombreuses  aujourd'hui  en  Irlande  pour  que  nous  ne  signalions  pas  avec 
empressement  un  volume  de  poésies  irlandaises  publié  récemment  par 
M.  Ed.  Mac  Coy.  Ce  sont  des  traductions  de  pièces  choisies  parmi  les 
chefs-d'œuvre  de  Th.  Moore,  Burns^  Byron,  Davis  et  autres  poètes. 
Cultiver  la  langue  nationale  qui  tombe  de  plus  en  plus  au  rang  de  patois, 
tenter  de  l'épurer,  de  la  relever  de  la  vulgarité,  d'en  faire  l'organe  d'une 
vie  littéraire,  est  d'un  patriotisme  trop  rare  en  Irlande  pour  que  les 
celtophiles  ne  sachent  pas  gré  à  M.  Mac  Coy  de  sa  courageuse  tenta- 
tive. Nous  désirons  que  son  volume  soit  lu  dans  le  public  qui  parle  irlan- 
dais et  qu'il  y  répande  l'amour  de  la  langue  nationale.  Malheureusement 
l'écart  est  aujourd'hui  fort  grand  entre  la  prononciation  et  l'orthographe 
de  l'irlandais,  et  pour  que  l'irlandais  devint  de  nouveau  langue  littéraire 
et  moyen  de  communication  intellectuelle,  il  faudrait,  pensons-nous, 
qu'une  réforme  orthographique  rendit  le  langage  écrit  plus  ressemblant 
au  langage  parlé.  C'est  un  sujet  d'étude  qui  mérite  d'attirer  l'attention 
des  patriotes  qui,  comme  M.  Mac  Coy  et  M.  Ulick  Bourke,  voudraient 
rendre  au  gaélique  d'Irlande  son  éclat  et  sa  vitalité. 

H.  G. 

1.  Legendary  Fictions  of  the  Irish  Celts,  London,  1866. 


278  Bibliographie. 

Libérien  hag  Avielen,  or  the  catholic  epistles  and  gospels  for  the  day  up  to 

Ascension  translated  for  the  first  into  the  brehonec  of  Bnttany  :  also  in  three 
other  parallel  columns  a  new  version  of  the  sanie  into  Breizounec  (conimonly 
called  breton  and  armorican),  a  version  into  Welsh  mostly  new  and  closeiy 
resembling  the  breton,  and  a  version  gaelic  or  manx  or  cernaweg,  with  illus- 
trative  articles  by  Christoll  Teurien  and  Charles  Wari.ng  Saxton  D.  D. 
Ch.  Ch.  Oxford.  —  Londres,  Trûbner,  petit  in-folio  oblong,  70  feuillets 
sans  date. 

Il  y  a  dans  ce  volume  deux  parties  à  distinguer,  l'une  consiste  en 
traductions  d'épîtres  et  d'évangiles,  l'autre  en  dissertations. 

Les  traductions  d'épîtres  et  d'évangiles  sont  disposées  sur  quatre 
colonnes,  bien  que  le  titre  n'en  annonce  que  trois.  La  première  colonne 
contient  une  traduction  galloise  dont  une  partie  qui  ne  porte  pas  de 
signature  est  empruntée  à  la  bible  galloise  de  la  Société  Biblique  de 
Londres,  édition  de  1864,  et  dont  l'autre  partie  signée  des  noms  de 
MM.  Silvan  Evans,  R.  Williams  et  James  Johns,  est  nouvelle  comme  le 
titre  l'annonce.  La  seconde  colonne  renferme  une  traduction  en  breton 
de  Vannes  non  signée,  mais  due  probablement  à  la  plume  de  M.  Terrien 
qui  est  né  dans  le  Morbihan  et  à  qui  l'on  doit  déjà  la  traduction  de 
l'évangile  de  saint  Mathieu,  en  breton  de  Vannes,  publiée  à  Londres, 
en  1857,  aux  frais  de  Louis-Lucien  Bonaparte.  Mais  la  traduction 
donnée  dans  le  volume  dont  nous  rendons  compte  est  différente  de  celle 
qu'a  éditée  le  prince  Louis-Lucien  Bonaparte.  La  troisième  colonne  est 
occupée  par  une  traduction  en  dialecte  de  Cornouailles  et  de  Léon  que 
l'on  peut,  je  pense,  encore  attribuer  à  M.  Terrien.  Dans  la  quatrième 
colonne  on  trouve  presque  partout  la  traduction  en  gaélique  d'Ecosse, 
imprimée  à  Edimbourg  pour  la  Société  Biblique  de  cette  ville,  par 
Stevenson  et  C'%  en  1854,  sous  les  titres  de  Leahkraichean  an  t-seann 
tiomnaidh  et  de  Tiomnadh  nuadh.  Toutefois  la  traduction  de  l'épître  et 
de  l'évangile  du  premier  dimanche  de  l'Avent  a  été  refaite  par  M.  Th. 
Mac  Lauchlan,  et  la  traduction  en  gaélique  d'Ecosse  a  été  remplacée  par 
une  traduction  en  dialecte  de  l'île  de  Man  pour  l'épître  du  second 
dimanche  de  l'Avent  et  pour  toutes  les  épîtres  et  tous  les  évangiles,  à 
partir  du  3"  dimanche  après  Pâques.  La  traduction  en  dialecte  de  l'île 
de  Man  est  empruntée  à  la  Bible,  publiée  dans  le  dialecte  de  Man  par 
la  Société  Biblique,  sous  ce  titre  :  Yn  Vible  Casherick.,  ny  yn  Chenti 
Chonaant,  as  yn  Conaant  Noa,  Londres,  1819.  J'ignore  la  provenance  de 
la  traduction  de  l'évangile  du  second  dimanche  de  l'Avent,  la  seule,  si 
je  ne  me  trompe,  qui  soit  écrite  en  comique. 

L'intérêt  principal  du  livre  se  trouve  dans  la  facilité  de  comparer  les 
traductions  d'un  même  original  en  quatre  dialectes  différents. 


Bibliographie.  279 

Je  ne  puis  apprécier  jusqu'à  quel  point  les  auteurs  des  parties  nou- 
velles de  la  traduction  galloise  ont  amélioré  la  traduction  de  la  Société 
Biblique.  Je  ne  m'aventurerai  pas  à  critiquer  la  traduction  vannetaise  de 
M.  Terrien  :  mais  quand  il  a  prétendu  confondre  en  un  seul  dialecte, 
les  deux  dialectes  de  Cornouailles  et  de  Léon,  et  nous  donner,  lui 
vannetais,  un  texte  rédigé  en  un  dialecte  autre  que  le  sien,  il  a  fait  acte 
d'irréflexion  et  de  témérité.  Je  vais  donner  quelques  exemples.  Je  les 
prendrai  dans  l'évangile  de  la  messe  de  l'aurore  à  Noël  (S'  Luc,  II, 
I  $-20).  Le  texte  gallois  est  emprunté  à  la  Société  Biblique  de  Londres, 
le  texte  gaélique  à  la  Société  Biblique  d'Edimbourg.  Le  premier  a  rendu 
les  mots  0'.  Tro'.y.éveç  (bergers)  par  y  bugeiliaid,  le  second  par  na 
buachaillean.  M.  Terrien,  dans  la  traduction  vannetaise  s'est  servi  des 
mots  er  vugulien  qui  ont  le  même  sens  et  la  même  étymologie  (voir 
Stokes,  Ir.  GL,  p.  81,  n""*  583,  584).  Mais  lorsque  dans  la  traduction 
en  dialecte  de  Cornouailles  et  de  Léon  il  emploie  les  mots  ar  vugulien,  il 
me  parait  bien  hardi.  S'il  ne  voulait  pas  dire  comme  Le  Gonidec  ÇBibl 
Sanîel,  t.  II,  p.  434)  ar  veserien,  il  fallait,  comme  le  fait  M.  Troude  dans 
son  Nouveau  Dictionnaire  pratique  français  et  breton,  recourir  à  une  péri- 
phrase et  écrire  ar  bugale  an  denved.  Bugel,  pluriel  bugale  et  non  bugulien, 
a  en  dialecte  de  Léon  perdu  son  sens  primitif  de  bubulcus  et  veut  dire  en 
général  ((  garçon  )>  ou  «  enfant.  »  Au  vers  1 7  aCiToTç  (à  eux)  est  rendu 
par  wrtiiynt  en  gallois^  par  dehai  en  vannetais,  par  dezai  en  dialecte  de 
Cornouailles  et  de  Léon.  En  léonnais  on  dit  dezho.  Au  vers  19,  sv  ty; 
7.7._:c'x  rj-r,i  (dans  son  cœur)  devient  en  gallois  yn  ei  chalon,  en  vanne- 
tais en  lie  halon,  en  dialecte  de  Cornouailles  et  de  Léon  en  he  cVialon  : 
c'est  du  cornouaillais;  en  léonnais  on  dirait,  au  lieu  de  c  halon,  chaloun. 
Au  vers  20  ooziZ'ynt:  (glorifiant)  en  gallois  gan  [g]ogoneddu  est  traduit 
en  vannetais  par  en  ur  rein  gloer  (en  donnant  gloire)  périphrase  identique 
à  celle  du  gaélique  a'  tabhairt  gloire.  M.  Terrien  a  voulu  employer  en  dia- 
lecte de  Léon  et  de  Cornouailles  une  formule  identique  en  eur  ri  gloar, 
mais  «  donner  )>  se  dit  en  léonnais  rei,  en  cornouaillais  roei  et  non  ri. 

Il  me  resterait  à  parler  des  rares  dissertations  latines  de  M.  Saxton, 
de  celle  où  par  exemple  cet  honorable  théologien  attaque  M.  Max  Mùller, 
l'appelant  :  pontifex  ille  maximus  mercurialium  virorum  qui  more  sagans, 
etc.  Il  me  resterait  à  apprécier  les  nombreuses  dissertations  françaises 
de  M.  Terrien  qui  par  exemple,  folio  2  H,  vo,  cite  à  propos  des  runes, 
trois  mots  gothiques  en  les  écrivant  de  manière  à  prouver  qu'il  n'a  pas 
de  cette  langue  l'idée  la  plus  élémentaire,  puis  continue  en  vers  : 

Oui  je  vous  le  dis  tout  bas. 
Tout  bas,  en  cachette, 


28o  Bibliographie. 

Oui  je  vous  le  dis  tout  bas, 
Mais  n'en  parlez  pas. 

Enfin,  suivant  plus  ou  moins  son  idée,  il  nous  entretient  des  Gaulois 
à  main  légère  et  porteurs  de  cannes,  qui  payaient  les  taverniers  romains, 

A  la  façon  de  Bar-bari 

Biri-Biribi 
A  la  façon  de  Bar-bari 

Mon  ami. 

Ceux  de  nos  lecteurs  qui  voudront  s'instruire  devront  se  borner  à  lire 
les  textes  néo-celtiques  édités  par  MM.  Terrien  et  Saxton;  et,  après  y 
avoir  consacré  les  heures  sérieuses,  réserver  les  dissertations  françaises 
pour  les  heures  de  récréation. 

H.    D'A.    DE   J. 


Gramadeg  o  laith  y  Cymry;  a  grammar  of  the  Welsh  language,  by 
William  Spuruell.  Third  édition.  Carmarthen,  W.  Spurrell,  1870.  yii)-2o6  p. 
in- 12.  —  Prix  :  5  sh. 

«  Prétendre  à  une  grande  originalité  en  mettant  au  jour  une  gram- 
maire galloise  serait  vain,  lorsque  tant  d'écrivains  ont  traité  ce  sujet, 
tandis  que  les  principes  de  la  langue  demeurent  sans  changement.  » 
Ainsi  s'exprime  M.  Spurrell  dans  sa  préface  :  nous  croyons  au  contraire 
qu'un  grammairien  gallois  pourrait  «  prétendre  à  une  grande  originalité  » 
en  exposant  d'une  façon  scientifique  les  lois  qui  président  au  dévelop- 
pement de  sa  langue.  Un  pareil  travail,  qui  aurait  pour  base  et  pour 
point  de  départ  la  Grainmatica  Celtica  de  Zeuss  devrait  séduire  quelqu'un 
des  écrivains  gallois  familiarisés  avec  l'étude  de  I2  philologie  celtique. 
Une  grammaire  historique  de  la  langue  galloise  serait  une  œuvre  utile 
et  bienvenue  auprès  du  public  gallois  lui-même  qui  porte  un  si  vif  intérêt 
à  sa  langue  nationale'.  Les  écrivains  gallois  y  gagneraient  même  à 
mieux  connaître  leur  langue  et  ne  parleraient  pas  par  exemple,  comme 
le  fait  M.  Spurrell,  d'un  préfixe  ys  dans  les  mots  ysbryd  (spiritus)  elys- 
baid  (spatium)!  Les  grammaires  galloises  existantes  ne  sont  guère  que  des 
manuels  pour  l'étude  pratique  de  la  langue.  Ces  réserves  faites,  disons 
que  la  grammaire  de  M.  Spurrell  est  une  des  meilleures  et  méritait 
d'arriver  à  une  troisième  édition.  Les  lois  de  la  syntaxe  et  les  règles  du 
changement  des  consonnes  initiales  sont  exposées  avec  clarté.  En  outre, 


I.  Voir  notre  article  Les  Celtes  du  pays  de  Galles  et  leur  littérature  dans  la  Revue  des 
Deux  Mondes  à\x  i"  mars  1871. 


Bibliographie.  281 

l'auteur  présente  parfois  des  observations  dont  les  philologues  peuvent 
tirer  profit,  par  exemple  sur  la  ressemblance  d'idiotismes  gallois  et  français 
(p.  17$),  sur  certaines  particularités  de  prononciation  provinciale 
(passim),  sur  des  exemples  de  métathèse  (p.  40)  et  quelques  autres 
points  encore. 

H.  G. 


Llyfryddiaeth  y  Cymry  :  yn  cynnwys  hanes  y  llyfrau  a  gyhoeddwyd  yn 
yr  iaith  Gymraeg,  ac  mewn  perthynas  i  Gymru  a'i  thrigolion,  o'r  flwyddyn 
I  ^46  hyd  y  flwyddyn  iSoo;  gyda  chofnodau  bywgraffiadol  am  eu  hawduron, 
eu  cyiieithwyr,  eu  hargrafFydion,  a'u  cyhoeddwyr.  Gan  y  diweddar  Parch. 
William  Rowiands  (Gwilym  Lleynj;  gyda  chwanegion  a  chyweiriadau  gan  y 
Parch.  D.  Silvan  Evans/B.  D.  Llanidloes,  Pryse,  1869.  xxxij-762  p.  in-8. 
—  Prix  :  21  sh. 

Un  des  secours  les  plus  utiles  à  l'histoire  littéraire  est  une  bonne  biblio- 
graphie; aussi  sommes-nous  heureux  de  voir  paraître  l'important  ouvrage 
en  langue  galloise  dont  nous  venons  de  transcrire  le  titre  (en  français  : 
«  Bibliographie  Galloise,  contenant  l'indication  des  livres  en  gallois,  et 
de  ceux  relatifs  au  pays  de  Galles  ou  à  des  Gallois,  publiés  de  1  $46  à 
1800;  avec  des  notes  biographiques  sur  les  auteurs,  éditeurs,  impri- 
meurs ;  par  feu  William  Rowiands  (Gwilym  Lleyn)  avec  des  additions 
et  des  corrections  par  M.  D.  Silvan  Evans.  »)  Les  éclaircissements 
qui  accompagnent  l'indication  de  chaque  ouvrage  font  de  ce  livre  une 
véritable  histoire  de  la  littérature  galloise  pendant  les  trois  derniers 
siècles.  M.  William  Rowiands  avait  consacré  quarante  années  de  sa  vie  à 
ce  travail  bibliographique,  et  après  sa  mort  son  manuscrit  fut  confié  à 
un  des  scholars  les  plus  distingués  de  la  Principauté,  M.  Silvan  Evans, 
qui  le  revit  et  le  compléta.  Cette  compilation  était  d'autant  plus  difficile 
à  mener  à  bien  qu'il  n'existe  pas  de  grande  collection  de  livres  gallois  et 
qu'il  a  fallu  en  réunir  les  éléments  en  fouillant  les  bibliothèques  parti- 
culières et  en  dépouillant  les  catalogues  de  livres  d'occasion.  C'est  dire 
qu'il  ne  pouvait  être  absolument  complet,  comme  en  convenait  M.  -Silvan 
Evans  dans  sa  préface.  Nous  même  avons  noté  quelques  lacunes  et 
M.  John  Peter  nous  en  a  signalé  d'autres.  M.  Silvan  Evans,  du  reste,  a 
continué  ses  recherches  depuis  la  publication  de  la  Llyfryddiaeth  et  a 
réuni  assez  de  matériaux  nouveaux  pour  un  supplément.  Nous  sommes 
heureux  d'annoncer  que  ce  supplément  paraîtra  dans  la  prochaine  livrai- 
son de  la  Revue  Celtique.  Un  travail  de  ce  genre  appelle  le  concours  de 
tous  :  aussi,  dans  l'intérêt  même  des  études  galloises,  engageons-nous  nos 
lecteurs  gallois  qui  connaîtraient  des  livres  omis  dans  la  Llyfryddiaeth, 
à  en  envoyer  l'indication  à  M.  Silvan  Evans  (à  Llanymawddwy,  Merio- 


282  Bibliographie. 

nethshire).  Nous  adresserons  une  prière  du  même  genre  aux  biblio- 
graphes du  continent.  Faute  de  moyens  d'information,  l'ouvrage  de 
MM.  W.  Rowlands  et  S.  Evans  ne  signale  hors  des  iles  Britanniques 
aucun  livre  concernant  le  pays  de  Galles  ;  et  pourtant  si  peu  de  relations 
que  le  pays  de  Galles  ait  eues  avec  le  reste  de  l'Europe,  il  nous  sem- 
blerait étrange  qu'il  n'eût  été  publié  en  Europe  de  1 546  à  1800  aucun 
ouvrage  parlant^,  même  incidemment,  de  la  Principauté^  ne  fut-ce  qu'un 
récit  de  voyage.  Nous  faisons  appel  au  bon  vouloir  des  érudits  qui 
s'occupent  de  recherches  bibliographiques  et  nous  publierons  dans  la 
Revue  toutes  les  communications  qu'ils  voudront  bien  nous  adresser  à 
ce  sujet. 

H.  G. 


Gwaith  y  Parch.  Walter  Davies,  A.  G.  (Gwallter  Mechain).  Dan  olygiad 
y  Parch.  D.  Silvan  Evans,  B.  D.,  Periglor  Llan  ym  Mawddwy,  Meirion. 
Caerfyrddin,  W.  Spurrell;  Llundain,  Simpkin,  Marshall,  a'u  Gyf.  1868.  5 
vol.  10-8°  de  xxiv-552,  vij-600  et  xij-600  p.  in-8°.  —  Prix  :  24  sh. 

Cette  volumineuse  publication,  par  sa  valeur  comme  par  son  étendue, 
tient  une  place  distinguée  dans  la  littérature  galloise  contemporaine. 
M.  Walter  Davies  (né  en  1761,  mort  en  1849),  plus  connu  sous  son 
nom  bardique  de  Gwallter  Mechain,  a  été  un  des  écrivains  gallois  les 
plus  éminents  de  ce  siècle,  et  c'est  aussi  bien  dans  un  intérêt  littéraire 
que  dans  un  but  de  piété  envers  un  mort  qu'on  a  pensé  à  réunir  ses 
œuvres  dispersées.  On  a  laissé  hors  de  cette  collection  les  éditions  qu'il 
a  données  d'anciens  poètes  gallois  (Huw  Morris  et  Lewis  Glyn  Cothi)  et 
celles  de  ses  oeuvres  dont  le  caractère  n'était  pas  purement  littéraire, 
telles  que  des  traductions  de  l'anglais,  et  un  ouvrage  étendu  sur  l'agri- 
culture du  pays  de  Galles;  mais  il  restait  assez  pour  un  vaste  recueil. 
De  ces  trois  volumes,  les  deux  premiers  contiennent  les  œuvres  galloises 
de  Walter  Davies  (prose  et  vers),  le  troisième  ses  œuvres  anglaises  et 
sa  correspondance.  Il  ne  nous  appartient  pas  de  parler  de  la  partie  poé- 
tique, mais  nous  pouvons  dire  qu'elle  est  tenue  en  grande  estime  par  le 
public  gallois.  Les  œuvres  en  prose  (galloises  et  anglaises)  ne  traitent 
guère  que  de  sujets  gallois.  Walter  Davies  s'occupait  avec  un  amour 
tout  patriotique  de  l'histoire,  de  la  littérature  et  de  la  langue  de  son  pays. 
A  côté  de  notices  consacrées  à  l'histoire  de  différentes  paroisses,  à  la 
nomenclature  des  rivières  de  South  Wales,  nous  remarquons  un  essai 
sur  les  institutions  bardiques  de  Caermarthen  et  de  Glamorgan,  de  nom- 
breuses lettres  sur  l'orthographe  galloise,  des  études  critiques  sur  les 
traductions  galloises  de  la  Bible  des  xvi"  et  xvii';  siècles.  De  nombreux 


Bibliographie.  285 

articles  publiés  par  Walter  Davies  dans  diverses  revues  galloises  et  réu- 
nis dans  ce  recueil  traitent  en  outre  mainte  question  de  littérature  natio- 
nale; on  y  a  joint  des  rapports  sur  les  concours  littéraires  de  différents 
Eisteddfodau  et  des  discours  prononcés  à  ces  cérémonies.  La  variété  des 
sujets  traités  par  Walter  Davies  dans  les  limites  de  l'histoire  et  de  la  lit- 
térature de  son  pays  est  une  nouvelle  recommandation  de  ses  œuvres 
auprès  des  personnes  qui  s'intéressent  au  pays  de  Galles  et  qui  en  com- 
prennent la  langue.  Cette  publication  a  été  faite  par  les  soins  de  M.  Sil- 
van  Evans,  qui  a,  çà  et  là,  ajouté  quelques  notes.  —  Il  serait  injuste  de 
n'en  pas  louer,  en  terminant,  la  belle  exécution  typographique,  qui  fait 
grand  honneur  aux  presses  galloises  de  M.  Spurrell. 

H.  G. 


Brittany  and  its  Byways  :  some  account  of  its  inhabitants  and  ils  an- 
tiquities,  during  a  résidence  in  that  country ,  by  Mrs  Bury  Palliser,  with 
numerous  illustrations.  London ,  Murray,  1869,  X-314P.  in-12.  —  Prix: 
10  sh.  6  d. 

M'"*"  Palliser  est  un  écrivain  de  talent  à  qui  l'histoire  des  arts  doit 
des  publications  fort  estimées.  Après  une  excursion  en  Bretagne,  sa 
visite  de  ce  pays  si  curieux  pour  l'étranger  lui  a  paru  valoir  la  peine 
d'être  racontée  à  ses  compatriotes.  Nous  croyons  volontiers  que  la 
lecture  de  son  charmant  volume  donnera  à  plus  d'un  insulaire  la  tentation 
de  faire  le  même  voyage.  Elle  raconte  ce  qu'elle  a  vu  sans  prétention  et 
sans  longueurs,  et,  artiste,  sait  voir  le  côté  pittoresque  des  choses;  de 
belles  illustrations,  représentant  antiquités,  monuments,  paysages,  types, 
costumes,  complètent  le  récit  de  l'intelligente  voyageuse  et  font  de  son 
ouvrage  une  œuvre  des  plus  agréables  aux  yeux.  M'"'=  Palliser  n'a  pas 
assez  vécu  en  Bretagne  pour  connaître  les  mœurs  de  ses  habitants  et 
la  poésie  de  ses  traditions,  et  elle  a  vu  le  pays  plus  que  les  habitants; 
mais  il  ne  faut  pas  demander  trop  à  un  livre  de  ce  genre  qui  à  l'agrément 
du  récit  joint  le  luxe  des  illustrations. 

H.  G. 


CHRONIQUE, 


I 


J.  p.  M.  Lescour  et  Guillaume  Lejean.  —  Celtistes  morts  au  champ  d'honneur. 
—  L'Académie  Irlandaise  et  la  Société  Archéologique  d'Irlande.— Destruction 
du  Musée  de  Strasbourg.  —  Incendie  du  Musée  de  Nancy.  —  Une  poésie  de 
M.  Luzel. 

Alors  même  que  la  guerre  n'aurait  pas  atteint  les  études  celtiques  dans  les 
hommes  qui  les  cultivent  et  dans  les  monuments  qui  en  transmettent  la  tradition, 
nous  aurions  dû  commencer  cette  chronique  par  de  tristes  nouvelles,  la  mort  du 
poète  Lescour  et  celle  du  voyageur  Guillaume  Lejean.  Jean-Pierre-Marie  Lescour 
(en  breton  Ar  Skour,  ce  qui  signifie  «  La  Branche  »),  né  le  2  mars  1814  à 
Hanvec,  arrondissement  de  Brest  (Finistère),  et  mort  à  Morlaix  le  19  août  1870, 
avait  pris  le  titre  de  «  Barde  de  Notre-Dame  de  Rumengol  »  :  Rumengol ,  un 
des  lieux  de  pèlerinage  les  plus  fréquentés  de  la  Bretagne,  se  trouve  dans  la 
commune  de  Hanvec,  où  Lescour  était  né.  Presque  toutes  ses  œuvres  poétiques 
bretonnes  se  trouvent  réunies  dans  les  deux  recueils  qu'il  a  publiés  sous  le  titre 
de  Telenn  Remmgol  (iSé-j,  in- 12,  Brest,  Lefournier)  et  de  Tclcnn  Gwcngam  ^ 
(1869,  in-i2,  Brest,  Piriou).  Il  a  encore  écrit  quelques  chansons  satiriques,  telles 
que  Fistoulik,  Ar  Bris-Diod  (publiées  en  feuilles  volantes  par  l'imprimerie  Haslé, 
à  Pvlorlaix).  Lescour  aimait  la  langue  bretonne  et  s'intéressait  vivement  au  mou- 
vement de  renaissance  littéraire  de  la  Bretagne;  mais  sa  muse  restait  souvent 
terre  à  terre  et  ne  connaissait  pas  l'élan  d'une  inspiration  véritable.  —  Une 
perte  plus  grande  pour  les  lettres  bretonnes  est  celle  de  Guillaume  Lejean  (Ar 
lann),  bien  qu'il  ait  peu  écrit  en  Breton.  Il  est  mort  au  mois  de  février  dernier, 
au  retour  d'un  voyage  en  Turquie,  dans  le  village  de  Plouégat-Guerrand  (Fi- 
nistère), où  il  était  né  en  février  1824.  Ses  études  du  collège  achevées,  il  était 
entré  comme  employé  à  la  sous-préfecture  de  Morlaix.  «  Pendant  son  séjour 
dans  cette  ville  (j'emprunte  ces  détails  à  une  notice  de  M.  Le  Men),  il  publia 
une  histoire  de  Morlaix  devenue  rare  aujourd'hui,  et  un  volume  intitulé  La  Bre- 
tagne et  SCS  Historiens,  qui  fut  couronné  par  la  Société  Académique  de  Nantes.  A 
cette  même  époque  se  rattachent  encore  divers  travaux  historiques  et  littéraires 
publiés  dans  VÈcho  de  Morlaix  et  des  traductions  bretonnes  de  la  Bible  très- 
appréciées  et  presque  introuvables  aujourd'hui.  Il  partit  ensuite  pour  Paris  où  il 

I .  Le  texte  breton  de  ces  recueils  est  accompagné  d'une  traduction  française. 


Chronique.  285 

devint  secrétaire  de  Lamartine,  et  fut  attaché  à  la  rédaction  du  journal  Le  Pays 
qu'il  quitta  avec  ses  collègues  après  le  coup  d'état.  »  Dès  lors,  il  se  livra 
entièrement  à  la  géographie  pour  laquelle  il  avait  une  véritable  vocation.  Ce 
n'est  pas  ici  le  lieu  de  mentionner  ses  travaux  géographiques,  ni  de  raconter  ses 
grands  voyages  en  Asie  et  en  Afrique  et  sa  captivité  chez  le  roi  Théodoros.  Bien 
qu'il  vécût  en  Orient  plus  qu'en  Bretagne,  il  n'avait  pas  oublié  son  pays  natal, 
et  lorsque  la  mort  l'a  surpris,  il  méditait  un  ouvrage  sur  la  littérature  populaire 
de  Basse-Bretagne.  Nous  ne  pouvons  mieux  faire  pour  le  louer  que  de  citer 
quelques  mots  écrits  par  M.  Renan,  à  la  nouvelle  de  sa  mort  :  «  La  mort  de  ce 
pauvre  Guillaume  Lejean  m'a  désolé.  Il  était  une  des  gloires  de  notre  Bretagne, 
le  plus  intelligent  et  le  plus  courageux  voyageur  de  France.  Et,  avec  cela,  homme 
de  grand  cœur,  esprit  critique  et  plein  de  pénétration.  Vous  savez  qu'il  était 
aussi  fort  versé  dans  nos  études  Bretonnes,  et  qu'il  avait  formé  une  collection  de 
chansons  populaires  de  notre  pays.  C'est  encore  une  grande  perte  que  nous 
faisons  de  ce  côté-là.  « 


C'est  entre  deux  campagnes  que  César  écrivait  son  traité  grammatical  De 
Analogia,  et  les  officiers  qui  emploient  leurs  loisirs  à  des  études  de  philologie  ne 
sauraient  avoir  un  plus  illustre  patron.  Les  études  celtiques  ont  été  de  tout 
temps  cultivées  avec  succès  par  des  hommes  adonnés  au  métier  des  armes  : 
M.  Pictet  et  M.  de  Belloguet  ont  été  officiers,  le  premier  dans  l'armée  suisse,  le 
second  dans  l'armée  française;  officier  dans  notre  armée  est  également  M.  Mowat 
dont  nous  signalons  plus  haut  (p.  272)  une  incursion  dans  le  domaine  de  la  phi- 
lologie gauloise.  Aussi  devons-nous  un  souvenir  et  une  parole  d'adieu  à  de  jeunes 
officiers  qui  s'adonnaient  à  nos  études  et  que  la  mort  a  enlevés  avant  qu'ils  aient 
eu  le  temps  de  rien  faire  pour  elles.  Le  premier  régiment  de  Tirailleurs  Algériens 
en  comptait  trois  dont  les  noms  se  trouvèrent  parmi  les  premiers  souscripteurs 
de  la  Revue  Celtique  :  MM.  Vuillemin,  Belamy  et  Delaitre,  les  deux  premiers 
lieutenants  et  le  dernier  sous-lieutenant.  Nous  tenons  d'autant  plus  à  constater 
que  les  études  celtiques  étaient  cultivées  par  des  Turcos,  que  ce  corps  a  été  de  la 
part  de  l'ennemi  l'objet  de  calomnies  toutes  particulières.  La  mort  héroïque  du 
lieutenant  Belamy,  tombé  à  Wissembourg,  a  été  racontée  dans  un  récit  qu'un 
turco,  simple  soldat,  a  donné  de  cette  aiïaire';  et  ce  régiment  a  été  si  fortement 
engagé  à  Wissembourg  et  à  Wœrth ,  que  nous  avons  tout  lieu  de  craindre  que 
le  sort  de  M.  Belamy  n'ait  été  celui  de  MM.  Vuillemin  et  Delaitre.  La  Revue  a 
perdu  un  autre  de  ses  souscripteurs  dans  la  répression  de  l'insurrection  parisienne, 
M.  Rajat,  capitaine  au  y  régiment  d'infanterie  provisoire,  tué  à  l'assaut  d'une 
barricade.  L'Allemagne  n'est  pas  seule  à  regretter  des  savants  tombés  sur  le 
champ  de  bataille  ! 


I.  Souvenirs  de  campagne  et  de  captivité,  par  Albert  Duruy,  dans  la  Revue  des  Deux 
Mondes  d\i  r-' juin  1 871,  p.  435. 


286  Chronique. 

Malgré  notre  répugnance  à  parler  des  événements  de  la  politique  contempo- 
raine dans  cette  revue,  à  laquelle  nous  voulons  garder  un  caractère  à  la  fois 
neutre  et  international ,  il  serait  ingrat  de  notre  part  de  ne  pas  rappeler,  sinon 
comme  témoignage  de  sympathie  à  la  cause  de  la  France,  du  moins  comme 
hommage  aux  droits  de  la  civilisation,  la  conduite  des  deux  savantes  sociétés 
qui  représentent  en  Irlande  les  études  celtiques,  je  veux  dire  l'Académie  Irlan- 
daise et  l'Association  Historique  et  Archéologique  d'Irlande.  Lorsque  le  siège  de 
Strasbourg  eut  montré  quel  péril  la  poliorcétique  allemande  faisait  courir  aux 
collections  scientifiques  et  artistiques  qui  sont  le  bien  moins  de  la  France  que  du 
monde  civilisé  tout  entier,  l'Académie  Irlandaise  de  Dublin  protesta  d'avance 
contre  le  bombardement  des  monuments  publics  de  Paris  et  l'Association  Archéo- 
logique et  Historique  d'Irlande  suivit  aussitôt  son  exemple'.  Nous  remercions  les 
sociétés  irlandaises  du  sentiment  qui  a  inspiré  leurs  démarches,  mais  nous  ne 
devons  pas  leur  laisser  ignorer  que  si  le  Louvre  et  la  Bibliothèque  Nationale  ont 
échappé  au  destin  de  la  Bibliothèque  de  Strasbourg,  ce  n'est  pas  que  leurs  pro- 
testations aient  été  entendues,  mais  parce  que  ces  précieuses  collections  étaient 
hors  de  la  portée  du  tir  des  assiégeants. 


La  destruction  de  la  Bibliothèque  de  Strasbourg  dans  la  nuit  du  24  août  1870 
est  en  effet  un  des  événements  les  plus  douloureux  de  la  dernière  guerre  et  une 
des  pertes  des  plus  cruelles,  non-seulement  pour  l'Alsace,  mais  aussi  pour  la 
science  ^.  Le  gouvernement  d'Alsace-Lorraine  a  eu  la  prétention  de  la  remplacer 
par  une  collection  d'ouvrages  modernes  réunis  de  divers  côtés,  et  les  naïfs 
peuvent  croire  que  la  Bibliothèque  de  Strasbourg  est  aujourd'hui  ressuscitée  de 
ses  cendres.  Mais  les  érudits  savent  bien  qu'on  ne  refait  pas  une  bibliothèque 
comme  on  rebâtit  un  édifice,  et  qu'on  ne  remplace  pas  une  collection  de  400,000 
volumes,  la  plupart  anciens,  de  5,000  incunables  et  de  5,000  manuscrits.  Ce 
que  surtout  on  ne  remplacera  pas,  c'est  l'admirable  collection  d'antiquités  gallo- 
romaines  qui  se  trouvait  dans  le  même  local  que  la  Bibliothèque,  et  qui  a 
presque  entièrement  péri  avec  elle.  La  vallée  du  Rhin  a  été  habitée  par  des 
populations  celtiques  avant  d'être  envahie  par  les  tribus  germaines,  et  les  époques 
gauloise  et  gallo-romaine  y  ont  laissé,  de  ce  côté  du  Rhin  surtout,  un  grand 
nombre  de  souvenirs.  Ils  avaient  été  réunis  dans  le  musée  de  Strasbourg;  il  y 
avait  là,  entre  autres  monuments,  une  précieuse  collection  de  bas-reliefs  mytho- 
logiques du  plus  grand  intérêt  pour  l'étude  de  la  mythologie  celtique.  Quelques 
uns  ont  fait  l'objet  d'intéressants  travaux  publiés  par  M.F.Chardin  dans  la  Revue 
Archéologique.  M.  de  Barthélémy   citait  récemment  l'un  d'eux  ici-même  (p.  3). 


1.  Voir  le  Journal  0/  the  Historical  and  Arch<£ological  Association  of  Ircland,  janvier 
1871,  p.  320. 

2.  Sur  la  destruction  de  la  Bibliothèque  de  Strasbourg  et  sur  la  responsabilité  du 
général  de  Werder  dans  ce  désastre,  voir  l'article  d'un  savant  distingué  de  Strasbourg, 
M.  Rodolphe  Reuss,  dans  la  Revue  Critique  du  i"  septembre  1871. 


Chronique.  287 

Ces  richesses  sont  probablement  perdues  pour  la  science  celtique;  car  bien  que 
les  objets  de  cette  sorte  résistent  mieux  que  des  manuscrits  ou  des  livres  aux 
ravages  d'un  incendie,  la  ruine  du  bâtiment  de  la  Bibliothèque  a  été  telle  qu'il 
ne  peut  guère  en  survivre  que  des  débris  informes.  Nous  avons  voulu  nous  ren- 
seigner à  cet  égard,  et  voici  ce  que  nous  écrivait  de  Strasbourg,  le  6  août,  un 
archéologue  distingué  de  cette  ville,  M.  le  colonel  de  Morlet  :  «  Il  n'est  pas 
encore  possible  de  préciser  ce  qui  pourra  être  recueilli  du  musée  de  la  Biblio- 
thèque de  Strasbourg  :  le  bâtiment,  effondré  par  le  bombardement,  doit  être 
entièrement  démoli  et  reconstruit.  Tout  ce  qui,  trouvé  dans  les  décombres,  a 
paru  provenir  du  Musée,  a  été  entassé  à  l'Académie,  et  il  n'est  pas  encore 
possible  de  réunir  ces  débris  mutilés  ;  je  crains  bien  que  les  bas-reliefs  mytholo- 
giques ne  se  retrouvent  pas  intacts;  j'espèrecependant  pouvoir  réussir  à  retrouver 
dans  cette  masse  au  moins  le  Mithra  découvert  il  y  a  deux  ans  ;  on  m'assure 
qu'il  doit  s'y  trouver.  »  Nous  tiendrons  nos  lecteurs  au  courant  de  ces  travaux 
de  déblaiement  ;  mais  déjà  on  en  sait  assez  pour  dire  que  peu  de  chose  survivra 
du  musée  gallo-romain  de  Strasbourg.  Il  importe  peu  aux  maîtres  de  l'Alsace 
que  cette  province  ait  perdu  les  titres  de  son  ancienne  nationalité  gauloise;  mais 
nous  avons  le  droit  de  les  regretter  doublement,  comme  archéologue  et  comme 
Français.  Ce  qui  avait  survécu  à  l'invasion  du  quatrième  siècle  n'a  pas  été 
épargné  par  celle  du  dix-neuvième,  et  nous  pouvons,  hélas!  redire  avec  un  auteur 
ancien  :  les  ruines  mêm.es  ont  péri! 

Ipsce  periere  ruina! 


Un  malheur  analogue  devait,  dans  d'autres  circonstances,  frapper  la  capitale 
de  la  Lorraine.  Dans  la  nuit  du  17  au  18  juillet,  le  feu  se  déclarait,  sans  qu'on 
en  connaisse  encore  la  cause,  dans  le  palais  ducal  de  Nancy,  que  les  soldats 
prussiens  avaient  évacué  le  15.  La  Bibliothèque  et  le  Musée,  installés 
dans  ce  vénérable  monument,  ont  presque  entièrement  péri  dans  l'incendie  :  les 
collections  de  Nancy  étaient  loin  d'avoir  l'importance  de  celles  de  Strasbourg;  ce 
n'en  est  pas  moins  un  événement  déplorable,  pour  la  ville  de  Nancy  surtout, 
si  durement  éprouvée  déjà  par  le  long  séjour  de  l'ennemi.  Le  musée 
renfermait  plusieurs  objets  gallo-romains.  Voici  ce  que  nous  écrit ,  au  sujet 
de  ce  désastre,  M.  Ch.  Cournault,  conservateur  du  Musée  Lorrain  :  «  Il 
existe  au  catalogue  du  Musée  Lorrain,  édition  de  1869,  pp.  16-34,  n°'  92-250, 
une  énumération  des  objets  en  bronze,  fer,  terre  cuite,  etc.,  de  l'époque  gallo- 
romaine,  que  possédait  le  Musée.  Pour  les  objets  les  plus  importants,  il  y  aune 
courte  description,  mais  c'est  surtout  au  journal  de  la  Société  Archéologique  qu'il 
faut  recourir  pour  trouver,  soit  des  descriptions  détaillées,  soit  même  des  dessins 
lithographies.  Malheureusement  la  collection  des  catalogues  et  celle  du  journal 
ont  été  brlilées  dans  l'incendie  de  la  Bibliothèque.  Quelques  statuettes  de  l'époque 
gallo-romaine  ont  pu  être  sauvées  ainsi  que  le  bras  et  la  jambe  de  la  Venus  de 
Scarponne,  des  haches  ou  ciseaux  de  bronze,  des  pointes  de  lance,  quelques 


1 


288  Chronique. 

fibules,  des  as  de  la  république  romaine,  des  anses  de  vase,  etc.;  mais  tous  ces 
objets  ayant  passé  par  le  feu ,  ont  été  soit  fondus  en  partie,  soit  tordus  ou 
brisés.  Leur  patine  a  disparu  complètement  et  ils  se  présentent  dans  l'état  le  plus 
déplorable  aux  yeux  de  l'archéologue.  Il  serait  impossible,  à  moins  d'un  long  et 
minutieux  travail,  de  les  décrire  dans  l'état  oij  ils  sont.  On  les  a  tous  déposés 
dans  une  caisse,  pêle-m.èle,  à  l'abri  des  regards  du  public,  sous  les  voûtes  de  la 
chapelle  des  Cordeliers,  qui  est  fermée.  On  procédera  plus  tard  à  leur  inventaire 
et  à  leur  classement;  Toutes  les  antiquités  en  pierre,  inscriptions,  bas-reliefs, 
tombeaux,  étaient  au  rez-de-chaussée  et  n'ont  pas  été  atteints  par  l'incendie.  Les 
vases  en  terre  sont  dans  le  même  cas.  » 


Nous  ne  parlerons  pas  aujourd'hui  des  événements  qui  ont  pu  se  produire 
depuis  l'an  dernier  dans  le  monde  celtique,  car  il  ne  convient  pas  de  mêler  des 
pensées  profanes  à  tous  ces  .souvenirs  de  deuil.  Nous  terminerons  en  citant  une 
belle  et  touchante  poésie  de  notre  ami  et  collaborateur,  M.  Luzel,  que  nous 
trouvons  dans  un  journal  de  Bretagne,  Le  Lanmonnais  du  29  juillet,  et  nous 
espérons  que  le  lecteur  nous  pardonnera,  eu  égard  aux  circonstances,  d'empiéter 
une  fois  en  passant  sur  le  domaine  de  la  littérature  celtique  contemporaine.  Nous 
remarquons  à  ce  propos  que  M.  Luzel  y  écrit  son  nom  Ann  Uchcl  en  breton;  Il 
écrivait  jusqu'ici  Ann  Huel;  l'un  et  l'autre  signifie  littéralement  «  Le  Haut.  » 
Les  deux  orthographes  sont  admises,  mais  la  première  {Ann  Uc'bel)  nous  semble 
meilleure  parce  qu'elle  correspond  au  nom  français  Luzel  (pour  L'Uzel),  où 
l'aspirée  c'h,  anciennement. x  (breton  uc'hel  =  gaulois  uxello-),  a  laissé  sa  trace 
dans  le  z.  Du  reste,  l'orthographe  des  noms  propres  n'est  pas  soumise  à  des 
règles  bien  rigoureuses. 

H.  GAIDOZ. 

AR  VAMM  GLANV. 

Klewet  :  —  Un  intanves  a  oa  chommet  klanv-bra: 
War  hc  gwele  :  he  mab  bete  kcar  a  redaz, 
Buhanna  ma  c'hallaz,  da  glask  medesined 
Ewit  hi  louzoai,  ha  iac'hâd  he  c'hknnd. 

Na  oa  ket  pinvidik,  met  n'hen  doa  kct  damant 
Ewit  he  vammig  kei-z  da  roi  he  hall  arc' liant. 
Ma  teuaz  gant-han  tri,  ar  re  muia  brudet 
Hag  ar  muia  gwiek,  herve  m'hen  doa  klcwct. 

Pa  digwczjont  en  ti,  a  tastonjont,  gant  mail, 
Hag  lie  brcch,  hag  hejenn,  hag  hi  chavjont  klanv-fall. 

—  Rld  a  vô  hi  goada!  —  a  lavaraz  unann. 

—  Te  a  zo  un  azenii,  ha  na  ouzoud  foeltr  mann  ! 


Chronique.  289 

A  lavaraz  ann  eil  :  —  Marw  a  ve  kent  ann  noz 
Mar  tenfcs  takcnn  voad;  na  wcles  kct  penoz 
Ez  eo  skornet  he  zreid!  —  Ro  peuc'h  din-me  raktal, 
Ann  tân  zo  en  he  fenn  !  Lak'  da  dorn  war  he  zâl. 

Me  a  lâr  roi  dour  tomm!  —  Ha  me  'lâr  tenna  goad! 

—  A^^  douMomm,  na  goada  !  Rag  goaveït  er-vad 
"Ve  lac' ha  ar  vroeg  paour  ober  'vcl  ma  lâret  : 

Ar  choiera  hi  deûz,  ma  c'hredet  mar  karet! 

A  laraz  ann  drived  :  —  Penoz  ar  choiera  ? 

—  la  n'hoc'h  met  daou  azenn,  ha  na  ouzoc'h  nctra! 

—  Ar  vroeg  a  varvo,  sur,  mar  komer  ho  louzou.  — 

—  Ra  varvo  'ta,  kentoc'h  eget  heuil'  ho  komzou!  — 

Hag  c  kricnt  ho  zri,  hag  c  skocnt  ho  zroad, 
Hag  ho  zello  a  oa  ker  ruz  cvei  ar  goad. 
Ha  keit-se  ar  vroeg  paour,  euz  ur  c'horf-marw  henvel, 
Na  gomze,  na  fiache;  ez  oa  'vont  da  vervel. 

He  mab  a  oa  eno  0  selaou,  glac'haret, 
Ha  da  louzouerienn  hen  eûz  neuze  lâret  : 

—  «  Na  ranforz  al  louzou,  gant  ma  vô  va  mamm  iac'h; 
Met,  en  hano  Doue,  gret  prim,  pa  lâran  dac'h!  n 

Met  nhaljont  dont  a-benn  nepred  da  cm  giewet, 
Diwarbenn  ai  louzou,  nag  iwe  ar  c'hlenved. 
Hag  ar  mab  a  Idraz  :  —  «  It-kuit  gant  ar  gounnar! 
Me  'iac'hao  ma  mamm;  c'hui  hi  lac'h/e,  hep  mar!  i» 

Ha  war  gorf  ien  he  vamm  neuze  a  em  strinkaz, 
Ha  d'he  zreid,  d'he  daou-dorn  ha  d'he  zremm  a  pokaz, 
Hag  a  skuillaz  daero  euz  a  wir  garantez, 
Hag  a  teuaz  he  vamm  d'ar  iec'hed,  d'ar  vuhez  ! 

Selaouet  :  Ar  vamm-ze  pehini  'zo  klanv-fall, 
Gant  gouliou  spontuz,  ez  eo  hor  mamm  Bro-C'halt  : 
Hag  ai  louzouerienn  'zo  klasket  var  he-zro, 
Mar  na  garant  diwail,  hi  c'hasfont  d'ar  maro  ! 

Kenvroïz  ker,  kredet,  ewit  torri  ankenn 
Ha  klenvejou  ur  vamm,  ar  gwella  louzouenn 
Eo  karout  anezhi.  —  Bcomp  'ta  unanct 
Ewit  karout  hon  bro,  hag  a  vô  c'hoaz  zatwet.  — 

F. -M.  Ann  UC'HEL. 
Plouaret,  16  ewen  1871. 


290  Chronique. 

UNE  MÈRE  MALADE. 

Ecoutez  :  —  Une  veuve  était  restée  dangereusement  malade,  sur  son  lit. 
Son  fds  courut  à  la  ville,  le  plus  vite  qu'il  put,  afin  de  chercher  des  médecins 
pour  lui  donner  des  remèdes  et  guérir  son  mal. 

Il  n'était  pas  riche;  mais  il  ne  craignait  pas  de  donner  tout  son  argent  pour 
sa  mère  chérie.  Il  amena  trois  médecins,  les  plus  renommés  et  les  plus  savants, 
d'après  ce  qu'on  lui  avait  dit. 

En  arrivant  dans  la  maison,  ils  s'empressèrent  de  tâter  le  bras  et  la  tète  de  la 
veuve,  et  ils  la  trouvèrent  très-malade.  —  Il  faut  la  saigner,  dit  un  d'eux.  — 
Vous  êtes  un  âne  !  vous  ne  savez  rien  du  tout  ! 

Lui  répondit  le  second  :  —  elle  serait  morte  avant  la  nuit,  si  vous  lui  tiriez 
une  seule  goutte  de  sang!  Ne  voyez-vous  pas  que  ses  pieds  sont  glacés.  — 
Laissez-moi  en  paix  à  l'instant  ;  elle  a  le  feu  à  la  tête  ;  mettez  votre  main  sur 
son  front. 

—  Je  dis  qu'il  faut  lui  donner  de  l'eau  chaude!  —  Et  moi,  je  dis  qu'il  faut  la 
saigner!  —  Ni  eau  chaude  ni  saignée!  car  sachez  bien  que  ce  serait  tuer  la 
pauvre  femme  que  de  faire  ce  que  vous  dites  :  elle  a  le  choléra!  croyez-m'en  si 
vous  voulez  : 

Dit  le  troisième.  —  Comment  le  choléra?  —  Oui;  vous  êtes  deux  ânes,  et 
vous  ne  savez  rien!  —  La  femme  mourra  sûrement,  si  elle  prend  votre  remède! 

—  Eh!  bien,  qu'elle  meure,  plutôt  que  de  vous  écouter! 

Et  ils  criaient  tous  les  trois,  et  frappaient  du  pied,  et  leurs  yeux  étaient  j 
rouges  comme  le  sang.  Et  pendant  ce  temps-là,  la  pauvre  femme,  semblable  à  1 
un  cadavre,  ne  parlait  ni  ne  bougeait  :  elle  allait  mourir. 

Son  fils  était  là  qui  écoutait,  le  cœur  navré,  et  il  dit  alors  aux  médecins  :  ' 

—  Peu  m'importe  le  remède,  pourvu  que  ma  mère  soit  guérie  ;  mais,  au  nom  de 
Dieu,  hâtez-vous  ! 

Mais  ils  ne  purent  tomber  d'accord,  ni  sur  la  maladie,  ni  sur  le  remède,  et  • 
alors  le  fils  dit  encore  :  —  «Allez  au  diable!  moi,  je  guérirai  ma  mère,  et  vous, 
vous  la  tueriez  sûrement  !  »  — 

Et  il  se  jeta  sur  le  corps  refroidi  de  sa  mère,  embrassant  ses  pieds,  ses  mains 
et  son  visage;  il  répandit  de  vraies  larmes  d'amour  et  il  rappela  sa  mère  à  la  ' 
santé,  à  la  vie.  , 

Ecoutez  :  —  Cette  mère  qui  est  dangereusement  malade,  avec  des  blessures  i 
épouvantables,  —  c'est  notre  mère  la  France;  et  les  médecins  qui  ont  été  i 
appelés  pour  la  soigner  la  conduiront  à  la  mort,  s'ils  n'y  prennent  bien  garde!    i 

O  mes  chers  compatriotes,  croyez-moi,  pour  soulager  la  douleur  et  les  maux  I 
d'une  mère ,  le  meilleur  remède  c'est  de  l'aimer.  —  Entendons-nous  donc  dans  '[ 
l'amour  de  la  patrie,  et  elle  Sera  encore  sauvée! 

Plouaret,  le  16  juin  1871.  F. -M.  LUZEL.  j 

Nogent-le-Rotrou,  imprimerie  de  A.  Gouverneur.  i 


Errata  du  premier  numéro. 
gne  24,  au  lieu  de  :  Prémeaux  lire  :  Pernanà 


dafod  laferyd  bob  gyeithred  hynod,  a 
guiuglcd  a  uneithid  truy  dir  cymru  er 
y  s  talm  0  amser.  Ond  os  myfyrio  a  da- 
munych  ne  darlain  ar  ych  pen  ych  hû, 
chui  a  gaech  l'eiiis  le  cymyys  i  hynny, 
er  maint  fy  da  i  boetfini'r  tes;  nail  ai 
meun  tai  glei^ion  hafaid,  ne  gar  layr 
dufr  rhedegog  meyn  glyn  ag  irgoed, 
ne  meun  dyphryn  lysseuayg,  ne  ar  ael 
doldir  meilionaug,  ne  meyn  cadlas  0 
fedy,  ne  0  ynn  planedig,  ne  ar  fynyd 
amlyg  auelog,  ne  meyn  rhyy  gyfle  ar- 
al,  le  ni  bydai  na  blinder  naluded  yr- 
th  yres  yr  binon.  Ond  ynghylch  y  dref 
hon,  nid  oes  dim  tcbig;  canys  os  i  ogo  y 
cyrchych,  ne  i  gilfach  heb  haid  yn  toy 
ynnu  vn  amser  arni,chyi  a  geych  oer- 
fel  angheuayl,  os  yntau  meyn  le  am- 
^Vg  y  trigych,  y  brydni  a  dayd  frain  ag 
adar,  os  aros  a  yneych  yn  iy,  chyi  a  fy 
A       ij     gych 


evented 
ption  to 
e  which 
ig  of  the 
out  the 
spectus. 
subscri- 
^nd  may 


290  chronique. 

UNE  MÈRE  MALADE. 

Son 
pour 

II) 
sa  mi 
d'apr  4 

E 

veuv  guch  gê  fylni,  a'r  gyinlannau  o'r  fath 

°"  yma,  er  i  bod  yn  deg  yr  olug  arnyn  :  ag 

yn  hyfrydach  aros  yndyn  nog  meun  ma 

Laisj  noed  erail  o'n  hamgylch  :  etto  ni  chyn- 

son  hessa  calon  cymro  yrtliynt,  megis  y  gu- 

~  nai  urth  lan  dyfrduy ,  ne  laur  dyphryn 

'^'  cluyd,  ne  urth  ami  0  leoed  a  fedrun  i 

pauvi  '■'  •  .       j      ■ 

vous  ''^'^^^  0  faenol  deui  i  gaergybi  y  m  mô. 

Dit  A  phe  bai'r  le  0  hono  ihun  yn  gystal  ar 

vo"^  fan    ore    yngliymru ,    etto    e   layenychai 

fynghaloni  yno  yn  gynt   vrth  gloued  y 
Et 

rougt 

un  cd 


gog  yn  canu,  nog  a  ynai  yma  vrth  glo 
yed  perbynciau'r  eos,  ne  fy  y  niais   brô- 
So  fraith,  ne   lathreidgan   muyalch,   ne  pe 

gunaid  musig  cysson  cyfangan   0   gyd- 
lais  paradyyssaid  hol  adar  y  byd  yn  yr 


-Pt 
Dieu, 

M 


alor^  vnle.   Gr.   ych   dirfayr  gariad   i'r  ylad 

syd  yn  péri  hynny  :  gyir  fely  a  doyad  y 

phylosophyd,  na  byd  vniayn  barn  le  bo 

cariad  ne  gas  yn  rheoli.  Canys  digassed 

a     yyl 


vous 

Et 

et  son 

santé 

Ec. 

épouv 

appel 

0) 

d'une 

l'amo 


Errata  du  premier  numéro. 
gne  24,  au  lieu  de  :  Prémeaux  lire  :  Pernanà 


a  uyl  fai  le  ni  ho,  a  chariad  ueithiau 
a  farna^r  bai  yn  rhinued  Urth  hynny 
Ira  fo  cimainî  ych  serch  i  gymru,  an- 
od  iuch  fod  yn  vsîus  cyfiaijn  rhyngthi 
ag  estrôylad  yn  y  byd.  Fely,  am  fod  cyn 
hophed  gennych  y  ulad  ar  bobl,  ni  ue- 
lun  i  dim  yel  i  difyrru^r  amser  na  sia- 
rad  am  bethau  cymreig,  ag  edrych  be 
th  a  ijnai  les  idynt  a  fydai  ar  ych  lau 
chui  i  dyyn  i  ben.  Mo.  Gyir  iayn  a 
doedych,  am  hynny  moessuch  yeled  a 
fydai  bofjbl  i  ni  yneuîhur  mal  y  gyna 
eth  layer  o^r  groegyyr,  ar  ladinyyr 
gynt,  pan  yrrid  nhuy  ar  darfysc  i  ryu 
gilfach  neultuaul  i  dario  :  yno'r  scri- 
fonnent  hyy  riy  beîh  i  hyphordi  gyyr  i 
gulad  meun  rhinyed,  dysc,  ne  bethau 
erail,  a  fydai  les,  vrdas,  a  gogoniant 
idyn,  fal  y  gynaeîh  Tyllius  i  lyfraii  0 
philosophydiaeth  gan  mijyaf  i  gyd.  Gr. 
Nid 


evented 
ption  to 
e  which 
ig  of  the 
out  the 
spectus. 
subscri- 
^nd  may 


290  Chronique. 

UNE  MÈRE  MALADE. 

Ec  "         ■-'  '-'  — *'-   ' — 

Son 
pou; 

lu 
sa  m'  ^ 

dapi 

E 
veuv 


Nid  guiu   ini   edrych  am    yneuthur   yn 
Voui  debig  i'r  gijyr  o'r  amser,   a'r  guledyd 

une  s 
Laisf 
son   . 


hynny,  gan  nad  oes  yn  y  to  syd  hediu  un 

synuyr    abl    i'm    gystadhi    ar    aîhrylith 

oed    gentliynt     hyy.    Heblay    hyn    mae 

arnom  mi    eisiau    lauer   peth  oed  gen- 

^^'ê'  thynhuy  yn  barod  oi  cynhorthyyau  pâ 

fydent   meyn    cyfinggyngor.     Canys    yr 

ydoed  genthynt   yn  i    hiaith   ihunan,   i 

vous  gyfedach,  ag  imgynghori  a  hyy  ni,   ra- 

madegyyr  celfyd ,  ymryssymyyr  ystroy- 

gar,    areithyyr    ymadrodus,    dadleuyyr 

parabldoeih  ,      philosophydion     dyfndysc 

Se  fydygon    coyraint,    gyfreithyyr    arder- 

—  Pt  chayg,  dinasuyr  pyylaug,   ryfelyyr  en- 

^^"'  yog,   a  guyr  godidaug  ymhob  celfydyd, 

.    ^  grady  aîhreigl   syd   yn    damyain    ymysc 

vous  dynion,  fal  y  galent  gael,  pan  chyenny 

Et  chent   yybodaeth   am  bob  peth  a   dama 

^^  son  j^(,f^^^  (i   chloijed  dyledus  henyau  pob  cy 

santé  ,  . 

Eo  ^    ■ 

épouv 
appel 

0) 
d'une 
l'amo 


pauvj 
vous 
Dit 


—  l 

El 
rougf. 
un  c? 


Errata  du  premier  numéro. 
gne  24,  au  lieu  de  :  Prémeaux  lire  :  Pernanà 


friy  beth,  gen  baub  yn  i  gylfydyd  ihun 
A  ninnau  syd  heb  yrun  o'rhain  gen- 
nym,  na  chiiaith  (am  yn  bod  cyn  beled 
odi  cartref)  jod  i  graphu  ar  yr  iaith 
sathredig  ymysc  y  cyphredin.  0  heru 
y 4  hyn,  pe  galem  gael  gyybodaeth  ur- 
th  darlen  lyfrau  0  ieiîhiau  erail ,  am 
laver  0  bethau  a  datent  i  dyscu  ai  treu 
thu,  etto,  e  fyd  caledi  maur  pan  gei^i- 
er  cyfieuîhu  a  throi  yr  vnrhiu  bethau 
i'r  gymraeg,  am  fod  yn  brin  y  geiriau 
gènym,  er  bod  yr  iaith  0  honi  ihun  cyn 
gyfoethocced  ag  un  aral.  Mo.  Gedu- 
ch  ido,  er  nas  galom  yneuthur  yn  gy- 
stal  ag  y  damunem;  ef  aie  y  bernir  yn 
eyylys  ni  yn  da  am  yneuthur  a  alem  : 
canys  le  palo'r  grym  eyylys  da  a  hae- 
da  glod.  Hefyd  gyej ,  rhag  bod  yn 
segur,  ag  i  difyrru'r  amser,  siarad 
am  y  gymraeg,  yn  gynt  nog  am 
ofered 


evented 
ption  to 
e  which 
ig  of  the 
out  the 
spectus. 
subscri- 
^nd  may 


290  Chronique. 

UNE  MÈRE  MALADE. 

Ec  " -    '-  ■'  —'-   ' ■'- --'-'"     -'-  '-   '•♦ 

Son 
poui 

II-, 

dapi 
E 
veuv  ojereà    gan    na    ad   y    hrydni    anfei- 

draul  i  ni  yr  ouran,  studio  dim  a  phru- 
yîh  yndo.  Gr.  Yn  enii  duy,  gyfynnuch  y 
peth  a  fynnoch,  minnau  a'ttehaf  yn 
orau  mettrijyf.  Ond,  yn  fy  marni,  go- 
rau  oed  yn  gyntaf  son  am  ramadeg  : 
^^'&'  Canys  0  dyno  bydau  dechrau,  os  myn- 

em    i'r    iaith     gynnydu  yn    lyydianus. 
Etto  gan  nad  yu  i'n  bryd,  ond  son  o'ra 


Vou 

une  s 
Laisf 


pauv» 
vous 


Dit 


vous  bed  amdani  gofynnych  y  peth   cyntaf  a 

ryngo  bod  iijch  grybyyl  0  honof.  Mo. 
Minnau  a  dechreuaj  gê  hynny  a  gra 
madeg,  ag  yno  mi  a  ynaf  fal  y  gyely- 


—  l 

El 
rougf. 
un  c? 

Se  yfachos. 

-Pt 

Dieu  Deth  yu  gramadeg  a  phessayl  rhann 

M-  arbennig  syd  idi.  Cap.  I. 

alor' 

YQ,.s  DOedych  ithe  fely,  yn  eny  duy,   beth  yy 

Et  gramadeg.     Gr.     Gramadeg     y  y     celfy 

et  son  dyd,  i  doedyd  ag  i  'scrifennu  pob  yma- 


sante 
Eo 
épouv 
appel 
0  ) 
d'une 
l'amo 


drod 


Errata  du  premier  numéro. 
gne  24,  au  lieu  de  :  Prémeaux  lire  :  Pernanà 


drod  yn  gouir,  ag  yn  gyfadas.  Mo. 
Pessaul  rhan  arbennig  syd  i  ramadeg? 
Gr.  Pedair,  a  rhain  a  eliiir  pedair  co- 
lofn  Cramadeg.  laynscrifenydUth, 
Cyfiachydi^th,  Cystrayi£th,  Tonydi^th. 
Mo.  Beth  yu  laynscr?  Gr.  Rhan  0  Ramad- 
eg yn  dyscu  a  pim  lythrennau  y  dylid 
scrifennu  a  silafu  pob  galr.  Mo.  Beth 
yu  Cyjiach.?  Gr.  Rhan  0  Ramadeg  yn 
dangos  megis  iachan  pob  gair  ar  i  bê 
ihun  al  an  0  blethiad  ymadrod  :  mal 
manegi  tadog£th  epil,  cenedl,  rhij,  trei 
gliad  gair  cyn  i  roi  meiin  cymlheth  ■ 
ymadrod.  Mo.  Gen  dechraa  onoch, 
moessuch  gloued  descreifiad  y  duy  go- 
lof  n  erail.  Beth  yu  Cystrauidith?  Gr. 
Rhan  0  ramadeg  yn  hyphordi  vn  i 
gyssyldu  yn  iaun  ag  yn  gysson  ymrafael 
rannau  o'madrod  ynghyd  ijrth  y  cyn- 
ghordiadau  ai  perthynas.  Mo.  Be 
B        lach 


•evented 
ption  to 
e  which 
ig  of  the 
out  the 
spectus. 
subscri- 
^nd  may 


2C)o  Chronique. 

UNE  MÈRE  MALADE. 

Ec  "  '    •  ■     '     -      - '■' -   '•• 

Son 
pou. 

Il 
sa  ni'  10 

d'ap 

lach   i  yneuîhur  pê  ar  y  pedair  colofn 

Vou  doeduch   beth   yy    Tonyduth^   Gr.    Rlià 

L,  0    ramadeg   i  gyfruydo    dyn  i  adnabod 

""^  ^  iaijn  dô,  a  chymuys  fessurau  ymadrod. 

At  y,  rhan  lion  y  perthyn  pob  dosparth 

_  ar  gynghaned  a   inessurau    cerd    dajod. 

saig.  Mo.    Ai    digon    gyybod   y   pedair  rhan 

pauv'  y  ma,    i    yneuîhur    vn    yn    rhamadegur 

perphaith?  Pam  nad  digon?    Canys   os 

medr  vn  scrifennu'n   goyir,    a   silafu'n 

iayn  bob  gair,    ag  adnabod  i  hanes,  i 

1  dreigl,  ai  eppil  yn  gyntaf  ar  i  ben  ihun 

yedi    hyny    yn    hyphord    cystrayennu'r 

geiriau    yn    gynghordiayl    i    yneuîhur, 

j  perpheidbleîh    ymadrod,     a    chida    hyn 

Dieu  dosparîhu  îon,  accen,  meidir,  a  messu- 

^  raa    damuyniaul    i^madrod     ai     rhanau 

^°''  ni  bydai  diin  yn  ol  a  berîhynai  aï  suyd 

vous  j  ■      ■      j  j  . y  . 

E 
et  S( 
sant 

E 
époi 
appe 

C 
d'ur 
l'aiT 


VOU' 

D 

vou 


rou 
un 
S 


gramadegyr       ardechaug.       Mo.       Yn 
yir  nid  oes  dim  amgen  oi  ofyn  ar  i  tau 


Errata  du  premier  numéro. 
gne  24,  au  lieu  de  :  Prémeaux  lire  :  Pernanà 


ef.  Ond  yroyrâ  yedi  iuch  dangos  me- 
un  ychydig  0  eiriau,  beth  yu  grama- 
deg  ai  phedair  colofn,  chiji  a  yrrasoch 
arnaf  flys  cloued  desparth  manylach 
ar  bob  un  0  honyn,  i  gyjryydo  un  a  chu 
ennychai  scrifennu  cymraeg,  ai  doe- 
dyd  yn  iayn,  ag  i  gadu  yn  hiaith  rhag 
i  mynd  ar  gyfyrgol.  Cr.  Anayd  ini 
y  ma  yneuîhur  hynny  yn  berphaith,  0 
blegid  y  drapherth  syd  i'n  gorthrymu, 
Hefyd  yr  ydym  ymhel  alan  o'n  gylad, 
ag  a  fuotn  yn  hir,  jal  na  alom  na  go- 
fyn  cyngor  erail  na  dal  ar  yr  iaiîh  yn 
hunain.  nid  oes  chuaith  gennym  neb 
a'mcanod  y  lyybr  hun  yn  y  gymraeg 
on  blaen  ni,  fal  y  gelid  yrtli  ol  i  droed, 
gael  peth  cyfryydyd.  fely  nid  gyiu  i 
ninnau  ar  hyn  0  amser  amcanu,  a  dy- 
fei^^io  phord  a  iyybr  neyyd,  ai  duyn  i 
hen  perphaitli  a'runuaith ,  ag  nis  ga 
B       ij  lod 


%dat 
en  / 


iigwèt 


tes 

s  lecteurs 


me  prevented 
ibscription  to 
olume  which 
jinning  of  the 
tring  out  the 
.e  prospectus. 
:  our  subscri- 
red  and  may 


290  Chronique. 

UNE  MÈRE  MALADE. 

Ef  ••  '    ■        ■■     ' 

Son 
pou? 

Il' 

dap 

E 
veuv 
Voui 

L, 
une  s 
Lais 
son 


!o4  (med  Aristoteles)  yr  vn  gyr  erioed 
dychmygu  celfydyd  oi  dechrau,  ai  gii- 
neuthur  yn  berphaith  hefyd.  Mo. 
Gyir  diammau  yy'r  peth  a  doedassoch, 
er  hynny  rhyglydus  y  y  cychyyn  gyaith 
da,  er  nas  galo  dyn  i  dyyn  ef  i'r  pen 
S3'&'  y   damunai,    Hefyd    meyn   ieithoed     era- 

il,  nid  oed  i  bob  celfydyd  ond  dechrau 
disas,  ag  ynol  i  dechrau  vnyaith ,  erail 
0  amser  i  ainser  ai  trefnod  hyynt,  ag 
ai  chyanegod  nés  i  dyad  0  dechreuad 
bychà  amherphaith ,  i'r  perpheithryyd 
y  maent  yndo  yr  oyran.  Ni  bydai  hyy- 
S,  rach    ond    dechrau    onochyithau    ar    y 

■  I  gramadeg    cymraeg,    y    canlhynai    erail 

a  ynai  ben  ar  y  gyaith,  ag  ai  try^iai  le 
methai    gennychyi.     Gr.     Ni    alafinnau 
mo'r  gyad,  nad  yy'r  dihareb  yn  yn  yir, 
E  dechrau'r   gorchyyl    yy  ■  hanner  y  gya- 

ith,  a  phan   yeler  cychyyn  peth   molian- 
nus 


pauv 

VOU' 

D 

VOU 

1 

rou^ 
un 


Dieu 

alor 
vous 


et  S( 
sant 

E 
époi 
appc 

C 
d'ur 
l'an 


Errata  du  premier  numéro. 
gne  24,  au  lieu  de  :  Prémeaux  lire  :  Pernanà 


ij 


nus  rhagdo  pob  dyn  dih'istr  a  fyd  pa- 
rod  i  gymorth,  Am  hynny ,  gan  yeled 
ych  bod  chyi  yn  chuennych,  mi  a  unaf 
oran  galuyf  :  gyel  gênyf  yeled  onochyi 
yrth  fyngyaith,  fod  diphig  gain  ynof, 
na  thybied  ohonoch  fod  eisie  eyylys  i 
yneuthur  a  orchmynnoch.  Ag  fely 
edrychyn  beth  alom  i  doedyd  ynghylch 
y  golofn  gynîaf  i  ramadeg,  ni  a  oedyn 
i  tair  erail  nés  cael  myy  0  ennyd  a  sei- 
biant.  Mo.  Mosssych,  yn  eny  duy ,  y 
rhan  yma  yn  gynîaf,  a  phan  darpho 
yych  yneuthur  pê  ar  hon,  ni  siariadyn 
am  y! ail. 

laynscrif.    aphessayl    pync   syd  oi'styriay 
yn    i    chylch.    a    phump   peîh   pyrihyn- 
assol  i  lythyren  oi  draethu. 
Cap.  2. 

BElh    syd    raid    i   fanegi    yrth     dreuthu 
laun- 


idat 
en  t 


tes 

s  lecteurs 


me  prevented 
ibscription  to 
olume  which 
jinning  of  the 
iring  out  the 
.6  prospectus. 
;  our  subscri- 
red  and  may 


200  Chronique. 

UNE  MÈRE  MALADE. 


L 

une 
Lais 
son 


VOU' 

D 

VOU 

1 

rou, 
un 
S 


IV 
alor 
vous 

E 


sanl 
E 
époi 
app( 
C 
d'ur 
l'an 


M 


Ef 

Son 
pou; 


sa  m 
d'ap 

E 
veuv  launscr.  Gr.   0   heruyd  bod   yn  scrifen 

Vou  nu  pob  gair  a   lythyrennau,  yn  gyntaf 

dim    rhaid   yu   guneuthur   dosparîh   byr 

ar  y  lythyrenau,  ag  ijedi  hynny  son  am 

y  silafau   ar  geiriau.   Mo.  Pessaul  pu- 

_  ne  syd  oi'spyssu.  yrth  dosparth  y  lythy- 

saig.  rennau?   Gr.   Pump,   yn  gyntaf  d'un  da 

P^"^'  oed  fanegi,  beîh  yu  lythyren;  yn  yr  ail 

fan   guedus  oed  doedyd  y   nifer  syd  o 

honynî,  yn  y  trydyd  le  cy fadas  yu  dan- 

gos  heny  pob  un;  yn  ol  hynny  cymhesur 

oed  dyyn  ar  dalt,  pa  yahan  syd  rhyn- 

gîhyntf  yn  diuaeîha   o'r   cybl   y   hydai 

fodus   yspyssu  y  mod  syd  yy  cyssyldu 

_  I  nhyy    i    yneuthur   silafau.     Mo.     Beîh 

Die.  yxt    lythyren.    Canys  am   hynny    mae'n 

rhaid,   yrth  a  doedassoch ,  cael  adrybed 

yn  gyntaf.  Gr.  lythyren  yy'r,  elfen  leiaf 

ineyn    ymadrod.    Mo.    Beth    yy    elfen? 


et  S(  Gr.    Rhan    diuahanrhedaijl    o    beth    cy- 


jan- 


Errata  du  premier  numéro. 
gne  24,  au  lieu  de  :  Prémeaux  lire  :  Pernanà 


«5 


fansodedig,  a  fo  mor  sengyl  na  elir  moi 
pharîhu  i  amrafaelion  rannau  erail 
y  ladinuyr  ai  geilu  elementû  :  y  cymru 
elfyd,  ne  elfen.  Mo.  Vrthynny  nid 
ydiu  dd.  ph.  ch.  th.  ll.lythyrennau,  0  her- 
yyd  i  cyfansodi  0  dyy  elfen.  Gr.  ydynt 
er  hynny  i  gyd.  Canys  nid  oes  ond  galu 
vn  lyîhyren  gan  bob  un  0  honynt,  er  i' 
scrifennu  a  duy  elfen,  eisie  i'r  cymru 
dychmygu  vn  fath  ar  elfen  i  yasaneu- 
îhu  tros  bob  un  megis  y  gynaeîh  y  gro 
egyyr  yn  le  ph,  th,  a'r  vn  phunud  yn  le 
dd,  ag  ch.  A  phe  buassai  sain.  H.  genth- 
ynt,  ni  adousid  dim  honihithau  heb  i 
lun  sengl  o'r  neultu.  Ond  am  gaelonô 
ni  yn  lythyrenau  gan  y  ladinyyr,  e  or- 
fu  clfttio  hyn  0  diphig,  nail  aitryyfy- 
ry,  h,  at  lythyren,  ne  îryy  dyblu'r  un, 
mal  y  mae'r  arfer  fyyaf  etto,  yn  ydyy 
yma,  dd.  //.  Ond  cynnhyyssach  yy,  (jna- 
nyedig 


%dat 
en  t 


diga/êt 


.tes 

s  lecteurs 


me  prevented 
ibscription  to 
olume  which 
^inning  of  the 
)ring  out  the 
le  prospectus. 
■  ;  our  subscri- 
red  and  may 


une  5 
Lais 
son 


vou 

D 

vou 


Die. 

]\ 
alor 
vous 

E 


16 


290  Chronique. 

UNE  MÈRE  MALADE. 

E(  "  '    ■        ••     ->  - 

Son 
pou. 

Il 
sa  m 
d'ap 

E 
veuv  nuedig    os    mynnem    breintio    dim)    roi 

Vou  titl  dan  odre.  d.  yn  le.  dd.  dan  odre.  l.  yn 

L.  le.  II.  ag.  fely  ta  odre.  u.  yn  [e'r  chijeched 

fogail;  mal,  lau  duu  :  ne  ryu  nod  hynod 

meun  man    aral,    imijared    a   gurîhun- 

_  dra  idyblu.  Mo. 

saig. 

P^"^'  Lun    henyai    a   nifer.    y    lythyrennau. 

Cap.     ? . 


—  Maer  [un  ar  henu  syd   i   bob   lythyren? 

1  Gr.    Vrth  y  dafylan  yma  e  geir  gyybod 

'^°"'  pob  un   0  honynt.   Ondefua^ai  raid  yn 

c  êy^^^f  ào^àyd  pessayl  vn  syd  o'r  lythy- 

_  I  rennau  igyd,   Canys  hynny  oed  yr  ail 

bync  a'dayyd  i  fanegi  ynghylch  y  ly- 
thyrennau :  etto  gan  ofyn  onoch  yn  gyn 
taf  am  i  luniau,  ai  heyau,  mi  a  ynaf 
ynol  ych  dysyfiant  chyi  delluch  yn  da 
et  s(  ar  y  dafulan  yma  ag  chyi  a  geych    yc 

sanl  igd 

E 
époi 
app( 
C 
d'ui 
l'an 


Errata  du  premier  numéro. 
gne  24,  au  lieu  de  :  Prémeaux  lire  :  Pernanà 


«7 


led  pob 

un  0' 

'r  dau. 

s,  yu  i 

luniau 

ai  hen 

y  au  i  gyd. 

A 

a 

a 

L 

l 

el 

B 

b 

be 

M 

m 

em 

C 

c 

ce 

N 

n 

en 

a 

ch 

che 

0 

0 

0 

D 

d 

de 

P 

P 

pe 

D 

d 

de 

R 

r 

er 

E 

e 

e 

S 

■  s 

es 

F 

f 

fe 

T 

t 

te 

G 

g 

g^ 

Th 

th 

the 

I 

i 

L 

V 

u 

u 

H 

h 

he 

V 

y 

y 

L 

l 

d 

Y 

y 

y 

adat 
en  t 


digwêt 


Mae    lieblau'r    rhain     dair    erail ,    nid  '^^^       , 

'S  lecteurs 
ydyn  lythyrennau  cymraeg.  s.  penrh.   Q_ 

X.  Z.  cyphr.  q.  x.  z,  henyaa,  cuy,  ecs, 

zed.  etlo  rhaid  vrth  y  dyy  gyntaf  i'scri 

C         fennu  me  prevented 

abscription  to 
'olume  which 
ginning  of  the 
jring  out  the 
le  prospectus, 
t  our  subscri- 
red  and  may 


200  Chronique. 

UNE  MÈRE  MALADE. 
Er  ""  .    ■  .      ,  1.J 

Son 
pou. 
II 
sa  m  ,8 

d'ap 

E 
yç^^  fennu  ymbel  air  ladin,  ag  yrth  y  diya- 

Vou  ethaf  i  silafu  rhyu  air  grocg  a  fenthy- 

L.  cier   yeithie.  Mo.    mae'r   phord    i    dait 

y  dafulan  yma.  Gr.  Chyi  a  yelych  dair 

rhes  i  bob  lythyren,  yn  y  gyntaf  mae  lu 

_  niau  mayr  idynt,  a'r  riieini  a  elyir  pen 

saig.  rheithiayl,  yn  yr  ail  res  mae  luniaa  by 

P^"^'  ,  chain,   a^rheini  a  eluir  lythyrennau  cy 

phredinaul,  yn  y  dryded  y  mae    heny- 

YQy  au   pob    vn.    Mo.    Paham    y    gijnayd 

—  dau  lun  i  bobun  o  honynt?  a  oes  le  urth 

l  iaynscr.  y  dylid  scrifennu'r  nail  a  go- 

chel  y    lai  ?   Gr.    Oes  :  yn  nechrau  pob 

rhessym    cyflaun   gyedus   oed    scrifennu 

_  I  'rhai    myyaf,  a  hefyd  pob  heny  prio- 

Die-  dayl  a  dylid  i  dechrau  ag  vn  or  pêrhei 

th.iaul,    mal,    lesu.  Mair.   Gruphyd.  jun- 

dain.   Hafren  :  ag  am  i  bod  yn  bcnnaf 

yrth    dechrau    ^rhain,     ei    gelyir    pen- 


une  5 
Lais 
son 


rou, 
un 
S 


1\ 
alor 
vous 

E 


et  Si  rhcithiaul   ond   y   rhai  mân    a    scrifen- 


sant 
E 
époi 
app. 
C 
d'ui 
l'an 


nir 


Errata  du  premier  numéro. 

Page  I,  ligne  24,  au  lieu  de  :  Prémeaux  lire  :  Pernanà 

Page  3,  ligne  (>,  —  — 

Page  5,  ligne  10,  —  — 

Page  56,  ligne  7,  au  lieu  de  :  Valkyrian  lire  :  Valkyria 

Page  73,  ligne  37,  au  lieu  de  :  trigium  lire  :  triginn 

Page  76,  ligne  7,  au  lieu  de  :  séc.  lire  :  sec. 

Page  79,  dernière  ligne,  au  lieu  de  :  duaccradat  lire  :  duacradat 

Page  80,  ligne  22,  lire  nuradinse  (quae  loquebar),  prés.  sec. 

Page  83,  ligne  7,  au  lieu  de  :  th.  masc,  en  u  lire  th.  masc.  en  t 

Page  85,  ligne  5,  au  lieu  de  :  français  lire  :  français 

—  avant-dernière  ligne,     —  — 
Page  1 12,  ligne  20,  au  lieu  de  :  setu-inîWre  :  setu  int 
Page  1 14,  ligne  20,  au  lieu  de  :  gromzas  lire  :  gomzas 
Page  1 16,  ligne  4,  au  lieu  de  strumm  lire  stutnm 

—  5 ,       —        ma  oaoa  digwêt,  lire  :  ma  oa  digwêt 
Page  120,  ligne  17,  au  lieu  de  :  gaut  lire  :  gant 


— 

19,         —          hè     —     hé 

Page 

122, 

ligne  1 1 ,  au  lieu  de  :  ijem  lire  :  ijenn 

— 

12,         —         gaut  —    gant 

— 

16,         —         aun    —     ann 

— 

31,        —         enz    —    euz 

Page 

124, 

ligne  22,  au  lieu  de  :  gaut  lire  :  gant 

— 

36,        —          griè...  hè  lire  :  grié...  hé 

Page 

130, 

ligne  1 4,  au  lieu  de  :  gawd  lire  :  gwad 

Page 

M7, 

ligne  34,  au  lieu  de  :  ruccaitgthe  lire  :  ruccaigthe 

Page 

M9, 

ligne  26,  au  lieu  de  :  persuasis  lire  :  peruasis 

— 

ligne  37,  au  lieu  de  :  perrerantes  lire  :  pererrantes 

Page 

172, 

note  3 ,  ligne  i ,  au  lieu  de  :  Le  lecteur  lire  :  Les  lecteurs 

TO  OUR  SUBSCRIBERS. 

Owing  to  the  late  events,  we  hâve  been  for  a  very  long  tirae  prevented 
from  issuing  the  '  Revue  Celtique';  consequently,  the  subscripîion  to 
the  first  year  will  be  continued  until  the  end  of  the  ist  volume  which 
we  shall  endeavour  to  complète  before  1872.  From  thebeginning  of  the 
second  volume  henceforward,  we  shall  do  our  utmost  to  bring  out  the 
'  Revue  '  every  third  month  regularly,  as  we  promised  in  the  prospectus. 
Until  the  ist  volume  is  fmished,  we  are  obliged  to  request  our  subscri- 
bers'  indulgence  for  the  irregularities  which  hâve  occurred  and  may 
still  occur  in  the  issuing  of  our  numbers. 


La  Revue  Celtique  forme  par  an  un  volume  d'environ  520  pages. 
—  Prix  d'abonnement:  Paris,  20  fr.;  Départements,  22  fr.;  Étranger,  le 
port  en  sus.  On  souscrit:  Pour  la  France,  en  envoyant  un  mandat-poste 
payable  au  nom  de  M.  F.  Vieweg,  propriétaire  de  la  librairie  Franck, 
67,  rue  de  Richelieu^  à  Paris;  pour  l'étranger,  par  l'intermédiaire  d'un 
libraire. 

Une  liste  des  souscripteurs  sera  publiée  à  la  fin  de  chaque  vohime. 

Il  est  tiré  quelques  exemplaires  sur  papier  de  Hollande  portant  sur  le  titre  le 
nom  imprimé  du  souscripteur.  Le  prix  d'abonnement  à  ces  exemplaires  est 
double,  c'est-à-dire  40  fr.  pour  Paris,  44  fr.  pour  les  départements. 

Toutes  les  communications,  correspondances,  etc.,  doivent  être 
adressées  franc  de  port  à  M.  H.  Gaidoz,  aux  soins  de  M.  F.  Vieweg, 
propriétaire  de  la  librairie  Franck,  rue  de  Richelieu,  67,  Paris. 

La  direction  de  la  Revue  ne  s'engage  pas  à  renvoyer  aux  auteurs  les 
manuscrits  non  insérés. 


To  DUR  British  subscribers  : 
The  subscribers  are  respectfully  requested  to  remit  the  amount  of 
L  I  subscription  for  the  Ist  volume  of  the  Revue  Celtique,  in  a  Post  Of- 
fice Order  payable  at  the  General  Post  Office  London  to 
Trûbner  and  C° 

8  and  60  Paternoster  Row.  E.  C. 
London. 

N.  B.  A  few  copies  are  printed  on  laid  paper  with  the  names  of  subscribers. 
The  termsof  subscription  fer  thèse  copies  is  double,  viz.  two  pounds  per  annum. 

A  list  of  the  subscribers  will  be  given  at  the  end  of  every  yearly  volume. 

Subscriptions  for  America  and  the  Colonies  are  received  by  : 

E.  Steiger,  New-York  (U.  S). 

John  Wiley  and  Son,         d° 

J.  B.  Lippincott  and  Co.,Philadelphia  (U.  S.) 

Mohun  and  Bestor,  Washington  (U.  S.) 

Dawson  Brothers,  Montréal  (Canada). 

G.  Robertson,  Melbourne  (Australia). 

AU  literary  communications  to  be  addressed,  post  free,  «  To  the  Edi- 

tor,  care  of  Mons.  F.  Vieweg,  propriétaire  de  la  librairie  A.  Franck, 

67,  rue  de  Richelieu,  Paris.  »    .  - 

Books  for  review  to  be  sent  «  To  the  Editor,  care  of  Messrs  Trùbner 

AND  C,  8  and  60,  Paternoster  Row,  E.  C.  London.  »  , . 

The  Editor  cannot  undertake  to  return  communications  which  are 

not  asked  for. 

Nogent-le-Rotrou,  imprimerie  de  A.  Gouverneur. 


J.ffc.^^. 


ù-£M^ 


Les  Numéros  ne  se  vendent  pas  séparément. 


A         ^  PUBLIÉE  V"^     ^ 

^  ^^ 

iQ^      AVEC     LE     CONCOURS     DES     PRINCIPAUX     SAVANTS        V^V 
DES    ILES    BRITANNIQUES   ET    DU    CONTINENT 


DIRIGÉE    PAR 


H.    GAIDOZ 

Professeur  de  géographie  et  d'ethnographie  à  VÉcole  des  Sciences  Politiques  de  Paris, 

Membre  de  la  Cambrian  Arch<eological  Association  et  de  la  Royal  Arch£ological 

Association  of  Ireland,  etc. 


N"'  3  et  4  —  Décembre  1871  —  Août  1872 


LIBRAIRIE  A.   FRANCK  (f.  vieweg  propriétaire) 
6j,  rue  de  Richelieu,  PARIS 

TRiJBNER  AND  C 
8  and  6o,  Paternoster  Row,  E.C.,  LONDON 


J^mnberj^  are  not  sold  separately. 


SOMMAIRE  DU  PRÉSENT  NUMÉRO  : 

Au  lecteur. 

Table  des  matières . 

Liste  des  collaborateurs. 

Liste  des  souscripteurs. 

Les  légendes  des  monnaies  gauloises,  par  M.  A.  de  Barthélémy. 

La  racine  DRU  dans  les  noms  celtiques  des  rivières,  par  M.  A.  Pictet. 

L'Ex-Voto  de  la  Dea  Bibracte  (premier  article),  par  M.  J.  G.  Bulliot. 

Influence  de  la  déclinaison  gauloise  sur  la  déclinaison  latine  dans  les  documents 
latins  de  l'époque  mérovingienne^  par  M.  H.  d'Arbois  de  Jubainville. 

The  manumissions  in  the  Bodmin  Gospels,  by  Whitley  Stokes,  Esq. 

The  Luxembourg  Folio,  by  John  Rhys,  Esq. 

Attodiad  i  Lyfryddiaeth  y  Cymry,  gan  y  Parch.  D.  Silvan  Evans. 

Le  Catholicon  de  J.  Lagadeuc,  par  M.  Whitley  Stokes. 

Proverbes  et  dictons  de  la  Basse-Bretagne  (deuxième  article),  par  M.  L.  Sauvé. 

Traditions  et  superstitions  de  la  Basse-Bretagne  (deuxième  article),  par  M.  R. 
F.  Le  Men. 

La  véritable  histoire  de  Bretagne  de  Dom  Lobineau,  par  M.  P.  Levot. 

Mélanges  :  Teutates,  par  M.  H.  d'Arbois  de  Jubainville. 

Bibliographie  :  Hoimboe  :  Om  Vildssviintypen  ;  —  de  Belloguet  :  Glossaire 
gaulois  (H.  d'A.  de  J.).  —  Flechia  :  Di  alcune  forme  de'  nomi  locali  dell'  Italia 
superiore  (H.  G.).  —  Hucher  :  L'Art  gaulois  (H.  d'A.  de  J.).  —  De  Saulcy  : 
Lettres  sur  la  numismatique  gauloise  (H.  d'A.  de  J.).  —  H.  Martin  :  Études 
d'archéologie  celtique  (H.  G.).  —  Zeuss  :  Grammatica  celtica  (H.  d'A.  de  J.). 

—  Nigra  :  Reliquie  Celtiche  (H.  d'A.  de  J.).  —  The  poems  of  Ossian,  éd.  Clark  ; 
Ebrard  :  Handbuch  der  mittel-gaelischen  Sprache  (H.  G.).  —  Bottrell  :  Tradi- 
tions and  hearthside  stories  of  West  Cornwall  (Gaston  Paris).  —  Wh.  Stokes: 
StMeriasek,a  Cornish  drama;  Charnock:  Patronymica  Cornu-Britannica(H.G.). 

—  0.  von  KnobelsdorfF  :  Die  keltischen  Bestandtheile  in  der  englischen  Sprache 
(H.  G.).  —  Thomas  :  Hanes  Cymry  America  (H.  G.).  —Publications  diverses. 

Chronique,  par  M.  H.  Gaidoz  (M.  Wocel  et  M.  de  Belloguet).  —  L'inscrip- 
tion d'HoeyIaert.  —Articles  de  revues.  —  Lectures  de  MM.  Mac  Lauchlan, 
Luzel  et  d'Arbois  de  Jubainville. — Publications  annoncées.— Création  d'une  chaire 
de  philologie  celtique  à  l'Université  de  Berlin). 

Corrigenda  et  Addenda. 

Note  sur  :  Goidilica,  éd.  by  Stokes  (C.  N.). 

Supplément  :  Dosparth  byrr  ar  y  rhan  gyntafi  ramadcg  cynutug  [gan  Gruffydd 
Roberts,  1 567.]  A  fac-similé  reprint.  (This  will  be  continued  in  regular  instal- 
ments,  with  a  separate  pagination,  in  ail  subséquent  numbers  until  the  work  is 
completed). 


J 


LISTE 


DES 

MOTS    RELEVÉS    SUR   LES    MONNAIES    GAULOISES 
(1871). 


De  tous  les  monuments  qui  ont  conservé  des  souvenirs  épigraphiques 
contemporains  de  l'époque  gauloise,  les  monnaies  sont  les  plus  nombreux. 
On  sait  combien  sont  peu  communes  les  inscriptions  gravées  sur  pierre 
et  sur  métal;  le  Dictionnaire  d'Archéologie  Celtique,  publié  par  la  Com- 
mission de  la  Topographie  des  Gaules,  donne  de  celles-ci  les  représen- 
tations les  plus  exactes. 

Les  légendes  monétaires  forment  maintenant  un  appoint  considérable 
dont  les  celtistes,  jusqu'à  ce  jour,  se  sont  peu  servi  dans  leurs  travaux. 
Il  serait  injuste  de  leur  faire  des  reproches  à  ce  sujet  et  de  les  accuser 
de  négligence  ;  les  philologues  n'étant  pas  numismatistes,  la  prudence 
leur  faisait  un  devoir  de  s'abstenir.  En  effet  l'étude  des  monnaies  gauloises 
est  récente;  elle  ne  remonte  pas  au  delà  de  l'année  1856,  date  de  la 
fondation  de  la  revue  spéciale  créée  par  MM.  Cartier  père  et  de  La 
Saussaye.  Pendant  longtemps  cette  branche  de  la  science  n'a  donné  que 
des  résultats  assez  vagues.  Il  y  avait  des  tâtonnements  et  des  hésitations 
dans  le  déchiffrement  des  légendes;  le  même  mot  était  souvent  lu  de 
de  diverses  manières,  suivant  l'état  de  conservation  des  pièces  sur  les- 
quelles il  était  gravé,  et  aussi  suivant  l'habileté  de  celui  qui  tentait  de  le 
deviner. 

Je  ne  veux  pas  insister  sur  les  essais  faits  jadis  par  MM.  Breulier  et 
Monin  pour  interprêter  les  légendes  monétaires  gauloises;  leurs  conjec- 
tures, aussi  peu  solides  que  celles  de  M.  Pierquin  de  Gembloux^  n'ont 
pas  fait  faire  un  pas  à  la  science.  Mais  je  ne  puis  omettre  de  noter  qu'en 
1858  encore,  M.  Roget  de  Belloguet  reconnaissait  qu'il  croyait  devoir 
être  très-réservé  à  l'égard  de  la  numismatique,  à  cause  de  l'incertitude 
de  la  forme,  des  continuelles  variations  et  des  difficiles  lectures  des 
monnaies. 

20 


292  Liste  des  mois  relevés  sur  les  monnaies  gauloises. 

Il  est  cependant  peu  croyable  qu'une  collection  de  près  de  400  mots  ne 
fournisse  pas  quelques  éléments  utiles  aux  savants  qui  cherchent  à  recons- 
tituer une  langue.  On  objectera  que  dans  cette  série  les  noms  propres 
d'hommes  dominent;  mais  ces  noms  peuvent  donner  des  indications 
précieuses  :  ils  doivent  parfois  être  accompagnés  de  qualifications; 
ils  sont  souvent  composés  de  vocables  qui  ont  une  signification  usuelle; 
on  peut  saisir  certains  détails  de  prononciation.  Je  n'ai  pas,  du  reste,  à 
empiéter  sur  le  domaine  de  la  philologie,  devant  me  borner  au  modeste 
rôle  de  numismatiste. 

C'est  aussi  comme  numismatiste  que  j'ai  essayé  de  réviser  toutes  les 
légendes  des  monnaies  gauloises  connues  jusqu'à  ce  jour;  de  les  présenter 
sous  la  forme  que  je  crois  être  la  vraie;  enfin  de  faire  disparaître  quelques 
leçons  erronées  que  l'on  trouve  encore  parfois  dans  des  livres  sérieux. 

Les  monnaies  gauloises  à  légendes  sont  relativement  les  moins  an- 
ciennes :  ces  pièces  sont  d'abord  anépigraphes;  puis  paraissent  des 
lettres  isolées,  puis  deux  lettres  réunies  ou  disposées  en  monogramme  ; 
enfin  de  véritables  légendes  plus  ou  moins  abrégées.  La  numismatique 
gauloise,  proprement  dite,  finit  avec  le  dernier  siècle  avant  l'ère  chré- 
tienne. 

Ces  légendes  sont  généralement  écrites  en  caractères  grecs  ou  romains; 
parfois,  dans  le  même  mot  ces  caractères  sont  employés  concurremment. 
Chez  les  Salasses,  et  chez  les  peuplades  gauloises  de  la  Haute-Italie,  on 
voit  des  monnaies  porter  des  caractères  qui  procèdent  de  l'alphabet  des 
Etrusques  et  de  celui  des  Latins,  surtout  du  premier.  Les  lettres  celti- 
bériennes  sont  employées  à  Nîmes  et  chez  quelques  peuples  de  l'Aqui- 
taine. J'aurai  soin,  du  reste,  de  noter,  lorsqu'il  en  sera  besoin,  les 
caractères  qui  n'ont  été  empruntés  ni  au  grec  ni  au  latin. 

Anatole  de  Barthélémy. 


N.  B.  —  J'ai  indiqué  par  les  signes  AV,  AR,  et  M,  le  métal  des  monnaies, 
or,  argent  ou  bronze. 


ABALLO.  Mauv.  lect.  p.  Caballos.  ACVSSROS,  M.  Rev.  num.  fr.    i8}8.  Pi. 

ABVCATO,  AV.  Rev.  num.  fr.  1836.  Pi.  2.  XXl. 

ABVDOS,  AV.  JE.  Bituriges.  Dict.  d'arch.  ADDEDOMAROS,  ADDIDOM,  AV.  Britanni. 

celt.  pi.  desmonn.  n"  144,  14$.  Lelewel,  J.  Evans,  pi.  XIV,  1,2  a  9.  —  Num. 

VII,  44.  Chron.  18(6,  p.  1(9. 

ACINCOVEPVS-PETRVCORI,  OU  PERRV-  ADIETVANVS  REX-SOTIOTA;  AR.  Sotia- 

CORI,   AR.  Denier  au  cavalier.   Musée  tes.  Dict.  d'arch.  celt.  n"  47.  —  Ducha- 

de  Lyon.  lais,  p.  16. 

ACVNO,  M.  Lambert.  2' partie,  XVII,  14.  adnamaTI,  AR.  Boii.  Lelewel,  III,  12. 


Liste  des  mots  relevés  sur  les  monnaies  gauloises. 


295 


ATHd,  JE.  Senones.    Rev.  num.  fr.  1844, 

p.  365.  Dict.  d'arch.  celt.  n"  24. 
AESV,  AR.  Briîanni.  J.  Evans.  PI.  XV,  8. 
ALABDOAIIOS-NIDE,  AR.  Lelewel,  VI,  I  2. 

—  Duchalais,  p.  18. 
AMBACTVS,  JE.  Lelewel.  IX,  9.  —  Du- 
chalais, p.  158. 
AMBIE,  JE.   Type  des  Abvdos.   Coll.   de 

Saulcy. 
AMBILLI-EBVRO;    AMBILO-EBVR,    AR. 

Denier  au  cavalier.   Dict.    d'arch.   celt. 

n"  82.  —  Lelewel,  VI,  17. 
AMBIORIX,  mauv.    lect.   p.  AMBILLI.  — 

Lelewel,  VIII. 
AMEN,  AV.  Salasses  (caraci.  étr.-lat.).  Rev. 

num.  1861.  p.  J44. 
AM;     AMMI;    AMMINVS-DVN,    AR,     JE. 

Britiinni.  J.  Evans,  p.  209;  pi.  V,  i  et  2. 
ANDECOMBO-ANDECOM,    AR.    Lelewel, 

III,  44,  45  ;  IV,  47.  Dict.  d'arch.  celt. 

n°  72.  —  Duchalais,  p.  116. 
ANDOBRV.  Voy.  GARMANOS. 
AND;  ANDO;  ANDOC;  ANDOCO.  AV,  AR, 

JE.  Britanni.  J.  Evans,  p.  217  et  pi.  V, 

4,  5,  6. 
ANDVGOVONl-CELIICORIX,  JE.  Andecavi. 

Dict.  d'arch.  celt.  n"  68.  (Saulcy. 

annaroveci-annaroveci,  je.  Coll.  de 
ANNICOIOS,  JE.  Lelewel,  IX,  23. 
.^KORBO.    Voy.  Dubnorex. 
ANTEÔ  ;   ANTEDRIGV  ;  ANTED,  AV,  AR. 

Britanni.  J.  Evans,  pi.   1,   7  et  8;   pi. 

XV,  9,  10,  II. 
ANTin.  AHM.  JE.  Antipolis.  Dict.  d'arch. 

celt.    n°  4.    —   Duchalais,    85.    —    La 

Saussaye,  11  à  17. 
AOYE,  AYE,  AR.^vt'n/o.La  Saussaye,Num. 

de  la  Narbonn.  n"  17;  Dict.  d'arch.  celt. 

n"  3.  —  Lelewel,  VIII,  32.  —  Duchalais, 

p.  20. 
ARKAN;    ARCANTODAN-ROVECA;     AR- 

CANTODA-MAVFENN,  AE.  Lambert,  2= 

partie,  XVI,  16.  -  Rev.  num.  fr.  1859, 

p.  313;  1868,  p.  410. 
ARDA-ARDA,  JE.   Lelewel,   IX,   31  à  34. 

Dict.  d'arch.  celt.  n"  Ç)G. 
AREC.  Voy.  VOLCAE. 
AREMACIOS    (ou    GIOS),   JE.    Duchalais, 

p.  255. 
APHTOI.VMOI-NAMA,   JE.  Duchalais,  p. 

81  et  83. 
ARIVOS.  Voy.  Santonos. 
ARTOS,  JE.  Carnutes.  Rev.  num.  fr.  1842, 

pi.  XXI. 
ARTVE-COMVN.    Mauvaise  lecture  d'une 

monnaie  de  Passtum  de  Lucanie,  attribuée 

fautivement  à  la  Gaule.  Cf.  Rev.  num. 

fr.  1848,  p.  351  et  Lelewel,  IX,  15. 
ARVS.  Voy.  Segvsia. 

ACTIKO.  Mauv.  lecture  pour  KACriAO. 
ATAV,  Stat.  d'or.  Coll.  Saulcy. 
ATECTORI,  JE.  Pictavi.  Lelewel,  IX,  24. 
ATEPILOS.   Voy.  TovTOBOCio. 


ATEVLA-VLATOS,  AR.  Lelewel,  III,  43; 
V,  10. 

AGIIDIACI-A.  HIR.  IMP,  AR.  Dict.  d'arch. 
celt.  n"  120. 

ATISIOS.   Voy.  REM9S. 

?,A  TNALIOS,  JE.  Edui.  Coll.  Saulcy. 

AHORI.  Britanni.  Rev.  num.  VII,  373. 

ATPILI.  Voy.  Orgetorix. 

ATTA,  AR.  Bail.  Lelewel,  I,  12  et  III,  11. 

AVARIICO,  JE.  Lelewel,  VII,  72.  Ducha- 
lais, p.  7,  lisait  AVACIICO. 

[AViARICI.  Mauv.  lect.   Voy.  Vmiciv. 

AVAVCIA,  JE.  Aduatuci.  Lelewel,  IX,  26. 
Dict.  d'arch.  celt.  n"  1 1  j. 

AVDAIACOS,  AR.  Type  du  denier  au  cava- 
lier. Rev.  num.  1847,  p.  26J,  pi.  XI. 

AVDOS,  JE.  Rev.  num.  1838,  p.  412. 

AVLIRCVS;  AVLIRCO-EBVROVICO.  Au- 
lerci  Ehurovici.  JE.  Lelewel,  IX,  47  et  46. 
—  Dict.  d'arch.  celt.  n"  70. 

AVLOIB.  Voy.  IIAVLOIB  et  SOLIMA.  Rev. 
num.  fr.   1846,  p.  116,  pi.  VII. 

AVN,  AR.^.fin?rtn«(.  J.Evans,pl.XVlI,8. 

AVOT  (ou  TOVA),  JE.  Coll.  Saulcy. 

AVSCRO.    Voy.  DvRNACOS. 

AVSCROCOS;  AVSCROCVS;  AVSC,  AR. 
Lelewel,  VII,  32. 

BELINOS,  AR.  Lelewel,  Vil,  4.  —  Du- 
chalais, p.  J. 

BIIINOC,  AR.  Voy.  Belinos.  Duchalais, 
p.  J  :  quelques  numismatistes  pensent 
qu'il  faut  lire  BPIINOC. 

BHTAPPATIS,  JE.  Betarra.  Dict.  d'arch. 
celt.  n°  M.  —  Duchalais,  p.  84  à  86. 

BIATEC,  AR.  Boii.  Lelewel,  I,  4;  III,  15. 

BIRAGOS,  AR.  Coll.  Saulcy. 

BISO,  JE.  Lelewel,  VII,  73. 

BITOVIOS  BACIAEr,.*:.  Biterrenses  ou  To- 
losates. 

BITOVKOC  BACIAErS,  JE.  Id. 

BODVO  :  BODVOC,  AV.  AR.  Britanni.  Le- 
lewel, VIII,  18,  19. — John  Evans,  p.  13$, 
pi.  I,  2,  3. 

BQKIOC.  Voy.  AOrrOIT.\AHTQN. 

BOYIBIION,  AR.  Musée  de  Rouen.  Lam- 
bert, r"  partie,  pi.  ix,  4. 

BRIIN(NOS),  AR.  Lecture  très-douteuse. 
Voy.  BiuNOs.  Lambert,  i"  partie,  XI, 
16. 

BRICA,  JE.  Coll.  Ledain,  à  Metz. 

BRIC-COMAN.  BR-COMAN;  BRICO-COMA, 
AR.  Lelewel,  III,  49. 

BRIGIOS,  JE.  Amrni.  Lelewel,  VII,  1. 

BVGIOS,  JE.  Mus.  de  S'  Germain.  Dict. 
d'arch.  celt.  n'  153. 

BVSV;  BVSVMARV,  AR.  Boii.  Lelewel, 
111,  14. 

CABALLOS,  JE.  Mus.  de  St. -Germain. 
CABE  COL,  AR.  JE.  Cabellio  colonia.  Dict. 

d'arch.  celt.  n°  2.  —  Lelewel,  VIII,  14, 

16;  —  Duchalais,  p.  21. 


294 


Liste  des  mots  relevés  sur  les  monnaies  gauloises. 


CAL-MOR,  AR.  Mon.  du  Sud-Est;  sér.  des 
den.  au  cavalier.  Rev.  num.i86o,  p.  417. 

CALEDV,  AR.  Lelewel,  III,  (i  et  IV,   51. 

CALEDV-SENODON,  AR. 

CALIIDV,  JE.  Amrni.  Dict.  d'arch  celt. 
n"  I  (0.  —  Lelewel,  VU,  1 1 . 

CALI AGIIIS,  M.  Carnutes?  Dict.  d'arch.  celt. 

CALITIX.   Voy.  Cosii.  jn"  158. 

CALLE.    Voy.  Eppil. 

C.4A0Y,  CAAOYA-MAN,  m.  m.  de  Saulcy 
propose  de  déchiffrer  ainsi  la  légende 
assez  incertaine  de  monnaies  qui  se 
trouvent  surtout  dans  le  Châlonnais;  il 
voit  le  nom  du  chef  Suession  appelé 
Galba  par  les  historiens.  Après  avoir 
étudié  plusieurs  exemplaires  je  n'ai  trouvé 
que  NKYOVS  ou  SVOYKN  au  droit,  et 
au  revers  M  AN. 

CaM,  AR.  Lelewel,  VIII,  2. 

CAMBIL,  M.  Bituriges?  Dict.  d'arch.  celt. 
monn.  n"  135. 

CAMBOTRE,  AR.  Lelewel,  V,  II.  Ducha- 
lais,  p.  8. 

CAMVL-CVNOBELI;  C.\MV-CVNO;  CAMV- 
CVN;  CAMVLODVNO-CVNO,  AV.  AR. 
JE.  Britanni.  Lelewel,  VIII,  51,  s 5»  54i 
JS,  56:  —  J.  Evans,  pi.  IX,  I,  2,  3  à 
14;  pi.  XI,  I  à  4;  pi.  XII,  9314; 
pi.  XIII,  I  à  4. 

CANTORIX.  Voy.  TVRONOS. 

CARMANOS.   Voy.  GARMANOS. 

CARSICIOS-  ...MMIOS,  AR.  Duchalais , 
p.  25. 

CAS,  AV.  Arverni.  Rev.  num.  XIll,  ijo. — 
Peghoux. 

CATAL,  AE.  Musée  de  St.-Germain. 

CATAV,  AE.  Lelewel,  VII,  40. 

CATTI,  AV.  Britanni.  AV.  Lelewel,  VIII, 
17;  —  J.  Evans,  pi.  I,  4. 

CATTOS.   Voy.  Cisiambos. 

CAV.  Mauv.  lect.  p.  AVSC. 

CAVDVRO.  Britanni. 

CAVNO.  Lelewel.  Mauv.  lect.  p.  CN.VOL. 

CELIICORIX.   Voy.  Andvgovonni. 

CEVARIX.   Voy.  Varixce. 

CICIIDV.BRI-IIPAD,  AE.  Arverni.  Dict. 
d'arch.  celt.  n"  134.  —  Duchalais,  p.  $. 

CINCIVNV,  AE.  Carnutcs.  Lelewel,  V,  17, 
et  Rev,  num.   1848,  p.   344. 

CISIAMBOS;  CISIAMBOS  CATTOS  VERCO- 
BRETO,  AE.  Lexovii  Lelewel,  VII,  41  et 
42.  Dict.  d'arch.  celt.  n"  78. 

CISIARECO,  baron  Marchand.  Mauv.  lect. 
p.  CISIAMBOS. 

CN.    Voy.    VOLVNTILLVS. 

COBROVOMARVS,   AR.  Boii. 
COGESTLVS,  AR.  Boii.  Lelewel,  VII,  38. 
COIOS.  Voy.  Orcitirix. 
COISA,  AR.  Boii. 

COL.  Colonia.  V.  Cabe,  Nemavsvs. 
COMAN.  Voy.  Cosii,  Brico. 
COMMIOS.     Voy.    Carmanos,    Carsicios, 
TiNo,  ViRi,  Verica.  Lelewel,  VI,  29. 


COMMIOS,  AV.  Britanni.  J.   Evans,  pi.  I, 

10. 
COMVX,    AV.    Britanni.  J.  Evans,  pi.  1,  s. 
CONA,   AR.    Rev.   num.    1847,  p.  266,  et 

1844,  p.  404- 
CONE...D,  AE.  Coll.  Saulcy.  Dict.  d'arcl,. 

celt.  n"ii2.  —  Lambert,  r^' partie,  IX, 

4- 

CONGE;   CONGESA,  AR.  Boii. 

CONNO  EPILLOS.  —  SEDVLLVS,  AE. 
Coll.  Saulcy, 

CONTOVTOS,  AE.  Lelewel,  V,  13.  —  Du- 
chalais, p.  17. 

COOV-COV,  AR.  Denier  au  type  du  cava- 
lier du  S.-E.  Rev.  num.  1860,  p.  417. 

COPO,  AR.  Boii. 

CORIARCOC  iCllVICOVIJ.  — A.  IMP.HIR, 
AE.  Lelewel,  VI,  36. 

CORILISSOS Mauv.  lect.  p.  Coriarc-m 

COSll-COMAN,  AR.  Denier  au  cavalier. 

COSII-CALITIX,  AR.  Denier  au  type  ' 
cavalier  du  S.-E.  Rev.  num.iS6o,p.  41  7. 

COVED..,  AR.  Type  des  deniers  des  VoIc.t 
Tectosages.  —  Coll.  Saulcy.  On  connaÏ! 
aussi  une  obole,  au  type  de  la  croix,  se 
rattachant  au  type  massaliète,  et  qui 
porte  la  légende  COVE.  Mus.  de  St.- 
Germain. 

COVS,  obole  d'argent  trouvée  à  Vieille 
Toulouse,  et  conservée  dans  la  coll.  de 
M.  de  Saulcy. 

CRAB,  AR.  Britanni.  J.  Evans,  pi.  V,  5,  et 
p.  214. 

CRICR;  CRICRV;  CRICIRO;  CRICIRV, 
AV.  AR.  AE.  Betlovaci.  Lelewel,  IV,  )i\ 
VI,  40.  —  Dict.  d'arch.  celt.  n°  113. 

CRITVRIX-A.IMP.HIR,  AE.  Musée  Je 
Lyon. 

CVBIO,  AR.  Coll.  de  Saulcy. 

CVNOBELI.   Voy.  Camvl,  Tascio. 

CVNOBELI-CVN;  CVNO-SOLIDV;  CVNO- 
BELINVS  REX-TASC;  CVNOBELINi- 
TASCIO;  CVNO-TASCF;  CVNO-TASCiO; 
CVNOBII-TASC.FIL;  CVNOBELINI- 
TASCIOVANI.F  ;  CVNOB-TASCIIOVAN- 
TIS,  AR.  AE.  Britanni.  Lelewel,  VIII, 
S7,  s8.  —  J.  Evans,  pi.  XX,  i  à  14,  XI. 
6  à  14;  pi.  Xll'.  1  à  7. 

CVNVANOS,  AE.  Arverni.  A.  Peghoux, 
PI.  II,   17. 

DARA.   Voy.  DlARlLOS. 

AEIOVIGIIAGOC;  AEIVIGAG,  AE.  Diviiui- 
cus.  Dict.  d'arch.  celt.  n"  109. 

AEIOVN-AEIV..,  Divona  selon  Crazannes; 
mauv.  lect.  p.  Dciouvigiiagoc. 

AEIOYIN.  Mauv.  lect.  voy.  le  mot  précé- 
dent. —  Duchalais,  p.  13. 

AHM.   Voy.  Antipolis. 

DEY,  Britanni. 

DIAOVLOS.  Mauv.  lect.  p.  DIASVLOS. 

DIARILOS-DARA,  AR.  Dict.  d'arch.  celt. 
n"  184.  —  Lelewel,  VII,  15. 


Liste  des  mots  relevés  sur  les  monnaies  gauloises. 


295 


DIASVLOS,  AR.  Dict.  d'arch.  celt.  n°  149. 

—  Leiewel,  VII,  13.  M.  de  Saulcy  croit 

pouvoir  lire  DIVISAFOS 
DIAV,  AE.  Edui.  Dict.  d'arch.  celt.  n"  92. 
DIAVCOS,  AE.  Edui.  Id.  n"  227. 
Q^DOCI.SAMF;  C^DOCI;  DOCI.  AR.  AE. 

Sequani.  Dict.  d'arch.  celt.  n"  177. 
DICOM.  Pellerin.  Bouteroue.  Mauv.  lect.  p. 
DIKOI,  AR.  Gaule  cisalpine,   ou  Salassi. 

Lambert,  2'  partie,  XVII,  15,  16,  17. 
DONNAM,   AE.   Arverni.  Coll.  Saulcy.  — 

A.  Peghoux,  n"  38, 
DONNVS.  Voy.  DvRNACVS. 
DONNVS-ESIANNI,  AR.  Denier  au  type 

du  cavalier  du  S.-E. 
DRVCCA-TVRONA,    AE.    Musée   de    St.- 

Germain. 
DVBNOCOV.    Voy.  Dubnoreix. 
DVBNOREIX;    DVBNOREIX-DVBNOCOV; 

DVBNORX;  DVBNOREX-ANORBO,  AR. 

Dumnorix.  Dict.  d'arch.  celt.  n'"  6j,  66, 

163.  —  Leiewel,  IV,  45,  46;  VI,  19. 
DVBN;  DVBNO;  DVBNOVIILLAVNOS, AR. 

Boii. 
DVBNO;  DVBNOVIILLAVN;  DVBNOVEL- 

LAVNOS,  AV.  AR.  AE.  Britanni.  Leie- 
wel, VIII,  20.  —  J.  Evans,  IV,  6,  7,  8, 

9,  10,  II,  12. 
DVMN-TICIPSENO,     AV.    Briannit.     J. 

Evans,  pi.  XVII,  3. 
DVMNOCOVEROS.   Voy.  Vousios. 
DVMN0VER03,  AR.  Boii. 
DVMNOVEROS,  AV.  Britanni.  J.  Evans, 

pi.  XVII,  2. 
DVN.  Voy.  AMMINVS. 
DVRAT-IVLIOS,  AR.  Pictavi.  Dict.  d'arch. 

celt.  no  20.  —  Leiewel,  VII,  12.  Ducha- 

lais,  p.  14. 
DVRNACVS-DONNVS;  DVRNAC-EBVROV; 

DVRNAC-AVSC,  AVSCRO,  AVSCROCOS; 

DVRNACVS-ESIANNI,  AR.  Dict.  d'arch. 

celt.  n°  83,   167.  —  Leiewel,    IV,    $2; 

VI,  18,  p.  30.  Denier  au  cavalier. 
DVRNOCOV.  Mauv.  lecture  p.  Dubnocov. 

IIAROS',  AE.  Type  de  Abvdos. 

EBVRO;    EBVROV.    Voy.    DVRNACO,   AM- 

BILLI,   RlCANT. 

ECCAIOS,  AE.  Dict.  d'arch.  celt.  n"  86. 

ECCAIO;  IICCAIO,  AR.  Boii. 

ECEN;    ECE,    AE.    Britanni.   J.    Evans, 

pi.  XV,  I,  2  à  J. 
HCOYArEFl,  AE.  Coll.  de  Saulcy. 
EDVIS-ORGETIRI,  AR.    Edai ,  Orgetorix. 

Dict.  d'arch.  celt.  n"'  63-64.  —  Leiewel, 

VII,  87. — Duchalais,  p.  112.  —  La 
Saussaye,  Inst.  arch.  de  Rome,  1846. 
T.  XV. 

EIVICIAE,  AE.  Coll.  de  Saulcy. 


_i.  Il  ne  faut  pas  oublier  que  le  double 
I  équivaut  à  un  E. 


EKPIT,  AE.  Leiewel,  V.,  59. 
EAKESOOVIX-TASGUTIOS,  AE.  Carnutes. 

Dict.  d'arch.  celt.  n"  73.  —  Leiewel,  IV, 

57- 
ELIOCAOI  -  SVTICOS,     AE.     Vdiocasses. 

Dict.  d'arch.  celt.  n" /^^. — Lelewel,VII,5. 
ELVIOMAR,AR.  Boii. 
EPAD,  AR.  AE.  Arverni,  Epasnactus.  Dict. 

d'arch.  celt.  n'  91-133.  —  Leiewel,  VI, 

21.  —  Duchalais,  p.  i. 

IIPAD.   Voy.  ClCUDVBRI. 

EPATI;  TASCIF-EPATICCV,  AV.  AR. 
Britoms.  J.  Evans,  pi.  VIII,  12,  13,  14. 

EPENOS:  EPENVS;  EfTHNOC,  AE.  Meldi. 
Dict.  d'arch.  celt.  n°  43.  —  Leiewel,  VI, 
44,  4J- 

EPILLOS.  Voy.  Rev.  num.  1838,  p.  306; 
1847,  p.  373;  Leiewel,  pi.  VII,  n"  2. — 
Voy.  aussi  Conno. 

EPPIL  COMF;  EPPILLVS  COMF;  EPPI 
COMF;  EPP.  REX  GALLE;  EPPI,  Bri- 
tanni. AV.  AR.  AE.  Leiewel,  VIII,  8,  7, 
9,  40.—  J.  Evans,  pi.  III,  8,  9,  10,  11, 
12,  13;  pi.  IV,  I,  2,  3,  4,  5. 

ERCOD-ERCOD,  AR.  Duchalais,  p.  169. 

IIPOMIIAOS,  AR.  Bituriges.  Duchalais,  p. 
91,  92,  lisait  à  tort  Eromclos. 

ESIANNI.  Voy.  DoNNVS. 

IISVPaS.  Britanni. 

EVOIVRIX,  AR.  Boii. 

FABIARI,  AR.  Boii. 

GARMANOS-COMIOS   ou   COMMIOS.  AR. 

Dict.  d'arch.  celt.  n"  89.  —  Duchalais, 

p.  87. 
GARMANOS-ANDOBRV,  AE.  Leiewel,  III, 

50.  —  Lambert,  2'=  partie,  XVI,  11.  — 

Duchalais,  p.  86  et  67. 
GELISVC.  Mauv.  lect.  pour  SEGISVC. 
GERMANVS-INDVTILLir,AE.rrmn.Dict. 

d'arch.  celt.  n"  118.  —  Leiewel,  IV,  2j. 
GIAMILOS;   GIAMILO  SIINVI,  AE.  Leie- 
wel, VII,  3. 
TAAMKfiX,  AR.   Clanum.    Dict.   d'arch. 

celt.  n"  7.  —  Leiewel,  III,  8.  Cab,  de 

France. 
GOTTINA,    AV.    Treviri.  Leiewel,  IV,  23. 

A.  HIR,  AE.  Treviri.  Dict.  d'arch.  celt.  n" 

117.  —  Leiewel,  IX,  14. 
A.  HIR.IMP.    Voy.  Mirfii.'xrn,  Coriarco, 

Criturix. 

IBRVIX,  AE.  Rev.  num.  1863,  306.— 
Leiewel,  IX,  44.  —  Duchalais,  p.  122. 

irOHn-MACCA,  AE.  Massalietes.  Rev. 
num.   1847,  267. 

lEMEP.  Mauv.  lect.  p.  CMEP. 

IFELITOVESI.  AR.  Gall.  Cisalpina.  Leie- 
wel, pi.  VII,  8. 

IFNKOVE,  AR.  Call.  Cisalpina.  Duchalais, 
p.  109. 


296 


Liste  des  mots  relevés  sur  les  monnaies  gauloises. 


INAM,  AV.  Britanni.  J.  Evans,  p.  149. 
INDVTILLl.  Voy.  Germanvs. 
IMIOCI,  AR.  Rev.  num.   1862,  pi.   i. 
lOTVIRlX,  AR.  Boii.  Rev.  num.  Xll,  267. 
ISVNIS,  AE.  Bituriges.  Dict.  d'arch.   celt. 

n"  147. 
IVLIVS.  Voy.  ToGiRix. 
IVLIV.   Voy.  Onomopatis. 
IVLIOS.   Voy.  DvRAT. 

KABALA.  Statère  d'or,  coll.  Saulcy. 
KAIANTOAOY.  BASiAEtîS,  AE.  Bebryces, 

ou  Tolosates.  Dict.  d'arch.  celt.  n°  31. 

Lelewel,  IX,  54. 
KALMKHTQN,  AR.  Caenicenses.  Coll.  de 

France  et  de  Saulcy.  Dict.  d'arch.  celt. 

n°  I.  —  Lelewel,  111,  9. 
KAA;  KAARTEAOV,  hK.Aedui.  Dict.d'arc. 

celt.  n"  62.  —  Lelewel,  IV,  40,  41. 
KAPI0A,  AE.  Camutes. 
KAPNITOC  ou  KAP0NT0C-1..CII.   Mauv. 

lect.  de  Duchalais. 
KACriAO  (r.  KAAV),  AE.  Ko^.Samnaget. 
KASILOI,  AV.  Salassi.  Rev.   num.    1861, 

P-  344- 
KAT,  AV.  Sûlassi.  Rev.  num.  1861,  p.  344. 
KERAT;    KERATI  ;     KERATIX.  Britanni. 

Rev.  num.  XV,  24 j    et   358.  —  Mauv. 

lect.  Voy.  EPATI. 
KOIIAKA,  AE.  Camutes. 
KRACCVS,  AE.   Duchalais,   p.    277.    Rev. 

num.  VII,  223. 
KPAMITOC.  Mauv.  lect.  de  Mionnet.  Voy. 

Kapnitoc. 
KPISIO.  Mauv.  lect.  p.  KPIZZ.  (Musée  de 

Marseille).  AE.  Le  Crest? 

AAKYAQN,  AR.  Massalia.  Lelewel,  VII, 
28.  —  Duchalais,  p.  27. 

LAVOMARVS,  AR.  Boii. 

LEXOVIO.  Voy.  Semissos. 

LIBECI,  AR.  Libici  de  la  Cisalpine,  carac- 
tères italiques,  légende  tracée  de  droite  à 
gauche. 

LIHOVI-MACCA.  Mauvaise  lecture  pour 
Massalia.  Voy.  lyorju. 

LITA;  LITAV;  LITAVICOS,  AR.Aedui.  Dict. 
d'arch.  celt.  n°  69.  —  Lelewel,  VIII,  7. 
—  Duchalais,  p.  115,  116. 

LIXIOVATIS,  AE.  Lexovii.  Dict. d'arch.  celt. 
n°  77. 

AOrrOCTAAHTQN;  BwKIOC  ou  AOV- 
KOTIOC-AOITOSTAAII-I'AVIU»  (ces 
5  lettres  en  caract.  celtibér.),  AE.  Lon- 
gostaleti.  La  Saussaye,  Narbonn.  —  Dict. 
d'arch.  celt.  pi.  des  monn.  n"  29. —  Du- 
chalais, p.  90  et  91.  —  A.  Heiss,  p.  438. 

AOM.  AE.  Coll.  de  Saulcy. 

AOYKOTIOC.  Voy.  AoYTO(7Ta>>7iTwv. 

LVCIOS;  LVCCIO.  AR.  Lelewel,  IX,  37, 
58. 

LVCOTIOS,  AV. Trevin  ou  Rtmi.  Lelewel,  IV, 

IWGWDWm,  kK.  Lugdiinum.  [21. 


LVXTIIPIOS,  AE.  Cadurci.  Dict.  d'arch. 
celt.  n"  71.  —  Lambert,  i"  partie.  IX, 
II.  —  Duchalais,  p.  13. 

MA,  AE.  Mandubiil 

MADVBUNOS.  Mauv.  lect.   p.  Matugenos. 

MAGVRIX  ou  MAGVROC,AE.  Dict.  d'arch. 

celt.  n"  229. 
MAGVS.  AR.   Lelewel,  VIII,  11.  Monnaie 

d'authenticité  douteuse.  \salia. 

MACCA;  MAXSA;  MAIÏ.VATHTQN.  Mas- 
MATVGIINOS,  AE.  Leuci.  Lelewel,  VI,  43 . 

—  Duchalais,  p.  170. 
MAVC.   Voy.  NiNNOS. 
MAVFENN.    Voy.  Arcantodan. 
MEDIO;  MEDIOMA,AE.Mf^/oma?na.  Dict. 

d'arch.  celt.  n'>  ici,  102.  —  Lelewel,  VI, 

41,  42. 

MOR.    Voy.   VOLVNTILLVS. 

MOTVIIDI.  AE.  Coll.  Saulcy. 

MV;  MVRI...,  AR.  Mus.  de  Metz  :  on  a 
cru  lire  MVRINO,  mais  les  deux  dernières 
lettres  sont  douteuses.  —  Lelewel,  pi. 
VI,  28;  Rev.  num.  pi.  XIII,  8. 

L.  MVNaT.  Voy.  Vlattv. 

MVRIIIO,  AR.  Lelewel,  VI,  28. 

NAMA.  Voy.  Aretoilmos. 

NAMAIAT.  M.   Nemausus.    Dict.    d'arch. 

ceU.  n°  12.  —  Lelewel,  VII,  19.  —  Du- 
chalais, p.  72,  73. 
NEDEN  (en  caract.  celt.).  Mauv.  lect.  p. 

Nerencn. 
NEMAY,  AE,  Nemausus.  Dict.  d'arch.  celt. 

monu.  n"  13.  Duchalais,  p.  72. 
NEM.   COL,   AR.   AE.    Nemausus  colonia. 

Lelewel.   VIII,    1$,    16.  —  Duchalais, 

p.  73  à  82. 
NEMET,  AR.  Boii. 
NERENCN,  AE.  (caract.  celtib.)  Narboncn- 

ses.  Dict.  d'arch.  celt.  pi.  des  monn.  n" 

30.  —  A.  Heiss,  p.  434. 
NIDE.  Voy.  Alabdoaenos. 
NINNO-MAVS...AIIOS,  AR.   Lelewel,    IV, 

26.  — •  Duchalais,  p.  92. 
NONNO;  NONNOC  ;    NONNOS,  AR.  Boii. 
NOVIIOD,  AR.  Coll.  de  Saulcy. 

OISAM,  AE.  Sequani.  Lelewel,  VII,  47. 

OLTIRIO,  AR.  Drachme  salasse  imitée  des 
Massaliétes.  Rev.  num.  1861,  p.   345. 

GAIV.  IVLI...  OMAPATIS,    AR.    Coll.   de     | 
Saulcy.  —  Dict.  d'arch.  celt.  n"  iio. 

OCII.  Mauv.  lect.  de  Pellerin;  yoy.  Kap- 
nitoc. 

OMAOS,  AE.  Duchalais,  p.  223. 

...OMONDON,  AV.  Arverni.  Ch.  Lenormant 
lisait  OMONOION.  Coll.  Saulcy. 

ONOBA,  AR.  Type  du  cavalier.  Coll.  de 
Saulcy.  1' 

ONTHEGA,  AR.  (caract.  cellib.)  Agatha' 
A.  Heiss,  p.  433.  I 

ORGET,  AE.  Cette  légende  et  les  trois  sui-     ) 


Liste  des  mots  relevés  sur  les  monnaies  gauloises. 


297 


vantes    sont    gravées    sur    des    pièces 

éduennes. 
ORCIITIRIX-COIOS,  AR. 
ORGETIRIX-ATPILLI.F,  AR.  Leiewel,  IV, 

50;  VIII,  7. 
ORGETIRIX-EDVIS,    AR     Dict.    d'arch. 

celt.  n"'  75,  76,  65. 
OVACIA.    Mauv.    lect.    de   Mionnet.  Voy. 

VACCA.  [146. 

OSNAII,  AE.  Bituriges.  Dict.  d'arch.  celt.  n" 
OYI.  KY,  AR.  Leiewel,  VIII,  3.  —  Ducha- 

lais,  p.  9. 
OYOAE.    Stat.   d'or    attribué   aux    Leuci. 

Coll.  Saulcy. 

riAPOS.  Mauv.  lect.  p.  IIAPOS. 

PAVRP.   Voy.  AoYYO(jTa),r,Twv. 

IIAVLOIB-SOLIMA,  AV.  Ane.  coll.  de  La 
Saussaye:  mus.  de  Lyon.  Leiewel,  III,  31. 

nKNNOOVI.NJiOC,  AR.  Coll.  de  Saulcy. 

PETRVCORI.   Voy.  Acincovepvs. 

PIRVKOI  (caract.  salass.),  AR.  Salassi. 
Rev.  num.  1861,  345. 

PICTILOS,  AR.  Dict.  d'arch.  celt.  pi.  des 
monn.  n"  133.  —  Lambert,  2"  partie, 
XV,  31. 

PIXTIL;  PIXTILOC;  PIXTILOS,  M.  Leie- 
wel, VII,  S9  à  63. — Lambert,  i'"  partie, 
X,  8,  9,  10.  2=  partie,  XV,  22  à  30.  — 
Duchalais,  p.  171  à  182. 

T.  POM-SEX.F,  AE.  Petruconi? 

PRIKOV  (caract.  sal.),  AV.  SalassL  Dict. 
d'arch  celt.  pi.  des  monn.  n"  32.  — Rev. 
num.  1861,  p.  343. 

Q.-DOCI-SAMIF,  AR.  AE.  Sequani.  Leie- 
wel, IV,  3s,  36;  VII,  45  et  46.  Dict. 
d'arch.  celt.  n». 

RATVMACOS-SVTICOS,AE.  Ke/(OMJj;.Dict. 

d'arch.  celt.  n"  46.  —  Leiewel,  VI,  34. — 

Lambert,  i"  partie,  IX,  5,  6,  7,  8. 
REMO-REMO,  AE.  Rémi.  Leiewel,  IV,  9, 
REMOS-ATISIOS,  AE   Rémi.  Dict.  d'arch. 

celt.  n"'  107-108.  —  Leiewel,  VII,  10. 
REX.  Voy.  Adietvanvs,  Cvnobelinvs,  Eppi, 

Vrdo. 
PirANTIKO,AE.Beb7<:«?Lelewel,VII,36. 
RICANT-EBVRO,  AR.  Denier  au  type  du 

cavalier  du  S.-E. 
RIKO,  AR.  Ricomagenses   (cisalp.).    Dict. 

d'arch.  celt.  n"  48.  —  Duchalais,  p.  69. 
RICOV,  AR.   Drachme  salasse  imitée  des 

Massaliètes.  Rev.  num.  1861,  p.  345. 
RICON.  Voy.  Tas,  Tascio. 
ROOV.   Voy.  Cn.  Volvnt. 
ROVECA.  Voy.  Arcantodan. 
ROVECA;  POOYIKA,  AR.  AE.  Meldi.  Dict. 

d'arch.  celt.  n°  80.  —  Leiewel,  VI,  49. 

—  Lambert,  1'  partie,  XVI,  17,  19,  20. 

—  Duchalais,  p.  182  à  186. 

?RVFI,  AE.  Britanni.  J.  Evans,  pi.  Vil, 
12;  Vlll,   I. 


RVFS,  AE.  Britanni.  i.  Evans,  pi.  VII,  14- 
COL.  RVS.  Mauv.  lect.  d'une  monnaie  de 

Béryte,  attribuée  à  Ruscino. 
ROVICV,  AV.  5uM.f/on«.  Lecture  douteuse. 

Mus.  de  St-Germain. 

SA,  AV.  Santones.  Dict.  d'arch.  celt.  n"  21. 
SAEMV  ou  SAFMV,  AR.  Britanni.  J.  Evans, 

pi.  XV,  7. 
SAM.  Voy.  Q.  Doci. 
Q^  SAM,  AE.  Sequani. 
I.\MN.\rHT-r.KAAV.  KACriAO,   AE. 

Samnagenses.  Dict.  d'arch.  celt.  n"  8.  — 

Leiewel,  VII,  18. 
SANTONOS;  SANCTOS,  AR.  Santones.  Dict. 

d'arch.  celt.  n"  22.  —  Duchalais,  p.  15. 
SANTONOS-ARIVOS,AR.5rt«fonM. Leiewel, 

V,  9.  —  Duchalais,  p.  16. 
SEDVLLVS.   Voy.  CONNO  epilos. 
SEGISA,  AE.    Leiewel,  VII,  45    —  Dict. 

d'arch.  celt.  n"'  205  et  210 
SEGO;  TASCIO-SEGO,  AV,  AR.  Britanni. 

Leiewel,  VIII,  47.  —  J.  Evans,  pi.  Vlll, 

10,  II. 
CErOBI,  AR.  Segovii.  Coll.  de  Saulcy.— 

Num.  de  la  Narb.,  p.  121. 
SEGVSI A-ARVS,  AR.  Segusiûvi.  Dict.  d'arch. 

celt.  U"  23.  —  Leiewel,  VIII,  S- 
SEMISSOS  PVBLICV  LEXOVIO,  AE.  Lexo- 

v/7.  Coll.  de  France  et  de  Saulcy. 
SENAS  (en  caract.  italiq.),  AR.  Leiewel,  IX, 

1,2.  —  Duchalais,  p.   106. 
SENODON.    Voy.  Caledv. 
SIINVl.   Voy.  G1AMILOS. 
SENVS;  SlINVS,  AE.  Carnutes. 
SEQVANOIOTVOS,  AR.  Sequani.  Dict.  d'ar- 
ch. celt.  n"  2j.—  Leiewel,  IV,  27:  VI, 
SEX.F.  Voy.  T.  POM.  [16. 

CMEP,  AE.  Coll.  de  Saulcy. 
SOBIVS.  Voy.  TociANT. 
SOLIDV.    Voy.  CVNO. 
SOLIMA;  COLIMA,  kV .  kK.  Bituriges  .'OKI. 

d'arch.  celt.  n°8i,  148.  —  Leiewel,  lll, 

29, 30, 3i;IV,  37,  38,  39. 
SOLLOS,  AE.  Duchalais,  p.  70. 
SOTIOTA.   Voy.  Adietvanvs. 
STRATOS,  AE.  Duchalais,  p.  187. 
SVEI,  AE.  Britanni.  J.  Evans,  pi.  i,  9. 
SVICCA,  AR.  Boii. 
SVTICOS.    Voy.  ELIOCAOI  et  Ratvmacos. 

—  Leiewel,  IX,  43. 

TAMBIL.  Mauv.  lect.  p.  Ambilli. 
TASCIO.  Voy.  Cvnobelinvs;   Sego;    Epa- 

Ticcv,  Ver. 
TAS:  TASC;T  ASCI;  TASCIA;  TASCIAVA; 

TASCIOVAN;  TASCIOVRICON:  TASCI- 

RICONI.  TAXCI,  AV.  AR.  AE.  Britanni. 

J.  Evans,  pi.  V,  7,  8,  9,  10,  n,  12,  13, 

14.  Pi    VI,   I,  2,  3,4,    5,  6,  7,  8,  9; 

p.  268,  pi.  VIII,  6,  7,  8,  9. 
TASGET,  AE.  Carnutes.  Dict.  d'arch.  celt. 

n-  74. 


298 


Liste  des  mots  relevés  sur  les  monnaies  gauloises. 


TASGIITIOS.   Voy.   Elkesoovix. 
TATINOS,  AE.  Duchalais,  p.  iio. 
TIGIPSENO.  Voy.  Dvmn. 
TINC    COMMIF;    TIN-COMF.    TINC-C.F; 

TIN-COM,  AV.  Britanni.  J.  Evans,  pi.  I, 

11,15,  14;  pi.  Il,  I  à  8. 
TINDV,  AV.  Britanni.  J.  Evans,  pi.  1,  10. 
TOC-TOC,  AE.  Sequani.  Lelewel,  i,  7. 
TOCIANT...-SOBIVS,  AE.  Coll.  de  St-Ger- 

main. 
TOGIRIX  ;  IVLIVS  TOGIRIX,  AR.  Sequani. 

Dict.  d'arch.  celt.  n"  176. —  Lelewel,  IV, 

48,  49.  —  Lambert,  r»  partie  X,  12  à 

27- 
TOVA.  (AVOT),  AE.  Coll.  de  Saulcy. 
TOVTOBOCIO-ATEPILOS,    AE.   Carnutes. 

Lelewel,  VI,   35. 
TRICCOS.  Voy.  TVRONOS. 
TRICO  (ou  OKIPT),  AR.  Tricolli.  Lelewel, 

VII,  17.  Dict.  d'arch.  celt.  n°  14. 
TTALV,  AE.  (VLATT?),  au  type  du  lion. 

Coll.  de  Saulcy.  Voy.  Vlattv. 
TVROCA-VIRODV,  AR.  Lelewel,  VIII,  22. 
TVRONA.   V'ov.   Drvcca. 
TVRONOS-CÂNTORIX,  AE.  Turones.  Lele- 
wel, IV,  58.  Dict.  d'arch.  celt.  n°  26. 
TVRONOS-TRICCOS,  AE.  Turones.  Lelewel, 

VI,  32  et  55.  Dict.  d'arch.  celt.  n""  27, 

28.  —  Lelewel,  IX,  41. 

VACCA.  Mauv.  lect.  p.  MACCA. 

VADNIILOS,  AE.  Carnutes.  —  Sur  quelques 
exemplaires,  on  dit  VADAHIILOS  :  en 
comparant  avec  la  légende  qui  suit  et 
qui  accompagne  un  type  identique,  on 
peut  penser  que  la  vraie  forme  de  ce  mot 
est  VANDALllNOS. 

VANDIILOS,  AE.  Carnutes.  Dict.  d'arch. 
celt.  n"  1 57.  —  Lelewel,  IV,  j. 

VARIXCE,  AE.  Lelewel,  IV,  $9.  Je  propo- 
serais de  lire  CEVARIX,  ou  plutôt  d'y 
voir  une  mauvaise  lecture  du  mot  qui  suit. 

VARTICE,AE.  Nervii.  Dict.  d'arch.  celt.  n° 

VBIOS.  Mauv.  lect.  p.  CVBIOS.         [104. 

(V)CCETIO.   Mauv.  lect,  p.  TASGETIO. 

VIID-COMA,  AR.  Denier  au  type  du  cava- 
lier du  S.-E. 

VENEXTOC,  AE.  Metdi  ou  Parisii.  Dict. 
d'arch.  celt.  n"  1 14. 

VEP-CORF,  AV.  Britanni.  i.  Evans,  pi. 
XVII,  5,  6. 

VERCA,  AE.  .Arverni.  Lelewel,  VI,  47.  Dict. 
d'arch.  celt.  n»  90.  —  Duchalais,  p.  3. 

VERCINGETORIXS,  AV.  Arverni.  Dictionn. 
d'arch.  celt.  n"  69. 


VERCOBRETO.   Voy.  Cisiambos. 

VERIC    COMF    REX  ;    VERICA    COMMIF 

REX,   AV.   AR.  Britanni.  J.  Evans,  pi. 

II,  12:  III,  3,  5,  6. 
VER;    VER-DIAS;    VER-TASCIA  ;    VER- 

LAMIO;    VlIR;  V-TAS,   AV.    AR.     AE. 

Britanni.   Lelewel,  VIII,  48,  49.  —  J. 

Evans,  pi.  VI,  II,    12,   14;  pi.  VII,   I, 

2,  3,  7,  8,  9,  10,  II. 
VERO,  AE.  Lelewel,  I,  8. 
VEROSDVMNO.  Voy.  Dvmnoveros. 
VllGOTAL.  Mauv.  lect.  Voy.  Vurotalo. 
VIIPOTALO,    AR.    Dict.  d'arch.    celt.  n°' 

171-172.  —  Lelewel,    VI,   20.  —  Du- 
chalais, p.  4. 
VINDIA,  AE.  Duchalais,  p.  279. 
VIRETIOS,  AE.  Pictavi.  Coll.  de  Saulcy. 
VIRI  COF;  VIR.   REX  COM.F;  VIR  COM 

F.  VI-COMF;  VIRI  (Voy.    Verica),  AV. 

AR.   Britanni.    J.   Evans,   pi.  II,  9,  lo, 

II,  13, 14.  Pi.  III,  I,  2,  4,  p.  184  et  185. 
VIRICIV,  AE.  Lelewel,  XI.  —  Duchalais, 

p.  188  à  100. 
VIRODV.  Voy.  TVROCA. 
VIROS-VIROS,  AV.   Lelewel,  IV,  17. 
VIROT,  AE.  Lambert,  2'-' partie,  XVI,  s. 
VIRRI-EPPI  COMF,  AE.  Britanni.  i.Evms, 

pi.   111,7. 
VLATOS.   Voy.  Atevla;  Ttalv. 
VLATTV-L.  MVNAT,  AE.  Segusiaves.  Dict. 

d'arch.  celt.   pi.   des  monn.    n"  119.  Je 

crois  que  la  légende  incomplète  ..TTALV 

donne  le  même  nom.  —  C'est  à  tort  que 

l'on  cru  lire  IVSSV. 
VLKOS,  AV.  Salassi.  Rev.  num.    1861.  p. 

344-  [VI,  ^ 

VOCARANNA,  AV.  Treviriou  Rémi.  Lelewel, 
VOCORIX  ou  VOCORIO,  AV.  Britanni.  J. 

Evans,  pi.  I,  6. 
VOL;  VOLC;  VOLCAE-AREC  ;  VOLC.AR, 

AR.etyï:.  Volcae  arecomici.  Dict.  d'arch. 

celt.  n"  10,  II.  —  Lelewel,  VI,  4;  VII, 

20,  31.  —  Duchalais.  p.  71. 
V0LlS10S-DVMN0C0VER0S,AV.Bn7ann(. 

J.  Evans,  pi.  XVII,   I. 
CN.  VOLVNT;  MOR-VOLVNT;  MOR-CN. 

VOL,  AR.  Denier  du  S.  E.  au  cavalier. 
VOOC,  AR.  Lelewel,  VU,  16. 
VOSIINOS,  AV.  Britanni.  J.  Evans,  pi.  IV, 

13  et  14. 
VRDORE  (Viridorix  ?),  AR.  Coll.  de  Saulcy. 

—  Dict.  d'arch.  celt.  pi.  d.  monn.  n°  84. 

YLLYCCI,.?:.  5fnona.Lelewel,VI,46.Dict. 
d'arch.  celt.  n"  174. 


SUPPLEMENT. 
Pendant  l'impression  de  ce  catalogue,  on  m'a  signalé  quelques  mon- 
naies gauloises  présentant  des  légendes  inédites  : 

ATVLLOS,  AV.  Boii.  Heiss,  p.  437. 

BIATEC,  AV.  Boii.  CXOKNl,  M.  Type  des  monnaies  mention- 

BRICTZE  (caract.  celtib.),  K..  Bebryces.  A.         nées  à  l'art.  CA.VOVA.  Coll.  Gariel. 


LA   RACINE   c(  DRU  ,> 

DANS    LES    NOMS    CELTIQUES    DES    RIVIERES. 


L'article  qui  suit  est  un  fragment  détaché  d'un  travail  plus  étendu  sur 
la  nomenclature  celtique  des  cours  d'eau.  C'est  là  une  branche  de  l'ono- 
mastique moins  étudiée  jusqu'à  présent  que  celles  qui  concernent  les  noms 
d'hommes  et  de  lieux,  et  dont^  cependant,  l'importance  n'est  pas 
moindre.  Les  noms  de  rivières,  en  effet,  surtout  ceux  des  grands  fleuves^ 
appartiennent  en  général  aux  temps  les  plus  anciens,  et  nous  reportent 
très-haut  vers  les  premières  migrations  des  peuples  et  les  origines  des 
langues,  ils  ont  aussi  cet  avantage  sur  les  autres  noms  propres  qu'ils  se 
rattachent  généralement  à  un  nombre  plus  limité  de  significations  carac- 
téristiques, ce  qui  rend  la  recherche  de  leurs  étymologies  plus  facile  et 
plus  sûre.  Pour  le  gaulois  en  particulier,  que  nous  connaissons  si  peu 
d'une  manière  directe,  les  noms  de  rivières  transmis  par  les  anciens  sont 
très-propres  à  nous  révéler  les  affinités  que  le  vieux  celtique  avait  con- 
servées, à  un  plus  haut  degré  que  les  idiomes  néo-celtiques  insulaires, 
avec  ses  congénères  de  l'Orient,  le  sanscrit  et  le  zend.  Ils  nous  éclairent 
aussi  plus  d'une  fois  sur  l'histoire  des  grands  mouvements  de  la  race 
celtique  en  Europe^,  restés  qu'ils  sont  comme  des  témoignages  d'un 
séjour  plus  ou  moins  prolongé  de  cette  race  dans  des  régions  occupées 
plus  tard  par  d'autres  peuples.  Le  groupe  que  j'en  détache  ici  est  un 
exemple  remarquable  de  ce  que  l'on  peut  attendre  d'un  travail  général  à 
ce  sujet. 

La  racine  verbale  dru  se  trouve  également  en  sanscrit  et  en  zend. 
Ainsi,  en  sanscrit,  dru  (dravatï)  «  courir,  courir  vite,  fuir;  courir  sus, 
attaquer  vivement;  se  liquéfier^,  fondre.  »  Au  causatif,  drâvay,  «faire 
courir,  mettre  en  fuite,  faire  couler,  liquéfier,  fondre  (act.)  )>,  et  aussi,  au 
moyen,  drâvayatê^  «courir,  couler.  »  De  même,  en  zend,  dru  «courir, m 
dràvay,  «  faire  courir,  »  etc. 

20* 


300  La  racine  «  dru  » 

Comme  substantif  identique  à  la  racine,  dru  signifie  «cours,  course,  » 
et  forme  des  adjectifs  composés,  tels  que  raghudru,  «  au  cours  rapide,  )> 
miîadru,  «  au  cours  mesuré,  régulier,  »  comme  aussi  les  noms  propres 
de  quelques  rivières,  Çaîadru,  «  aux  cent  cours,  «  le  Sutlej  actuel,  Vita- 
dru,  «  au  vaste  cours  (?)  »  (de  vi-tan,  «  expandere  »  pour  vitata  «  ex- 
pansus »  ou  bien  pour  Vîtadru,  de  vïta,  «tranquille,  »  mais  aussi  «  libre, 
déchaîné  »  (Wilson.  Dict.). 

De  toutes  les  langues  congénères,  la  seule,  à  ma  connaissance,  qui  ait 
conservé  cette  racine  comme  verbe,  sous  la  forme  drav,  développée  de 
dru  devant  une  voyelle,  c'est  le  gaélique  écossais  drabh,  (prononcer 
drav)  à  l'impératif  «  solve,  dissolve,  deliquesce,  »  à'oxx  drabhadli,  «  dis- 
solutio,  labefactio.  «  Ce  verbe  existe  sûrement  aussi  en  irlandais^  où 
l'on  trouve  les  dérivés  drabh ,  «  rebut,  »  drabhadh,  «  séparation ,  » 
drabhas,  «  boue,  saleté,  «  etc.,  mais  il  manque  dans  les  sources  dont  je 
dispose.  Le  sens  général  de  course,  de  mouvement  rapide,  se  montre 
encore  dans  l'irlandais  drabh  ^  drubh,  «  char  »  dérivé  de  dru,  comme 
currus  de  currere. 

Dans  les  langues  germaniques,  Bopp  croit  à  une  affinité  avec  dru  du 
gothique  dreiban,  «  agere,  pellere,  »  ang.-sax.  drifan,  d'où  draf,  «  ar- 
mentum,  »  angl.  to  drive  et  drove  (cf.  Diefenbach,  Goth.  Wb.,  II,  640  , 
avec  le  sens  causatif  du  sanscrit  et  zend  drâvay.  Pott  y  rattache  de  plus, 
comme  formes  secondaires  augmentées,  deux  autres  verbes  germaniques, 
l'anglo-saxon  driopan,  angl.  drop,  scand.  driupa,  anc.  allem.  triufan, 
«  stillare,  »  avec  un  p  causatif  final;  puis  le  gothique  driusan  (^driUis, 
drusun)  «  cadere,  »  etc.,  dont  1'^  répondrait  au  désidératif  sanscrit 
dudrùsh  (Pott.  Wurzel  Wb.  I,  1064).  Au  sujet  de  ces  rapprochements, 
il  faut  observer  que  le  dr  initial  échappe  plus  d'une  fois  à  la  loi  germa- 
nique de  la  mutation  des  consonnes,  laquelle  exigerait  régulièrement  ir 
en  gothique. 

A  côté  de  dru,  le  sanscrit  possède  encore  deux  racines  de  même  sens, 
et  probablement  alliées,  savoir  drâ  et  dram,  «  currere;  «  toutes  deux 
conservées  dans  le  grec  opa-vat,  ot-opâ-cy.co ,  et  op£[;,(o,  cs-cpc'j.a, 
opcp.oç,  etc.,  tandis  que  dru  manque  complètement,  aussi  bien  qu'en 
latin  et  en  lithuano-slave. 

Je  laisse  de  côté  les  dérivés  divers  qui  n'ont  que  des  acceptions  secon- 
daires. Ceux  qui  intéressent  les  noms  de  fleuves  viendront  à  leur  place 
dans  les  rapprochements  qui  suivent. 

i)  Dravus  {PYm.  3,  28,  i),  Apâl^cc  (Strab.  p.  260,  53;  éd.  Mûller 
et  Dùbner.  Paris,  1863).  Au  ix*^  siècle,  Travus,  aujourd'hui  Drau 
(Fœrstemann.  Altd.  Orîsn.  429).  La  Drave,  affluent  du  Danube. 


dans  les  noms  celtiques  des  rivières.  joi 

Ce  nom  est  sûrement  celtique,  aussi  bien  que  celui  de  Savus,  et 
d^autres  de  la  Pannonie,  occupée  assez  longtemps  par  des  tribus  gauloises. 
Il  trouve  son  corrélatif  exact  dans  le  sanscrit  drava,  adj.  «qui  court, 
coule,  fluide,  »  et  comme  substantif,  au  nominatif  singulier,  dravas, 
«  course,  fluidité,  mouvement  rapide.  »  Pline  déjà  signale  la  rapidité  de 
cette  rivière  :  Dravus  e  Noricis  violentior. 

Plusieurs  cours  d'eau  en  France,  en  Allemagne,  et  peut-être  dans  la 
Grande-Bretagne,  ont  sans  doute  porté  le  même  nom,  conservé  au 
moyen-âge,  et  encore  actuellement,  sous  des  formes  plus  ou  moins 
altérées.  Ainsi,  en  France  : 

Droa  (au  xiii''  siècle)  aujourd'hui  la  Drouette  (Eure-et-Loir.  Dict. 
topog.  '  Cf.  ibid.  le  nom  de  lieu  Droa,  Draavia,  maintenant  Droue). 

Drouet  (le),  affluent  du  Chaudon  (Alp.  Marit.  archiv.  2)  diminutif 
masculin  moderne  de  Drou,  comme  Drouette  au  féminin. 

Druivette  (la),  russeau  affluent  de  la  Salasse  (Drôme^  archiv.),  syno- 
nyme de  Drouette. 

Dravey  (le),  ruisseau  affluent  delaGalaure,  et  qui  charrie  des  pierres 
(Drôme,  archiv.). 

En  Ecosse  : 

Dru,  affluent  du  Spey  dans  l'Inverness.  —  Il  est  douteux  que  ce  nom 
appartienne  au  groupe  de  dérivés  qui  précèdent,  bien  qu'il  se  rattache 
sûrement  à  la  même  racine.  Il  faudrait  connaître  son  orthographe  gaé- 
lique et  ses  formes  anciennes  pour  savoir  par  la  perte  de  quel  suffixe  il 
s'est  réduit  à  la  racine  simple;  car  on  ne  saurait  l'assimiler  directement 
au  sanscrit  dru,  «  cours,  course,  »  mentionné  plus  haut.  Si,  par  ex.,  le 
vrai  nom  était  Druth,  avec  le  îh  quiescent,  il  se  relierait  à  un  groupe  qui 
se  présentera  plus  loin. 

En  Allemagne  : 

Trave  (la),  rivière  qui  se  jette  dans  la  Baltique,  à  Travemùnde, 
Holstein.  Plus  anciennement  sans  doute  Trava,  à  côté  du  synonyme 
Travena  au  x*"  siècle  (Fœrst.  429),  qui  reviendra  plus  tard.  Le  î  pour  d 
est  dû  à  l'influence  germanique;  et  comme  ce  nom  ne  s'explique  pas  par 
les  anciens  dialectes  de  la  Germanie,  il  semble  bien  témoigner  du  séjour 
des  Celtes  dans  cette  partie  de  l'Allemagne  du  Nord. 

2)  Druentia  (Plin,  3,  $,  2),  ApcjEVTÎa;  (Strasb.  p.   169,  42),  (Ptol. 


1.  Je  désigne  ainsi  les  Dictionnaires  topographiques  des  départements  publiés  jusqu'à 
présent  par  le  gouvernement  français. 

2.  Par  archiv.,  j'en  réfère  aux  rapports  hydrographiques  des  archivistes  des  départe- 
ments que  j'ai  reçus  jusqu'à  ce  jour,  au  nombre  d'une  vingtaine  seulement,  par  l'entremise 
de  la  Commission  de  la  Topographie  des  Gauks,  et  dont  l'envoi  a  été  interrompu  par  les 
événements  de  la  guerre. 


^02  La  racine  «  dru  n 

2,  10,  6)  var.  Axp'jév-'.aç  (Strab.  p.  966),  Diirantia  (Rolland.  Sept.  6, 

76).  —  La  Durance,  affluent  du  Rhône. 

Dans  mes  Origines  Indo-Européennes  (I,  128),  j'ai  comparé  déjà  le 
sanscrit  dravanti,  rivière  en  général,  littéralement  currens,  et  féminin  du 
participe  présent  dravant,  de  dru-ant,  avec  le  développement  euphonique 
de  u  en  av,  comme  dans  drava  et  Dravus.  Cf.  zend  drvanî,  parsi  darvaut, 
houzvaresh  darvand,  «  courant,  se  précipitant  »  (Justi.  Altbakt.  Wb.). — 
La  terminaison  en  tia  est  peut-être  latine,  la  forme  gauloise  restant 
inconnue. 

On  sait  que  la  Durance  est  une  rivière  rapide,  torrentielle^  et  redou- 
table par  ses  ravages  ;  ce  qui  a  donné  lieu  au  vieux  dicton  cité  par 
Papirius  Masso  (p.  442)  : 

Le  gouverneur,  le  parlement  et  la  Durance, 
Ces  trois  ont  gâté  la  Provence. 

Son  nom  de  Druentia  la  caractérise  ainsi  parfaitement.  Comme  celui 
de  Dravus,  il  a  été  certainement  appliqué  à  plusieurs  rivières  dans  les 
pays  habités  par  les  Celtes.  Ainsi,  nous  trouvons  : 

Drancia  (xi"  et  xii'^  siècle);  aussi  Druentia  dans  les  chartes  du  même 
temps,  à  ce  m'assure  M.  John  Galiffe.  La  Drance  ou  Dranse,  torrent  de 
montagne  qui  se  jette  dans  le  lac  de  Genève.  Deux  torrents  du  Vallais, 
affluents  du  Rhône,  portent  le  même  nom  de  Dranse.  Comme  la  dési- 
nence latine  anîia,  entia,  est  devenue  constamment  ^/zcc,  ence  en  français, 
on  peut  admettre  avec  sûreté  que  Drancia  est  provenu  de  Dranîia,  con- 
tracté à  «on  tour  de  Dravantia  ou  de  Druentia. 

Un  troisième  nom,  sans  doute  de  même  formation,  se  p/ésente  en 
Grande-Bretagne,  au  vu"  siècle,  dans  : 

Dorveniium,  ou  plutôt  Dorvcntius,  fluv.  Britannise  (Anon.  Raven. 
p.  438,  3  ;  éd.  de  Parthey).  Cf.  Dcrventio,  fluv.  et  loc.  (BoUand.  Jan.  i, 
302;  et  Itin.  Ant.  466). 

Deorwent  et  Daerenta,  en  1043  (Boxhorn.  Dict.  ang.-sax.).  Il  y  a 
aujourd'hui  trois  rivières  distinctes  du  nom  de  Derwent,  dans  le  Derby- 
shire,  le  Yorkshire  et  Surrey.  L'intervention  de  dor,  der,  pour  dro,  dre, 
est  la  même  que  celle  de  Durance  pour  Druance,  et  du  parsi  darvant  pour 
dravant  (v.  sup.).  J'ignore  si  ces  rivières  de  Grande-Bretagne  ont  un 
cours  rapide. 

Enfin,  un  quatrième  nom,  d'une  identité  moins  sûre,  est  celui  d'un 
affluent  de  la  Vistule,  savoir  : 

Drewenz  (la),  sans  doute  anciennement  Dreventia  d'après  l'analogie  des 
changements  de  Radantia  en  Ratenza  (Fœrst.  1 146),  AlisontiaenAlscnzc, 


dans  les  noms  celtiques  des  rivières.  joj 

Brigantia  en  Bregens,  etc.  (Cf.  Zeuss,  Gr.  C.^,  798).  La  ressemblance  des 
formes  est  frappante,  mais  ce  nom  peut-il  être  celtique  ?  Est-ce  qu'il  y 
a  jamais  eu  des  Celtes  près  de  la  Vistule  .?  On  peut  croire  du  moins  que 
quelqu'une  de  leurs  tribus  a  occupé  les  côtes  de  la  Baltique  vers  l'ouest, 
comme  le  nom  de  la  Trave  nous  l'a  fait  présumer.  Il  faut  se  rappeler 
d'ailleurs  ce  que  dit  Tacite  des  Aesiii  ou  Aestui,  que  leur  langue  se  rap- 
prochait plus  de  l'idiome  britannique  que  de  celui  des  Suèves,  dont  ils 
avaient  du  reste  les  coutumes  (De  mor.  Germ.  c.  XLV).  La  question 
s'éclaircirait  peut-être  par  un  examen  attentif  de  tous  les  noms  de 
rivières  sur  les  côtes  sud  de  la  Baltique.  Ce  qui  paraît  certain,  c'est  que 
ni  le  slave,  ni  le  lithuanien,  ni  le  germanique,  n'offrent  pour  Drewenz  une 
étymologie  probable  '. 

3)  Droma,  en  1203  (Cartul.  de  Die,  p.  42,  archiv.).  —  La  Drôme, 
affluent  du  Rhône,  rivière  rapide. 

L'Inde  ancienne  nous  offre,  comme  corrélatif  parfait,  une  rivière 
Drumâ  (Vichn.  Pour.  Wilson,  p.  18$),  de  dru  par  le  suffixe  ma.  En 
zend,  on  trouve  le  substantif  analogue  draoman,  «  élan,  attaque,  assaut,)) 
qui  serait  en  sanscrit  drôman.  Ceci  empêche  de  penser,  soit  à  un  rappro- 
chement avec  druma,  arbre,  bois  =  dru,  dâru,  de  dar,  <f  fmdere,  divi- 
dere,  »  soit,  pour  la  Drôme,  à  la  racine  dram,  «  currere,  errare,  » 
cpé'j.d),  opz[j.o:,  etc. 

Ce  nom  aussi  se  rencontre  plus  d'une  fois  en  France.  Ainsi  : 

Drome  (la  ,  qui  se  jette  dans  la  Manche  'Calvados  . 

Dromé  ilei,  ruisseau  de  la  Haute-Savoie,  affluent  au  lac  Léman 
(archiv.). 

Dromance  (la' ,  affluent  du  Noireau  :  Calvados) .  Cette  dernière  forme, 
qui  a  dû  être  plus  anciennement  Dromantia,  diffère  par  le  suffixe,  aug- 
menté de  mant,  et  analogue  au  latin  mentum,  dans  augmenium,  segmentum, 
tormentum,  etc.  Le  suffixe  mant,  secondaire  en  sanscrit,  est  aussi  primaire 
en  zend  'Cf.  Justi,  373,  n"  274). 

4)  Druna  (Auson.  Mos.  423),  Drona  ix'^  siècle.  Fœrst.  430).  La 
Drone,  affluent  de  la  Moselle. 

Druna  (vu" siècle),  Truna  [w"  siècle.  Fœrst.  430).  La  Traun,  affluent 
du  Danube,  près  de  Linz. 
Druna  ^Vales.  177,  187).  —  La  Droune,  affluent  de  l'Ain  (Jura). 
Druna  x"  siècle.  Fœrst.  430),  affluent  de  l'Alz,  en  Bavière. 
Drona  (xiv<--  siècle^ .  —  La  Drone  ou  DronnC;  affluent  de  l'Isle  (Dor- 


I.  On  pourrait  penser,  pour  le  slave,  à  dreva,  drevo,  «  arbre,   bois,  »  si  le  suffixe, 
provenu  d'un  participe  présent,  n'exigeait  pas  un  verbe  comme  racine. 


304  L(^  racine  «  dru  « 

dogne  et  Gironde.  Archiv.).  —  Cf.  Dronona  (Anon,   Rav.  299,   5  . 

Tous  ces  noms  identiques  dérivent  de  dru  par  le  suffixe  na,  de  même 
que,  en  sanscrit,  celui  d'une  rivière  Drônî  f.  (Dict.  de  Pétersb.),  à  dis- 
tinguer de  drônî,  drona,  «.  cuve,  vase  de  bois,  «  provenu  de  dru,  «  lig- 
num.  «  En  zend,  on  trouve  draonahh,  «  course,  »  qui  serait  dronas  en 
sanscrit.  Le  synonyme  dravaiia,  «  course,  flux,  »  a  développé  Vu  en  ar; 
et  il  est  intéressant  de  retrouver  cette  formation  dans  quelques  noms  de 
rivières  celtiques.  Ainsi  : 

Trewina  fix"  siècle.  Fœrst.  429).  —  La  Drau,  affluent  de  la  Drave; 
pour  Dravina  plus  ancien. 

Travena  (x«  siècle.  Fœrst.  it.).  — •  La  Trave,  dans  le  Holstein. 

Drouvenne  (xv"  siècle),  ruisseau  très-rapide  (Jura,  archiv.). 

Druon  (xwf  siècle),  de  Dravon,  Druvon?  —  Aujourd'hui  le  Driou, 
affluent  de  la  Clouère  (Vienne,  archiv,). 

5)  Drotus  (xiii"  siècle).  Dordogne,  archiv.  —  Le  Drot  ou  Dropt, 
affluent  de  la  Garonne. 

Droude  (la),  ruisseau  affluent  du  Gardon  (Gard.  Dict.  top. 

L'étymologie  prochaine  se  présente  ici  dans  le  gallois  drud,  plus  an- 
ciennement drut,  adj.  «  rapide,  hardi,  furieux,  »  et,  comme  substantif, 
«  un  brave,  un  héros.  »  Le  corrélatif  irlandais  druth  a  pris  le  sens  défa- 
vorable de  fou  (Cormac,  Gloss.  éd.  de  Stokes,  p.  59;  Senchus-Mor. 
p.  124).  C'est  sans  doute  l'acception  du  gallois  qu'il  faut  adopter  pour 
les  noms  d'hommes  gaulois  tels  que  Druîos,  dans  Druticnos,  fils  de  D.. 
et  Druta  f.  (Cf.  mon  Nouvel  essai  sur  les  inscriptions  gauloises,  p.  73). 

Le  gallois  drut  répond  exactement  au  sanscrit  druta,  rapide,  participe 
de  dru,  d'où  l'adverbe  drutam,  «vite,  soudain.»  Cf.  zend  drùta, 
«  courant,  et  couru  »  (Justi).  C'est  ici  peut-être  qu'il  faut  placer  le  nom 
de  la  rivière  Dru,  en  Ecosse,  si,  comme  je  Pai  conjecturé  plus  haut,  il 
représente  la  prononciation  usitée  pour  Druth,  où  le  th  est  quiescent. 

J'ignore  si  le  Drouts,  affluent  du  Dnieper,  dans  la  Russie  d'Europe, 
a  quelque  connexion  avec  la  racine  dru. 

6)  Druise  fia),  cascade  de  la  Gervanne  (Drôme;  archiv.). 
Dreusse  (la),  torrent  affluent  du  Paillon  (Alp.  Mar.,  archiv.). 
Drousou  (le),   ruisseau  affluent  du  Celé  (Lot,  archiv,).  Je  n'ajoute 

qu'avec  doute  ces  noms  actuels,  dont  les  formes  anciennes  sont  incon- 
nues, comme  se  rattachant  à  la  racine  dru.  Ils  rappellent  singulièrement 
le  gothique  driusan  [draus,  drusun),  cadere,  d'où  drus,  «  chute,  »  driuso, 
(c  pente;  »  angl.  sax.  dreôsan,  «  ruere,  »  néerland,  druysch,  «impetus,  » 
etc.,  que  Pott,  ainsi  que  nous  l'avons  vu,  rapproche  du  désidéraiif 
sanscrit  dudrûsli,  de  dru  avec  un  sens  intensitif  ou  fréquentatif.    Une 


dans  les  noms  celtiques  des  rivières.  ^05 

forme  analogue  peut  avoir  existé  en  gaulois,  où  nous  trouvons  un  Drusus, 
Gallorum  dux  (Cicer.  Brut.  28;,  dont  le  nom  aurait  eu  un  sens  rapproché 
de  Drutos'.  Cf.  Drauso,-onis,  dans  une  inscription  gallo-romaine  'Grut. 
919,  8).  Zeuss  a  comparé  l'irlandais  Druis,  qu'il  explique  par  ^r«5,  drùis, 
«  libido  «  iGr.  C.^  24!.  Il  semble,  toutefois,  que  d'après  la  règle  posée 
par  lui-même  'p.  $2,  786;,  1'^  aurait  dû  disparaître  en  irlandais.  Il  est 
probable  que  drus,  drùis,  est  provenu  de  drust,  drusti,  ce  que  confirme- 
rait le  nom  propre  Drust,  Drost,  Drest  'Martyrol.  of  Doneg.  29  ij  et 
Drosîân  (IV  Mag.  Ann.  717).  —  Dès  lors  Drusus  ne  serait  plus  compa- 
rable, et  l'on  pourrait  penser,  pour  l'irlandais,  à  la  racine  sanscrite 
dharsli,  «  audere,  temerum  esse,  »  d'oià  dhrishu,  dhrishta,  «  vaillant,  » 
dhrishti,  «  vaillance  «,  etc.  Cf.  gr,  rcasûç,  et  ^xp^oz.,  goth.  ga-daursan, 
«  audere,  ;  »  ang.  sax.  ge-dyrst,  anc.  ail.  ga-tursti,  «  audacia;  »  ail.  mod. 
dreist,  «  audax,  »  etc. 

Je  suis  loin  de  donner  ce  premier  travail  comme  complet.  Je  ne  doute 
qu'une  hydrographie  générale  de  la  France,  de  la  Grande-Bretagne,  de  l'Ir- 
lande, etc.,  n'y  apporte  encore  de  nouveaux  éléments.  Tel  qu'il  est,  ses 
résultats  sont,  à  coup  sûr,  remarquables.  La  racine  de  mouvement  dru, 
qui,  en  dehors  du  sanscrit  et  du  zend,  n'a  été  conservée  comme  verbe  que 
par  le  gaélique,  et,  moins  sûrement,  par  quelques  formes  germaniques 
secondaires,  ne  nous  a  pas  offert  moins  de  cinq,  et  peut-être  six  groupes 
de  dérivés  en  gaulois,  pour  les  noms  de  rivières  seulement.  Et  de  ces 
dérivés  par  des  suffixes  également  usités  en  sanscrit  et  en  zend,  trois 
coïncident  évidemment  avec  des  noms  de  cours  d'eau  de  l'Inde  ancienne. 
Il  ne  faudrait  pas  en  conclure  qu'ils  en  proviennent  directement,  mais 
cela  prouve  que  la  racine  dru  a  dû  exister  en  cehique  avec  les  forma- 
tions diverses  qui,  déjà  chez  les  Aryas  primitifs,  ont  servi  à  désigner  les 
rivières  en  tant  que  courantes  et  rapides.  Et  cet  exemple  n'est  pas 
exceptionnel.  Plusieurs  autres  racines  de  mouvement,  général  ou  fluide, 
offrent  à  des  degrés  divers  des  faits  analogues,  qui  seront  exposés  dans 
un  travail  plus  étendu,  s'il  m'est  donné  de  pouvoir  l'achever. 

Adolphe  PicTET. 


I.  On  peut  se  demander  si  le  chef  gaulois  n'avait  pas  pris  un  nom  romain,  car  celui 
de  Drusus  a  été  celui  de  plusieurs  personnages  illustres.  On  trouve  même  à  Rome,  à  l'an 
112  av.  J.-C,  un  consul  Drusus  qui  n'avait  sûrement  pas  un  nom  gaulois. 


L' EX-VOTO 

DE     LA    DEA     BIBRACTE. 
(Premier  article,  i 


Dans  les  travaux  de  construction  du  séminaire  d'Autun,  en  1679,  on 
découvrit  une  plaque  de  bronze  portant  l'inscription  suivante  '  : 


L'apparition  du  nom  de  Bibracte  sur  un  monument  épigraphique  pro- 
duisit dans  le  monde  savant  une  certaine  émotion  au  milieu  des  polé- 
miques dont  l'emplacement  de  l'oppidum  Eduen  était  l'objet  depuis  un 
siècle.  Les  partisans  de  l'identité  de  Bibracte  et  d'Augustodunum  l'ac- 
cueillirent comme  un  argument  sans  réplique,  d'autres  comme  l'œuvre 
d'un  faussaire;  et,  quoique  l'authenticité  de  ce  bronze  soit  encore  con- 
testée par  des  juges  éminents,  on  doit  reconnaître  qu'elle  a  été  acceptée 
par  la  majorité  des  auteurs.  L'inscription,  commentée  dès  lors  avec  plus 
d'empressement  que  de  critique,  a  été  opposée  dans  toutes  les  disserta- 
tions géographiques  à  ceux  qui  placent  Bibracte  hors  d'Autun.  Celle  de 
d'Anville,  reproduite  parWalckenaer  et  par  tous  ceux  qui  se  sont  armés 

1.  Nous  devons  à  l'obligeante  permission  de  la  Commission  de  la  Topographie  des 
Gaules  de  pouvoir  reproduire  le  dessin  de  cette  plaque  donné  dans  le  Dictionnaire  d'Ar- 
chéologie Celtique  à  l'article  BIBRACTE. 


Cex-voto  de  la  Dea  Bibracte.  507 

de  leur  nom  a  fait  loi.  Elle  mérite  dès  lors  d'être  citée  de  préférence, 
comme  résumant  de  la  manière  la  plus  complète  la  thèse  que  nous  com- 
battons. Notre  intention  n'est  pas  de  discuter  ici  la  question  de  l'identité 
de  Bibracte  et  d^Augustodunum,  mais  de  réfuter  simplement  l'argument 
tiré  de  l'ex-voto  de  la  DEA  BIBRACTE,  en  faveur  de  cette  opinion. 

«  La  DEA  BIBRACTE,  disait  l'illustre  géographe,  est  la  ville  même  de 
Bibracte  divinisée;  la  présence  de  l'inscription  à  Autun  établit  l'identité 
des  deux  villes  et  par  suite  la  divinisation  d'Augustodunum  sous  le  nom 
de  Bibracte;  donc  Bibracte  et  Augustodunum  sont  une  ville  unique  sous 
deux  noms  différents  et  simultanément  employés;  »  il  étayait  cette 
théorie  par  des  arguments  spécieux  :  «  Les  anciens,  disait-il,  ont 
souvent  établi  un  culte  religieux  en  l'honneur  des  villes,  Rome  a  eu  des 
temples  dans  plusieurs  villes  de  l'empire.  »  Et  il  continuait  de  la  sorte  : 

«  Des  peuples  particuliers  déifièrent  aussi  leur  capitale.  Le  peuple  helvétien 
honorait  la  déesse  Avcntla,  ou  plutôt  il  rendait  un  culte  à  Aventicum  comme 
déesse,  ainsi  qu'il  paraît  par  deux  inscriptions  qu'on  a  trouvées  près  des  ruines 
d'Avenche  ou  de  l'ancienne  ville  Aventicum,  qui  était  la  capitale  de  ce  peuple  : 
Civitas  Hclvedorum  Aventicus.  Les  peuples  Aedui  ont  de  même  honoré  comme  déesse 
la  ville  d'Autun  qu'ils  qualifient  de  son  nom  primitif  DEA  BIBRACTE....  L'in- 
scription me  paraît  prouver  invinciblement  qu'Autun  est  l'ancienne  ville  de  Bi- 
bracte. P.  Caprilius,  sextumvir  augustal,  s'acquitte  d'un    vœu  qu'il  avait  fait  à 

la  Déesse  Bibracte L'institution  des  sexvirs  datant  de  Tibère,  l'inscription 

d'Autun  dressée  par  un  sextumvir  augustal  est  donc  tout  au  plus  tôt  du  règne 
de  Tibère;  elle  peut  être  postérieure;  or  dès  les  premières  années  de  l'empire  de 
Tibère,  Autun  était  la  capitale  des  AeJui,  Augustodunum  caput  gentis,  dit  Tacite  ; 
et,  par  le  témoignage  de  l'inscription,  Bibracte  était  encore  capitale  des i4e^/ui  sous 
Tibère  et  peut-être  depuis  le  règne  de  cet  empereur.  Autun  ne  peut  donc  être 
une  ville  différente  de  l'ancienne  Bibracte'.» 

Nous  avons,  pour  ne  pas  affaiblir  l'objection,  cité  le  texte  même  des 
Éclaircissements  géographiques. 

La  première  erreur  de  d'Anville  consistait  à  tirer  d'un  fait  particulier  et 
mal  compris  une  conséquence  générale. 

En  voyant  le  nom  de  Rome,  de  la  cité  par  excellence,  associé  à  celui 
du  génie  Auguste,  il  s'est  cru  autorisé  à  doter  d'autres  villes  d'attribu- 
tions analogues,  sans  remarquer  que  le  culte  de  Rome,  exclusivement 
,  politique  et  créé  pour  imprimer  à  la  domination  romaine  un  caractère 
fatal  et  sacré,  était  une  exception.  La  déesse  Rome,  de  Virgile  à  Ruti- 
lius,  resta  le  génie  de  l'unité  des  peuples  par  la  conquête,  et,  au  déclin 

1.  D'KmïWe,  Eclaircissements  géographiques,  p.  329,  550,  331. 


joS  L ex-voto  de  la  Dea  Bibracte. 

de  l'empire,  son  dernier  poète  empruntait  le  mysticisme  des  chrétiens 
pour  célébrer  cette  divinité  qui  s'effaçait  avec  le  paganisme  tout  entier. 
Mais  rien  de  semblable  n'existait  dans  la  Gaule.  Quel  rapport  pouvaient 
avoir  avec  ce  génie  souverain  les  villes  des  provinces  ?  A  quel  titre  pou-    , 
vaient-elles  s'élever  des  autels  et  réclamer  des  adorateurs  ?  Les  recueils    i 
d'inscriptions  ne  citent  parmi  les  génies  tutélaires  aucune  ville  divinisée,    ; 
mais  des  dieux  :  Jupiter,  Apollon,  Esculape,  Hygie,  conservateurs  de  la    i 
ville,  Diane,  la  Fortune,  Sylvain^,  Hercule,  Mars,  les  Nymphes  salutifères,    \ 
Sérapis,  le  Soleil,  etc.  Toutes  les  villes,  d'après  ces  recueils,  étaient   i 
pourvues  d'un  ou  de  plusieurs  patrons  sans  être  elles-mêmes  divinisées.     î 

La  seconde  erreur  de  d'Anville  était  une  méprise  radicale  sur  la  nature   j, 
de  l'inscription  qu'il  commentait.  f 

Les  nombreux  monuments  du  culte  des  DE^  gauloises  sont  des  ex-  f 
voto  rappelant  des  guérisons  ou  des  actes  de  dévotion.  Presque  tous  i 
proviennent  des  bords  ou  du  voisinage  de  quelque  source,  parfois  de  ' 
temples  consacrés  à  des  dieux  salutifères  :  Apollon,  par  exemple  ',  /' 
preuve  évidente  qu'ils  concernaient  moins  la  politique  que  la  médecine,  j^ 
et  lorsqu'on  suit  la  filiation  du  culte  des  DEM,  dans  nos  campagnes,  on  [ 
la  retrouve  aux  fontaines  sacrées  que  fréquentent  encore  les  villageois,  I 
pour  obtenir  la  cessation  d'un  mal,  la  santé  des  enfants,  la  prospérité  du  |: 
bétail  et  des  récoltes.  Il  existe  bien  peu  de  fontaines  à  pèlerinage  près  | 
desquelles  d'anciennes  traces  du  culte  des  génies  ne  se  révèlent  soit  par  ifi 
des  restes  de  sanctuaires,  de  simulacres  de  toute  nature,  ou  par  des  | 
pratiques  qui  n'ont  pas  varié  depuis  l'antiquité  ^.  Cette  religion  était  f 
enracinée  à  un  tel  degré  chez  toutes  les  races  celtiques  que  les  apôtres  ' 
de  la  Gaule  comme  de  l'Irlande,  saint  Martin,  saint  Patrice  5,  saint  Colom- 
ba 4,  saint  Eloi  5,  étaient  occupés  à  la  combattre;  Grégoire  de  Tours  la  > 
mentionne*^;  les  conciles  et  les  capitulaires  la  réprouvent  et  condamnent 
ses  sectateurs?;  et  cependant  la  tradition  a  conservé  une  telle  puissance 


1.  Les  ex-voto  de  la  DEA  AVENTIA  le  mentionnent,  celui  de  la  DEA  BIBRACTE  se  ; 
trouvait  dans  le  temple  de  ce  Dieu.  j 

2.  Voir  Le  Culte  des  eaux  sur  les  plateaux  Eduens,  par  J.  G.  BuUiot,  dans  les  Mémoires  j 
lus  à  la  Sorbonne  en  1867  (archéologie).  Paris,  Imprimerie  Impériale,  1868,  in-8,  p.  1 1-32.  j 

3.  Bolland.  17  mart. 

4.  Bolland.  Vita  S.  Columb.  ix  jun. 

J.  Prïterea  quoties  aliqua  infirmitas  supervenerit ,  non  qujerantur  praecantatores ,  non  ; 
divini,  non  sortilegi,  non  caragi,  nec  per  fontes  aut  arbores,  vel  bivios  diabolica  pliylac-  ; 

teria  exerceantur S.  Eligii   Episcopi  Noviomensis  Vita  a   S.   Audoeno  Rothomagensi  1 

Episcopo  scripta,  lib.  11,  c.  xv,  dans  Migne  :  Patrohgie,  2'  sér.  T.  LXXXVll,  p.  529.      I 

6.  De  Gloria  confess.  II.  Vie  de  saint  Hilaire  de  Poitiers.  ! 

7.  «  Si  in  alicujus  episcopi  territorio  infidèles  aut  faculas  accendunt,  aut  arbores,  fontes,  j 
vel  saxa  venerantur,  si  lioc  eruere  neglexerit,  sacrilegii  reum  se  esse  cognoscat.  »  Labbe.  ' 
Sacrosancta  concilia.  1671.  T.  IV,  p.  1013.  4"  concile  d'Arles,  canon  XXIII.  ! 

«  Siquis  ad  fontes  aut  arbores,  vel  lucos  votum  fecerit,  etc.  »  (Capitulaire  de  789,  c.  31.1 


L'ex-voto  de  la  Dea  Bibracte.  309 

que  dans  chaque  village  du  pays  Eduen,  à  peu  d'exception  près,  pour 
ne  pas  sortir  de  la  région  d'où  provient  notre  ex-voto,  certaines  sources 
sont  visitées  encore  aujourd'hui.  Que  devait-il  en  être  du  temps  des 
Gaulois  ? 

Telle  était  l'attribution  de  l'immense  majorité  des  fées  de  la  Gaule,  et 
c'est  à  contre-temps  qu'on  a  cru  voir  dans  les  ex-voto  de  certaines  DEM, 
divinités  propices  par  nature,  des  apothéoses  de  cités.  Qu'on  examine 
en  effet  les  monuments  qui  concernent  les  génies  pris  sans  motif  pour  la 
personnification  de  quelques  villes^  on  constatera  invariablement  dans 
ces  villes  mêmes  ou  dans  leur  voisinage  une  source  de  même  nom.  C'est 
à  ce  titre  que  le  dieu  Vasio  ',  le  dieu  Nemausus,  étaient  les  génies  des 
sources  de  l'Ouvèze  et  de  Némause,  non  la  personnification  des  villes  de 
Vaison  et  de  Nîmes^  pas  plus  que  Vesunna,  Aventia,  Divona,  Bibracte, 
ne  l'étaient  des  lieux  où  on  a  trouvé  leurs  ex-voto.  Le  culte  des  fontaines 
connues  sous  ces  noms,  répandu  dans  l'antiquité  la  plus  reculée  par  toute  la 
Gaule, explique  bien  plus  naturellement  les  monuments  votifs, quel'apothéose 
gratuit  de  villes  en  faveur  duquel  l'histoire  et  l'archéologie  sont  muettes 
et  que  la  logique  n'admet  pas.  La  fontaine  a  précédé  la  ville  et  n'a  pas 
été  divinisée  par  elle,  mais  c'est  la  ville  au  contraire  qui  a  pris  le  nom 
d'une  source  divinisée  ou  reçu  dans  ses  temples  les  ex-voto  offerts  à  son 
génie. 

Si  les  DEM  eussent  été  la  personnification  d'un  lieu,  d'une  ville,  leur 
nom  serait  exclusivement  attaché  à  la  localité  même,  intransmissible  en 
un  mot.  Mais  partout  le  même  génie  gaulois  est  honoré  dans  vingt  en- 
droits différents,  au  Nord,  au  Midi,  en  Italie,  en  Bretagne;  Grannus 
avait  des  autels  sur  les  rives  du  Tibre,  de  la  Saône,  du  Doubs,  de  la 
Moselle  2.  Il  n'était  donc  point  la  ville  divinisée  d'Aquis  Grannum,  puisqu'on 
le  retrouvait  à  la  source  du  Grannus  dans  les  Vosges,  à  celle  de  la  Grosne 
dans  le  pays  Eduen,  à  la  cité  de  Gran  en  Séquanie,  à  Plombières,  à 
Horbourg  sur  le  Rhin,  à  Lauingen  sur  le  Danube,  dans  toute  la  Gaule 
et  jusqu'en  Calédonie  5  ;  mais  ce  dieu  des  sources  était  le  patron  d'une 
fontaine  dans  chacune  de  ces  contrées  et  lui  donnait  son  nom.  Borvo, 
autre  génie  des  eaux  thermales,  n'était  point  la  ville  divinisée  de  Bourbon- 


«  Item  si  arboribus  vel  pétris  vel  fontibus  ubi  aliqui  stulte  luminaria  vel  alias  observa- 
tiones  faciunt,  etc.  »  (Capitulaire  de  la  même  année  C.  65).  Baluze.  Regum  francorum 
capiîularia. 

1.  L'ex-voto  du  Dieu  de  l'Ouvèze  à  Vaison  est  le  pendant  de  celui  de  la  DEA  de 
l'Yonne  à  Auxerre,  ces  deux  villes  étant  situées  chacune  sur  la  rivière  dont  l'ex-voto 
mentionne  le  génie. 

2.  On  connaît  nombre  d'inscriptions  de  ce  Dieu.  Voir  dans  les  mémoires  de  l'Académie 
de  Metz  pour  1840;  Bégin,  Lettres  sur  l'histoire  médicale  du  Nord-Est  de  la  France,  p.  29. 

3.  De  Ring.  Etablissements  romains  du  Rhin  et  du  Danube.  T.  Il,  p.  94,  151, 141,  149. 


îio  L' ex-voto  de  la  Dea  Bibracte. 

Lancy,  de  Bourbon-l'Archambaut,  ni  de  Bourbonne,  mais  le  génie  des 

sources  de  toutes  ces  villes  et  de  la  Bourbince  dans  le  pays  éduen. 

La  présence  d'une  inscription  en  l'honneur  de  la  DEA  BIBRACTE  à 
Augustodunum  ne  prouve  donc  nullement  l'identité  de  cette  ville  et  de 
Bibracte  ;  le  génie  de  la  source  celtique  et  celui  de  la  ville  bâtie  par 
Auguste  n'ont  rien  de  commun.  Les  ex-voto  de  cette  DEA  célèbre  dans 
tout  le  pays  Eduen  et  particulièrement  dans  un  périmètre  qui  comprenait 
Augustodunum  pourraient  se  rencontrer  à  Chalon  ou  à  Nevers  sans 
fournir  le  plus  mince  argument  à  ceux  qui  tenteraient  de  l'identifier  avec 
l'une  ou  l'autre  de  ces  villes,  pas  plus  que  l'ex-voto  des  Mères  Trévires, 
à  Xanten  sur  le  Rhin,  ne  l'identifie  avec  Trêves".  En  effet,  les  Eduens 
ainsi  que  les  Gaulois  d'Avenche,  de  Périgueux,  de  Bordeaux,  de  Cahors, 
etc.,  avaient  continué,  après  la  conquête  romaine,  de  rendre  aux  sources 
sacrées  un  culte  dont  la  civilisation  étrangère  modifia  les  formes  sans 
attaquer  le  fond.  Ils  allaient,  comme  par  le  passé,  boire  aux  fontaines 
pour  perdre  la  fièvre,  en  offrant  au  génie  un  œuf,  une  monnaie,  une 
banderoUe,  un  bâton,  sans  avoir  jamais  pensé  invoquer  une  ville  pour 
leur  guérison;  mais  tandis  que  les  anciens  Gaulois,  peu  soucieux 
d'images  2,  se  bornaient  à  quelques  pratiques  superstitieuses,  ceux 
d'entre  eux  qui  fréquentaient  ou  habitaieut  les  municipes,  semblent  avoir 
emprunté  aux  Romains  l'usage  des  figures  et  des  inscriptions  votives. 

C'est  à  ce  titre  que  les  ex-voto  des  génies  ruraux  se  rencontrent  dans 
les  centres  gallo-romains  où  leurs  simulacres,  presque  tous  de  la  déca- 
dence ,  ne  pouvaient  personnifier  les  oppida  gaulois ,  abandonnés , 
détruits,  transformés  depuis  longtemps,  pas  plus  que  les  villes  qui  leur 
avaient  succédé  ;  mais  ils  y  rappellent  les  guérisons  qui,  d'année  en  année, 
étaient  obtenues  aux  lieux  où  l'on  cherchait  la  santé. 

La  troisième  erreur  de  d'Anville  est  celle  qui  attribue  à  l'inscription  de 
la  DEA  BIBRACTE  une  antiquité  inadmissible.  Elle  datait  selon  lui  du 
règne  de  Tibère  qui  avait  créé  les  sexvirs  augustaux  5,  comme  si  la  date 
de  cette  institution,  qui  dura,  avec  des  phases  diverses,  autant  que  l'em- 


1.  De  Ring,  op.  cit.  T.  Il,  p.  4.  A  propos  d'une  inscription  à  MARS  BRITONIVS  qu'il 
attribue  au  Mars  de  Britonium  en  Galice,  quoique  trouvée  à  Nîmes,  et  d'une  autre  au 
dieu  de  Vence  en  Provence,  découverte  à  Seyssel,  l'auteur  de  la  Religion  des  Gaulois  , 
ajoute  :  «  il  y  a  tant  d'exemples  d'honneurs  rendus  par  les  anciens  à  des  dieux  des  pays  i 
les  plus  éloignés,  que  ce  seroit  se  faire  un  pliantôme  à  pure  perte,  de  rejeter  cette  éty-  i 
mologie  par  cela  seul  »  (D.  Martin,  I,  p.  501,  11,  p.  84).  11  cite  une  dédicace  au  Mer-  I 
cure  An>ernetro\ivée  en  Germanie  (1,  p.  374)  | 

2.  César,  en  parlant  du  Mercure  gaulois  a  dit  :  «  hujus  sunt  plurima  simulacra.  »  Le 
mot  simulacntiii  n'implique  pas  une  représentation  personnelle;  mais  un  signe  quelconque.  ; 
B.  G.  VI    17.  La  rareté  des  simulacres  religieux  authentiquement  antérieurs  à  la  conquête  | 
romaine  permet  au  moins  le  doute. 

].  D'Anville,  Ed.  géogr.,  loc.  cit. 


L'ex-voto  de  la  Dea  Bibracte.  3 1 1 

pire  lui-même,  pouvait  impliquer  en  rien  celle  de  notre  ex-voto.  Aucune 
raison  ne  le  rattache  au  règne  de  Tibère  plutôt  qu'à  celui  de  Constantin 
et  ses  caractères  archéologiques  rappellent  bien  plus  le  quatrième  que  le 
premier  siècle  de  notre  ère,  comme  on  le  verra  dans  la  seconde  partie 
de  ce  travail. 

A  un  autre  point  de  vue,  la  DEA  BIBRACTE  pouvait-elle  être  le  génie 
d'Augustodunum  .?  Auguste,  en  édifiant  la  ville  et  en  lui  donnant  son  nom, 
n'avait  point  eu  pour  but  de  la  consacrer  au  génie  de  Bibracte  qu'il 
supplantait.  Pour  créer  une  Gaule  nouvelle,  il  changeait  les  divisions 
territoriales,  les  noms  ou  l'emplacement  des  chefs-lieux,  substituait  des 
villes  aux  plus  illustres  oppida  condamnés  à  périr  sur  les  montagnes.  Il 
élevait  à  Lyon  le  temple  de  Rome  et  Auguste  dont  le  prem.ier  grand- 
prêtre  était  éduen  ;  il  appelait  les  représentants  des  soixante  cités  gau- 
loises aux  pieds  du  génie  nouveau  de  leur  pays.  Cette  suprématie  était 
incompatible  avec  le  culte  de  Bibracte,  avec  les  souvenirs  gaulois  qu'il 
voulait  anéantir,  et  que  son  successeur  ne  favorisait  pas  davantage. 

La  politique  impériale  qui  réglait  tout,  avait  du  reste  pour  ces  cas 
particuliers  une  reconnaissance  légale.  Lorsqu'un  génie  étranger  était 
admis  dans  la  religion  officielle  et  prenait  place  à  côté  ou  au-dessous  des 
dieux  romains,  il  recevait  le  diplôme  de  son  admission,  il  devenait 
AUGVSTE,  comme  les  grands  dieux,  patrons  des  empereurs. 

Ces  sortes  de  reconnaissances  sont  presque  toutes  spéciales  à  la  Gaule, 
les  Romains  s'en  étant  montrés  parcimonieux  dans  les  autres  provinces, 
telles  que  l'Afrique  et  l'Asie. 

Faut-il  voir  dans  ce  privilège  un  acte  de  tolérance.?  Non,  les  Romains 
firent  deux  parts  dans  la  religion  des  Gaulois,  ils  poursuivirent  les 
druides  dont  l'influence  politique  leur  portait  ombrage,  en  même  temps 
qu'ils  favorisèrent  le  culte  des  génies,  et  des  dieux  plus  voisins  de  leur 
propre  mythologie.  Le  peuple  attaché  à  ces  divinités  subalternes  dont  le 
culte  formait  sa  religion  journalière,  conserva  des  superstitions  inofïen- 
sives  pour  les  conquérants  qui  s'en  déclarèrent  les  protecteurs. 

Les  génies  gaulois  devinrent  ainsi  presque  tous  augustes. 

Il  n'est  pas  en  effet  de  ville  gallo-romaine  dans  laquelle  on  ne  ren- 
contre des  Mères,  des  Sylvains,  des  DEJE  avec  le  titre  d'AUGVSTES. 

A  Lyon  :  MATRIS  AVGUSTIS 


A  Vésone  :  TUTEL^  AVG 

VESVNNAE 


312  L'ex-voto  de  la  Dea  Bibracte. 

Telles  eussent  été  les  inscriptions  de  la  DEA  BIBRACTE,  si  elles  eussent 
concerné  le  génie  reconnu  de  la  cité;  mais  cette  DEA  ne  possédant  pas 
même  le  brevet  de  l'acceptation  administrative,  n'avait  droit  dès  lors  qu'à 
un  culte  purement  individuel,  comme  si  une  pensée  politique  lui  eût 
refusé  un  honneur  dont  jouissaient  les  plus  humbles  génies  gaulois. 

Le  titre  de  sexvir  augustal  ne  donne  à  l'ex-voto  de  Caprilius  aucun 
caractère  public.  Ces  magistrats  annuels  et  d'un  ordre  inférieur,  pris 
dans  la  classe  des  affranchis  ou  dans  le  peuple  dont  ils  partageaient  les 
croyances,  étaient,  par  leurs  fonctions  mêmes,  tenus  à  des  actes  appa- 
rents de  dévotion.  La  surveillance  des  édicules  religieux  multipliés  dans 
chaque  quartier  d'Augustodunum,  aux  façades  des  maisons  et  aux  carre- 
fours', les  familiarisait  avec  tous  les  détails  de  la  religion  populaire. 
Parmi  les  innombrables  génies  dont  chaque  jour  on  recueille  à  Autun  les 
images  mutilées,  le  sexvir  avait,  comme  ses  concitoyens,  ses  dieux  de 
prédilection.  La  DEA  BIBRACTE,  fée  des  plus  accréditées  non-seule- 
ment à  Augustodunum,  mais  dans  tout  le  bassin  de  l'Arroux  et  des 
affluents  éduens  de  la  Loire,  exerçait  un  prestige  sans  égal.  De  l'enceinte 
de  la  ville  d'Auguste,  on  apercevait  le  sommet  nuageux  où  elle  résidait, 
et  le  vieil  oppidum  dont  elle  rappelait  la  gloire  et  le  nom.  De  pareils 
aspects  et  de  pareils  souvenirs  légitimaient  la  renommée  légendaire  qui 
l'avait  fait  classer  par  le  peuple  au  nombre  des  divinités  protectrices  du 
pays. 

Le  rapprochement  le  plus  spécieux  tenté  par  d'Anville  dans  l'intérêt 
de  sa  thèse  des  villes  divinisées  est  celui  de  la  dea  Aventia  avec  la  dea 
Bibracte,  aussi  peu  fondés  l'un  que  l'autre. 

Aventicum  était  une  colonie  romaine  COLONIA  HELVETIORVM 
postérieure  à  la  conquête  comme  Augustodunum,  et  habitée  de  même 
par  une  population  mélangée  d'indigènes  et  d'étrangers.  Chacune  des 
deux  races  avait  ses  divinités  distinctes  dans  ces  deux  villes.  La  partie 
gauloise  honorait  les  génies  des  sources  en  renom  du  pays  ;  les  colons 
romains  adoraient  Apollon,  dieu  principal  d'Augustodunum,  d'Avencheset 
de  Vésone,  «  l'Apollo  noster  »  d'Eumène,  et  celui  des  ex-voto  d'Aven- 
tia,  qui  le  qualifient  de  genius  incolarum  ^  dans  des  inscriptions  communes 
aux  deux  patrons  des  habitants. 

1.  «Cum  Berecynthiaï  simulacrum  per  Augustoduni  compila  veheretur.  »  (Actes  du 
martyre  de  saint  Symphorien,  antérieurs  à  Grégoire  de  Tours,  D.  Ruinart.  Acta  sincera, 
Greg.  Turo.  de  gloria  confess.  n°  958.) 

2.  DEAE  AVENTIAE 
ET  GENIO   INCOLAR 

T.  lANVARIVS 


(Inscriptiones  Helveti£  collecU  et  explkau  ab  1.  G.  Orellio,  n°  177.  Turici  1844.) 


L' ex-voto  de  la  Dea  Bibracte.  j  l  j 

La  DEA  AVENTIA  n'était  ainsi  à  côté  d'Apollon  qu'un  génie  local  de 
la  colonie  des  Helvétiens^  de  même  famille  et  de  même  nature,  par 
exemple,  que  la  DEA  helvétienne  NARIA  NOVSANTIA  dont  un  ex-voto, 
identique  dans  sa  teneur  à  celui  de  Dibracte,  a  été  découvert  à  Neuve- 
ville  près  du  lac  de  Bienne  '  ;  elles  n'étaient  toutes  deux  que  des  divinités 
populaires,  invoquées  pour  la  santé.  Le  nombre  de  vérifications  faites 
antérieurement  sur  des  points  identiques  assurait  à  l'avance  que  la  DEA 
Aventia  n'échappait  pas  plus  que  toutes  celles  de  même  famille  à  la  règle 
générale  qui  proscrit  les  villes  divinisées. 

Il  fallait,  pour  arriver  à  une  solution,  faire  les  mêmes  recherches  qui 
avaient  réussi  dans  tous  les  autres  lieux  occupés  par  des  villes  antiques, 
ayant  un  nom  commun  avec  des  DEAE^  et  savoir,  en  un  mot,  si  la  Dea 
Aventia  était  l'apothéose  de  la  colonie  d'Avenches  ou  le  génie  d'une 
source  qui  lui  avait  donné  son  nom. 

Nous  avions  cru  d'abord  que  les  inscriptions  votives  de  la  DEA 
AVENTIA  appartenaient  à  Munchweiler,  village  voisin  d'Avenches,  où 
Gaspard  Hagenbuch^  en  avait  lu  plusieurs,  et  qu'il  fallait  y  chercher  la 
source  d'Aventia,  mais  d'obligeants  renseignements  nous  ont  appris 
que  ces  ex-voto  y  avaient  été  transportés?.  Il  était  d'autant  plus  naturel 
de  s'écarter  dans  les  environs  que  les  eaux  qui  alimentent  la  ville  prove- 
naient en  majeure  partie  du  dehors,  amenées  dès  l'époque  romaine, 
comme  à  Augustodunum,  par  des  travaux  d'art.  Une  fontaine  cependant 
coulait  à  l'intérieur,  et  cette  fontaine,  comme  celles  de  toutes  les  DE^E 
gauloises,  était  à  tort  ou  à  raison  recherchée  comme  préservatif  ou  remède. 
C'est  là  que  résidait,  ainsi  que  dans  tous  les  lieux  où  le  même  fait  se 
reproduit,  la  véritable  DEA  AVENTIA,  qui  n'a  jamais  été  et  n'a  pu  être 
une  ville  divinisée.  Nous  copions  la  note  qui  nous  est  communiquée. 


NVMINIBVS  AVG 

ET  GENIO  COL.   HEL. 

APOLLINI  SACR 


(Orelli,  op.  cit.  n"  176.) 

1.  NARIAE 
NOVSAN 

TIAE 

T.  FRONTINIVS 

HIBERNVS 

V.  S.  L  M 

(Orelii  :  op.  cit.  n"  166.1 

2.  Lettres  sur  la  Déesse  Bibracte  de  Gaspard  Hagenbuch  au  président  Bouhier.  n  no- 
vembre 1744.  Bibl.  Nat.  de  Paris,  Mss.  Bouhier.  1653,  p.  -I'^,  verso. — Orelli,  op.  cit. 
n"  177  et  suiv. 

5.  M.  Morel  Fatio,  conservateur  du  musée  de  Lausanne,  et  M.  Gaspari,  conservateur 
du  musée  d'Avenches,  à  qui  est  dû  ce  renseignement. 


JI4  L'ex-voto  de  la  Dea  Bibracte. 

«  Il  existe  effectivement  dans  l'enceinte  d'Aventicum  à  200  pas  des 
remparts,  près  de  Donatyre,  une  source  d'eau  très-abondante,  qui 
s'appelle  la  fontaine  des  Buydères;  elle  jouit  d'une  certaine  réputation 
et  nos  gens  lui  attribuent  la  propriété  de  guérir  le  goitre,  de  faire  passer 
la  toux;  ils  prétendent  qu'elle  est  chaude  en  hiver,  froide  en  été,  etc.  Le 

D''  B la  tenait  en  grande  estime  et  la  prescrivait  souvent  aux  enfants 

malades  des  environs.  Elle  jaillit  avec  force  de  la  glaise,  elle  est  très- 
bonne  à  boire  et  les  habitants  la  préfèrent  en  cas  de  maladie  à  toute  autre 
eau  ' ,  )) 

Tels  sont  les  caractères  des  sources  des  DE^E  gauloises,  visitées  dès 
la  plus  haute  antiquité  par  les  populations.  Leur  nom  a  passé  au  premier 
noyau  d'habitations  groupé  près  d'elles,  de  la  même  manière  que  celui 
du  patron  de  l'église  aux  villages  formés  à  l'entour.  La  ville  d^Aventicum 
a  pris  le  nom  d'Aventia  comme  Nemausus  celui  du  génie  de  la  magnifique 
source  de  Némause;  les  génies  sont  restés  après  ce  qu'ils  étaient  aupara- 
vant, sans  que  les  villes  aient  participé  en  rien  à  leur  divinisation. 

Sans  doute  les  habitants  ont  déposé  des  ex-voto  dans  les  temples; 
mais  les  ex-voto  n'étaient  pas  seulement  ceux  des  habitants,  mais  de  tous 
ceux  qui  de  près  ou  de  loin  venaient  demander  une  guérison  ;  ils  ne  la 
demandaient  pas  à  coup  sûr  à  une  ville^,  maii  au  génie  dont  l'interven- 
tion se  révélait  dans  l'efficacité  des  eaux.  Aussi  les  ex-voto  sont-ils  par- 
fois loin  du  lieu  consacré. 

L'ex-voto  de  la  DEA  ICAVNE^  trouvé  à  Auxerre  était  bien  plus 
éloigné  des  sources  de  l'Yonne  que  celui  de  la  DEA  BIBRACTE  des 
fontaines  de  l'oppidum  Eduen. 

Une  inscription  de  Nîmes  mentionne  dans  cette  ville  le  culte  de  la  DEA 
VRA,  la  fontaine  d'Eure  près  d'Uzès'.  Les  Mères  germaines  et  gau- 
loises se  trouvent  en  Grande-Bretagne,  le  Mars  Caturige  des  Alpes 
en  Germanie,  Epona  et  Camulus  à  Rome  même.  L'ex-voto,  par  sa 
nature,  n'avait  pas  de  patrie,  et  bien  que  déposé  le  plus  souvent  dans  le 

1.  Lettrede  M.  Gaspari.  Décembre  1869. 

2.  AVG.   SACR.    DEAE 

ICAVNI 
T.  TETRICIVS  AFRICAN. 

DS  D  D 
(Lebeuf  :  Histoire  ecclésiastique  et  civile  d'Auxerre,  1745,  in-4.  T.  II,  p.  6.)  Orelli  :  Inscr. 
Lat.  I,  p.  98. 

3.  Comarmond,  Description  du  Musée  lapidaire  de  la  ville  de  Lyon,  n°  587. 

AVGVST 

LARIBVS 

CVLTORES  VRAE 

FONTIS 


L'ex-voîo  de  la  Dca  Bibracte.  3 1 5 

sanctuaire  même  de  la  divinité  à  laquelle  il  était  adressé^  il  se  rencontre 
aussi  dans  la  patrie  du  pèlerin  et  au  lieu  plus  ou  moins  éloigné  où  son 
souhait  a  été  réalisé. 

On  a  rapproché  de  la  DEA  BIBRACTE  et  de  la  DEA  AVENTIA,  pour 
en  faire  un  génie-ville,  la  DEA  VESVNNA  dont  Vésone  porte  le  nom. 
Le  modèle  n'est  pas  plus  heureux  que  les  précédents,  car  la  DEA 
VESVNNA  est  le  génie  d'une  source,  et  cette  source  ne  coule  ni  dans  la 
ville  de  Périgueux,  ni  même  dans  l'oppidum  gaulois  des  Pétrocoriens. 
Lorsque  ces  derniers,  après  la  conquête  abandonnèrent  leur  oppidum, 
comme  les  Eduens  celui  de  Bibracte,  pour  peupler  la  ville  Auguste  de 
Périgueux,  ils  y  transportèrent  le  culte  de  la  DEA  VESVNNA  un  de  leurs 
génies  des  eaux. 

«  La  fontaine  Vcsunna,  nous  écrit  un  correspondant,  a  été,  ainsi  que  la  DIVONA 
des  BiturigesVivisqueset  des  Cadurques,  la  DEA  tutélaire  des  Pétrocoriens;  elle 
coule  dans  l'étroite  vallée  qu'habitèrent  les  premiers  Gaulois,  pasteurs  dans  ces 
contrées. 

))  D'un  côté  à  l'est  est  l'oppidum  d'Ecorne-Bœuf,  et  à  l'ouest  une  retraite  ou 
refuge  appelée  Camp  de  César.  La  rivière  de  l'Isle  coule  au  pied  de  l'oppidum  et 
du  camp.  Au  delà  s'étend  la  vallée  où  fut  bâtie  la  ville  gallo-romaine  de  Vésone. 
Le  temple  de  la  DEA  tutélaire  fut  élevé  en  face  de  la  vallée  où  coule  la  fon- 
taine. 

»  Le  culte  des  cours  d'eau,  des  lacs,  des  fontaines,  des  gouffres,  était  général 
dans  nos  contrées.  Beaucoup  de  sources  ont  conservé  de  nos  jours  leurs  vertus 
miraculeuses,  grâce  à  l'intervention  du  christianisme  qui  a  mis  un  saint  à  la  place 
de  la  DEA  païenne.  Un  grand  nombre  d'églises  sont  placées  sur  des  fontaines  ou 
à  côté.  Plusieurs  de  nos  abbayes,  celles  de  Brantôme,  de  Saint-Arnaud,  etc., 
ont  été  élevées  dans  des  lieux  célèbres  par  des  superstitions  antérieures  à  la  con- 
quête romaine',  »  Ces  faits  se  répètent  par  tout  le  pays  Eduen. 

Les  ex-voto  des  DE^  gauloises  découverts  dans  les  villes  gallo- 
romaines  s'adressaient  donc  à  des  divinités  rurales  et  populaires  dont  les 
fontaines  étaient  souvent  hors  de  ces  villes  et  dont  le  culte  avait  précédé 
leur  fondation,  comme  à  Avenche  et  à  Vésone.  On  rencontre  encore  dans 
cette  dernière  ville  le  dieu  TELONVS,  génie  d'une  autre  source  située 
à  une  demi-lieue  et  dont  les  ex-voto  étaient  néanmoins  déposés  dans 
les  temples  romains  de  Périgueux  2.  Le  même  dieu  Telonus  était  la  divi- 
nité d'un  petit  temple  situé  sur  une  passe  profonde  au  bord  de  l'Arroux, 
entre  Autun  et  Toulon-sur-Arroux,  il  semble  avoir  donné  son  nom  à  cette 
ville  très-peu  distante. 

1.  Note  due  à  l'obligeance  de  M.  Galy,  conservateur  du  Musée  de  Périgueux. 

2.  Wlgrin  deTaillefer,  antiquités  de  Vésone.  2  vol.  in-4.  Périgueu.x,  1824-1826. 


3i6  L'ex-voto  de  la  Dea  Bibracte. 

Ces  citations  déterminent  dès  lors  la  véritable  nature  de  la  DEA 
BIBRACTE  qu'il  est  superflu  de  chercher  dans  des  interprétations  ima- 
ginaires. Dès  qu'il  sera  prouvé  qu'elle  était  un  génie  des  eaux,  d'une 
source  visitée  encore  aujourd'hui  comme  celle  d'Aventia,  de  Vesunna,  et 
tant  d'autres,  sa  présence  à  Augustodunum  s'expliquera  tout  naturelle- 
ment par  les  usages  religieux  des  Gallo-Romains.  Les  habitants  de  la 
ville  qui  allaient  lui  demander  la  santé  à  une  époque  où  le  plateau  d'où 
elle  coule  était  abandonné,  ne  pouvaient  placer  leurs  ex-voto  ailleurs 
que  chez  eux,  et  surtout  dans  ce  temple  d'Apollon,  dieu  d'une  source 
chaude',  qui  restait  dans  son  rôle  en  accueillant  dans  sa  demeure  les 
gages  de  reconnaissance  décernés  par  les  malades  aux  génies  des  autres 
sources  du  pays. 

Une  question  reste  encore  à  éclaircir,  celle  de  savoir  si  la  fontaine  de 
la  DEA  BIBRACTE  aurait  existé  à  Autun.  Tous  les  lieux  connus  comme 
patronnés  par  une  DEA  possédaient  une  source  ordinairement  de  même 
nom,  on  l'a  vu;  mais  Autun  ne  réalise  pas  cette  condition.  Placé  à  la 
base  d'un  plateau,  comme  une  presqu'île,  il  n'a  aucune  espèce  d'impor- 
tance dans  l'hydrographie  du  pays,  et  serait  presque  complètement 
dépourvu  d'eau  sans  les  travaux  artificiels  qui,  à  l'époque  romaine 
comme  aujourd'hui,  lui  en  ont  fourni.  La  source  voisine  de  l'abbaye 
Saint-Andoche,  si  elle  n'est  pas,  comme  plusieurs  le  croient,  la  dérivation 
d'un  aqueduc  antique,  n'a  jamais  été  l'objet  d'un  culte  et  ne  saurait 
rappeler  Bibracte. 

Les  génies  des  ruisseaux  environnants  sont  inconnus.  Le  ruisseau  de  la 
Fée,  filet  d'eau  éloigné  d'Autun  dans  les  bois,  rappelle  seul  le  souvenir 
d'un  génie  celtique.  A  une  lieue,  au  bord  de  l'Arroux,  on  trouve  à  Ornée 
une  source  sacrée  qui  porte  le  nom  latin  de  Flore,  Fleury.  L'étymologie 
de  l'Accoron,  l'Escurrens  des  chartes,  qui  coule  au  nord-est  de  la  ville, 
rappelle  simplement  le  caractère  d'un  torrent.  Le  ruisseau  de  Rivault 
est  défini  par  son  nom  même.  Tous  ces  noms  sont  romains.  Aucune  source 
jaillissante  n'existe  dans  l'intérieur  de  la  ville  ;  aucun  nom  ne  rappelle  celui 
d'une  DEA.  Le  texte  d'Eumène  relatif  à  une  source  d'eau  chaude  destinée 
aux  épreuves  judiciaires  et  dédiée  non  à  Bibracte,  mais  à  Apollon,  est 
lui-même  discutable.  Il  ne  dit  point  que  la  source  non  plus  que  les  bois 
sacrés  qui  l'entouraient  fussent  à  Autun  et  auprès  du  temple;  ils  parais- 
sent plutôt  hors  des  murs,  d'après  le  te.xte,  puisqu'il  faut  circuler^  circum 
ire,  pour  voir  les  uns  et  les  autres-.  Il  est  donc  plus  naturel  de  les  cher- 

1.  Eumène,  panégyrique  de  Constantin  Auguste,  CXXI.  «  Apollo  noster  cujus  ferventi- 
bus  aquis  »  etc. 

2.  Eumène:  Paneg.  Constiint.  Aug.  XXll.  «lllos  quoque  Apollinis  lucos  et  sacras  scdi 


L'ex-wto  de  la  Dca  Bibracte.  517 

cher  à  la  forêt  sacrée  qui  domine  la  ville  et  à  la  Fontaine-Chaude  sur  le 
plateau  de  Montjeu  dont  un  aqueduc  amenait  les  eaux  à  Augustodunum. 
La  tradition  comme  l'hydrographie  prouvent  que  la  UEA  BIBRACTE 
ne  pouvait  avoir  son  origine  à  Autun.  A  Vésone  on  connaît  l'emplace- 
ment de  la  fontaine  Vesunna,  à  Nîmes  celle  de  Nemausus,  à  Cahors  et  à 
Divone  celle  de  Divona,  à  Luxeuil  celle  de  Luxovius,  mais  à  Autun 
personne  n'a  jamais  entendu  parler  de  Bibracte,  par  la  raison  bien  simple 
qu'elle  était  au  Mont  Beuvray. 

Le  pèlerinage  des  sources  de  Bibracte,  populaire  comme  celui 
d'Alesia,  était  trop  profitable  aux  marchands  d'Augustodunum  qui  y 
transportaient  des  denrées,  pour  être  délaissé.  Ces  sortes  de  pèlerinages 
existaient  du  reste  dans  tous  les  anciens  oppida,  et  il  n'en  est  pas  dans 
lequel  on  ne  retrouve  la  fontaine  sacrée  avec  son  cortège  de  légendes  et 
de  superstitions. 

Le  Beuvray  étant  le  point  de  formation  des  principaux  ruisseaux  du 
Morvan  et  de  la  partie  adjacente  du  bassin  de  l'Arroux,  ses  eaux  comme 
celles  de  toutes  les  montagnes  situées  dans  les  mêmes  conditions  avaient 
été  divinisées.  Elles  étaient  devenues  la  DEA  BIBRACTE,  comme  celles 
de  l'Yonne  qui  prennent  naissance  à  ses  pieds  étaient  devenues  la  DEA 
ICAVNE,  celles  de  la  Seine  la  DEA  SEQVANA,  celles  de  Bourbon  le 
dieu  BORVO,  celles  de  Vesonne  la  DEA  VESVNNA  et  toutes  celles  que 
nous  avons  citées  et  pourrions  citer  encore.  Ce  génie  celtique  renié  ou 
non  par  les  Romains,  ne  peut  être  compris  qu'à  l'aide  des  coutumes  des 
Gaulois,  et  c'est  en  se  reportant  à  ces  coutumes  qu'on  voit  Caprilius 
gravir  le  Mont  Beuvray  avec  les  autres  habitants  d'Augustodunum,  pour 
la  fête  celtique  qui  se  tenait  au  printemps  à  la  source  de  Bibracte. 

Chaque  arrivant  se  rendait  à  la  fontaine,  et  ne  se  livrait  aux  affaires 
qu'après  avoir  bu  et  accompli  son  acte  de  dévotion  accompagné  de  pra- 
tiques qui  existent  encore  aujourd'hui.  Ceux  qui  se  croyaient  préservés 
de  mal  ou  exaucés  dans  une  demande,  ceux  qui  croyaient  devoir  la 
santé  à  l'eau  limpide  de  la  DE.A,  s'empressaient  après  leur  guérison  d'ex- 
primer leur  reconnaissance  par  un  ex-voto  :  «  Referunt  vota  templis  ',  » 
de  la  même  manière  qu'un  pèlerin  de  Sainte-Reine  ou  de  Saint-Jacques 
déposait  son  bourdon  ou  un  tableau  commémoratif  dans  l'église  de  son 
village,  sans  que  ce  village  pût  être  confondu  avec  le  lieu  d'où  il  arrivait. 
La  population  gauloise  émigrée  de  Bibracte  devait  être,  du  reste,  assez 

et  anhela  fontium  ora  circum  eat.  »  —  [On  pourrait  comprendre  le  circum  ire  d'Eumène 
autrement  que  ne  le  fait  M.  Bulliot  et  y  voir  l'action  de  faire  le  tour,  par  vénération, 
d'un  endroit  tenu  pour  sacré,  usage  que  j'ai  vu  pratiquer  encore  de  nos  jours  en  Irlande. 
—  H.  GJ 

I.  Eumène,  pro  gratiarum  actione,  14. 


3i8  L'ex-voto  de  la  Dea  Bibracte. 

nombreuse  à  Augustodunum  pour  y  avoir  transporté  le  souvenir  et  le 
culte  de  son  génie  gaulois,  mais  son  sanctuaire  primitif  et  vénéré  resta 
toujours  au  Mont  Beuvray.  En  consultant  les  usages  traditionnels  qui 
n'ont  pas  plus  disparu  dans  le  Morvan  que  chez  les  Bretons,  on  voit 
durant  le  moyen-âge,  au  premier  mercredi  de  mai,  une  fête  qui  rappelle 
les  pardons  de  la  Bretagne  et  celle  dont  Grégoire  de  Tours  a  donné  la 
description',  se  tenir  durant  trois  jours,  sur  le  plateau  désert  de  Bibracte  ^ 
toutes  les  populations  du  pays  Eduen  y  accourir,  les  marchandises 
transportées  des  villes  voisines,  les  échéances  des  paiements  fixées  à 
cette  date,  des  notaires  d'Autun  s'y  rendant  pour  acterî.  Aujourd'hui 
encore  les  nourrices  viennent  à  la  fontaine  se  laver  le  sein  pour  obtenir 
du  lait,  elles  déposent  sur  ses  bords  un  sou  ou  un  œuf;  les  fiévreux 
boivent  son  eau  ;  ceux  qui  redoutent  les  sorts  s'y  agenouillent  et  jettent 
ensuite  par  derrière  l'épaule  gauche  la  baguette  de  coudrier  au  pied  de 
la  croix,  etc.  Nous  reconnaissons  là  les  coutumes  religieuses  de  la  Gaule 
et,  à  la  source  du  Mont  Biffracte"^,  celle  de  la  DEA  BIBRACTE. 

Il  faut  donc  renoncer  à  faire  de  cette  DEA  le  génie  d'Augustodunum; 
son  rôle,  tel  que  nous  venons  de  le  décrire,  est  beaucoup  plus  modeste. 
Elle  reste  dans  la  catégorie  des  mères,  des  douées,  des  fées,  des 
nymphes  s,  c'est  la  déesse  du  peuple  et  des  traditions.  La  géographie 
ou  l'histoire  n'ont  pas  à  discuter  son  domicile;  elle  habite  aujourd'hui 
où  elle  habitait  du  temps  de  César,  de  Strabon,  de  saint  Martin  et,  en 
donnant  à  cette  question  les  proportions  de  la  réalité,  l'inscription  de 
Caprilius  se  réduit  à  la  guérison  d'un  malade,  trop  incertaine  pour 
mériter  à  la  déesse  Bibracte  la  réputation  que  lui  ont  faite  les  savants. 
Le  paysan  Morvandeau  qui  dépose  furtivement  un  sou  sur  ses  bords,  la 
nourrice  qui  s'y  rend  pour  obtenir  un  nounissage  prospère,  en  ensei- 
gnent plus  long  sur  la  célèbre  DEA  que  toutes  les  dissertations  dont  elle 
a  été  l'objet  6. 

L'universalité  du  cuhe  des  DE^  est  telle  qu'on  a  droit  de  s'étonner 
que  des  erreurs  aussi  palpables  que  celles  qui  ont  eu  cours  au  sujet  de 


1.  De  Gloria  confess.  it. 

2.  Terrier  du  Beuvray  xv'  siècle.  Archives  d'Autun. 

5.  Archives  d'Autun,  actes  manuscrits.  —  Voir  A.  de  Charmosse,  Cartul.  de  l'église 
d'Autun,  in-4.  Autun,  186$.  —  J.  G.  BuUiot,  Essai  hist.  sur  l'abbaye  de  Saint-Martin 
d'Autun.  T.  II,  chartes  128  et  151.  2  vol.  in-8.  Autun,  1849. 

4.  Nom  latin  du  Beuvray  dans  les  chartes  du  xiii"  siècle. 

5.  On  peut  voir  dans  les  recueils  d'épigraphie  Gallo- Romaine  un  grand  nombre 
d'inscriptions  votives  se  rapportant  aux  NYMPHIS  et  aux  FATIS. 

6.  Pendant  l'été  de  1868  un  habitant  de  Glux,  rentrant  de  nuit,  fut  poursuivi  par 
deux  malfaiteurs  qui  lui  tirèrent,  sans  l'atteindre,  deux  coups  de  pistolet.  Le  lendemain  on 
lisait  son  nom  écrit  à  la  craie  sur  la  croix  de  Saint-Martin,  au  sommet  du  Beuvray.  Un 
sou  était  déposé  en  offrande. 


L'eX'VOto  de  la  Dca  Bibracte.  ^  19 

l'ex-voto  Eduen,  aient  pu  subsister  si  longtemps.  Il  suffit  d'ouvrir  un 
recueil  épigraphique  pour  les  réfuter. 

La  DEA  ABNOBA'  du  Mont  Abnoba,  en  Wurtemberg,  dont  on  a  ajouté 
quelquefois  le  nom  à  celui  de  Diane,  était  une  Douée  et  présidait  aux 
sources  du  Danube  et  du  Necker.  ACIONNA  DEA-,  génie  de  la  fontaine 
de  l'Etuvée,  était  à  Orléans  ce  que  la  la  DEA  BIBRACTE  était  à  Autun. 
A  Villey-sur-Tille  en  Bourgogne,  la  DEA  ARNALIA  5  guérissait  les 
maniaques  qui  y  venaient  de  loin;  on  bâtit  depuis  dans  ce  lieu  une 
chapelle  dédiée  à  St  HERMES  et  à  St  AVGVSTIN  qui  furent  substitués 
à  Mercure  et  aux  dieux  Augustes  de  l'inscription  gallo-romaine.  Le  sou- 
venir de  la  DEA  resta  à  la  fontaine  et  aux  arbres  des  fées,  troncs  énormes 
que  l'on  visitait  encore  par  curiosité  au  siècle  dernier 4.  La  DEA 
CLVTODA,  récemment  découverte  dans  un  village  de  la  Nièvre  s, 
près  d'une  fontaine,  guérissait  de  la  fièvre  i^.  La  DEA  SIRONA  était 
honorée  en  Germanie,  associée  à  APOLLO  GRANNVS  à  Rome,  en 
Dacie,  à  Nierstein  où  elle  présidait  à  l'établissement  thermalv.  A  Luxeuil, 
la  DEA  BRIXIA,  est  associée  au  dieu  LVXOVIVS,  génie  des  eaux 
thermales  s. 

On  voit  de  même  sur  l'autel  du  Mesvrin  près  Autun,  une  fée  associée 
au  génie  du  ruisseau,  devant  lesquels  on  va  encore  en  pèlerinage?. 

A  l'oppidum  de  Hohenbourg  en  Alsace,  le  génie  des  sources  du  pagus, 
résidait  à  la  fontaine  de  Sainte-Odile.  La  montagne  de  Sion  vénérée 
aujourd'hui  par  les  Lorrains,  comme  autrefois  par  les  Leukes,  attire  les 
pèlerins  qui  viennent  boire  l'eau  de  ses  sources,  ainsi  que  la  célèbre 
fontaine  de  Sainte-Reine  d'Alise,  et,  pour  rentrer  dans  le  pays  Eduen, 
nous  n'aurions  qu'à  gravir  les  montagnes  de  l'Essertenue,  de  Dettey,  de 
Lanty,  de  Rome-Château,  pour  retrouver  auprès  des  sources  des  ancien- 
nes forteresses  celtiques  telles  que  le  Beuvray,  les  premiers  sanctuaires 
des  fées  de  la  Gaule. 

J.-G.  BULLIOT. 


j.  Orelli,  Inscr.  lat.  n"  1986. 

2.  Orelli,  n°  19(5. 

}.  Courtépée,  Description  du  duché  de  Bourgogne.  Dijonnais;  VilIey-sur-Tille. 

4.  Orelli,  n°  1961. 

5.  A  Mesves.  Voir  le  Bulletin  de  la  Société  Nivernaise  des   lettres,   sciences  et  arts,    2° 
série,  T.  II,  p.  371. 

6.  Je  dois  ce  renseignement   sur   les  propriétés  prétendues  de  la   source,  à  M.  Bauer, 
curé  de  Mesves,  auteur  de  la  communication  à  la  Société  Nivernaise. 

7.  Maximilien  de  Ring,  op.  cit.,  I,  p.  260. 

8.  Orelli,  n    2024. 

9.  Bulliot  :  Le  culte  des  eaux,  etc. 


INFLUENCE 

DE 

LA   DÉCLINAISON   GAULOISE 

SUR  LA    DÉCLINAISON    LATINE 

DANS    LES    DOCUMENTS    LATINS    DE    l'ÉPOQUE    MÉROVINGIENNE. 


M.  Gluck  dans  ses  K.  N.  a  signalé  un  fait  curieux  dont  il  me  semble 
avoir  méconnu  la  valeur  :  Le  continuateur  de  César  a,  dit-il  (p.  ^56), 
écnt  Atrebatas  à  la  manière  grecque;,  VIII,  7;  c'est  la  leçon  des  bons 
manuscrits,  et  Nipperdey  a  cru  avec  raison  devoir  l'admettre  dans  son 
édition  de  préférence  à  la  leçon  Atrebates  que  donnent  nos  éditions.  Ce 
qu'a  de  curieux  la  forme  Alrebatas,  c'est  qu'elle  appartient  à  un  nom  dont 
le  thème  est  devenu  consonantique,  après  avoir  été  vraisemblablement 
terminé  en  /',  et  qui  du  reste  se  rattache  complètement  à  la  troisième 
déclinaison  latine.  Hirtius  n'est  pas  le  seul  écrivain  romain  qui  ait 
donné  un  accusatif  pluriel  en  -as  aux  noms  gaulois  dont  le  thème  est 
consonantique  et  qui  dans  les  textes  suivent  aux  autres  cas  les  lois  de  la 
troisième  déclinaison. 

Nous  suivrons  l'ordre  chronologique  : 

Lucain,  Pharsale,  I,  398,  a  écrit  :  Pugnaces  pictis  cohibebant  Lingonas 
armis. 

Tacite,  Histoires,  livre  IV,  chap.  5  5  :  pênes  Treveros  ac  Lingonas. 

Florus,  livre  III,  chap.  10  :  Arvernos  atque  Biturigas,  Carniitas,  simul 
Sequanosque  contraxit. 

Eutrope,  livre  IX,  chap.  23  :  Pugnatum  est  circa  Lingonas. 

I.  Ce  nom  est  encore  écrit  Atrcbctis  pour  Atrebatis  dans  la  légende  d'une  monnaie 
mérovingienne  :  -is  est  en  gaulois  comme  dans  le  latin  archaïque  la  désinence  spéciale  à 
l'accusatif  pluriel  des  thèmes  en  /'. 


Influence  de  la  déclinaison  gauloise.  ^21 

Ammien  Marcellin,  livre  XVI,  chap.  2  :  venerat  Tricassas. 

Orose,  livre  VI,  chap.  1 1  :  In  Pictonas  proficiscitur; 

Livre  VII,  chap,  29  :  apud  Senonas; 

Livre  VII,  chap.  32  :  apud  Atrebatas. 

S.  Jérôme,  Chroni^jue,  année  367  :  apud  Atrebatas. 

Enfin  on  lit  dans  l'Itinéraire  d^Antonin  (D.  Bouquet,  I,  105  C,  108  A) 
Suessonas. 

Deux  inscriptions  du  haut  empire  viennent  confirmer  les  leçons  four- 
nies par  les  écrivains.  La  première  est  du  temps  de  l'empereur  Vespasien 
et  concerne  un  abornement  :  inter  Viennenses  et  Ceutronas  (Desjardins, 
Table  de  Peutinoer,  p.  46,  d'après  Renier,  Revue  Archéologique,  ib"  année, 
p.  3  $8).  La  seconde  est  relative  à  un  personnage  qui  avait  exercé  toutes 
les  charges  municipales  à  Autun  et  à  Langres  :  omnibus  honoribus  apud 
Aeduos  et  Lingonas  functus  (Desjardins,  Table  de  Peutinger,  p.  19,  d'après 
Orelli,  n"  2020). 

Vers  l'époque  où  M.  Gluck  publiait  son  savant  mémoire,  il  paraissait 
dans  les  Beitrxge  de  Kuhn  une  dissertation  de  M.  Ebel  qui  donnait  la 
solution  de  la  difficulté.  M.  Ebel  établissait  que  l'accusatif  pluriel  des 
thèmes  consonantiques  en  vieil  irlandais  ne  pouvait  s'expliquer  sans 
l'hypothèse  d'une  désinence  primitive  en  -7is  (t.  I,  p.  168).  Il  a  repro- 
duit cette  doctrine  dans  la  seconde  édition  de  la  Grammatica  celtica, 
p.  2^3,  n:ais  sans  produire  d'exemples  gaulois  à  l'appui  de  son  argumen- 
tation phonétique.  Les  exemples  pourtant  ne  manquaient  pas. 

On  ne  sera  donc  pas  étonné  si  Grégoire  de  Tours  a  pu  dire  : 

Biturigas  obsidebant,  D.  Bouquet,  II,  282  B; 

accedens  usque  Namnetas,  D.  B.,  II,  275  C; 

N ainnetas  'dccessii,  D.  B.,  II,  3^1  D; 

usque  Santonas,  D.  B.,  II,  239  B; 

Santonas  venh,  D.  B.,  II,  332  A; 

Quem...  Suessionas  àekrentes,  D.  B.,  II,  214A; 

Suessionas  rediit,  D.  B.,  II,  233  C; 

apud  Suessionas,  D.  B.,  II,  243  A; 

filium  suum...  Suessionas  dirigere  cogitabas,  D.  B.,  Il,  351  B; 

On  lit  de  même  dans  VEpitome  : 

usque  Suessionas,  D.  B.,  II,  398  C; 

Sexsionas  pervaserunt,  D.  B.,  II,  404  D; 

Sexionas  recepit,  D.  B.,  II,  408  B; 

Et  dans  Frédégaire  : 

Suessionas  adducitur,  D.  B.,  II,  434  C  ; 

Suessionas  peraccedens,  D.  B.,  II,  435  B. 


J22  Influence  de  la  déclinaison  gauloise 

Suivant  l'usage  ordinaire  dans  ces  bas-temps,  cet  accusatif  fait  fonc- 
tion de  génitif  et  d'ablatif. 

D'abord  de  génitif  . 

On  trouve  dans  les  monnaies  mérovingiennes  : 
Betoregas  c;[vitatis], 
Carnotas  ciV[itatis], 
Lingonas  cm[tatis], 
Redonas  cm[tatis], 
Sanîonas  aV/[tatis], 
Sennonas  civita[i\s]. 

(Voir  un  mémoire  de  M.  de  Barthélémy  dans  la  Bibliothèque  de  l'École 
des  chartes,  6"  série,  t.  I,  p.  452-461); 

Dans  deux  formules  : 

Bitoricas  in  civitatem  (Rozière,  Recueil  général  des  formules,  LXII, 
CCLXII); 

Dans  Grégoire  de  Tours  : 

Biturigas  cmXa.Xem,  D.  B;,  II,  147  D; 

Bituricas  urbem,  D.  B.,  II,  192A; 

Biturigas  urbem,  D.  B.,  II,  148  B,  377  D; 

urbem  Suessionas,  D.  B.,  II,  324  D,  353  D; 

Dans  VEpitome  : 

Sexionas  civitatem,  D.  B.,  II,  410  C; 

Dans  Frédégaire  : 

civitatem  Senonas,  D.  B.,  II,  436  B, 

Les  lois  de  la  grammaire  classique  auraient  exigé  :  Biturigum,  Car- 
nutum,  Lingonum,  Redonum,  Santonum,  Senonum,  Suessionum.  Mais  à  cette 
époque  où  la  langue  latine  se  transforme,  la  forme  d'un  cas  régime  fait 
continuellement  fonction  d'un  autre  cas  régime.  Ammien  Marcellin,  livre 
XVI,  chap.  3  avait  déjà  dit  :  apud  Senonas  oppidum,  pour  :  apud  Senonum 
oppidum. 

L'accusatif  pluriel  gaulois  en  -as  fait  aussi  fonction  d'ablatif  dans 
Grégoire  de  Tours,  exemple  : 

duas  portiones  de...  Abrincatas,  c'est-à-dire:  de  Abrincatibus,  D.  B.,II, 

344  A; 
cathedram  Suessionas  habere,   c'est-à-dire  :  Suessionibus ,  D.  B.,  II, 

214  A; 

Suessionas  sepultus  est,  c'est-à-dire:  Suessionibus,  D.  B.,  II,  230  D; 

On  lit  déjà  dans  la  Notitia  dignitatum  : 

Praefectus  Laetorum  gentilium. ..  Silvanectas,  c'est-à-dire  :  Silvanectibus, 
D.  B.,  I,  128  G; 


sur  la  déclinaison  latine.  325 

Praefectus  Laetorum  Francorum  Redonas,  c'est-à-dire:  Redonibiis,  D. 
B.,  I,  128  B; 
Praefectus  Sarmatorum  gentilium  Lingonas,  D.  B.,  I,  129  A, 
Enfin  nous  signalerons  dans  les  légendes  des  monnaies  mérovingiennes 
les  accusatifs  Abrinktas,  Dialdenlas,  Lemovecas  dont  il  serait  peut-être 
téméraire  de  prétendre  déterminer  la  fonction. 

Les  noms  de  peuples  gaulois  à  thème  consonantique  pour  lesquels  des 
exemples  d'accusatifs  pluriels  en  -as  ont  été  relevés  ci-dessus  est  de  seize. 
Ce  sont  les  : 

Ahrincates  (d'abord  Abrincatui), 

Atrebates, 

Bituriges, 

Carnutes, 

Ceatrones, 

Diablintes, 

Lemovices, 

Lingones, 

Namnetes, 

Picîones, 

Redones, 

Santones  (ou  Santonî), 

Senones, 

Silvanectes, 

Suessiones, 

T  masses. 
Il  n'y  a  ce  nous  semble  aucun  rapport  entre  les  accusatifs  pluriels 
gaulois  en  -as,  et  les  termes  géographiques  Baiogas,  Durocas,  Trecas 
qu'on  trouve  dans  les  monnaies  mérovingiennes,  dans  la  notice  des  cités 
de  la  Gaule  et  dans  Grégoire  de  Tours  (D.  B.,  II,  2,  318,  407).  Ces 
derniers  mots  sont,  suivant  moi,  quant  à  la  forme,  au  nominatif  singulier. 
Le  nominatif  singulier  des  thèmes  consonantiques  se  formait  par 
l'addition  d'un  -s  final.  Le  nominatif  singulier  de  Trecasses,  Bajocasses, 
Durocasses  aurait  élé  régulièrement  Trecass-s,  Baiocass-s,  Darocass-s.  Mais 
il  est  impossible  de  prononcer  ainsi  trois  5  à  la  fin  d'un  mot.  On  aura 
donc  dit  au  nominatif  singulier  Trecas,  Baiocas,  Durocas.  Comparez  le 
latin  as  pour  ass-s,  génitif  assis.  Peut-être  est-ce  par  une  forme  celtique 
analogue^  Juras,  Jurass-is  qu'on  doit  expliquer  les  formes  si  variées  du 
nom  du  mont  Jura  dans  les  textes  latins  et  grecs  où  il  est  par  exemple 
tantôt  de  la  première  déclinaison,  accusatif  Juram,  tantôt  de  la  seconde, 
nominatif  Jurassus  (Gr.  C  »,  p.  786).  Quoi  qu'il  en  soit,  dans  la  notice 

22 


^24  Influence  de  la  déclinaison  gauloise 

des  cités  de  la  Gaule  (D.  B.,  t.  II,  p.  2  B),  on  lit  :  civitas  Baiogas.  Je 
crois  reconnaître  dans  Baiogas  un  adjectif  au  nominatif  singulier,  s'accor- 
dant  avec  civitas. 

Mais  cette  forme  s'est  ensuite  pétrifiée  et  s'est  employée  à  tous  les 
cas.  C'est  ainsi  que  Grégoire  de  Tours  a  écrit  :  Trccas  Campaniœ  urbem 
(D.  B.,  II,  318  A);  et  qu'on  lit  dans  l'Epitome  :  Trecas  junxerunt  (D. 
B.,  II,  407  B)  et  dans  la  Notitia  dignitatum  :  Praefectus  Laetorum... 
Baiogas  (D.  B.,  I,  128  B).  Cela  ne  doit  pas  étonner  quand  on  voit  à  la 
même  époque  l'accusatif  pluriel  en  -as  de  la  3"  déclinaison  faire  fonction 
de  génitif  et  d'ablatif. 

L'accusatif  pluriel  en  -as  des  thèmes  consonantiques  n'est  usité  dans 
la  période  mérovingienne  que  pour  un  petit  nombre  de  noms  de  lieux. 
Il  était  trop  contraire  au  système  général  de  la  déclinaison  latine  pour 
s'étendre  aux  thèmes  consonantiques  importés  en  Gaule  par  les  conqué- 
rants romains. 

Mais  il  y  a  dans  la  langue  latine  de  l'époque  mérovingienne  certains 
usages  que  les  grammairiens  classiques  qualifient  à  bon  droit  de  solé- 
cismes  et  qui  nous  paraissent  dus  à  l'influence  de  la  tradition  celtique. 

Mettons  en  regard  les  désinences  latines  et  les  désinences  celtiques  de 
la  première  déclinaison,  c'est-à-dire  des  thèmes  féminins  en  -a. 

Celtique. 
Sing.  Nom.  -a  -a 

-es 
-i 
-an 


Latin. 

Nom. 

-a 

Gén. 

-ae 

Dat. 

-ae 

Ace. 

-am 

Abl. 

-a 

Nom. 

-ae 

Gén. 

-arum 

Dat. 

-is,  -abus 

Ace. 

-as 

Abl. 

-is,  -abus 

Plur.  Nom.  -ae  -as 

-an 
-ahis 
-as 


A  l'époque  mérovingienne  011  les  cas  régimes  tendent  à  se  confondre 
en  un,  la  flexion  du  cas  sujet  présente  à  elle  seule  autant  d'importance 
qne  celles  de  tous  les  cas  régimes  réunis.  Nous  remarquerons  qu'au 
singulier  le  nominatif  latin  a  la  même  désinence  que  le  nominatif  celtique. 
Au  pluriel,  tandis  que  le  nominatif  latin  se  caractérise  surtout  par  l'ab- 


sur  la  déclinaison  latine.  325 

sence  d'-5  finale,  le  nominatif  gaulois  se  termine  par  un  -s  ;  sa  flexion  est 
identique  à  celle  de  l'accusatif  -as. 

Or  à  l'époque  mérovingienne  les  nominatifs  pluriels  de  la  première 
déclinaison  en  -as  se  multiplient  dans  les  monuments  latins  de  la  Gaule, 
savoir  ; 

1°  Dans  les  diplômes  mérovingiens  : 

vacuas  et  inanis  permanirent  pour  vacuae  et  inanes  permanerent,  Tardif, 
Monuments  historiques,  n°  15,  1.  4; 

uîras(]ue  partis  vise  fuaerunt  accepisse  pour  utraeque  partes  visac  fuerunt 
accepisse,  n"  1 5,  1.  $  ; 

nostras  equalis  precepcionis  locuntur  pour  nostrae  aequales  praeceptiones 
loquuntur,  n"  22,  1.   17. 

eas...  debent  confirmare  pour  eae  debent  confirmari,  n"  39,  1.  1  ; 

ipsas  donacionis  veracis  aderant  pour  ipsae  donationes  veraces  aderant, 
n°  42,  1.  7. 

rotaticus  vel  reliquas  reddebucionis  pour  rotaîicus  vel  reliquae  redebitiones, 
n"  47,  1.  9. 

quae  conlatas  vel  donatas  fuerunt  ...  abstractas  vel  dismanatas  fuerunt 
pour  quae  conlatae  vel  donatae  fuerunt  ...  abstractae  vel  dis manatae  fuerunt, 
n"  $4,  1.  5  et  6; 

2"  Dans  les  formules  ; 

reliquas  naîiones  sub  tuo  regimini  et  gubernatione  decant  pour  reliquae 
nationes  sub  tuo  regimine  et  gubernatione  degant,  Rozière^  VII; 

si  aliquas  causas  adversus  eum  vel  suo  mittio  surrexerint  pour  si  aliquae 
causae  adversus  eum  vel  suum  missum  surrexerint,  IX; 

si  aliquas  causas  fuerint  quas  ...  recte  definitas  non  fuerint,  eas  ...fiant 
suspensas  vel  reservatas  pour  si  quae  causae  fuerint  que  ...  recte  definitae  non 
fuerint,  eae  ...fiant  suspensae  vel  reservatae,  X; 

villas  ...  qui  in  antca  fuerint  conlatas  pour  villae  ...  quae  in  antea  fuerint 
collatae,  XX; 

quia  conjunxerunt  mihi  necligencias,  pour  quia  conjunxerunt  me  negli- 
gentiae,  XL VIII; 

quia  conjunxerunt  mihi  culpas  pour  quia  conjunxerunt  me  culpae,  XLIX; 

reliquas  vero  epistolas  vacuas  et  inannis  permaneant  pour  reliquae  vero 
epistolae  vacuae  et  inanes  permaneant,  CXXIX; 

qualiscumque  ...  epistolas  ...  firmatas,  ostensas  fuerint  vacuas.  perma- 
neant pour  qualescumque  ...  epistolae  ...  firinatae,  ostensae  fuerint,  vacuae 
permaneant,  CXXIX; 

qualis  causas  mihi  oppresserunt  pour  quales  causae  me  oppresserunt , 
CXXX; 


J26  Influence  de  la  déclinaison  gauloise 

(Quantum  ipsas  res  inmelioratas  valuerint  pour  cjuantum  ipsae  res  immelio- 
ratae  valuerint,  CCLXIX; 

alias  praecarias  ...  fuerint  renovaîas  pour  aliae  precariae  ...  fuerint 
renovatae,  CCCXL; 

commuîaîionis  duo  une  tenore  conscriptas  ...  firmas  et  inviolatas  perma- 
neant  pour  cummutationes  duo  uno  tenore  conscriptae  firmae  et  inviolatae 
permaneanî,  CCGVII; 

3°  Dans  divers  textes  de  la  loi  salique  : 

omnes  res  suas  erunt  pour  onines  res  suae  erunt,  Pardessus,  p.  31,65, 
109. 

Hoc  sunt  septem  causas  pour  haec  sunt  septem  causae,  p.  3  50. 

Incipiunt  sententias  pour  incipiunt  sententiac,  p.  355. 

Telle  est  la  forme  qui  a  triomphé  dans  les  langues  néo-celtiques  de  la 
Gaule. 

Le  provençal  termine  en  -as  le  cas  sujet  des  noms  de  la  première 
déclinaison.  Le  français  archaïque  le  termine  en  -es  =  -as.  Cette  dési- 
nence nous  paraît  d'origine  celtique. 

Les  autres  désinences  celtiques  des  thèmes  féminins  en  -a  n'ont  pas 
eu  aussi  bonne  fortune.  Signalons  cependant  l'identité  de  la  désinence 
celtique  -/  du  datif  singulier  avec  la  désinence  du  datif  latin  vulgaire 
de  la  première  déclinaison. 

On  lit  dans  des  formules  : 

fides  reifacti,  c'est-à-dire /acfae,  Rozière,  CCLXVIII; 

basilici  pour  basilicae,  CCCXXXIX. 

Passons  à  la  seconde  déclinaison. 

§3. 

Voici  le  tableau  des  désinences  latines  et  gauloises. 

Gaulois. 
-os 
"i 
-u 
-on 


-01 
-on 
-abos 
-us 


Latin. 

Sing.  Nom. 

-us 

Gén. 

-i 

Dat. 

-0 

Ace. 

-um 

Abl. 

-0 

Plur.  Nom. 

-i 

Gén. 

-orum 

Dat. 

-is 

Ace. 

-os 

Abl. 

-is 

sur  la  déclinaison  latine.  527 

On  sait  comment  deux  nombres  et  deux  cas  se  distinguent  par  la  loi 
de  Vs  dans  le  français  archaïque  et  dans  le  provençal.  Pour  la  première 
déclinaison  cette  loi  est  établie  conformément  à  l'usage  celtique,  contrai- 
rement à  l'usage  latin  ;  c'est-à-dire  que  le  français  archaïque  et  le  pro- 
vençal donnent  un  s  final  au  cas  direct  du  pluriel,  quoique  le  nominatif 
pluriel  latin  n'ait  pas  à's  final  et  parce  que  cet  s  final  existe  au  même 
cas  en  celtique.  Si  nous  passons  à  la  seconde  déclinaison  nous  trouvons 
le  latin  et  le  gaulois  d'accord  pour  terminer  en  -s  le  nominatif  singulier 
et  pour  supprimer  1'^  final  du  nominatif  pluriel;  de  même  le  cas  direct 
français  archaïque  et  provençal  prend  un  s  final  au  singulier  et  n'en  prend 
pas  au  pluriel  de  cette  déclinaison.  Il  est  probable  que  l'influence  décisive 
a  été  ici  comme  dans  la  première  déclinaison  celle  de  l'élément  celtique. 

Le  français  archaïque  et  moderne  a  conservé  trois  accusatifs  singuliers 
de  cette  déclinaison  :  «mon,  »  «ton,  »  «son.  »  La  désinence  est 
identique  à  la  désinence  gauloise.  On  ne  peut  se  contenter  de  la  cir- 
constance que  les  dissyllabes  meum,  tuum,  suum  avaient  été  dans  la 
langue  vulgaire  réduits  à  l'état  monosyllabique  (Brachet,  Dictionnaire  aux 
mots  mon,  ton,  son).  Cette  explication  est  insuffisante  puisque  le  mono- 
syllabe sum  première  personne  du  présent  de  l'indicatif  du  verbe  esse,  a 
donné  «  sui  »  aujourd'hui  «  suis  »  (Bartsch,  Chrestomathie,  p.  484).  On 
doit  voir  dans  la  conservation  de  la  nasale  finale  de  «  mon,  »  «  ton,  » 
«  son,  ))  le  résultat  d'une  influence  celtique. 

Les  langues  néo-celtiques  tant  du  rameau  irlandais  que  du  rameau 
breton  ont  gardé  de  nombreux  débris  de  Vn  finale  de  l'accusatif  que  nous 
montrent  les  inscriptions  gauloises  (Stokes,  Beitr.,  t.  VII,  p.  70).  A 
côté  du  gaulois  celicnon,  canecosedlon,  on  peut  mettre  le  gallo-latin  tu- 
mulon  qu'on  trouve  dans  une  des  Inscriptions  chrétiennes  recueillies  par 
M.  Le  Blant,  comme  le  français  archaïque  «  meon  »  :=  meum  des  fa- 
meux serments  de  Strasbourg.  Les  langues  néo-celtiques  autres  que  le 
français  archaïque  et  le  provençal  ont  perdu  toute  trace  de  la  nasale 
finale  de  l'accusatif.  La  plupart  des  populations  de  race  latine  avaient 
cessé  de  prononcer  cette  nasale  dans  la  langue  vulgaire  bien  des  siècles 
avant  la  naissance  du  français.  C'est  un  fait  que  M.  Corssen  a  établi  par 
de  nombreux  exemples  (^Aussprache^,  t.  I,  p.  267-276).  Si  l'on  n'admet 
pas  l'action  persistante  d'une  tradition  gauloise,  comment  expliquer  l'ex- 
ception qui  distingue  la  France? 

Les  faits  qui  suivent  peuvent  se  concevoir  sans  l'intervention  de  cette 
tradition  gauloise,  mais  ils  aideront  à  comprendre  la  fusion  du  gaulois  et 
du  latin. 

En  regard  du  datif-ablatif  latin  en  -0  le  gaulois  met  son  datif  en  -u. 


328  Influence  de  la  déclinaison  gauloise 

L'opposition  entre  les  deux  langues  est  moins  grande  qu'elle  ne  paraît  : 
car  le  latin  avait  à  la  seconde  déclinaison  un  ablatif  vulgaire  en  -u  pour 
-0.  Déjà,  suivant  une  remarque  d'Aulu-Gelle,  Cicéron  avait  dit /re/u  et  pec- 
catu  pour  freto  elpeccato.  M.  Schuchardt,Fo/:a//'5mu5,t.  I,p.9i-94,  a  réuni 
nombre  d'exemples  analogues;  et  en  Gaule  à  l'époque  mérovingienne  on 
trouve  : 

Dans  les  diplômes  : 

îeleneu  pour  îeUneo,  Tardif,  n"  44,  1.  10,  i  ^,  26; 

eu  pour  eo,  n°  44,  1.  3;  n"45,  1.  5,  y,  n"  48,  1.  3  ; 
Dans  les  formules  : 

furtu  pour  furto,  Rozière^  L; 

sociatu  pour  sociato,  CCXV  ; 
Dans  les  inscriptions  : 

locu  pour  loco,  Le  Blant,  I,  89; 

rictu  pour  recto,  II,  12  ; 

clarissimu  pour  clarissimo,  II,  16; 

titolu  pour  titolo,  \\,  204. 

Le  latin  terminait  en  -os  l'accusatif  pluriel  de  la  2''  déclinaison.  L'ac- 
cusatif pluriel  celtique  en  Irlande  et  en  Gaule  se  terminait  en  -us.  (Voir 
M.  Stokes  :  Der  Accusaûv  pluralis  in  den  britisclien  Sprachen  dans  les 
Beitr.,  t.  VII,  p.  69-71).  Mais  il  y  avait  aussi  un  accusatif  pluriel  latin 
vulgaire  de  la  2''  déclinaison  en  -us.  M.  Schuchardt,  Vokalismus,  t.  Il, 
p.  9 $-97,  a  réuni  un  grand  nombre  d'exemples  de  cet  accusatif.  Cet 
accusatif  était  fort  usité  en  Gaule  à  l'époque  mérovingienne  où  des  sou- 
venirs celtiques  ont  pu  contribuer  à  le  répandre.  On  lit  dans  les  diplômes  : 

infra  murus  pour  intra  muros,  Tardif,  n"  4, 1.  3  ; 

ejus  manus  dicuntur  tripedare  illi  calamus  (ses  mains,  dit-on,  lui  laissent 
trembler  les  plumes),  n"  13,  1.  4; 

ad  matrigolarius ,  pour:  ad  matricularios,  n"  13,  1.  4; 

tessauriciate  vobis  îessaurus,  pour  :  thesaurizate  vobis  tliesauros,  n°  19, 
1.  2; 

facile  vobis  aniicus,  c'est-à-dire:  amicos,  n"  19,  1.  4,  5; 

nus  mansellus  alicus  visi  fuemus  concessisse;,  pour:  nos  mansellos  aliiiuos 
vis!  fuimus  concessisse,  n"  20,  1.  3  ; 

ipsus  mansellus  ...  habiat,  pour:  ipsos  mansellos  habeat,  n"  20, 1.  8-1 1; 

ante  hus  annus,  pour  :  ante  hos  annos,  n"  30,  1.  4;  n"  5 1 ,  1.  2  ; 

Solidus  cento  ...  concessissit,pour:  solidos  centum  concessisses,n"  51, 
1.  3-6; 

solidus  cento,  pour:  solidos  centum,  n"  34,  1.  7  et  1 3  ; 

solidus  duccntus,  pour  :  solidos  duccntos,  n"  34;,  1.  7  et  1 3  ; 


\ 


sur  la  déclinaison  latine.  529 

ad  missus,  pour:  ad  missos,  n"  34,  1.  7; 

ad  successoris  nostrus,  pour:  ad  successores  nostros,  n"  34,  1.  1  $  ; 

ante  os  tz«n/w,  pour:  ante  hos  annos,  n"  3$,  1.  5  ; 

/^5u^  solïdos  s excentus...,  pour:  /p^05  solidos  sexcentos,  n°  35,1.  6-7; 

monachiis  ...  intromittere,  pour:  monichos  intromittere,  n"  56,  1.  5; 

presbiteros  aut  diaconus  vel  reliquos  gradus  ordenandus,  pour  :  presby- 
îeros  aut  diaconos  vel  reliquos  gradus  ordinandos,  n"  36,  1.  8; 

valente  soledus  duodece,  pour:  valentem  ^o/fio^ duodecim,  n"4o,  1.  29; 

ingenuus  esse,  pour:  ingenuos  esse,  n°  40,  1.  80; 

ad  Parisius,  pour:  ad  Parisios,  n"  44,  1.  19; 

missus  nostros,  pour:  missos  nostros,  n"  54,  1.  9; 
Dans  les  formules  : 

soledus  tantus  exsolvat,  c'est-à-dire:  solidos  tanîos,  Rozière,  XLV; 

valente  soledus  tantus,  c'est-à-dire  :  solidos  tanîos,  XLVI  ; 

civis  romanus  ipsos  eos  esse,  c'est-à-dire:  cives  romanos,  LXII  ; 

soledus  tantus  ...  componat,  c'est-à-dire:  solidos  tanîos  CXIV; 

inter  illus  et  illus  germanus,  pour  :  inter  illos  et  illos  germanos,  CXXV  ; 

ad  legitimus  nostros  revertatur  heredis,  pour  :  ad  legitimos  nostros  rever- 
tatur  haeredes,  CXXIX; 

animus  adortamus,  pour  :  animos  adhortamus,  CLII  ; 

grèges  armentorum  duus ...  caballus  tantus,  pour  :  grèges  armentorum 
duos  ...  caballos  tanîos,  CCXV  ; 

lectus  vestitus  tantus,  pour  :  lectos  vesîiîos  îanîos,  CCXXI  ; 

cedo  tibi  caballus,  pour:  cedo  tibi  caballos,  CCXXII  ; 

dono  tibi  ...  drappus,  c'est-à-dire:  drappos,  CCXLIII; 

nec  nos  contingit  ultimus  dies  inordinaîus,  pour  :  ne  nos  contingat 
ultiraus  dies  inordinatos,  CCXLVII; 

inter  conjngaîus,  pour:  inter  conjugaîos,  CCXLVIII; 

Wu/ui  allegare,  pour:  îiîulos  allegare,  CCXLVIII; 

ad  nostros  legiiimus  revertatur  heredis,  pour  :  ad  nostros  Icgiîimos  rever- 
tatur haeredes,  CCXLVIII  ; 

ferente  modius  îanîus,  pour:  ferentem  modios  tanîos,  CCLXXX; 

t^tî/u5  habuit  fidejussores, c'est-à-dire:  datos,  CCCCXLIV; 
Dans  la  loi  salique  : 

Si  quis  ...  caballus  ...  invenerit,  c'est-à-dire:  caballos,  Pardessus,  p.  7  , 

très  colpus,  pour  :  très  colap'ws,  p.  11; 

citra  Ligare  aut  Carbonarius,  pour:  citra  Ligerim  aut  Carbonarios,  p.  58. 
Dans  les  inscriptions  : 

annus,  pour:  annos.  Le  Blant,  t.  I,  p.  31 ,  78,  79,  80,  116,  1 50,  151, 
152,   3)5,  346,  370,  372,  392,  395>  420,  437,  45',  455,  4^1,  462, 


î?o  Influence  de  la  déclinaison  gauloise 

489,  493,  t.  Il,  p.  8,  10,  23,  27,  59,  41,  42,  62,  76,  79,  103,  105, 

107,  116,  117,  122,  123,  134,  139,  150,  151,  etc. 

anus  pour  annos,  I,  37,  153,  454; 

pluremus  pour  plurimos,  I,  183; 

^/2e;?u5  pour  rt;2/mo5,  II,  12; 

férus  pour  /ero5,  II,  12; 

Dans  un  des  fragments  de  Saint-Avit  que  M.  Delisle  a  publiés  d'après 
les  papyrus  du  vr'  siècle  conservés  à  la  Bibliothèque  nationale  : 

corvos  ...  depulsus,  c'est-à-dire  depulsos,  p.  24. 

Naturellement  cet  usage  s'étend  aux  noms  propres  de  lieux.  Nous 
avons  déjà  cité  un  exemple  :  Parisius  pour  Parisios  d'après  un  diplôme. 
Il  y  en  a  plusieurs  autres.  Notre  savant  et  malheureux  ami  M.  Jacobs  a 
déjà  observé  que  dans  Grégoire  de  Tours,  Paris  se  dit  toujours  Parisius; 
que,  dans  Frédégaire,  Tours  en  outre  se  dit  Turonus  et  Thoronus  et 
Reims  Renms  {Géographie  de  Grégoire  de  Tours,  2''édition  ,  p.  141,  185). 

Ainsi  on  lit  dans  Grégoire  de  Tours  : 

raro  Pamm^  visitans,  D.  Bouquet,  II,  185  C; 

apud  Parisius,  D.  B.,  II,  183  C,  243  A; 

Parisius  venlt,  D.  B.,  II,  340  B; 

veniens  Parisius,  D.  B.,  II,  340  B; 

Parisius  ingredi,  D.  B.,  II,  351  B; 

Parisius  accedens,  D.  B.,  II,  369  C,  381  D; 
Et  dans  Frédégaire  : 

perrexit  Parisius,  D.  B.,  II,  417C; 

Remus  ...  fecit  confugium,  D.  B.,  II,  445  C; 

Chlodoveum  Thoronus  Xvamm\s\t,  D.  B.,  Il,  408  C; 

Turonus  ...  de  potestate  Chilperici  absîuUt,  D.  B.,  II,  407  A. 

Dans  la  langue  latine  de  l'époque  classique  on  aurait  dit  Parisios,  Tu- 
ronos,  Remos. 

A  l'époque  mérovingienne  l'accusatif  vulgaire  en  -us  fait  fonction  de 
génitif  et  d'ablatif  suivant  l'usage  alors  général  d'employer  les  uns  pour 
les  autres  les  cas  régimes. 

On  trouve  déjà  dans  l'itinéraire  de  Jérusalem  : 

civitas  Auscius,  pour:  civitas  Ausciorum. 

On  lit  dans  les  légendes  des  monnaies  mérovingiennes  oii  M.  de  Bar- 
thélémy a  recueilli  la  liste  de  noms  de  lieux  publiée  par  lui  dans  la 
Bibliothèque  de  l'École  des  chartes,  6"  série,  t.  I'''  : 

Arvermis  civis  pour  Arvernorum  civitaîis; 

Meldus  civetati  pour  Meldorum  civitatis; 

Parisius  cive  pour  Parisiorum  civitatis  ; 


sur  la  déclinaison  latine.  331 

Renms  civet  pour  Remonim  civitatis; 

Turonus  civi  pour  Turonoruin  civitatis. 

Je  ne  multiplierai  pas  davantage  les  citations.  Il  me  paraît  pro- 
bable que  ces  noms  de  peuples  gaulois  ont  conservé  la  forme  de  l'accu- 
satif pluriel  de  la  langue  nationale.  Et  cette  forme,  pétrifiée  quand  eut 
disparu  le  sentiment  des  nuances  qui  distinguaient  les  cas  indirects,  cette 
forme  employée  indifféremment  pour  tous  les  cas  régimes,  persista  fort 
avant  dans  le  moyen-âge,  notamment  à  la  date  de  lieu  des  chartes.  Il 
est  inutile  de  parler  ici  des  innombrables  diplômes  que  les  rois  capétiens 
ont  donnés  à  :  Parisius,  c'est-à-dire  apud  Parisios  ou  Parisiis. 

Je  terminerai  en  signalant  les  nominatifs-accusatifs  pluriels  vulgaires 
en-is  de  la  troisième  déclinaison  latine.  On  en  trouve  en  Gaule  à  l'époque 
mérovingienne  d'innombrables  exemples.  Ils  sont  employés  indifférem- 
ment pour  les  thèmes  consonantiques  et  pour  les  thèmes  en  -i  que  la 
langue  classique  des  Romains  a  rangés  un  peu  pèle  mêle  dans  cette  décli- 
naison. La  désinence  de  ces  nominatifs-accusatifs  pluriels  latins  vulgaires 
est  identique  à  celle  des  thèmes  celtiques  en  -/,  telle  quelle  a  été  déter- 
minée par  M.  Ebel  (Be//r.  t.  I,  p.  179).  Cette  concordance  peut  être  une 
des  raisons  pour  lesquelles  d'une  part  les  Gaulois  ont  si  facilement  appris 
la  langue  latine  et  d'autre  part  nous,  aujourd'hui,  avons  tant  de  peine  à 
retrouver  et  à  rassembler  les  ruines  enfouies  et  dispersées  du  gaulois. 

H.  D'ARBOIS  de  JUBAINVILLE. 


23 


THE    MANUMISSIONS 


BODMIN     GOSPELS. 


The  following  manumissions  are  found  in  the  so-called  Bodmin  Gos- 
pels, a  ms.  in  the  British  Muséum,  marked  Add.  Ms.  9067,  and 
were  written  in  the  tenth  or  the  beginning  of  the  eleventh  century. 
They  hâve  been  four  times  printed  :  i)  by  Davies  Gilbert  in  the  third 
volume  of  his  Parochial  History  of  Cornwall,  pp.  408-414;  2)  by 
Kemble,  in  his  Codex  Diplomaticiis  Aevi  Sax.  IV,  308-317;  3)  by  Oliver  in 
his  Monasticon  Dioecesis  Exoniensis.  p.  43 1-4  3  3;  and  4)  by  Thorpe  in  his 
Diplomatariiim  Angliciini  j€vi  Saxonici,  London,  186$,  p.  623-631.  Gil- 
bert's  édition  isshamefully  inaccurate,  and  none  of  the  others  are  free 
from  mistakes  in  the  Cornish  names.  The  objects  of  the  présent  édition 
are,  first,  to  correct  thèse  errors,  and,  secondly,to  render  generally  ac- 
cessible to  Celticscholars  the  best  materials  available  for  the  study  of  old- 
Cornish  phonetics.  I  hâve  spelt  the  proper  names  with  initial  capitals 
and  punctuated.  For  want  of  proper  types,  the  thorn  of  the  ms.  has 
been  represented  by  th,  the  barred  d  by  d.  —  The  old-Welsh  names 
which  I  hâve  compared  are  taken  from  the  Liber  Landavensis;  the  old- 
Breton  names  from  M.  de  Courson's  excellent  édition  of  the  Cartulaire 
de  l abbaye  de  Redon,  Paris,  1863. 

Whitley  Stokes. 

Dublin,  November  20,  1871. 


The  Manumissions  in  the  Bodmin  Gospels.  3  ^  3 

F"  i  =  .  Haecsuntnomina  illorumhominum,  Hûnaetsororillius  Dolo,  quos 
liberavit  Byrhtflasd,  pro  redemptione  animae  suae  super  altare  sancti 
Petroci,  coram  istis  testibus  :  Leofric  prespiter,  Budda  prespiter,  Mor- 
hay//;o  prespiter,  Deui  prespiter,  Hresmen  diaconus,  Custentin  laicus, 
Wurlowen  laycus,  ut  libertatem  habeant  cum  semine  suo  sine  fine  ;  et 
maledictus  sit  qui  fregerit  hanc  libertatem. 

Ruraun  liberavit  Haluiu  super  altare  sancti  Petroci,  coram  istis  testi- 
bus :  clerici  sancti  Petroci. 

Budic,  Glowmaeti  quos  liberavit  Uulfsie  episcopus  super  altare  sancti 
Petroci. 

Hoc  est  nomen  qui  liberavit  Duihon  super  altare  sancti  Petroci 
Leofstan,  coram  istis  testibus  :  Byrhsie  presbiter,  Morhatio  diaconus, 
Britail,  lohann. 

'|-  Haec  sunt  noniina  illarum  feminarum  quas  liberavit  Wulsige  :  Ce- 
moyre,  Rum,  Addalburg,  et  Ogurcen^  coram  istis  testibus  viden[tibus  :] 
Osian  presbiter,  Cantgethen  diaconus,  Leucum  clericus. 

Wulfsige  episcopus  liberavit  ludprost  cum  filiis  eius,  pro  anima  Ead- 
gar  rex,  et  pro  anima  sua,  coram  istis  testibus  :  Byrhsige  presbiter, 
Electus  presbiter,  Abel  presbiter,  Morhatfe  diaconus,  Canret/eo  diaconus, 
Riol  diaconus. 

Hec  sunt  nomina  illorum  hominum  quos  liberavit  ^^Ifsie  super  altare 
sancti  Petroci,  pro  redemtione  anime  sue:  Onwen,  Ewsannec,  lesu, 
coram  istis  testibus  :  Byrhtsie  presbyter,  Mermen  presbyter,  Agustinus 
lector,  Movhaitho  diaconus,  Riol  diaconus. 

Hoc  est  nomen  illius  femine  Gluiucen  quam  liberavit  Ordulf,  pro  ani- 
ma ^Ifsie,  super  altare  sancti  Petroci,  coram  istis  testibus  :  Morhaiio 
diacono,  Tithert  clerico. 

TliQS  ys  i/zses  mânes  nama  de  Byrhsie  gefreade  et  Petrocys  stowe  : 
Byhstan  Hâte  Bluntan  sunu,  on  JEthéhiàe  gewitnyse  hys  agen  wif,  7  on 
Byrhisi  ys  msesepreostas,  7  on  Riol,  7  Myrmen,  7  Wunsie,  Morhxththo, 
7  Cynsie  preost. 

F»  1  b.  Hecsuntnominamulierum,Medhuil,Adlgun,  quas  liberavit  Ead- 
munt  rex,  super  altare  sancti  Petroci,  palam  istis  testibus  :  Cangueden 
diaconus,  Ryt  clericus,  Anaoc,  Tithert. 

Haec  sunt  nomina  hominum  quas  liberavit  Eadmund  rex,  pro  anima 
sua,  super  altare  sancti  Petroci  :  Tancwoystel,  Wenerie^,  coram  istis 
testibus  :  Wulfsie  presbyter,  Adoyre,  Milian  clericus;  atque  in  eadem 
die  mandavit  hanc  feminam  Arganteilin  eisdem  testibus. 

Haec  sunt  nomina  hominum  quos  liberaverunt  clerici  Petroci  :  Sul- 
leisoc,  Ourduy//ial,  pro  anima  Eadgari  régis,  super  altare  sancti  Petroci, 


^^4  ^^'^  Maniimisswns  in  tlie  Bodmin  Gospels. 

in  festivitate  Sancti   Micaelis,  coram  istis  testibus  :   Byrhsie  presbiter, 

Osian  presbiter,  Austius  lector,  Riol  diaconus. 

Hoc  est  nomen  mulieris  Meonre  quam  liberavit  Ullfrit  pro  anima  sua, 
super  altare  sancti  Petroci,  coram  istis  testibus  :  Mermen  presbiter^ 
Morhaitio  diaconus,  Guai^frit  clericus. 

j  Hec  sunt  nomina  mulierum  quas  liberavit  Wulfsie  episcopus  et  cle- 
rici  sancti  Petroci  :  Proscen,  Wuencen,  Onncum,  lilcum,  super  altare 
Sancti  Petroci,  coram  istis  testibus  :  Byrhsie  presbiter,  Rio!  diaconus, 
Morha^o  diaconus,  WuaJrit  clericus. 

-J-  Hoc  est  nomen  illius  mulieris  Wencene^iel  quam  liberavit  Ordgar 
dux,  pro  anima  sua,  super  altare  Petroci  sancti,  coram  istis  testibus  : 
Wulfsige  episcopus,  Leumarh  presbiter,  Gnfmd  presbiter,  Morhaii/o 
diaconus. 

F"  2a. -|- Hoc  est  nomenilliushominislliu//!,  cum  seminesuo,  quem  libe- 
ravit JEthehxd  rex,  super  altare  sancti  [Petroci],  coram  istis  testibus  : 
JEthelwerd  dux  testis,  Osolf  prepositus  testis,  Mermen  prespiter,  Riol 
prespiter,  Ret  clericus,  Lecem  clericus,  Ble?/;ros  clericus. 

F"  2b.  j-  Hoc  est  nomen  istius  hominis  Madfu?/;  quem  liberavit  lofa,  pro 
redemtione  animae  suae,  super  altare  sancti  Petroci,  coram  istis  testibus 
videntibus.  Tittherd  presbiter,  Atha.\berth  presbiter,  Budda  presbiter, 
Brytthael  presbiter,  Cenmyn  presbiter  :  hii  sunt  laici  :  Tetlnon  filius 
Wasso,  et  Ungust  Cilifri.  Et  quicumque  fregerit  hanc  libertatem,  anathe- 
ma  sit  ;  et  quicumque  custodierit,  benedictus  sit. 

F"  3  a.  Hec  sunt  nomina  illarum  feminarum  quas  liberavit  Ermen,  pro  anima 
matris  illius  :  Guenguiu  et  Elisaued,  super  altare  sancti  Petroci, 
coram  istis  testibus  videntibus  :  Osian  presbiter,  Leucum  clericus,  Ret 
clericus. 

F°3  ^.f  Hoc  est  nomen  istius  hominis  Tenthmn,  cum  semine  suo,  quem 
liberavit  Ordulf  filius  Brun,  super  altare  sancti  Petroci,  pro  redemtione 
anime  sue,  ut  libertatem  habeat  ab  eo  et  a  semine  suo  perpetualiter, 
coram  istis  idoneis  testibus  :  Leofric  presbiter,  Prudens  presbiter,  Adal- 
berd  presbiter,  [f''  4a]  Tittherd  presbiter,  Budda  presbiter,  Boia  diaconus,  , 
Moray?/io  diaconus.  Quicumque  fregerit  hanc  libertatem,  anathema  sit;  i 
et  quisquis  custodierit,  benedictus  sit. 

F°4b.  -|-  Hoc  est  nomen  illius  mulieris  yElfgy///  quam  liberavit  Mthx\{\xd, 
pro  anima  sua  et  pro  anima  domini  sui  ^?/i3elwerd   dux,  super  cimba- 
lum  sancti  Petroci  [f°  $a]in  villa  que  nominatur  Lyscerruyt,  coram  istis  tes- 
tibus videntibus  ÂCiZ/sestan  presbiter,  Wine  presbiter,  Dunstan  presbiter,   - 
Goda  minister,   ^Ifwerd   Scirlocc,    Mthxlmne  Muff,   Ealdred  frater  1 
eius,  Eadsige  scriptor  :    et  hii  sunt  testes  ex  clericis  sancti  Petroci  : 


The  Manamissions  in  tlie  Bodmin  Gospels.  ?  3  $ 

Prudens  presbiter,  Boia  diaconus,  Wulfsige  diaconus,  Byrhsige  clericus, 

ut  libertatem , 

F  ')°^.  Et  postea  venit  JEthxlwxrd  aux  ad  monasterium  sancti  Petroci 
et  liberavit  eam,  pro  anima  sua,  super  altare  sancti  Petroci,  coram  istis 
testibus  videntibus:  Buruhwold  bisceop,  Germanus  abbas,  Tittherd  pres- 
biter, Vv'ulfsige  diaconus,   Wurgent  filius  Samuel,  Ylcaer?/ion  praeposi- 

tus,  Te//iion  consul [f°6'']  filius  Môr.  Et  ipse  adfirmavit,  ut 

quicumque  custodierit  hanc  libertatem,   benedictus  sit;  et  quicumque 
fregerit,  anathema  sit  a  Domino  Deo  celi,  et  ab  angelis  eius. 

F°  y.  Hoc  est  nomen  illius  hominis  quem  liberavit  Cenmenoc,  pro 
anima  sua,  super  altare  sancti  Petroci,  Benedic,  coram  istis  testibus  vi- 
dentibus :  Osian  presbiter,  Morhaitho  diaconus. 

F^yb.  Hoc  est  nomen  illius  [hominis].  Anaguistl  quem  Eadgar  rex  libe- 
ravit, pro  anima  sua,  super  altare  sancti  Petroci,  coram  istis  testibus 
videntibus  :  Wulfsige  presbiter,  et  Grifiu^  presbiter,  et  Conredeu  (Con- 
redei  ?)  diaconus,  et  Byrehtsige  cleric[us  et]  Elie  laicus. 

Wuenumon  7  hire  team,  Moruiv^  hire  swuster  [7]  hire  team  and 
Wurgustel  7  his  team  •  wuarun  gefreod  her  on  tune  •  for  Eadryde  cy- 
ningc  7  for  ^tielge[ard]  biscop.  an  //;as  hirydes  gewitnesse  de  her  on 
tune  syndun. 

Hoc  est  nomen  illius  hominis  quem  liberavit  Perem,  pro  anima  sua, 
Gurient,  super  altare  sancti  Petroci,  coram  istis  testibus  :  Adelces  pres- 
biter, Morhaedo  diaconus,  Guaedret  clericus.  Vale.  Vive  in  Xpo. 

F^S^j  Wunstan,  Bleiros,  Hincomhal,  Benedic,  Wurcant,  Otcer,  Onn- 
wuen,  Argantmoet,  Telent. 

f  Marh  gefreode  Ledelt  7  ealle  hire  team.-  for  Eadwig  cyningc  on  his 
aegen  reliquias  •  7  he  hie  het  laedan  hider  to  mynstere  •  7  her  gefreo- 
gian  on  Petrocys  reliquias  •  on  tliats  hirydes  gewitnesse. 

Her  kyd  on  tlnssere  bec  th.  Mihïg  bohte  anne  wifmann  Ongyne//;el 
hatte  •  7  hire  sunu  Gy^^iccael  •  aet  T/mrcilde  •  mid  healfe  punde  *  aet 
thxrç  cirican  dura  on  Bodmine  •  7  sealde  jîlilsige  portgereua  7  Mac- 
cosse  hundredesmann  un.  pengas  to  toile,  tha  ferde  vEilsig  to  the  tha 
menn  bohte  •  7  nam  hig  7  freode  uppan  Petrocys  weofede  aefresacles' 
on  gewittnesse  thissa  godera  manna*  th.  wses  Isaac  messepreosf  7  E\ed- 
cuf  messepreost  •  7  Wunning  messepreost  •  7  Wulfger  messepreost  •  7 
Grifiut^  messepreost  •  7  Noe  messepreost  •  7  Wuvthicid  messepreost  •  7 
jî^ilsig  diacon  ■  7  Maccos'  7  Te^iion  Modredis  sunu  •  7  Kynilm  •  7  Beor- 
laf  •  7  Dirling  •  7  Gratcant  ■  7  Talan  •  7  gif  hwa  ?/;as  freot  abrece  •  hebbe 
him  md  Criste  gemene.  Amen. 


3^6  The  Manumissions  in  the  Bodmin  Gospels. 

Hoc  est  nomen  illius  mulieris,  Codgivo,  quae  liberata  fuit  pro  anima 
Maccosi  centurionis,  super  altare  sancti  Petroci,  in  vigilia  Adventus  Domini, 
istis  testibus  videntibus  :  Boia  decanus,  Godricus  pr.,  Sewinus  pr.,  Eli 
diaconus,  Wulgarus  diaconus,  Godricus  diaconus,  Elwine  diaconus,  Edri- 
cus  clericus,  Elwinus,  Elwerdus,  Sicteicus,  Waso,  Wulwerdus,  et  alii 
quamplurimi  de  bonis  liominibus.  Si  quis  tam  temerarius  sit  qui  hanc 
libertatem  fregerit ,  anathema  sit  a  Deo  et  ab  angelis  eius.  Amen , 
fiat. 

F"  8^.  j  Haec  sunt  nomina  illorum  quos  liberavit pro  anima  Etgar 

rex,  super  altare  sancti  Petroci  :  Guene,  Cen,  Arganbri,  et  lunitor  de- 
dit  unum  pro  anima  Etgar  rex,  id  est  nomen,  Brethoc,  coram  istis  testi- 
bus :  Grifiud,  Loumarch  presbiter,  Gaudreit  clericus. 

Her  ky^  on  //iissere  bec  th.  ^Ifric  ^Ifwines  sunu  wolde  theowhn 
Putraele  him  to  nyd//;eowetlinge  •  îha.  com  Putrael  to  Boia  7  bed  his 
forespece  to  vElfrice  his  bretiere.  T/;a  sette  Boia//zas  spece  wii  ^Ifrice. 
Th.  wes  th.  Putrael  sealde  Mh'ice  VIII  oxa  aet  there  cirican  dura  xl 
Bodmine-  7  gef  Boia  sixtig  penga  for  there  forspasce  •  7  dide  hine  sylfne 
7  his  ofspreng  aefre  freols  7  saccles  •  fram  thâm  dsege  •  w'ui  ^Ifrice  •  7 
md  Boia  •  7  -w'id  ealle  ^Elfwines  cyld  7  heora  ofspreng  •  on  i/;issere 
gewitnesse:  Isaac  messepreosf  7  Wunning  pr.*  7  Sewulf  pr.'  7  Godric 
diacon.-  7  Cufureprauosf7  Wincuf-  7  Wulfwerd-  7Gestin  ?/iesbisceopes 
stiwerd  •  7  Artaca  •  7  Kinilm  •  7  Godric  Map  •  7  Wulfger  •  7  ma  godra 
manna. 

'l  Haec  sunt  nomina  illorum  hominum  quos  liberavit  ^Ifsie,  pro 
anima  Eadgari  régis,  et  pro  anima  sua,  super  altare  sancti  Petroci  : 
Guentanet,  Cenhuitfel,  David,  Anau  prost,  coram  istis  testibus.  Byrhtsie 
presbyter,  Riol  diaconus,  Anaoc  clericus,  Tidherd  clericus,  Beniamen 
clericus. 

']-  Hoc  est  nomen  illius  mulieris  quam  liberavit  Gratcant  :  Ourdylyc 
cum  filio  suc  Wurci,  super  altare  sancti  Petroci,  coram  istis  testibus  : 
Hedyn  presbiter,  Lowenan  diaconus,  Leucum  clericos,  BleZkos  clericos, 
Boia  discipulus,  Cenmyn  clericos,  Beniammen  clericos. 

F°i  3^  Hoc  est  nomen  illius  mulieris,  id  est  Medguistyl,  cum  progenie 
sua,  id  est,  Bleidiud, Ylcer^on,  Byrchtylym,  quos  liberaverunt  clerici  sancti 
Petroci,  super  altare  illius  Petroci,  pro  remedio  Eadryd  rex,  et  pro  ani- 
mabus  illorum,  coram  istis  testibus  :  Comuyre  presbiter,  Grifiud  pres- 
biter^ Oysian  presbiter,  Loumarch  diaconus,  Wudryt  clericus,  Loucum 
clericus,  Tithert  clericus. 

F"i29b.H3ercy^on//iysonbéc//i.^.lwoldgefreodeHwatii-forhyssawle* 
a[t]  Petrocys  stow  •  a  degye  7  sefter  degye.  An[d]  ^Iger  ys  gewyt- 


The  Mannmissiom  in  the  Bodmin  Gospels.  337 

nisse-  7  Gotric  •  7  Walloti  •  7  Gryiy'ui-  7  Bley<icuf-  7  Salamair  7  hebbe 
he  Godes  curs  7  sanctus  Petrocus  •  7  aealle  welkynes  sanctas  the  th. 
brece  dad  ydon  ys.  Amen. 

F"  1 37a.  Custentin  liberavit  Proscen,  pro  anima  sua^superaltaresancti 
Petroci^  coram  istis  testibus:  Mermen  presbiter,  Rioldiaconus,Cantguei- 
then  diaconus,  Tithert  clericus,  et  aliis  multis. 

7  Wulfsieepiscopus  liberavit  Aedoc  filiam  Catgustei,  pro  anima  sua  et 
Eadgari  régis,  super  altare  sancti  Petroci  :  Cyngeit,  et  Magnus,  et  Sul- 
meath,  et  lustus,  et  Rumun,  et  Wengor,  et  Luncen,  et  Fuandrec,  et 
Wendeern,  et  Wur^ylic,  et  Cengor,  et  Inisian,  et  Brenci,  etOnwean,  et 
Rinduran,  et  Lywci.  Haec  suntnomina  illorum  hominum  illarumque  [fe- 
minarum]  quos  liberavit  Wulfsige  episcopus,  super  altare  Sancti  Petroci, 
pro  anima  sua  et  pro  anima  Eadgseri  régis. 

7  Haec  sunt  nomina  illarum  feminarum  quas  liberavit  Ermen ,  pro 
anima  matris  illius  :  id  est  Guenguiu  et  Eiisaued,  coram  istis  testibus  : 
Freoc  pr.,  et  Osian  pr.  et  Leucum  monachus. 

7  Hoc  est  nomen  illius  hominisquem  liberavit  Osferd,  pro  anima  Eat- 
gari  régis  :  Gurheter,  super  altare  sancti  Petroci,  coram  istis  testibus  : 
Comoere  episcopus,  Agustinus  lector,  Byrhsie  sacerdos. 

7  Hoc  est  nomen  [illius  hominis]  quem  liberavit  Eusebi,  pro  anima 
sua  :  Ceenguled,  super  altare  sancti  Petroci,  coram  istis  testibus  :  Gri- 
fiud,  Leumarh,  Riol. 

7  Hec  sunt  nomina  illorum  hominum  quos  liberavit  Anaoc,  pro  ani- 
ma sua  :  Otcer,  Rannoeu,  Muelpatrec,  losep,  super  altare  sancti  Petroci, 
coram  istis  testibus  videntibus  :  Cemoere  episcopus,  Osian  sacerdos, 
Leucum  clericus,  Guaedret  clericus. 

+  Haec  sunt  nomina  illorum  hominum  :  Agustin,  yElchon,  Sulcaen, 
Loi,  Milcenoc,  Guenneret,  Gurcencor,  Riol,  Anaudat,  ^Eulcen,  Gurcant, 
Cest,  JEnïud,  Oncenedl,  Lucco,  ludhent. 

F°i  37^.  f  Thés  sint  tha.  menn  the  Wulfsige  byscop  freode  ■  for  Eadgar 
cinig  7  for  hyne  sy[lfne]  •  aet  Petrocys  wefode.  Leuhelec.Welet...  nwalt. 
Beli-  losep.  Dengel.  Proswite*  Tancwuestel*  an^/îasgewitnessc  Byrhsige 
msesseprost  "  Mermen  masseprost  •  Mar  •  Catuutic  •  Wenwiu  •  Puer  • 
Me^wuistel  •  losep. 

f  Thys  syndun  thara  manna  naman  de  Wulfsige  byscop  gefreodet  aet 
Petrocys  wefode  ■  for  Eadgar  7  for  hyne  silfne  •  7  Byrhsi  ys  gewitnese 
masseprost  ■  7  Mermen  masseprost  •  7  Morhi  •  f  Diuset  7  ealle  hère  team. 

Dys  sindun  thara  manna  naman  ^e  Wunsie  gefreode  at  Petrocys  stowe 
[for]  Eadgar  cinig  •  on  ealle  ^aes  hiredys  gewitnesse  •  Conmonoc  •  larn- 
wallon  •  7  Wenwaer/Zzlon  ■  7  Maeiloc. 


5^8  The  Mannmissions  in  the  Bodmin  Gospels. 

f  Haec  suntnomina  filiorum  :  Wurcon,  Ae^an,  luneni,  Wurfodu,  Gur- 
uaret,  quorum  filii  et  nepotes  posteritasque  omnis  défend erunt  se  per 
iuramentum,  Eadgari  régis  permisu,  quoniam  accussatione  malorum  dice- 
bantur  patres  eorum  fuisse  coloni  regi[s];  Comoere  episcopo  teste, 
yElfsie  praeside  teste,  Dofagan  teste,  March  teste,  Mlînod  teste,  Byrh- 
tsie  prespiter  teste,  Mittui^f  prespiter  teste,  Abel  prespiter  teste. 

Hoc  est  nomen  illius  viri  quem  liberavit  Byrhtgyuo  :  Salenn,  pro 
anima  sua^  super  altare  sancti  Petroci,  coram  istis  testibus  :  Leof.... 
presbiter,  Osian  presbiter,  Morcant. 


GLOSSARIAL  INDEX  TO  THE   CELTIC  WORDS 

IN   THE    FOREGOING    MANUMISSIONS. 

Adoyre  i  ^. 

Mdân  12-j  ^.  a  derivative  from  aed  'ignis',  W.  aidd  zeal,  aT5oç. 

Aedoc  1 37  '"i.  'ignea'. 

Mnmd  (iEniucl,  Thorpe)  1 37  ^. 

JE\i\cen  157  =•  leg.  Aclcen?  and  cf.  0.  Bret.  Aclaiin,  Aeluuod,  Cum-acl, 

Tut-aeL 
Anaguistl  7  ^,  (Kemble  :   Anaguiftl)^  leg.  Anauguistl,  ma  cf.  0.   Bret. 

Anau-britou,  -bud,  -car,  -lien,  -hiart,  -hocar,  etc.,  etc.  Doit-anau, 

Cloes-anau,  etc.  anaa^^W.  anaw  harmonia,  poesis;  see  Gluck,  K. 

N.  106.  Gr.  C.2  129.  132-3. 
Anaoc  i  ^^  8  i',  =  0.  W.  Anauoc  (=  "Anavàcos)  Lib.  Land.  1 58. 
Anauprost  8  ^.  see  Anaguistl. 
Anaudat  {Anauclat,  Thorpe)  137  ^  pater  harmoniae;  see  Anaguistl,  and 

cf.  0,  W.  tataguen  (now  tâd  awen)  Nennius. 
Arganbri  8  ^.  cf.  Argan-lis,  Domesday  (Cornwall)  7  '. 
Arganteilin  1  ^.  ^silver-elbow'. 
Argantmoet  8  a.  This  and  the  two  preceding  names  are  compounds  of 

argant  'silver',  Gaulish  argento-  Gr.  C,^  845,  W.  ariant,  Ir.  argat, 

airget.  Cf.  the  O.  Bret.  names  Argant-hael,  -Ion,  -louuen,  -monoc, 

etc. 
Austius  I  ^. 

Beli  137  b.  also  a  Welsh  name.  Gr.  C.^  86.  Br.  "ili. 
Benedic  8  -'.  borrowed  from  benedictusas  dylyc  infra  from  dilectas. 
BleJcuf  8  a.  better  Bley^ifcuf  1 29  ^\ 
Ble(iros2  %  8  ^'  Ble//2ros  2='  8  ^.  Hère  and  in  the  preceding  name,  we  hâve 


I 


The  Manumissions  in  î::e  Bodmin  Gospels.  339 

compounds  of  bled!i^=W.  blaidd,  Br.  bleiz,  '^wolf.  In  the  Cornish 

vocabulary  the  word  is  written  bleiî,  leg.  bleith.  The  Old  Breton 
.  names Bledic,  Bleid-bard,  Fou4/e/^  containthis  word; soin  L.Land. 

.nledud,  Bledris,  Bledbui,  Bledgur,  Arth-bleid,  Gr.  C*  8$,  86. 
Bodmin  8  ^.  the  name  of  a  Cornish  town. 
Boia  4^8''.  occurs  in  Domesday  as  the  name  of  a  clerk  of  S.  Petroc  : 

it  is  perhaps  unceltic. 
Brenci  137  ^  The  first  syllable  is  obscure  to  me  :  the  second  seems  ci 

'hound':  so  Wur-ci. 
Brethoc  8  b.  leg.  Bretoc?  and  cf.  0.  Bret.  Brit-hael,  Britoei,  Briîou,  Con- 

brit,  El-brit,  Ho-brit,  Roen-brit,  Sul-brit,  Uuen-brit. 
bri  V.  Argan-bri  and  cf.  0.  Br.  Guic-bri,  Uuor-bri,  Brioc  :  cf.  W.  bry 

^high'?  One  can  hardly  equate  W.  bri  auctoritas,  Gr.  C.  ^  86  n. 

98. 
Britail  1  \  Brytthael  2^=0.  Br.  Brit-hael. 
Budic  I  3  =  batic  in  Catuutic  1 37  ^  'victorious'.  0.  W.  Budic  L.  Land. 

123.  Gr.  C.2  848.0.  Bret.  Budic  (Bodicus,  Greg.  Tur.  v.  16),  also 

in  Galbudic,  larnbudic,  Loiesbudic,  Uurbudic,  0.  W.  budicaul  victor. 
Canrecieo  i  »  =  Conredeu  7^. 
cant  in  Cantgeîhen,    Gratcanî,    Gurcanî,    Morcant  (W.   cann,  now  can 

'white')  is  very  common  in  Old    Breton  names,  e.  g.  Eiicant 

(=:  Avicantos],    Haelcant,   Hincant,    larncant,  Indcant ,    Morcant 

{=  Moricantos,  W.  Morgan,  Gr.  C.^,  162),  etc. 
Cantgethen  i  ^  =Cangueden  i  ^^  =  Cantgueithen  137  ^. 
Catgustel  137  a  ^battle-hostage'. 
Catuutic  137  ''.  'battle-victorious'.  cat  'battle',  Gaulish  catu  (see  Gluck, 

47  s.  V.  Catuvolcus),  Ir.  cath,  0.  W.  cat,  Gr.  C.^  81,  is  in  Middle- 

Cornish  cas,  with  the  usual  change  of  t  {d)  to  s. 
Ceenguled  1 37  a. 

Cemoyre  i  ^  =  Comocre,  Comuyre  infra. 
Cen  8  ^  and  v,  Glui-cen,  Lun-cen,  Pros-cen,  Wuen-cen,  and  perhaps  Siû- 

c£n,  cf.  W.  cen  'skin' .'' 
Cenedl  v.  Oncene^fl,  cenedl  v.  Wencenedel,  W,  cenedl,  Ir.  cenél  'kindred' 

kinethel  (generatio)  Vocab. 
Cengor  1 37  a. 
Cenhui^iel  8  b. 

Cenmenoc  7  ^  perhaps  the  0.  Br.  Cenmonoc. 
Cenmyn  3  -'  8  t. 
cenoc,  V.  Milcenoc. 
Cest,  137  3.  W.  cest  'paunch'. 


340  The  Manumissions  in  tke  Bodmin  Gospels. 

ci  'hound'  (Ir.  cû,  y.6o)v)  in  Wur-ci,  Bren-ci,  and  perhaps  Ci-Ufri. 

Cilifri  3  =. 

comhal  V.  Hincomhal,  and  cf.  0.  Br.  Gleu-comal,  Roen-comal,  Comal-car 

=  Comalt-car  :  W.  cy/cî//  junctus.  Gr,  C*  1 16  n. 
Comoere  127  ^  (bis),  137  '^,  Comuyre  13  a. 
con  (in  Wur-con):  cf.  0.  W.  Con-car,  Con-guas,  etc.  Br.  Con-woion,  Cun- 

woion,  Cun-marck,  W.  owz  'top',  Gaulish  in -/.uvG-l^rAXivoç,  etc.  Gr. 

C.^92.  93- 
Conre^eu  7  b. 
Costentin  1 37  a.  Custentin  1  «.  borrowed  from  Constantinus.  Note  the  loss 

of  the  rz  in  the  first  syllable  and  the  umlaut  of  the  a  in  the  second, 
cum  V.  Illc\im,  Leiicum,  Louciim,  Onncum.  This  seems  the  old  form  of  eu/ 

(v.  Bledcuf),  Ir.  coim,  W.  eu  'amiable'. 
Cyngelt  1343  =  cyncelt  ? 

Dengel  137'^.  With  the  first  syllable  cf.  perhaps  0.  Bret.  Glea-den. 
Deui  I  a  borrowed  from  David,  like  Br.  Devy,  Deuy.  Buh. 
Diuset  137  b.  leg.  diuiset  'chosen'  =  Mid.  Corn,  dywysys,  W.  dewiso, 

to  choose. 
Dolo  1  a, 
Duihon  i  «. 
duythal  in  Ourduy?/!al  is  the  Old  Breton  doetal,  doiîal.  The  meaning  is 

obscure  to  me. 
dylic,  dylyc  in  Wurdylic,  Ourdylyc  is  borrowed  from  dilecîus  as  Benedic 

from  benedicîus. 
eihn  in  Argant-eilin  =  W.  elin,  Corn,  elin  (gl.  ulna),  Br.  elin  'cubitus' 

Cath.,  now  ilin  or  élin. 
Elisaued  3  »   137^.  note  in  this  loanword  the  infection  ofthevowel- 

flanked  b. 
Ewsannec  1  ^  ex  'avisvantâco?  See  as  to  names  compounded  with  eu-. 

Gr.  C.2  82. 
Freoc  1 37  ^  is  also  an  Old  Breton  name.  O.W.  Frioc,  Friauc,  Lib.  Land. 

140,  236, 
Fuandrec  1 37  ^ 
GaudreitS  ^  leg.  Guadreit? 

gent  (in  Gurient,  Wurgent)  ïor  genêt  as  in  0.  Br.  names.  Gr.C.^  839. 
Glowmae^f  1  •''.  The  first  syllable  is  =  either  toOld  Bret.  gloeu  (W.  gloew 

'bright'  Ir.  glé  Gr.  C.^   105)  in  Uueten-gloeu,  or  gleu  (W.  glew 

'hrâve')  in  Gleu-bidoe,  Gleu-comal,  Gleu-hocar,  Gleu-louucn,  etc. 

Gr.  C.»  1 10.  0.  W.  Gleu,  Ellgleu,  Glew-hvyt.  Gr.  C.*  109. 
Gluiucen  i  a  'bright  skin'?  W.  gloew. 


The  Manumissions  in  thc  Bodmin  Gospels.  541 

Gratcam  8  ^  8  b.withthe  firstsyllable  cf.  0.  Bret.  Gratlon,  W.  Gratlaun 
L.  Land.  227,  244. 

Grifiu^  I  b  y  b  8  a^  Grifiud  8  M  5  ^  1 57  %  the  commonWelsh  name  {G^if- 
fud,  Gruffud,  Gr.  C^  i63)anglicised  Griffith. 

Guaedret  7  ^,  127  ^  Cmuim  i  ^Wua^rit  i  ^  and  perhaps  Gaudreit  8  *>. 
cf.  perhaps  W.  gwaed  'blood',  or  W.  gwaedd  'cry'  =  Ir.  fded. 

gueithen,  gethen,  geden  (v.  Cantgethen)  seems  cognate  with  W.  gweiîhio 
'te  work'.  If  the  th  be  written  for  t  cf.  the  0.  Bret.  uiieten,  which 
occurs  compounded  in  Anau-uueten,  Bud-uueten  and  many  other 
names. 

Guene  8  ^. 

Guenguiu  3  a_  i-^j  s^=  Wenwiu  1 37  b.  a  woman's  name  :  cf.  0.  Br. 
Uuen-uuocon,  Uuen-uuoial,  Uuen-uuorgou.  The  guia  is  probably  — 
\W.gwiw  (Ir. //u)  'fit,  meet'  0.  Br.  uu  ium  Arth-uuiu,  Gal-miu, 
Haeruuia,  etc.  Uuiu-cant,  Uuiu-homarch,  etc.  The  guen  seems  the 
féminine  oi  guin. 

Guenneret  237  3. 

Guentanet  8  ^.  (Kembleand  Thorpe:  Guenttinef),3iman'sname.  The  tanet 
is  perhaps  =  Ir.  tene,  gen.  îened,  'fire',  a  ?-stem.  It  occurs  with 
great  frequency  in  Old  Breton,  e.  g.  Eutanet,  Ristanet,  Tanetbiu  , 
Tanetcar,  Tanetguion,  Tanetmarcoc,  etc.,  etc.  The  guen  is  obscure 
to  me.  It  occurs  in  Old  Breton  names  e.  g.  Guen-calon  (also 
Guincalon),  Guenhael,  etc. 

guestel,  guistel,  guistl,  guistyl,  gustel  (in  Tanc-mestel,  Meàwuistel.  Ana- 
guistl,  Medguistyl,  Caigusiel,  Wurgustel),  is  iheW.  gwystl  'hostage'. 
Br,  gwestl,  Ir.  giall.  The  Corn,  guistel  is  glossed  by  'obses'  in  the 
Vocab.  gustle  (spondere),  P.  249.  4.  0.  H.  G.  gisal. 

guiu  V.  Guenguiu. 

Gurcant  137  a.  =  0.  W.  Gurcanî.  L.  Land.  m.  12$. 

Gurcencor  1 37  a. 

Gurheter  137  ^  leg.  Gurheten,  which  is  a  Breton  name. 

Gurient  7  ^  =  Wurgent  $  ^.  cf.  0.  Br.  Urm-gent,  and  for  the  vocalization 
of  the  g  of  g^n?  the  Bret.  Pritient,  Riiimt,  Urbien.  Gr.  C?  137, 
the  W.  ariant,  etc.  Gr.  C.^  140. 

Guruaret  1 37  ^.  0.  Br.  Uuoruuoret.  In  this  and  the  four  preceding  words 
the  gur  is  the  intensive  prefix=Gaulish  ver-(Gr.  C.»  859),  O.W. 
guor-,  gur.  0.  Br.  mior-,  guor-  (Gr.  C.^  895,  896).  It  is  spelt  in 
the  same  way  in  the  Vocab.  {gurhemin  ruif  g\.  edictum).  Another 
spelHng,  our-,  occurs  infra. 
gwallon  V.  larnwallon  =  0.  Celtic  vellaunos. 


342  The  Manumissions  in  the  Bodmin  Gospels. 

Gy^ficcael  8  \ 

hael  V.  Brylthael,  W.  Iiail  Gr.  G.^  loo,  now  hael  'generous',  0.  Br.  hail 

in  Romhail,  Sulhail,  Hail-cobrant,  etc. 
Haluiu  I  a.  (Oliver:  haluin)  leg.  Haeluiu? 
Hedyn  8  b,  0.  Br.  Heden,  Guorheden. 
helec  V.  Leuhelec.  heligen  (gl.  salix)  Vocab. 
hent  V.  ludhent.  Br.  lient  'via',  Goth.  slnths. 
heten  v.  Gurheten. 

Hincomhal 8  ^. cf. O.Br. Hin-cant, Hin-hoiarn,Hin-uualart, Hin-imallon, etc. 
hui^el  8  b. 
Huna  I  a.  unceltic  ? 
larnwallon  137  ^  =  0.  Br.  larnauallon,  larnguallon.  The  first  élément 

iarn  occurs  in  numberless  Old  Breton  names,  e.  g.  larn-bidoe,  ïarn- 

bud,  larn-cant,  -car,  -con,  -ganoe,  etc.,  etc.,  and  is  according  to 

Ebel  (Gr.  C.^  106)  the  same  word  as  hoiarn,  Goth.  eisarn  'iron'. 

G.  C.M04,  827.  The  second  élément  (=Gaulish  Vdlaunus,  O.Br. 

Uuallon)  is  also  in  O.  Br.   Catuuallon,  lud-,  Loies-,  etc.,  0.  W. 

Casswallaun,  Riguallaun.  Gr.  C.^  87. 
llmth  2  a. 

lllcum  I  b.  V.  cum  supra. 
Inisian  137  ».  O.Br.  /«/sa/z  seemscognate.  Thetermination-/a/7  (=gaH, 

W.  gân  'a  birth',  cf.  Gurient)  re-occurs  in  Milian,  Osian  and  Teri- 

îhian  infra. 
ludhent  137  ^. 
ludprost  I  a.  (Ina  prost,  Kemble  and  Thorpe).  Hère,  and  in  ludhent,  the 

iud  is  the  Scr.  yudh  'war',  'warrior'  :  cf.  0.  Br.  ladcant,  ludcar, 

ludhael,  ludcum,  etc. 
lunerii  137  t.  leg.  ludnerth  ^^  0.  W.  ludnerth  L,  Land.  154,   176. 
lunitor  8  b,  (Kemble:  juniorumj   cf.  0.  Br.   lunet,  Uuriunet,  luncthant, 

lunetmonoc,  etc. 
Lecem  i  ^. 

Le^elt  8  '^  a  woman's  name. 
leisoc  (in  Sidlcisoc]  =  O.  Br.  Loiesoc.  Gr.  G. 2  101  ? 
Leucum   1  ^  3  a_  3  t.  i  ^y  a  (yis-^^  Loucum  1 3  ^ 
Leuhelec  1 37  ^. 
Leumarch  \  ^.  i^j  ^  Loumarch  8  b.  1 3  a.    old  W.  Loimarch.  Gr.  C.^ 

107.  later  Lyuarch  (hen).  Hère  and  in  thetwo  precedingnames  we 

hâve  the  équivalent  ior  W.  leii^Catleii)  r\ow  llcw  'lion'.  See  loo  Lywci 

and  as  to  the  primitive  form  of  Icu  (lou),  which  seems  to  hâve  lost 

a  V,  see  Gr.  C.^  107. 


The  Manumissions  inthe  Bodmin  Gospels.  34^ 

Loi  1 37  3.  0.  Br.  Lui  ?  Louui,  0.  W.  Legui  ? 
lowen,  in  Wurlowen,  =  W.  leguen  'leguenid  laetitia)  now  llawen  'joyful', 

Bret.  louuen,  louen  in  Arganî-louen,  Cat-buuen,  Gleu-louuen,  Uur- 

louuen,  etc. 
Lowenan  S^.  =0.  Br.  Louuenan. 
Lucco  1 37  2. 
Luncen  137  ^.  cf.  0.  Br.  Liin-monoc,  Lunen.  W.  Hun  'form'.  'shape'  is 

perhaps  the  same  word. 
Lyscerruyt  5  ^  a  Cornish  town,  now  Liskeard. 
Lywci  137  3  perhaps  Br.  LeuguiÇien  -{-  ci)  ^lionhound.' 
Madfu?/!  2  ''•  the  mad  (Br.  Madganoe,  M adgo ne)  perhaps  W.  mad  'good'. 

the  futh  (leg.  fut!')  W.  /w^  quick  motion  .'' 
mae^in  Glowmsà  :  cf.  Br.  Maedri.  Neither  W.  maedd  'buffet'  nor  maeth 

'nurture'  affords  a  satisfactory  explanation. 
Maeiloc  1 37  t.  =  0.  Br.  Maeloc. 
Mar  1 37  a. 
march  'horse' v.  Loumarch,  W .  march,  Iv.marc,  Gaulish  ;j.xp-/.7.,  O.  H.G. 

marach. 
Marh  8  =>  a  woman's  name,  cognate  with  march?  cf.  0.   Br.    Marchoc, 

Marchuallon,  etc.  O.H.G.  meriha. 
Medguistyl  1 3  '■•  (Thorpe  :  Madguistyl),  Me^wuistel  1 37  ^. 
Medhuil  1  b. 

menoc  in  Cenmenoc  :  cf.  Br.  Glaimenoc. 
Meonre  i  a,  1  i^,  1 37  3,  1 37  b  (bis). 
Mermen  i  M  ^  2  ^  1 37  ^  1 37  ^  {bis],  Myrmen  i  =>. 
Milcenoc  137  ^  cf.  O.  Br.  Milcondoes,  Gur-mil. 
Milian  1  b.  0.  Br.  Milon,  Milun  are  perhaps  cognate.  See  Inisian. 
Mittui^(?)  1 37  ''. 
Modred  8  a.  0.  Br.  Modrot. 
moet,  in  Argantmoet,  is  a  very  common  élément  in  Breton  names,  e.  g. 

Alar-moet,   Caî-moet,  Fau-moet-car,  Treb-moet-car,  Mor-moet,  Ur- 

moet,  Moet-gen,  etc.  The  meaning  is  obscure  to  me. 
M6r  6  a  borrowed  from  the  Irish  ?  mbr,  mâr,  W.  maur. 
Morcant  137  ^.  is  also  0.  Breton.  W,  Morgan.  Gr.  C.^  162. 
Morhayï/zo  1  ^.  Morha^/zo  ib.  Morhair/zo  ib.  Morhai^o    i  t»  Morha^o  ib. 

Moraytio  4  ^  Morhaitho  7  \  Morhsedo  7  ^. 
Morhi  1 37  ''. 

Moruiw  7  ''  a  woman's  name. 

Muelpatrec   1 37  ^  leg.   Maelpatrec  'calvus  Patricii',  borrowed  from  the 
Irish  Maelpâîricc.  see  Gr  C.^,  102.  n. 


344  The  Manumissions  in  the  Bodmin  Gospels. 

nerth  in  Iu(d)ner^  Wis',  'valor',  0.  W.  nerffi  (Tutnerlh),  Ir.  nert,  Gaul. 
Cob-nertus. 

Ogurcen  i  ^.  cf.  perhaps  0.  Br.  Uuor-ocar. 

Oncenedl  1 37  ^  Ongyne?/îel  8^  a  woman's  name, 

Onncum  i  ^.  nom.  fem.  'ornusamabilis'  î  W.  on  'ash'. 

Onnwuen  8  ^  Onwen  i  %  Onwean  1 37  a  ^ornus  alba'?  lîwen  herebe  for 
wenn,  we  hâve  an  example  in  Cornish  of  the  féminine  form  of  the 
adjective  win,  gulnn  (W.guin,  fem.  guen  Gr.  C.^  279):  cf.  Win-cuf 
infra  and  Wuencen,  Wuenceneàel,  Wendeern,  Wengor,  Wenwiu, 
Wenw£rthlon. 

Osian  i  »,  3  ^  7  %  1 37  ^  (bis')  1 37  ^  Oysian  1 3  ^  See  Inisian,  Terithian. 

Ourduyï/ial  i  b,  =  o.  Br.  Uuordoetal,  Uuordoiîal. 

Ourdylyc  8  ^,  Wur^ylic  1 37  »  'valde  dilecta'  =  O.Br.  Gurdilec. 

Perem  -j  ^.-j  ^.  =.  W.peryf  'a  sovran'.  Is  this  a  petrified  superlative? 

Petroc,  latinised  Petrocus,  passim. 

Proscen  i  ^.  1 37  3.  for  Prostcen  ? 

prost  in  ludprost,  cf.  0.  Br.  Prosî-lon,  Prost-uuoret. 

Proswite  1 37  ^.  {or  Prostwite? 

Rannoeu  1 37  ^  =  'Rannêvo-s  .^ 

redeo,  redeu  see  Canredeo,  Conredeu. 

Ret    I    b   3   a  Ryt, 

Rinduran,  1 37  ^,  is  also  an  Old  Breton  name. 

Riol  1  M  b  (J)is)  1 37  a  (bis),  Riol  1 37  ^  =  regâlis  ?  Gr.  C*  818,  or  cf. 
W.  rhioli  to  rule. 

rit  in  Guae^frit,  Uua^rit,  cf.  0.  Br.  Hael-rit,  Uueten-rit,  Riî-cani,  Rit-gen, 
Riî-guoret,  etc. 

ros  in  Bleiros,  borrowed  from  hros  'horse'  ? 

Rum  I  3  cf.  0.  Br.  Rum-uual. 

Rumun  1  3,  137  ».  unceltic  ? 

Salenn  1 37  ^. 

Sulcaen  1 37  a. 

Sulleisoc  I  ''. 

Sulmeaf/z  1 37  ^  The  sul  hère  and  in  Sul-can,  Sul-leisoc,  constantly  occurs 
in  Old  Breton  names  e.  g.  Sulbrit,  Sulcar,  Sulcomin,  Sidgobri,  Sul- 
hail,  Sulhoiarn,  Sulmael,  Sultiern:  so  0.  W.  Sulgen.  Gr.  C.^  1 36.  It 
probably  means  'sun'  (W.  Corn,  and  Bret.  iu/ borrowed  from  Lat. 

SOI). 

Talan  8  -'.  is  also   an   Old    Breton  name,   derived   perhaps  from   tal 

^forehead'. 
Tancwuestel  1 37  ^.  Tancwoystel  i  ^. 


I 


The  Manumissions  in  the  Bodmin  Gospels.  545 

tanet  v.  Guenlanet. 

tat  'father',  (in  Anaudaî)  W.  tâd,  Mid.  Cornish  tâs  =  lat.  tata. 
Tebion  $  ''. 
teern  (in  Wen-deern)  =  Ir.  tigerne  'dominus'  :  W.  teyrn  Gr.  C^  827:  cf. 

0.  Br.  Tiarnan,  Tiarnmael,  Tiarnoc.  Mid.  W.  Edern,  Edyrn,  Mah., 

0.  W.  Eu-tigern,  Eutegern,  Gr.  C.^  85. 
Telent  8  ^  also  an  Old-Breton  name. 

Tenthhn  ]  ^.  Old  Br.  Terithien  (-^terith  -\-  gen).  See  Inisian. 
Tetliion  j  ^Te^ion  8  «  =  0.  Br.  Tethion  'd.  W.  fa/Z/z  iter?),  W.  Teithyon 

Gr.  C.2  824. 
Tithert  i^S  i  ^  i^  %  137  a.  Tittherd  2  ^  Tidherd  8  b.  unceltic  ? 
Ungust  3  2  (Thorpe:  Ungost).  Letter  for  letter,  thisis  the  Irish  Oengus: 
un  =  Lat.  unus  Çoinos),  gust  =  Lat.  gustus^  Goth.  kustus  5oy.t;rf,. 
wallon  V.  Idrnwallon. 
waret  v.  Guruaret. 

Wasso  3  2=::::  n'^50,  Domesday  (Cornwall)  8  ''. 
Wuencen  i  ^.  a  woman's  name. 
Wencene^el  i  ^.  a  woman's  name. 
Wendeern  1 34  a  (==  wen  -|-  /e^ra  q.  v.;  'alba  domina'  ? 
Wengor  1 37  3. 

Wuenumon  j  ^  a.  woman's  name. 

Wenwiu  1 37  ^  ("'alba  digna';  =  Guenguiu  3  %  a  woman's  name. 
Wenwaer/Alon  1 37  ''. 

Wincuf  8  '^  (—  0.  Br.  Vuincum,  Red.  377;  ''albus  -amabilis'. 
wiu  (in  Moruiw,  Wenwiu),  W.  gwiw,  Ir.  fiu,  Gr.  G.*  1 10. 
Wuadrit  i  ^  Wudryt  133. 
Wurcant  8  a  =  0.  W.  Gurcant,  Lib.  Land.  m,  125,  and  cf.  0.  Br. 

Uuorcantoc. 
Wurci  8  ^.  wur+ci  'canis'. 
Wurcon  137  ^  =:  0.  W.  Gurcon,  Guorcon,  L.  Land.  130.  170.  and  cf. 

0.  Br.  Gal-con,  Guit-con,  larncon,  Conan,  etc. 
Wurt^ylic  1 37  ^  'valde  dilecta'. 
WurfO(./u  137  b  =  *ver-boduus  :  cf.  0.  Br.  Cat-uuodu,  Eu-bodau,  Dre- 

bodu,  Tribodu.  Pictet,  Rev.  Arch.  juillet  1868,  p.  3. 
Wurgent  5  ^  v.  Gurient. 
Wurgustel  7  t.  v.  guesîel. 
W'urthkld  8  \ 
Ylcaerthon  5  ''.  Ylcerthon  13  ^  perhaps  unceltic. 

W.  S. 


THE  LUXEMBOURG   FOLIO. 


Lasl  March  I  went  to  hâve  a  look  at  the  Luxembourg  folio,  andcom- 
pared  it  as  carefully  as  I  could  at  the  time  with  a  facsimile  published  by 
a  local  Society  of  antiquarians  in  the  24th  volume  of  their  transactions'. 
That  I  found  on  the  whole  very  correct  and  useful  :  since  then  my  rea- 
dings  hâve  been  collated  with  the  original  by  M.  Schroetter,  librarian 
ofthe  bibliothèque  de  l'Athénée  royal  grand  ducal  de  Luxembourg,  and 
by  M.  Hardt,  a  member  of  the  above-menîioned  society.  Seeing  that 
several  of  Zeuss  and  Mone's  mistakes  were  due  to  their  not  having 
carefully  perused  the  entire  fragment,  no  apology  need  be  made  for 
publishing  it  now  in  full.  Besides  it  cannot  but  be  interesting  to  Romance 
scholars.  The  parchment,  which  is  hère  and  there  defective,  is  a  foHo 
taken  out  of  a  book,  and  forming  four  pages,  of  which  the  first  two 
contain  21  lines  of  manuscript,  and  the  other  two  20  lines'each.  The 
contents  may  be  described  as  follows  :  —  i .)  The  first  six  lines  of  what 
I  call  page  i^,  are,  owing  to  defects  in  the  Ms.  and  want  of  context, 
nearly  unintelligible.  According  to  Mr.  Bradshaw,  superintendent  of  the 
University  Library,  Cambridge,  we  hâve  hère  the  end  of  a  song  like 
those  printed  a  short  while  ago  from  a  Cambridge  Ms  by  Jaffé,  the 
simzas  end'mg  mih  dulcis  jugalis  meus.  2.)  The  rest  of  the  first  two 
pages  consists  of  glossse  collectae  partly  in  Latin  and  partly  in  Welsh. 
Thèse,  I  am  inclined  to  think,  were  copied  from  an  older  Ms.  and  it  is 
this  that  seems  to  account  for  some  of  the  glosses  having  got  into  the 
line,  and  perhaps  for  the  emerging  hère  and  there  of  a  kind  of  context, 
which  mocks  one's  most  diligent  search.  What  errors  may  be  attributed 
to  the  transcriber  is  of  course  impossible  to  say.  ^.1  The  third  and  last 


1.  Publications  de  la  section  historique  de  l'Institut  constitué  sous  le  protectorat  de  Sa 
Majesté  le  Roi  Grand-Duc.  Luxembourg,  1869. 


The  Luxembourg  folio.  347 

part  occupies  thetwo  last  pages,  opening  with  a  kind  of  rhythmic  twaddle 
about  astronomy  and  closing  with  the  prophet  in  the  lion's  den. 

As  to  the  Latinity  of  thèse  fragments  it  is  of  that  strange  kind,  of  which 
Gildas'  '  Lorica  ',  published  in  Stokes'  '  Irish  Glosses  ',  is  an  excellent 
spécimen,  one  of  its  most  strikingcharacteristics  beinga  strongtendency 
to  latinize  Greek  and  even  Semitic  words,  where  ordinary  mortals 
would  hâve  found  familiar  Latin  words  answer  their  purpose  better. 
For  instance,  one  meets  in  this  Ms.  and  in  the  Lorica  with  such  words 
as  conis  A.  occulis,  gihras  .i.  homines,  sennarum  .i.  dentium,  and  gugras, 
À.  capita.  Of  the  late-Latin  words,  which  meet  us  hère,  several  are 
highly  interesting,  and  several  very  obscure  being  unknown  to  Ducange 
and  Diefenbach.  As  to  its  âge  the  Ms.  is  spoken  of  in  the  Grammatica 
Celtlca  as  being  of  the  çth  century  ;  but  if  I  am  right  in  regarding  it  as 
a  copy,  its  contents  may  claim  greater  antiquity.  This  seems  placed 
beyond  a  doubt  by  the  fact  that  the  only  other  Welsh  glosses  '  approaching 
it  in  importance  and  antiquity  are  those  contained  in  the  Juvencus 
Codex  published  by  Stokes  in  the  Trans.  of  the  Philological  Society, 
1 860- 1 .  The  Ms.  last  alluded  to  is  held  to  be  of  the  8th  or  9th  century,  but 
is  certainly  younger,  as  far  as  its  Welsh  contents  are  concerned,  than  the 
one  we  are  hère  discussing,  as  may  be  seen  from  comparison  of  such 
forms  as  trucarauc,  diauc,  anbithaul,  litimaur,  cilurn,  trumm  and  ruid 
which  occurin  the  Juvencus  Codex  :  thèse,  I  am  persuaded,  would  in 
the  Luxembourg  MS.  hâve  been  respectively  trucaroc,  dioc,  anbiihol, 
Ihimor,  cilorn,  tram  and  roed  or  roid;  not  to  mention  the  Luxembourg 
golbinoc  ïrom  golbin,  which  in  the  Juvencus  Codex  has  the  comparatively 
modem  form  gilbin.  That  the  reader  may  judge  for  himself  the  merits  of 
the  document,  1  hère  give  as  exact  a  copy  of  it  as  I  at  présent  can  : 


I.  Since  the  above  was  written,  I  hâve  heard  from  Mr.  Bradshaw,  ihat  he  has  disco- 
vered  a  fresh  batch  of  Welsh  glosses. 


24 


^48  The  Luxembourg  folio. 

Page  I. 

I  congsiudet  animi/i  meus  placuissc?  hoc  in  domino  re?rit?is?i 
latus  meum  dulcis  iugalis  meus;  kalamitas  deme 
recedit  ista  uerba  noio  audire  sitibi  dilectat  nub[e] 
re  alium  uirum  pf/quiris  ;  rem  ;  Die  acnocte  doleo  etfleo 
j  propter  caru[m]  uirum  mèum  sitibi  mefraudeïnoniaces  meum 
latus  dulcis  iugalis  meus 

Cadus  .i.  unda  follum  .i.  ualle/n  haud  '  pulla  ^  domescas? 
co;zclauas  4  lectriceam  s  conis  ^  baiolat  7  stemata  ^  ausinicum  9 
propinnat  '°  forcipe  "  austum  '^  sophismatum  '5  cespitis  "4  sulco  'J 

:o  lectriceus'6  cetus'7  remota'^  rumoris'9  ora^o  digestus^'  uibrat^- 
pernas^i  uigricatu524  ulcera-s  assiles-''  gugras^?  garrulis^s  turm[a]29 
limphis'û  spumaticus''  pontus52;  Inertes??  Iiquidis54  abdet'S 
indolis?''  tabe??,  ufedis  gibrosc'S  pacatis?''  genimina4o 
gibras4'  regulosis42  orgiis45  dusmus44  bellicamina4S  quis46 

1 5  mansia47  migrus48  esciferis49  senisso  fidiss'  fusamP  uerniamn 
crasiciH  andriuenereisîs  prosapiaJ^  sulcauissentS7  cimbiss^ 
sainos^  follaminisi^a  congelo<^'  incal[c]ulatis<^-  factio^J  uim64 
alborea'^s  oliuauit'^''  semigilati"^?  s[e]ros  iwfenosa^s  machide^9 
alligeris7o  orticumetris7'  essu/n72  afroniosus75  guturicau[it]74 

20  titonis7s  reumas76  fultris77  inormis78  arcontium79  indolu[m]8° 
phalanges^'  pastricant^^  arcontes*^?  decreta^4  essura^s  turm[a]86 


1.  .i.  non.  2.  .i.  nigra.  3.  .i.  ingema[s].  4.  .i.  uenas.  5.  lectricem.  6.  .i.  occulis.  7. 
portât.  8.  .i.  signa.  9.  uocalicum.  10.  ministrat.  ii.  ore.  12.  douohinuom.  13.  .i. 
questionum.  14.  telluris.  1$.  rec.  16.  léctoralis.  17.  drogn.  18.  guparth.  19  clôt.  20. 
finis.  21.  narratus.  22.  crihot.  23.  m^mbra.  24.  rocredihat.  25.  creitiii.  26.  cronion.  27. 
capita.  28.  riglion.  29.  multito.  30.  undis.  31.  euonoc.  32.  mare.  33.  blinion.  34.  liumi- 
dis.  35.  absconde[t|.  36.  progenies.  37.  incedlestnéuiom.  38.  huniane.  39.  pacificatis. 
40.  progenies.  41.  homines.  42.  natrolion.  43.  inirogedou.  44.  diaboliis.  45.  bella.  46. 
aqiiibus.  47.  uita.  48.  paruus.  49.  boitoiion.  (o.  eusiniou.  51.  toruisiolion.  ^2.  gurpait. 
53.  letitiam.  54.  pectoralis.  jj.  cou  f  ?  antoiion.  56.  progenies.  J7.  roricseti.  (8.  naui- 
bus.  59.  ancou.  60.  uallis.  61.  co«grogo.  62.  innumeratis.  63.  cetus.  64.  airolio|n].  65. 
alba.  66.  rogulipias.  67.  iiantertoetic.  68.  Igiieltiocion.  69.  airniaou.  70.  atanocion.  71. 
auibus.  72.  diprim.  73.  euonoc.  74.  roluncas.  7s.  maris.  76.  naues.  77. 
uncis.  78.  ingens.  79.  pnncipum.  80.  gentium.  81.  bodiniou.  82.  regminant.  83.  prin- 
cipes. 84.  dodimenu.  Si.  d  ?  ?  u  ?  I.  86.  multit  :  this  last  and  n"  29  are  hard  to  read, 
as  the  last  letters  are  very  faint  :  both  seem  to  represent  some  contraction  of  multi- 
tiido. 


The  Luxembourg  folio.  349 

Page  2. 

I   lugubre  apocatur'  pantes^  gr  ?  ?  sat'  uecordia4  normaes 
nequit*^  uiraginis7  incerte^  edulia9  decoreoi°  coUegio" 
acri'-  lastro  doci!ia'5  atrocia'4  armame/zta'S  pr£  pugnis"^  auelloso'7 
spadam'^  inormia  dermorion  concitis'^^  somata^°  partimonia^' 
5  candentem^nolibii523pelta/n=4pastricat-slitturam=6neui27durili28spicula" 
fidoque5'3  occupât''  tutamine  tôles"' 2  acrostratam?'  regulosi54 
uibro3S  toxicis5<'  perforo??  torriculas'*^;  digestis3''  quis4o  gibriosa4' 
tona42calculum45straui44orgiis4Spithis461icaui47militonem48co/!flictis4'' 
auellosos°  inagones'  militauiP  operam^ntan  stragesH  stematibuiss 

10  turmaei"^  lectaqueS7  nitidisî^  pastricants''  incalculatas^o  compti'^' 
apocant<^2  trabeas^-J  arictant64  neuum'>s  aclibosas''''  tornatili^? 
tonsurasi^s  comas''?  et  spisis7o  iubis7i  stemicamina72  cum  priscae7} 
tignae74  seratu75  natus7<'  turm3e77  munime/na78  cor/citis79  lastrat8° 
prsecentur^'  phalangem^^  jnstans^J  reseratis^4  queraesta^s  cianti^^ 

1 5  sorcipe87  (sic)  palat^**  etossilew^9  sennarum?"  seriem9'  eximius?^ 
polici95  exigendus94  herus9S  censuerit?''  sactionem97  (sic)  emulamenti9S 
collegia99  lustram ' °°  unitum ' '^ ■  perfundo ' "^  consolatum ' °3  uulgantem ' °4 
per  auia'°s  pasium'°^art  ?  ?  is'°7  et  agrica'°8finitauerit'°9  tornatili"° 
éructas'"  creparatas"^  gelaminis"'  depromis"4forci"s  palas"*'  adeo 

20  suis  quis"7  uerbialia''^  apocant"9  bradium'^o  factoris'^'  fribulas'" 
spiculat'23  inlatam'24  stemicaturas'^s  nouello'26  canori[ca]'27  pica'^s 


I.  [co";llocatur.  2.  o[m]nes.  3.  dodiprit.  4.  bicoled.  5.  régula.  6.  nepen.  7.  mulieris. 

8.  bun.  9.  da?dou.  lo.  cadr.  1 1.  cuntulk/.  12.  deurr.  13.  docibilia.  14.  arocrion.  1$. 
^^  arma.  16.  ardrén.  17.  catol.  18.  énsem.  19.  buenion.  20.  corpora.  21.  rannou.  22. 
^^Lalban:.  23.  inembris.  24.  scutum.  25.  regminat.  26.  linom.  27.  tigoin.  28.  calât.  29. 
^^Hiacula.  30.  torguisi.  31.  acupet.  32.  membra.  33.  golbinoc.  34.  uenenosi.  3;.  [c  reham. 
^^^n6.  niortalibu^.  37.  treorgam.  38.  imagines.  39.  narratis.  40.  aquibu.?.  41.  humana-  42. 
^^Hmortalem.  43.  num.e  rum.  44.  strouis.  45.  obsequiis.  46.  natrolion.  47.  occidi.  48.  mili- 
^^P  tem.  49.  astortou.  50.  c^talrid.  51.  enarima.  52.  occidi.  53.  opé-ra.  54.  airou.  55.  signis. 
^K  j6.  turbas.  57.  electa.  j8.  candidis.  j9.  gubernant.  60.  innumeratas.  61.  ornati.  62. 
^^L  collocant.  63.  uestes.  64.  coUocant.  6s.  liou.  66.  milinon.  67.  cron.  68.  guiltiatou.  69. 
^K^  mogou.  70.  cr[a|seticion.  71.  ableuou.  72.  comtoou.  73.  entic.  74.  cepriou.  75.  aciri- 
WK^  miniou.  76.  filius.  77.  trebou.  78.  caiou.  79.  buenion.  80.  mutât.  81.  iolent.  82.  bodin. 
f^    83.  pr^csens.  84.  apcrtis.  85.  bestia.  86.  aarecer.  87.  ore.  88.  reuelat.  89.  ascorinol.  90. 

dentium.  91.  mm.  92.   optimus.  93.   ol.    94.    rogandus.  95.   deus.  96.   iudicauerit.   97. 

drog.  98.  cormo^u].  99.  cuntuUetou.  100.  ancera.  ici.  unum.  102.  doguorenniam.  103. 

consilium,   104,    uagantem.   105.    -hint-.   106.  pedum.   107.   finis.    108.   tirolion.    109. 

ornauerit.  iio.  cron,  m.  predicas.  112.  sententias.  113.   congregationis.    114.  douo- 

louse.   115.  ore.    116.   reuélas.   117.    aquibuj.    118.    cobrouol.   1 19.  ômcobloent.    120. 

bud.  121.  adiutoris.  122.  sentensus.    123.    an  serat.    124.   dodocetic.    I2j.  uestimeHta. 

126.  nouo.  127.  holeu.   128.    pi  g. 


3^0  The  Luxembourg  folio. 

Page  3. 

1  ardoris  amplectitur  orientem';  Altero  diurnum  rutulat 
aroto^  promerium5;  Aliud  merseum  inlucessc/  sidus  umbra 
culum;  Celatu/H  fulgentes  sternicant  uranum4  pliades  ge 
minosque  fulraineo  candore  congelât  tirioness;  Torrentes 
5  palatum''  sternicant  boetes/  olimphu/n;  Aliae  propiores 
celiti  currunt  mines  ^  tabulati;  Alterae  remotiora 
sécant  climata  ;  Supernum  digesta  pastricat  coumspera  ; 
Axem  co/zuexam  cardinesquc  tornalitem  trutinat  in  uer 
tiginem;  Septenos  reciduo  fleu  mouet  globos  ;  Ge 

10  mella  polieus  amplectitur  hemisperia  situ^;  Nube  ?  tegunt 
polum  obtestacula;  Ac  uitrea  atro  ligone  sérum  cacumi 
na  ;  Altum  firmamenti  tronum  angelicse  possident  ca 
teruae  ;  Qu3S  aureis  supern  ?  decoris  consedunt  cadetris''; 
Quis  purpurea  ;  gemmarum  emicant  stemata  ;  Albo 

1 5  reis  induta  stolis  ;  Dilitiatas  discurrunt  agmina 
metas.  ampla  stemicaru/n  congelât  olimpus  collegia 
q«e -sermocinoso  faminum  uero  nausiam'°  choorti.  sublimem 
posco  rectore/n;  Qui  olimphiam  amplo  gubernat  speram 
potito  terrestrium  frugifero  arctam  ?  ?  funda 

20  uit  solu/n  quod  incalculata  frugiferis  gignit  pla  ?  ?  ? 


I.  .i.  stellam.  2.  sido.    5.  .i.   spatium.    4.  cœlum.    5.  uii  trio.    6.  .i.  réuébtum. 
stellas.  8.  .i.  fines.  9.  cathedris.  lo.  .i.  lestnaued. 


The  Luxembourg  folio.  3  5 1 

Page  4. 

!  figmfntis  h  ?  derosa  congelât  aromata;  Multigenas 
animantium  instaurât  catf  ruas  ;  Escifera  digestis  cere 
monicat  '  oblectam^'nta  turmis  ;  Spumosa  sedadtithis 
flustra  ;  Ac  tempestiva  reprimit  occeani  diuortia  glas 
5  netellatum  procellosis  tluctibui  op^riat  tolum  et  glaucum 
mundiano  arcauit  limbum  tolo;  Undisonum  fréquenter 
inflat  calubris  talasum  turbataqae  trement  equora; 
Interdum  garulas  sedatis  fotibui  refrénant  undas  ;  Ro 
bustasqu(?  uentorum  com^rxxml  flabras;  Alias  clamoreo 

10  nothorum  inflat  ethera  flamina;  Aima  folliceis  îegit 

robora  imis  ;  israel'wÀCdi  roboreum  indux//  agmina  p^r  pon 
tum  ;  pr^ruptusquc  tithici  mormoris  pendebat  utroqnc 
latere  tumulus  pedestrem  stupuen7  marmore  cal 
\ç.m;  Egipticum  sorbuit  pelagus  caetum.  Nectoreum  aereae 

1 5   liguro  fluit  coorti  pastum;  flagrantia  patuit  dulce 
dine  castra  ;  Duru/n  aperuit  pollenti  latice  saxum  ; 
Crebrosque  ausit  uitreo  gurgite  riuos  trinos  pio  im 
brium  uapore  obseruauit  in  fornacis  estunatos  ;  Insi 
gnem  leonino  eruit  uate/«  folio  ;  seuosque  prohibuit 

20  rictus  ne  sacros  pestifero  morsu  tangerent  artus; 


5  ^  2  Tlic  Luxembourg  folio. 

Page  1,  line  9.  donohimiom  (gl.  austum).  I  should  hâve  preferred  reading 
douolienuom,  but,  as  it  stands,  this  I  fear  cannot  be  done.  The 
Word  analyses  itself  into  do-uo-Innu-om.  On  the  compound 
prefix  douo  or  doguo,  in  both  of  which  forms  it  occurs  in  this 
fragment,  see  Gr.  C.^.  p.  907.  In  modem  Welshitis  known  as 
dyo  in  dyoddef,  «  to  suffer,  »  dyogel,  «  safe,  »  etc.  The  ending 
~oni  occurs  now  as  -win  in  only  a  few  words,  such  as  dcgwm, 
((  tithe,  »  rhigwm,  «  rigmarole,  »  codwm,  «  a  fall,  »  c'uhvm,  «  a 
wolf.  »  The  body  of  the  word  is  hinu,  which  I  identlfy  with 
the  modem  enw  v  a  name  «  ;  it  is  remarkable  that  it  is  hmo 
in  Breton,  lianow  in  Cornish  and  henw  in  North  Wales  pretty 
generally,  although  there  can  hardly  be  a  doubt  that  the  h  is 
inorganic,  as  is  seen  from  the  Irish  ainin.  But  we  hâve  no 
évidence  that  we  should  regard  the  old  Welsh  form  as  hinu 
rather  than  inu  or  enu,  as  we  hâve  hère  several  instances  of 
h  inserted  between  vowels,  as  usual  in  other  spécimens  of 
old  Welsh.  Douohinuom  as  a  whole  seems  to  mean  «  a  naming 
or  calling  by  name.  »  With  this  aushim  agrées;  for  in  line  8  we 
hâve  ausinicum  =  vocalicum  and  page  4  line  17  the  words, 
Crebroscjue  ausit  vitreo  gurgite  rivos,  etc.  Ducange  only  gives 
ausare  =  nominare. 

rcc  (gl.  sulco).  It  appears  probable  that  cespitis  sulco  are  to 
be  read  together.  The  word  rec  is  evidently  identical  with  the 
modem  rhych.  The  writer  uses  c  for  ch  throughout,  though, 
as  a  rule,  he  writes  th  as  modems  do  ;  indeed  there  can 
hardly  be  any  doubt  that  ch  and  th  were  fixed  in  those  Welsh 
forms,  where  they  now  occur,  anterior  to  the  date  of  thèse 
glosses.  Rec  has  very  probably  lost  an  initial  p  and  is  to  be 
referred  to  the  same  origin  as  old  Slavonic  prasC^,  Lat.  porca, 
«  the  ridge  between  two  furrows  »,  Greek  7:épy.oq,  and 
English /urro))'.  See  Curtius'  Cnmdziige  no.  104. 

line  10.  drogn  (gl.  cctus)  occurs  later  as  drog  :  this  stands  for  drong; 
30  mogou  for  mongou,  page  2,  line  12.  Itis  not  easy  to  account 
for  the  writing  drogn.  I  hâve  nowandthen  known  Frenchmen 
to  mistake  English  ng  for  iheïr  gn;  can  gn  hère  be  only  an 
équivalent  of  ng?  It  would  be  two  unwarranted  a  supposition 
to  think  the  n  the  termination  of  a  neuter  form  :  were  it  so, 
the  word  would  be  on  a  level  with  deng,  «  ten,  »  as  in  dcng 
niwrnod,  «•  ten  days,  »  for   \ieccn  diwrnod.   The  Irish  form  is 


The  Luxembourg  folio.  ^  5  5 

also  drong;  Stokes  reminds  me  of  the  laie-Latin  dningiis,  «  a 
troop  or  body  of  soldiers,  »  which  may  possibly  hâve  been  a 
Word  of  Gaulish  origin.  The  équation  oï  drong  with  the  EngHsh 
throng  and  its  Germanie  cognâtes  is  tempting  but  impos- 
sible; so  one  has  only  to  fall  back  on  the  root  dargh,  whence 
it  would  perhaps  be  possible  to  explain  drong  as  équivalent  to 
dargha,  «  fessel,  band  »  in  the  sensé  of  a  band  of  men.  See 
Fick's  Wœrt.^,  p.  89. 

guparth  (gl,  remota)  seems  to  be  aptly  explained  by  the 
English  apart.  This  form  is  a  contracted  one  for  giiôparth 
which  became  gi'ioparth,  then  guparth.  The  prefix  never  assumes 
this  form  in  modem  Welsh,  but  rather  drops  the  u  and  becomes 
go-,  whereby  we  should  now  hâve  gobarth  for  guparth. 

crihot  (gl.  uibrat)  seems  to  be  the  reading  where  I  should 
hâve  expected  crihet;  on  page  2,  line  7,  we  hâve  crehain  (gl. 
uibro).  The  h  is  prooably  inorganic  and  cri  is  to  be  taken  as 
the  base,  from  which  are  derived  the  modem  cryn,  «  a  shaking 
or  quaking,  »  as  in  daeargryn,  «  earthquake,  »  Breton  krén, 
«  tremblement,  «  and  cryd,  «  a  cradle  »  (which  seems  also  of 
Welsh  origin)  and  also  <(  the  fever  »  as  in  cryd  tridiau,  «  the 
tertian  ague.  »  Compare  the  German  ritte,  «  das  Fieber.  •» 
line  II.  rocredihat  (gl.  uigricatus).  Ahove  the  t  of  uigricat  I  think  I 
read  the  same  abbreviation  which  occurs  on  page  i^  line  i, 
over  anim  me,  which  I  read  animus  meus,  also  over  rict  to  make 
rictus,  page  4,  line  20,  where  the  words  run  as  folio ws  :  — 
sevoscjue  prohibuit  rictus  ne  sacres  pestijero  morsu  tangerent  artus. 
Rocredihat  can  accordingly  be  nothing  but  a  passive  participle, 
which  in  modem  Welsh  has  the  syllable  ig  attached  to  it,  and 
is  exemplified  in  this  Ms.  in  such  words  as  hantertoetic,  dodo- 
cetic,  etc.  The  simple  participle  remains  hère  and  there  as  an 
adjective;  such,  for  instance,  are  bcndigaid,  «  blessed,  »  can- 
naid,  «  white,  lit.  bleached,  >>  and  agored,  <c  open.  »  William 
Salesbury  not  unfrequently  made  use  of  this  form  :  in  the 
préface  to  St.  Matthew's  gospel  he  has  honneit  yw  «  it  is  alle- 
ged,  ))  and  Matthew,  I.  2$,  he  renders  TrptoTcxoy.ov  by  cynenit, 
which  he  explains  in  the  margin  as  meaning  cyntaf  anet,  <(  first 
born.  »  In  the  Marchog  Crwydrad  published  By  the  Rev.  D. 
S.  Evans  Tremadoc  and  Carmarthen,  1864;  reprinted  from 
the  Brython  vol.  V),  p.  14,  we  hâve  priodad  «  married  «:  the 
passage  reads  —  pan  \doedd  yn  newydd  briodad  âr  Amherawdr 


5  54  "^^"^  Luxembourg  folio. 

CLwdius  «  when  she  was  newly  married  lo  the  Emperor 
Claudius.  « 

Besides  thèse  there  are  a  few  others  which  hâve  undergone 
more  change,  such  as,  poeth,  «  hot  »  for  popt-  from  the  root 
PAK,  and  llaith,  «  damp,  moist,  »  for  lact-  from  a  root  which 
appears  in  the  Irish  Icigliim,  «  1  melt  ;  »  this  is  made  still 
clearer  by  the  compound  dadlaiîli  «  to  re-melt,  »  that  is,  to 
thaw.  Of  course  doeth  and  coeth  are  not  te  be  mentioned 
hère,  as  they  are  simply  borrowed  from  the  Latin  doctus  and 
codas.  Rocredihat  seems  to  hâve  been  formed  from  a  nominal 
base  credi,  which  ought  to  be  identical  with  the  poetic  word 
craidd  :  this  now  means  the  heart  or  centre  of  anything.  Thus 
it  would  appear  that  rocredihat  means  «  made  hearty  or  stout- 
hearted  »  and  reminds  one  of  the  Greek  ejy.ipoio;  and  of  the 
ordinary  Welsh  calonogi,  «  to  make  spirited  »,  from  calon,  u  the 
heart.  »  Nor  can  vigricaius  be  very  différent  in  meaning,  as  it 
appears  to  be  formed  from  vigor  in  the  same  way  as  pastricare 
from  pastor  ;  so  that  vigricare  probably  would  mean,  «  to 
render  vigorous,  or  to  invigorate.  » 

creiîhi  (gl.  ulcéra)  is  the  plural  oî  craith,  «  a  scar,  »  Irish 
crcacht.  When  a  syllable  is  added,  ai  becomes  ei,  a  rule  which 
still  holds  in  the  language.  The  word  craiîh  probably  comes 
from  a  root  scrag  or  scrak,  whence  we  seem  to  hâve  the  tjv 
glish  scralch,  and  possibly  the  greek  -/xpizaio,  for  vapay.yw. 
On  ■/  =  sk  consult  Benfey's  Or.  u.  Oc.  I.  p.  248. 

cronion  (gl.  assiles)  is  the  plural  oi  cron,  an  adjective  which 
twjce  in  this  Ms.,  glosses  tornatili.  This  last  according  to  Die- 
fenbach  means  «  round,  rounded  orturned  »  or,  as  he  has  it, 
habilis  ad  tornandum.  Assiles  is  obscure  to  me. 

riglion  (gl.  garralis).  This  is  the  plural  of  rigl,  now  rliigyl, 
(I  flippant  or  fluent.  »  P^or  instance  siarad  Cymraeg  yn  rhigyl, 
('  to  talk  Welsh  fluently.  •»  Connected  with  this  word  is  rlii- 
gwm,  <(  rigmarole  or  doggerel,  »  meaning  anything  so  put 
together  as  to  be  easily  repeated  owing  to  its  regularity  of 
rhythm. 
line  12.  cuonoc  (gl.  spumaticus).  This  is  now  ewynog,  «  frothy  or  foa- 
ming,  ))  from  ewyn,  «  foam.  »  The  termination  -oc  =  -ac-. 
Later  it  became  -auc,  then  -awg,  the  diphthong  of  which  once 
more  gives  way  to  0,  as  -awg  is  now  left  to  the  poets  and 
to  bombastic  writers,  -og  only  being  used  in  ordinary  prose. 


The  Luxembourg  folio.  î  5  5 

The  same  remarks  also  apply  to  -0/.  The  origin  of  the  word 
en\n  is  not  very  clear ;  probably  the  ni-  is  identical  with  aw- 
in  aweddnr,  «  fresh  water,  »  and  possibly  with  af-  in  afon, 
{(  a  river.  » 

blinion  fgl.  inertis  is  the  plural  oïblin,  which  now  has  two 
meanings,namely,  «tired»  and  «  tiring».  The  former  is  the  more 
gênerai  ;  the  latter  is  common  in  North  Wales  in  speaking  of 
dispositions;  for  instance,  d\n  blin  means  in  Anglesey  not  «  a 
tired  man  »  but  "  a  man  who  is  of  a  disagreeable  disposition  and 
tires  other  people.  i> 

line  1 5.  incedlesUiéuiom  (gl.  îabe.  ufedis).  As  to  the  Latin  there  can  be 
little  doubt  but  that  it  stands  for  iabe  consedis  =  Qn)  tabe  con- 
sedis.  There  is  considérable  similitary  between  the  first  syl- 
lable  of  the  second  word  as  it  stands  in  the  Ms  and  the  first 
of  a  word  I  read  candentem,  page  2,  line  5.  The  Welsh  gloss 
analyses  itself  into  in  cedlestnéuiom  «  in  a  collection  of  tabès 
or  pituita.  »  The  préposition  is  now  yn;  ced-  is  now  cyd-, 
équivalent  in  meaning  to  the  Latin  con-;  and,  unless  I  am  mis- 
taken,  the  ced-  in  cedlestnéuiom  is  meant  to  give  the  force  of 
con-  in  consedis.  As  to  lestnéuiom,  it  is  of  course  to  be  compared 
with  lestnaued  page  3,  line  17.  The  ending  -om  we  hâve 
already  met  with  ;  leaving  this  out  of  considération,  we  hâve 
Icstncui  for  lestnau-i.  The  syllable  neu  is  identical  with  nau  in 
lestnaued  just  mentioned,  and  occurs  also  in  naues  (gl.  remuas) 
page  I,  line  20.  The  other  part  of  the  word  lest  is  pro- 
bably to  beidentified  with  the  modem  llesg,  «  sluggish,  feeble  », 
whence  lestnéuiom  would  seem  to  mean  a  «  sluggish  fluid  ». 
The  identity  of  lest  with  llesg  need  not  surprise;  for  instances 
of  st  becoming  se  fncw  sg)  are  not  uncommon  in  Welsh  ;  e.  g. 
g)visg  is  for  gwist  and  to  be  compared  with  the  Latin  vestis, 
with  which  it  is  identical  in  meaning  ;  asc-wrn,  <f  a  bone,  »  is 
of  the  same  origin  as  iîTÉsv  ;  both  llost  and  lloscwrn  mean  «  a 
tail  »  and  are  probably  connected  with  llusgo,  «  to  drag  or 
trail  »  ;  it  is  also  probable  that  cwsg,  «  sleep,  »  stands  for 
cwst  =  avt-t,  which  appears  as  cos  in  the  wellknown  ni 
guorcosam  (I  will  not  oversleep)  in  the  luvencus  Codex.  The 
old  Irish  form.  to  be  compared  is  cot-lud,  «  sleep.  » 

line  14.  natrolion  (gl.  regulosis).  As  to  regulus  meaning  a  basilisk  or  a 
serpent  see  Ducange.  Natrolion  is  the  plural  oï  natrol,  «relating 
to  serpents»,  from  the  base  natr,  whence  modem  ncidr,  v  a 


356  The  Luxembourg  folio. 

snake  »  :  plural  nadredd.  The  steps  gone  through  hère  are- 
natr,  nafr,  natlr,  net'ir,  ncitir,  ncidir,  neidr.  The  same  applies 
to  deigr  =  Sây-py  ;  plural  dagrau,  «  tears,  »  and  lo  llcidr,  «  a 
thief,  »  from  the  Latin  laîro,  plural  lladron.  It  is  hère  seen  that 
the  irrational  vowel,  which  evolves  itself  between  t  and  r  and 
gets  fixed  as  an  /,  has  no  footing  in  the  plural,  as  the  r  supports 
itself  on  the  following  vowel.  In  South  Wales  neidir,  llcidir, 
deigirâve  theforms  still  used.  It  is  hardly  necessary  to  mention 
that  natr  =  natar  implied  in  the  Latin  natrix,  «a  vvatersnake.» 
See  Benfey's  Or.  u.  Oc.  I.  pp.  254-62. 

inirogedou  (gl.  orgiis] .  Inirogedou  stands  for  in  i  rogedou  or 
in  i{r)  rogedou,  i  being  the  article  for  ir,  which  dispensed  with 
its  r  before  another  r,  just  as  we  now  write  y  for  yr  in  such 
positions.  Supposing  rogedou  to  be  the  plural  of  r'ogcd,  there 
would  be  no  difficulty  in  identifying  the  latter  with  the  modem 
rhewydd,  «  wantonness,  lust,  »  whence  is  derived  rhewyddu, 
(c  to  copulate.  »  Undoubtedly  regulosis  orgiis  are  to  be  cons- 
trued  together  ;  and  so  is  the  Welsh,  and  in  the  following 
order:  in  i  rogedou  natrolion,  «in  the  serpentine  orgies.» 

line  1  $.  hoitolion  (gl.  esciferis).  Ali  of  the  reading  that  one  can  feel 
pretty  certain  about  is /'-o/Zo/z;  as  far  as  I  can  guess  it,  the 
above  is  the  correct  one.  Boiiolion  would  be  the  plural  0 
boitol,  «  relating  to  food,  »  from  boit,  which  I  take  to  be  the 
old  form  of  the  modem  bwyd,  «.  food.  » 

eusiniou  (gl.  senis)  seems  to  be  the  plural  of  cusini  now  cisin, 
«  the  husks  of  corn,  «  used  as  a  collective  noun  in  modem 
Welsh,  like  «  chaff  «  or  «  bran  »  in  English.  The  word  is 
derived  from  aus  for  aucs  =  Greek  à'j^-iv(o,  Lith,  àuksz-tas. 
Hence  it  appears  probable  that  eusini  at  first  meant  merely 
((  growth,  vegetable  growth  or  foliage;  »  indeed  it  is  very 
possible  that  it  hère  means  foliage,  as  we  are,  I  think,  to  con- 
strue  together  esciferis  senis  =  food-giving  leaves  ;  for  senis 
is  undoubtedly  connected  as  to  etymology  with  the  English 
senna,  «  the  leatlets  of  the  cassia,  d  borrowed  from  the 
Arabie.  As  to  eusini  becoming  eisin  in  modem  Welsh  we  hâve 
in  the  same  Ms  douoleuse  from  bus  which  afterwards  became 
lleis  and  Hais:  The  Welsh  root  aus  has  undergone  another 
séries  of  changes  becoming  os  whence  we  hâve  us,  «  chafï,  » 
and  even  the  word  eisin  occurs  as  usun,  by  progressive  assi- 
milation for  'usin,  in  Salesbury  quoted  by  Ellis  (Early  Engl. 


The  Luxembouni  folio.  ?57 

Pronun.,  III,  p.  76 1;  where  one  reads  as  follows  :  —  >■<  Who 
so  euet  wyll  distincUye  learne  the  Welsh  sound  of  u  let  hym 
once  geue  eare  to  a  Northen  Welsh  man,  whan  he  speaketh 
in  Welsh,  the  wordes  that  signifie  in  English  obedient  chaff 
singlerly  :  which  be  thèse  in  Welshe,  uvudd,  usun.  «  A  simi- 
lar  case  of  assimilation  is  afforded  by  the  word  llurug  for 
llurig  =  lorica.  The  form  uriidd  just  mentioned  is  not  so  easily 
explained,  as  it  seems  immediately  derived  from  "obudiens  or 
'obodiens,  for  obaudiens;  but  Diefenbach  quotes  obaiidirc  only 
in  the  sensé  of  «  contra  vel  maie  audire,  auditum  obstruere,  » 
whereas  we  want  it  in  the  sensé  of  u  obeying.  » 

îoruisioUon  'gl.  jidis)  and  torguisi  (gl.  fuio),  page  2,  line  6, 
baffle  me  completely. 

gurpait  (gl.  fusain)  I  take  to  be  for  gurpaith;  this  would  be 
derived  from  paith,  which,  according  to  Davies,  meant  «  des- 
ertus,  devastatus  :  »  compare  the  derivative  peithiawg,  of  the 
same  meaning.  The  prefix  gur  (=  guor)  enhances  the  strength 
of  the  word  :  so  we  might  render  it  «  thoroughly  devastated,  « 
which  answers  to  the  Latin  fusain  as  nearly  as  the  average  of 
the  glosses  in  this  Ms.  do  to  the  words  they  purport  to  explain. 

line  16.  cou  ??  antolion  (gl.  andriuenereis).  The  first  part  of  the  word  may 
be  cari  and  not  cou  :  the  two  succeeding  letters  I  cannot 
decipher.  In  the  Gr.  C.  the  word  is  given  as  couuantolion,  which 
is  clearly  wrong,  as  it  does  not  give  the  righi  number  of 
letters. 

roricseti  (gl.  sulcauissent)  seems  to  be  the  reading  where  one  would 
expect  roricsent;  there  is  probablysome  mistakein  the  reading 
of  the  last  three  letters  :  so  we  will  confine  our  remarks  to 
the  rest  of  the  word.  Ro  is  of  course  the  usual  prefix,  and  rie 
is  identical  with  rhych,  already  discussed.  The  tense  of  which 
we  hâve  hère  an  instance  runs  in  modem  Welsh  thus  :  — 
rhychas-wn,  rhychas-et,  rhychas-ai,  etc.  containing  in  ail  its 
forms  the  syllable  as,  whereas  in  roricseti  we  hâve  ries  instead 
of  ricas.  This  introduces  the  question  of  new  formations  in 
Welsh,  which  would  be  paralleled  in  Sanskrit,  for  example, 
by  verbs  cf  the  other  conjugations  taking  the  form  of  the  first. 
In  this  way  the  vowel  conjugation  owing  to  the  working  of 
analogy  and  the  fact  of  its  involving  the  language  in  fewer 
difficulties  than  a  consonantal  one,  has  swallowed  up  ail  the 
Welsh  verbs  excepting  a  few  which  form  the  tense  in  question 


558  The  Luxembourg  folio. 

as  tollows  :  —  clywsai,  gwelsai  «  he  had  heard  »,  uhe  had  seen» 
respectively.  Other  instances  are  the  following  :  —  (i)  Par- 
ticiples  in  -etic  as  dodocetic  :  thèse  imply  simple  participles  in 
-at  as  duc-at  which  I  could  not  help  regarding  as  a  new  for- 
mation for  duct.  (2)  The  Sanskrit  -tavya  would  in  Welsh  regu- 
larly  become  -teuya,  -dyw,  -dwy;  but  it  never  occurs  except  as 
-adwy  -  atavya.  Similarly  in  old  Cornish  it  is  met  with  as 
-adow  =  -ddev-,  as  in  caradow  -----  Welsh  caradwy.  (5)  So  also 
in  the  case  of  the  affix -far  or  rather  that  form  of  it  which 
appears  as  tôr  in  the  Latin  victor,  vicîoris,  we  meet  always 
with  -adur  (=  ator)  as  in  penadur,  a  monarch.  A  careful  study 
of  Welsh  affixes  would  probably  increase  the  number  of  forms 
where  the  insertion  of  the  vowel  a  has  been  effected  in  the 
same  way. 

Une  17.  ancou  (gl.  salno).  Asto  the  Latin  it  may  be  samo;  possibly  the 
original  was  sanie  from  sanies.  The  Welsh  seems  identical  with 
the  modem  angeu,  «  death,  »  Breton  ancou,  «  death.  »  In  modem 
Welsh  u  has  become  iï  and  the  termination  ou  has  the  three  forms 
au  (=  a  -{-  il),  eu  {=  e  -\-  ii),  and  e  with  the  u  omitted.  The 
three  are  optionally  used  in  the  singular,  thus  borau,  borcu  or 
bore,  <(  morning.  »  The  same  terminations,  at  least  the  same  in 
form,  are  used  in  the  formation  of  the  plural  of  nouns  very 
frequently,  e.  g.  pethau,  petheu  or  pethe,  things  :  -au  is  now 
the  only  one  written  ;  formerly  eu  was  common  in  books  and 
is  still  the  prévalent  one  in  reading,  while  e  is  more  confmed 
to  certain  dialects.  On  comparing  the  following  words  in  this 
fragment  :  —  euonoc,  natrolion,  rogedon,  atanocion,  catol,  etc. 
it  appears  that  1  had  not  as  yet  passed  through  the  stage  0 
into  ou  and  au;  so  one  could  not  think  of  deriving  the  ou  of 
ancou  from  an  il;  further  I  could  not  undertake  to  say  any 
thing  about  it.  In  some  instances  we  know  ou  or  au  to  be  a 
mère  guna  of  ;z;  e.  g.  gcnau,  «mouth,  »  to  becompared  with 
Yovu-ç,  and  tendu,  «  thin,  lean,»  which  represents  the  Sanskrit 
tanu-s,  Latin  tcmi-is.  In  other  instances  a  b  or  m  has  become 
)',  u,  ii,  successively  and  given  rise  to  the  same  form  of 
ending  as  in  clcddeu,  for  cleddyf  and  in  delieu  and  goreu,  both 
superlatives  in  af  (for  am),  "dehaf  and  goraf:  The  same  is 
perhaps  the  case  in  the  Welsh  eisieu,  «  want,  »  Irish  easblia, 
«  a  defect,  ^  and  in  the  Welsh  borau  (for  "morau,  probably 
for  'moraf  équivalent  to  the  Irish  bdracli  or  mâradi)  of  the 


Tlie  Luxembourg  folio.  559 

same  origin  as  the  German  morgen,  Gothic  maurgins.  Still 
angeu,  dechreu,  chwareu,  etc.  are  obscure  to  me.  Manaw, 
the  Welsh  name  of  the  Isle  of  Man,  suggests  to  me  that  au 
may  possibly  represent  in  some  cases  an  or  ans  :  were  this 
the  case,  the  plural  -au  would  of  course  represent  an  old 
accusative  in  an  or  ans. 

airolion  l'gl.  uim).  The  n  of  airolion  is  not  in  the  Ms  but  the 
Word  being  in  the  margin  I  venture  to  think  that  it  was  once 
there  and  ultimately  faded  away.  Airolion  would  be  the  plural 
of  airol,  which  must  mean  «  relating  to  slaughter  or  war,  >i 
from  air,  now  aer  «  slaughter  or  war.  »  The  Irish  is  ar; 
but  how  cornes  Welsh  ai  or  ae  to  be  -  Irish  a?  1  ani  inclined 
to  think  that  the  stem  is  agr-,  with  which  one  should  com- 
pare ver-agri,  as  well  as  the  Greek  à^pa,  Zend  azra,  ==  «  the 
chase.  n  Hère  may  also  be  compared  old  Irish  àram,  mod. 
direanih,  which  Stokes  considers  as  standing  for  ad-ram;  nor 
is  the  disappearing  of  a  média  before  r  uncommon  in  Welsh, 
e.  g.ygarawys  =~  quadragesima;  cadair,  a  chair,  -=  v.aOÉopa, 
Irish  cathdir.  It  appears  that  airolion  as  a  gloss  on  vim  must 
mean,  «  those  whose  business  is  slaugther  and  war  »  i.  e.  a 
force  or  troop  of  soldiers. 

.  rogulipias  fgl.  oliuami  .  This  is  a  form  derived  from  the  nominal 
base  gulip,  now  gnlyb,  «  wet,  »  and  naturally  follows  the 
vowel  conjugation.  On  gulip  see  Stokes'  Irish  Glosses,  p.  87. 
Hère  we  hâve  a  fair  spécimen  of  the  loose  and  easy  way,  in 
which  the  Latin  words  are  translated  by  the  writer  of  this 
fragment. 

hantertoetic  l'gl.  semigilati..  It  is  right  to  say  that  the  Latin  and 
the  Word  next  following  look  like  semigilatis  ros  :  this  I  am 
inclined  to  treat  as  semigilati  5[e]ro5.  Semigilatis  could  not  fail 
to  hâve  been  rendered  into  Welsh  as  a  plural^  which  hanter- 
toetic however  is  not.  Skinner  in  his  Etymologicon  Lingus 
Anglicane  (London  lôyij  gives  under  the  word  Clung,  n  semi- 
gelaîus  ^  famé  seu  frigore  semimortuus;  »  but  hère  we  must 
probably  understand  semicelatus,  which  would  mean  exactly 
hantertoetic  =  half  thatched  or  half  covered.  Hanter,  now 
uanner,  half,  but  Breton  hanter,  is  an  old  comparative  :  thus, 
hanter  -  hami-ter  ^  sami-ter  ïvom  the  same  origin  as  the  Skr. 
s7,mi-,  Latm  semi-,  Old.  H.  G.  sami-,  Greek  r,[j.'.-  and  ï)ij.'.rj;. 
Vide  Curtius  n"  453  ;  according  to  him  sama,  which  is  the 


560  The  Luxembourg  folio. 

form  reflected    in   the   Welsh   word,    is  the  original  base. 

igueltiocion  fgl.  in  jenosa].  The  Welsh  stands  for  in  gueltiocion, 
the  in  being  a  proclitic  is  written  with  the  next  word  and  the 
/;  left  out  as  in  mogou  and  drog,  for  mongou  and  drong.  Gueltio- 
cion is  of  course  the  plural  of  gueltioc  «  grassy  «  or  according 
to  the  Latin  «  hayey.  »  In  modem  Welsh  it  is  guelltog  without 
the  semivowel  /,  and  derived  from  gwellt,  «  grass,  straw.  » 
But  the  i  is  essential  to  the  word,  as  gualt,  now  gwallt, 
means  «the  hair  ofthe  head  »,  where  asgualti,  which  of  course 
must  become  guelti,  now  gwellt,  means  «  grass  or  straw.  » 
So  we  seem  to  be  justified  in  dividing  gueltioc  into  guelti-oc  or 
guelt-i-oc  and  not  into  guelt-ioc  :  probably  guelti  =  valtya, 
and  gueltioc  =  valty'âc,  which  would  account  for  the  i  appea- 
ring  as  a  semivowel  before  terminations  beginning  with  a 
vowel.  On  the  suffix  y  a  see  Schleicher's  Comp.,  pp.   388-98. 

airmaou  (gl.  niachide).  The  Latin  is  obscure  to  me  :  it  is  proba- 
bly connected  with  [j.iyr,,  as  airmaou  means  «  battlefields  »  : 
old  Irish  armaige.  The  Welsh  is  in  the  plural,  while  the  Latin 
is  in  the  singular  ;  thus  «  in  fenosâ  machide  =  in  gueltiocion 
airmaou  =-  in  grassy  battlefields.  »  Reverting  to  airmaou 
the  singular  form  ought  to  be  airma,  whereas,  p.  2,  line  9, 
itis  arima,  which  I  think  cannot  but  be  a  mistake. 
ine  19.  atanocion  (gl.  alligeris).  Is  the  plural  of  atanoc,  winged,  from 
atan,  a  wing.  This  is  probably  derived  from  the  root  pat  as 
in  the  Latin  patere. 

diprim  (gl.  essum)  may  possibly  be  also  read  doprim.  The  termi- 
nation  -im  is  the  same  as  that  of  such  infmitives  as  medi,  \ 
rhoddi,  moli,  etc.  which  are,  more  correctly  speaking,  abstracti 
nouns.  In  modem  Welsh  the  m  does  not  appear  even  as  an  ; 
/or  11'  in  such  forms;  that  it  once  was  a  part  ofthe  same  seems  ' 
proved  by  the  verses  in  the  Codex  of  Juvencus,  where  one  ; 
fmds  the  tolerably  intelligible  words  :  —  ni  guru  gnau  molim 
trin[taut]  =  (it  is)  no  hard  work  to  praise  the  Trinity  :  a  j 
little  further  on  we  hâve  :  —  nit  guorgnau  molim  map  meir  =  \ 
(it  is;  no  excessive  work  to  praise  Mary's  Son.  Hère  I  think! 
there  can  be  no  doubt  but  that  molim  modem  moli,  to  î 
praise. 

roluncas  (^\.  guturicau[itj).  This  verb  is  formed  from  lune  now 
Ihvnc  or  llwngc ;  the  infmitive  of  the  modem  verb  isllyncu,' 
to  swallow.  With  guturicare  compare  vigricarc,  pastricare,  etc.  | 


The  Luxembourg  folio.  361 

line  20  naues  (gl.  reumasj.  I  know  of  no  word  reuina  meaning  a  ship, 
and  I  take  reuinas  to  stand  for  paûixa-a.  If  so  naues  is  Welsh 
^  nav-es,  and  to  be  referred  to  the  same  origin  as  cedlest- 
neuiom.  Compare  also  the  Welsh  équivalent  for  Neptune,  nam- 
ely,  Neifion,  for  Nevi-ân.  Thus  it  would  seem  that  naves 
means  «  currents  »,  perhaps  «  ebb  and  flow  »  of  the  sea  : 
then  titonis  reumas  would  be  the  currents  of  the  sea  ^  -zx 
titonis  ptù[j.x-yt,  for  titonis  ^  maris,  which  is  the  gloss  on  it. 
The  termination  es  has  now  generally  the  force  of  a  collective 
and  not  of  a  plural  :  e.  g.  llynges,  «  a  fleet»;  bûches,  «a  herd 
of  milch  cows  «;  then  «  the  place  where  they  are  brought  to- 
gether  to  be  milked.  »  Dr.  Davies  in  his  Welsh-Latin  dictio- 
nary  gives  branes  --  brain. 
line  2  I .  bodinlou  gl.  phalanges)  is  the  plural  of  bodln  which  occurs  page 
2  line  14  below  :  it  is  now  byddin,  «  an  army.  »  Bodinlou 
seems  to  indicate  that  the  base  is  bodini  not  merely  bodln  : 
however  the  Irish  bulden^  which  is  a  fem.  J-stem  entirely 
disagrees  with  the  Welsh  form  ;  possibly  they  are  différent 
forms  of  the  same  word.  The  0  o{  bodln  prevents  us  comparing 
it  with  the  English  band  from  the  root  bandh  or  bhandh,  «  to 
bind.  ))  It  seems  best  referred  to  the  root  budh,  «  to  be 
awake,  »  etc.  ;  in  this  case  it  would  hâve  had  a  meaning  simi- 
lar  to  the  English  <(  watch  »  or  «  die  Wache  «  of  the  Ger- 
mans.  Translate  together  «  phalanges  pastricant  arcontes.  » 
dodlnwni  (gl.  décréta).  The  Latin  has  usually  been  read  decreat; 
but  I  think  that  a  better  reading  is  decreclt.  I  venture  to 
prefer  décréta  to  both,  as  I  fmd  that  ail  the  verbs  of  the  ^rd 
person  singular  of  the  présent  indicative  active  end  in  this  Ms 
in  t  in  the  glosses.  As  to  dodlmenu  leaving  out  of  considération 
the  prefix  do,  it  appears  that  dlmenu  =^  modem  dljamv,  «  despi- 
cable,  dwindling.  » 
^or-/ (gl.  é-^^ura).  The  Welsh  word  seems  to  be  an  adjective 
ending  in  -0/  ;  so  I  venture  to  construe  décréta  essura  turba 
as  «  the  diminished  famishing  crowd.  « 
page  2,  line  i.  dodiprit  (gl.  grH  sat).  I  think  this  is  the  reading  of  the 
Welsh,  but  the  Latin  baffles  me  altogether.  Dodiprit  ought  to 
mean  «  eats  up  »  or  «  devours,  «  as  it  is  derived  from  the 
simple  verb,  whose  infinitive  dlprlm  we  hâve  already  met 
with. 
blcoled  (gl.  uecordm)  would  now  be  bygyledd  :  the  only  nearly 


^62  The  Luxembourg  folio. 

related  word  known  to  me  is  bygyhi,  «  to  molest  or  oppress.  » 

line  2.  nepcn  (gl.  nequit  .  Ncquiî  stands  undoubtedly  for  ne  quid  and  is 
in  perfect  keeping  with  Welsh  phonology  up  to  the  présent 
day,  as  it  is  hard  to  get  a  Welshman  to  say  id,  and  not  make 
it  it;  for  a  short  vowel  in  his  case  seems  to  demand  not  a 
média  but  a  tenuis  after  it;  thus  he  generally  says  hot,  pot, 
rot,  etc.,  for  hod,  pod,  rod,  etc.  Nepcn  =  ne-pen,  just  as 
nepell  --  ne-pell  and  nemawr  =  ne-mawr,  meaning  respectively 
ce  not  far  »  and  «  not  much  »  from  pell,  «  far  »  and  manr, 
«  much.  ))  The  syllable  pen  is  now  pyn  in  «  py/iag  »  =  pyn- 
ag  --=  Latin  cuin-que  as  in  the  formula  /j)V)'-/?}7î^g  =  qui  cum- 
que  and  pa  wraig  bynag  =  quae  mulier  cumque.  It  is  proba- 
bly  a  neuter  like  hyn,  «  this,  »  as  in  hyn  o  bryd  «i  id  temporis;  ;> 
so  nepen  =  «  not  any  thing  or  nothing.  )> 
biin  is  written  over  incerte  but  is  a  gloss  I  think  on  uiraginis.  The 
latter  had  been  already  glossed  mulieris  so  that  the  Welsh 
gloss  could  not  help  standing  over  the  next  word  incerte.  Of 
course  the  words  viraginis  incerte  ;for  incerte)  hâve  to  be 
construed  together  :  indeed  it  is  not  unlikely  we  should  take 
together  nequid  viraginis  incerts.  Bun  is  identical  v\'ith  the 
modem  Welsh  bun  used  in  poetry  for  «  woman,  maid  or  damsel  >'  ; 
it  cannot  be  equated  with  *  ban  (as  in  banyw],  Irish  bean,:i 
woman  :  it  stands  more  probably  for  ban,  which  reminds  one 
of  the  Skr.  -jâni  (rather  Xhan  jani),  Anglo-Sax.  cwén. 
da?  dou  (gl.  edulia).  Owing  to  a  defect  in  the  Ms  I  cannot  make 
anything  of  this  gloss  :  it  is  clear  that  it  is  a  plural  form  in  -ou. 
cadr  îgl.  decoreo).  Decoreo  is  from  an  adjectival  form  dccoreus  : 
at  any  rate  the  Welsh  requires  this,  as  cadr  =  u  fortis, 
robustus;  Armorie,  venustus,  »  as  Davies  rightly  observes. 
The  form  which  the  word  has  taken  in  Armorie  is  kaer 
u  beau,  superbe,  magnifique,  grand.  » 
cuntullet  (gl.  collegio)  is  derived  from  cuntull,  now  cynnull,  «  to 
collect,  or  assemble  :  »  cuntullet  has  been  superseded  by 
cynnulliad,  excepting  in  the  compound  cynnulleidfa,  «  a  con- 
grégation, »  -  cuntullet- ma.  The  prefix  con  becomes  cun 
throughthe  influence  of  the  succeeding  u.  Cuntullet  is  probably 
derived  from  the  root  tal,  more  usually  met  with  as  tul  ==«  he  be 
auf,  wasge,  «  see  Curtius  Gr.  no.  236]  and  seems  to  be,  a 
participial  formation  meaning  0  what  has  been  collected  or 
assembled  together.  » 


The  Luxembourg  folio.  363 

line  3.  deurr  (gl.  acri)  isnow  wrilten  dewr,  «  brave,  valiani;);  the  origin 
of  the  Word  is  to  me  obscure. 
arocrion  (gl.  atrocia  )  is  the  plural  of  arocr.  If  I  am  right  in  suppo- 
sing  the  first  two  letters  to  represent  the  préposition  ar  used 
hère  as  an  intensive,  we  hâve,  as  the  kernel  of  the  word,  the 
syllable  ocr,  which  undoubtedly  represents,  and  with  perfect 
regularity,  the  Latin  âcer,  âcris;  so  arocrion  probably  means 
«  very  sharp,  very  violent,  «  which  does  tolerably  as  a  rende- 
ring  of  atrocia.  The  modem  Welsh  ocr,  «  usury^  »  has  nothing 
to  do  with  this  word,  as  it  was  borrowed  from  the  Anglo- 
Saxon  wôcor  =  German  wucher. 

ardrén  fgl.  pr^pugnis]  stands  for  ar-dren.  Ar  is  the  ordinary  pre- 
fix;  dren  is  now  trin,  «  a  battle  ».  The  change  of  dr  into  tr  in 
modem  Welsh  occurs  also  in  trutn,  «  a  ridge  «,  Irish  druim, 
and  in  trythyll  and  trern,  which  used  to  be  drythyll  and  drem 
respectively  not  a  very  long  time  ago.  As  to  the  change  of  e 
into  /  see  the  next  line,  where  we  hâve  derinorion,  which  in  the 
modem  language  is  dirfawrion. 

catol  (gl.  auelloso)  is  derived  from  cat,  now  cad,  «  a  battle.  « 
As  to  avelloso  it  is  derived  from  avellum,  which  according  to 
Ducange  means  v  war  or  civil  war.  « 
line  4.  dermorion  (gl,  inormia)  is  written  in  the  line  but  there  can  be 
no  doubtthat  it  is  a  gloss  on  inormia,  that  is,  of  course,  enormia. 
The  singular  would  hâve  been  dermor,  now  dirfawr,  «  very  great, 
or  huge  ».  Like  the  old  Irish  dermar  it  analyses  itself  into  *do- 
ari-mdr,  whence  regularly  d^er'mor;  in  fact  we  hâve  in  Welsh 
also  erfawr  (=  "ari-mâr]  used  nearly  with  the  same  meaning 
as  dirfawr. 

buenion  (gl.  concitis)  stands  for  "buanion  and  is  the  plural  of 
buan,  «  swift,  quîck.  «  A  more  original  form  of  the  word 
would  probably  be  muan;  the  ending  -an  being  the  same  as 
in  bychan,  «  little,  «  (from  bach,  «  little  »)  and  the  root  being 
the  same  as  that  of  the  Latin  mov-eo  and  mïï-tare. 

rannou  (gl.  partimonia)  is  the  plural  of  rann,  now  rhan,  «  a  part 
or  share.  «  Can  rann  be  for  rap-na  from  the  same  root  as  the 
Latin  rapere  (see  Curtius  no.  331),  or  for  rad-na  from  a  root 
RAD  (see  Fick^  p.  164),  from  which  the  Latin  radere  is  derived? 
In  the  former  case  it  would  mean  «  one's  share  of  booty  etc.  n 
and  in  the  latter  «  a  pièce  torn  or  hacked  off  from  a  greater 
one.  » 

25 


564  T'/'fi  Luxembourg  folio. 

line  5.  linom  (gl.  litturain)  is  a  derivative  from  /m,  «  a  Une,  «  =  Latin 

tigom  (gl.  neu/).  A  nei/^s  seems  hère  to  be  looked  at  as  an  emi- 
nence  or  rising  on  the  skin,  whereas  in  line  1 1  it  refers  to  the 
brownness  of  a  spot  on  it.  Tigom  is  probably  for  *stigom  : 
see  Kuhn's  Beitrsge  vol  VII,  p.  25,  where  Stokes  mentions 
several  forms  which  hâve  lost  an  initial  s.  Another  instance, 
which  occurs  in  this  Ms,  is  to  (for  stog)  in  comtoou.  Of  course 
stigom  reminds  one  of  the  English  sty.,  «  a  small  tumour  on 
the  edge  of  the  eyelid.  «  The  root  is  stigh  «  ascendere.  « 
I  think  one  might  read  linoni,  tigoni,  etc.  instead  of  linom, 
tigom,  etc.  ;  on  the  whole  I  hâve  hesitated  to  départ  from  the 
old  reading  of  the  termination  in  question. 

calât  (gl.  durili)  is  in  modem  Welsh  caled,  (f  hard»;  the  origin  of 
the  Word  is  to  me  obscure,  but  I  should  hardly  hesitate  to  equate 
it  with  the  Gothic  hardus.  On  the  disagreement  between  Cur- 
tius  and  Corssen  on  the  origin  of  hardus  consult  Curtius  Gr. 
no.  42  b,  and  Corssen  M.  516.  Supposing  Curtius  to  be  right, 
it  is  to  be  noticed  that  the  other  Celtic  derivatives  of  the 
root  KAR  retain  the  r  unchanged^  e.  g.  careg,  «  a  stone,  »  and 
corwg^  Irish  curach,  «  a  little  boat,  «  which  strongly  remind 
one  of  the  Sanskrit  karaka  (Wasserkrug;  eine  in  Form  eines 
Krugs  ausgehœltev  Kokosnuss)   :  fmally  one  may  compare 
with  karaka  the  Welsh  caregl,  «  calix,  scyphus.  » 
line  6.  acupet  (gl.  occupât)  stands  probably  for  achupet.  The  verb  achup, 
now  achub,  «  to  save^,  rescue  »  etc.  is  derived  from  occupare 
in  the  sensé  of  «  anticipating  «   or  «  preventing,  «  which 
seems  to  hâve  led  to  the  idea  of  guarding   or  anticipating 
attacks,  whence   the   passage  is  natural  to   «    saving  »  or' 
«  rescuing.  »  The  word  has  still  at  times  the  signification  to 
anticipate  :  indeed  the  only  meanings  which  Davies  attributes  , 
to  it  are  «  occupare,  »  and  «  prseoccupare.  »  It  is  very  usual  i 
to  say  efe  a  achubodd  fy  mlaen  «  he  occupied  my  front,  ))  ^ 
meaning  «  to  outstrip,  outrun  or  hâve  the  start  of  one  )>  liter-  \ 
ally  or    metaphorically.    The  words    occupât  tutamine  îoles,  ■ 
which  I  take  together,  seem  to  suggest  that  the  writer  used  I 
the  Latin  verb  as  we  do  the  modem  Welsh  achub  ;  for  the  ! 
sensé  seems  to  be  «  he  saves  his  limbs  by  means  of  a  protec- 
tion. «  I  hardly  think  the  allitération  hère  accidentai;  other- 
wise  why  not  use  membra  instead  of  the  outlandish  tôles i' 


The  Luxembourg  folio.  365 

goUnnoc  (gl.  rostratam)  is  derived  from  golhin,  in  the  Juvencus 
Codex  gilhin,  and  now  gylfin,  «  the  bill  or  beak  of  a  bird  ;  » 
Davies  gives  gwlf  and  gwhv  as  used  in  the  same  sensé.  In 
middle  and  modem  Irish  the  word  occurs  as  gulbha,  genitive 
gulhhan.  So  it  appears  that  golbinoc  stands  for  gulbinoc,  the  u 
being  changed  into  0  before  the  /  of  the  succeeding  syllable. 

line  7.  creham  (gl.  uibro).  This  gloss  is  in  the  margin  and  I  venture  to 
think  that  reham,  which  is  ail  that  is  now  visible,  stands  for 
creham,  which  in  its  turn  represents  an  older  form  criham,  the 
i  being  modulated  into  e  before  the  a  of  the  next  syllable.  In 
line  10  of  the  preceding  page  the  :  oi  crihot  (or  crihet}  remains, 
as  neither  0  nor  e  has  this  effect  on  /. 
/reorgdm  (gl.  per/oro)  reminds  one  at  first  sight  ofthe  Irish  treo- 
ruighim,  «  I  guide  or  lead.  «  On  the  whole  it  seems  better 
referred  to  the  root  arg  which  Curtius  fmds  in  opsYo)  and 
Skr.  arjami  «  erlange.  »  Treorgam  would  then  mean,  «  I  reach 
through,  or  get  through,  .)  which  may  be  regarded  as  a  pas- 
sable translation  of  perfora  considering  that  the  writer  paid, 
apparently,  more  attention  to  the  préfixes  than  the  entire 
words  of  which  they  formed  parts  :  this  seems  to  be  the  case 
hère,  per-  being  well  rendered  by  ire-. 

line  8.  strouis  (gl.  straui).  The  Welsh  seems  to  hâve  borrowed  the  Latin 
verb  struere  in  the  sensé  of  insidias  vel  mortem  alicui  struere  : 
strouis  is  the  first  person  singular  of  the  preterite  of  the  same 
as  used  in  Old  Welsh.  In  the  modem  language  it  is  not  used 
as  such,  but  its  base  lopped  of  its  inflections  occurs  as  a  noun, 
which  is  still  familiar  and  has  the  form  ystryw,  «  a  trick,  a 
stratagem.  »  If  we  take  sterno,  stravi,  as  meaning  «  to  prostrate 
or  floor  an  enemy  »,  the  Iwo  verbs  would  not  be  very  tar  from 
being  synonymous.  This  conjecture  is  not  satisfactory,  but  I 
see  no  other  way  of  accounting  for  the  one  being  hère  used  to 
explain  the  other. 
natrolion  (gl.  pithis)  we  hâve  already  met  with.  Of  course  orgiis 
piîhis  =  orgiis  regulosis.  Pythis  seems  to  mean  «  relating  to 
serpents  »  apparently  of  the  pytho  species.  Ought  the  word 
to  be  pithiisï 
astorîou  (gl.  conflictis)  may  also  be  read  astoitou  :  I  hâve  not 
been  able  to  identify  the  word. 

line  9.  catalrid  fgl.  auelloso).  The  last  three  letters  of  this  gloss  may  be 


^66  The  Luxembourg  folio. 

ird,  rid,  inel  or  nid.  I  am  unable  to  détermine  which  :  they  are 
separated  from  caîal  by  the  stems  of  the  //  of  avelloso;  but  that 
by  no  means  proves  that  they  form  a  separate  word.  Possibly 
catahid  may  stand  for  caiolrid  and  mean  cadolrwydd,  «  warli-  ' 
keness,  )>  which  is  a  possible  derivative  of  cadol.  Then  taking 
the  words  together  avelloso  in  agone  miliîavi,  the  Welsh  rende- 
ring  would  be  enarima  caiolrid  etc.  «  in  the  battle  of  war- 
likeness  or  bravery  »  etc.,  that  is,  the  adjective  avelloso  would 
be  glossed  by  a  noun  in  the  genitive,  This  is  very  unsatisfac- 
tory  and  must  remain  so  until  the  reading  is  made  out  with 
more  certainty. 

enarima  (gl.  in  agone)  stands  for  en  airma;  for  arima  violâtes  the  , 
vowel  séquence  and   is  refuted  by  the  other  related  forms  ; 
airou,  airolion  and  airmaou.  En  is  the  modulated  form  of  the 
préposition  in  coming  before  the  a  of  airma  on  which  it  leans 
so  to  say,  being  one  of  the  Welsh  proclitics. 

airou  (gl.  strages)  is  a  related  word  and  the  plural  of  air  already  , 
noticed. 
line  1 1.  Hou  (gl.  nenum).  This  word  has  fallen  out  of  use;  but  the  root 
//  occurs  gunated   as  liai   «  color   fuscus,   «    according  to 
Davies,  who  mentions  gwydd  lai  and  march  liai  which  mean  ^ 
respectively  «  a  grey  goose  »  and  «  a  brown  horse.  »  So  it 
seems  hou   hère   means    «  a  brownness  n  or  «  a   brown 
spot.  » 

milinon  (gl.  Ubosas).  I  am  anything  but  clear  as  to  the  meaning 
of  Ubosas.  I  suspect  that  milinon  is  a  mistake  for  milinion  the 
plural  of  milin,  now  melyn,  «  yellow,  lit.  of  the  colour  of  j 
honey  »  [mel).  It  is  probable  that  the  word  is  derived  in  any  i 
case  from  mel  :  possibly  it  may  mean  «  honeyed  things  »  say  ' 
«  cakes,  »  which  is  supposed  to  be  the  meaning  of  lihosas  \ 
supposing  it  a  derivative  of  the  Latin  libum.  Milinon  for  ' 
melinon  would  be  an  instance  of  vowel  assimilation,  which  j 
is  not  observed  in  this  class  of  words  in  modem  Welsh  :  the  I 
same  applies  to  guiltiatou  below. 

cran  (gl.  tornatilî).  In  addition  to  what  has  been  already  said  i 
under  cronion  it  would  not  be  out  of  place  to  make  a  few 
observations  hère  on  the  class  of  adjectives  to  which   cron 
belongs.  The  greater  number  of  them  are  comprised  in  the 
following  list  :  — 


The  Luxembourg  folio. 


î67 


i)  Sing. 

masc, 

,  crwm; 

fem. 

croin  ; 

plural, 

crymion, 

curved. 

)) 

)) 

crwn  ; 

» 

cron; 

» 

crynion, 

round. 

» 

» 

dwfn; 

» 

dofn; 

» 

dyfnion, 

deep. 

)) 

» 

llwfr; 

)) 

llofr; 

» 

llyfrion, 

cowardly. 

» 

» 

llwm; 

» 

llom  ; 

)) 

llymion, 

bare. 

» 

n 

trwm  ; 

)> 

îrom  ; 

» 

trymion, 

heavy. 

)) 

)) 

manwl; 

» 

manol; 

)) 

manylion, 

minute. 

2)  Sing. 

masc. 

■  hyr; 

fem. 

ber; 

plural; 

,  byrion, 

short. 

» 

» 

brych ; 

)) 

brech  ; 

» 

brychion, 

freckled. 

« 

» 

gwlyb; 

)) 

gwleb  ; 

» 

gwlybion, 

wet. 

» 

» 

Uyfn; 

)) 

llefn; 

» 

llyfnion. 

smooth. 

)) 

» 

llym  ; 

)) 

Hem  ; 

)) 

llymion 

sharp. 

)) 

» 

sych; 

» 

sech; 

« 

sychion, 

dry. 

» 

» 

tyn; 

» 

ten; 

)) 

tynion. 

tight. 

» 

)) 

melyn; 

» 

melen; 

» 

melynion, 

yellow. 

Reverting  to  such  forms  as  trwm  (masc.)  and  îrom  (fem.),  the 
présent  Ms  shows  no  trace  of  such  a  differentiation  of  the  forms  : 
moreover  the  Irish  has  o  in  both  genders.  The  explanation 
seems  to  be  this  that  the  masculine  had  thrown  away  itstermi- 
nation  some  time  before  the  a  of  the  féminine  had  disappeared , 
thus,  tyn  =*ten,  while  ten  =  *tina,  which  of  course  must  hâve 
become  "tcna,  whence,  by  droppingthe  termination,  ten  would 
resuit.  Similarly  ?nvm  =^*trom;  and  trom  ^=  *troma.  Hère  the 
oofthe  masculine  being  short  becomes,  according  to  rule, 
w  :  the  same  change  seems  to  hâve  been  prevented  in  the 
féminine  by  the  a  which  once  followed  as  a  féminine  termina- 
tion. This  pairing  of  the  vowels  w,  o,  and  y,  e,  has  become 
an  instinct  of  the  language,  and  has  been  the  means  of  chan- 
ging  the  gender  of  a  good  many  nouns.  Propose  to  a  Welsh- 
man  a  monosyllabic  noun^,  with  which  he  is  unacquainted,  he 
will  seldom  hesitate  to  use  it  as  a  féminine  if  its  vowel  is  o  or 
e,  and  as  a  masculine  if  it  is  w^  or  y  :  if  it  is  a  or  /  he  is  unde- 
cided.  He  also  applies  this  rule  extensively  in  the  formation  of 
othernouns,  e.  g.  hogyn,  a  lad,  hogen,  a  lass;  asyn,  a  he-ass, 
asen,  a  she-ass;  sometimes  such  a  pair  of  words  has  only  one 
meaning  e.  g.  ovd  and  cod,  a  bag. 
line  12.  guiltiatou  (gl.  tonsuras)  is  the  plural  of  guiltiat  for  gualtiat  (by 
assimilation  as  in  the  case  oï milinon)kom gualt,  now gwallt,  hair. 

mogou  (gl.  comas)  stands  of  course  for  mongou  the  plural  of  mong, 
now  mwng,  «  mane  »  rather  than  «  hair.  » 


368  The  Luxembourg  folio. 

craseticion  (gl.  spicis  [lege  spissis])  is  the  plural  of  craseiic,  which 
is  evidently  derived,  as  Stokes  suggests,  from  the  Latin  verb 
crasso,  crassatum,  crassare,  «  to  make  thick,  to  condense.  « 
as  when  we  read  «  pili  crassantur  in  setas  «  and  «  crassatus 
aer.  »  The  ordinary  Welsh  word  cras  «  arid_,  parched  or  scor- 
ched  )>-and  its  derivative  crasu,  «  to  parch,  »  do  not  offer  a 
suitable  explanation  of  the  word  in  question. 

ableuou  (gl.  iubis)  stands  ior  a  bleuou,  which  in  its  turn  represents 
ac  bleuou  assimilated  into  ab  bleuou  and  written  a  bleuou  «  and 
hairs  »  or  «  with  hairs.  «  Bleuou  is  the  plural  of  bleu,  now 
written  blew,  «  hair.  »  The  Latin  words  et  spisis  jubis  are  to 
be  read  together  :  so  the  Welsh  but  in  the  order  which  the 
conjunction  a  suggests  :  thus  a  bleuou  craseticion.  Reverting  to 
the  word  blew,  and  comparing  other  forins  of  this  kind  such 
as  rliew,  frost  ;  glcw,  «  brave  ;  »  tew,  «.  thick,  fat  ;  «  llew,  «  a 
lion,  »  and  drew-i,  «  olere,  fsetere,  «  in  none  of  thèse  does  it 
seem  probable  that  ew  is  immediately,  if  at  ail,  derived  from 
au.  Llew,  Breton  leon,  is  possibly  borrowed  from  Latin  and 
not  to  be  considered  hère.  Tew  (Irish  tiugh)  probably  stands 
for  tegu  (for  tigu),  with  which  one  should  compare  the 
English  «  thick  »  German  dick.  Welsh  rhew  (Irish  rco)  pro- 
bably =  reu,  for  riu,  which  reminds  one  of  the  Gothic/nus; 
the  Celtic  languages  having  hère  lost  an  initial  p  as  often  hap- 
pens.  Similarly  Welsh  byw,  Irish  beo,  strongly  reminds  of  the 
Gothic  gvius,  =  vivus.  The  words  glew  and  drew-i  are  of 
obscure  origin  :  however  drew-i  seems  related  to  the  Irish 
drabh,  «  refuse,  »  drabhas,  «  dirt,  nastiness.  »  So  drew-  may 
stand  for  dram  or  drav,  according  as  the  word  is  to  be  refer- 
red  to  the  root  dram  or  to  dru,  both  meaning,  «  to  run,  to 
drop  or  trickle  :  »  see  Curtius  no.  275.  The  transition  of 
meaning  would  in  this  instance  be  aptly  illustrated  by  his 
dérivation  of  the  Latin  «  tabès.  » 
cotntoou  (gl.  stemicamina).  With  stemicamina  compare  bellicamina, 
stcmicaturas,  pastricant,  vigricatus,  etc.  It  is  probably  derived 
from  Gzi\j.\).y.  through  a  late  Latin  form  stema.  It  appears  that 
stemicarc  meant  not  only  «  to  put  on  a  garland  »  or  «  crown 
with  a  chaplet  »  but  to  cover  generally  with  any  article  of 
dress,  iov  stcmicaturas  is  glossed  vestimeiita.  The  Welsh  is  the 
plural  oïcom-to,  from  to,  «  a  thatch  or  covering;  »  it  stands 
for  stog  from  the  Aryan  root  stag,  to  cover,  whence  aii-^cq, 


The  Luxemlwiirg  folio.  369 

and  Latin  toga.  This  is  not  the  only  instance  of  a  becoming 
0  before  a  guttural  in  Welsh  ;  compare  nos,  «  night,  »  = 
'nocs;  noeth  =  *noct-;  cyfoeth  =  *cumacî;  convg  (=  Irish 
curacli)  «  a  coracle  ;  »  treorgam  aiready  noticed  ;  and  wyth, 
«  eight  »,  =  'oith  =  "oct;  also  ômcobloent  below. 

entic  fgl.  pnsc£]  is  the  modulated  form  in  Welsh  of  antic  from 
the  Latin  antiquus  :  it  is  elsewhere  unknown  to  me. 
line  13.  cepriou  (gl.  tignx)  may  possibly  be  cipriou;  but  the  former  1 
think  préférable,  at  least  judging  from  the  modem  gunated 
form  ceibr.  I  fancy  the  writer  hère  made  a  mistake  in  glossing 
tigricz  in  the  plural,  for  it  strikes  one  as  being  the  genitive 
singular  qualified  by  prises  and  standing  for  tigni.  There  is  no 
doubt  as  to  the  Welsh  cezl?r^  which  Davies  explains  as  mea- 
ning  «  Longurius.  Arm.  tignum.  Angl.  sparre.  » 

aciriminiou  (gl.  seratu)  is  the  reading  I  am  tempted  to  adopt  of 
what  at  first  sight  looks  Uke  aqriminiou,  which  would 
analyse  itself  into  aq  (--  ac)  riminiou,  while  the  reading  I  hâve 
preferred  makes  ac  i  riminiou.  New  ac  =  with  ;  i  is  the  defi- 
nite  article,  as  in  «w  /  rogedou  »,  for  ir;  riminiou  is  the  plural 
of  rimin,  from  a  base  rimini  by  assimilation  for  remin  or  ramin 
as  in  milinon  and  guiltiatou.  The  word  would  now  be  rhcfin, 
and  ought  to  mean  «  a  rope,  a  cord,  or  some  means  of  binding 
or  fastening;  »  but  as  it  is  elsewhere  unknown,  we  can  only 
consult  allied  forms,  of  which  the  first  place  is  claimed  by 
rhefan'g,  which  Davies  explains  as  follows  :  —  «  Funis.  Est  et 
idem  quod  Gwden,  et  Tid  ;  »  then  he  quotes  :  Nyddu  pedair 
gwialen,  a  gwneuthur  pedair  rhefawg  i'w  rwymo.  Hist. 
Caroli  Magni.  Ac  a  phedair  rhefawg  y  rhwymid  Olifer.  Ibid. 
To  rhefawg  we  may  add  rhaff,  «  a  rope,  »  and  rheffyn,  its  dimi- 
nutive.  As  to  seratu  it  is  of  course  from  a  verb  serare  «  to 
fasten  or  close,  »  whence  the  French  serrer.  On  this  point  I 
cannot  do  better  than  quote  M.  Brachet's  account  of  the  word 
in  his  Dictionnaire  étymologique  de  la  langue  française  :  — 
Serrer,  en  italien  serrare,  du  latin  serare,  fermer  à  clef,  dans 
Priscien,  d'où  le  sens  du  verbe  français  dans  la  locution  serrer 
les  grains,  serrer  son  argent,  serrer  des  hardes,  et  dans  le  dérivé 
serrure,  ce  qui  sert  à  serrer.  Le  latin  serare,  devenu  serrare* 
dans  les  textes  latins  du  moyen-âge,  prend  le  sens  d'enchaîner, 
d'où  postérieurement  le  sens  de  lier  fortement,  de  presser,  de 
serrer.  On  lit  dans  la  Chron.  Saxon,  publ.  dans  Mabillon  (t.  4, 


570  Tke  Luxembourg  folio. 

ann.  p.  431)  :  Fratricidas  autem  et  parricidas sive  per 

manutn  et  ventrem  serratos  de  regno  ejiciant. 

To  return  to  the  Ms  one  may,  I  think,  construe  as  follows  :  stemi- 
camina  cnm  prisc£  tign£  seraiu  «  roofings  with  the  faste- 
ning  of  an  old  tigna.  »  Line  21  we  hâve  spiculat  .i.  insérât; 
can  spiculare  raean  to  secure  a  house  by  fastening  the  door 
with  a  «  spiculum,  »  a  spike,  or  any  similar  contrivance,  or 
are  we  to  consider  insérât  to  be  a  mistake  for  inferrat  (from 
ferrum)  supposing  that  inferrare  happens  to  hâve,  sotne  time  or 
other,  existed  in  the  sensé  of  «  ironing,  shooting  or  impahng?  » 

irebou  (gl.  îurmx)  is  the  plural  of /re^,  now  îref,  a  town,  From 
the  Latin  it  would  seem  that  treb  had  not  yet  lost  its  old  mea- 
ning  of  «  tribe,  »  which  probably  came  down  from  a  time 
when  the  tribe  was  more  permanent  than  its  abode.  Of  apiece 
with  this  is  Rhufain  --  Romani,  but  always,  as  far  as  we  can 
go  back,  meaning  «  Roma.  )>  Treb  is  of  the  same  origin  as  the 
Latin  tribus  if  not  indeed  borrowed  from  it^  which  I  am  incli- 
ned  to  think  is  the  case. 

caiou  (gl.  munimenta)  is  the  plural  of  cai,  now  cae  =  1)  what 
encloses,  a  hedge  or  wall;  2)  what  is  thereby  enclosed,  a 
field.  With  cae  =  cai  compare  aer  =  air  noticed  above.  It 
stands  probably  for  cagi  =  German  hag,  Anglo-Saxon  hegc, 
English  hedge,  from  the  Aryan  root  kagh  «  umfassen^  umgùr- 
ten.»  See  Fick's  Worîerbuch^,  s.  v.  The  Welsh  from  the  English 
«  quay  »  is  cei  which  is  a  distinct  word. 
line  14.  iolent  (gl.  pr£centur)  is  the  subjunctive  :  the  singular  correspon- 
ding  to  it  now,  ioled,  is  interesting  as  being  nearly  the  only 
kind  of  form  which  still  retains  the  personal  termination  in  the 
third  person  singular.  The  infmitive  would  be  ioli,  with  which 
Stokes  would  compare  Irish  ilach,  «  psean.  » 

aarecer  (gl.  ciantï)  stands  of  course  for  a  arecer,  where  a  is  the 
relative  pronoun  meaning  who  or  which.  This  in  fact  was  the 
only  ready  way  of  rendering  into  Welsh  the  présent  participle 
of  the  Latin.  It  remains  to  explain  arecer  :  it  looks  like  a  third 
person  singular  of  the  passive,  and  taking  it  to  be  a  translation 
of  the  Latin  I  cannothelp  thinking  that  it  is  a  déponent  form. 
If  so  the  termination  -er  is  accounted  for,  then  we  hâve  arec 
to  identify  ;  this  I  propose  to  do  with  arg  in  arglwydd  (lord) 
which  Stokes  compares  (/r.  Gl.,  p.  147)  with  the  Irish  airech, 
«  primus,  anterior  :  »  thus  arglywydd  -^  arg-lywydd,  meaning 


The  Luxembourg  folio.  ^71 

«  first  leader  or  commander,  »  and  arecer  would  probably 
mean  «  he  has  the  first  place,  acts  as  commander  in  chief  » 
or  perhaps  «  he  incites  or  exhorts  to  battle  ;  «  so  ^  arecer 
would  be  «  qui  cieat.  » 

line  1 5.  ascorinol  Tgl.  ossilem)  seems  to  be  the  correct  reading  of  what 
has  hitherto  been  represented  as  ascrunol.  The  noun  from 
which  ascorinol  was  formed  must  hâve  been  ascorin,  which  was 
contracted  into  ascorn  now  ascwrn,  «  a  bone.  «  The  termina- 
tion  wrn  is  known  in  other  modem  Welsh  words  e.  g.  migwrn, 
cogwrn,  celwrn,  talwrn,  gwibwrn,  hespwrn,  etc.  Asc-h  the  Welsh 
form  of  the  root  which  appears  in  cstéov  and  Skr.  asthi,  «  a 
bone.  )) 
nim  (gl.  seriem)  shows  the  same  irregularity  of  vowel  as  the 
modem  nifer  (a  number)  both  being  derived  from  the  Latin 
numerus;  may  we  suppose  a  provincial  Latin  form  nimerus  to 
hâve  been  used  in  Britain  .'' 

line  16.  ol  (g\.  polie i)  means  in  modem  Welsh  «  a  mark,  impression,  or 
footmark.  »  Hère  it  means  the  mark  made  with  the  pollex, 
or  a  ring  worn  on  it,  in  signing  documents.  On  pollex  see 
Ducange,  who  fmds  that  pollex  is  «  idem  quod  sigillum  «  for 
instance  in  the  following  quotation  which  he  gives  :  — 
«  Locus  appensionis  sigilli  tria  lilia  Gallica  ex  una  parte,  ex 
alia  impressione  pollicis  cancellarii  prsefati  principis.  » 
cormo  (gl.  emulamentij  is  in  the  margin  and  may  possibly  hâve 
lost  an  u  :  if  so  it  would  be  a  plural  cormou  of  'corm  ^=  mid- 
Welsh  cwnvfoT  cwryf,  now  cww,  «  béer  ».  Can  emulamenti  be 
for  ebullamenti?  We  thus  arrive  after  a  fashion  at  the  idea  of 
fermented  liquor  of  some  kind  or  other,  which  seems  to  bethe 
meaning  oï  cormou.  Cwrw  is  masculine  in  Welsh,  probably  for 
an  old  neuter  ;  for,  though  the  modem  Irish  form  cuirm,  geni- 
tive  corma,  is  féminine,  in  old  Irish  it  was  neuter,  as  Stokes 
tells  me.  So  also  are  the  forms  recorded  by  Greek  authors, 
namely,  -:;  7,;p;j,x  and  ts  y.ojpjj.'..  The  following  are  the  steps 
through  which  the  Welsh  word  has  successively  gone  :  — 
corm-,  cofm,  corom,  corov,  cwrwf,  cwrw.  I  hâve  no  doubt  Da- 
vies  is  right  in  giving  the  plural  of  cwrw  as  cyrfau,  though  I 
hâve  never  heard  the  word  used  in  the  plural  :  cyrfau  tallies 
perfectly  with  cormou,  in  which  the  evolved  0  of  corom  could 
hâve  had  no  footing  as  the  m  was  immediately  followed  by  a 
vowel.  Compare  with  corom  the  Irish  pronunciation  of  orm  as 


572  The  Luxembourg  folio. 

or"m,  gorm  as  gor"m,  etc.  Even  the  Anglo-Irish  are  heard  to 
say  stomm,  forum,  arum,  etc.  for  storm,form,  arm,  etc.  which 
forms  a  western  illustration  for  Benfey's  dissertation  on  the 
Skr.  vowel  ri  in  Or.  u.  Occ. 

line  17.  ancera  (gl.  lustram).  The  reading  of  the  Latin  may  be  lustrant, 
but  owingto  a  defect  in  the  Ms  it  is  hard  to  décide.  Moreover 
ancera  is  very  obscure.  I  am  inclined  to  treat  it  as  standing 
for  ancerd,  the  stem  of  the  d  having  faded  and  so  giving  the 
word  the  appearance  of  endingina.  Ancerd  I  identify  with  the 
modem  angerdd  «  aestus,  «  according  to  Davies.  It  is  generally 
associated  with  fire,  and  extensively  used  metaphorically  for 
the  «  brunt  «  of  anything.  To  answer  to  this,  one  wants  lustram 
to  mean  «  lustre  «  or  «  glare  ».  But  I  confess  the  words  in  ques- 
tion baffle  me  entirely. 
doguorenniam  (gl.  perfundo)  looks  at  first  sight  as  if  it  were  doguo- 
ren  nam,  whence  I  am  inclined  to  think  that  the  gap  is  owing 
to  a  part  of  a  letter  having  faded  and  that  the  above  is  the  cor- 
rect reading.  According  to  Dr.  Davies  «  rhennaid  est  genus 
mensurae  »,  and  Le  Gonidec  gives  renn  «  mesure  pour  les 
grains,  qui  vaut  à  peu  près  deux  boisseaux.  1)  Further  in  the 
Oxford  extract  «  de  mensuris  et  ponderibus  »  we  fmd  the  words 
—  «  in  sextario  .i.  in  héstdur  mél  .i.  is  xxx  hâ  guorennieu  »; 
hère  I  think  «  xxx  hâ  guorennieu  «  must  mean  ;<  50  plus  an 
excess  or  additlonal  quantity.  »  If  so,  doguorenniam  probably 
means  «  I  give  over  and  above  the  bare  measure,  give  in  ex- 
cess »;  nor  is  there  anything  very  improbable  in  the  supposi- 
tion that  this  is  the  meaning  the  writer  attached  to  the  Latin 
perfundo. 

line  18.  hint  {g\.  peravia)  may  almost  to  a  certainty  be  restored  and 
read  as  tre  dihintion  «  per  avia  ».  Hint  hâs  been  equated  with  the 
Gothic  sinths,  and  hère  it  renders  «via».  Now  it  is  oftener  the 
équivalent  of  «  iter  »  than  of  «  via  » . 
tirolion  (gl.  agrica)  is  the  plural  of  tirol  «relating  to  ?/r»,  land, 
which  is  not  to  be  identified  with,  or  derived  from,  the  Latin 
terra  :  rather  is  it  identical  with  the  Skr,  tiram,  «  shore  or 
bank»;  compare  tirio  «to  come  to  shore,  to  land  ».  Tir  is  now 
masculine,  but  was  probably  once  neuter  like  the  Irish 
tir. 

line  19,  douolouse  (gl.  dcpromis).  De/jromere  seems  to  hâve  meant  «  to 
sing»:  see  Diefenbach.  The  Welsh  verb  as  it  stands  is  now 


The  Luxembourg  folio.  375 

unknown,  but  the  simple  louse  would  now  be  lleisi,  «  thou 
voicest,  or  wilt  voice  or  sing  ».  The  change  of  u  into  i  has 
already  been  noticed  :  louse  became  first  leusi,  then  leisi. 
line  20.  cobrouol  (gl.  verbialia)  is  derived  from  cobrou,  now  cyfryw, 
which  now  never  takes  the  termination  -ol  though  amrywiol 
does.  Cyfryw,  is  derived  from  rhyw,  «a  kind  or  species»,  and 
cyfryw  or  cobrouol  would  mean  «congeneric  in  the  sensé  of 
being  of  the  same  kind  or  genus  »  or  simply  «  such  as»,  Latin 
talis.  The  b  in  cobrouol  stands  for  an  m  —  com-rouol  :  compare 
omcobloent,  for  om-com-loenî,  whence  it  appears  that  before  r 
and  /,  m  was  particularly  liable  to  be  changed  into  b  as  in 
Greek.  As  to  the  latin,  verbialia  =  a taliâ-»,  the  word  seems  to 
be  an  anomalous  formation  from  verbi,  as  used  in  the  phrase 
«  verbi  causa  »  or  «  verbi  gratia  »  —  thus  in  Cicero's  Fat.  6. 
12  :  —  si  quis,  verbi  causa,  oriente  Canicula  natus  est.  By  the 
way,  I  hâve  not  found  out  that  the  i  in  the  word  verbiage  is 
accounted  for,  Can  it  be  that  it  is  of  the  same  origin  as  in 
verbialia,  and  that  the  word  originally  signified  a  fault  of  style 
arising  from  inserting  too  many  particulars  «  verbi  gratia  »  ? 
omcobloent  (gl.  apocant).  What  appears  as  an  accent  over  the  0 
may  hâve  been  a  correction  of  the  same,  the  corrections  being 
always  written  above  the  letters  to  be  corrected.  But  imco- 
bloent  seems  to  me  hardly  admissible  at  the  date  of  this  Ms. 
The  Latin  occurs  several  times  and  is  in  each  instance,  except 
the  présent  one,  glossed  collocare.  It  was  probably  formed 
from  apothecare,  thus  apotcare,  apoccare,  apocare.  The  word 
omcobloent  reminds  of  the  modem  ymgyfleant,  but  phonetic 
difficulties  prevent  their  being  identified.  Analysing  the  word 
we  hâve  ôm-cob-lo-ent,  where  om-cob-  =  om-com-,  and  -ent  is 
the  termination  of  third  person  plural  =  -\jnti.  Thus  we  hâve 
left  as  the  base  of  the  verb  lo;  the  latter  stands  for  */og,  which, 
as  may  be  seen  from  what  was  said  under  comtoou,  probably 
represents'/ag,  for  original  "/ag/z,  whence  we  hâve  Xt/zq  Xi/oç, 
Gothic  liga,  lagja  etc.  From  the  same  root  also  comes  the 
Welsh  lie,  «a  place  »,  Breton  léac'h  and  leh.  So,  after  ail, 
ymgyfleant  and  omcobloent,  though  not  identical,  are  very  nearly 
related.  If  thèse  conjectures  should  turn  out  to  be  well-foun- 
ded  omcobloent  ought  to  mean  either  «they  place  themselves» 
or  «  they  place  around  »  according  as  ôm-  is  taken  to  hâve 
the  force  of  the  y  m-  or  the  am-  of  modem  Welsh. 


374  The  Luxembourg  folio. 

bud  (gl.  hrad'mm)  is  now  hudd,  «  benefit  or  profit  «.  Bradium  = 
bravium  =  ^paSaTov  ;  the  Welsh  hud  seems  accordingly  to 
hâve  meant  especially  the  u  prize  of  victory  »  and  probably  «  vie- 
tory»  itself,  as  its  derivative  buddug  means  «victorious».  Com- 
pare Irish /^ua/rf,,  «victory».  The  English  words  of  the  same 
stock  are  hooty,  to  boot  etc. 

Une  21.  dodocetic  (gl.  inlatam)  is  from  the  simplex  docetic,  now  dygedig, 
representing  an  unmodulated  form  duc-at-ic,  which  became 
doc-at-ic,  and  doc-et-ic  from  the  base  duc.  The  latter  means  in 
book-Welsh  «  to  take  with  one,  to  conduct  »,  but  in  the  collo- 
quial  its  ordinary  meaning  is  «  to  take  with  one  what  is  not 
one's  own,  to  steal  »,  which  reminds  of  the  attempt  to  dérive 
fur  and  (fwp  from  the  root  bhar,  to  bear.  The  base  hère  coin- 
cides  with  that  of  the  Latin  dux,  ducis,  whereas  the  Latin  duco, 
Gothic  îiuhan  show  gunation  of  the  root-vowel  ;  this  is  also 
the  case  in  Welsh  in  the  preterite  of  this  verb,  which  is,  for 
example,  in  the  3rd  person  singular,  dûg,  old  Welsh  duc  = 
Gothic  lauh,  and  stands  for  dudôca  (for  dudauca)  to  be  compa- 
red  with  the  Skr.  dudôha.  It  is  seen  that  the  final  consonant 
of  the  Skr.  duh  differs  from  that  hitherto  given  in  the  Welsh 
forms,  but  the  nominal  form  which  serves  as  infmitive  for  the 
latter  coincides  with  it  in  this  particular  ;  the  infmitive  being 
now  dwyn  probably  for  "dogn  or  *dogin.  This  by  a  common 
substitution  of  b  for  g  seems  to  hâve  given  use  to  a  form  *dobn 
or  "dobin,  whence  dyfn  in  the  modem  diddyfnu,  «  to  wean  »; 
which  forms  perhaps  the  only  réminiscence  in  Welsh  of  the 
Sanskrit  meaning  oï  duh,  (c  to  milk,  or  draw  out  the  juice  of 
anything»,  while  the  Irish  has  in  common  use  deoch,  «a  drink», 
and  diug-alm,  «  I  drink  ofï».  No  form  corresponding  to  the  Skr. 
duhitar,  Gr.  Ouyx"'']?  from  this  root  is  preserved  in  the  Celtic 
languages  ;  nevertheless  I  think  they  once  had  one,  but  got 
to  render  it  by  a  synonym  from  the  root  marg  whence  Latin 
mulgeo,  Gr.  à-[j,opY-=Ç'  ^nd  English  milk.  This  I  trace  in  the 
Welsh  merch,  «  a  girl  or  daughter  »,  probably  for  *mcrcs 
(=  merg-s),  in  the  same  way  as  nos  stands  for  "nocs,  and  to 
be  compared  with  the  Lithuanian  mergà,  (O  girl». 
holeu  (gl.  çanori[çaJ)  stands  for  holev,  now hylef,  <f  of  ready  voice ». 
A  defect  in  the  Ms  occurs  hère  :  it  has  been  suggested  that 
canari  should  be  read  canoriça,  which  suits  admirably.  A  little 
to  the  left  of  the  p  of  pica  there  stands  a  g  which  looks  like 


The  Luxembourg  folio.  ?7  5 

the  remains  of  a  gloss  on  pica.  Of  course  the  modem  word  for 
a  magpie  namely  piog  suggests  itself  at  once,  but  is  inadmis- 
sable;  for  it  ought  at  the  date  of  this  Ms,  to  hâve  ended  in  c 
and  not  in  g.  However  it  puts  one  on  the  right  track  :  now 
piog  looks  like  a  derivative  oï  pi-  :  this  is  rendered  certain  by 
the  plural  pi-od.  In  old  Welsh  pi  would  hâve  been  plg,  which 
seems  more  nearly  related  to  the  English  pie  (than  to  the 
French  pic,  Latin  picus)  as  both  thèse  having  dropped  their 
guttural  would  lead  one  to  suppose  that  that  was  a  g  rather 
than  a  c.  This  plg  then  I  présume  to  hâve  been  the  gloss  on 
pica,  canorica  pica  being  rendered  liolev  plg. 

page  3,  line  17.  lestnaued  (gl.  nausiam)  stands  for  lestnaved,  which  may 
be  illustrated  as  to  its  meaning  by  comparison  with  llesmair,  «  a 
swoon  »,  for  lest-mer.  The  former  syllablehasalready  beenex- 
plained  :  mer  means  «  a  fluid  »,  as  in  merllyn,  «  a  pool  of  stagnant 
water  »,  dy-fer-u,  «  to  drop  »,  and  dad-mer  «  to  thaw  ». 

page  4,  line  5.  glas  (gl.  glaucum)  has  got  into  the  line  above  glaucum 
evidently  through  the  carelessness  of  a  transcriber. 

Before  laying  aside  my  pen,  I  feel  it  my  pleasant  duty  toacknowledge 
the  manifold  assistance  which  Mr.  Stokes  has  given  me  both  in 
reading  and  interpreting  thèse  glosses  :  I  am  indebted  also  to  the  Rev. 
A.  H.  Sayce,  Queen's  Collège,  and  Mr.  Bliss,  the  Bodleian,  Oxford, 
as  well  as  to  Mr.  Bradshaw,  the  University  Library,  Cambridge. 

John  Rhys. 

Jan.  5,  1872.  Merton  Collège.  Oxford. 


ATTODIAD    I    LYFRYDDIAETH    Y    CYMRY 
(Supplément  to  the  Cambrian  Bibliography). 


Since  the  publication  of  Llyfryddiaeîh  y  Cymry^  in  1869,  several 
books  that  escaped  notice  in  that  work,  but  printed  during  the  period 
embraced  by  it  (i  546-1800),  hâve  corne  to  my  knowledge.  Thèse  omis- 
sions the  following  list  is  intended  to  supply.  I  shall,  in  the  first  place, 
raake  such  additions  to  the  published  work  as  the  présent  materials  at 
my  disposai  will  allow,  and  then  I  intend  to  offer  some  corrections  of 
the  more  important  errors  that  hâve  unavoidably  crept  into  it. 

To  those  that  hâve  not  seen  the  Llyfryddlaeth  it  may  be  necessary  to 
State,  that  the  plan  adopted  in  that  work  is  chronological,  beginning 
with  the  year  1 546,  when  the  first  book  in  the  Welsh  language  was 
issued  from  the  press,  and  ending  with  the  eighteenth  century.  Under 
each  year  are  registered.the  works,  including  reprints  as  well  as  origi- 
nal éditions,  known  to  hâve  appeared  in  the  course  of  it  ;  and  when 
the  date  of  publication  is  uncertain,  they  are  entered  as  near  the  time 
of  their  appearance  as  could  be  inferred  from  the  évidence  or  probabi- 
lity  which  they  presented  ;  and  to  distinguish  thèse  articles  from  those 
the  date  of  which  admits  of  no  doubt,  the  mark  ^  has  been  prefixed  to 
their  titles.  In  this  supplément  the  chronological  order  has  necessarily 
been  abandoned,  and  the  articles  will  be  found  promiscuously  entered  ; 
but  at  the  end  a  table  of  référence  to  the  works  printed  in  each  year  will 
be  given. 

To  draw  up  a  correct  and  .complète  list  of  Welsh  books  for  any  given 
period  is  by  no  means  an  easy  task,  and  the  further  we  go  back  from 
the  présent  time,  the  difficulty  proportionally  increases.  No  library,  either 
public  or  private,  in  which  even  a  tolerably  complète  collection  of  Welsh 
books  is  deposited,  anywhere  exists.  The  library  of  the  British  Muséum 
is  extremely  defective  in  early  and  comparatively  early  works  in  the 

I.  See  an  account  of  that  work  in  the  foregoing  number,  p.  281. 


Aîlodiad  i  Lyfryddiaeth  y  Cymry.  377 

Welsh  language  ;  and  the  collection  in  the  Bodleian  at  Oxford  is  still 
more  meagre.  St.  David's  Collège,  Lampeter,  an  institution  which  ought 
to  identify  itself  with  everything  that  is  national,  possesses  by  far  the 
largest  library  in  the  Principality;  but  the  number  of  Welsh  books  which 
it  contains  is  very  small,  and  those  few  are  neither  rare  nor  of  any  par- 
ticular  value.  Few  private  libraries  are  rich  in  this  kind  of  literature, 
and,  with  a  few  exceptions,  the  peasant's  cot  rewards  the  researches  of 
the  bibliographer  better  than  the  nobleman's  mansion.  A  Cambrian  Mu- 
séum, in  which,  among  other  things,  ail  the  books  in  the  Welsh  tongue 
might  be  deposited,  is  a  great  desideratum. 

D.  Silvan  Evans. 

1.  Y  Drych  Christianogawl,  yn  yr  hwn  y  dichon  pob  Christion  gan- 
fod  gwreiddin  a  dechreuad  pob  daioni  sprydawl,  sef,  gwybod  modd  i 
wasanaethu  Duw,  drwy  ei  garu  a'i  ofni  yn  fwy  na  dim,  ag  i  daflu  ymaith 
beth  bynnag  ar  afo  rwystr  i  hynny.  Y  Rhan  gyntaf  yn  péri  gwasanaethu 
Duw  drwy  ei  garu. 

Rhotomagi  apud  haeredes  Jathroi  Faronis.  1 58$.  8vo.  Pages  xii-71. 

A  portion  of  the  title  will  be  found  in  Ll.  y  C.  (under  the  year  1 584,  2), 
but  without  any  particulars.  It  is  the  work  of  Dr.  Grufïydd  Roberts,  the 
Welsh  grammarian,  and  was  published,  apparently  after  his  death,  by  Dr.  Roger 
Smith,  who  has  prefixed  to  it  a  prefatory  epistle  to  the  Cymry.  It  is  particu- 
larly  worthy  of  notice  as  being  one  of  the  few  Welsh  books  printed  on  the  Con- 
tinent, and  the  only  one  yet  known  to  hâve  been  executed  at  Rouen.  The  only 
existing  copy  known  to  me  is  the  one  in  the  possession  of  the  Rev.  John  Peter,  of 
Bala,  which  is  imperfect,  the  title  and  introductory  portion  of  the  work  being 
suppHed  in  manuscript  ;  and  it  is  to  this  gentleman  I  am  indebted  for  a  descrip- 
tion of  it.  This  is  the  first  part  ;  but  whether  a  second  part  ever  appeared,  is 
at  présent  unknown.  See  Traethodydd  for  January,  1872,  p.  90. 

2.  Hanes  y  Ffydd  er  Dechreuad  y  Byd  hyd  yr  oes  hon.  1666.  4to. 
pp.  89. 

This  is  undoubtedly  the  first  édition  of  Hanes  y  Ffydd  Ddifîuant  by  Charles 
Edwards  (Ll.  y  C.  1671,  1).  It  contains  only  the  first  part  of  that  work. 
The  date  is  taken  from  the  préface,  the  titlepage  of  the  copy  inspected  being 
wanting,  as  is  too  often  the  case  with  old  Welsh  books. 

3.  Testament  Newydd  ein  Harglwydd  a'n  hiachawdr  lesu  Grist. 
London.  Printed  by  M.  S.  for  John  Allen  at  the  Sun-rising  in  St. 

Pauls  Churchyard.  1654.  i2mo.  pp.  820,  134=954. 
It  contains  the  metrical  Psalms  as  well  as  the  New  Testament. 

4.  Bwyd  Enaid  :  sef  Llyfr  bychan  yn  bedair  Rhan.  Rhan  I.  Am  Dduw 
a'i  Ddaioni  iDdynol-ryw.  Rhan  II.  Am  Ddyled  Dyn  tuag  at  Dduw,  a'r 


îyS  Attodiad  i  Lyfryddiaeth  y  Cymry. 

Pechodau  gwrthwyneb.  Rhan  III.  Am  Ddyled  Dyn  iddo  i  hun  ai  Gym- 

mydog.  Rhan  IV.  Am  y  pedwar  peth  diweddaf. 

Preintiedig  gan  N.  Thomas.  8vo.  pp.  62  [1723]. 

No  place  or  date  is  given  ;  but  Nicholas  Thomas  printed  ar  Carmarthen.  The 
author  was  the  Rev.  David  Lewis,  vicar  of  Llangatwg,  Glamorganshire,  from 
which  place  the  metrical  préface  is  dated  «  Tachwedd  18.  1723  »  (See  Ll.  y  C. 
1710,  I  ;  1725,  2).  It  is  ail,  excepting  a  few  pages  at  the  end,  in  popular  verse; 
and  the  paper  is  remarkable  for  its  inferior  quality. 

5.  Yr  Angenrheidrwydd  0  gredu  Gwobryon  a  Chospedigaethau  y 
Byd  arall  tu  ag  at  fod  yn  wir  Grefyddol.  Wedi  ei  gasglu  allan  0  waith 
Joan  Scot  D.  D.  a^i  Gymreigio  gan  Joshua  Thomas  Ficcer  Merthyr 
Cynog  yn  Sir  Frycheiniog. 

Argraphwyd  gan  Tho.  Durston  Gwerthwr  Llyfrau  yn  y  Mwythig  1743. 
i2mo.  pp.  2,  iv,  62  =  68. 
For  notices  of  the  author  and  the  translater,  see  Ll.  y  C.  1752.  6;  1753,  10. 

6.  Egwyddorion  Difmyddiaeth,  fu'n  cael  eu  pregethu  a'u  credu,  gan 
Ddisgyblion  Crist  gynt  yn  Bethania.  Gan  Morris  Griffiths,  gerllaw 
Hwlffordd. 

Caerfyrddin,  Argraphwyd  gan  I.  Daniel.  1789.  i2mo.  pp.  24. 

The  work  of  a  Baptist  minister,  forming  a  sort  of  confession  of  faith.  Every 
subject  ends  with  a  verse  or  stanza,  and  three  hymns  will  be  found  at  the 
conclusion. 

7.  Hymnau  a  Chaniadau  newyddion,  ar  amrywiol  Fesurau.  Gan  loan 
Ifan  ,  0  Blwyf  Manarowan,  in  sir  Benfro. 

Caerfyrddin,  Argraphwyd  gan  loan  Daniel,  yn  Heol  y  Brenin.  1790. 
i2mo.  pp.  12. 

8.  Rhai  Hymnau  ac  Odlau  Ysprydol  ar  amryw  Ystyriaethau,  ynghyd 
â  Marwnadau  0  Goffadwriaeth  rhai  Brodyr  Ffyddlawn  a  ymadawsant  ar 
Bywyd  hwn.  Gan  Peter  Williams. 

Argraphwyd  yng  Nghaerfyrddin,  gan  Evan  Powell,  yn  Heol  y  Prior. 
1759.  12  mo.  pp.  24. 

9.  Ymddiddau  rhwng  Ffidelius,  Philosophus,  a  Dr.  Theologus,  yng 
nghylch,  i.  Athrawiaeth  y  Drindod  ;  2.  Am  yr  Enaid;  2.  Am  Ddiodde- 
faint  Crist  ;  4.  Am  nodau  ysgrythurol  0  Ras. 

[Caerfyrddin,  1778.] 

The  title  of  the  copy  consulted  was  wanting  ;  but  it  was  evidently  printed 
ar  Carmarthen;  and  the  date,  as  appears  from  p.  40,  is  1778.  No  author's 
name  is  given. 

10.  Llawlyfr  y  Llafurwr,  yn  ei  hyfTorddio  pa  fôdd  i  wneud  y  goreu  0 
amrafael  weithredoedd  e'i  Alwedigaeth  a'r  Pethau  cynnefinaf  sy'n  digwydd 


Attodiad  i  Lyfryddiaeth  y  Cymry.  379 

yn  ei  Fywyd,  tuag  at  ogoniant  Duw,  a  lleshaad  ei  Enaid  ei  hun.  A 
'sgrifenwyd  yn  Saesonaeg  gan  Weinidog  yn  y  Wlâd  er  daioni  i'w  blwy- 
folion  :  ag  a  gyfieithwyd  er  mwyn  y  Cymru. 

Argraphwyd  yn  Nulun  yn  y  Flwyddyn,  1747.  i2mo.  pp.  48. 

It  appears  to  be  the  same  work  as  No.  1 0,  under  1 7 1 1 ,  in  L/.  y  C. ,  the  trans- 
later of  which  was  the  Rev.  Moses  Williams.  Dulun,  properly  Dulyn,  is  the 
Welsh  form  of  Dublin,  where  the  book  was  printed. 

I  I.  Cydwybod  y  Cyfaill  gorau  ary  Ddaear...  In  Saesoneg  gan  Henry 
Stubbs,  wedi  ei  gyfieilhu  gan  Theophilus  Evans. 

Amwythig,  Argraphwyd  gan  John  Rogers,  tros  Theophilus  Evans  a 
Siôn  Rhisiart.  171  $. 

The  first  of  the  many  publications  of  the  fascinating  author  of  Drych  y  Prif 
Oesoedd,  thefirst  édition  of  which  appeared  the  year  following  (1716). 

1 2.  Y  Rhan  Gyntaf  ar  Ail  Rhan  o  Hanes  y  Disgibl  Sanctedd  hwnnw  a 
gladdodd  Gorph  yn  lachawdwr  Crist.  I  Bris  iV  Dwy  Geiniog. 

Argraphwyd  yn  y  Mwythig,  gan  StafFord  Prys,  tros  Lewis  Jones, 
1760. 

1 5.  Allwedd  Newydd,  neu  Ffordd  Hawdd  ac  Esmwyth  i  Bobl  ieuaingc 
ddysgu  Darllen  Cymraeg... 

Caerfyrddin  :  Argraphwyd  gan  I.  Daniel.  Pris  chwe'cheiniog.  [1799]. 

No  date  ;  the  first  édition  may  hâve  appeared  a  year  or  two  earlier  ;  the 
fourth  came  out  in  1804. 

14.  Eisteddfod  Corwen,  Mai  12,  1789,  pp.  12. 

Without  place  or  printer's  name.  It  contains  poetical  effusions  by  Jonathan 
Hughes,  Walter  Davies  (GwallUr  Mechain),  Thomas  Edwards  (Twm  o'r  Nant), 
and  others.  See  Gtfaith  Grvallter  Mechain,  i.  228. 

1 5.  Galarnad  ar  Farwolaeth  Elinor  Roberts  0  blwyf  Llansannan  yn 
sir  Ddinbych^  a  ymadawodd  a'r  bywyd  hwn  y  chweched  dydd  ar  hugain 
0  Chwefror,  177^  Ynghyd  ag  ychydig  Hymnau,  etc. 

Trefecca:  Argraflfwyd  dros  Edward  Parry,  1774.  PP-  '2. 

16.  Blodeuog  Waith  y  Prydyddion  Brytannaidd.  O  Gasgliad  Methu- 
salem  Davies. 

Machynlleth  :  Argraphwyd  gan  Titus  Evans,  1791.  pp.  36, 
A  différent  work  from  No.  8,  under  1710  in  L/.  )  C,  but  the  title  was  evidently 
borrowed  from  it. 

17.  Crynodeb  0  Egwyddorion  Crefydd  :  neu  Gatecism  Byrr  i  Blant, 
ac  Eraill,  i'w  Ddysgu.  Ail  Argraffiad.  Gan  y  Parchedig  T.  Charles, 
A.  B. 

Ngwrecsam  :  Argraphwyd  gan  R.  Marsh.  1791.  i2mo.  pp.  96. 
See  Ll.  \  C.  1789,  1. 

26 


^So  Atlodiad  i  Lyfryddiacth  y  Cymry. 

i8.  Traethawd,  yn  Dair  Rhan.  Rhan  I.  Am  Ffydd;  II.  Am  Ufudd-dod 
a  Gweithredoedd  Da  ;  III.  Am  Ras. 

The  copy  inspected  being  imperfect,  the  full  title  cannot  be  given,  and  the 
exact  date  could  not  be  ascertained;  but  it  appears  to  hâve  been  published  after 
Amddiffyniad  o'r  Eglwys  Gristionogol  by  the  same  author,  which  appeared  in 
1780.  A  second  édition,  under  the  auspices  of  the  Society  for  Promoting  Chris- 
tian Knowledge  and  Church  Union  in  the  Diocèse  of  St.  David's  was  published 
at  Carmarthen  in  1822. 

The  author,  the  Rev.  Howel  Howel,  who  died  in  1793,  aged  86,  was  a 
native  of  the  parish  of  Abernant,  near  Carmarthen,  where  he  was  born  in  1707, 
and  was  descended  from  the  Rev.  Thomas  Howell  (father  ot  the  author  of  Epis- 
tolae  Ho-Elianae),  at  one  time  vicar  of  that  parish.  Before  he  obtained  the 
vicarage  of  Llanbeudy,  in  Carmarthenshire,  which  he  held  until  his  death,  he 
was  either  vicar  or  curate  of  Cilcennin  in  Cardiganshire. 

19.  Annerch  ir  Cymru  iw  galw  oddiwrth  y  llawer  0  bethau,  ar  yr  un 
peth  angenrheidiol  er  mwyn  cadwedigaeth  eu  heneidiau.  Yn  enwedig 
at  y  tlodion  annysgedig,  sef  y  crefTtwyr^  Uafurwyr  a  bugeiliaid,  y  rhai 
0  isel  radd,  o'm  cyffelyb  fy  hunan.  Hyn  er  eich  cyfarwyddo  i  adna- 
bod  Duw  a  Christ  (yr  hyn  yw  bywyd  tragwyddol)  yr  hwn  sydd  yn 
Dduw  unig  ddoeth,  a  dysgu  ganddo  ef,  y  deloch  yn  ddoethach  nach 
athrawon.  0  Waith  Ellis  Pugh. 

Argraphwyd  yn  Philadelphia  yn  y  flwyddyn  1721,  gan  Andrew  Brad- 
ford.  8vo.  pp.  III. 

This  was  the  first  édition  of  this  work,  as  well  as  the  first  Welsh  book  ever 
printed  m  America.  A  copy  is  in  the  Philadelphia  Library.  See  LI.  y  C.  1782, 
5  ;  1727,  10;  and  Bancr  America  for  February  9,  1870. 

The  work  was  translated  into  English  by  Rowland  Eliis  and  David  Lloyd, 
and  printed  at  Philadelphia  in  1727;  and  a  2^  édition  of  the  Welsh  original  ap- 
peared in  London  in  1782,  i2mo,  of  which  a  new  édition  was  published  at  the 
same  place  in  1801,  i6mo. 

The  author,  a  Quaker,  was  a  native  of  the  parish  of  Dolgellau^  North  Wales, 
where  he  was  born  in  1656,  and  died  in  Pennsylvania  in  1718,  three  years  be- 
fore the  appearance  of  the  American  édition  of  the  book. 

20.  Y  Rhybuddiwr  Christnogawl.  Yn  cynnwys  Annogaeth  Ddifrifol  i 
i  Fuchedd  Sanctaidd... 

Argraphedig  yn  Llundain  ganJ.  R.  i  S.  Manship,  tan  Lun  y  Llong, 
yn'r  Heol  a  elwir  (Yd-fryn)  Cornhill,  yn  agos  i'r  (Cyfnewidty  Brenhin- 
awl)  Royal  Exchange.  1699.  Yr  ail  Argraphiad  yn  Gymraeg.  i2mo. 

See  Ll.  yC.  1689,  1. 

21.  Dwy  Gerdd  Dduwiol,  er  Lleshad  i  bob  Christion.  Sef,  y  Gyntaf, 
Erfyniadau  neu  Ddwyfol  Ddeisyfiadau  am  Ras  a  Gwellhad  Buchedd.  Ar 


Attodiad  i  Lyfryddiacth  y  Cymry.  381 

Ail,  Annogaeth  i  wir  Edifeirwch,  ac  Ymroad  Ddifrifol  i  droi  oddiwrlh 
ein  Pechodau  a'n  Hanwireddau.  0  Wneuthuriad  Thomas  Dafydd  0 
blwy  Meifod  yn  Sir  Drefaldwyn. — Argraphwydyn  y  Mwylhiggan  Tho. 
Durston,  tros  Thomas  Owen  yn  y  Flwyddyn  17 14.  pp.  8. 

22.  Cyffes  Ymadrodd  neu  Eiriau  diweddaf  Robert  Owen  0  Blwyf 
Lianrwst  yn  Sir  Ddinbych  ;  yr  hwn  a  ddioddefodd  yn  haeddedigol  ar  y 
Pren  Dioddef  yn  yr  hen  Waun  neu'r  Old  Heath,  yn  ymyl  y  Mwythig  ar 
y  17  dydd  0  Ebrill  17 17.  pp.  8. 

The  author  and  printer's  name  is  thus  given  at  the  end  :  «  0  Wneuthuriad 
ac  Argraphiad  John  Rhydderch  yn  y  Mwythig,  ac  ar  werth  ynghyd  ac  amryw 
Faledi  Cymraeg  a  Saesnaeg.  » 

25.  Llyfr  Carolau  a  Dyriau  Duwiol  yn  cynnwys  Casgliad  helaethach 
nag  y  sy'n  yr  argraphiadau  eraill  0  Oreuon  Gwaith  y  Prydyddion  gorau 
Ynghymru  yn  y  ffordd  honno  0  Gerddwaith.  At  ba  un  y  Chwanegwyd 
yr  Ail  Rhann  yr  hon  na  fu  erioed  or  blaen  yn  argraphedig.  Y  Pedwer- 
ydd  Argraphiad. 

Argraphwyd  yn  y  Mwythig  gan  T.  Durston.  1729.  12  mo.  pp.  432. 

This,  it  will  be  seen,  is  stated  to  be  \.he  fourth  édition,  while  that  of  1745 
is  calied  the  fourth  also.  The  first  édition  was  edited  by  Ffoulke  Owens,  and 
printed  at  Oxford  in  1686,  8vo  ;  the  second  by  Thomas  Jones  in  1696;  and 
the  third  by  Durston  at  Shrewsbury  in  1720.  This  must  therefore  be  the  fourth 
édition,  and  the  so-called  fourth  édition  of  1745  must  be  the  fifth.  See  Ll.  y  C. 
under  thèse  years. 

24.  ProphydoHaeth  Nixon  wedi  ei  chyfansoddi  ar  fesur  cerdd  gan  Jo- 
seph John. 

No  date.  Anthony  Nixon's  Cheshire  Prophecy,  of  which  this  is  a  translation, 
appeared  first  in  1719,  and  has  been  frequently  reprinted. 

25.  Hanes  0  Fywyd  a  Marwolaeth  ludas  Iscariot. 
Argraphwyd  yn  y  Mwythig  gan  Thos.  Durston.  pp.  24.  No  date. 

26.  Dull  y  Briodas  Ysbrydol  rhwng  Mab  y  Brenhin  Alpha  a  Merch  yr 
hên  Amoriad  yn  Nyffryn  Trueni  Ysbrydol. 

Argraphwyd  Ynghaerlleon  gan  T.  Huxley  dros  Petr  Morris.  1770. 

27.  Cydymmaith  i'r  Allor,  yn  dangos  Natur  ac  Angenrheidrwydd  0 
ymbaratoi  i'r  Sacrament  mewn  Trefn  i  dderbyn  yn  deilwng  y  Cymmun 
Sanctaidd.  Ym  mha  un  y  profir  fod  yr  holl  ofn  a'r  Arswyd  (ynghylch 
Bwytta  ac  yfed  yn  annheilwng,  ac  i  fod  yn  Euog  0  Ddamnedigaeth  i  ni 
ein  hunain  wrth  hynny)  yn  ddi-sail  ;  ac  yn  anwarantedig.  At  yr  hyn 
Chwanegwyd  Gweddiau  a  Myfyrdodau,  i  Ymbarattoi  i  dderbyn  y  Sacra- 
ment, fel  y  mae  Eglwys  Loegr  yn  gofyn  gan  ei  Chymmunwyr...  Gwedi 
ei  Gyfieithu  ir  Gymraeg,  gan  L.  E. 


382  Atîodiad  i  Lyfryddiaetli  y  Cymry. 

Argraphwyd  in  y  Mwythig,  gan  Stafford   Pryse.    1774.    i2mo.  pp. 

74- 

Several  éditions  of  this  work  are  registered  in  Ll.  y  C,  but  none  bearing  this 
date.  The  date  hère  given  is  unmistakable,  but  the  number  of  the  édition  is  not 
stated.  The  préface  to  the  work  is  signed  by  W.  V. 

28.  Dioddefiadau  y  Byddinoedd  Brutanaidd  yn  y  Dychweliad  trwy 
Holland  yn  y  Blynyddoedd  1794  a  1795. 

Croesoswallt  :  Argraphwyd  gan  W,  Edwards.   1796.  i2mo.  pp.  14. 

29.  Canwyll  Crist,  etc. 

Caerlleon,  ArgraflFwyd  gan  loân  Harfie  ynagosi'r  ty  Marchnad.  1767. 
i2mo.  pp.  8. 

30.  Barnedigaethau  Ofnadwy  Duw  ar  Blant  Creulawn...  Wedi  ei 
gyfieithu  i'r  Cymry  Gan  Ifan  Thomas  argrafïydd. 

Mwythig  argraflfwyd  gan  W.  Williams  tros  Lewis  Jones.  1766.  i2mo. 
pp.  8. 

It  must  be  the  first  édition  of  No.  12,  1767,  in  Ll.  y  C,  though  the  latter 
is  not  stated  to  be  a  second  édition. 

31.  Gwaedd  yng  Nghymru,  yn  Wyneb  pob  Cydwybod.  Gan  Morgan 
Lloyd,  0  Wynedd.  At  yr  hyn  y  rhag-chwanegwyd,  ei  Lythyr  i'r 
Cymru  cariadus.  Ynghyd  a  Hanes  ei  Fywyd  Ysbrydol,  a  sgrifennwyd 
ganlho  ei  hun...  Yr  Ail  Argraphiad. 

Caerfyrddin^  Argraphwyd  gan  J.  Ross,  yn  Heol-Awst,  1767.   i2mo. 

PP-  36. 

This  is  called  the  second  édition,  but  it  must  be  the  second  of  the  impres- 
sions issued  by  Ross,  as  there  are  no  less  than  four  previous  éditions  recorded 
in  Ll.  y  C,  the  first  édition,  according  tothatwork,  having  appeared  in  1653. 
We  hâve  the  author's  own  statement  that  the  'Llythyr'  which  forms  part  of  this 
édition  was  the  first  production  which  he  committed  to  the  press. 

32.  Canwyll  y  Cymru:  sef,  Gwaith  Mr.  Rees  Pritchard,  gynt 
Ficcer  Llanddyfri,  a  brintiwyd  o'r  blaen  yn  bedair  rhan,  wedi  ei  cyssylltu 
oll  ynghyd  yn  un  Llyfr.  — The  Divine  Poems  of  Mr.  Rees  Pritchard, 
sometimes  Vicar  of  Landoverey  in  Carmarthenshire. 

London,  Printed  by  J.  Moxon  and  B.  Beardwell  for  D.  Jones,  in  the 
year  1696.  i2mo. 

This  may  be  the  fourth  édition,  but  it  is  not  stated  that  such  is  the  case. 

33.  Hymnau  Duwiol. 
Mwythig,  1740.  i2mo. 

34.  Pregeth  George  Whitfield  ar  yr  Enedigaeth  Newydd. 
Bristol,  1739. 

35.  Amsera  Diwedd  Amser;yn  Ddau  Draethawd  :  Y  cyntaf  ynghylch 


Attodiad  i  Lyfryddiaetli  y  Cymry.  585 

Prynnu'r  Amser:  Yr  ail  ynghylch  ystyried  ein  Diwedd.  AOsodwyd  allan 
gyntaf  yn  Saesonaeg  gan  John  Fox.  Ac  a  gyfieithwyd  yr  awrhon  i'r 
Gymraeg  er  daioni  i'r  Cymru...  Argraphwyd  yn  y  Flwyddyn  1724. 

Place  not  given.  If,  as  the  author  of  Ll.  y  C.  supposes,  two  éditions  of  this 
work  appeared  in  1707,  this  must  be  the  third  impression,  and  that  of  1784  the 
fourth  ;  but  to  me  it  appears  that  the  two  éditions  recorded  under  1707  are 
identical,  and  this  must  be  regarded  as  the  second.  The  translater  was  the 
Rev.  Samuel  Williams,  though  the  name  does  not  appear  on  this  title 
page. 

]6.  Canwyli  y  Cymry  :  sef  Gwaith  Mr.  Rees  Prichard  gynt  Ficcer 
Llanddyfri ,  wedi  ei  argraphu  ynghyd  yn  chwe  rhan  yn  fwy  cyf. . ,  a  heiaeth- 
ach  nag  un  argraphiad  a  fu  allan  erioed  o'r  blaen,  a  chwedi  ei  fanwl 
chwilio  ai  ddiwygio'n  ofalus  0  amryw  feiau  a  changymmeriadau  anafus 
gan  John  Rhydderch.  The  Divine  Poemsof  Mr.  Rees  Prichard  sometime 
Vicar  of  Llandovery  in  Carmarthenshire.  Seithfed  Argraphiad  gyda 
ychwanegiad  helaeth. 

Argraphwyd  yn  y  Mwythig  gan  Thomas  Durston,  lie  y  gellir  càel 
printio  pob  math  a'r  gopiau  am  bris  gweddaidd  a  chael  ar  werth  amryw 
lyfrau  Cymràeg  a  Saesnaeg. 

Like  many  of  the  books  printed  by  Durston,  it  has  no  date  ;  but  from  the 
tact  that  it  contains  six  parts,  while  the  édition  of  1724,  which  is  dated,  has 
but  fivc,  we  may  reasonably  conclude  that  it  appeared  some  time  later  than  that 
impression.  Différent  editors  were  not  always  careful  to  enumerate  their  éditions. 
The  édition  printed  by  Durston  in  1714  is  called  the  fifth. 

37.  Canwyli  y  Cymry;  sef  Gwaith  Mr.  Rees  Prichard  gynt  Ficar 
Llanddyfri,  yn  bum  rhan.  The  Divine  Poems  of  Mr.  Rees  Prichard 
sometime  Vicar  of  Llandovery  in  Carmarthenshire. 

Argraphwyd  yn  y  Mwythig  gan  John  Rogers.  1724.   i2mo. 

What  édition  this  was,  is  not  stated. 

58.  The  Morning  Star:  or  the  Divine  Poems  of  Mr.  Rees  Prichard, 
sometime  Vicar  of  Llandovery  in  Carmarthenshire,  transtated  into  English 
verse. 

London,  Printed  and  sold  by  J.  Johnson,  Whitechapel  Road  Side, 
J.  Pridden,  Bookseller,  Fleet  Street,  and  T.  Baldwin,  Paternoster  Row. 
1785. 

Apparently  a  reprint  of  W.  Evans's  translation  of  this  popular  work.  See  Ll. 
)C.  1771,  14. 

59.  Ban  wedy  i  dynny  air  yngair  a\\à  0  hen  gyfreith  Howel  da\  vap 


*  For  want  of  proper  type,  the  Anglo-Saxon  barred   d,  used  in  this  title,  has  been 
represented  by  d. 


^84  Attodiad  i  Lyfryddiaeth  y  Cymr\. 

Cadell  brenhin  Cymbry,  ynghylch  chwechant  mlynerf  aeth  heibio  wrth 
yr  hwn  van  y  gellir  ^eall  bot  yr  ofFeiriait  y  pryd  hynny  yn  priodi  gwrage./ 
yn  ^ichwith  ac  yn  kyttal  ac  wynt  in  gyfreithlawn. 

A  Certaine  Case  Extracte  out  of  the  auncient  Law  of  Hoel  da,  kyng 
of  Wales  in  the  yere  of  oure  Lorde,  nyne  hundred  and  fourtene  passed  : 
whereby  it  maye  gathered  that  priestes  had  lawfully  maried  wyues  al 
that  tyme. 

I.  Cor.  vii. 

It  is  better  to  mary,  than  to  burne. 
S.  Ambrosse. 

The  consent  of  the  wyll,  is  thys  burning 

...Was  owner  of  Llantathun. 

There  is  no  imprint  on  the  title  page,  but  the  colophon  is  as  follows:  'Impriii- 
ted  at  London  by  Roberte  Crowley,  dwellyng  in  Elye  rentes  in  Holburne.  Thr 
yere  of  our  Lord.  M.  D.  L. 

Cum  priuilegio  ad  iinpriinendum  solum.' 

This  is  a  small  quarto  of  four  unpaged  leaves,  the  back  of  the  titie  being  blank. 
The  author  was  William  Salesbury,  and  the  tract  appears  to  hâve  formed  an 
appendix  to  «  The  Baterie  of  the  Popes  Botereulx  »  (L/.  y  C.  1550,2,  note)  whicli 
appeared  the  saine  year,  and  from  the  same  press.  In  my  copy  the  first  two  or 
three  words  of  the  last  line  of  the  title  are  illegible,  a  defect  apparently  caused 
by  the  paper  not  having  taken  the  impression.  The  work,  excepting  the  extracts, 
is  written  in  English,  and  is  ail  in  black  letter. 

40.  Y  Gwirioneddyn  Diane  0  Law  Trais.  Hefyd  Breuddwyd  Hynod. 
Llundain,  argrafïedig  gan  S.  Rousseau,  Heol  y  Coed,  Ffynon  Feusydd, 
ac  ar  werth  gan  J.  —  R.  60  Paternoster  Row,  Gwerth  Ceiniog.  i2mo. 
8  pages. 

41.  Histori'r  Geiniogwerth  Synnwyr  Ar  Ddull  Enter  Lute  neu  hancs 
Marchiant  mawr  yn  Lloeger  a  hoffodd  Butain  0  flaen  ei  wraig;  ag  fel  y 
Cafodd  ei  Droeadigaith  drwy  ryfeddol  Ragluniaeth  Duw.  Ar  yr  hynn  y 
chwanegir,  ychydig  0  gwrs  y  Byd  Presennol,  ynghylch  mesur  y  tiroedd, 
a  Dyblu  Rhenti  yn  amryw  fannau;  Gyda  chydig  ddiddanwch  perthynasol 
i'r  fath  waith.  0  Gyfansoddiad  Hugh  Jones  Llangwm.  Pris  Chwech  ei- 
niog. —  Argraphwyd  yn  Ngwrecsam  gan  R.  Marsh,  Gwerthwr  Llyfrau. 

No  date. 

42.  Y  Rhan  gyntaf  0  Gatecismau  a  Gweddiau,  neu  Grefydd  Plant 
Bach  Saith  neu  Wyth  Mlwydd  Oed.  Gan  I.  Watts,  D.  D. 

Argraphwyd  yn  Llundain,  1747.  8vo. 

45.  Liais  j  Durtur  :  Sef  Gwahoddiad  Grasol  Crist  ar  Bechaduriaid... 
Gan  y  Parchedig  Mr.  D.  Rowland,  Gweinidog  yn  Efengyl  yn 
Llangeitho. 


Attodiad  i  Lxfryddiaeth  v  Cymr\.  585 

Argraphedig  yn  Llundain  gan  W.  Roberts  ac  ar  werth  Ynghymru  gan 
D.  Jones  0  Drefryw;  a  W.  Thomas  dan  lun  y  Fuwch  Goch,  Cowlane  yn 
agos  i  Smithfield.  1764.  (Pris  Dwy  geiniog).  i2mo.  pp.  1$. 

A  reprint  of  No.  1 5,  1762,  in  Ll.  y  C. 

44.  Porth  neu  Ddechreuad  Christianogaeth. 

i2mo.  pp.  62. 

4').  Pererindod  :  Sef  Hanes  y  Parchedig  Mr.  J.  Hart,  Gweinidog  yr 
Efengyl  yn  Llundain.  Wedi  ei  'Scrifennu  a'i  Law  ei  hun  yn  Saes'naeg, 
mewn  Rhagymadrodd  yw  Lyfr  Hymnau...  Ynghyd  a  rhai  Hymnau  (gan 
mwyaf  ar  Destynau  yr  Awdwr).  Gan  J.  Thomas. 

Caerlleon  :  Argraphwyd  gan  loan  Harfie,  tros  J.  Thomas.  1767. 

46.  Llythyr  oddiwrth  Gymmanfa  0  Weinidogion  a  gyfarfu  yn  yr  Allt- 
wen,  yn  Sir  Forganwg  ar  y  dydd  cyntaf  a'r  ail  0  Fehefm  yn  Flwyddyn 
1779,  2t  eu  hamryw  Eglwysydd.  Caerfyrddin,  argraphwyd  gan  J.  Ross. 

47.  Hymnau  ;  neu  Ganiadau  er  mawl  a  gogoniant  i  Dduw.  Gwasa- 
naethwch,  etc.  Salm.  c.  2.  Gan  lefaru,  etc.  Eph.  v.  19.  N.  B.  Fod 
Gair-lyfr,  Yscrythyrawl,  (yn  cael  ei  ddwyn  ymlaen,  yw  Argraphu,  os 
bydd  gofyniad  Cyffredin  amdanynt.)  Yn  Cynnwys,  amryw  arwyddoccad 
y  Geiriau  mwya  caled,  yn  y  Bibl.  Sef  Swyddau,  enwau  Dynion,  Gwra- 
gedd^  Gwledydd,  Dinasoedd,  Afonydd.  A  Naturiaetheu,  Bwystfilod^ 
Adar,  Pyscod,  Coed,  Planhigion,  Ffrwythau,  Hadau,  Cerrig,  etc. 

Dublin  :  Argraphwyd  gan  S.  Powell.  1764. 

In  this  awkward  way  the  saine  page  is  made  to  serve  the  purpose  of  a  title  for 
one  bock  and  an  advertisement  for  another,  and  is,  in  both  cases  very  inaccura- 
tely  printed.  Tfie  author,  whose  name  the  title  does  net  bear,  was  John  Robert 
Lewis,  of  whom  a  notice  will  be  found  in  Ll.  y  C.  under  1760,   13. 

48.  Amdo  i  Babyddiaeth. 
Llundain,  1672,  Svo. 

See  Moses  Williams,  Cofrestr,  N»  1 5. 

49.  Hyfïorddiadau  i  Ymddygiad  Defosiynol  a  Gweddus  yng  Nghy- 
hoeddus  Wasanaeth  Duw;  yn  fwy  enwedigol  yr  Arferiad  o'r  Weddi  Gyfï- 
redin  a  appwyntiwyd  gan  Eglwys  Loegr. 

Llundain  :  Printiwyd  gan  Tomas  Bascett,  Printiwr  i  Ardderchoccaf 
Fawrhydi'r  Brenin  ;  a  chan  Wrthddrychiaid  Rhobert  Bascett.  1752. 
Svo.  pp.  8. 

Generally  prefixed  to  the  Cymmrodorion  illustrated  édition  of  the  Prayer 
Book  which  bears  date  1755  and  1770.  The  editor  was  Richard  Morris,  who 
also  s'jperintended  two  éditions  of  the  Welsh  Bible  (1746,  1752). 

^0.  Tair  0  Gerddi  Newyddion.  Yn  gyntaf.  Cerdd  yn  Gosod  allan 
mor  Rhyfeddol  iw  Gweilhreddoedd  Duw  yn  mhob  ces,  ag  yn  Rhoddi 


j86  Attodiad  i  Lyfryddiaeth  y  Cymry. 

Hanes  am  y  Ddraenen  wen  a  Flodeuodd  yngwlad...  hen  Ddydd  nadolig. 
17 j 3.  Dechre  ar  Gwel  yr  Adeilad.  Yn  Ail.  Cerdd  er  Addysg  i  ni 
am  Styried...  yn  ddifrifol  am  ddydd  y  farn...  ymddangos  ger  bron 
Brawdie...  hyn  a  wnaethom...  Drwg.  Iw  chanu  ar  Loath  to  départ... 
Yn  Drydydd.  Cerdd  0  Gynghorion  i  Ifiengtyd  i  Beidio  Gwneuthyr... 
a  dysgu  Gwneuthyr  daioni  iw  chanu  ar  Ddiniweidrwydd. 

Argraffwyd  ynghaerlleon  gan  E.  Adams,  1753. 

The  title  slightly  impertect.  The  author  was  Ellis  Roberts  ihe  poetaster.  Svr 
LI.  y.  C.  1774,  16  ;  and  Traethodydd  for  January,  1872,  p.  103. 

51.  Dwy  0  Gerddi.   Y  Gyntaf...    farwnad  am  yr  anrhydeddus 

Williams  Wynn,  ar  ffarwel  Ned  Puw.  Yr  ail...  yn  y  Gerddi  chwi  gewch 
Gyflawn  Eglurhâd  am  Ddrygioni  Dyn  a  Gwrthie  Duw  1754,  ar  Loath 
to  Départ  y  ffordd  fyraf.  Emyn  yn  dangos  mawr  Drugareddau  Duw  yw 
etholedigion.  Tri  0  Englynion  i  Mr.  Howel  Lewis  meddig  0  Lundain,  ail 
Mâb  William  Lewis,  Esq.  0  Trosglwyn  yn  amlwch  ym  mon. 

Argraphwyd  yn  y  Mwythig  tros  Tho.  Roberts. 

No  date  ;  but  it  appears  to  hâve  been  printed  in  1754.  The  name  of  Ev.m 
Davies  is  subscribed  to  one  of  the  «  Gerddi  »,  and  that  of  Hu.  Evens  to  tin 
«  Emyn  »  and  «  Englynion  n.  The  title,  as  will  be  seen,  is  slightly  injured. 

52.  Yn  Gyntaf,  CyfFes  ar  i  glafwelu  un  Dafydd  Evans  prydydd  0 
lanfair  caereinion  'n  Sir  drafaldwyn  iw  canu  ar  fesyr  Gwel  'r  Adailiad. 
Yn  Ail.  Gynghorion  i  ferched  ifaingc  iw  canu  ar  farwnad  Bwngc.  ^n 
drydydd.  Addyned  a  fïurpas  pechadyr  gwedi  bod  yn  agos  i  Ange  ond 
gwedi  cael  i  Spario  gen  dduw  yng  hyd  a  chyngor  i  erill  i  gofio  duw 
rnewn  iechid  canu  ar  gwel  ar  adailiad. 

Argraphwyd  [cetera  desunt]. 

The  production  of  Jonathan  Hughes,  of  LIangollen,  who  was  horn  in  1721. 
and  died  in  1805.  Cp.  Ll.  y.  C.  1778,  i. 

53.  Tymhorol  Newyddion,  or  Wybren  neu  Almanac  Newydd, 

Am  y  Flwyddyn  er  Creadigaeth  y  Byd  571  $ 

Oedran  ein  Harglwydd  1766 

Er  diwigiad  y  Calendar  14 

Tyrnasiad  B.  George  III  6 

Gwedi  Blwyddyn  naid  2 

Argraphiad  y  llyfr  hwn  i 

Yn  cynwys  Calendar  cyflawn  or  deuddeg  Mis  y  Flwyddyn,  Dechreuad 

y  Pedwar  Tymhor,  Codiad,  Machludiad  aThremiadau'r  Haul,  y  Lleuad, 

ar  Planedau,  Hanes  Termau  Cyfraith  yn  Llundain,  a  Chymru,  Termau 

Ysgolheigaidd  Rhydychen,  a  Chambridge,  gida  nifer  ô  Dablau,  Chroni- 

clau,  gwaith  Beirdd,  a  Chôf-restrau ,  na  fu  erioed  yn  breintiedig  or 


Atiodiad  i  Lyfryddiaeth  y  Cymry.  587 

blaen  yn  y  Jaith  Gymraeg,  a  Uawer  0  bethau  eraill  cymwysol  a  chyfeus 
iw  Gwybod  ai  deall,  nad  ellir  moi  pennodi  yma.  Gwaith  gwael  Philo- 
math Gwilim  Hywel . 

Argraphwyd  yn  y  Mwythig,  ag  ar  werth  gan  J.  Eddowes,  Preintiwr, 
a  gwerthwr  Llyfrau,  ag  ar  werth  hefyd  Yngwrecsam,  gan  R.  Marsh; 
yn  Llangyniw,  gan  H.  Rogers  ;  yn  Caio  gan  M.  Jones  ;  yn  y  Bala,  gan 
R.  Edwards;  yn  Dolgelleu,  gan  W.  Hughes;  yn  Corwen,  gan  R. 
Evans  ag  Ev.  Jones;  yn  Rhuthin,  gan  E.  Evans  a  P.  Edwards;  yn 
Llangollen,  gan  R.  Parry  ;  yn  Abergavenny,  gan  B.  Rogers  ;  yn 
Abertawy,  gan  M.  Bevan;  yn  Aberhonddu,  gan  D.  Jones  a  T.  Llewelin; 
vn  Llanfawr  yml  y  Bala_,  gan  R.  Rynallt;  yn  Pwllheli,  gan  R.  Williams; 
vn  Llanidloes,  gan  \V.  Howell,  E.  Parry,  a  R.  Evans;  yn  Aberystwyth, 
gan  G.  Lloyd;  yn  Machynlleth,  gan  W.  Jones,  L.  Rowlands,  H. 
Hughes,  ag  El.  Herbert  ;  yn  Oswestry,  gan  S.  Hotchkis  ;  yn  Caer- 
fyrddin,  gan  Mr.  Williams,  a  Mrs.  Taylor  ;  yn  Llangeitho,  gan  D. 
Jones;  yn  Llangadog  gan...  Charles;  agyn  Llandeilo,  gan  Walter 
John.  'Pris  8^.)  8vo.  pp.  48. 

The  first  Welsh  almanac  is  stated  to  hâve  been  published  in  the  year  1680 
by  Thomas  Jones,  the  compiler  of  the  small  Welsh-English  Dictionary  which 
appeared  in  London  in  1688  ;  and  I  believe  they  hâve  been  continued  without 
interruption  to  the  présent  time,  though  few  of  them  hâve  ever  been  noticed  by 
bibliographers. 

As  far  as  I  bave  beenable  to  ascertain^  Thomas  Jones's  successors,  tothe  end 
of  the  i8th  century,  were  the  following  :  John  Jones,  of  Ty'n  y  Caeau,  near 
Wrexham  ;  Evan  Davies,  of  Manafon,  Montgomeryshire  ;  John  Rhydderch,  the 
Shrewsbury  printer  ;  John  Prys,  of  LIandegla,  in  Denbighshire;  John  Edwards, 
of  Glyn  Ceiriog,  in  the  same  county  ;  William  Howel  ;  John  Gain  Jones  ; 
John  Robert  Lewis,  of  Holyhead  ;  John  Harris,  of  Cydweli;  and  Matthew  Wil- 
liams, of  Llandeilo.  Prys  published  almanacs  annually  for  about  forty  years,  and 
J.  R.  Lewis  for  forty-four. 

The  almanac  hère  recorded  is  the  first  of  a  séries  of  ten,  which,  during  so 
many  years,  were  published  by  Gwilym  Hywel,  or  William  Howel,  a  native  of 
the  parish  of  LIangurig,  near  Llanidloes,  in  Montgomeryshire,  who  was  born 
in  1705,  and  died  at  Llanidloes  in  1775,  the  year  in  which  the  last  of  his  an- 
nuals  appeared. 

The  almanacs  of  W.  Howel,  like  the  rest  of  those  which  were  published  in 
the  last  and  preceding  century,  being  very  scarce,  I  hâve  given,  for  this  year, 
the  e.xtremely  long  title,  imprint  and  ail,  in  full;  but  for  the  remaining  years, 
for  brevity's  sake,  the  leading  words  of  each  title  must  suffice.  Excepting  the 
dates  and  the  mottoes,  the  différence  between  them  is  very  immaterial. 

As  has  been  appropriately  observée),  the  old  Welsh  almanacs  of  the  seven- 
teeth  and  eighteenth  centuries  may  be  regarded  as  the  precursors  of  the  monthly 


^88  Attodiad  i  Lyfryddiaeth  y  Cymry. 

magazines  and  other  periodicals  now  so  plentifui  in  the  Welsh  language,  and 
were  a  kind  of  médium  for  the  literary  intercommunication  of  those  days, 
being  conducted  and  compiied  by  men  of  considérable  literary  pretensions*. 
Hence  we  find  in  them  many  things  which  could  hardly  be  expected  in 
publications  of  the  class  to  which  they  belong.  In  addition  to  the  usual  infor- 
mation found  in  almanacs,  each  of  them  contains  a  certain  amount  of  matter 
strictly  literary,  sometimes  in  prose,  but  more  generally  in  verse,  and  some  ot 
thèse  possess  no  small  merit. 

The  sfaple  articles  of  this  kind  will  be  found  to  consist  of  popular  songs  and 
Christmas  carols  ;  but  occasionally  they  contain  aiso  some  of  the  superior  pro- 
ductions of  a  preceding  âge. 

Their  principal  literary  articles  will  be  noticed  under  each  year  as  weproceed. 
In  this  year's  issue  we  hâve  only  «  Carol  Nadolig  »,  and  a  few  «  Englynion  », 
both  apparently  by  the  Editor. 

54.  Tymmhorol-,  ag  wybrenol  Newyddion,  neu  Almanac  Newydd  am 
y  Flwyddyn...  0  Oedran  ein  Harglwydd  1767,...  Pan  edrychwyf  ar  dy 
Nefoedd,  gwaith  dy  fysedd;  y  Lloera'r  Ser,  y  rhai  ordeiniaist:  Pa  beth 
yw  Dyn!  Salin,  viii.  3,  4.  0  gasgliad  Gwilim  Howel,  Philomath. 

Argraphwyd  yn  y  Mwythig,  ag  ar  werth  gan  J.  Eddowes^  Preintiwr, 
a  gwerthwr  Llyfrau...  (Pris  8  d.).  8vo.  pp.  48. 

The  motto  from  the  Eighth  Psalm  has  been  added,  and  «  Hywel  »  converted 
into  «  Howel  »  ;  and  so  the  name  continues  to  the  end  of  the  séries. 

The  principal  literary  article  is  the  fine  pastoral  or  «  Bugeilgerdd  »  of  Edward 
Richard,  which  had  been  finished  the  previous  year,  and  was  now  printed  for 
the  first  time.  See  Gwaith  Prydyddawl  Edward  Richard  (London,  8vo,  1811), 
p.  3 1  ;  Blodau  Dyfed,  p.  170.  We  hâve  also  «  Englynion  »  by  Dewi  Fardd, 
John  Edwards,  Rhys  Morgan,  and  William  Ruffe  ;  and  «  Gwahoddiad  i  Sion, 
neu  Ymdaith  a'r  [o'r]  Aipht  i  wlad  Canaan  »,  by  Sion  Powel,  of  Llansan- 
nan,  Denbighshire. 

55.  Tymmhorol,  ag  wybrenol  Newyddion,  neu  Almanac  Newydd  am 
y  F'iwyddyn...  0  Oedran  ein  Harglwydd  1768...  0  gasgliad  Gwilim 
Howel,  Philomath. 

Argraphwyd  yn  y  Mwythig,  ag  ar  werth  gan  J.  Eddowes,  preintiwr, 
a  gwerthwr  Llyfrau (pris  8  d.).  8vo.  pp.  48. 

The  motto  this  year  is  taken  from  Cen.  i.  14.  The  literary  articles  are  «  Cy- 
wydd  Marwnad  Lewis  Morris  »,  by  the  Rev.  Evan  Evans  (laum  Brydydd  Hir), 
author  of  Disscrtatio  dcBardis;  «  Hymn  Newydd  »,  by  Edward  Richard,  author 
of  the  «  Bugeilgerdd  »  noticed  under  1767,  reprinted  as  «  Emyn  neu  Hymn  » 
in  his  Gwailh   Fiydyddawl,  p.  79;  and  Blodau  Dylcd,  p.  261  ;  «  Gweniailh  a 


*  Mr.  E.  Hamer,  in  Collections  historicat  and  archdcological  for  Montgomcryshire,  vol. 
iii,  p.  250.  Iii  the  same  paper  Mr.  H>inier  lias  given  a  short  sketch  of  the  lif'e  of  Howel. 


Attodiad  i  Ls'frxddiaeth  y  Cymry.  ^89 

Hoced  y  Tafarnau  »,  by  John  Edwards.  Clochydd  Manafon;  «  Cyffes  ac  Achwyn- 
iad  Mab  lefangc  »,  by  John  Evan,  0  Lanihangel  Ystrad  yn  Sir  Aberteifi,  which 
wili  be  found  reprinted  in  Blodau  Dyfed,  p.  402  ;  and  some  «  Englynion  »  by 
Dewi  Sien,  and  by  the  editor.  It  contains  also  some  account  of  the  celebrated 
bridges  of  Llanrwst  and  Pont  y  Pridd. 

56.  Tymmhorol,  ag  wybrenol  Newyddion,  neu  Almanac  Newydd  am 

y   Fwyddyn...  0  Oedran  ein  Harglwydd   1769 0  gasgliad  Gwilim 

Howel. 

Argraphwyd  yn  y  Mwythig,  ag  ar  werth  gan  J.  Eddowes,  Preintiwr 
a  gwerthwr  Llyfrau  with  y  Ty  Marchnad 'pris  S  d.).  8vo.  pp.  48. 

«  Philomath  d  is  omitted,  and  the  motto  is  trom  Jer.  xiv.  22.  The  poetical 
pièces  are  «  Cywydd  Marwnad  yr  Urddasol  Bendefig  Robert  Davies,  0  Lannerch, 
Yswain,  yn  sir  Fflint  »,  by  the  Rev.  Evan  Evans,  reprinted  in  Blodau  Dyjed,  p. 
17;  «  Carol  duwiol  Nadolig  »,  by  Sion  Powel  ;  «  Englynion  y  ganwyd  i'r 
Bont  newydd  ar  Dâf  yn  Sir  Forganwg  sêf  Pont  y  Ty-Pridd,  by  Lewys  Hopcin, 
0  Landyfodwg  yn  sir  Forganwg,  which  will  be  found  reprinted  in  his  collected 
Works  called  Y  Fel-Gafod,  p.  69;  «  Carol  Mai,  »  by  Dewi  Fardd  ;  and,  as 
usual,  some  «  Englynion  »  by  the  editor  himself. 

57.  Tymmhorol,  ag  wybrenol  Newyddion,  neu  Almanac  Newydd  am 

y  Flwyddyn 0  Oedran  ein  Harglwydd    1770...  0  gasgliad  Gwilim 

Howel. 

Argraphwyd,  ac  ar  werth  yn  y  Mwythig,  gan  J.  Eddowes,  Preintiwr, 
a  gwerthwr  Llyfrau  with  y  Ty  marchnad (pris  8  d.).  8vo.  pp.  48. 

It  contains  «  Marwnad  Lewis  Morris,  Esgweier  »,  by  the  Rev.  Gronwy 
Owen,  being,  so  far  asitis  known,  thelast  production  of  his  pen.  It  was  written 
in  Virginia  in  1767,  and  has  been  frequently  reprinted.  See  Greal  neu  Eurgrawn 
^Carnarvon,  1800),  p.  27;  Corff  y  Gaine  {2^'^  t^ii.),  p.  i;  and  Gronoviana, 
p.  116.  Succeeding  the  «  Marwnad  »  we  hâve  «  Carol  Plygain  Ddydd  Nado- 
lig »,  by  David  Jones,  0  Drefriw  (Dewi  Fardd),  the  compiler  of  Blodeugerdd 
Cyniru,  1759,  and  Cydymailh  Diddan,  1766;  and  «  Englynion  »,  by  Jack 
Rhees,  0  Lanrhaiadr  ym  Mochnant,  John  Jones  Llywelun,  0  Gaer  Einion, 
D.  M.  Bardd  anadnabyddus,  and  Dafydd  Griffydd,  «  Saer-Maen  0  Lanba- 
darnfâch,  yn  sir  Aberteifi  ».  The  motto  this  year  is  from  Ecoles,  xliii.  7,  8. 

58.  Tymmhorol,  ag  wybrenawl  Newyddion,  neu  Almanac  Newydd  am 

y  Flwyddyn 0  Oedran  ein  Harglwydd  1771 0  gasgliad  Gwilim 

Howel 

Argraphwyd,  ac  ar  werth  yn  y  Mwythig,  gan  J.  Eddowes,  Preintiwr, 
a  gwerthwr  Llyfrau  with  y  Ty  marchnad...  (pris  8  d.).  8vo.  pp.  48. 

Literary  articles  :  «  Cywydd  Marwnad  yr  hybarch  Lewis  Morris,  Ys- 
gweier  n,  by  Hugh  Hughes,  0  Lwydiarîh  Escôb,  yn  Sîr  Fon  ;  «  Carol  Haf  », 
by    John  Edwards,  Clochydd  Manafon;  «  Marwnad  Tomas  Makaig  »,  by  loan 


?90  Attodiad  i  Lyfryddiaeth  y  Cymry. 

Siencin,  o  Aberteifi  (see  Blodmi  Dyfai,  p.    285);  and  «  Cywydd  yr  Hwsmon  )i, 

by  GLwilim]  H[owel]. 

59.  Tymmhorol,  ag  wybrenawi  Newyddion,  neu  Almanac  Newydd 
am  y  Flwyddyn...  0  Oedran  ein  Harglwydd  1772...  0  gasgliad  Gwilim 
H  owel... 

Argrapliwyd,  ac  ar  werth  yn  y  Mwythig,  gan  J.  Eddowes  Preintiwr, 
a  gwerthwr  Llyfrau  yn  yml  y  Fy  marchnad...  ('pris  8  d.).  8  vo.  pp. 
46. 

Among  its  contents  are  «  Yr  Awdl  GyfFes  »,  by  Wiliam  Cynwal  ;  «  Cerdd 
Dafydd  Efan,  yn  ddiweddar  0  Lanfair  Caer-Einion  yn  sir  Drefaldwyn,  Bardd  o'r 
Oes  ddiwaethaf  »  ;  «  Carol  ar  Ystyr  Genedigaeth  ein  lachawdwr  lesu  Grist  i\ 
by  Huw  ap  Huw  (=Hugh  Hughes,  of  Llwydiarth  Esgob^,  Anglesey);  «  Engly- 
nion  i  annerch  G.  H.  »,  by  the  same;  and  «  Cywydd  i  Sior  Tywysog  Cymru  », 
by  Rice  Jones,  0  wlâd  Meirion  (=  Rhys  Jones,  Blaenau,  Merioneth,  compiler 
oï  Gorchestion  Bdrdd  Cymru,  1773,  4to). 

The  title  in  the  copy  inspected  is  imperfect. 

60.  Tymmhorol,  ac  wybrenawi  Newyddion,  neu  Almanac  Newydd 
am  y  Flwyddyn...  0  Oedran  ein  Harglwydd  1773...  0  gasgliad  Gwilim 
Howel... 

Argraphwyd,  ac  ar  werth  yn  Mwythig,  gan  J.  Eddowes,  Preintiwr, 
a  gwerthwr  Llyfrau  yn  yml  y  Ty  marchnad...  (pris.  8  d.).  8vo.  pp.  48. 

It  contains  «  Cywydd  y  Methiant  »,  wrongly  attributed  to  the  Rev.  Evan 
Evans  (sometimes  called  leuan  Brydydd  Hir  Ituaf)  instead  of  leuan  Brydydd  Hir 
Hynaj,  who  flourished  about  the  middle  of  the  fifteenth  century  ;  «  Cywydd  am 
Enedigaeth,  a  Dyfodiad  ein  lachawdwr  lesu  Grist  i'r  byd  yn  y  Cnawd  »,  by 
Huw  Huws  0  Fon  ;  «  Annogaeth  i  bob  gwir  Gristion  ddyfod  o  dan  Lywodraeth 
pechod,  i  wybodaeth  o'r  goleuni  »,  by  John  Rhys  0  Llanrhaiadr  ;  «  Cân,  yn 
dymuno  llwyddiant,  ac  ymwared  0  beryglon,  i  Long  newydd  Mr.  Lloyd  0  Gwm- 
gloyn,  yn  Sir  Bemfro  »  (reprinted  in  Blodau  Dyfcd,  p.  214)  by  loan  Siencyn  0 
Aberteifi  ;  Gwahoddiad  l'r  Beirdd  »,  by  G.  H.  (=  Gwilym  Howel),  I.  S.  (= 
loan  Siencyn),  and  1.  R.  (=  lohn  Rhys;  with  a  short  account  of  an  Eisteddfod 
held  at  Llanidloes.  The  niotto  in  the  title  is  taken  from  Esdr.  iv,  34,  35. 

61.  Tymmhorol,  ac  wybrenawi  Newyddion,   neu  Almanac  Newydd 

am  y  Flwyddyn 0  Oedran  ein  Harglwydd  1774...  0  gasgliad  Gwilim 

Howel... 

Argraphwyd,  ac  ar  werth  yn  y  Mwythig,  gan  J.  Eddowes,  Preintiwr, 
a  gwerthwr  Llyfrau  yn  yml  y  Ty  marchnad...  (pris  8  d.).  8vo.  pp.  48. 

The  motto  is  from  hai.  xlv.  12.  The  first  pièce  of  poetry  is  «  Awdl  Foliant 
Rhisiart  ap  Sion  »  (generally  called  «Rhisiart  Sion  Greulawn  »),  by  Sion  Tudur, 
which  is  said  to  hâve  suggested  to  Dean  Lloyd  of  St.  Asaph  the  idea  of  his 
Legcnd  of  Captain  Jones  (London,  1656).  The  «  Awdl  »  will  aiso  be  found  prin- 
tcd,  but  from  a  différent  ms.,  in   the  Brython  for  1858,  p.   215.  The  othcr 


Amdiad  i  Lyfryddiaeth  y  Cymry.  591 

effusions  consist  of  «  Carol  Mai,  1772  »,  by  John  Edwards,  already  mentioned; 
(I  Englynion  »,  by  Harry  Parry,  0  Graig  y  Gath,  a  poetaster,  of  whom  a  notice 
will  be  found  in  Gn'aith  Gwallter  Mechain,  i.  466  ;  «  Ychydig  0  hanes  y  Gym- 
deithas  [Eisteddfod]  a  gynhaliwyd  yn  Aberteifi,  Dydd  liun  y  Sulgwyn,  sef  Mai 
51,  1773  »,  by  loan  Siencyn,  Thomas  Cox,  and  Benjamin  Owen. 

61.  Tymmhorol,  ac  wybrenol  Newyddion,  neu  Almanac  Newydd  am 

y  Flwyddyn 0  Oedran  ein  Harglwydd  177$ 0  gasgliad  Gwilim 

H  0  w  e  1 . . . 

Argraphwyd,  ar  werth  yn  y  Mwythig,  gan  J.  Eddowes,  Preintiwr, 
ac  gwerlhwr  Llyfrau  yn  yml  y  Ty  marchnad...  (pris  8  d.].  8vo.  pp.  48. 

The  literary  contributions  are  the  following  :  «  Cywydd  Marwnad  Mr. 
William  Morris  o'r  Dollfa  Ynghaer  Gybi  ym  Mon  »,  by  the  Rev.  Evan  Evans, 
reprinted  in  the  Cylchgrairn,  ii.  86  ;  «  Carol  Plygain  »,  by  David  Jones  0  Dre- 
friw  ;  «  Cywydd  0  waith  Rhees  Morgan,  0  Bencraignedd,  ym  Morganwg,  a 
wnaeth  i  Wiliam  Duwc  0  Cumberland,  yn  amser  y  gwrthryfel  yn  Scotland  yn 
y  Flwyddyn  1745  »  ;  «  Englynion  ar  ystyr  y  pedwar  Elfennau  »,  anonymous  ; 
«  Dammeg  »,  by  Huw  Huws  0  Fon;  «  Annerch  lorwerth  Morganwg  »  Cproba- 
bly  lolo  Morganwg),  being  a  laudatory  address  to  the  editor  ;  <>  Annerch  David 
Jones,  C.  C.  i  Gwilim  a  ;  and  a  verse  of  four  lines  by  Gwilim  himself,  «  Ar 
ystyr  coegni  a  rhodres  y  byd  ».  This  being  the  last  of  the  séries,  the  editor  having 
died  in  the  course  of  the  year,  the  motto  is  not  ill  chosen:  «Dysg  i  ni  felly  gyfrif 
ein  dyddiau,  fe!  y  dygom  ein  calon  i  ddoethineb!  »  Salm  xc,  12. 

The  last  page  of  each  almanac  is  invariably  devoted  to  the  advertisement  of 
Bocks  sold  by  J.  Eddowes  at  Shrewsbury,  and  R.  Marsh  at  Wrexham. 

William  Howel  was  succeeded  by  John  Gain  Jones,  who  published  his  first 
almanac  in  1776. 

62.  Wybrenawl  Gennadwri  neu  Almanac  Newydd  am  y  Flwyddyn 
oedran  y  Byd,  5695.  Ac  am  Flwyddyn  0  oedran  yn  Jachawdwr  Jesu 
Grist  1746.  Ar  Ail  ar  ol  Blwyddyn  Naid. 

Yn  mha  un  eu  cynhwysir  Dyddiau'r  Mis,  a  Llythyren  y  Sul,  Dyddiau 
Gwylion  a  hynod,  oed  y  Lleuad  ai  Rheolaeth  ar  Gorph  Dyn  ac  Anifael 
with  fyned  Trwy'r  Deuddeg  Arwydd,  Toriad  y  Dydd,  a  dechreu 
Tywyll  Nos,  Codiad  a  Machludiad  yr  Haul,  ystyniad  a  Byrrhad  y  Dydd, 
hyd  y  dydd,  dyfodiad  y  Twr-Tewdws  i'r  Dehau  ar  Semidiurnal  Ark  neu 
hanner  hyd  y  dydd  pan  fo'r  haul  mewn  cyswllt  ar  Twr-Tewdws 
y\v  chwanegu  at  ddyfodiad  y  Twr-Tewdws  ï'r  Dehau  i  gael 
ei  fachludiad  ;  ar  Seminoctiurnal  Ark,  neu  hanner  hyd  y  Nos  yw 
chwanegu  at  yr  amser  ei  bydd  y  Twr-Tewdws  yn  y  deheu  ei  gael  yr  awr 
ar  munud  o''i  godiad,  Dyfodiad  y  lleuad  i'r  Dehau  ar  Semidiurnal  Ark,  y 
Dydd  cyntaf,  ar  ail  dydd  ei  bo'r  lleuad  yn  mhob  arwydd  a  hynny  yw 
chwanegu  at  yr  amser  ei  bydd  Lleuad  yn  y  Deheu  ei  gael  yr  awr  ar 
munud  oi  Machludiad,  bob  Dvdd  Trwy'r  flwyddyn  acyv^  Suhsîractio  neu 


?92  Attodiad  i  Lyfryddiaeîh  y  Cymry. 

yw  dynny  oddiwrlh  yr  amser  ei  bo'r  lleuad  yn  Deheu  ei  gael  yr  awr  ar 
munud  oi  Chodiad  y  Dydd  a  fynoch  Trwy'r  flvvyddyn.  Tremiadeu'r  pla- 
nedau  ac  amcan  or  hîn,  Dechreuad  pedwar  Chwarter  y  flwyddyn,  a 
Sywedyddawl  Farnedigaeth  ar  bob  chwarter  y  neilltuol,  Dechreu  a 
Diwedd  Termau  cyfraith  yn  Llundain  :  caniadau  Duwiol  a  llawer  o 
bethau  cytleus  yw  ddeall  a  pherthynasawl  i'r  fath  waith  sy'n  ormodedd 
yw  henwi  yma.  0  Waith  John  Prys  Philomath.  Ar  Wythfed  yn  Argra- 
phedig. 

Argraphwyd  yn  y  Mwythig,  gan  Tho.  Durston  ac  ar  werth  gan  Mr. 
Payn  yn  Wrecsham,  WilHam  Hughes  yn  Dolgelle,  John  Jones,  a  Thomas 
Jones  yn  Rhuthun,  Rhobert  Edwards  yn  y  Bala,  Thomas  Pierce  yn 
Wyddgrug,  Mr.  Peter  Hughes  o  Gorwen,  William  Morris,  Evan  Ellis, 
a  Sam.  Hotckis  yn  Groesoswallt.  8vo.  pp.  48. 

The  preceding  is  the  complète  title,  and  it  will  be  seen  that  it  is  about  as  full 
as  any  page  in  the  bock.  This  being  the  8th  yearof  issue,  Prys  must  hâve  publislu  J 
his  first  almanac  in  1758  ;  and  he  continued  to  put  forth  his  yearbooks  up  tu, 
if  net  later  than,  1777,  a  period  of  about  forty  years.  Both  typographically  anJ 
in  a  literary  point  of  view,  they  are  much  inferior  to  the  almanacs  of  his  con- 
temporary  and  rival  W.  Howel. 

The  literary  effusions  are  «  Byrr  hanes  ynghylch  Gan  tre'r  Gwaelod  »,  tlif 
same  that  is  printed  in  Difyrnxh  ir  Cymry,  p.  1 1  (see  Llyfryddiadh  y  Cynii) , 
'7 5°)  7);  "  Carol  Plygain  Newydd  »,  by  Arthur  Jones;  «  Tri  Englyn  ei  FedJ- 
ig  »,  by  John  Price;  «  Cerdd  Dduwiol  ei  annog  Dynion  yn  i  Hiefienctyd  ci 
feddwl  am  ei  diwedd  »,  to  which  is  subscribed  the  name  of  «  Richard  Parrv 
Athraw  ysgol,  yn  Sir  Fôn  »  ;  «  and  Pennill  ac  Englynion  Bryt  yinherthynas  y 
Diflfygiadau  mwya  hynod  a  ddigwyddant  ar  yr  Haul  ar  Lleuad  rhwng  hyn  a 
diwedd  y  Flwyddyn  1750  »,  by  W.  Edward. 

In  the  copies  1  hâve  seen,  Prys  generally  substitutes  ei  for  ;  and  y,  i  for  d 
and  eu,  and  confuses  ;'))'  and  yiv,  with  many  other  strange  peculiarities. 

63.  [Wybrenawl  Gennadwri  neu  Almanac  Newydd  am  y  Flwyddyn 
0  oedran  y  Byd,  $694.  Ac  am  y  Flwyddyn  0  oedran  ein  Jachawdvvr 
Jesu  Grist  1745...  0  Waith  John  Prys  Philomath,  etc.] 

My  copy  wants  the  titlepage,  with  soine  other  leaves,  and  therefore  I  can 
only  supply  the  title  conjecturally  from  that  of  the  following  year,  aiready  given 
in  ail  its  absurd  fulness.  The  following  pièces,  intended  for  poetry,  will  be  found 
in  this  year's  issue  :  A  Dialogue  between  the  author  or  editor  and  John  Parry 
of  the  parish  of  Gorwen  ;  «  Awdwl  Gowydd  ar  y  pedwar  mesur  ar  hugain  0 
Goffadwriaeth  am  ddioddefaint  Crist  »,  the  author  being  one  Owen  Griffith  of 
Anglesey  ;  «  Englyn  i  ofyn  fTon  »,  attributed  to  Dafydd  ab  Gwilym  ;  other 
Englynion  by  Huw  and  Edward  Morris  ;  «  Gywydd  0  Alarnad  am  yr  Anrhyd- 
eddus  fardd  Edward  Morris  »,  by  Huw  Morus;  and  «  Cerdd  0  Gynghorion  i  ferched 
Jeuaingc»,  by  the  author.  The  last  page  has  a  list  of  Books  sold  by  Tho.  Durston. 


Aîtodiad  i  Lyfryddiaeth  v  Cyniry.  ^93 

64.  Dehonglydd  y  Sêr  Neu  Almanac 

Am  y  P^lwyddyn  0  oedran  |    ^  .    -*   ^  " 
^         ^     ^  (    Crist  1747. 

Ar  Drydydd  ar  ol  Blwyddyn  Naid...  0  Waith  John  Prys  Philomath. 
Ar  Nawfed  Argraphedig. 

Argraphwyd  yn  y  Mwythig  gan  T.  Durston...  8vo.  pp.  48. 

It  contains,  among  other  matters,  «  Cerdd  0  Gyftes  gwr  iefangc  0  Brydydd  », 
by  Jonathan  Hughes;  and  «  Carol  Plygain  »,  of  no  great  merit,  by  Ellis  Wynne, 
author  of  Bardd  Cwsg. 

Thèse  three  are  ail  that  I  hâve  as  yet  been  able  to  consult  of  Prys's  almanacs. 
The  following  title  and  contents  (n°  65)  I  take  from  an  article  on  w  Hen  Lyfrau 
y  Cymry  »  in  the  Tradhodydd  for  January,  1872  ;  and  several  other  entries  in  this 
list  are  indebted  to  the  sa  me  paper. 

6  5 .  Dehonglydd  y  Ser  neu  Almanac  Newydd 

Am  y  Flwyddyn  0  oedran   1    J.  '' 

^         J     ^  {   Crist  1756. 

Yr  bon  sydd  Flwyddyn  Naid...  0  glasgcliad  John  Prys  Philomath. 
Ar  Dau-Nawfed  yn  Argraphedig  :  ar  pedwerydd  yn  ol  y  cyfri  Newydd 
neu'r  New  Stile. 

Argraphwyd  yn  y  Mwythig  gan  Tho.  Durston,  etc.  8vo.  pp.  48. 

It  appears  to  contain  the  following  effusions  of  the  bards  :  «  Chwech  Eng- 
lyn  mewn  attebiad  i  Englynion  Dafydd  Jones  0  Drefriw  yn  yr  Almanac  am 
1755  »,  by  «  Evan  Thomas  Orudd  a  darllenydd  yn  llanarth  sir  Aberteifi  », 
usually  called  Ifan  Tomas  Rhys,  «  Prydydd  a  Darllenydd  yn  Llanarth  ».  Most 
of  this  writer's  works  will  be  found  printed  in  Diliau'r  Awcn.  Aberystwyth, 
i2mo,  1842.  «  Carol  Plygain  »,  by  Arthur  Jones,  and  «  Mytyrdod  am  ei 
farwolaeth  »,  by  Owen  Gruflfydd  of  Llanystumdwy,  complète  the  poetical 
contributions. 

66.  Hanes  y  Cyflawn  0  Fuchedd  a  Gweithredoedd  Joseph  oArimathea. 
Y  Disgybl  cyntaf  a  bregethodd  yr  Efengyl  yn  y  Deyrnas  hon.  Yn  dangos 
1.  Ymhale  y  ganwyd  ef  ac  y  dygwyd  i  fynu.  2.  Ei  ryfeddol  Ddysg  a'i 
Ddoethineb  yn  ei...  3.  Y  modd  y  dewiswyd  ef  yn  un  0  Ben  Cyngor... 
4.  Y  modd  y  trowyd  ef  i  fod  yn  Ddisgybl.  5.  Y  modd  y  claddodd  Gorph 
ein  lachawdr...  gwerthfawr  a  brynnasai.  6.  Y  modd  yr  ymdeithiodd  0 
Rhufain  ac  y  torodd  y  Hong  arno.  7.  Y  modd  y  daeth  i'r  Deyrnas  hon, 
ac  y  dechreuodd  bregethu'r  Efengyl  yn  Ynys  affallon  neu  Glastenbury, 
lie  plannodd  ei  ffon  yn  y  llawr  yr  hon,  cyn,  symmudo  i  law  oddiarni, 
a  droes  yn  Ddraenen  iraidd,  ac  a  flagurodd  ac  sydd  etto  hyd  Heddyw 
yn  arfer  0  flaguro  a  blodeuo  bob  Nydd  Nadolig  a  cholli  ei  Blodeu  cyn 
y  Nos.  8.  Yn  gyntaf  Cerdd  a  wnaed  ir  Gwrthryfel  ynghylch  y  Grefydd, 
sef... 


^94  Attodiad  i  Lyfryddiaeth  y  Cymry. 

Argraphwyd  yn  y  Mwyihig  gan  J.  Eddowes  a  J...  dros  William 
Thomas. 

It  has  no  date.  It  is  in  verse  ;  the  author  or  translater  subscribes  his  name  as 
«  John  Edwards  o'r  Glyn  Ceiriog  Piiilomath  »,  wlio  was  born  about  the  year 
1700,  and  died  in  1776:  see  Ll.  y.  C.  1768,  6.  The  legend  of  Joseph  of  Ari- 
mathea  must  hâve  been  popuiar  at  this  time  in  the  Principality.  Cp.  Nos.  12,  50, 
and  67. 

67.  Dwy  0  Gerddi,  0  leshâd  i'r  sawl  ai  Ystyreio  a  gwae  i  bob  Dyn  na 
chymero  rhybudd  wrthynt.  Yn  Gyntaf,  Erbyn  Godineb.  Yn  ail.  Hanes 
fel  y  daeth  deuddeg  cennad  megis  Deuddeg  Angel  i  Glastonberry  yr 
Nadolig  Diweddaf  ag  ychydig  0  hanes  y  Ddrainen  a  blanodd  Joseph  0 
Arithamea[5/c].  Yn  Ddiweddaf.  Mae  Eisie  Cael  Henwe  Saith  0  Langcie 
0  Blwy  Bangor  a  fytho  am  Chware  Enterluwd  yr  Hâ  nesa  mi  fyddaf  yn 
ffwl  fy  Hun,  yr  hwn  wyf  brawd  Wil  o'r  Ty'n  y  Werglodd. 

Without  imprint  or  date.  It  is  of  no  literary  merit. 

68.  Llwybr  Hyffordd  y  Plentyn  Bach  i  Fywyd  tragwyddol...  Wedi 
ei  gyfleithu  yn  Cymraeg  gan  Theoph.  Evans. 

Argraphwyd  yn  y  Mwythig  gan  Tho.  Durston  1758. 

69.  Y  Nefol  Genad  neu  Lwybur  Hyffordd  Plentyn  i  Fowyd  Tragwydd- 
ol. Rhieni  plant  sy  ai  Chwant  am  Dduw  Edrychwch  pa  fodd  y  byddan 
byw.  Dan  ofn  yr  Arglwydd  ddedwydd  ddawn  nhw  gan  ogoniant 
llwyddiant  Uawn... 

Argraphwyd  yn  y  Mwythig,  gan  Stafford  Prys,  tros  Lewis  Jones 
1760. 

A  différent  translation  trom  the  preceding  (n°  68)_,  and  a  much  interior  per- 
tormance. 

{To  he  conïunied.) 


LE  CATHOLICON  DE  J.  LAGADEUC. 


L'utile  édition  du  Catholicon  de  Lagadeuc  publiée  par  M.  R.  F.  Le 
Men  repose  sur  celle  d'Auffret  de  Quoetqueuran,  publiée  à  Tréguier  en 
1499.  M.  Le  Men  n'annonce  pas  avoir  collationné  le  manuscrit  de  La- 
gadeuc dont  l'original,  ou  une  ancienne  copie  ',  est  conservé  à  la  Biblio- 
thèque Nationale  de  Paris  où  il  est  classé  :  Lat.  7656.  Par  l'obligeante 
entremise  de  M.  le  vicomte  de  la  Villemarqué,  j'ai  récemment  reçu  de 
M.  J.  de  Gaulle  la  copie  des  deux  premières  lettres  de  ce  ms.,  et  je  me 
propose  de  soumettre  aux  lecteurs  de  la  Revue  les  plus  importantes 
variantes  et  additions  que  me  permet  de  fournir  la  comparaison  de  la 
copie  de  M.  de  Gaulle  avec  l'édition  de  M.  Le  Men. 

W.  S. 

[A  cette  occasion,  j'ai  jugé  à  propos  de  collationner  les  éditions  impri- 
mées du  Catholicon  que  possède  la  Bibliothèque  Nationale.  Elles  sont 
au  nombre  de  trois:  i)  une,  in-folio,  datée  de  1499  et  classée  X,  1429, 
a.  C'est  d'après  un  autre  exemplaire  de  cette  édition,  conservé  à  la 
Bibliothèque  de  Quimper,  que  M.  Le  Men  a  publié  son  édition.  L'exa- 
men de  cette  édition  m'a  convaincu  qu'elle  est  reproduite  avec  une 
grande  fidélité  par  M.  Le  Men.  Je  la  désigne  par  A,  et  l'édition  de  M.  Le 
Men  par  Aa.  —  2)  Une  édition  in-4,  classée  X,  1429  ff  aa.  Je  la  dé- 
signe par  B,  On  ne  peut  en  connaître  la  date  parce  que  le  premier  et  le 
dernier  feuillet  ont  malheureusement  disparu.  Je  ne  suis  pas  en  état  d'en 
étabhr  l'âge  exact  par  l'étude  des  caractères  et  de  l'impression  :  le 
bibliothécaire  que  j'ai  consulté  à  ce  sujet  ne  la  croit  pas  antérieure  à 
l'édition  de  1499.  Mais,  qu'elle  lui  soit  ou  non  postérieure,  elle  en  est 
indépendante.  Elle  est  dans  bien  des  cas  plus  complète.  Elle  contient 
un  grand  nombre  d'exemples  bretons  que  l'édition  de  1499  et  le  manus- 
crit même  suppriment,  tout  en  laissant  subsister  les  exemples  corres- 
pondants latins  et  français.  Un  dépouillement  intégral  de  l'édition  1x1-4" 
serait  aussi  important  que  celui  du  manuscrit,  sinon  davantage.  — 
5^Une  édition  petit  in-S",  classée  X,  1429  ff  a  b.  Je  la  désigne  par  G, 


I.  [Le  ms.  de  la  Bibliothèque  Nationale  ne    peut  être  l'original   de   Lagadeuc;  c'est 
une  copie,  laissée  inachevée,  et  faite  elle-même  peut-être  sur  une  autre  copie.  —  H.  G.) 

27 


:596  Le  Catholkon  de  J.  Lagadeuc. 

Cette  édition  est  beaucoup  plus  abrégée  que  les  précédentes.  Elle  est  de 
1 522  et  non  de  1501  comme  le  dit  dans  sa  préface  M.  Le  Men,  mal 
renseigné  à  cet  égard  ' .  L'Explicil  de  cette  édition  étant  fort  inexactement 
reproduit  dans  le  Manuel  du  Libraire  de  Brunet  (y  éd.  t.  I,  col.  ^$5  , 
je  crois  utile  de  le  reproduire  ici.  (J'étends  les  contractions;  : 

Explicit  Catholicon  seu  dictionarius  trino  partitus  vernaculo  :  expensis 
honesti  viri  Yvonis  Quilleuere  Parisius  commorantis  ]  rursuz  impressus. 
Necnon  opéra  [  ac  ipsius  industriadiligenter  tersus  et  emendatu»  |  Anne 
seiq  [sic]  millesimo  vicesimo  primo,  Pridie  kal.  Februarias. 

On  voit  que  dans  cet  Explicit  il  y  a  une  erreur  d'impression  et  une 
lacune  ;  selq  est  probablement  une  faute  pour  l'abréviation  de  sclllcct  et 
après  millesimo  il  faut  suppléer  qulngenteslmo ,  et  on  a  de  la  sorte  la  date 
1521;  mais,  comme  il  s'agit  des  Calendes  de  Février,  et  qu'à  cette 
époque,  en  France,  l'année  commençait  encore  à  Pâques,  on  a  comme 
véritable  date  :  1522. 

Le  loisir  m'a  manqué  pour  collationner  tous  les  articles,  si  intéressant 
que  dût  être  ce  travail  ;  mon  attention  s'est  bornée  aux  articles  signalés 
par  M.  Stokes  comme  offrant  des  différences  entre  le  Manuscrit  et  l'édi- 
tion de  1499  reproduite  par  M.  Le  Men,  et  je  me  suis  contenté  d'ajouter 
à  son  travail  les  variantes  de  B  et  de  C.  H.  G.] 

VARIANTES. 
Abaff  A.  Aa.  B.  C.  —  Abaff  et  couart  tout  ung  Ms. 
Abil...  pur  abilafï...  ent  pur  abilaff  A.  Aa.    —  peur  abillafî...   ent  peur 

abilhaff  Ms. 
Abim  A.  Aa.  B.  C.  —  Abism  Ms. 
Abloez  en  bloez  A.   Aa.   —  A  bloaz  en  bloaz  B.   C.  —  Abloeaz  an 

bloeaz  Ms. 
Abostoler  (s.  v.  Abostol)  A.  Aa.  B.  —  leffr  a  abostolou  Ms. 
Abonn  march  A.  Aa.  —  Abon  march  B.  —  Aboun  march  Ms. 
Absentaff  A.  Aa.  —  Absantaff  Ms.  C. 
Achiuafî  A.  Aa.— Acheuaff  B.  C.  (B.  et  C.  donnent  à  l'article  précédent: 

Acheffj  —  Achiffaff  Ms. 
Acord,  Acordaff  A.  Aa.  —  Accord,  Accordafî  Ms.  B.  C. 
Adoptio  A.  Aa.  —  Adoption  C.  —  Adopcion  Ms. 

Ael  g,  ange  A.  Aa.  B.  C.  —  Ael  g.  angre  Ms.  j 

Afet  A.  Aa.  —  Afïet  Ms.   C.  —  Afîet  pe  poquet.  ga.  basio...   Item  hoc     | 

I.  La  même  erreur  a  été  commise  par  M.  tle  h  Villemarqiié  clans  VEssaism  l'histoire 
de  la  langue  bretonne  (p.  l)  qu'il  a  mis  en  tête  de  son  édition  du  dictionnaire  français- 
breton  de  Legonidec.  j 


Le  Catholicon  de  J.  Lagadeuc.  ]C)-j 

basium  |  sii.  g.  baise,  b.  aff  pe  poq...  Idem  hoc  suauium  |  ii.  g. 
baise  luxurieux,  b.  poq  luxurius.  B. 

AffermaffA.  Aa.  C.  —  Affirmaff  Ms. 

Alhuezerez  A.  Aa.  —  Alhuezeres  Ms.  B.  C. 

Alusonet.  g.  aulmonyer  A.  Aa.  —  Alusonnier.  g.  aulmosnier  Ms.  — 
Alusuner  B.  C. 

Am  eoll  A.  Aa.  —  Am  eoul  Ms.  —  Am  youll  B.  C. 

Ammonetet  ^s.  v.  Amonetaff;  A.  Aa.  B.  —  Amonestet  Ms.  C. 

Ampechaff  A.  Aa.  B.  C.  —  AmpeschafF  Ms. 

Anaff  A.  Aa.  B.  C.  —  Anafan  Ms. 

Anes  A.  Aa.  —  Anaes  Ms.  —  Anes  al'r  [aliter]  dyeas.  g.  mesayse. 

Ancoffnez  (s.  v.  Ancouffhat   A.  Aa.  B.  C.  —  Ancouffnez  Ms. 

Anneu  A.  Aa.  B.  C.      i  ,  ,  a       -j       ^r 

.    .  Anneu  ha  anneurfenn  idem  Ms. 

Anneuenn  A.  Aa.  ) 

Apellaff  A.  Aa.  —  Appellaff  Ms.  B.  C. 

Appotiquaererez  A.  Aa.  B.  —  Appotiquaerez  Ms.  —  Apotiquaerez  C. 
s.  V.  Apotiquaen. 

Ararz  A.  Aa.  —  Arazr  Ms.  B.  C. 

Arbalastr.g.arbalestre.l.(  Arbalastr.  g.  arbalestre.  1.  hec  balista,  ste  Ms. 
balistrarius.  A.Aa.B.C.i  Arbalestrer,  g.  arbalestrier,!.  hicbalistarius,rii. 

Arbitag  A.  Aa.  B.  C.  —  Arbitrag.  Ms.  [Ms. 

Archbaelec  A.  Aa.  B.  C.  —  Arc  bealeuc  Ms.  (lege  :  archbaeleuc). 

Archidiagon  Aa.  —  Arch  diagoun  Ms.  —  Archidiagon  A.  B.  C. 

Archidiagondet  A.  Aa.'  B.  C.  —  Archdiagôdet  Ms. 

Argantier  A.  Aa.  —  Arganter  Ms.  —  Archanter  B.  C.  (B.  et  C.  don- 
nent Archant  et  Archanton  . 

Arguemant  A.  Aa.  —  Argument  Ms.  B.  C. 

Assentiment  Aa.  —  Assantament  Ms.  —  Assentement  A.  B.  —  Assan- 
tement  C. 

Auel  gualern  A.  Aa.  —  Auel  goalarnn  Ms.  —  Auel  gualernn  B.  —  Auel 
galern  C. 

Auterite  A.  Aa.  B.  C.  —  Autorite  (mais  Auteriteaff)  Ms. 

Aznauoudeguez  A.  Aa.  B.  C. —  Aznauodaeguez  (maisAznauoudec    Ms. 

Baelec  A.  Aa.  B.  C.  —  Le  ms.  a  deux  articles  correspondants  :  Bea- 
leuc. g.  prebstre.  latine  hic  et  hec  sacerdos  (entre  Baculaff  et  Bagic 
bihan ;  —  et  :  Baeleuc  pe  baelegues  g.  prebstre  (entre  Baeguelat  et 
Baeleguiez. 

Baguic  uihan  A.  Aa.  —  Bagic  bihan  Ms.  Baguic  B.  C. 

Bannech  A.  Aa.  B.  C.  —  Banhe  Ms. 

Bara  panen  A.  Aa.  —  Bara  panenn  Ms.  B.  C. 


398  Le  CathoUcon  de  J.  Lagadeiic. 

Barbieres  A.  Aa.  —  Barbares  Ms.  B.C. 

Barfuec  A.  Aa.  B.  —  Barffec  Ms. —  Item  hic  barbatolus.  g.  pou  barbu, 
b.  barfueguyc.  B.  —  Barfeuc.  g.  barbu...  Et  hic  barbatolus,  li. 
gai.  pou  barbu,  bri.  nep  en  deueux  nebeut  a  barf.  C. 

Baz  A.  Aa.  B.  C.  —  Bazz  Ms. 

Baz  da  tamoesat  A.  Aa.  B.  C.  —  Bazz  da  taffoessat  Ms. 

BerignafF  A.  Aa.  B.  —  Bernygnatï  Ms.  —  Beringnaff  C. 

Bescol  A.  Aa.  B.  C.  —  Bescoul  Ms. 

Besaff  groaet  Aa.  —  Bezaff  groaet  A.  —  BezafF  gruet  Ms.  —  Bezaff 
graet  B.  C. 

Bezuenn  A.  Aa.  B.  C.  —  Bezeuenn  Ms. 

blamaff,  blamet  (s.  v.  Blam)  A.  Aa.  B.  C.  —  blammaff,  blammet  Ms. 

Bleiz  A.  Aa.  B.  C.  —  Bleiz  bras.  g.  grant  loup.  Ms.  —  Inde  lupilus, 
li.  g.  petit  loup.  b.  bleizic.  B. 

blezuyaff  (florere  :  s.  v.  Bleuzuenn)  A.  Aa.  —  bleuzif  Ms.  —  bleuzuyaff 
B.C. 

Blonec  A.  Aa.  B.  C.  —  Blounhec,  g.  suyf  de  porc.  1.  hoc  obdomen, 
inis  (entre  les  articles  Eloez  et  Blont). 

boeder  '  lare  (s.  v.  boet)  A.  Aa.  —  boeder  larg  :  gl.  large  en  viande)  Ms.  B. 

Bombart  A.  Aa.  B.  C.  —  Boumbart  Ms. 

Bondal  Aa.  —  A  et  C  donnent  Bôdal;  ô  est  ici  pour  ou,  bien  qu'il  soit 
généralement  l'abréviation  de  on.  —  Le  Ms.  et  C.  donnent  Boudai 
en  toutes  lettres.  (Cet  article  est  entre  les  art.  Bouc!  et  Bouderie). 

Bozennenn  A.  Aa.  B.  C.  —  Boezennenn  Ms. 

Breauiaff  A.  Aa.  —  Breauyff  Ms.  —  Breauyaff  B.  C. 

Breulim  A.  Aa.  B.  C.  —  Le  Ms.  a  deux  articles  correspondants  à  celui- 
ci  :  1)  Breaulim,  g.  meule  I.  hec  molina,  ne  (entre  Breauyff  et 
Breuet)  ;  2)  Breulim,  g.  meule  pour  aguiser.  1.  hec  mola...  entre 
Breuion  et  Breulimaff). 

Brit  A.  Aa.  B.  C.  —  Brid  Ms. 

Burtell  A.  Aa.  —  Burutell  Ms.  —  Brutell  B.  C. 

ADDITIONS    EMPRUNTÉES    AU    MS. 

Agace,  g.  agace.  1.  agatha,  the. 

Amiral,  g.  Amiral  ou  seigneur  de  nef  a  mer  la.  hic  navarchus,  chi. 
Ampris.  g.  Amprise  [cf.  :  douz  ampris  souvissant  (à  votre  dessein  suffi- 
sant) M.  233  ^'j. 
Anes  g.  Agnes.  1.  hec  Agnes,  etis. 

I.  observez  l'emploi  de  la  préposition  comme  suffixe  ;  Boeder  =  hoed  +   er  ;   cf.  le 
gaulois  bratu-àe. 


Le  Catholicon  de  J.  Lagadeuc.  599 

Apell.  pe  adiabell.  g.  de  loign.  1.  de  longe,  adverbium  loci.  [cf.:  adiabell 

pa  emem  sellaff   quand  je  me  regarde  de  loin_  M.  88.] 
arat   g.  arer   s.  v.  Arabl  —  A.  B.  C. 
Argat.  g.  hucher.  [Probablement  erreur  du  copiste  pour  Archat.  Le 

mot  se  trouve  entre  les  articles  Arch  et  Arch  an  boet.] 
Asis.  g.  assise,  l.  hec  assisia,  assisie. 
Asq.  g.  cornière  [aujourd'hui  ask  «  entaille»,  cf.  Diez,  Etym.  Wœrt.  Il, 

Î78,  s.  V.  osche.] 
Auel  gueffret.  g.  vent  de  mydy.  —  [Se  trouve  également  dans  B.  (s.  v. 

Auel   qui  donne  en  outre  :  homme  qui  habite  deuers  midi.  bri.  nep 

a  chom  diouch  cresteiz.  —  C  donne  Auel  guefret.   —  Aujourd'hui 

gévret.] 
Auoun  costez.  g.  dun  coustez.  1.  alterutrius  adverbium. —  [Comparez  le 

comique  wonyn,  C.  M.  389.] 
Ausaffcoan.  g.  apparailler  a  souper   entre  les  mots  Abece  et  Abel  .  [cf. 

rac  ausaf  an  boedou  M.  6  ^;  ,ez  auso  plen  an  pasc  M.  47''  ;  auset 

M.  49  •';  auset  boet  M.  200  ^'^  auset  doz  guys  M.  208  '';  petra  vezo 

a  aushymp  ny .''  M.  200  ''.J 
Azff.  g.  meure.  Uide  in  mur.  cest  tout  ung.  [Cet  adjectif   gall.  addfed, 

irl.  abaidh)  est  aujourd'hui  hav,  haô  «  mûr»  avec  un  h  inorganique.] 
Bahu.  g...  tmanque] 
Baill.  g.  bausen  ?^  1...  [manque] 
Bateau,  g.  idem.  1.  hec  camba,  cambe. 

Bazoul  cloch.  g.  bâte  ou  bâton  iaujourd  hui  bazoulen  ■<  espèce  de  mar- 
teau qui  pend  dans  le  milieu  d'une  cloche  et  qui  la  frappe  pour  la 

faire  sonner  ■>.] 
Benaet.  g.  Benoyt.  1.  hic  benedictus,  iti. 
bihanhaet   lat.  minutusj  s.  v.  Bihan. 
Bleuzffan  groaguez  [^a  •/,a-:a;rr,v'.x,  lit.  «  fleurs  des  femmes  »]  uide   in 

natur.  [Ici  bleuzff  est  le  pluriel  de  bleuzuenn  «  fleur  »  et  groaguez 

le  pluriel  de  gruec  «  femme  ».] 
Blouhec.  1.  abdomen^  inis. 
Brae.  g.  Broyé,  hoc  trahale,  lis.  [aujourd'hui  braé  «  instrument  propre 

;i  broyer  ou  briser  le  chanvre  ou  le  lin  ».  Le  Gon.] 
buguelenn.  g...  (manque)  [probabl.  le  moderne  bugélen  «  petit  houx  ■>.] 
Buron  et  fulort.  tout  ung.  ibi  uide.  [buron  est  probablement  =  anc.  fr. 

buron  «  hutte  »  et  signifie  ici  «  privé  »  cf.  le  gall.  ty  bach  dans  le 

même  sens.] 
But.  g.  bute  1...   manque). 

Simla,  19  Avril  1870.  Whitley  Stokes. 


LAVAROU  KOZ  A  VREIZ  IZEL 


EIL     STROLLAD. 


95 

Didalvei  eo  ha  koll  amzer 

Diski  ar  mad  hep  hen  ober. 

96 

Oher  vad  pa  c'helli, 

Droug  a  ri  pa  gari. 

97 

Sell  peira  'ri. 

98 

Kalonek  a  drec'h  peh  ira. 

99 

Hep  stourm  ne  vezer  kct  treac'h. 

100 

E  rankcr  neiin  pe  veuzi. 

lOI 

Ober  ha  ievel. 

102 

Pep  ira  evit  Doue. 

105 

Mervel  da  veva. 

104 

Den  a  galon  a  zo  doujct. 

105 

A  skiant  hag  a  goantin 
Eo  pinvidik  'walc'h  pcp-hini. 

106 

N'euz  den  ebed  war  ann  douar 
Na  gav  en  tu  bennag  he  bar. 

107 

E  pep  Ira  a  glask  peh  den 
Tenna  begik  he  spillen. 

108 

Ar  c'hamm 

A  wcl  he  damm. 

PROVERBES    ET    DICTONS 

DE  LA   BASSE  BRETAGNE. 


DEUXIEME    SERIE. 


I. 


9^  C'est  peine  inutile  et  perte  de  temps 

Qu'apprendre  le  bien  sans  le  faire. 

q6  Fais  le  bien  quand  tu  pourras, 

Tu  feras  le  mal  quand  tu  voudras. 

97  Prends  garde  à  ce  que  tu  feras. 

98  L'homme  de  cœur  vient  à  bout  de  tout. 

99  Sans  combat  point  de  victoire. 

100  il  faut  nager  ou  se  noyer  'c'est-à-dire  :  Il  faut  vaincre  ou  mourir). 

101  Faire  et  se  taire. 

102  •  Tout  pour  Dieu. 
10^  Mourir  pour  vivre. 

104  L'homme  de  cœur  est  respecté. 

IL 

105  De  savoir  et  de  beauté 
Chacun  se  trouve  assez  riche. 

106  II  n'est  homme  sur  la  terre 

Qui  ne  trouve  quelque  part  son  égal. 

107  En  toute  chose  chacun  cherche 
A  tirer  le  bout  de  son  épingle. 

108  Le  boiteux 

Voit  son  morceau,    (C.-à-d.   :   Si  disgracié  qu'on 
puisse  ètrCj  on  a  toujours  bonne  opinion  de  soi). 


402  Lcivarou  Koz  a  Vrciz  Izcl. 

109  Ar  c'hainin  a  zaill  keit  hag  ciin  dll, 

Hirroc'li  mar  gall. 

1 10  N'e  ket  ai  c'hezek  bras  a  gass  ar  c'herc'h  d'ar  marc'liad. 

1 1 1  Ann  hini  a  raie  ceun  a  gav  atao  ledan  hc  streat. 
■112  Ne-d-eo  ket  cur  skendilik  a  ra  ann  hanv, 

Nag  eur  har-avel  ar  goanv. 

II?  Al  lestr  na  zent  ket  ouz  ar  star 

Ouz  ar  garrek  a  zento  sur. 

114  Pa  ve  arrued  ar  gwall, 
Gwell  eo  horn  evit  dall. 

1 1 5  Gwelloc'h  co  beza  kiger  eget  beza  leue. 

1 16  Gwelloc'h  eo  lazaar  bleiz  cvit  beza  lazet  gant-han. 

1 1 7  A-wesiou  gwelloc'h  doujans  evit  karantez. 

118  —  Ranna  pe  ganna  ! 

—  Leuskel  ar  goad  da  iena. 

1 19  Red  eo  Iczel  nep  hen  euz  gai 
D'hen  em  gravât  ha  da  c'hrognal. 

120  Danvad  kaillaret,  peurvuia, 
Ouz  ar  re  ail  'glask  em  frota. 

121  Ann  neh  a  chomm  er  ger  diouc'h  ann  noz 

A  vez  divlamni  antronoz. 

122  Daou  louarn  kamm  a  zo  ireac'h  d'unan  eeun. 

123  Kdret  a  reer  ann  drubarderc:,  —  kasoni  a  zo  euz  ann  truhard. 

1 24  Em  milin  n'euz  ket  dour  awal'ch  evit  mala  hoc'h  arreval. 
1 2  j  Ne-d-eo  ket  pec'het,  nemet  mad, 

Mouga  ann  aer  gant  he  c'hofad. 

III. 

1 26  E-leac'h  'ma  ann  dour  ar  sioula 

E  vez  ann  domina. 

1 27  Bezo  ann  avel  e-leac'h  ma  karo, 
Pa  ra  glao  c  c'hleb  atao. 

128  Na  c'hodriit  ket  gand  al  lagad. 


Proverbes  et  Dictons  de  la  Basse-Bretagne.  405 

109  Le  boiteux  saute  aussi  loin  qu'un  autre, 

Plus  loin  s'il  peut. 

no  Ce  ne  sont  pas  les  grands  chevaux  qui  portent  l'avoine  au  marché. 
(C.-à-d.  :  Le  plus  grand  n'est  pas  toujours  le  plus  fort). 

1 1 1  Qui  marche  droit  trouve  toujours  son  chemin  large. 

1 12  L'Été  ne  se  fait  d'une  seule  hirondelle, 
Pas  plus  que  d'un  coup  de  vent  l'Hiver. 

1 1  ;;  Navire  qui  n'obéit  point  au  gouvernail 

Obéira  sûrement  à  l'écueil. 

1 14  Quand  malheur  est  arrivé, 

Mieux  vaut  être  borgne  qu'aveugle. 

1 1  ^  Mieux  vaut  être  le  boucher  que  le  veau. 

1 16  Mieux  vaut  tuer  le  loup  qu'être  tué  par  lui. 

1  17  Mieux  vaut  quelquefois  être  craint  qu'aimé. 

118  —  Partage  ou  bataille  ! 

—  Laisse  le  sang  se  refroidir.  (C.-à-d.  :  Attends  que  ta 
colère  soit  passée  pour  prendre  une  résolution  extrême.. 

119  II  faut  laisser  le  galeux 
Se  gratter  et  grogner. 

1 20  Brebis  crottée,  le  plus  souvent. 
Aux  autres  cherche  à  se  frotter. 

1 2 1  Qui  reste  à  la  maison  sur  le  soir 
Est  sans  blâme  le  lendemain. 

122  Deux  renards  boiteux  viennent  à  bout  d'un  renard  qui  est  droit. 

125  On  aime  la  trahison,  —  on  hait  le  traître. 

124  Dans  mon  moulin  il  n'est  assez  d'eau  pour  moudre  votre  provision. 

12  j  Ce  n'est  point  un  péché,  c'est  un  bien 

D'étouffer  le  serpent  avec  sa  portée. 

IlL 

126  Où  l'eau  montre  le  plus  de  placidité 

Elle  a  le  plus  de  profondeur. 

127  Souffle  le  vent  où  il  voudra. 

Quand  il  y  a  pluie  elle  mouille  toujours. 

125  Ne  jouez  pas  avec  l'œil. 


^©4  Lavarou  Koz  a  Vreiz  Izel. 

1 29  List  ar  re  ail  diliiia  ho  gwiad. 

1 50  N'c  ket  red  toi  mein  warlercli  kement  ki  a  c'han. 

151  '  Ahred  pe  zivezad  cz  a  ann  toi  da  fall. 

1 52  Hep-kcn  beteg  ar  wech  diveza  cz  a  ar  pod  d\ir  feunteun . 

I  j  j  Pà  vez  rc  dotnin  ar  iod 

E  skaot. 

1 34  Divezad  skei  war  vorzed 

Pa  vez  bramet. 

1  j  j  Liez  a  wech  vez  tizet  fall 

Nep  a  ^ustum  tizout  re  ail. 

1 36  War  stad  're  ail  nep  a  gomzo, 

Mar  kar  cm  zellet  c  tawo. 

1 57  N'ez  eut  pesk  hcb  he  zrcin. 

1 38  N'euz  den  na  ira  hep  he  si, 
Hag  allez  hen  euz  daou  pe  dri. 

139  Ma  mignon,  mar  am  euz  car  si, 

A  kredan  hoc  h  euz  daou  pe  dri. 

1 40  Scllit  euz  ho  poutou 
Hag  e  welot  toull  ho  lerou. 

141  Ann  hini  a  zant  ar  c'houez, 
Dioc^h  he  reor  e  koucz. 

142  Kenîd  rehech  a  ra  kakous  da  gakous, 

Eo  kakous. 

IV. 

14  j  Re  gravât  a  boaz, 

Re  brezek  a  noaz. 

144  Gwdssoc'h  eun  toi  teod  evit  eun  toi  kleze. 

145  Brudfall  a  ia  beteg  ar  mor; 
Brud  vad  a  chomm  e  toull  ann  nor. 


Gotlis  {cûiies  Cothi),  mais  des  Juifs  dispersés  après  la  ruine  de  Jérusalem.  De  plus,  on 
les  tenait  pour  lépreux  de  père  en  fils,  et  les  professions  les  plus  viles  leur  étaient  seules 
permises.  Aujourd'hui  les  Cacous  deviennent  rares,  mais,  en  souvenir  des  métiers  qu'ils 
exerçaient  de  préférence,  on  donne  toujours  le  nom  de  Cacous  aux  cordiers  et  aux 
tonneliers. 


Proverbes  et  Dictons  de  la  Basse-Bretagne .  405 

I  20  Laissez  les  autres  débrouiller  leur  écheveau. 

I  ?o  ]l  ne  faut  pas  jeter  de  pierre  à  tout  chien  qui  aboie. 
1 3 1  Tôt  ou  tard  le  coup  porte  à  faux. 

1 52  C'est  seulement  jusqu'à  la  dernière  fois  que  la  cruche  va  à  la  fon- 
taine. 

1 33  Quand  trop  chaude  est  la  bouillie, 

Elle  brûle. 

1 34  C'est  trop  tard  de  frapper  sur  sa  cuisse, 

Quand  le  pet  est  lâché. 

1 5  5  Souventefois  est  bien  pris 

Qui  a  pour  habitude  de  prendre  les  autres. 

1 36  Sur  la  condition  des  autres  qui  parlera, 

S'il  veut  se  regarder  se  taira. 

1 57  Pas  de  poisson  sans  arête. 

n8  II  n'est  homme  ni  chose  sans  défaut, 

Et  souvent  homme  et  chose  en  ont  deux  ou  trois. 

1 50  Mon  ami,  si  j'ai  un  défaut, 

Je  crois  que  vous  en  avez  deux  ou  trois. 

140  Regardez  vos  chaussures 

Et  vous  verrez  le  trou  de  vos  bas. 

1 4 1  Sentez-vous  puanteur  ? 

C'est  de  votre  c.  qu'elle  tombe. 

142  Le  premier  reproche  que  fait  cacous  à  cacous, 

C'est  qu'il  est  cacous  '. 

IV. 

145  Trop  gratter  cuit. 

Trop  parler  nuit. 

144  Plus  de  mal  fait  un  coup  de  langue  qu'un  coup  d'épée. 

14$  Mauvaise  réputation  va  jusqu'à  la  mer  ; 

Bonne  réputation  reste  au  seuil  de  la  porte. 

I .  Les  Cacous  de  la  Bretagne  sont  les  derniers  représentants  d'une  race  misérable, 
avec  laquelle  le  reste  de  la  population  ne  voulut  jamais  contracter  d'alliance.  Leur  nom, 
comme  celui  des  Cagots,  leurs  frères  des  provinces  pyrénéennes,  a  gardé  jusqu'à  ce  jour 
son  ancienne  valeur   de  réprobation   et  de  mépris.   On  les  disait   descendants,  non  des 


4o6  Ldvarou  Koz  a  Vreiz  Izel. 

146  Nep  10  leinni  beg  he  deod  a  renk  beza  kalet  kostez  he  benri. 

147  Araog  komz  grit  nao  zro 
Gand  ho  teod  en  ho  keno. 

148  Pcoc'h!  Peoc'h! 
Lost  ar  vioc'h 
''Zo  gan-e-oc^h. 

149  Gant  Doue  hanvet  miiia  eo 
Nep  na  lavar  mad  pe  na  duo. 

150  Va  mab,  gant  ar  ment  a  venti, 
Ha  netra  ken,  mentet  c  vi. 

I  s  I         Gand  ar  muzul  c  rofed  d'ar  re  ail,  c  vezo  roet  d'e-hoc'h. 

I  )2         Barnit  ar  re  ail  evel  ma  fell  d'e-hoch  beza  barnet. 

I  ^  i  Diouc'h  arfrouez  ema  ret  tanvaat 

Kent  evit  lavarei  ema  mad. 

I  54         Gortozidann  noz  evit  lavaret  eo  bet  kaer  ann  deiz. 

I  )  5  D'ann  ahardae  'lavarfet 

Hag  hen  a  zo  bet  kaer  ann  de, 
Evel  d'ar  maro  a  welfet 
Hag  hi  'zo  bet  mad  ar  vuhe. 

1 56  Eur  skoulm  great  gand  ann  teod  na  ve  ket  diluunmct  gand  ann  dent. 

I  )-/  Gwelloc'h  eo  eur  ger  tavet 

Eget  daou  lavaret. 

158  Kersc 

Na  dcu  ^met  goudc. 


1 59  Ar  iar  a  goll  lie  vi 

0  kana  re  goude  dozvi. 


à  l'état  d'inscription  sous  la  forme  suivante  d'après  M.  Miorcec  de  Kerdanet  :  Gant.  Doue:  j 

han  :  oet  :  muingna   :  eo   :  nep  :  ha  lavar  :  mat   :  pe  :  ha  :  teo  :  (Les  vies  des  Saints  j 

de  la  Bretagne  Armorique,  par  FR.  Albert  le  Grand,  avec  des  notes  par  D.    L.  Miorcec  | 

de   Kerdanet.    Brest,   1857,   in-4,  p.  J07).  —  J'ai  récemment  été  relever  l'inscription,  j 
et  je  l'ai  lue  comme  suit  . 

Gant  :  doue  :  han  :  vet  :  mungna  :  eo  :  ! 

Nep  :  na  laiiar  :  mat  :  pe  :  na  :  tco.  \ 
Cette  inscription  en  lettres  gotliiques  est  contenue  dans  une  banderolle  que  tient  i 
ange  en  granit  sculpté  en  bas-relief  à  la  porte  de  l'ossuaire. 


Proverbes  et  Dictons  de  la  Basse-Bretagne.  407 

146  Qui  a  pointu  le  bout  de  la  langue  doit  avoir  le  crâne  solide.  (A  cause 

des  coups  de  bâton  qu'il  s'expose  à  recevoir). 

147  Avant  de  parler  tournez  neuf  fois 
Votre  langue  dans  votre  bouche. 

148  Paix!  Paix! 

La  queue  de  la  vache 
Est  avec  vous'. 

149  Qui  doit  à  Dieu  le  plus  de  compte  est 
Celui  qui  ne  parle  bien  ou  qui  ne  se  tait  -. 

1 50  Mon  fils,  comme  tu  mesureras, 

Et  non  autrement,  mesuré  tu  seras. 

1 5 1  Avec  la  mesure  que  vous  donnez  aux  autres  il  vous  sera  donné. 

1 52  Jugez  les  autres  comme  vous  voulez  être  jugés. 
1 5  î  Au  fruit  il  faut  goûter 

Avant  de  dire  qu'il  est  bon. 
1 54  Attendez  la  nuit  pour  dire  que  le  jour  a  été  beau. 
I  s  ^  C'est  au  soir  que  vous  direz 

Si  le  jour  a  été  beau, 

Comme  à  la  mort  vous  verrez 

Si  bonne  a  été  la  vie. 
1 56  Nœud  fait  avec  la  langue  ne  se  défait  point  avec  les  dents. 
I  ^7  Mieux  vaut  une  parole  que  l'on  tait 

Que  deux  que  l'on  dit. 

158  Regret 

Ne  vient  qu'après. 

V. 

159  La  poule  perd  ses  œufs 

En  trop  chantant  après  avoir  pondu. 

1.  Ce  dicton  est  curieux  et  me  paraît  ancien.  Je  l'ai  souvent  entendu.  C'est  pour  couper 
court  à  une  querelle  qui  menace  de  devenir  sérieuse,  qu'on  l'emploie  d'ordinaire.  Aux 
premiers  éclats  de  voix  un  tiers  intervient,  et  s'adressant  au  querelleur  qui  s'échauffe  le 
plus,  il  dit  :  «  Paix!  Paix!  La  queue  de  la  vache,  c'est  vous  qui  la  tenez.  »  J'ai  vaine- 
ment demandé  quelle  signification  on  prêtait  à  ces  étranges  paroles.  On  me  répondait 
invariablement  :  nous  disons  ce  que  nous  avons  entendu  dire...  Les  anciens  iar  re  goz) 
parlaient  ainsi...  Toutefois,  dans  nombre  de  cas,  il  me  semble  qu'on  aurait  pu  les  tra- 
duire de  la  sorte  :  «  Calmez-vous,  calmez- vous!  on  sait  que  la  raison  est  de  votre  côté; 
on  sait  que  c'est  avec  vous  qu'est  la  sagesse.  « 

Serait-ce  quelque  souvenir  d'une  autre  patrie  ?  Il  serait  difficile  d'en  faire  la  preuve. 
Quoiqu'il  en  soit,  les  Brahmanes  ne  désavoueraient  pas  un  tel  langage. 

2.  Sur  le  charnier  de  Notre-Dame  de  Trémavoézan  (Finistère',  cet  adage  se  trouve 


4o8 

Lavaroii  Koz  a  Vrciz  Izel. 

i6o 

Pa  gloc'li  ar  iar  e  vez  vi  pe  laboiis 

i6i 

Dibaoî  siminal  a  voged 

Anez  ne  ve  tan  en  oaled. 

162 

Ar  c'homsiou  a  zo  merc'het 

Hag  ar  skrijou  a  zo  goazet. 

i6j 

Ldvaret  a  recr  allez 

Gaoïi  e-leac'li  gwlrlonez. 

164 

Kant  klevet 

Nd  dalvont  ket 

Eur  gwelet. 

VI. 

165  Neb  a  oar  relz  ar  wlrione 
A  hell  lu  laret  gwel  a-ze. 

1 66  Etre  c'hoarl  ha  jars 

E  vez  lavarel  arwlrlonez  da  gais. 

167  Ar  wlrlonez  a  zo  diez  da  glevet 
Drelst  pep  ira  d'ann  liinl  n'Iii  c'har  ket. 

168  Ar  wlrlonez  a  zo  kasaiiz 
Drelst  pep  tra  d^ann  lilnl  a  zo  kabluz. 

169  Ar  wlrlonez  a  zo  kasauz, 
Hag  ann  lilnl  hl  Iar  a  zo  arabaduz. 

170  Ann  den  klanv  lie  zaoulagad  n'hell  ket  sellet  ann  de, 

Nag  ar  re  a  zo  kabluz  klevet  ar  wlrione. 

1 7  1         Petra  a  zervlch  nacVi  oiiz  Doue  ar  pez  a  oar  ar  WercViez  ! 

172  Tra  kuz  da  drl  nep  a  lavar 
A-benn  neubeud  eun  ail  lien  goar. 

173  E-leac'li  ma  vez  tri 
E  vez  toull  ann  tl. 

VIL 

174  Dion,  telr  amzcr  lien  cuz  ann  den  ; 
N'int  ket  henvel  ann  cil  eiiz  eben. 

175  0  vont  d\n  fest  c'Iioul  a  gano, 
0  tout  en  dro  e'hoiil  a  welo. 


1 


Proverbes  et  Dictons  de  la  Basse-Bretagne.  409 

160  Quand  glousse  la  poule,  il  y  a  œuf  ou  poussin. 

161  Rarement  cheminée  fume 
S'il  n'y  a  feu  dans  l'âtre. 

162  Les  paroles  sont  des  femelles 
Et  les  écrits  des  mâles. 

165  On  dit  souvent 

Mensonge  à  la  place  de  vérité, 

1 64  Cent  entendus 
Ne  valent  pas 

Un  vu. 

VI. 

165  Qui  sait  la  règle  de  vérité 
Peut  la  dire  sans  broncher. 

1 66  En  jouant  et  plaisantant 
On  dit  à  plusieurs  la  vérité. 

167  La  vérité  est  difficile  à  entendre, 
Surtout  pour  celui  qui  ne  l'aime  pas. 

168  La  vérité  est  haïssable, 

Surtout  pour  qui  se  sent  coupable. 

169  La  vérité  est  haïssable 

Et  qui  la  dit  est  radoteur. 

170  L'homme  qui  a  les  yeux  malades  ne  peut  regarder  le  jour, 

Ni  le  coupable  entendre  la  vérité. 

171  Que  sert  de  niera  Dieu  ce  que  sait  la  Vierge!  (C.-à-d.  :  Pourquoi 

faire  un  mystère  de  ce  que  savent  plusieurs  personnes  ? , 

172  Secret  confié  à  trois  personnes 
Est  avant  peu  connu  de  quatre. 

17^  Où  il  y  a  trois  personnes 

La  maison  est  à  jour. 

VIL 

174  Deux  ou  trois  saisons  vit  l'homme, 
Aucune  ne  ressemble  à  l'autre. 

175  En  allant  à  la  fête  vous  chanterez, 
En  revenant  vous  pleurerez. 


410 

Lavarou  Koz  a  Vreiz  Izel. 

■76 

Goudc  cVioarzin  c  teu  gwela, 

Coude  cVioari  huanada. 

177 

Re  diouz  vintin  nep  a  c'hoarzas 

Barz  ann  noz  allez  a  welas. 

178 

Coude  ann  enkrez 

Ê  teu  levenez. 

179 

Cant  ann  amzer  hag  ann  avel 

Ez  apep  anken  war  ho  dlouaskel. 

1 8o  Biskoaz  glao  n'euz  gret  na  dawfe, 

Avel-greon  plnl  na  gouezfe. 

i8i  Itron  Varla-Dnicz  hag  ann  Aotrou  Sant  Per 

A  ro  d'ar  gwall  zaout  kerniel  l  en. 

1 82  Gwell  eo  dougen  ar  groaz  eget  he  ruza. 

185  Ne  cuz  droug  na  zervlch  da  vad. 

1 84  C'hoant  Doue  ha  c'hoant  dcn  a  zo  daou. 

185  Doue  had  ann  ed  en  douar, 
Ha  Donc  hcn  dashim  pa  gar. 

186  E-leacVima  oa  ann  erv  cr  bloaz-man,  e  vezo  ann  and  cr  hloaz  a  zen. 

187  Koz  ha  laouank,  ha  da  hep  oad, 
Ann  Ankou  heulo  d'ho  falc'had. 

1 88  Eun  den  kreny,  —  eun  den  krevet  ; 
Eur  baleer  braz,  —  eun  den  brevet; 
Eun  neuier-kaer,  —  eun  den  beuzet  ; 
Eun  tenner-mad,  —  eun  den  lazet. 

1 89  Cad  Doue  ema  ar  inadou  ; 
Sachit  war-n-hoa  grabanadou. 

1 90  Ar  goustlans  gant  lie  tlk-tok 
A  zo  kloc'hlk  Sant  Kollcdok. 

191  Ar  bodennou  ho  dcaz  daoulagad. 

192  Cwell  ve  gan-ln  mervel  mil  gwech 
Evit  koll  ma  enor  eur  wech  ; 
Rak  ma  enor,  pa  ve  kollet, 

Evit  he  glask  n'hen  c'havinn  ket. 

193  Red  eo  niuzula  aznaoudegez  gant  ann  troadad  mad-oberiou. 


Proverbes  et  Dictons  de  la  Basse-Bretagne.  41 1 

176  Après  le  rire  les  pleurs, 
Après  les  jeux  les  sanglots. 

177  Tel  que  trop  matin  l'on  vit  rire 
Dans  la  nuit  bien  souvent  pleura. 

178  Après  tristesse 

Liesse. 

179  Avec  le  temps  et  le  vent 
Tout  chagrin  s'envole.      • 

180  Jamais  on  ne  vit  pluie  qui  ne  cessât, 
Vent  impétueux  qui  ne  tombât. 

181  Notre-Dame  de  Pitié  et  le  seigneur  saint  Pierre 
Donnent  aux  vaches  méchantes  des  cornes  courtes. 

182  Mieux  vaut  porter  sa  croix  que  la  traîner. 

185  II  n'est  mal  qui  ne  serve  à  bien. 

184  Désir  de  Dieu  et  désir  de  l'homme  sont  deux. 

i8<i  Dieu  sèm.e  le  blé  sur  la  terre, 

Et  Dieu  le  moissonne  quand  il  veut. 

1 86  Où  était  le  sillon  cette  année  sera  la  fosse  l'année  prochaine. 

187  Vieux  et  jeunes,  et  gens  de  tout  âge, 
La  Mort  viendra  vous  faucher. 

188  Homme  fort,  —  homme  crevé  ; 
Grand  marcheur,  —  homme  brisé  ; 
Beau  nageur,  —  homme  noyé  ; 
Bon  tireur,  —  homme  tué. 

189  Dans  la  main  de  Dieu  sont  les  richesses  ; 

Arrachez-les  à  poignées. 

190  La  conscience  avec  son  tic-toc 

Est  la  clochette  de  Saint-Kollédoc  '. 

1 9 1  Les  buissons  ont  des  yeux. 

192  Mieux  vaut  pour  moi  mourir  mille  fois 
Que  perdre  mon  honneur  une  fois  ; 
Car  mon  honneur,  quand  il  sera  perdu, 
J'aurai  beau  le  chercher,  je  ne  le  trouverai  pas. 

19^   Il  faut  mesurer  la  reconnaissance  avec  la  mesure  des  bienfahs. 


I .   Dans  la  croyance   populaire,  St-Ké,   appelé  aussi  St-KoUédoc,  possédait   une  do- 
ihelte  qui  l'avertissait  du  bien  qu'il  devait  faire  ou  du  mal  qu'il  devait  éviter. 

28 


412  Lavaron  Ko:  a  Vreiz  Izel. 

194  'Neh  a  m  vade-lcc'h  droiik 

D'ar  haradoz  lien  cm  zow^. 

19$  Mad  eo  heva  pell  ; 

Beva  mad  a  zo  well. 

196  Ar  viicz  vad  a  bad  aiao, 
Ar  vuez  fall  a  baouezo. 

1 97  Ar  vulic  hirran  'zo  c'hoaz  berr, 

Hag  ar  bcc'li  skanvan,  c'hoaz  ponner. 

1 98  Pa  erra  eur  c'holl  en  ti, 
Ez  erra  daou  pe  dri. 

199  Lagad  ann  denpa  eo  sarret, 
Lagad  Doue  'zo  digoret. 

200  Ha  c'Iioui  a  garre  kaoïit  eur  maro  mad? 

Bevit  ervad. 

201  Eul  linscl  wenn  ha  pcmp  plankenn, 
Eun  torchenn  blouz  dindan  ho  penn, 
Pemp  troated  douar  war  c'horre, 
Setu  madou  ar  bed  cr  be. 

202  Avel,  holl  avel! 
Ez  eo  rcd  merni. 

Dastuinet  ha  Iroel  e  gallek  gant  L.  F.  Salvet 


! 


Proverbes  et  Dictons  de  la  Basse-Bretagne.  41 5 

194  qui  rend  le  bien  pour  le  mal 
Au  paradis  se  porte. 

195  Vivre  longtemps  c'est  bien  ; 
Vivre  bien  c'est  mieux. 

1 96  La  bonne  vie  dure  toujours, 

La  mauvaise  vie  aura  un  terme. 

197  La  vie  la  plus  longue  est  courte  encore, 
Le  fardeau  le  plus  léger  encore  pesant. 

1 98  Quand  arrive  une  perte  (c.-à-d.  une  mort'  à  la  maison, 
Il  en  arrive  deux  ou  trois. 

199  Quand  l'œil  de  l'homme  est  clos, 
L'œil  de  Dieu  est  ouvert. 

200  Voulez-vous  avoir  une  bonne  mort  ? 

Vivez  bien. 

201  Un  linceul  blanc  et  cinq  planches. 

Un  bouchon  de  paille  sous  voire  tête, 

Cinq  pieds  de  terre  par  dessus, 

Voilà  les  biens  du  monde  dans  la  tombe. 

202  Vent,  tout  n'est  que  vent  ! 

Il  faut  mourir. 

Recueilli  et  traduit  par  L.   F.   Sauvé. 


TRADITIONS  ET  SUPERSTITIONS 


DE  LA  BASSE-BRETAGNE!. 


Les  Géants. 

Les  géants  ont  laissé  en  Bretagne  moins  de  souvenirs  que  les  Nains. 
Ils  figurent;,  il  est  vrai,  d'une  manière  épisodique,  dans  les  contes  qui 
font  le  charme  des  veillées  bretonnes,  mais  les  traditions  dans  lesquelles 
ils  jouent  un  rôle  de  quelque  importance  sont  fort  rares.  En  voici 
une  : 

A  dix  kilomètres  environ  du  bourg  du  Huelgoat,  si  connu  par  ses 
mines  de  plomb  argentifère  et  par  les  sites  pittoresques  qui  l'entourent, 
se  trouve,  à  gauche  de  la  route  de  Pleyben,  la  chapelle  de  Saint-Herbot, 
bâtie  au  fond  d'un  vallon  arrosé  par  la  rivière  Elez.  Cette  chapelle, 
assez  remarquable  par  la  richesse  de  son  ornementation,  date  du  xvr'  s. 
Elle  renferme  le  tombeau  de  saint  Herbot,  sur  lequel  est  couchée  la 
statue  du  saint  vêtu  en  ermite.  En  face  de  la  chapelle,  de  l'autre  côté 
de  la  route,  s'élève,  sur  un  coteau  boisé,  le  manoir  du  Rusquec.  C'est 
au  milieu  de  ces  bois,  à  travers  d'énormes  rochers,  que  coule  la  cascade 
de  Saint-Herbot. 

A  l'époque  où  les  premiers  missionnaires  chrétiens  arrivèrent  en 
Bretagne,  un  saint  personnage,  nommé  Herbot,  vint  établir  son  ermi- 
tage dans  le  lieu  oii  est  maintenant  la  chapelle  qui  porte  son  nom.  Or, 
il  advint  que  les  habitants  de  ce  pays  étant  tous  païens,  le  saint  homme 
fut  exposé  à  de  cruelles  persécutions.  Mais  rien  ne  pouvait  ébranler  sa 
constance  ni  diminuer  son  zèle  pour  la  conversion  des  idolâtres.  Au 
nombre  de  ses  plus  cruels  ennemis  était  le  seigneur  du  Rusquec,  un  des 
hommes  les  plus  savants  du  pays,  qui  voyait  avec  dépit  les  progrès  du 
missionnaire  chrétien.  Le  seigneur  du  Rusquec  avait  parmi  ses  amis  un 
géant  énorme  qui  lui  était  entièrement  dévoué,  parce  qu'il  l'avait  soigné 
dans  une  grave  maladie  et  qu'il  avait  réussi  à  lui  rendre  la  santé.    Un 

1.  Voir  plus  haut,  p.  226  et  suiv. 


Traditions  et  Superstitions  de  la  Basse-Bretagne.  41 5 

jour,  le  savant  païen  fut  trouver  le  géant  et  lui  dit  :  «  Je  suis  fatigué 
d'entendre  si  près  de  moi  la  voix  de  ce  chrétien  maudit.  Je  veux  qu'en 
reconnaissance  du  service  que  je  t'ai  rendu  tu  trouves  le  moyen  d'empê- 
cher le  bruit  de  ses  prédications  et  de  ses  cantiques  d'arriver  à  mes 
oreilles.  »  Le  géant  se  mit  aussitôt  à  chercher  un  moyen  de  se  rendre 
agréable  à  son  ami.  Il  est  bon  de  dire  que  ce  pays  n'était  pas  alors  ce 
qu'il  est  aujourd'hui.  A  la  place  où  l'on  voit  les  beaux  bois  du  Rusquec, 
il  n'y  avait  qu'une  montagne  aride,  toute  couverte  de  grands  rochers 
qui  rendaient  la  culture  de  la  terre  impossible.  Les  géants  ne  brillent 
pas  ordinairement  par  l'esprit,  mais  il  parait  que  celui-ci  en  avait  plus 
que  les  autres,  car  voici  ce  qu'il  imagina  :  «  Je  vais,  se  dit-il,  enlever 
toutes  ces  grosses  pierres  qui  rendent  stérile  la  terre  de  mon  bienfaiteur, 
et  je  les  jetterai  ensuite  dans  la  rivière  qui  coule  près  de  la  maison  de 
ce  chrétien.  Les  eaux  seront  ainsi  forcées  de  s'élever  au  dessus  du 
barrage  que  formeront  les  rochers,  et  le  bruit  qu'elles  feront  en  retom- 
bant sera  assez  fort  pour  couvrir  la  voix  de  l'ennemi  du  seigneur  du 
Rusquec,  à  qui  je  rendrai  de  cette  manière  un  double  service.  »  Aussitôt 
dit,  aussitôt  fait.  En  quelques  tours  demain  les  rochers  furent  précipités 
dans  la  rivière,  et  les  eaux,  brusquement  arrêtées  par  cette  digue,  y 
formèrent  une  cascade  dont  le  bruit  devait  dominer  la  voix  de  l'homme 
de  Dieu.  Mais,  par  un  de  ces  miracles  si  fréquents  à  cette  époque,  il 
arriva  que  le  bruit  de  la  chute  d'eau,  quoique  perceptible  dans  toutes  les 
autres  directions,  ne  se  fit  pas  entendre  du  côté  de  l'ermitage. 

Les  conversions  augmentèrent  de  jour  en  jour.  Dans  cette  lutte  du 
paganisme  contre  la  foi  chrétienne,  le  géant  et  le  seigneur  du  Rusquec 
furent  vaincus.  Us  périrent  tous  les  deux  de  mort  violente,  et  la  croix 
fut  définitivement  plantée  dans  ce  pays  qui  n'avait  naguère  pour  habi- 
tants que  des  idolâtres. 

A  un  kilomètre  de  la  chapelle  de  Saint-Herbot,  sur  le  flanc  d'une 
montagne  aride  traversée  par  la  route,  se  trouvent  les  ruines  d'une 
grande  allée  couverte  connue  dans  le  pays  sous  le  nom  de  «  Tombeau 
du  Géant  «  (Be-Keor,  altération   de  Bez-Caor  o\x  Caar^^.    La  tradition 


I.  Ce  mot,  que  l'on  retrouve  dans  la  plupart  des  dialectes  celtiques,  n'existe  plus  dans 
le  breton  armoricain  usuel.  Mais  on  le  rencontre  quelquefois  en  composition.  Il  est  pos- 
sible que  l'île  de  Gavr-Inis,  dans  le  Morbihan,  qui  renferme  une  belle  allée  couverte  bien 
connue  des  archéologues,  doive  son  nom  à  une  leg;nde  analogue  à  celle  qui  se  rattache 
au  monument  de  Saint-Herbot.  Je  n'ignore  pas  que  l'on  traduit  ordinairement  Cavrinis 
par  presqu'île,  mais  je  ferai  observer  qu'en  breton  les  mets  7/,  maison;  Inis  ou  Enes, 
île;  Lec'h,  lieu,  se  placent  quelquefois  après  leur  complément.  Ainsi  on  dit  Mol- Enes, 
pour  Enez-Mol;  Dtint-Enes,  pour  Enes-Dant  Cartul.  de  Landevennec,  f"  i  S4  R);  Manach- 
Ti,  pour  Ti-an-Manach:  Marc'halec'h,  pour  Lec'h-an-Marc'had ;  etc.  Gavr-Inis  pourrait 
donc  signifier  «  Ile  du  Géant  »,  de  même  que  Manac'h-Ti  signifie  «  Maison  du  Moine.  » 


41 6  Traditions  et  Superstitions  de  la  Basse-Bretagne. 

rapporte  que  là  était  enterré  un  géant  dont  le  corps,  lorsqu'on  le  mit 
dans  le  tombeau,  avait  été  replié  neuf  fois  sur  lui-même,  et  que  chacun 
des  plis  avait  neuf  pieds  de  longueur.  La  seule  particularité  que  l'on 
raconte  de  lui,  est  qu'ayant  un  jour,  en  se  promenant,  passé  par  dessus 
l'église  de  Saint-Herbot,  l'extrémité  de  la  tour  toucha  le  haut  de  ses 
jambes  :  «  Tiens,. dit-il,  la  fougère  est  bien  haute  dans  ce  pays.  »  Il  est 
probable  que  ce  géant  est  le  même  que  celui  de  la  légende  de  saint 
Herbot. 

Les  traditions  de  l'ancien  évêché  de  Tréguier  font  souvent  mention 
d'un  géant  breton,  qu'elles  nomment  Rannou  le  Fort.  Guillaume  Lejean, 
le  savant  voyageur  que  la  France  vient  de  perdre,  a  rapporté  deux  de 
ces  légendes  dans  le  Bulletin  de  l'Association  bretonne  '.  «  Un  jour,  dit-il, 
que  Rannou  le  Fort  était  à  son  manoir  de  Trelever,  à  une  demi-lieue  du 
bourg  de  Guimaëc  (commune  du  canton  de  Lanmeur,  Finistère),  il 
apprit  que  certaines  vieilles  femmes,  attroupées  dans  une  maison  du  dit 
bourg,  débitaient  mille  horreurs  sur  son  compte.  Furieux,  il  arracha  un 
peulven  et  le  lança  à  tour  de  bras  dans  la  direction  de  la  maison  indi- 
quée. Mais  la  pierre  passa  à  quelques  pouces  au  dessus  du  toit  et  vint 
tomber  là  où  nous  la  voyons  aujourd'hui  fichée  dans  le  mur  du  cime- 
tière. )) 

Une  autre  fois,  Rannou,  étant  à  Plouigneau,  avait  parié  de  porter  à 
bout  de  bras  jusqu'à  Morlaix  une  énorme  pierre.  Mais,  épuisé  de 
fatigue  à  une  demi-lieue  en  deçà  du  but,  il  la  posa  en  équilibre  sur  une 
butte  rocheuse  où  on  la  voit  encore,  au  lieu  dit  la  Croix-Rouf!,e-. 

D'après  une  tradition  recueillie  par  M.  René  Keranbrun  dans  le 
pays  de  Tréguier,  voici  de  quelle  manière  Rannou  aurait  été  doué  de 
sa  force  prodigieuse  : 

«  Sa  mère  se  promenait  un  jour  au  bord  de  la  grève,  en  ramassant 
des  coquillages.  Tout  à  coup,  elle  découvre  une  sirène  que  la  mer  en  se 
retirant  avait  laissée  à  sec.  La  pauvre  femme  eut  d'abord  bien  peur,  elle 
prit  la  fuite.  Mais  ayant  regardé  de  loin,  et  voyant  toujours  cette  étrange 
créature  immobile,  à  la  même  place,  elle  revint  sur  ses  pas  et  se  mit  à  la 
considérer  d'assez  près.  Alors  la  sirène  lui  dit  :  «  Par  pitié,  venez  à  mon 
secours  et  ne  me  laissez  pas  mourir  ici.  N'ayez  pas  de  crainte;  je  n'ai 
jamais  fait  de  mal  à  personne.  Bien  au  contraire,  par  mon  chant,  j'avertis 
les  matelots  de  la  présence  des  écueils.  «  —  La  pauvre  femme  avait 
l'âme  bonne.  Elle  vint  au  secours  de  la  sirène  et  l'aida  à  regagner  les 


Tome  111,  p.  M. 
Ibid.,  p.  63. 


Traditions  et  Superstitions  de  la  Basse-Bretagne.  417 

tlots.  Alors  celle-ci  lui  dit  encore  :  <(  Que  veux-tu  que  je  fasse  mainte- 
nant pour  toi  ?  Je  suis  puissante,  demande-moi  quelque  chose  de  possible 
et  tu  seras  satisfaite.  »  —  «  Eh  bien!  j'ai  un  fils  à  la  mamelle,  fais  qu'il 
soit  le  plus  fort  et  le  plus  vaillant  des  hommes.  » 

La  sirène  plongea  dans  la  mer  et  reparut  quelques  minutes  après, 
portant  à  la  main  une  conque  pleine  d'une  liqueur  semblable  à  du  lait. 
—  <(  Tu  donneras  ceci  à  boire  à  ton  fils,  »  dit-elle,  v  mais  prends  bien 
garde  d'en  répandre  une  seule  goutte.  » 

Néanmoins,  la  femme,  de  retour  chez  elle,  n'osa  pas  faire  prendre  le 
breuvage  à  son  fils  avant  d'en  avoir  fait  l'essai.  Elle  en  donna  donc  à 
son  chat,  et  ne  remarquant  sur  cet  animal  aucun  effet  qui  pût  l'inquiéter, 
elle  donna  le  reste  à  son  fi!s. 

Le  petit  Rannou  et  le  chat  ressentirent  bientôt  la  puissance  du  philtre 
magique.  Le  chat  devint  si  grand  et  si  fort  qu'il  fallut  l'attacher  à  un 
rocher  avec  une  chaîne  de  fer.  Quant  à  Rannou,  à  l'âge  de  neuf  ans, 
il  cassait  avec  ses  mains  sept  fers  à  cheval  réunis,  et  il  jouait  aux  osselets 
avec  de  gros  blocs  de  quartz  qui  forment  un  monticule  près  de  la  rivière 
le  Doiiron,  à  l'angle  nord-est  du  département  du  Finistère.  A  onze  ans, 
il  avait  déjà  dix  pieds  de  haut;  c'était  un  prodige.  Mais  dès  cette  époque 
il  y  eut  chez  lui  un  affaissement  subit.  Sa  grande  force  disparut,  et  une 
précoce  caducité  brisa  ses  membres,  à  cet  âge  oij  les  autres  hommes 
commencent  à  peine  à  se  développer.  Le  peu  de  confiance  de  la  mère 
avait  tout  perdu.  Il  fallait  à  Rannou  la  potion  entière  pour  être  un  héros, 
et  il  est  resté  dans  la  tradition  comme  le  symbole  d'une  force  extraor- 
dinaire, mais  incomplète  '. 

On  peut  encore  mettre  au  nombre  des  géants  le  seigneur  de  Castel- 
RufTel.  La  forteresse  de  Castel-Ruffel  est  un  oppidum  celtique  ou  gaulois 
qui  couronne  un  des  mamelons  les  plus  élevés  de  la  chaîne  des  Montagnes 
Noires,  en  la  commune  de  Saint-Goazec  (Finistère).  Il  se  compose 
d'une  vaste  enceinte  circulaire  à  laquelle  se  rattache  un  fer  à  cheval  du 
côté  de  l'est.  Les  remparts  sont  formés  de  gros  blocs  de  quarzite 
empilés  les  uns  sur  les  autres  à  la  manière  des  constructions  cyclo- 


I .  Cette  légende  se  retrouve  avec  quelques  modifications  dans  les  contes  slaves  et 
aussi  dans  les  contes  bretons  dont  M.  Luzel  a  recueilli  une  admirable  collection  qui 
trouvera,  je  l'espère,  prochainement  un  éditeur.  Dans  ces  contes,  la  sirène  de  notre 
légende  est  remplacée  par  le  roi  des  poissons,  qui  accorde  à  celui  qui  le  remet  dans 
l'eau  tous  les  services  qu'il  lui  demande.  Les  marins  bretons  croient  fermement  à  l'exis- 
tence des  sirènes.  Il  y  a  dans  le  voisinage  de  la  baie  de  Douarnenez  (Finistère)  une 
tradition  d'après  laquelle  Dahut,  la  fille  impudique  du  roi  Grallon,  aurait  été  changée  en 
sirène  après  la  submersion  de  la  ville  d'is  dont  on  trouvera  plus  loin  la  légende,  et  que 
c'est  elle  qui  soulève  les  tempêtes  dans  la  baie  que  les  riverains  appellent  Ze  lac  (Al  Lenn). 
On  entend  alors  sa  voix  qui  domine  le  bruit  du  vent  et  des  flots. 


41 8  Traditions  et  Superstitions  de  la  Basse-Bretai^ne. 

péennes.  A  quelques  mètres  de  l'enceinte  est  une  longue  allée  couverte. 
Le  seigneur  de  Castel-Ruffel  avait  une  fille  qui  s'enfuit  un  jour  avec  un 
compagnon  de  la  demeure  paternelle.  Lorsque  le  seigneur  apprit  la  fuite 
de  sa  fille,  il  entra  dans  une  violente  colère  et,  apercevant  les  fugitifs  au 
moment  où  ils  traversaient  la  lande  de  Saint-Jean,  à  trois  lieues  de  son 
château,  il  an-acha  des  remparts  une  grande  pierre  qu'il  lança  dans  leur 
direction.  La  pierre  ne  les  atteignit  pas,  mais  elle  avait  été  lancée  avec 
tant  de  force  qu'elle  s'enfonça  profondément  dans  le  sol  à  l'extrémité  de 
la  lande  où  on  la  voit  encore  aujourd'hui.  On  l'y  voit  en  effet.  C'est  un 
beau  menhir,  qui  fait  partie  d'un  alignement  dont  plusieurs  pierres  ont 
été  détruites  ou  renversées. 

Les  traditions  du  genre  de  celles  qui  précèdent  sont  répandues  un 
peu  partout.  Dans  la  Cornouaille  anglaise  et  dans  le  pays  de  Galles, 
rien  n'est  plus  commun  que  les  Palets  du  Géant.  En  France  on  les  appelle 
Palets  de  Gargantua. 

Gargantua,  que  les  Bretons  nomment  toujours  Gargantuas,  et  dont  ils 
appliquent  le  nom  comme  synonyme  d'une  autre  épithète  bretonne, 
Goulifias,  aux  gens  qui  mangent  beaucoup,  a  laissé  quelques  souvenirs 
en  Bretagne,  surtout  dans  le  pays  de  Tréguier,  où  le  dicton  suivant  est 
très-populaire  : 

Gargantuas  pa  oa  bco,  Gargantua  quand  il  était  vivant, 

A  iee  'n  ur  gammcd  da  Bontav.  Allait  d'une  enjambée  à  Pontrieux. 

Un  jour  qu'il  passait  par  dessus  la  haute  flèche  de  l'église  Saint- 
Tugdual,  à  Tréguier,  il  s'écria  :  «  Comme  les  chalumeaux  sont  longs 
par  ici  dans  les  champs!  >•>  C'est  la  même  légende  que  celle  qui  se 
rapporte  au  géant  de  Saint-Herbot. 

Une  autre  fois,  il  raccommodait  ses  souliers,  assis  sur  la  tour  plate 
du  Bali,  à  Lannion.  Son  ligneul  traînait  sur  la  rue,  et  quand  il  l'attira  à 
lui,  il  souleva  à  là  hauteur  de  la  tour  une  charrette  attelée  de  quatre 
chevaux  et  chargée  de  sable  de  mer^  qui  passait  dessus. 

On  voit  à  Pontaven  (arr.  de  Quimperlé,  Finistère),  sur  la  rive  gauche 
de  la  rivière,  en  face  du  quai,  un  rocher  qui  a  la  forme  d'un  énorme 
soulier.  On  l'appelle  le  soulier  de  Gargantua.  Avant  la  construction  du 
quai,  il  y.  avait  sur  la  rive  droite,  vis  à  vis  de  ce  soulier,  un  rocher 
creusé  par  les  eaux  pluviales,  en  forme  d'auge,  et  que  l'on  appelait  le 
bain  de  pieds  de  Gargantua. 

D'après  une  tradition  que  j'ai  recueillie  à  Laz,  dans  les  Montagnes 
Noires,  la  demeure  de  Gargantua  était  à  la  Pointe  du  Raz.  Certes,  la 
Pointe  du  Raz  est,  par  son  aspect  grandiose,   une  demeure  digne  d'un 


Traditions  et  Superstitions  de  la  Basse-Bretagne.  419 

géant!  Une  particularité  qu'il  importe  de  noter,  c'est  que,  comme 
Castel-Ruffel,  la  Pointe  du  Raz,  ce  lieu  sauvage  et  désolé  où  l'on  ne 
peut  se  tenir  debout  pendant  les  tempêtes,  était  un  eppidum,  ou  place 
forte,  à  une  époque  où  nos  côtes  avaient  pour  habitants  une  race 
d'hommes  plus  forte  que  celle  qui  les  occupe  "aujourd'hui.  Cette  pointe 
est  en  effet  séparée  du  continent  par  un  mur  cyclopéen,  et  l'on  peut  voir 
encore  les  substructions  des  deux  barbacanes  qui  en  défendaient 
l'entrée^  et  celles  d'assez  nombreuses  habitations  adossées  au  mur  de 
clôture.  Il  est  assez  remarquable  de  rencontrer  dans  le  Finistère  deux 
oppida  qui,  d'après  la  tradition,  auraient  servi  de  demeure  à  des  Géants. 
La  dimension  des  matériaux  employés  à  la  construction  des  remparts 
de  ces  forteresses  est,  je  crois,  la  meilleure  explication  de  cette  croyance 
populaire. 

Les  Lutins. 

Ce  sont  des  esprits  méchants  qui  tourmentent  les  hommes  au  point 
de  les  faire  mourir.  Ils  prennent  toutes  sortes  de  formes  ;  celles  d'un 
taureau,  d'un  bélier,  qui  tuent  les  passants  à  coups  de  cornes,  ou  d'un 
lièvre  qui  se  glisse  entre  les  jambes  de  ceux  qui  traversent  un  pont,  et 
les  fait  tomber  dans  l'eau.  Mais  leur  forme  favorite  est  celle  d'un  chien 
barbet  qui  jette  du  feu  par  la  gueule.  Chaque  chemin  creux,  en  Basse- 
Bretagne,  chaque  pont,  chaque  précipice  a  son  lutin  particulier.  Ils  se 
tiennent  aussi  fréquemment  dans  les  carrefours,  où  on  les  voit  sous  la 
forme  d'un  homme  coiffé  d'un  chapeau  à  haute  forme  et  à  bords  très- 
larges,  ou  sous  celle  de  belles  jeunes  filles  qui  appellent  d'une  voix 
douce  les  passants.  S'ils  ont  l'imprudence  de  se  laisser  charmer  par  ces 
sirènes  de  la  nuit,  un  coup  de  tonnerre  se  fait  entendre  aussitôt  qu'ils 
sont  près  d'elles,  et  ils  tombent  foudroyés.  C'est  pour  cela  que  l'on 
trouve  si  souvent  des  cadavres  dans  les  carrefours  '.  Les  lutins,  comme 
la  plupart  des  autres  esprits  malins,  peuvent  attaquer  avec  succès  une 
ou  deux  personnes,  mais  ils  n'ont  aucune  puissance  sur  trois  baptêmes, 
c'est-à-dire  sur  trois  personnes  réunies.  Leur  pouvoir  de  faire  le  mal  est 
intermittent.  En  effet,  outre  qu'ils  ne  peuvent  l'exercer  qu'à  certains 
jours,  il  ne  leur  est  accordé  pour  tourmenter  les  hommes  que  les  heures 
impaires  de  la  nuit,  depuis  le  coucher  du  soleil  jusqu'à  son  lever. 

Il  y  a  une  classe  de  lutins  que  l'on  désigne  sous  le  nom  de  Hoppers 
Cappeleurs).  Un  des  plus  connus  et  des  plus  redoutés  dans  les  environs 

I.  Les  carrefours  Croas-Hent,  chemin  de  croix,  au  sing.)  sont  très- redoutés  des 
paysans  bretons,  qui  n'y  passent  jamais  le  soir  qu'en  faisant  le  signe  de  la  croix.  Ils  sont 
persuadés  que  les  chats  s'y  réunissent  chaque  année,  dans  la  nuit  du  Mardi-Gras. 


420  Traditions  et  Superstitions  de  la  Basse-Pretagne. 

de  Quimper,  est  lan-an-Od  (Jean  du  rivage).  Il  se  tient  toujours  sur  le 
bord  des  rivières,  faisant  entendre  continuellement  le  cri  Ion,  hou,  hou  ! 
cri  guttural  familier  aux  paysans  bretons  lorsqu'ils  rentrent  le  soir  à  la 
ferme  après  leurs  travaux,  et  qui  se  répète  de  village  en  village.  Si 
quelque  passant  répond  à  ce  cri,  lan-an-Od,  franchit  en  un  clin-d'œil  la 
moitié  de  la  distance  qui  le  sépare  de  l'imprudent,  et  répète  le  même 
cri.  Si  le  passant  y  répond  encore,  le  lutin  franchit  la  moitié  de  l'espace 
qui  lui  reste  à  parcourir.  Enfin,  s'il  y  répond  une  troisième  fois,  lan-an-Od 
se  trouve  subitement  tout  près  de  sa  victime,  qu'il  étrangle  ou  qu'il  noie. 
s'il  est  dans  le  voisinage  d'une  rivière. 

Les  Viltansed  (êtres  immondes),  connus  surtout  dans  l'ancien  évêché  de 
Léon  (nord  du  département  du  Finistère),  sont  des  lutins  qui  se  plaisent 
dans  la  fange,  où  ils  se  livrent  à  leurs  ébats.  On  dit  qu'une  personne  a 
été  frappée  d'un  sort  {scoet)  par  ces  êtres  immondes,  lorsqu'elle  éprouve 
comme  des  contorsions  dans  les  membres. 

Un  singulier  lutin  est  celui  que  les  habitants  de  Morlaix  appellent 
Pair  ar  voutou  coad  (le  gars  aux  sabots).  Il  parcourt  les  rues  de  la  ville 
quand  sonnent  dix  heures  du  soir,  et  s'y  promène  d'un  pas  grave  et  lent. 
Si  on  le  regarde,  on  le  voit  grandir,  grandir  démesurément,  et  l'on  se 
sent  devenir  de  plus  en  plus  petit  à  mesure  que  le  lutin  devient  de  plus 
en  plus  grand.  On  met  fin  à  ce  prodige  en  cessant  de  regarder  le  lutin. 

Les  Loups-Garoux. 

On  les  nomme  en  breton  Den-Vleiz  (homme-loup),  au  sirigulier,  et 
Tud-Vleiz,  au  pluriel.  Ces  êtres  ont  une  double  existence.  Le  jour  ils 
ne  diffèrent  en  rien  des  autres  hommes  dont  ils  partagent  les  occupations. 
La  nuit,  ils  revêtent  une  peau  de  loup,  et  prennent  aussitôt  le  naturel  de 
cette  bête  fauve.  Ils  courent  les  bois  et  les  champs,  attaquant  les  hommes, 
et  faisant  la  chasse  aux  animaux  qu'ils  dévorent  avec  avidité.  Au  point 
du  jour  ils  cachent  leur  peau  de  loup  avec  le  plus  grand  soin,  et  rentrent 
secrètement  à  la  ferme  où  ils  reprennent  leurs  travaux  habituels.  Il  existe 
entre  leur  peau  de  loup  et  leur  corps  une  sorte  de  solidarité  d'impressions 
physiques  si  grande,  qu'ils  éprouvent  toutes  celles  auxquelles  elle  est 
exposée.  C'est  ainsi  que  si  elle  est  placée  dans  un  lieu  froid,  ils  éprou- 
veront tout  le  jour  un  vif  sentiment  de  froid.  On  raconte  qu'un  loup- 
garou  avait  caché  sa  peau  de  loup  dans  un  four.  Pendant  le  repas,  la 
fermière  y  fit  allumer  du  feu.  Aussitôt  le  loup-garou  se  mit  à  crier  :  c  Je 
brûle!  Je  brûle!  »  et  à  se  démener  comme  s'il  avait  été  dans  une  four- 
naise. Ces  hommes-loups  passent  pour  être  doués  d'une  grande  force 
physique,  et  font  d'excellents  travailleurs. 


Traditions  et  Superstitions  de  la  Basse-Bretagne.  421 

Les  Lavandières  de  t^un  {Coiierezou,ou  Cowezerezou-Noz'). 

Ce  sont  des  lavandières  qui,  pendant  leur  vie,  ont,  par  négligence  ou 
par  avarice,  gâté  le  linge  ou  les  vêtements  de  pauvres  gens  qui  avaient 
à  peine  de  quoi  se  vêtir,  en  frottant  ces  vêtements  avec  des  pierres  pour 
économiser  leur  savon.  En  punition  de  cette  faute,  Dieu  les  renvoie 
après  leur  mort  sur  la  terre,  où  il  leur  impose  pour  pénitence  *  de  laver 
constamment  du  linge,  pendant  les  heures  impaires  de  la  nuit,  dans  les 
rivières  et  dans  les  lavoirs  où  elles  travaillaient  habituellement  pendant 
leur  vie,  et  d'y  transporter  dans  leur  tablier  des  pierres  prises  dans  le 
lieu  où  elles  les  prenaient  autrefois.  Pour  se  venger  de  ce  travail  forcé, 
elles  appellent  le  soir  les  passants,  ou  vont  elles-mêmes  à  leur  rencontre 
et  leur  présentent  l'extrémité  d'un  drap  mouillé,  dont  elles  tiennent 
l'autre  bout,  en  leur  ordonnant  de  les  aider  à  étreindre  ce  linge.  S'ils 
sont  assez  peu  avisés  pour  étreindre  réellement  le  linge  en  le  tordant, 
les  lavandières  finissent  par  leur  rompre  les  bras  ^  Pour  échapper  à  ce 
supplice,  il  suffit  de  tourner  le  linge  dans  le  même  sens  que  la  lavandière. 
Celle-ci  finit,  après  quelque  temps,  par  se  lasser,  en  voyant  que  son 
travail  n'avance  pas,  et  laisse  aller  sa  victime.  Cette  légende  est  très- 
répandue  en  Bretagne,  où  la  crainte  des  lavandières  de  nuit  est  des  plus 
vives.  Aussi  évite-t-on  avec  soin  le  soir  le  voisinage  des  lieux  où  on 
lave  habituellement  le  linge.  C'est  bien  assez  d'entendre  de  loin  le  bruit 
effrayant  de  leurs  battoirs. 


1.  Je  trouve  ce  mot  écrit  au  pluriel  Cauuerezou,  dans  un  titre  de  1460.  On  prononce 
maintenant  en  Cornouaille  Couerezou. 

2.  Cette  croyance  à  une  réparation,  s'accomplissant  sur  la  terre  après  la  mort,  des 
fautes  commises  pendant  la  vie,  est  pour  les  Bretons  une  sorte  d'article  de  foi.  J'ai 
mentionné  plus  haut,  en  parlant  des  Nains,  la  pénitence  de  cette  femme  condamnée  à 
revenir  sur  la  terre  pour  filer  autant  de  lin  qu'elle  en  avait  volé  pendant  sa  vie.  On  croit 
communément  en  Bretagne  que  toute  personne  doit  manger  après  sa  mort  autant  de 
boisseaux  de  cendre  qu'elle  a  volontairement  perdu  eu  gaspillé  de  boisseaux  de  pain  en  ce 
monde.  Les  filles  de  fcme  qui,  par  impatience  ou  négligence,  laissent,  en  faisant  des 
crêpes,  couler  leur  pâte  dans  le  feu,  reviennent  la  nuit  pleurer  et  gémir  sur  leur  ancien 
foyer,  où  elles  font  de  vains  efforts  pour  allumer  du  feu.  On  voit,  la  nuit,  les  meuniers, 
qui,  faute  d'avoir  bien  ajusté  leurs  meules  ou  par  toute  autre  négligence,  ont  perdu  du 
grain  qui  leur  était  confié,  parcourir  la  nuit  les  sentiers  qu'ils  fréquentaient  pendant  leur 
vie,  portant  sur  le  dos  des  sacs  remplis  de  pierres.  En  un  mot,  tout  tort  matériel,  sur- 
tout celui  que  l'on  fait  aux  orphelins,  doit  être  réparé  après  la  mort. 

Une  croyance,  qui  appartient  à  un  autre  ordre  d'idées,  est  celle-ci  :  Les  femmes  mariées 
qui  contrarient  volontairement  l'augmentation  de  leur  famille  reviennent  sur  la  terre  sous 
la  forme  d'une  truie  accompagnée  d'un  nombre  de  petits  égal  à  celui  des  enfants  qu'elles 
auraient  eus  en  obéissant  à  la  loi  naturelle.  Pour  se  débarrasser  de  ces  divers  revenants, 
il  est  nécessaire  de  les  conjurer.  On  verra  plus  loin  ce  que  les  Bretons  entendent  par 
conjuration. 

5 .  Dans  quelques  cantons  du  Finistère,  on  croit  que  le  supplice  qu'elles  infligent  à 
leurs  victimes,  consiste  à  les  frapper  violemment  au  visage  avec  leur  drap  tordu. 


42  2  Traditions  et  Superstitions  de  la  Basse-Bretagne. 

Les  Boudiket. 

Le  Boudic  que  l'on  nomme  Bom-Noz  dans  les  environs  de  Quimper,' 
est  un  esprit  qui  prend  surtout  plaisir  à  tourmenter  les  chevaux.  Si  vous 
trouvez  un  matin  leur  crinière  tellement  embrouillée  qu'il  vous  soit  im- 
possible de  la  démêler,  soyez  sûr  que  c'est  un  boudic  qui  aura  fait  le 
coup.  On  préserve  les  chevaux  de  ses  attaques  en  plaçant  le  soir  dans 
leur  râtelier  le  bâton  de  la  charrue  {Baz-an-Arar),  dont  il  a  été  question 
plus  haut.  Le  Boni-Noz  ne  se  contente  pas  d'inquiéter  les  chevaux,  il 
tourmente  aussi  les  personnes.  Ainsi  il  a  coutume  de  se  placer  la  nuit  sur 
la  poitrine  d'un  homme  endormi  et  de  le  presser  de  manière  à 
l'étouffer  '.  On  ne  connaît  pas  la  forme  sous  laquelle  le  boudic  commet 
ses  méfaits.  Des  personnes  réveillées  en  sursaut  par  le  sentiment  d'op- 
pression qu'il  leur  faisait  éprouver,  ayant  vivement  porté  la  main  à  leur 
poitrine,  ont  senti  un  objet  velu  qui  glissait  entre  leurs  bras  et  s'échap- 
pait. C'est  tout  ce  que  l'on  sait  du  boudic,  qui  n'exerce  ses  malices  que 
la  nuit. 

Le  Feu-Follet. 

On  le  désigne  sous  des  noms  différents  suivant  les  paroisses.  On 
l'appelle /4n/:£'/c'/;er  (l'errant,  le  circulant)^,  à  Saint-Pol-de-Léon  ;  Letern- 
Noz  (Lanterne  de  nuit)  à  Plouarzel  ;  Tan-Noz  (Feu  de  nuit),  dans  l'arron- 
dissement de  Quimper;  Potr-ar-Scot-Tan  (le  gars  du  tison),  dans 
l'arrondissement  de  Quimperlé;  Keleren,  dans  d'autres  localités,  etc.  Si 
l'on  voit  le  feu-follet,  avant  d'être  vu  par  lui,  on  n'a  rien  à  en  craindre. 
Mais  on  est  exposé  à  perdre  son  chemin,  s'il  vous  voit  le  premier.  Il 
vous  conduit  alors  dans  une  rivière  ou  dans  un  étang,  où  il  vous  fait  voir 
une  belle  route  et  où  vous  vous  noyez.  Pour  se  garantir  de  ses  maléfices, 
il  faut  ouvrir  son  couteau  de  manière  à  ce  que  la  lame  forme  un  angle 
aigu  avec  le  manche,  et  le  planter  en  terre  par  ses  extrémités  libres,  le 
plus  près  possible  du  feu-follet.  Il  perdra  tout  son  temps  à  tourner  autour 
du  couteau,  en  passant  sous  l'espèce  d'arche  qu'il  forme.  Un  autre 
moyen  de  se  préserver  contre  cet  ennemi,  est  de  retourner,  dès  qu'on 


1.  Dans  cette  situation,  il  forme  une  élévation  sur  la  poitrine  de  ceux  qu'il  tourmente. 
C'est  peut-être  de  là  que  lui  est  venu  son  nom,  le  mot  bom  signifiant  toute  élévation  en 
général. 

2.  Legonidec  (Dict.  breton-français)  écrit  Ankelch'cr  en  un  seul  mot.  Il  me  parait 
évident  que  ce  mot  est  composé  de  l'article  An  et  de  kelc'hcr,  qui  vient  de  kelc'hia, 
lerder,  faire  un  cercle.  Voir  le  Dictionnaire  de  D.  Le  PçWeùer,  3ux  mots  A nkelher  et 
Kcic'hia. 


Traditions  et  Superstitions  de  la  Basse-Bretagne.  423 

l'aperçoit,  une  pièce  quelconque    de   ses   vêtements,  son   bonnet,    sa 
poche,  etc. 

Ar-Ioten  ou  Ar-Gheoten. 

Ce  mot  signifie  littéralement  VHerbe.  C'est  une  piante  habitée  par  un 
certain  esprit,  qui,  comme  le  feu  follet,  a  pour  spécialité  de  faire  perdre 
leur  route  aux  voyageurs,  mais  avec  des  conséquences  moins  graves.  En 
effet,  si  vous  avez  la  mauvaise  chance  de  marcher  sur  cette  plante,  vous 
tournerez  toute  la  nuit  dans  un  cercle  infranchissable,  et  ce  n'est  qu'au 
lever  du  soleil  qu'il  vous  sera  possible  de  retrouver  votre  chemin.  Cette 
herbe  répand  la  nuit,  par  intervalles,  une  lueur  phosphorescente  analogue 
à  celle  que  produit  le  ver  luisant.  Elle  existe  dans  certaines  prairies,  et 
s'il  arrive  que  par  inadvertance  on  la  coupe,  en  fauchant  le  foin,  la 
pluie  commence  de  tomber  immédiatement,  et  gâte  la  récolte.  On  croit  à 
l'existence  de  cette  plante  dans  tout  le  Finistère,  et  probablement  dans 
toute  la  Bretagne  bretonnante. 

Les  Esprits-Follets. 

Leur  nom  est,  suivant  les  localités,  Bouffon-Noz  Farceurs  de  nuit), 
Biigel-Noz  (Garçons  de  nuit),  et  Teuz  ou  Duz.  Mais  cette  dernière 
appellation  s'applique  aussi  aux  lutins.  Les  esprits-follets  sont  des  esprits 
familiers  qui  rendent  service  aux  personnes  qu'ils  affectionnent,  et  qui 
font^toutes  sortes  de  malices  à  celles  qui  les  ont  offensées.  Heureuse  la 
servante  qui  a  un  esprit-follet  dans  sa  manche  !  La  maison  sera  balayée 
tous  les  jours  avec  soin,  sans  la  moindre  fatigue  pour  elle  ;  la  pâte  sera 
pétrie  ;  les  crêpes  seront  faites  sans  qu'elle  y  mette  la  main.  Heureux 
aussi  le  valet  décurie  qui  est  l'ami  d'un  follet  !  Il  pourra  dormir  la  grasse 
matinée,  laissant  à  son  compère  le  soin  de  panser  les  chevaux  et  de 
nettoyer  l'écurie.  Mais  pour  obtenir  les  bonnes  grâces  de  ce  capricieux 
esprit,  il  faut  être  pour  lui  plein  d'attentions  et  de  prévenances.  La 
moindre  offense  suffit  pour  l'irriter,  et  alors  il  ne  laissera  échapper  aucune 
occasion  de  vous  jouer  un  mauvais  tour.  Dans  le  nord  du  Finistère, 
surtout  dans  l'ancien  évêché  de  Tréguier,  il  était  d'usage,  il  y  a  quelques 
années  (j'ignore  si  cette  coutume  s'est  conservée),  de  placer  dans  un  des 
coins  du  foyer,  une  pierre  plate  ou  un  galet  (ur  vilien),  sur  laquelle  le 
bouffon-noz  venait  s'asseoir  la  nuit  pour  se  chauffer.  On  avait  soin  aussi 
de  ne  pas  couvrir  le  feu  entièrement  de  cendre,  mais  on  laissait  à  décou- 
vert un  peu  de  braise ,  pour  que  le  pauvre  esprit  en  reçut  quelque  chaleur. 
Un  jour  il  arriva  qu'une  servante  maligne  qui,  jusques  là,   n'avait  reçu 


424  Traditions  et  Superstitions  de  la  Basse-Bretagne. 

que  des  services  du  follet,  eut  la  mauvaise  pensée  de  faire  rougir  au  feu 
la  pierre  où  il  venait  se  reposer  la  nuit.  Le  pauvre  bouffon-noz  se  brûla 
cruellement.  Mais  la  malicieuse  servante  eut  à  se  repentir  bientôt  de  sa 
méchante  action.  A  partir  de  ce  moment,  rien  ne  lui  réussissait.  Dès 
qu'elle  avait  trait  les  vaches,  le  lait  tournait;  ses  crêpes  brûlaient  sur  la 
poêle  ;  quand  elle  allait  à  la  fontaine,  sa  cruche  se  cassait.  Enfin,  elle 
faisait  tant  de  gaucheries  et  de  maladresses,  qu'elle  fut  congédiée  de  la 
ferme,  où,  jusqu'au  jour  de  sa  mauvaise  action,  elle  avait  vécu  heureuse. 
Une  autre  vengeance  d'un  follet,  dont  l'histoire  est  connue  dans  toute  la 
Bretagne  bretonnante,  consistait  à  faire  subir  à  la  dernière  personne 
qui  se  mettait  au  lit  dans  la  maison,  la  correction  qu'on  inflige  aux  petits 
enfants  qui  ne  sont  pas  sages.  Il  fallait  voir  comme  on  se  hâtait  pour 
éviter  cette  correction,  qui  était  toujours  suivie  de  bruyants  ha  !  ha!  et 
d'éclats  de  rires  prolongés. 

Les  Conjurés. 

Les  âmes  de  ceux  qui  ne  sont  pas  morts  en  état  de  grâce  reviennent 
souvent  sur  la  terre,  où  elles  se  plaisent  à  tourmenter  les  vivants.  On  ne 
peut  s'en  délivrer  qu'en  les  conjurant.  Pour  cela,  le  prêtre  doit  leur 
jeter  sur  le  cou  son  étole  bénite,  après  quoi  elles  sont  entièrement  dans 
sa  dépendance.  Le  prêtre  peut  donner  aux  conjurés  la  forme  qui  lui 
convient.  Il  les  change  en  animaux  (le  plus  souvent  en  chien  barbet,  le 
prototype  du  diable  en  Basse-Bretagne),  ou  en  un  objet  quelconque,  tel 
qu'une  tabatière,  un  sabot,  etc.  La  pratique  la  plus  suivie  aujourd'hui, 
est  de  les  changer  en  ouragans.  Le  prêtre  ouvre  la  fenêtre,  et  leur  donne 
l'ordre  de  sortir.  Aussitôt  ils  se  précipitent  au  dehors  comme  un  vent 
impétueux,  auquel  se  mêle  leur  voix  que  l'on  prend  pour  le  tonnerre. 
On  entend  souvent  la  voix  des  esprits  dans  le  vent. 

Après  leur  métamorphose,  les  conjurés  sont  conduits  de  presbytère  en 
presbytère,  jusqu'au  presbytère  de  Braspartz.  Le  bedeau  de  cette  paroisse 
les  mène  ensuite  à  la  Roche-Trevezel,  le  point  le  plus  élevé  du  départe- 
ment du  Finistère,  d'où  les  âmes  condamnées  sont  précipitées  dans  les 
fondrières  du  Yun-Elez  ',  au  pied  du  Mont-Saint-Michel  dans  !a 
montagne  d'Are.  Cette  exécution  est  toujours  accompagnée  d'ouragans 
terribles  qui  font  trembler  la  montagne.   Pendant  la  route,  le  conjuré 

I.  Marais  de  la  rivière  Elez,  en  la  commune  de  Botmeur  .^Finistère;.  Dans  le  canton 
Je  Pont-Aven  (arrondissement  de  Quimperlé),  on  conduit  les  conjurés  dans  l'île,  ou 
presqu'île  de  Rag-Enez,  en  la  commune  de  Nevez.  On  verra  plus  bas  qu'on  les  conduit 
encore  dans  d'autres  lieux. 


Traditions  et  Superstitions  de  la  Basse-Bretagne.  42  5 

adresse  à  son  conducteur  les  paroles  les  plus  touchantes.  Il  l'implore  en 
prenant  la  voix  d'une  personne  qui  lui  était  chère,  et  que  la  mort  lui  a 
enlevée,  pour  l'engager  à  tourner  la  tête  et  à  le  regarder.  Mais  s'il  avait 
la  faiblesse  de  le  faire,  le  conjuré  lui  casserait  le  cou  aussitôt. 

Les  conjurés  ont  une  heure  sur  vingt-quatre  pour  faire  aux  hommes 
tout  le  mal  possible,  dans  la  limite  du  cercle  où  ils  ont  été  enfermés.  Ces 
cercles  sont  tracés  par  des  plantes  qui  croissent  ordinairement  dans  les 
marais,  et  leur  intérieur  est  toujours  dépourvu  de  végétation.  Malheur 
à  l'imprudent  qui  se  hasarderait  dans  ces  cercles  maudits  à  l'heure  où  les 
conjurés  sont  déchaînés  ! 

La  marquise  de  Trevaré  (Madame  de  M...),  connue  dans  le  pays  sous 
le  nom  de  Ar  Loncheghez-Coz  'la  vieille  goulue)  '  revenait  après  sa  mort 
dans  son  château  et  y  faisait  tant  de  vacarme  qu'il  était  devenu  inhabi- 
table. Ni  les  hommes,  ni  les  bêtes,  ne  pouvaient  passer  le  soir  sur  les 
routes  voisines  sans  s'exposer  aux  plus  grands  dangers.  Le  recteur  de 
Laz  se  décida  enfin  à  la  conjurer.  Il  étudia  avec  soin  ses  livres  et  se 
rendit  le  soir  au  château  de  Trévaré.  Une  lutte  s'engagea  entre  la  mar- 
quise et  lui.  Mais  il  avait  négligé  une  précaution  sans  laquelle  il  est 
impossible  de  se  rendre  maître  d'un  conjuré.  Il  n'avait  pas  ôté  ses  chaus- 
sures avant  d'engager  la  lutte.  Aussi  ne  put-il  parvenir  à  vaincre  la 
marquise.  Quelque  temps  après,  ayant  de  nouveau  consulté  ses  livres,  il 
retourna  au  château.  Mais  cette  fois,  il  eut  soin  de  s'y  rendre  pieds  nus. 
Dès  que  la  marquise  l'aperçut  :  ((Ah!  te  voilà  encore,  lui  dit-elle.  As- 
tu  cette  fois  bien  étudié  tes  livres  '^.  —  <(  J'ai  fait  mon  possible,  lui 
répondit  le  recteur.  »  —  «  Tu  ne  réussiras  pas  mieux  aujourd'hui  que 
l'autre  jour.  A  nous  deux  maintenant.  Voyons,  es-tu  homme  ?  »  —  ((  Oui, 
homme  jusqu'à  la  terre.  »  —  ((  Dis-îu  la  vérité  r  »  —  Tu  peux  t'en 
assurer,  dit  le  recteur  en  montrant  ses  pieds.  )>  La  marquise  se  baissa 
pour  voir  s'il  avait  réellement  les  pieds  nus.  Le  prêtre  profitant  de  ce 
mouvement,  lui  jeta  son  étole  sur  le  cou.  Elle  était  vaincue.  Le  recteur 
la  changea  en  petit  chien  épagneul,  et  rentra  à  son  presbytère.  «  Tiens! 
lui  dirent  ses  domestiques,  d'où  avez- vous  eu  ce  joli  petit  chien,  monsieur 
le  recteur  r  »  —  «  Oh  !  c'est  une  personne  de  ma  connaissance  qui  me 
l'a  envoyé.  »  —  <(  Faut-il  lui  donnera  manger?  —  ^  Non,  il  n'a  pas 
faim.  »  Il  prit  alors  son  bedeau  à  part,  et  lui  dit  :  c  Tu  vas  te  rendre 
avec  ce  chien  dans  le  bois  de  Trévaré.  Arrivé  dans  le  coin  le  plus  sombre 
du  bois,  tu  traceras  avec  cette  baguette  que  je  te  remets,  un  cercle  dans 


1.  J'écris  ce  mot  tel  que  je  l'ai  entendu  prononcer  par  un  habitant  de  la  commune  de 
Laz.  La  forme  la  plus  usitée  est  Lonkerez. 


426  Traditions  et  Superstitions  de  la  Basse-Bretagne. 

lequel  tu  feras  entrer  le  chien.  Tu  lui  donneras  alors  trois  coups  de 
baguette,  mais  seulement  trois  coups;  car  si  tu  lui  donnais  seulement 
un  de  plus,  tu  t'exposerais  aux  plus  grands  dangers.  Tu  reviendras 
ensuite  sans  jamais  regarder  en  arrière,  quelle  que  chose  que  tu  voies  ou 
entendes.  ). 

Le  bedeau  se  conforma  ponctuellement  aux  ordres  du  recteur,  et 
quand  il  eut  placé  le  chien  dans  le  cercle,  et  qu^il  lui  eut  donné  les  trois 
coups  de  baguette,  le  chien  lui  dit  :  «  Donne-moi  encore  un  coup,  je 
t'en  prie.  »  —  «  Non,  c'est  assez,  lui  répondit  le  bedeau.  j>  —  «  Ah  !  si 
tu  m'avais  donné  seulement  un  coup  de  plus,  je  t'aurais  brisé  tous  les 
membres.  »  Aussitôt  la  terre  s'entrouvrit.  De  ses  entrailles  sortirent  des 
hurlements  horribles.  Le  tonnerre  gronda.  Le  vent  souffla  avec  furie; 
des  flammes  s'élancèrent  de  l'abîme  qui  avait  englouti  le  chien,  et  par- 
coururent tout  le  bois.  C'était  la  réception  faite  à  une  âme  damnée! 

Suivant  une  autre  tradition  qui  a  cours  dans  la  commune  de  Plougonven 
(Finistère),  et  dont  je  dois  la  communication  à  M.  Luzel,  un  ancien 
évêque  de  Tréguier,  connu  dans  le  pays  sous  le  nom  à'Escop-Penar- 
stanc^,  «  revenait  »,  jusqu'en  ces  derniers  temps.  En  punition  d'une  vie 
qui  fut  loin  d'être  celle  d'un  bon  évêque,  Dieu  l'avait  condamné  à  venir 
toutes  les  nuits  dire  sa  messe,  ou  du  moins  essayer  de  la  dire,  dans 
l'église  de  Plougonven,  jusqu'à  ce  qu'il  eut  trouvé  un  chrétien  pour  la 
lui  servir,  et  faire  les  répons.  On  le  voyait  versjninuit  arriver  au  bourg, 
dans  un  vieux  carrosse  vermoulu  et  tout  disloqué,  traîné  par  deux  bidets 
poussifs  et  décharnés,  dont  les  brides  et  les  rênes  étaient  en  fil  d'étoupe, 
les  harnais  en  lambeaux,  et  qui  ressemblaient  aux  chevaux  de  la  Mort. 
Il  descendait  à  la  porte  du  cimetière,  gravissait  les  degrés  de  l'escalier  de 
pierre,  et  pénétrait  dans  l'église.  Il  allumait  les  cierges,  revêtait  l'étole 
et  la  dalmatique  ;  puis  du  pied  de  l'autel,  se  tournant  vers  le  bas  de 
l'église,  il  s'écriait  par  trois  fois  :  ((  S'il  y  a  ici  un  chrétien  qui  veuille 
me  répondre  la  messe,  je  le  prie  de  s'avancer  sans  crainte.  »  Mais  sa 
voix  ne  trouvait  pas  d'écho.  Alors  l'évêque  poussait  un  gémissement,  il 
se  déshabillait,  éteignait  les  cierges  et  remontait  dans  son  carrosse  pour 
retourner  au  manoir  de  Penarstanc.  La  même  scène  se  renouvelait 
chaque  nuit. 

Plusieurs  habitants  du  bourg  et  des  passants  attardés,  étonnés  de  voir 
l'église  s'illuminer  au  milieu  de  la  nuit,  s'en  étaient  approchés,  et  trou- 

I.  Frère  François  de  la  Tour,  .successivement  moine  de  l'abbaye  du  Relec  et  évêque 
de  Cornouaille,  puis  de  Tréguier.  Il  mourut  en  l'année  1(9?,  à  son  manoir  épiscopal  de 
Penarstanc,  en  la  commune  de  Plougonven,  et  fut  enterré  dans  l'église  de  cette  com- 
mune,  sans  enfeu  ni  épitaplie.  —  Albert  le  Grand,  Catal.  des  évêques  de  Cornouaille. 


Traditions  et  Superstitions  de  la  Basse-Bretagne.  427 

vant  les  portes  closes,  ils  avaient  tout  vu  par  le  trou  de  la  serrure.  Un 
recteur  de  Plougonven,  qui  était  plus  savant  que  tous  les  autres  prêtres 
du  pays,  voulut  conjurer  le  vieil  évêque.  Voici  comment  il  s'y  prit  : 

Un  peu  avant  minuit,  accompagné  de  six  jeunes  garçons  il  alla  se 
poster  derrière  le  pignon  d'une  maison  située  sur  le  bord  de  la  route  qui 
menait  à  Penarstanc.  A  l'heure  ordinaire,  ils  virent  venir  le  carrosse  de 
l'évêque,  et  aussitôt  les  enfants  se  mirent  à  crier^  suivant  les  instructions 
du  recteur  :  «  Hé!  voici  l'évêque  de  Penarstanc!  voici  l'évêque  de 
Penarstanc  !  Voyez  donc  quel  triste  attelage  !  Des  brides  de  chanvre  ! 
Des  rênes  d'étoupe!  et  quels  chevaux!  un  /;/7/aoiifr  (chiffonnier;  n'en  vou- 
drait pas!  » 

En  entendant  ces  cris  l'évêque  mit  la  tête  à  la  portière  de  son  carrosse. 
Mais  aussitôt  le  recteur  s'élança  vers  lui_,  lui  jeta  son  étole  sur  le  cou, 
et  monta  avec  lui  dans  le  carrosse.  Alors  les  chevaux  partirent  au  grand 
galop  vers  Penarstanc,  et  arrivés  là,  ils  se  précipitèrent  dans  l'étang  du 
manoir,  où  ils  s'engloutirent  avec  le  carrosse.  Le  recteur  seul  surnagea 
et  s^en  tira  sans  mal.  Depuis,  l'eau  semble  toujours  bouillonner  à  l'endroit 
où  l'évêque  avait  disparu. 

La  Peste. 

En  breton  Ar  Vossenn.  Elle  est  personnifiée  sous  la  forme  d'une  dame 
vêtue  de  blanc,  et  tenant  à  la  main  une  baguette  blanche.  La  tradition 
suivante  est  très-populaire  en  Cornouaille.  C'était  le  jour  du  pardon 
d'Elliant.  Un  jeune  homme  qui  allait  au  bourg,  aperçut  assise  sur  le 
bord  d'un  ruisseau,  qui  sépare  une  paroisse,  qu'on  ne  nomme  pas,  de  la 
paroisse  d'Elliant^  une  belle  dame  vêtue  de  blanc,  qui  tenait  à  la  main 
une  baguette  blanche.  «  Veux -tu  me  passer  de  l'autre  côté  du  ruisseau, 
dit-elle  au  jeune  homme.  »  Celui-ci  s'empressa  de  transporter  la  dame 
sur  l'autre  rive,  les  uns  disent  dans  ses  bras,  les  autres  sur  son  épaule. 
La  dame  lui  dit  alors  :  «  Tu  ne  sais  pas,  jeune  homme,  qui  tu  viens  de 
passer.  Je  suis  la  Peste;  mais  en  raison  du  service  que  tu  m'as  rendu,  tu 
n'auras  rien  à  craindre  de  moi.  Mets-toi  dans  le  coin  du  porche  de 
l'église;,  à  l'issue  de  la  grand'messe,  et  sois  attentif  à  ce  que  ferai.  Toutes 
les  personnes  que  je  toucherai  de  ma  baguette,  mourront  dans  la 
semaine.  )>  C'est  ce  qui  arriva  en  effet,  ajoute  la  légende.  Presque  tous 
les  habitants  de  la  paroisse  moururent.  En  quittant  la  paroisse  d'Elliant, 
la  Peste  se  dirigea  vers  celle  d'Ergué-Gabéric,  qui  en  est  voisine.  Mais 
arrivée  au  bord  du  ruisseau  qui  sépare  les  deux  paroisses,  elle  aperçut 
Notre-Dame  de  Kerdévot,  debout  sur  un  rocher,  dans  une  attitude  me- 
naçante. La  sainte  Vierge  ordonna  à  la  Peste  de  retourner  sur  ses  pas, 

29 


428  Traditions  et  Superstitions  de  la  Basse-Bretagne. 

et  lui  défendit  d'entrer  dans  la  paroisse  où  elle  avait  sa  chapelle.  La 
légende  ne  dit  pas  de  quel  côté  se  dirigea  la  Peste.  On  voit  encore  au 
bord  de  ce  ruisseau,  près  d'un  pont  appelé  Pont  ar  Vossenn  (Pont  de  la 
Peste),  entre  les  villages  de  Rubernard  et  de  Niverrot,  en  Ergué- 
Gabéric,  le  rocher  sur  lequel  se  tenait  la  sainte  Vierge,  et  où  elle  a  laissé 
l'empreinte  de  son  pied.  On  y  voit  aussi  l'empreinte  du  pied  de  la  Peste. 
La  chapelle  de  Notre-Dame  de  Kerdevot,  qui  est  en  grande  vénération 
dans  le  pays,  est  située  à  peu  de  distance  de  ce  pont.  De  nombreux  pèle- 
rins assistent  à  son  pardon,  qui  a  lieu  le  deuxième  dimanche  de  sep- 
tembre '. 

Peu  de  pays  ont  autant  souffert  que  la  Bretagne  de  la  peste  et  des 
autres  maladies  contagieuses.  Depuis  les  temps  les  plus  anciens  jusqu'au 
xv!!*"  siècle,  les  documents  constatent  l'apparition  fréquente  de  ce  fléau 
dans  cette  province.  Aussi  n'est-il  pas  surprenant  que  les  légendes  qui 
en  ont  conservé  le  souvenir  y  soient  si  populaires.  Ces  légendes  n'offrent 
dans  leurs  détails  que  de  légères  différences,  mais  le  théâtre  des  événe- 
ments qu'elles  rappellent  varie  suivant  les  localités.  En  Cornouaille,  les 
faits  se  passent  à  Elliant  ;  dans  l'évêché  de  Léon,  à  Plouescat;  dans  le 
pays  de  Tréguier,  à  Runan  et  à  Guingamp.  Voici  celle  qui  a  cours  dans 
l'évêché  de  Tréguier.  Elle  a  été  recueillie  de  la  bduche  d'une  femme 
âgée  de  quatre-vingt-deux  ans,  par  M.  F.  M.  Luzel,  dont  je  repro- 
duis textuellement  la  note  : 

u  A  une  époque  indéterminée,  la  peste  fit  de  grands  ravages  dans 
l'arrondissement  de  Lannion,  et  principalement  sur  les  côtes.  Nos 
paysans,   qui  aiment  à  se   représenter  chaque  chose,  même  les  plus 

I.  La  chapelle  de  Kerdevot  possède  un  triptyque  qui  sert  de  rétable  au  grand  autel, 
et  que  l'on  peut  compter  au  nombre  des  plus  beaux  morceaux  de  sculpture  sur  bois 
existant  en  Bretagne.  Les  panneaux  manquent.  Il  n'existe  que  la  partie  centrale  du 
meuble,  qui  est  divisée  en  six  compartiments  dans  lesquels  est  représentée,  en  haut 
relief,  la  vie  de  la  Vierge.  Quatre  seulement  de  ces  compartiments  sont  anciens;  les 
deux  autres  y  ont  été  ajoutés  à  une  époque  assez  moderne.  On  ignore  la  provenance  de 
ce  chef-d'œuvre,  qui  date  de  la  fm  du  xv"  siècle,  et  qui  est  très-probablement  un  ex- 
voto. 

D'après  la  légende  qui  s'y  rattache,  ce  triptyque  aurait  été  apporté  par  les  flots,_  sur 
la  côte  de  Bretagne,  d'où  deux  bœufs  de  couleur  blanche  l'auraient  transporté  à  la 
chapelle  de  Notre-Dame  de  Kerdevot.  A  partir  de  ce  moment,  ces  deux  bœufs  se  trou- 
vaient tous  les  matins  à  la  porte  de  la  chapelle,  à  la  disposition  des  pauvres  gens  de  la 
paroisse  qui  pouvaient  s'en  servir  pour  labourer  leur  champ.  Mais  ils  ne  pouvaient  les 
prendre  qu'après  le  lever  du  soleil,  et  ils  devaient  les  ramener  avant  son  coucher  au  lieu 
où  ils  les  avaient  pris  le  matin.  Un  habitant  de  la  paroisse  ayant  manqué  à  cette  obliga- 
tion, les  bœufs  disparurent  et  on  ne  les  revit  plus. 

D'un  autre  côté,  voici  ce  que  me  disait,  il  y  a  quelques  années,  le  bedeau  de  la 
chapelle  :  «  Ce  travail  a  été  fait  par  un  homme  pauvre,  mais  plein  de  dévotion  à  Notre- 
Dame,  à  qui  il  avait  consacré  sa  vie.  Comme  il  n'avait  pas  d'argent  pour  acheter  du 
bois,  il  se  contentait  des  copeaux  que  les  charpentiers  lui  donnaient  par  charité.  Il  a 
travaillé  bien  des  années  avant  d'en  venir  à  bout,  mais  il  n'y  serait  jamais  parvenu  si  la 
Sainte  vierge  elle-même  ne  l'avait  aidé.  » 


Traditions  et  Superstitions  de  la  Basse-Bretagne.  429 

abstraites,  sous  une  forme  concrète  et  palpable,  se  figuraient  le  tléau 
sous  les  traits  d'une  petite  vieille  femme  pliée  en  deux  et  s'appuyant  sur 
une  baguette  blanche.  Il  paraît  qu'elle  craignait  l'eau,  car  quand  elle 
rencontrait  une  rivière,  elle  s'arrêtait  et  s'asseyait  auprès  du  gué,  atten- 
dant que  quelqu'un  voulût  la  passer  sur  son  dos.  La  bonne  femme  de 
quatre-vingt-deux  ans,  dont  je  vous  ai  parlé  dans  la  lettre  que  vous  me 
rappelez,  me  dit  comment  la  Peste  traversa  le  Guindy,  puis  le  Jaiidy,  etc., 
avant  d'arriver  à  Runan,  oiî  elle  vida  presque  toutes  les  maisons.  De 
Runan,  elle  voulut  aller  directement  à  Guingamp,  et  ainsi  tout  le  pays 
entre  Runan  et  Guingamp  fut  préservé.  Comme  à  l'ordinaire,  elle  se 
trouva  arrêtée  par  un  cours  d'eau,  je  ne  sais  lequel.  C'était  un  samedi, 
jour  du  marché  de  Guingamp.  Plusieurs  personnes  avaient  déjà  refusé 
de  la  passer  sur  leur  dos;  enfin,  un  paysan  qui  conduisait  une  charrette 
pleine  de  lin  lui  permit  d'y  monter  jusqu'à  la  ville. 

—  «  Que  de  monde  il  y  a  aujourd'hui  à  Guingamp,  dit  le  paysan  à  la 
vieille. 

—  '(  Oui,  répondit  celle-ci,  mais  demain  presque  tout  ce  monde-là  sera 
mort,  ou  malade  au  lit. 

<(  Quand  la  nuit  fut  venue,  la  vieille,  avec  sa  baguette  blanche,  marqua 
presque  toutes  les  portes  d'une  croix,  et  le  lendemain  tout  le  monde 
était  ou  mort  ou  malade,  et  l'église  de  Guingamp  était  presque  déserte 
à  la  grand'  messe  !  « 

Outre  la  légende  en  prose  relative  à  la  peste,  il  existe  sur  le  même  sujet 
unguerz  très-connu  en  Cornouaille,  mais  dont  on  ne  retrouve  plus  que  quel- 
ques fragments  dans  les  anciens  évêchés  de  Léon  et  de  Tréguier.  Les  poètes 
populaires  bretons  n'ont  pas  pu,  en  effet,  négliger  un  sujet  qui  rappelait 
à  chacun  le  souvenir  de  parents  ou  d'amis  morts  victimes  de  la  conta- 
gion. Leurs  poésies  devaient  être  accueillies  partout  avec  une  pieuse 
reconnaissance  ;  car  je  ne  pense  pas  qu'aucun  peuple  conserve  plus 
religieusement  que  les  Bretons  le  souvenir  des  parents  qu'ils  ont  perdus. 
Que  ceux  qui  en  doutent  prennent  la  peine  de  visiter,  la  veille  du  jour  des 
Morts,  un  cimetière  de  campagne  '. 

Une  version  du  guerz   dont  je  viens  de  parler,    a  été  publiée   par 

I.  Il  existe  à  l'île  d'Ouessant  une  coutume  touchante  appelée  Broellou,  ou  Brouellou, 
dont  voici  les  détails  :  Quand  un  habitant  meurt  hors  de  l'île,  soit  de  maladie,  soit  à  la 
suite  d'un  naufrage,  ce  qui  n'est  pas  rare,  puisque  les  Iliens  sont  tous  marins,  les 
parents  du  défunt  font  une  petite  croix  de  bois  qu'ils  placent  sur  son  lit  ou  sur  la  table 
de  famille.  On  l'entoure  de  cierges,  et  l'on  invite  les  parents  et  les  amis  à  passer  la 
nuit  dans  la  maison  pour  y  dire  des  prières,  comme  si  le  corps  du  défunt  était  présent. 
Le  lendemain,  le  parrain  ou  le  père  du  mort  porte  la  croix  à  l'église,  suivi  :îe  tous  les 
assistants,  et  l'on  célèbre  le  service  des  morts  à  l'intention  du  défunt.  Autrefois,  on 
enterrait  la  croix  à  l'issue  de  la  cérémonie;  plus  tard  on  la  plaçait  sur  l'autel;  aujour- 
d'hui on  la  dépose  dans  une  urne,  près  de  la  chapelle  des  Trépassés  et,  lorsqu'il  s'y  trouve 
un  certain  nombre  de  croix,  on  les  enterre  toutes  ensemble. 


4^0  Traditions  et  Superstitions  de  la  Basse-Bretagne. 

M.  Luzel  dans  son  Recueil  de  chants  populaires  de  la  Bretagne  '.  En 
voici  une  autre  que  j'ai  recueillie  en  1870  dans  les  environs  de  Quimper^. 
Elle  est  plus  complète  que  la  première  et  offre  quelques  variantes  qui  ne 
sont  pas  sans  intérêt  : 

BOSSENN  ELLIANT. 
1. 

Hanta-  cant  nozvcz  cz  oun  bet 

'N  ur  parkic  bihan  balance, 

'N  ur  parkic  bihan  balance, 

Clase  laeres  cleier  an  Drindel. 

0  zri  maint  0  son  glaz  ; 

Ar  goulou  coar  an  allumaz,  (sic) 

An  oll  zent  a  zermoni  : 

«  Olier  coz  croughet  e  vi!  » 

Mar  e  vin  croughet  ar  btoaz  man, 

Na  vin  ket  croughet  barz  unan. 

Me  meus  er  ghcr  ur  verch  Vari, 

A  oar  ober  archant  coulz  ha  me. 
II. 

Ar  Vossenn  venn  zo  tal  ma  zi; 

Pa  garo  Doue  teui  en  ti. 

Pa  teui  en  ti,  me  ialo  'r  mez. 

Meur  da  galon  a  gra  dicz, 

LA  PESTE  D'ELLIANT. 

I. 
J'ai  passé  cinquante  nuits 
Dans  un  petit  champ  de  genêts, 
Dans  un  petit  champ  de  genêts, 
Cherchant  à  voler  les  cloches  de  la  Trinité. 
Les  trois  cloches  sonnent  le  glas; 
Les  cierges  s'allument, 
Tous  les  saints  prêchent  (disent)  : 
—  «  Vieux  Olivier,  tu  seras  pendu  !  » 
Si  je  suis  pendu  cette  année. 
Je  ne  le  serai  pas  l'année  prochaine. 
J'ai  à  la  maison  une  fille  (nommée)  Marie, 
Qui  sait  taire  (gagneri  de  l'argent  aussi  bien  que  moi. 

H. 
La  Peste  blanche  est  à  la  porte  de  ma  maison  ; 
Q^uand  il  plaira  à  Dieu  elle  y  entrera. 
Quand  elle  entrera,  je  sortirai. 
Elle  afflige  bien  des  cœurs, 

1.  Voir,  dans   les    Gwerziou   Breiz-lzel,    chants    populaires  authentiques  de  la  Basse- 
Bretagne,  \<t  gwerz  de  la  Peste  d'Elliant,  t.  i,  p.  497. 

2.  Elle  m'a  été  chantée  par  une  vieille  femme,   originaire    de  la   commune  de  Briec 
(Finistère),  journalière  chez  M.  a.  de  Blois. 


Traditions  et  Superstitions  de  la  Basse-Bretagne.  4^  i 

Calon  intanv  hag  intanvez, 
Calon  minor  ha  minorez; 
Seiz  mab  t  oa  en  un  tiad; 
Ho  zdz  int  et  en  ur  c'harrad; 
Ho  mam  arog  0  charread  ; 
Ho  zad  varkc'h  0  c'houibanat, 
Collet  gant  han  lu  skiant  vad, 
Gant  ar  glac'har  euz  he  seiz  vab. 
('  —  Autrou  sant  Ccrman,  m'ho  suppli 
Da  lojet  ma  seiz  mab  en  ho  ti.  » 

—  «  Leun  eo  ma  zi  beteg  'n  treuziou, 
Hag  ar  veret  betcg  'r  muriou.  n 

—  ((  Aiitrou  sant  German,  m'ho  suppli 
Da  benighct  ur  parc  pe  zaou, 

'Vit  lacat  corjou  ar  re  baour.  » 

Et  eo  ar  Vossenn  a  El  liant, 
Mez  ne  ket  et  heb  pourveant  ; 
Et  eo  gant  hi  dec  mil  a  cant. 
Ha  pevar  mil  'r  re  innocent. 

IV. 
Barz  e  Kemper  var  un  doal  venn 
Ez  oâscrivet  guerz  ar  Vossenn; 
Diou  plac'hic  iaouanc  0  scriva, 
Teir  femelen  0  discana. 

Cœur  de  veuf  et  de  veuve , 

Cœur  d'orphelin  et  d'orpheline. 

Il  y  avait  sept  fils  dans  une  maison , 

Ils  sont  allés  tous  les  sept  en  une  charretée. 

Leur  mère,  devant,  les  traînait  ; 

Leur  père  les  suivait  en  sifflant  ; 

Il  avait  perdu  la  raison. 

De  la  douleur  fde  la  mort)  de  ses  sept  fils. 

—  «  Monsieur  saint  Germain,  je  vous  supplie 

De  loger  mes  sept  fils  dans  votre  maison  (église).  » 

—  «  Ma  maison  est  pleine  jusqu'aux  seuils, 
Et  le  cimetière  jusqu'aux  murs.  » 

—  «  Monsieur  saint  Germain,  je  vous  supplie 
De  bénir  un  champ  ou  deux. 

Pour  mettre  les  corps  des  pauvres.  » 

III. 
La  Peste  est  partie  d'Elliant, 
Mais  elle  n'est  pas  partie  sans  être  pourvue, 
Elle  a  emporté  dix  mille  et  cent, 
Et  quatre  mille  innocents  (enfants). 

IV. 
A  Quimper  sur  une  nappe  blanche 
Fut  écrit  le  guerz  de  la  Peste  ; 
Deux  jeunes  filles  écrivaient, 
Trois  femmes  chantaient. 


4^2  Traditions  et  Superstitions  de  la  Basse-Bretagne . 

Une  troisième  version,  qui  diffère  en  bien  des  points  des  deux  pre- 
mières, a  été  publiée  il  y  a  déjà  longtemps  dans  le  Barzaz-Breiz.  L'auteur 
parait  s'être  servi  pour  arranger  cette  version,  des  guerziou  de  la  peste 
d'Elliant  et  de  la  peste  de  Plouescat,  qu'il  a  modifiés  en  partie,  et  aux- 
quels il  a  ajouté  des  développements  qui  trahissent  l'origine  moderne  de 
cette  composition  '. 

La  peste  est  la  seule  maladie  contagieuse  que  les  Bretons  aient  per- 
sonnifiée. Quant  aux  autres  maladies  épidémiques,  telles  que  le  choléra, 
le  typhus,  etc.,  ils  s'imaginent,  comme  on  le  croyait  généralement  au 
moyen-àge,  qu'elles  sont  causées  par  l'empoisonnement  des  fontaines,  et 
par  des  poudres  délétères  que  l'on  répand  sur  les  lieux  élevés,  d'où  elles 
vont,  portées  par  le  vent,  propager  le  fléau  dans  les  campagnes.  Ces 
poisons  sont  préparés  par  de  riches  habitants  des  villes,  qui  ont  puisé 
une  grande  science  dans  les  livres.  Ils  peuvent  à  leur  gré  arrêter  la 
contagion,  mais  ils  n'y  mettent  fin,  le  plus  souvent,  que  lorsque  quelques- 
uns  de  leurs  parents  ou  de  leurs  amis  en  ont  été  victimes. 

Il  n'est  pas  prudent  à  des  étrangers  de  s'aventurer  en  temps  d'épidémie 
dans  certains  cantons  reculés  de  la  Bretagne,  dont  les  populations, 
naturellement  douces  et  hospitalières,  peuvent  devenir  hostiles  à  des 
inconnus,  que  dans  leur  ignorance  elles  supposent  être  les  auteurs  du 
mal  mystérieux  qui  les  déciment.  Le  fait  suivant,  dont  j'ai  été  témoin, 
en  donnera  la  preuve. 

En  1855  ou  1854,  le  choléra  faisait  de  nombreuses  victimes  dans  la 
presqu'île  de  Crozon  (Finistère).  Un  voyageur,  qui  visitait  à  cette  époque 
ce  pays,  l'un  des  plus  pittoresques  et  des  moins  connus  de  la  Bretagne, 
s'était  arrêté  près  d'une  fontaine  pour  se  désaltérer.  Des  enfants  l'ayant 


I.  Ainsi,  dans  l'admirable  épisode  de  la  mort  des  sept  frères,  il  dit,  en  parlant  de  la 
mère  : 

«  Elle  hurlait,  elle  appelait  Dieu,  elle  était  bouleversée  corps  et  âme  :  —  Enterrez 
mes  neuf  fils  et  je  vous  promets  un  cordon  de  cire  qui  fera  trois  fois  le  tour  de  vos 
murs,  —  Qui  fera  trois  fois  le  tour  de  votre  église  et  trois  fois  le  tour  de  votre  asile.  — 
J'avais  neuf  fils  que  j'avais  mis  au  monde,  et  voilà  que  la  mort  est  venue  me  les  prendre, 
— •  Me  les  prendre  sur  le  seuil  de  ma  porte  ;  plus  personne  pour  me  donner  une  petite 
goutte  d'eau  !  » 

Rien  de  semblable  ne  se  trouve  dans  les  versions  populaires.  L'immense  douleur  de 
cette  mère  qui  traîne  ses  sept  fils  vers  le  cimetière  doit  être,  en  effet,  une  douleur 
muette.  Elle  ne  songe  pas  à  se  plaindre  ;  sa  seule  préoccupation  est  d'obtenir  un  coin  de 
terre  bénite  pour  y  déposer  le  corps  de  ses  enfants.  L'auteur  de  la  version  du  Barzaz- 
Breiz  ne  s'est  pas  souvenu  que  la  douleur,  chez  les  Bretons,  est  toujours  silencieuse.  Je 
ferai  en  outre  remarquer  que  cette  femme  fait  un  vœu  bien  téméraire  en  promettant  au 
patron  de  la  paroisse  d'Elliant  un  cordon  de  cire  qui  fera  trois  Ibis  le  tour  de  son  église 
it  trois  fois  le  tour  de  son  asile.  Il  y  a  des  asiles  qui  sont  fort  grands  :  l'asile  ou  Miiiichi 
de  Saint- Pol-de-Léon,  par  exemple,  comprenait  sept  paroisses.  Celui  de  Loc-Ronan  a 
_  deux  lieues  de  tour.  On  se  demande  comment  elle  pourra  payer  une  bougie  de  plus  de 
'  vingt-quatre  kilomètres  de  longueur,  elle  qui  se  plaint,  quelques  vers  plus  bas,  de  n'avoir 
plus  personne  pour  lui  donner  une  goutte  d'eau,  ce  qui  signifie,  si  je  ne  me  trompe, 
qu'elle  est  réduite  à  la  misère.  Il  est  vrai  que,  dans  la  première  édition  du  Barzaz-Breiz, 
son  cordon  de  cire  m;  devait  faire  que  deux  fois  le  four  de  l'église  et  quatre  fois  le  tour 
de  la  croix.  Il  n'y  est  pas  question  de  l'asile  du  saint. 


Traditions  et  Superstitions  de  la  Basse-Bretagne.  4 H 

aperçu,  s'enfuirent  en  criant  :  «  l'homme  du  choléra!  l'homme  du  cho- 
léra !  »  Aussitôt  les  hommes  et  les  femmes  qui  travaillaient  dans  les 
champs  voisins,  s'armant  de  fourches,  de  pioches  et  de  pierres,  se  mirent 
à  la  poursuite  de  l'étranger  en  criant  :  «  Tuez-le  !  Tuez-le  !  C'est 
l'homme  du  choléra  1  »  Les  femmes  surtout  se  montraient  acharnées  dans 
cette  poursuite.  Le  voyageur  parvint  cependant  à  leur  échapper,  grâce 
à  la  vitesse  de  ses  jambes.  Mais  quand  après  une  course  de  plusieurs 
kilomètres,  il  arriva  en  vue  du  port  de  Morgat  dans  la  baie  de  Douar- 
nenezj  il  tomba  épuisé  de  fatigue  sur  le  sable  de  la  grève,  où  les  furies 
qui  le  poursuivaient  l'auraient  certainement  lapidé,  si  le  poste  de  la 
douane  de  Morgat  n'était  venu  à  son  secours. 

Le  Diable. 

Je  ne  puis  clore  cette  galerie  d'esprits  malins,  sans  dire  un  mot  du 
diable,  leur  chef  naturel.  Son  nom  breton  est  Diaoul  ou  Diawl  ;  mais  on 
l'appelle  familièrement  Po//c, diminutif  probable  de  Diaboliis.  Les  bretons 
le  redoutent  bien  moins  que  les  latins,  et  dans  les  histoire?  qu'ils  en 
racontent,  ils  lui  font  presque  toujours  jouer  un  rôle  de  dupe,  comme  on 
le  verra  par  les  légendes  qui  suivent. 

Saint  Guennolé  qui,  avant  de  devenir  abbé  de  Landévennec,  était 
simple  recteur  de  Locunolé,  petite  paroisse  des  environs  de  Quimperlé 
(Finistère),  étant  un  jour  fort  en  peine  de  construire  un  pont  sur  la 
rivière  Elle,  pour  relier  sa  paroisse  à  celle  de  Guilligomarch,  se  lamentait 
sur  une  des  rives  du  fleuve,  lorsqu'un  beau  monsieur  parut  tout  à  coup 
sur  l'autre  rive  et  dit  au  saint  :  «  —  Je  sais  ce  qui  vous  embarrasse. 
Vous  voudriez  bâtir  un  pont  sur  la  rivière,  et  vous  ne  pouvez  y  parvenir. 
Eh  bien!  je  me  charge  de  vous  le  construire,  mais  à  une  condition.  » 

—  «  Laquelle  ?  dit  saint  Guennolé,  qui  avait  aperçu  le  pied  fourchu 
du  diable. 

—  C'est  que  vous  me  donnerez  la  première  créature  qui  y  passera. 

—  -  Affaire  conclue,  dit  le  saint.  Mettez-vous  à  l'œuvre.  Je  vais  faire 
un  tour  à  mon  presbytère,  et  je  reviendrai  dans  un  instant  voir  comment 
vous  travaillez. 

Quand  saint  Guennolé  revint,  le  pont  était  achevé,  et  le  diable  atten- 
dait à  l'autre  e.xtrémité  le  payement  de  son  marché.  Alors  saint  Guennolé 
ouvrit  un  sac  qu'il  avait  apporté  et  d'où  sortit  un  chat  qui  traversa  le 
pont  en  courant  à  toutes  iam.bes.  Le  diable,  obligé  de  se  contenter  de 
cette  maigre  proie,  s'en  alla  en  blasphémant,  poursuivi  par  les  éclats  de 
rires  et  les  huées  du  saint  et  de  ses  compagnons. 


4?4  Traditions  et  Superstitions  de  la  Basse-Bretagne. 

Le  pont  auquel  se  rattache  cette  légende  se  trouve  dans  un  des  sites 
les  plus  sauvages  du  vallon  de  l'Ellé,  et  porte  encore  aujourd'hui  le  nom 
de  Pont-an-Diaoïil  (Pont  du  Diable).  Un  pont  semblable  fut  construit 
aux  mêmes  conditions,  dans  le  Morbihan^  au  profit  de  saint  Cado,  qui 
dupa  le  diable  de  la  même  manière  que  saint  Guennolé.  Au  reste,  cette 
légende  n'est  pas  particulière  à  la  Bretagne.  On  la  retrouve  un  peu 
partout. 

Une  autre  fois,  trois  hommes,  le  sonneur  de  cloches,  un  aubergiste 
et  un  autre  habitant  de  la  commune  de  Pluguffan  (Finistère),  voulant 
faire  fortune  tout  d'un  coup,  se  rendirent  dans  un  carrefour,  peu  éloigné 
du  bourg,  après  avoir  publié  qu'ils  y  allaient  faire  une  vente.  Arrivés  au 
lieu  indiqué,  ils  tracèrent  avec  un  crayon  rouge  un  grand  cercle  dans 
lequel  ils  entrèrent,  et  y  allumèrent  du  feu.  L'un  des  hommes  était  armé 
d'un  fouet  pour  éloigner  les  personnes  qui  s'approcheraient  trop  près  du 
cercle  ;  le  second  soufflait  le  feu,  et  le  troisième  tenait  une  poule  blanche 
qu'il  paraissait  se  disposer  à  faire  cuire.  Quelques  personnes  s'appro- 
chèrent pour  prendre  part  à  la  vente,  mais  comme  ce  n'étaient  pas  celles 
qu'attendaient  les  trois  hommes,  elles  furent  chassées  à  coups  de  fouet. 
Après  avoir  attendu  quelque  temps,  l'un  des  vendeurs  s'écria  :  «  Com- 
ment! on  fait  une  vente  ici,  et  personne  ne  se  présente  pour  acheter  !  » 

Trois  hommes  vêtus  de  noir  parurent  alors  à  quelque  distance  du 
cercle.  —  (f  Je  veux  bien  acheter,  dit  l'un  d'eux,  mais  qu'avez-vous  à 
vendre  ? 

—  «  Une  des  créatures  qui  se  trouvent  ici.  Mais  pour  l'avoir,  il  faut 
me  jeter  une  bourse  où  l'argent  ne  manquera  jamais.  » 

—  '(  Je  n'ai  pas  de  bourse  de  ce  genre,  dit  l'acheteur,  mais  celui  qui 
va  me  suivre  vous  en  donnera  une.  »  Puis  il  disparut. 

Le  second  fit  la  même  réponse  et  disparut  à  son  tour.  Le  troisième, 
qui  n'était  autre  que  le  diable^  se  présenta  alors  et  jeta  aux  vendeurs  la 
bourse  qu'ils  demandaient. 

Il  s'imaginait  qu'il  venait  d'acheter  un  des  hommes  qui  se  trouvaient 
dans  le  cercle.  Mais  en  échange  de  sa  bourse  magique,  il  ne  reçut  que 
la  poule  blanche,  qu'il  dévora  de  rage,  et  disparut  en  feu  et  en  fumée. 

Outre  ces  légendes  qui  font  rire  aux  dépens  du  diable,  il  en  est  de 
plus  sérieuses  qui  renferment  un  enseignement  moral.  Telle  est  celle-ci 
qui  m'a  été  racontée  sous  le  titre  de  la  Tête  de  feu. 

Jean  était  un  homme  qui  ne  possédait  pas  de  qualités,  mais  qui  avait 
en  revanche,  beaucoup  de  défauts,  entre  autres  celui  de  s'enivrer  régu- 
lièrement toutes  les  fois  qu'il  allait  au  bourg.  Or,  il  ne  manquait  pas  d'y 
aller  tous  les  jours  de  la  semaine,  et  il  ne  s'en  revenait  que  le  soir  très- 


Traditions  et  Superstitions  de  la  Basse-Bretagne.  435 

tard_,  en  chantant  des  chansons  bachiques,  au  grand  désespoir  de  sa 
femme  et  de  ses  enfants,  dont  il  avait  dissipé  presque  tout  le  bien.  Un 
soir  que,  selon  son  habitude,  il  revenait  de  Châteauneuf,  il  vit  s'avancer 
vers  lui  un  globe  de  feu  qui  s'arrêta  à  ses  pieds.  Il  put  voir  alors  que  ce 
globe  était  une  tête  garnie  de  dents  aiguës  sur  toutes  ses  faces,  et  de 
laquelle  jaillissait  du  feu.  Il  était  si  endurci  dans  le  vice,  qu'il  ne  fut  pas 
effrayé  de  cette  vision.  —  <-  Que  me  veut  donc  cette  tête,  avec  ses 
dents  ?  lui  dit-il.  »  —  «  Jean,  lui  répondit  la  tête,  change  de  chemin,  ou 
il  t'arrivera  malheur  !  »  —  «  Oh  !  volontiers,  dit-il  ;  il  y  a  d'autres  routes 
que  celle-ci  pour  me  rendre  chez  moi.  »  Malgré  cet  avertissement,  il 
continua  à  mener  la  même  vie  déréglée.  Seulement  pour  rentrer  chez  lui, 
il  avait  soin  de  prendre  une  autre  route  que  celle  où  il  avait  vu  l'appa- 
rition. Son  aveuglement  l'avait  empêché  de  comprendre  que  le  change- 
ment de  chemin  qu'on  lui  demandait,  était  le  changement  de  sa  conduite. 
Un  matin  on  le  trouva  étranglé  dans  un  chemin  creux.  La  tête  de  feu 
était  le  diable.  C'est  lui  qui  avait  causé  la  perte  de  Jean;  mais  avant  de 
lui  permettre  d'en  faire  sa  proie,  Dieu  l'avait  contraint  de  donner  à  sa 
victime  un  avertissement. 

R.  F.  Le  Men. 


LA    VÉRITABLE 

HISTOIRE     DE     BRETAGNE 

DE    DOM    LOBINEAU. 


D'Argentré,  dans  son  Histoire  de  Bretagne,  nous  a  raconté  par  quels 
moyens  François  l"  réussit  à  obtenir  des  Etats  de  Bretagne  l'union 
définitive  de  cette  province  à  la  France.  Les  voies  de  persuasion  ne 
furent  pas  seules  employées;  la  corruption  fut  leur  auxiliaire  efficace. 
Toutefois,  l'adhésion  fut  loin  d'être  unanime,  et  d'Argentré  nous  a 
transmis  l'Advis  des  opiniastres,  c'est-à-dire,  les  objections  des  opposants, 
devenus  des  irréconciliables.  Ces  objections,  insérées  dans  l'édition  de 
1 582  (p.  1 179),  et  les  passages  sur  Philippe-Auguste  (p.  268);  sur 
saint  Louis  (p.  351);  sur  Charles  V  (pp.  '^62  et  632);  sur  Charles  VII 
(p.  948),  parurent  à  la  cour  de  France  autant  d'attentats  à  son  auto- 
rité, et  déterminèrent  les  poursuites  du  procureur  général  La  Guesle 
contre  celui  qu'il  appelait  le  faciendaire  du  duc  de  Mercœur,  insinuant 
par  là  que  d'Argentré,  au  lieu  d'être  un  historien  sincère  et  véridique, 
n'avait  composé  qu'un  pamphlet  destiné  à  faire  réussir  les  convoitises  du 
duc  de  Mercœur  qui  aspirait  à  se  faire  proclamer  duc  de  Bretagne.  La 
Guesle  n'osa  pourtant  pas  aller  jusqu'à  revendiquer  la  suzeraineté  de  la 
France  depuis  la  première  race.  Il  s'attacha  uniquement  à  établir  que  la 
Bretagne  était  un  fief  servant,  de  la  nature  de  ceux  qui  se  confondaient 
avec  le  fief  dominant  lorsqu'ils  venaient  à  se  trouver  réunis  dans  la 
même  main,  ce  qui  serait  résulté  des  deux  mariages  de  la  duchesse 
Anne  avec  Charles  VIII  et  Louis  XII,  et  qui,  dès  lors,  ne  pouvaient 
plus  être  séparés.  Ces  arguties,  empruntées  à  l'arsenal  de  la  jurispru- 
dence féodale,  furent  favorablement  accueillies  par  les  magistrats  fran- 
çais qui  condamnèrent  le  livre  et  ordonnèrent  la  suppression  des 
passages  incriminés.  Henri  III  ne  se  contenta  pas  de  l'arrêt  du  Parle- 
ment de  Paris.  Il  chargea  son  médecin  Vignier,  dont  il  fit  son  historio- 


La  véritable  Histoire  de  Bretagne  de  Dom  Lobineau.  4^7 

graphe,  de  réfuter  l'audacieux  écrivain  qui  avait  osé  affirmer 
l'indépendance  originaire,  immémoriale,  constante,  absolue,  de  son  pays. 
Vignier  remplit  sa  tâche  dès  1 582,  mais  il  mourut  en  1 596  sans  avoir 
publié  sa  réfutation  qui  ne  parut  qu'un  an  après  l'édition  de  l'histoire  de 
d'Argentré  de  1618. 

C'était  se  méprendre  étrangement  sur  le  caractère  des  Bretons  que  de 
croire  qu'ils  ne  tenteraient  plus  d'élever  la  voix  quand  il  s'agirait  de  la 
défense  de  leurs  droits  les  plus  chers.  L'union  avait  conservé  des 
adversaires  d'autant  plus  obstinés  que  la  violation  par  la  France  des 
clauses  du  traité  passé  avec  François  I"  révélait  l'intention  bien  arrêtée 
de  substituer  une  absorption  complète  à  un  contrat  synallagmatique. 
Aussi  Dom  Lobineau  se  fit-il  l'organe  du  sentiment  général  de  la  pro- 
vince en  protestant,  dans  maints  endroits  de  son  histoire,  contre  les 
prétentions  des  rois  de  France  à  une  suzeraineté  remontant  à  la  première 
race,  suzeraineté  qui  aurait  ainsi  rendu  implicitement  inutile  l'acte 
d'union  de  1532,  voire  même  les  deux  annexions  résultant  du  double 
mariage  d'Anne  de  Bretagne.  Nous  possédons  un  exemplaire  de 
VHistoire  de  Bretagne  de  Dom  Lobineau,  où  le  savant  bénédictin  soutient 
la  même  thèse  que  d'Argentré.  Le  texte  y  diffère  essentiellement,  en 
certains  endroits,  de  celui  des  autres  exemplaires  que  nous  avons 
rencontrés.  Parfois  même,  les  différences  sont  telles  qu'elles  présentent 
des  opinions  tout  à  fait  opposées.  Pour  qui  connaît  le  caractère  indé- 
pendant de  Dom  Lobineau  et  son  peu  d'orthodoxie  en  matière  religieuse, 
ces  variantes  n'ont  pas  été  volontaires.  L'autorité  civile  d'une  part, 
l'autorité  ecclésiastique  de  l'autre,  lui  imposèrent  ces  mutilations.  Dans 
l'intérêt  de  la  vérité  historique,  nous  avons  cru  utile  de  reproduire  les 
deux  textes.  Le  lecteur  jugera,  par  leur  dissemblance  et  par  la  nature 
des  sujets  auxquels  ils  s'appliquent,  par  lequel,  du  pouvoir  royal  ou  du 
pouvoir  ecclésiastique,  a  été  prescrite  la  substitution  de  cartons  au 
texte  primitif.  Nous  placerons  ce  dernier  à  la  gauche  des  pages  qui 
suivent,  et  celui  des  cartons  à  la  droite. 

Tome  !'''.  —  Histoire. 


Page  2.  ligne  11...  qui  semble  avoir  Dont  le  nom    ne  s'éloigne  pas  fort 

retenu  leur  nom.  de  celui  des  Samnites. 

P.  7.  Lignes  14-27. 

La  diversité  des  religions  ne  contri-  Ces  premiers  Bretons  furent  accom- 

bua  pas  peu  à  fomenter  cette  division;  pagnez  dans  leur  passage,  d'Evesques, 

les  Bretons  estoient  Chrestiens,   et   les  de  Prestres  et  de    Moines  remplis  de 

peuples  de  l'Armorique  (si  l'on  excepte  zèle,  qui  travaillèrent  utilement  à  déra- 

ceux  de  Nantes  et  quelque  peu  de  leurs  ciner  les  vices  et  la  superstition  parmi 


4îi 


La  véritable  Histoire  de  Bretagne  de  Dom  Lobineau. 


voisins)  adoroient  encore  les  idoles.  Les 
Bretons  firent  part  aux  Armoricains  de 
la  connaissance  du  vrai  Dieu,  par  le 
ministère  de  quantité  de  saints  Eves- 
ques  et  de  Prédicateurs  zelez  qu'ils 
leur  envoïerent.Le  nom  breton  de  Rio- 
thime,  que  l'on  trouve  à  la  teste  des 
Evesques  de  Rennes,  est  une  preuve 
du  zèle  des  Bretons  et  de  la  docilité 
des  Armoricams.  On  ne  sait  quel 
estoit  ce  S.  Justin,  que  les  anciens 
Catalogues  mettent  avant  Riothime. 
On  peut  croire  que  c'estoit  quelque 
disciple  de  s.  Clair  premier  Evesque 
de  Nantes,  mais  que  ses  prédications 
avoient  eu  peu  de  fruit,  et  qu'il  n'eut 
point  de  successeur,  jusqu'à  Riothime, 

3ui  fut  bien-tost  suivi  d'Athenius.  Ceux 
e  Vannes  suivirent  l'exemple  des 
Rennois,  la  pluspart  embrassèrent  en 
peu  de  tems  la  Religion  Chrestienne, 
mais  ils  voulurent  avoir  pour  premier 
Evesque  un  homme  de  leur  nation, 
comme  on  le  verra  bien-tost. 

Page  7,  ligne  28.  —  Nouveaux 
apostres. 

Ibid.,  ligne  29,  —  l'empire  du  dé- 
mon. 


les  Armoricains,  tant  ceux  qui  demeu- 
rèrent dans  les  pais  occupez  par  ces 
nouveaux  hostes,  que  ceux  des  pais  de 
Nantes,  de  Rennes  et  de  \'annes.  Ce  ne 
seroit  pas  estimer  autant  que  l'on  doit 
les  travaux  apostoliques  de  S.  Clair, 
d'Ennius  et  de  plusieurs  autres  prélats 
qui  avoient  establi  la  foi  Crestienne 
dans  le  pais,  que  de  croire  que  le  culte 
des  idoles  s'y  fust  conservé  jusqu'à  ce 
tems  ;  mais  quoique  les  Armoricains 
eussent  apparemment  tous  receu  la 
vraie  Religion,  il  est  à  croire  que  ces 
nouveaux  hostes  trouvèrent  encore 
assez  de  vices  et  de  pratiques  supers- 
tieuses  à  combattre  pour  estre  regardez 
comme  de  nouveaux  apostres  du  pais  ; 
et  leurs  soins  furent  si  bien  reçus  que 
les  habitans  de  Rennes  souhaitèrent 
d'avoir  pour  Evesque  Riothime  dont  le 
nom  paroît  Breton,  n'aïant  point  eu 
d'Evesque  (du  moins  les  Catalogues 
n'en  mettant  point)  depuis  S.  Justin 
dont  le  nom  se  trouve  à  la  teste  des 
Evesques  de  cette  ville. 

Hommes  remplis  de  l'esprit  de  Dieu. 

Les  vices. 


La  différence  des  deux  textes  ci-dessus  donna  lieu,  entre  Dom 
Lobineau  et  son  confrère  Dom  Liron,  à  une  polémique  dont  nous  avons 
ainsi  exposé  les  détails  à  l'article  Lobineau  de  notre  Biographie  bretonne 
(t.  II,  p.  3  5  3^: 

<c  Ce  passage  'La  diversité  de  religions,  etc.)  communiqué  à  D.  Liron, 
pendant  l'impression^  n'avait  pas  obtenu  son  approbation,  et  ses  raisons 
avaient  été  goûtées  de  son  confrère  qui,  sans  l'en  prévenir,  avait 
substitué  au  feuillet  primitif  un  carton  où  on  lisait  :  «  Ce  ne  seroit  pas 
estimer,  etc.  Cependant,  D.  Liron,  qui  n'avait  pas  été  prévenu  du  pla- 
cement du  carton,  et  qui  alors,  était  naturellement  fondé  à  croire  que 
D.  Lobineau  avait  persisté  dans  ses  idées,  s'était  décidé  à  combattre  son 
erreur,  ce  qu'il  fit  victorieusement  dans  son  Apologie  pour  les  Armoricains 
et  pour  les  églises  des  Gaules,  particulièrement  de  la  province  de  Tours. 
Paris,  Charles  Huguier,  1708^  in- 12.  Les  passages  qu'il  attaquait  y 
étaient  cités  textuellement. 

Que  fit  alors  D.  Lobineau  ?  N'écoutant  qu'un  puéril  et  bien  fâcheux 
amour-propre,  persuadé  d'ailleurs  qu'il  avait  si  bien  pris  ses  mesures 
que  sa  ruse  ne  serait  pas  découverte,  il  se  fit  agresseur,   et  s'appuyant 


La  véritable  Histoire  de  Bretagne  de  Dotn  Lobineau.  459 

sur  le  texte  substitué,  il  accumula  contre  D.  Liron  les  accusations  de 
calomnie,  de  falsification,  dans  sa  Défense,  insérée  dans  le  Supplément  du 
Journal  des  Savants  de  1708,  et  réimprimée  plus  tard  sous  le  titre  de  : 
Contr' Apologie,  ou  Réflexions  sur  l'Apologie  des  Armoricains.  Nantes, 
Jacques  Mareschal,  1712,  in-8  de  15  pp.  On  peut  juger  des  aménités 
dont  est  parsemée  la  Contf Apologie  par  l'épigraphe  suivante  qui  en 
décore  le  frontispice  :  Ne  addas  quicquam  verbis  illius,  et  arguaris,  inve- 
niarisque  mendax.  Prov.  xxx,  6.  Etourdi  du  coup,  D.  Liron  avait  beau 
feuilleter  VHistoire  de  Bretagne,  lire,  relire,  se  frotter  les  yeux,  il  ne 
parvenait  pas  à  y  trouver  ce  qui  en  avait  été  ôté.  Lobineau  triomphait. 
Mais  on  ne  tarda  pas  à  découvrir  sa  supercherie.  On  avait  omis  de 
mettre  le  carton  à  plusieurs  exemplaires  qui,  confrontés  avec  le  livre  de 
D.  Liron,  démontrèreut  la  véracité  de  ses  assertions. 


P.  13.  Ligne  37,..  estaient  les 
fondateurs,  et  qu'ils  y  avaient  establis  la 
religion  Chresticnne,  ils  ne,  etc. 

Page  25,  lignes  38-43. 

Quoique  l'on  ait  sujet  de  ne  pas 
faire  entièrement  fonds  sur  des  Auteurs 
intéressez  ('moines  de  S.  Denis  fondez 
par  Dagobertj  dont  le  témoignage  pa- 
roist  suspect,  par  la  fiardiesse  qu'ils 
ont  d'avancer  des  faits  dont  ceux  qui 
estoient  présens  à  l'action  n'ont  pas 
dit  un  mot,  on  veut  bien  croire  que 
Judicael,  pour  le  bien  de  la  paix,  re- 
connut en  Dagobert  et  en  ses  succes- 
seurs une  supériorité  de  puissance,  et 
promit  d'avoir  pour  eux  un  attache- 
ment fidelle,  et  de  ne  préférer  l'amitié  ni 
le  service  de  personne  au  leur. 

P.  28.  Lignes  3-6. 

Ce  n'estoit  pas  sans  doute,  pour 
paier  le  tribut,  que  les  Bretons  en- 
troient si  souvent  sur  les  terres  des 
Rois  de  France,  et  y  portoient  de 
tous  costez  le  feu^  le  fer  et  le  carnage. 

P.  zS.  Ligne  39.  —  Mais  que  ne 
peut  pas  l'amour  de  la  liberté  sur  un 
peuple  qui  n'a  jamais  servi  r 

P.  43.  Lignes  12  et  suivantes,  jus- 
qu'à la  42'  comprise. 

(Si    l'esprit    inquiet    d'Actard 

eust  pu  en  prendre  après  l'avoir  pro- 
curé aux  autres). 

(Actard  Evesque  de  Nantes  avoit 
été  eslevé  à   Tours.   Il   y   avoit  appris 


Les  mots  soulignés  sont  supprimés 
dans  le  carton. 


(^oique  leur  témoignage  ne  soit  pas 
entièrement  conforme  à  celui  du  Chan- 
celier du  Roiaume,  qui  estoit  présent 
à  l'action  ;  cependant,  comme  il  n'a 
point  fait  l'histoire  du  Roi,  mais  seu- 
lement d'un  particulier,  on  sera  plus 
porté  à  croire  qu'il  aura  obmis  des  cir- 
constances qui  n'estoient  pas  de  son 
sujet,  qu'à  se  persuader  que  ces  au- 
teurs les  aient  mventées  contre  la  vé- 
rité. 


Tous  les  autres  historiens  ne  se  sont 
jamais  avisé  d'apporter  d'autre  raison  des 
démêlez  qu'il  y  a  eu  entre  les  Rois  de 
France  ei  les  princes  Bretons,  que  les 
courses  des  Bretons  sur  les  terres  du 
Roïaume. 

Cette  ligne  est  supprimée  dans  le 
carton.  La  ligne  suivante  commence 
par  le  mot  Mais,  et  pour  le  reste,  les 
deux  paragraphes  sont  semblables. 


...  Si  ses  desseins  ambitieux  lui 
eussent  permis  de  jouir  tranquillement 
de  celui  qu'il  venoit  de  se  procurer. 

Il  avoit  dessein  de  se  faire  couron- 
ner Roi,  se  sentant  assez  puissant  pour 


440 


La  véritable  Histoire  de  Bretagne  de  Doin  Lobinean. 


que  l'Armorique,  selon  l'ancienne  dis- 
position des  Gaules,  estoit  de  la  troi- 
sième Lionnoise,  et  que  Tours  estant  la 
Métropole  de  cette  province,  les  Bre- 
tons établis  dans  l'Armorique  dévoient 
reconnoitre  l'Evesque  de  Tours  pour 
leur  métropolitain  légitime  et  naturel. 
Les  Bretons  raisonnoient  sur  d'autres 
principes,  comme  on  l'a  déjà  dit,  se 
faisoient  ordonner  les  uns  par  les  au- 
tres, et  n'assistoient  point  aux  Conciles 
de  Tours  ni  aux  autres  que  les  Rois 
de  France  convoquoient,  quoique  les 
Evesques  de  Rennes,  de  Vannes  et  de 
Nantes  y  assistassent  régulièrement. 

(Actard  (car  on  ne  peut  attribuer  à 
d'autres  qu'à  lui  d'avoir  réveillé  cette 
affaire  de  la  Métropole)  estoit  de  ces 
esprits  remuans  et  pleins  de  feu,  à  qui 
il  faut  sans  cesse  de  l'occupation  et  des 
affaires.  Il  n'eut  pas  plustôt  terminé 
celle  de  Lambert  qu'il  entreprit  celle 
de  la  Métropole.  Sa  qualité  de  média- 
teur de  la  paix  lui  avoit  donné  beau- 
coup d'entrée  à  la  cour  du  Prince  des 
Bretons;  il  s'aboucha  avec  les  Eves- 
ques du  pais,  et  les  pressa  si  vivement 
qu'à  la  réserve  de  celui  d'Alet,  il  en- 
traîna tous  les  autres  dans  son  parti, 
et  les  disposa  à  reconnoistre  l'Arche- 
vesque  de  Tours  pour  leur  Métropoli- 
tain). 

(Nominoé  n'apprit  qu'avec  chagrin 
les  intrigues  d'Actard.  Aussi,  dans  le 
dessein  qu'il  avoit  de  se  déclarer  contre 
la  France,  il  ne  pouvoit  rien  arriver  qui 
le  chagrinast  davantage  que  de  voir 
que  ses  Evesques  se  soumissent  volon- 
tairement à  un  prélat  du  Royaume. 
Pour  empescher  cette  union  qu'il  re- 
gardoit  comme  l'écueil  de  la  liberté  de 
sa  patrie,  il  prit  la  résolution  de 
déposer  les  Evesques  qui  y  avoient 
donné  les  mains,  de  restablir  celui  de 
Tréguer  ruiné  apparemment  par  les 
Normans,  d'en  ériger  un  nouveau  à 
Saint-Brieuc  ;  et  d'engager  le  Pape  à 
donner  à  l'filvesque  de  Dol  la  qualité 
d'Archevesqueet  de  Métropolitain  dans 
ses  Estats.  Cela  fait,  il  prétendoit  se 
faire  couronner  solennellement  Roi  par 
tous  les  prélats  bretons,  afin  de  les 
engager  par  une  action  d'un  aussi 
grand  éclat  à  soustenir  la  dignité  dont 
ils    lui    auroient    donné    les  marques, 


soustenir  l'éclat  de  ce  nom  ;  mais  il  ne 
le  pouvoit  faire  sans  le  concours  de 
l'autorité  Episcopale.  De  tous  les 
Evesques  de  la  province,  les  uns  dé- 
voient estre  naturellement  dans  les  in- 
térests  de  la  France,  parce  qu'ils  pou- 
voient  estre  redevables  au  Roi  de  leur 
élévation,  et  les  autres  aïant  reçu  leur 
ordination  de  l'Evesque  de  Tours,  le 
prince  Breton  devoit  supposer  qu'ils 
n'oseroient  pas  entreprendre  une  nou- 
veauté de  cette  nature  sans  le  consen- 
tement de  leur  Métropolitain,  qu'il  ne 
donneroit  jamais.  Cependant  une  céré- 
monie de  cette  conséquence  ne  se  pou- 
voit faire  que  de  concert  avec  tous  les 
Evesques.  Il  falloit  donc,  ou  les  gagner 
tous,  ou  trouver  un  moïen  de  chasser 
ceux  que  l'on  ne  pourroit  séduire.  La 
première  vo'ie  estoit  presque  impossible, 
pour  les  raisons  que  l'on  vient  de  dire, 
et  pariTii  ceux  qu'il  estoit  le  plus  diffi- 
cile de  gagner,  Actard,  Evesque  de 
Nantes  tenoit  sans  doute  le  premier 
lieu.  Ce  Prélat,  comme  on  en  peut  juger 
par  toute  sa  conduite,  estoit  de  ces 
esprits  remuans  et  pleins  de  feu  à  qui 
il  faut  sans  cesse  de  l'occupation  et  des 
affaires;  il  avoit  esté  élevé  à  Tours,  et 
il  s'y  estoit  parfaitement  instruit  des 
droits  du  Métropolitain  ;  à  la  moindre 
ouverture  qu'on  lui  eust  faite  des  des- 
seins de  Nominoé,  il  auroit  veu  que 
l'indépendance  que  ce  Prince  affectoit, 
entraîneroit  une  révolte  contre  la  Mé- 
tropole, aussi  bien  que  contre  la  Cou- 
ronne ;  il  n'y  auroit  jamais  donné  les 
mains,  et  se  seroit  servi  du  crédit  que 
ses  talens  et  sa  qualité  de  médiateur 
lui  avoient  donnez  tant  à  la  cour  du 
Roi  qu'à  celle  de  Nominoé,  pour  em- 
pescher que  ce  dernier  ne  vint  à  bout 
de  ses  desseins.  D'ailleurs  il  n'y  avoit 
pas  sujet  d'espérer  que  pendant  que  les 
Evesques  de  Bretagne  reconnoistroient 
pour  Métropolitain  un  Prélat  du 
Roiaunie,  la  nouvelle  souveraineté 
pcust  subsister  longtemps.  Il  falloit 
donc  rompre  cette  union  avant  toutes 
choses,  et  mettre  à  la  place  des  Eves- 
ques qui  avoient  receu  leur  ordination 
de  celui  de  Tours,  d'autres  Evesques 
qui  ne  fussent  redevables  de  leur  di- 
gnité qu'au  nouveau  Roi  qu'ils  couron- 
neroient,  et  faire  un  Archevesque  dans 


La  véritable  Histoire  de  Bretagne  de  Dom  Lobineau. 


44' 


comme  il  s'engagerait  en  les  recevant 
d'eux  à  les  maintenir  dans  l'indépen- 
dance qu'il  leur  auroit  procurée). 


P.  8j.  Ligne  19. 

...  très-jeune,  et  quand  il  tut  en  âge 
de  se  marier,  il  le  fit, 

P.  147.  Lignes  34-40. 

...  ;  et  la  pluspart  des  autres  articles 
estoient  ou  taussement  imputez,  ou  mal 
entendus.  Il  y  en  avoit  peu  qui  fussent 
de  lui  et  absolument  condamnables, 
encore  estoient-ils  peu  importans,  et 
lui  estoient  échapez  par  inadvertence 
et  par  précipitation.  Du  reste,  quand 
il  seroit  tombé  en  quelque  erreur  légère, 
pouvoit-on  douter  de  la  soumission  de 
son  esprit  à  l'autorité  de  l'Eglise;  et 
falloit-il,  pour  des  bagatelles,  s'achar- 
ner sur  un  homme  dont  le  savoir  eust 
esté  si  utile  au  public,  si  la  malice  de 
ses  ennemis  ne  lui  eust  envié  cet  avan- 
tage.? 

Page  212.  Lignes  20-30. 

...  aussi  bien,  pour  les  moindres 
bagatelles,  que  pour  les  sujets  les  plus 
importants.  La  moindre  révolte  contre 
leur  autorité,  la  m.oindre  infraction  de 
leurs  privilèges,  estoit  suivie  d'une 
excommunication  ;  manière  de  procéder 
d'autan^  plus  injuste,  qu'ils  s'estoient 
rendus  les  seuls  juges  de  ce  qui  les 
regardoit;  en  sorte  qu'ils  n'avoient 
presque  laissé  aux  tribunaux  séculiers 
d'autre  puissance  que  de  contraindre, 
par  le  glaive  temporel,  à  leur  faire 
satisfaction,  ceux  qu'ils  avoient  frappez 
du  glaive  spirituel;  sans  leur  donner  la 
liberté  d'examiner  si  leur  sentence 
estoit  juste,  avant  que  de  faire  droit  aux 
parties. 

Sans  chercher  ailleurs  des  exemples 
de  cette  conduite  des  puissances  ecclé- 
siastiques, on  se  contentera  de  rappor- 
ter ce  qui  s'est  passé  entre  le  clergé  et 
les  ducs  Pierre  Mauclercet  Jeanson  fils. 

Page  223.  Lignes  12-26. 

Ces  ordres  avoient  quelque  chose  de 


la  Province,  qui  sembloit  ne  pouvoir 
devenir  Roïaume,  à  moins  qu'elle  n'eust 
son  Métropolitain  particulier.  Mais  s'il 
n'avoit  pas  paru  aisé  au  Prince  bre- 
ton de  gagner  les  anciens  Evesques,  le 
dessein  de  les  déposer  n'estoit  pas 
moins  difficile  dans  l'exécution.  11  fal- 
loit  donner  quelque  prétexte,  de  peur 
qu'une  violence  ouverte  ne  rendist  cette 
entreprise  trop  odieuse  et  n'attirast  sur 
les  auteurs  les  foudres  de  l'Eglise. 

de  Quimper,  et  cela  ne  l'empescha  pas 
de  se  marier. 

...  ;  l'on  voit  que  parmi  les  autres  ar- 
ticles il  y  en  avoit  qui  estoient  ou  faus- 
sement imputez  ou  mal  entendus.  On 
ne  prétend  pas  au  reste  prendre  ici  la 
défense  d'Abailard  contre  un  grand 
saint  révéré  de  toute  l'Eglise,  et  contre 
un  Concile  dont  le  jugement  a  esté 
confirmé  par  le  Souverain  Pontife  ; 
mais  on  ne  peut  refuser  ce  témoignage 
à  la  vérité,  qu'Abailard  auroit  paru 
beaucoup  moins  coupable,  s'il  se  fust 
tait  moins  d'ennemis. 


...;  mais  on  ne  doit  pas  porter  le 
mesme  jugement  sur  le  sujet  de  ce  que 
l'on  vient  de  voir  par  rapport  à  l'An- 
gleterre. Il  estoit  juste  et  nécessaire  que 
les  Souverains  Pontifes  défendissent  par 
les  armes  spirituelles  un  Roïaume  qui 
s'estoit  soumis  à  eux  d'une  manière 
particulière  ;  et  c'estoit  un  grand  bien 
pour  toute  l'Eglise,  que  la  crainte  des 
excommunications  pust  empescher  l'in- 
vasion d'un  estât  si  considérable.  Les 
ditferens  de  Pierre  Mauclerc  et  de  son 
fils  avec  les  Ecclésiastiques  servent  en- 
core à  justifier  l'usage  que  ceux-cy 
faisoient  de  leur  autorité  ;  car  si  elle 
passoit  quelquefois  ses  justes  bornes, 
ceux  qui  la  vouloient  abatre  usoient 
souvent  trop  injustement  de  la  leur. 


Ces    ordres     estoient  si     rigoureux 


La  véritable  Histoire  de  Bretagne  de  Dom  Lobineau. 


442 

si  outré,  qu'il  est  à  croire  que  les  juges 
déléguez  du  S.  Siège  ne  voulurent  pas 
se  charger  de  les  exécuter  dans  toute 
leur  rigueur.  11  y  avoit  aussi  de  l'excez 
dans  les  plaintes  du  Clergé,  qui  faisoit 
passer  le  duc  pour  un  autre  Néron, 
sous  ombre  qu'il  avoit  entrepris  de 
réduire  dans  de  justes  bornes  l'excessive 
autorité  dont  ce  corps  s'estoit  emparé. 
11  est  vrai  que  le  Duc  estoit  violent 
dans  ses  manières,  qu'il  n'avoit  peut- 
estre  pas  assez  de  respect  pour  l'Eglise, 
et  qu'il  s'emparoit  sans  aucune  consi- 
dération de  ses  biens,  quand  il  en  avoit 
le  moindre  prétexte.  Mais  on  auroit  pu 
le  ménager  un  peu  d'avantage,  et  se 
servir  de  manières  plus  douces  et  plus 
raisonnables. 

Une  preuve  qu'il  n'en  vouloit  qu'à 
la  trop  grande  autorité  des  Ecclésias- 
tiques, et  point  du  tout  à  l'Eglise 
mesme,  c'est  que  l'on  a  trouvé  dans  lui 
la  mesme  facilité  que  dans  ses  prédé- 
cesseurs, pour  agréer  les  fondations, 
où  l'autorité  souveraine,  dont  il  estoit 
extrêmement  jaloux  n'estoit  point  in- 
téressée. Comme  il  paroistpar  celle  qui 
se  fit  à  Nantes,  de  son  consentement, 
dans  le  plus  fort  de  ses  démêlez  avec 
le  cierge,  cette  année  mesme. 

P.  299.  Lignes  28-33. 

...  il  fut  réglé  que  les  deniers  de 
Bretagne  peseroient  dix-neuf  sous  six 
deniers  au  marc  de  Paris,  et  les  mailles 
seize  sous  neuf  deniers  deux  oboles; 
et  les  deniers  de  Limoges  dix-neuf  sous 
deux  mailles  pour  l'aloi,  les  deniers  de 
Bretagne  dévoient  estre  de  seize  grains 
d'argent  Roïal,  et  les  mailles  de  trois 
deniers;  et  les  deniers  de  Limoges  de 
seize  grains. 

399.  Ligne  37. 

Rufflai  le  délia  incontinent  et  le  laissa 
aller. 

P.  442.  Lignes  33  et  34. 

...  de  Bretagne;  comme  le  nom  de 
Bretagne  et  ceux  de  VErminc  et  de 
l'Espy  se  donnoient  ordinairement  aux 
poursuivans  d'armes. 

P.  475.  Ligne  48-49. 

Le  Duc  trouvant  de  l'insolence  dans 
la  première  de  ces  propositions  et 

Ibid.  Ligne  55. 

...  estoit  le  Duc. 


qu'il  y  a  sujet  de  douter  que  les  juges 
déléguez  du  Saint-Siège  se  soient  servis 
de  toute  l'autorité  qui  leur  estoit  com- 
mise. Il  est  vrai  que  le  duc  estoit  vio- 
lent dans  ses  manières,  qu'il  n'avoit  pas 
assez  de  respect  pour  l'Eglise,  et  qu'il 
s'emparoit,  sans  aucune  considération, 
de  ses  biens,  quand  il  en  avoit  le  moin- 
dre prétexte;  mais  toutes  ses  préten- 
tions n'estoient  pas  égalen;ent  injustes, 
et  quand  on  le  regardoit  comme  un 
autre  Néron,  c'estoit  faire  de  lui  un 
portrait  qui  ne  lui  convenoit  pas. 

Pendant  qu'il  estoit  le  plus  occupé 
de  ses  démêlez  avec  les  Ecclésiastiques, 
les  Religieux  Dominicains  s'establirent 
à  Nantes. 


...  on  régla  les  deniers  de  Bretagne 
à  dix-neuf  sous  six  deniers  au  marc  de 
Paris,  et  les  mailles  à  seize  sous  neuf 
deniers  obole;  et  les  deniers  de  Limoges 
à  dix-neuf  sous  au  marc,  et  les  mailles 
à  seize  sous  neuf  deniers.  Pour  l'alloi, 
les  deniers  de  Bretagne  dévoient  estre 
de  trois  deniers  seize  grains  d'argent 
le  Roi,  et  les  mailles  de  trois  deniers, 
et  les  deniers  de  Limoges  de  trois  de- 
niers seize  grains. 

Le  païsan  se  trouva  incontinent 
délié,  et  Rufflai  le  laissa  aller. 

...  et  poursuivans  d'armes  de  Bre- 
tagne; aussi  bien  que  ceux  de  Bre- 
tagne et  ceux  de  VErminc  ei  de  VEspy. 


Le  duc  irrité  de  la  première  de  ces 
propositions,  et  trouvant 


il  estoit. 


La  véritable  Histoire  de  Bretagne  de  Dom  Lobineau.  443 

Tome  II.  — Preuves. 


Colonne  i.  Ligne  16. 

Les  deux  lettres  C.  M.  signifient 
apparemment  commuai  Moncta,  ce  qui 
revient  à  ce  qui  est  dit  ensuite  ex  stipe 
conlata,  c'est  à  dire  que  tous  les  mar- 
chands contribuèrent  à  l'érection  de  ce 
Tribunal  (La  construction  de  Locis 
est  assez  difficile  à  débrouiller;  car  il 
ne  paroist  pas  à  ceux  qui  ont  vu  l'ori- 
ginal, qu'il  y  ait  eu  rien  d'éfacé  que 
Pon  puisse  sous-entendre).  Il  paroist 
assez  évident  par  la  lecture  de  cette 
inscription,  qu'elle  estoit  destinée  pour 
un  Tribunal  et  non  pour  un  Autel;  et 
la  dédicace  que  Florus  et  Secundus  en 
font  aux  Empereurs  et  au  Dieu  Volien, 
ne  prouve  point  absolument  que  ce  fut 
un  autel. 

Col.  3.  Lignes  4-25. 

Les  deux  lettres  demi-effacées  P.  E. 
marquent,  ce  semble,  que  l'on  donnoit 
à  Victorin,  l'un  des  trente  Tirans,  la 
qualité  de  père  des  armées  Pater  Exer- 
cituum,  comme  on  appeloit  Victorine, 
sa  mère,  la  mère  des  armées  (Victorin 
avoit  esté  associé  à  la  souveraine  puis- 
sance par  Posthume,  et  tous  deux  de 
concert  avoient  opposé  leurs  armes  à 
Gallien  qui  estoit  venu  contr'eux  avec 
les  meilleures  troupes  de  l'Empire. 
Posthume  aïant  esté  tué  depuis  par 
ses  propres  soldats  à  cause  qu'il  leur 
avoit  refusé  le  sac  de  Mayence,  Lollien 
prit  sa  place  et  fut  tué  par  Victorin, 
à  qui  son  incontinence  attira  le  mesme 
sort:  il  fut  massacré  par  les  troupes  à 
Cologne,  avec  le  petit  Victorin  son  fils. 
Victorine  mère  du  Tiran  donna  ensuite 
l'Empire  des  Gaules  à  Marius  qui  ne 
le  tint  que  trois  jours,  et  puis  au  séna- 
teur Tetricus,  Président  des  Gaules  et 
son  parent,  lequel  après  la  mort  de 
Victorine  appella  l'Empereur  Aurélien 
à  son  secours,  et  se  démit  volontaire- 
ment de  l'Empire  entre  ses  mains,  ce 
qui  n'empescha  pas  Aurélien  d'orner 
son  triomphe  de  cet  illustre  captif. 

Colonne  6.  Lignes  3 1-54. 

On  peut  ajouter  ici  que  presque  tous 
les  mots  françois,  tant  anciens  que 
nouveaux,  dont  l'étimologie  n'est  pas 


....  Les  deux  lettres  C.  M.  sont 
apparemment  m:ses  là  pour  commimibus. 
Les  mots  :  ex  stite  [sic]  conlata,  font 
voir  que  les  Marchands  contribuèrent 
à  l'érection  de  ce  Tribunal.  Il  paroist 
assez  évident  par  la  lecture  de  cette 
inscription,  qu'elle  estoit  destinée  pour 
un  Tribunal,  et  non  pour  un  Autel;  et 
la  dédicace  que  Florus  et  Secundus  en 
font  aux  Empereurs  et  au  Dieu  Volien, 
ne  prouve  point  absolument  que  ce  fust 
un  autel. 


Les  deux  lettres  demi-effacées  P.  E, 
marquent,  ce  semble^  que  l'on  don- 
noit à  Victorin,  l'un  des  trente  Tirans, 
la  qualité  de  père  des  armées  Pater 
excrcituum.  Ce  n'est  pas  ici  le  lieu  de 
faire  le  détail  de  ce  qui  regarde  Vic- 
torin, et  l'on  ne  peut  conjecturer  à 
quelle  occasion  l'on  a  dressé  ce  monu- 
ment à  sa  mémoire.  Il  paroist  qu'il 
estoit  destiné  d'abord  pour  servir  de 
Milliare  ce  qui  semble  marqué  par  le 
mot  de  Lève  a. 


On  peut  ajouter  ici  que  presque  tous 
les  mots  françois,  tant  anciens  que 
nouveaux,  dont  l'étimologie  n'est  pas 

30 


444 


La  véritable  Histoire  de  Bretagne  de  Dom  Lobineau. 


latine  ou  germanique,  et  que  l'on  doit 
considérer  comme  des  restes  de  l'an- 
cienne Celtique; sont  Bretons,  comme: 
Accabler,  agraffe,  apprenti,  baratte, 
barguigner,  barril,  baron,  barre,  bas, 
hast,  baston,  bastard,  bec,  belette, 
bourse,  bateau,  (Vilain),  bière  (vic- 
tuaille),  blutter,  bottes,  bouton,  bouc, 
bouclier,  bran,  bruit,  broder,  brouët, 
croupion,  cabane  (camelot,  chapeau, 
corne  du  pied),  chat,  sangle  (clairon), 
cloche,  cotton,  cri,  crieur,  couppe, 
dague,  dard,  danser,  derechef  (débo- 
naire  ,  écuyer)  ,  (entamer  ,  étoffe), 
(faillir)  ferme  (pour  terre  à  la  campa- 
gne), flacon,  toi,  forest,  (forfait,  geôle), 
garant,  gourmand,  guimpe,  guérir, 
gonne  (ancien  mot  pour  robbe)  hanap, 
havre^,  hacquenée,  heaume,  hérauld, 
levain,  livrée,  lamproye,  mamam,  man- 
teau, marque,  marché,  matelas,  mo- 
quer, mortoise,  moustarde,  pavois, 
palefroi,  picquer,  pilier,  pisser,  planche, 
piastre,  propre  (pour  dire  net)  (le 
nom  qu'on  donne  aux  femmes  aban- 
données), rigole,  roder,  rostir,roussin, 
sain  (graisse  de  porc),  (simarre),  sire, 
tambour,  tarrière,  tetter,  tocque, 
trippes,  truand,  trompette,  trousse 
(pacquet),  tonneau  (yvre). 

Col.  7.  Lignes  23-25. 

Eclaircissement  sur  l'establissement 
de  la  Religion  Chrestienne  dans  l'isle 
de  Bretagne,  par  Dom  A.  Le  Gallois. 

Col.  76-79. 

Que  la  Bretagne  n'a  point  esté  don- 
née aux  Normans  de  Normandie. 


latine  ou  germanique,  et  que  l'on  doit 
considérer  comme  des  restes  de  l'an- 
cienne Celtique,  sont  bretons,  comme  .• 
Accabler,  agraffe,  amarrer  (pour  dire 
lier),  ampois,  andoùille,  apprenti,  balai, 
baratte,  barguigner,  barril,  baron, 
barre,  bas,  bast,  baston,  bastard,  bec, 
belette,  bourse,  bateau,  branler,  vilain, 
bière,  blutter,  bottes,  bouton,  bouc, 
bouclier,  bran,  branler,  braise,  briffer, 
bruit,  broder,  brouet,  caille,  croupion, 
cabanne,  chat,  sangle,  cloche,  cotton, 
cri,  crieur,  couppe,  dague,  dard,  dan- 
ser, derechef,  écharpe,  entamer,  étoffe, 
fange,  farce,  fardeau,  ferme  (pour  terre 
à  la  campagne),  flacon,  fol,  forest,  four- 
nir, garant,  gourmand,  guimpe,  guérir, 
golfe,  gonne  (ancien  mot  pour  robbe), 
haleine,  hanap,  havre,  hacquenée, 
heaume,  hérauld,  jarret,  levain,  livrée, 
lamproye,  manteau,  mareschal,  marque, 
moquer,  mortoise,  la  moue,  moustarde, 
pavois,  palefroi,  picquer,  pisser,  plan- 
che, piastre,  propre  (pour  dire  net) 
rebec  (pour  dire  violon),  rigole,  roder, 
rostir,  roussin,  sain  (graisse  de  porc), 
sire,  tambour,  tarrière,  tetter,  tocque, 
trippes,  truand,  trompette,  trousse 
(pacquet),  tonneau. 


Eclaircissement  sur  l'établissement 
de  la  Religion  Chrestienne  dans  l'isle 
de  Bretagne  et  sur  ses  premiers  saints, 
par  Dom  A.  Le  Gallois. 

Que  la  Bretagne  n'a  point  esté 
donnée  à  RoUon. 


La  légère  diflférence  des  titres  de  cette  dissertation  est  la  seule  qui 
existe  entre  les  textes  qui  la  composent  dans  les  deux  exemplaires.  Aussi 
nous  n'en  aurions  peut-être  pas  parlé  si  cette  dissertation  n'avait  elle- 
même  soulevé  contre  son  auteur  un  violent  et  périlleux  orage.  Qu'il  nous 
soit  encore  permis  de  reproduire  ici  un  passage  de  notre  article  Lobineau 
retraçant  les  diverses  phases  du  débat  auquel  elle  servit  de  prétexte.  Ce 
n'est  pas  le  moins  curieux  du  long  procès  fait  à  la  Bretagne,  et  dans 
lequel,  nous  le  verrons  plus  loin,  fut  impliqué  un  magistrat  de  la  Cour 
des  Comptes  de  Nantes,  non  moins  coupable  que  d'Argentré  et  Dom 
Lobineau. 

'■  Par  un  passage  de  son  Histoire,  p.  79,  et  par  une  Dissertation  insérée 


La  véritable  Histoire  de  Bretagne  de  Dom  Lobineau.  445 

dans  ses  Preuves,  col.  76-79,  Dom  Lobineau  avait  contesté  que  la 
Bretagne  eût  été  soumise  à  la  France  sous  la  première  dynastie^  et  que 
Charles-le-Simple  eût  concédé  à  la  Normandie  un  droit  de  suzeraineté 
sur  notre  province.  Ceci  —  qu'on  se  rappelle  la  date  de  l'Histoire  de 
Bretagne  (1707)  —  se  passait  sous  Louis  XIV,  qui  ne  tolérait  pas  les 
attaques  contre  son  pouvoir,  et  ne  laissait  pas  mettre  en  doute  qu'à 
toutes  les  époques  de  la  monarchie  l'autorité  royale  avait  été  centrale  et 
universelle.  Les  propositions  de  D.  Lobineau  résonnaient  d'autant  plus 
mal  sous  les  lambris  de  Versailles,  que  les  Bretons,  invoquant  les  privi- 
lèges qui  leur  avaient  été  reconnus,  lors  de  l'union  de  la.  province  à  la 
France,  s'agitaient  à  la  moindre  atteinte  dont  ils  les  croyaient  menacés. 
La  cour  de  France  ne  pouvait  donc  passer  condamnation  sur  des  asser- 
tions qui,  non  réduites  à  néant,  auraient  eu  pour  conséquence  d'atïaiblir 
son  principe  d'autorité.  Vertot  se  chargea  de  confondre  le  champion  de 
la  Bretagne.  Il  préluda  par  une  dissertation  qu'il  lut  à  l'Académie  des 
Inscriptions  et  Belles-Lettres,  et  qu'il  développa  ensuite  lorsqu'il  la 
publia  sous  ce  titre  :  Traité  historique  de  la  mouvance  de  Bretagne,  dans 
lequel  on  justifie  que  cette  province,  dès  le  commencement  de  la  monarchie 
française,  a  toujours  relevé  immédiatement,  et  en  arrière-fief  de  la  couronne 
de  France;  contre  ce  qu'en  a  écrit  le  P.  Lobineau,  dans  son  histoire  de 
Bretagne.  Paris,  Cot,  1710,-  in- 12.  Toutes  les  arguties,  toutes  les 
subtilités  possibles  sont  groupées,  habilement  d'ailleurs,  dans  ce  livre, 
pour  justifier  une  thèse  condamnée  par  toutes  les  autorités,  toutes  les 
traditions.  L'abbé  des  Thuileries,  comme  Normand,  se  crut  obligé  de 
porter  à  Vertot  le  secours  de  sa  Dissertation  sur  la  mouvance  de  la  Bretagne 
par  rapport  au  droit  que  les  Ducs  de  Normandie  y  prétendaient,  etc.  Paris, 
François  Fournier,  171 1,  in-12.  D.  Lobineau  riposta  à  ses  deux 
adversaires  par  sa  Réponse  au  Traité  de  la  mouvance,  etc.  Nantes, 
Jacques  Mareschal,  1712,  in-8  de  293  pp.  Ce  chef-d'œuvre  de  logique 
ne  convertit  pas  l'abbé  des  Thuileries  qui  reproduisit  ses  arguments  dans 
sa  Défense  des  Dissertations  sur  l'origine  de  la  maison  de  France  et  sur  la 
mouvance  de  la  Bretagne,  etc.  Paris,  Michel  Guignard,  etc.,  171 3,  in-12. 
Il  ne  voulut  pas  davantage  s'avouer  vaincu  par  la  réponse  que  lui  fit 
D.  Lobineau  dans  sa  Lettre  à  M.  de  Brilhac,  premier  Président  du  Parle- 
ment de  Bretagne,  etc.  Nantes,  Jacques  Mareschal,  1712,  in-8  de  29  p., 
car  il  revint  à  la  charge,  l'année  suivante,  dans  sa  Lettre  à  M.  l'abbé 
de  Vertot,  etc.  Paris,  171 1,  in-12. 

Après  ce  dernier  écrit  de  l'abbé  des  Thuileries,  la  lutte  cessa,  non 
certes  que  Lobineau  fut  le  moindrement  disposé  à  mettre  bas  les  armes. 
Convaincu  de  son  bon  droit,  et  très-peu  endurant  de  sa  nature,  il  n'au- 


446  La  véritable  Histoire  de  Bretagne  de  Dom  Lobineau. 

rait  pas  volontairement  abandonné  la  partie,  mais  ses  supérieurs,  se 
conformant  à  des  ordres  venus  de  haut,  lui  prescrivirent  le  silence.  La 
défense  était  si  absolue,  que  D,  Lobineau  ne  put  ou  n'osa  s'en  affran- 
chir, lorsque,  sept  ans  plus  tard,  l'abbé  de  Vertot  tenta  de  raviver  le 
débat  par  la  publication  de  son  Histoire  critique  de  l'établissement  des 
Bretons  dans  les  Gaules,  et  de  leur  dépendance  des  rois  de  France  et  des 
ducs  de  Normandie,  Paris,  Nyon,  1720,  2  vol.  in-12.  —  Ibid.  1730, 
2  vol.  in-12. 

Cette  publication,  œuvre  d'une  inqualifiable  rancune  (l'amour-propre 
d'un  auteur  battu  peut,  il  paraît,  mener  bien  loin),  cette  publication, 
disons-nous,  était  un  acte  odieux.  Vertot,  en  effet_,  avait  choisi,  pour 
rééditer  son  livre,  le  moment  même  où  la  participation  de  la  noblesse 
bretonne  à  l'échauffourée  de  Cellamare  avait  fait  tomber  les  têtes  de 
MM.  de  Pont-Kalleck,  du  Couédic,  de  Talhouët  et  de  Mont-Louis.  En 
rendant  D.  Lobineau  solidaire  des  faits  accomplis,  il  voulait  faire  peser 
sur  lui  la  vindicte  du  pouvoir  et  le  ressentiment  des  familles  des  condam- 
nés. Et  pour  qu'on  ne  se  méprît  pas  sur  son  but,  il  l'expliqua  lui-même 
dans  son  discours  préliminaire  (t.  II),  où  il  ne  craignit  pas  de  dire 
u  que  les  mouvements  qui  venaient  d'arriver  en  Bretagne,  et  qui,  par  la 
sagesse  du  gouvernement,  avaient  été  heureusement  arrêtés,  lui  avaient 
fait  naître  la  pensée  que  les  mauvais  desseins  de  quelques  Bretons 
étaient  peut-être  l'effet  d'anciennes  erreurs  où  ils  avaient  été  élevés  au 
sujet  des  rois  particuliers  et  des  privilèges  extraordinaires  de  cette  pro- 
vince. »  —  Puis  il  ajoutait  :  ^  Et  comme  les  histoires  même  de  cette 
nation  [lisez  :  l'histoire  de  D.  Lobineau]  ont  été  la  source  de  ces  préjugés, 
j'ai  cru  que  pour  calmer  les  esprits,  il  était  à  propos  de  les  désabuser  de 
ces  préventions  injustes,  puisées  dans  leurs  historîens.  »  Non  content 
de  transformer  D.  Lobineau  en  crîminel  d'État  dans  son  livre,  il  le 
dénonça  comme  tel  au  chancelier,  qui  eut  le  bon  esprit  de  ne  pas  lui 
donner  la  satisfaction  d'enfermer  D.  Lobineau  dans  une  étroite  prison  : 
Ce  dernier,  on  le  conçoit  du  reste,  était  réduit  à  se  taire. 

Col.  396.  Lignes  52-59. 

(Collationné   à  une    copie    ancienne  Tit.  de  Blein.  Copie  tirée  du  Cartu- 

tirée  du  Chasteau  de  Blein  et  repré-  laire  d'Alençon,   de   la  Chambre  des 

sentée  par  Pierre  Tafoireau,  sieur  de  Comptes  de  Paris,  cette  yyy.    Hévin 

La    Tour,  agent  de    Madame  la    du-  avoit  veu  l'original,  et  en  a  tiré  quel- 

chesse  de  Rohan,  ladite    collation   si-  ques  pièces.  Voyez  ce  qu'il  en  dit,  sur 

gnée  J.   Le  Jacobin,   du   Moulinet  et  les  Arrestsde  P>ain,  p.  525-530.  Nous 

Bodier  en  1673,  le  15  d'aoust).  L'ori-  avons  veu  l'inventaire  de  ce  cartulaire 

ginai  est  à  la  Chambre  des    Comptes  d'Alençon  qui  tait    mention  de  l'acte 

de  Paris,  cotté  yyy.  Voyez  Hévin  sur  que  l'on  vient  de  rapporter, 
les  Arrests  de  Frain,  T.  I,  p.  523-53 1. 


La  véritable  Histoire  de  Bretagne  de  Dom  Lobineau.  447 

On  avait  forcé  Dom  Lobineau  ou  à  dire  le  contraire  de  ce  qu'il 
pensait,  ou  à  se  taire.  C'est  ce  dernier  parti  que  l'on  prit,  sous  le 
Régent,  envers  le  magistrat  de  la  Cour  des  Comptes  de  Nantes,  dont  il 
a  été  parlé  précédemment.  Ce  magistrat  était  La  Gibonais,  dont  nous  ne 
saurions  trop  regretter  d'avoir  omis  de  parler  dans  notre  Biographie 
bretonne.  En  comblant  ici  cette  lacune,  nous  achèverons  de  faire  con- 
naître le  système  persistant  de  compression  qui  était  employé  à  l'égard 
des  écrivains  bretons  indépendants. 

La  Gibonais  i'Jean-Artur,  sieur  de),  né  à  Saint-Malo,  le  16  février 
1649,  ét^'t  f'is  de  M.  Julien  Artur,  sieur  de  Pontpacre,  et  neveu  de 
Jean  Cheville,  sieur  de  La  Gibonais,  chanoine  de  la  cathédrale  de  Saint- 
Malo,  lequel  fut  son  parrain,  et  lui  laissa  sa  terre  de  la  Gibonais,  en 
Trébivan,  terre  dont  il  prit  le  nom.  Il  fut  d'abord  destiné  à  l'état  ecclé- 
siastique. Après  avoir  terminé  ses  études,  il  prit  le  degré  de  bachelier  en 
théologie,  se  livra  plus  tard  à  l'étude  du  droit  et  s'y  voua  presque 
exclusivement.  Il  était  doyen  des  maîtres  de  la  Chambre  des  Comptes  de 
Nantes,  et  se  disposait  à  publier  une  réfutation  de  l'ouvrage  de  l'abbé 
de  Vertot  sur  la  Mouvance  de  Bretagne,  lorsqu'il  mourut  à  Paris,  au 
mois  de  janvier  1728.  C'était  un  magistrat  éclairé,  qui  connaissait  bien 
le  droit  public  de  la  province  de  Bretagne,  et  dont  la  vie  fut  une  cons- 
tante pratique  de  la  morale  chrétienne.  René  de  la  Bigotière  de 
Perchambault,  président  aux  enquêtes  du  Parlement  de  Bretagne,  ayant 
énoncé  dans  ses  divers  ouvrages,  à  propos  du  prêt  à  intérêt,  des 
maximes  que  plusieurs  jurisconsultes  trouvèrent  favorables  à  l'usure,  la 
Gibonais  les  réfuta  dans  un  livre  intitulé  :  De  l'usure,  interesî  et  profit 
que  l'on  tire  du  prest,  ou  l'ancienne  doctrine  sur  le  prest  usuraire,  opposée 
aux  nouvelles  opinions.  Paris,  1710.  in-12.  Cet  ouvrage  eut  beaucoup  de 
succès.  Si  l'auteur  n'y  répondit  pas  aux  principes  émis  par  la  Bigotière 
et  ses  partisans,  ce  fut  parce  qu'il  le  jugea  superflu,  la  faculté  de  théo- 
logie de  Nantes  les  ayant  déjà  condamnées.  On  a  encore  de  La 
Gibonais  :  I.  Maximes  pour  conserver  l'union  dans  les  Compagnies. 
Nantes,  17 14,  in-8.  Il  n'avait  d'abord  écrit  que  pour  son  instruction 
particulière  les  réflexions  solides  que  renferme  cet  ouvrage  ;  mais  les 
regardant  ensuite  comme  étant  d'une  utilité  générale,  il  se  décida  à  les 
publier  ;  on  y  trouve  des  portraits  ou  caractères  tracés  sans  aucune  vue 
d'application  personnelle  ;  la  troisième  partie  traite  des  devoirs  particu- 
liers aux  magistrats.  II  Recueil  des  édits,  ordonnances  et  règlements  con- 
cernant les  fonctions  ordinaires  de  la  Chambre  des  Comptes  de  Bretagne,  tiré 
des  titres  originaux  estant  au  dépostde  ladite  Chambre,  divisé  en  quatre  parties 
et  mis  en  ordre  suivant  la  nature  des  matières.  Respice  quoniam  non  mihi 
soli  laboravi,  sed  et  omnibus  exquirentibus  disciplinam.    Ecclesiastici, 


448  La  véritable  Histoire  de  Bretagne  de  Dom  Lobineau. 

cap.  yy.  A  Nantes,  de  P imprimerie  de  la  veuve  d'André  Querro,  imprimeur 
ordinaire  du  Roy  et  de  Nosseigneurs  delà  Cliambre  des  Comptes  de  Bretagne, 
au  Saint-Augustin,  Grand'-rue,  mdccxxiii,  par  privilège  du  Roy,  suivi  de  : 
Succession  chronologique  des  ducs  de  Bretagne  avec  quelques  observations  et 
faits  principaux.  A  Nantes  (ut  supra)  mdccxxx,  in-f"  et  iii-8. 

La  publication  du  Recueil  et  de  la  Succession  chronologique  fut  entravée 
par  le  gouvernement  du  Régent,  ardent  à  contenir  ou  à  réprimer  l'esprit 
d'indépendance  qui  cherchait  toutes  les  occasions  de  se  produire  en 
Bretagne,  et  que  MM.  de  Pont-Kalleck,  de  Mont-Louis,  de  Talhouët  et 
Du  Couédic  avaient  payé  de  leur  tête  en  1720.  Les  deux  ouvrages  de  La 
Gibonais  étaient  une  revendication  des  privilèges  et  des  immunités  dont 
la  Bretagne  devait  jouir  en  vertu  de  son  contrat  d'union  à  la  France.  La 
Chambre  des  Comptes,  qui  partageait  les  idées  et  les  principes  de  l'auteur, 
l'avait  encouragé  et  même  approuvé  dans  son  entreprise.  Les  faits  qui 
se  passèrent  à  cette  occasion  exigent  quelques  développements  qui 
feront  connaître  de  quels  moyens  usait  le  pouvoir  central  de  l'époque 
pour  empêcher  le  contrôle  de  ses  actes  et  de  ses  empiétements  sur  les 
franchises  de  la  province.  Environ  trente  pièces  déposées  aux  Archives 
de  la  mairie  de  Nantes  attestent  l'importance  que  la  Cour  attachait  à  ce 
que  ces  deux  livres  ne  parussent  pas,  ou  que  du  moins  ils  ne  parussent 
qu'après  avoir  subi  des  mutilations  qui  les  auraient  appropriés  à  ses 
prétentions  autoritaires.  C'est  de  ces  pièces  que  nous  extrayons  les 
détails  suivants. 

Conformément  aux  ordres  qui  lui  avaient  été  expédiés  de  Paris,  le 
14  septembre  1723,  M.  Paul  Esprit  de  Feydeau  de  Brou,  Intendant  de 
Bretagne,  prescrivit,  le  20  du  même  mois,  à  M.  Mellier,  maire  de 
Nantes,  de  faire  saisir  chez  Querro  «  toutes  ses  presses  et  deux  manus- 
crits avec  toutes  feuilles  imprimées  concernant  deux  ouvrages  qu'il 
imprime  sans  permission,  l'un  contenant  plusieurs  lettres-patentes,  édits, 
déclarations  et  règlements  concernant  les  finances  en  la  Chambre  des 
Comptes  de  Nantes,  avec  des  dissertations  sur  la  même  matière,  et 
l'autre  une  histoire  de  Bretagne  par  ordre  chronologique.  »  Il  était  en 
outre  enjoint  d'adresser  les  manuscrits  à  Rennes,  eu,  à  défaut,  les  feuilles 
imprimées,  pour  que  le  tout  pût  être  transmis  au  Garde  des  Sceaux. 

Docile  exécuteur  des  ordres  de  l'Intendant,  M.  Mellier  se  transporta 
de  sa  personne,  le  22  septembre,  à  l'imprimerie  de  Querro,  et  se  fit 
accompagner  d'un  greffier,  d'un  huissier  et  deux  recors.  Après  qu'il  eut 
fait  prêter  à  Querro  le  serment  de  dire  la  vérité,  ce  dernier  lui  déclara 
que  sa  mère,  la  veuve  Querro,  avait  imprimé,  il  y  avait  trois  ans,  plu- 
sieurs feuilles  du  Recueil  des  Edits  ;  que,  depuis  environ  un  an,  il  avait 
lui-même  continué  cette  impression  jusqu'à  concurrence  de  deux  volumes 


La  véritable  Histoire  de  Bretagne  de  Dom  Lobineau.  449 

in-folio,  dont  cent  vingt  exemplaires  en  feuilles  étaient  en  dépôt  dans  un 
magasin,  au  second  étage  de  la  maison  de  l'Empereur,  rue  de  la  Gaudine; 
qu'il  avait  aussi  imprimé  deux  éditions  d'une  Histoire  de  Bretagne,  l'une 
in-folio,  pour  être  jointe  au  Recueil  des  Edits,  l'autre  in-8  pour  Messieurs 
de  la  Chambre  des  Comptes,  et  que  ces  deux  éditions,  tirées  à  onze  cents 
exemplaires  étaient  dans  le  magasin  précédemment  indiqué.  Il  ajouta 
que  M.  de  la  Gibonais,  doyen  et  maître  de  la  Chambre  des  Comptes,  s'était 
prévalu  auprès  de  lui  de  l'autorisation  des  officiers  de  cette  Chambre,  et 
qu'il  retenait  les  manuscrits  après  avoir  fait  ses  corrections  sur  les 
épreuves;  qu'il  n'avait  connaissance  d'aucun  privilège  du  Roi  autorisant 
l'impression,  mais  qu'il  savait  que  sa  mère,  absente  de  Nantes  en  ce 
moment,  avait  souscrit,  en  1720,  un  acte  double,  dans  lequel  Messieurs 
de  la  Chambre  s'étaient  engagés  à  obtenir  du  Roi  un  privilège  qu'ils  lui 
auraient  transféré.  La  Gibonais  écrivait  très-incorrectement,  et  il  avait 
composé  ses  ouvrages  sur  des  feuilles  volantes,  surchargées  de  transpo- 
sitions et  de  ratures,  ce  qui  avait  empêché  l'envoi  du  manuscrit  à 
l'examen  de  M.  le  Garde  des  Sceaux,  et  déterminé  MM.  de  la  Chambre 
à  le  faire  imprimer  pour  qu'il  pût  lui  être  adressé,  et  qu'il  avait  été 
convenu  que  M"""-  Querro  serait  garantie  de  toute  perte,  dommage  ou 
inconvénient.  Enfin  Querro  déclara  se  souvenir  qu'il  avait  été  délivré 
environ  trente  exemplaires  du  Recueil  des  Edits,  mais  un  seulement  de  la 
Succession  chronologique,  qui  avait  été  envoyé  au  Conseil,  à  Paris,  pour 
en  obtenir  le  privilège. 

Après  qu'on  eut  fait  l'inventaire  de  l'imprimerie  renfermant  trois 
presses,  dix-huit  casses  dressées  faisant  trente-six  hauts  et  bas,  et  les 
ustensiles  accessoires,  M.  Mellier  la  ferma,  apposa  son  cachet  sur  la 
serrure  et  remit  la  clef  au  greffier.  S'étant  ensuite  transporté  dans  le 
magasin  qu'avait  indiqué  Querro,  il  y  prit  deux  exemplaires  de  la 
Succession  chronologique,  in-folio,  et  comme  ils  portaient  sur  le  titre  les 
mots  par  privilège,  il  interpella  à  ce  sujet  Querro  qui  lui  répondit  les 
avoir  mis  dans  la  persuasion  que  MM.  de  la  Chambre  obtiendraient  le 
privilège  qui  aurait  été  placé  à  la  fin  de  l'ouvrage.  Deux  exemplaires 
de  l'édition  in-8  et  deux  du  Recueil  des  Edits  furent  en  outre  emportés 
par  M.  Mellier  qui  apposa  les  scellés  sur  la  porte. 

On  ne  s'en  tint  pas  là  à  l'égard  de  Querro.  Il  fut  conduit  en  prison  et 
il  y  resta  jusqu'au  8  octobre  1723.  La  veille,  l'intendant  avait  écrit  à 
à  M.  Mellier  que  le  Garde  des  Sceaux  lui  avait  fait  savoir  «  que  s'il 
usait  de  toute  la  rigueur  de  la  loy,  il  ferait  mettre  au  pilon  l'édition 
entière  des  deux  ouvrages,  et  qu'il  interdjroit  pour  toujours  l'imprimeur 
(M"'-  Querro)  de  sa  profession,  mais  que  cependant  le  grand  âge  de  cet 
officier  et  ses  services  l'avaient  engagé  à  traiter  l'affaire  avec  plus  de 


450  La  véritable  Histoire  de  Bretagne  de  Dom  Lobineau. 

douceur.  »  C'est,  en  vertu  de  cette  lettre  que  l'intendant  avait  ordonné 
la  mise  en  liberté  de  Querro,  à  la  condition  toutefois  «  qu'il  paierait  son 
giste  et  geolage  jusqu'au  jour  de  sa  sortie  et  autres  frais  de  son  empri- 
sonnement. »  Cet  emprisonnement  cessa  le  8  octobre,  et  Querro  eut  à 
payer  une  somme  de  7  1.  10  s. 

Aussitôt  après  la  saisie  des  livres  incriminés,  M.  Mellier  les  remit  à 
l'Intendant  qui,  lui,  les  transmit  au  Garde  des  Sceaux.  Ce  dernier  en 
confia  l'examen  à  M.  Rassicord,  censeur  royal  et  bâtonnier  de  l'ordre 
des  avocats  à  Paris.  Le  long  travail  auquel  se  livra  ce  censeur  conclut 
au  remplacement  par  des  cartons  de  toutes  les  feuilles  qu'il  avait  corri- 
gées dans  les  quatre  parties  de  l'ouvrage  de  La  Gibonais.  En  exécution 
de  l'ordre  intimé  par  M.  Mellier,  le  10  novembre,  on  commença  l'im- 
pression et  le  placement  des  cartons.  Les  pages  242,  243,  249  et  25 1  de 
la  première  partie  furent  remplacées.  La  seconde  partie  n'eut  à  subir 
aucun  changement.  Querro  annonça  alors  que  La  Gibonais  ferait 
rentrer  tous  les  exemplaires  délivrés  pour  qu'ils  fussent  également 
corrigés.  Le  15  décembre  1723,  les  cartons  ayant  été  placés  dans  la 
première  partie,  M.  Mellier  remit  la  troisième  à  Querro  qui  fit  corriger 
les  pages  199,  294,  29$,  299  et  supprimer  les  pages  300,  301  et  302. 
Dans  la  quatrième  partie,  qui  fut  remise  le  5  janvier  1724,  des  cartons 
remplacèrent  les  pages  1 ,  2 ,  8,  9,  15,  18,  19,  23,  36,  37,  49,  62,83, 
ICI,  113,  114,  119,  120,  127  et  les  pages  38  à  48  furent  supprimées. 

Ce  travail  terminé,  M.  Mellier  transmet  à  Querro,  le  16  août  1724, 
l'ordre  de  M.  de  Brou  de  ne  rien  délivrer  à  La  Gibonais  avant  que 
l'Intendant  fût  revenu  en  Bretagne  et  se  fût  assuré  par  lui-même  si  les 
corrections  prescrites  avaient  été  opérées.  Toutes  les  feuilles  retranchées 
furent  brûlées  en  présence  de  Messire  Mathieu  Gautron  de  la  Bâte, 
abbé  de  la  Vieuville,  prêtre,  chanoine  et  grand  vicaire  de  Nantes,  que 
le  Garde  des  Sceaux  avait  nommé  inspecteur  de  la  librairie  à  Nantes. 
L'abbé  de  la  Vieuville  prit  ensuite,  au  hasard,  un  des  exemplaires 
corrigés  et  après  s'être  assuré  qu'il  l'était  bien,  il  le  remit  à  Guillaume 
Cors,  marchand  libraire  et  syndic  de  sa  communauté  qu'il  chargea 
de  vérifier  si  les  autres  exemplaires  étaient  conformes.  Cors,  après  avoir 
prêté  entre  les  mains  de  M.  Mellier  le  serment  de  s'acquitter  conscien- 
cieusement de  sa  charge,  se  mit  à  l'œuvre  le  lendemain,  et  ne  termina  son 
opération  que  le  25  juillet  suivant.  Il  avait  examiné  116  exemplaires 
Contenant  464  pages  sur  chacune  desquelles  il  avait  apposé,  à  la  cire 
rouge  d'Espagne,  son  cachet  représentant  un  cœur  enflammé  entouré  de 
onze  flèches  avec  cette  devise  :^  Une  seule  me  touche. 

P.  Levot. 


MÉLANGES, 


TEUTATES. 


L'intime  relation  qui  existe  entre  la  langue  latine  et  le  gaulois  me  fait 
croire  qu'il  peut  n'être  pas  trop  téméraire  de  proposer  l'explication  du 
nom  du  Dieu  gaulois  Teutates  par  les  règles  qui  ont  présidé  à  la  for- 
mation des  mots  dans  la  langue  latine. 

Dans  les  vers  de  Lucain  : 

Et  quibus  immitis  placatur  sanguine  diro 
Teutates,  horrensque  feris  altaribus  Hesus  (Aesus). 

Teutates  donne  trois  syllabes  longues.  Je  suppose  cependant  que  la 
voyelle  de  la  dernière  syllabe  est  un  /  bref  primitif. 

M.  Corssen  {Aussprache^,  t.  ii,  p.  227-230)  a  relevé  plusieurs  exem- 
ples de  l'emploi  d'^  pour  /  dans  la  dernière  syllabe  de  quelques  thèmes 
en  i  à  l'époque  classique  de  la  langue  latine:  torques,  fêles,  valles,  verres, 
aedes,  corbes,  puppes,  fides,  apes,  claves,  rates,  pour  torquis,  felis,  vallis, 
verris,  aedis,  corbis,  puppis,  fidis,  apis,  clavis,  ratis. 

La  seconde  syllabe  de  valles  ==  vallis  est  longue  dans  V Enéide,  Vivre  xi, 
V.  522  ;  c'est  une  faute  de  quantité,  mais  cette  faute  s'explique  par  l'ana- 
logie apparente  de  la  désinence  es  de  valles,  avec  la  désinence  étymolo- 
giquement  longue  de  clades  =  dad-as-s,  sedes  =  sad-as-s,  caedes  = 
caed-as-s,    nubes  =  nub-as-s. 

Il  n'y  a  donc  pas  à  s'étonner  si  Lucain  a  fait  longue  la  seconde  syl- 
labe de  Teutates  =  Teutatis. 

M.  Corssen,  Kritische  Nachtrsge,  p.  248,  a  signalé  l'existence  du 
suffixe  â-ti,  dans  les  formations  prim-a-ti-s,  optim-a-ti-s ,  et  dans  des  noms 
de  peuples  comme  Arpin-a-ti-s,  Capen-a-ti-s,  Arde-a-ti-s.  On  peut  y 
ajouter  Menâtes  avec  un  /  =  e  dans  la  dernière  syllabe,  Kritische  Bei- 
tr£ge,  p.  ^6^-^66. 

La  plupart  des  noms  terminés  par  le  suffixe  â-ti  ont  perdu  les  deux 
lettres  //  au  nominatif  singulier,  mais  nous  sommes  en  droit  de  restituer 


452  Mélanges. 

ces  deux  lettres  dans  :  siitnina[ti]s,  infima[îi]s,  pena[ti]s,  nostra[ii]s,  ves- 
irci[ti]s,  cuja[îi]s,  anîia[îi]s,  anxura[ti]s,  casina[li]s,  etc.  (Corssen,  Aus- 
sprache,  2^  édition,  t.  11,  p.  598). 

Des  noms  de  peuples  latins  qui  terminent  cette  liste,  on  peut  rappro- 
cher un  certain  nombre  de  noms  gaulois. 

On  trouve  réunis  dans  la  Gr.  C^,  p.  796-797,  plusieurs  noms  gau- 
lois terminés  par  le  suffixe  ati-,  ou  par  le  surfixe  aîo.  M.  Ebel  n'a  rien 
changé  au  système  suivi  par  Zeuss  dans  leur  classement,  et,  à  l'excep- 
tion de  deux,  les  a  tous  placés  dans  la  liste  des  noms  formés  à  l'aide  de 
suffixes  brefs  dont  la  lettre  /  fournit  le  principal  élément. 

Cependant  1'^  du  suffixe  était  long  dans  une  partie  de  ces  noms,  — 
les  lois  de  l'accentuation  le  prouvent.  —  Tels  sont  Cerate,  aujourd'hui 
Géré;  Brivatis,  aujourd'hui  Brioude.  A  ces  noms  cités  par  conséquent 
à  tort  comme  exemples  de  suffixe  bref  dans  la  Gr.  C  2,  on  peut  ajouter, 
toujours  en  s'appuyant  sur  les  lois  de  l'accentuation  :  Carpentorate,  Car- 
pentras,  Curcionaîis,  Coussenas,  Marciolatis,  MarsoUat,  Condaîe,  Condal, 
Condé,  cités  par  Quicherat,  de  la  formation  française  des  noms  de  lieu,  p. 
42,  et  Vasates,  Bazas. 

Il  y  avait  toutefois  un  suffixe  gaulois  ati  par  à  bref  puisque  Condate 
a  donné  à  la  géographie  française  des  noms  de  lieu  comme  Condes  et 
Cosne  (Quicherat,  ibid.,  p.  45  ).  Comparez  le  suffixe  latin  -es,  -itis  pour 
â-ti-s  si  savamment  étudié  par  M.  Corssen  (Aussprache  2,  11,  209-21 1). 

Nous  ne  pouvons  donc  savoir  avec  certitude  si  nous  devons  rattacher 
au  suffixe  ati  par  â  long  ou  au  suffixe  ati  par  a  bref,  les  nombreux  noms 
gaulois  terminés  en  atis  au  nominatif  singulier,  en  ates  au  nominatif  plu- 
riel, que  MM.  Becker  et  Pictet  ont  réunis  et  rapprochés  de  l'adjectif 
namausatis  {Beitr<£gc,  t.  m,  p.  419-420,  cf.  'Revue  archéologique,  nouvelle 
série,  t.  xv,  année  1867,  p.  ^87).  Cependant,  si  l'on  en  juge  par  les 
exemples  que  nous  avons  cités,  un  certain  nombre  doit  s'expliquer  par 
le  suffixe  âti. 

Le  suffixe  ati,  en  latin  -iti,  -it,  doit  son  origine  à  la  combinaison  de  Va 
final  de  thèmes  en  a  bref  avec  le  suffixe  //  (cf.  Schleicher,  Compcndium, 
2"--  éd.,  p.  450  et  suivantes). 

D'où  vient  Va  long  du  suffixe  ati  dans  les  noms  latins  dont  nous  avons 
parlé  plus  haut  ? 

Ces  noms,  dit  M.  Corssen,  s'expliquent  par  des  verbes  nominatifs  de 
la  conjugaison  en<3,non  pas  que  tous  ces  noms  aient  été  précédés  par  des 
verbes  dénominatifs,  mais,  en  ce  sens,  que  les  plus  anciens  sont  issus 
de  verbes  dénominatifs,  et  qu'une  fois  le  suffixe  ati  formé,  il  s'est  em- 
ployé en  des  circonstances  où  aucun  verbe  dénominatif  ne  déterminait 


Mélanges.  45? 

l'adjonction  de  ce  suffixe  au  thème  primitif  [Kritische  Naclitmge,  p.  248- 
249. 

TeutâtJs=i  îeuiatis  peut  donc  être  dérivé  du  thème  tcuto  par  l'interven- 
tion réelle  ou  idéale  d'un  verbe  dénominatif  dont  le  thème  était  teiitâ. 
M.  Stokes  dans  sa  savante  étude  sur  le  verbe  irlandais  a  constaté  l'exis- 
tence de  verbes  ena  dans  le  celtique  primitif  (Beiir.,t.  vi,  p.  365). 

Primaîis  de  prlmare  veut  dire  «  celui  qui  prime,  »  celui  qui  a  la  qualité 
d'être  primus.  Teuîates,teutatis,àénvé  d'un  verbe  qui,  s'il  avait  existé  en 
latin  aurait  fait  îeutare,  Mare  à  l'infinitif,  signifierait  :  celui  qui  a  la  qualité 
désignée  par  Padjectif  ou  le  substantif  Teuto-s.  Le  thème  teuto  de  teiitos 
existe  en  gaulois,  dans  les  composés  Teuto-maîus,  nom  d'un  roi  des 
Nitiobriges  (César  de  Bello  Galllco,  vu,  ^1,46;  Teuto-bodiaci,  nom  d'un 
peuple  de  la  Galatie  (Pline,  Hisî.  Nat.,  v.  32),  voir  Gr.  c^,  p.  34. 

Que  veut  dire  leutos^ 

Teiitos  est  dérivé  de  la  racine  TU  «croître  »  «  grandir,»  (Pott,  W'urzel- 
IVœrterbuch,  n"  265,  Etymologische  Forsclmngen,  i""  édit.,  t.  iv,  p.  793) 
au  moyen  du  guna  et  du  suffixe  -la-  qui  sert  ordinairement  à  former  des 
participes  passés  passifs  (Schleicher,  Compendiiim^,p.  426),  et  quelque- 
fois des  substantifs  ayant  un  sens  analogue  à  celui  du  participe  présent 
actif  (ibid.,  p.  436).  Il  semble  donc  que  teuîos  devrait  signifier  «  celui  qui 
s'est  accru,  »  «  celui  qui  s'est  agrandi,  »  «  le  fort,  »  «  le  grand,  »  «  le 
puissant.  » 

A  côté  du  thème  îeuto,  il  existe  un  autre  thème  gaulois  qui  lui  res- 
semble beaucoup,  c'est  le  thème  toiito,  qui  ne  diffère  du  premier  que 
parce  que  la  racine  tu  paraît  être  élevée  à  la  vriddhi  dans  toiito,  tandis 
qu'elle  est  élevée  seulement  au  guna  dans  teuto.  M.  Becker  (Beitrdge,  m, 
192),  a  donné  un  recueil  d'exemples  du  thème  touto  et  de  ses  dérivés^, 
d'après  les  inscriptions  et  les  monnaies  gauloises  et  gallo-romaines. 
L'identité  des  deux  thèmes  paraît  avec  raison,  ce  semble,  démontrée  à 
M.  Stokes  {Beitr£ge,  11,  107-108).  Le  grec  a  échappé  à  la  confusion  des 
diphthongues  eu  et  ou  (Schleicher,  Compendium  ^,  p.  68-69).  Mais  en 
latin  et  en  osque,  Ve  de  la  diphthongue  eu  s'assimilant  à  Vu  suivant  s'est 
changé  en  0  (Schleicher  Compendium  2,  p.  93,  1 1 1)  et  la  diphthongue 
ou  s'est  finalement  transformée  en  u  ou  en  0.  Le  même  phénomène  paraît 
s'être  produit  dans  les  langues  celtiques  (Gr.  C.^,  34-35. 

Touto  ne  serait  donc  qu'une  forme  secondaire  de  îeuto,  et  aurait  la 
même  valeur  étymologique;  on  rencontre  la  forme  tuto  et  pourrait 
trouver  aussi  toîo. 

La  forme  féminine  du  thème  teuto=touto-  s'est  conservée  dans  les  lan- 
gues néo-celtiques  :  tud,  en  breton-armoricain  ;  tus,  en  comique  ;  tuatli, 


4^4  Mélanges. 

en  irlandais,  sont  des  déformations  d'un  primitif  '  tota  '  tonta  '  tenta,  ils 
veulent  dire  «  gens,  «  <(  peuple.  »  Teuta  est  identique  au  nom  osque- 
sabin  et  ombrien  de  la  «  cité  :  »  tauta,  touta,  tuta,  tota  (Corssen,  Aus- 
prache^  t.  i,  p.  371)  et  au  gothique  thiuda,  «  peuple.  » 

Teuto-  et  touto-  sont  des  formes  masculines  du  celtique  *  tota,  «  peu- 
ple, ))  ((  gens,  »  de  l'italique  tauta,  touta,  tuta,  tota,  «  cité,  »  du  germa- 
nique thiuda  «  peuple  '.  »  Le  sens  de  «  peuple,  »  «  gens,  »  «  cité  «  n'est 
pas  pour  le  nom  féminin  un  sens  primitif;  le  sens  primitif  est  «  celle  qui 
s'est  accrue,  »  «  qui  s^est  agrandie,  «  «  qui  est  devenue  et  qui  est  puis- 
sante. »  Teuto-  serait  donc  comme  nous  l'avons  déjà  dit  «  celui  qui 
s'est  accru,  «  «  qui  s'est  agrandi,  »  «  le  fort,  »  «  le  puissant,  «  et  Teu- 
taîes,  teutatis  dérivé  de  teuto  aurait  une  signification  analogue.  Le  sens  de 
primas,  à'optimas,  pour  primatis  optimatis,  diffère  peu  de  celui  de  primus, 
à'optimus. 

Mais  au  lieu  de  recourir  à  l'interventiondu  thème  masculin  feufo=/ou/o, 
pour  nous  rendre  compte  de  la  formation  du  nom  divin  Tentâtes,  peut- 
être  devrions-nous  faire  dériver  ce  nom  du  thème  féminin  '  teuta  =  touta 
=  tota  =  tuath  =■  tud. 

Dans  ce  cas,  on  pourrait  comparer  le  sens  du  suffixe  gaulois  -ati-s, 
dans  Tentâtes,  avec  celui  du  même  suffixe  en  latin  dans  les  adjectifs  géo- 
graphiques Arpin-a-ti-s  d'Arpinum,  Arde-a-ti-s  à'Ardea.  Tentâtes  serait  le 
Dieu  qui  a  rapport  à  la  cité,  au  peuple,  considéré  comme  groupe  poli- 
tique; Tentâtes  aurait  été  un  Dieu  «  national.  » 

Quoi  qu'il  en  soit,  on  ne  peut  considérer  Tentâtes,  teutatis  comme  un 
nom  abstrait,  le  supposer  formé  au  moyen  du  suffixe  -tati-.  Ce  suffixe  est 
secondaire,  ne  se  juxtapose  pas  immédiatement  à  la  racine,  ne  se  place 
qu'à  la  suite  d'un  thème  déjà  formé  et  composé  d'une  racine  et  d'un 
suffixe.  Tels  sont  en  latin  duri-tas  dnritatis,  anxie-tas  anxie-tatis,  etc. 
(Schleicher,  Compendinm  ^,  p.  441).  Ce  serait  violer  une  loi  grammaticale 
certaine  que  de  comparer  Tentâtes  aux  dieux  abstraits  des  Romains 
comme  Libertas,  Félicitas,  Pietas,  ^quitas  (Preller,  Les  Dieux  de  l'ancienne 
Rome,  trad.  de  Dietz,  2"  édit.,  p.  412,  41 3,  418,  420). 

Un  nom  divin  de  Rome  qui  peut  se  mettre  en  regard  de  Tentâtes,  est 
celui  des  Pénates. 

La  racine  est  différente  :  tu,  «  croître,  »  «  grandir,  »  dans  Tentâtes, 
PA,  «  protéger,  «  «  nourrir,  «  dans  Pénates.  Elle  est  élevée  au  guna  dans 
Tentâtes,  elle  reste  sans  renforcement  dans  Pénates  ;  mais  Pénates  dérive 
du  thème  peno-,  qui  pourrait  être  un  participe  passé  passif,  de  la  racine 

I.  U  n'y  a  vraisemblablement  pas  de  rapport  entre  ce  thème  et  le  latin  totus,  dont  la 
racine  paraît  être  le  pronom  ta;  cf.  Fick,  Zeitschrift  de  Kuhn,  t.  XXl,  p.  10. 


Mélanges.  455 

verbale  pa,  comme  teuto-  un  participe  passé  passif  de  la  racine  verbale 
TU.  Le  suffixe  -na-,  -no-,  qui  sert  à  former  des  participes  passés  passifs 
(Schleicher,  Compendium  ^,  p.  429)^  est  aussi  employé  comme  le  suffixe 
-ta-,  -îo-  à  former  des  noms  qui  ont  un  sens  analogue  à  celui  du  parti- 
cipe présent  actif  :  penus  =  pe-no-s  signifie  donc  en  latin  «  nourriture,  « 
«  provisions  de  bouche,  «  à  proprement  parler  «  nourrissant,  »  et  de 
penus  est  dérivé  au  moyen  du  suffixe  ati-s,  le  nom  des  Pénates,  qui  sont 
les  dieux  des  provisions  de  bouche,  (Preller,  ibid.,  p.  ^64;  Corssen, 
Ausspraclie  *,  1. 1,  p.  425),  comme  Tentâtes  serait  le  dieu  de  la  puissance 
ou  de  la  cité. 

Je  me  reprocherais  d'être  aussi  affirmatif  sur  le  sens  de  Tentâtes  que 
je  le  suis  sur  le  mode  de  formation  de  ce  mot.  Le  sens  du  thème  masculin 
teuto,  en  gaulois,  ne  nous  est  pas  connu  d'une  manière  rigoureusement 
précise.  Tentâtes  peut  être  dérivé  de  la  forme  féminine  de  ce  thème  aussi 
bien  que  de  sa  forme  masculine.  Il  doit  encore  rester,  ce  me  semble, 
quant  à  présent,  une  certaine  incertitude  sur  la  signification  de  ce  nom 
qui,  si  nous  nous  en  rapportons  à  Lucain,  aurait  tenu  dans  la  mythologie 
gauloise  une  place  si  importante. 

Je  dis  :  si  nous  nous  en  rapportons  à  Lucain.  En  effet,  nous  sommes 
réduits  à  un  seul  témoignage.  Le  texte  de  Lactance  qu'on  cite  avec  celui 
de  Lucain  ne  me  semble  avoir  aucune  valeur,  il  ne  me  paraît  autre  chose 
que  la  rédaction  en  prose  des  vers  de  Lucain.  Il  est  étrange  que  le  nom 
de  Tentâtes  ne  se  soit  jusqu'à  présent  trouvé  dans  aucune  des  inscriptions 
si  nombreuses  qui  nous  donnent  des  noms  de  dieux  gaulois.  Tentâtes 
pourrait  bien  n'avoir  été  qu'un  dieu  topique,  le  dieu  d'un  peuple  gaulois; 
on  ne  voit  nulle  part  la  preuve  qu'il  ait  été  adoré  dans  toute  la  Gaule, 
et  qu'il  y  ait  occupé  le  rang  considérable  que  lui  attribuent  D.  Martin, 
Religion  des  Gaulois,  t.  1,  p.  201  et  suivantes,  et  M.  Amédée  Thierry, 
Histoire  des  Gaulois,  livre  iv,  chap.  i  ('.5'-'  édition,  t.  i,  p.  479).  L'identité 
de  Mercure  et  de  Tentâtes  n'est  nullement  démontrée,  puisque,  pour  l'éta- 
blir on  s'appuie  sur  un  passage  interpolé  de  Tite-Live. 

H.  d'ARBOIS  de  JUBAINVILLE. 


BIBLIOGRAPHIE. 


Om     Vildsviintypen     paa     galliske     og     indiske     Mynter,    af 

C.  A.  Ildi.MiioK,  (Sœrskilt  altrykt  af  Vidensk-Selsk-P^orhandlinger  tor  1868), 
Christiania,  i  1  p.  in-8",  avec  1  planche. 

M.  C.  A.  Holmboe,  en  étudiant  le  type  du  sanglier  sur  les  monnaies  de 
la  Gaule  et  de  l'Inde,  a  cherché  à  établir  des  rapports  entre  la  numisma- 
tique de  l'Inde  orientale  depuis  le  v^'  siècle  après  Jésus-Christ,  et  la 
numismatique  gauloise  des  deuxième  et  troisième  siècle  avant  notre  ère. 
Il  rappelle  que  le  sanglier  fut,  ainsi  que  l'a  établi  M.  de  La  Saussaye, 
l'emblème  national  gaulois;  les  monnaies  en  font  foi,  ainsi  que  les  figu- 
rines en  bronze  de  cet  animal  qui  ont  été  retrouvées  sur  plusieurs  points 
et  qui  ont  probablement  surmonté  des  enseignes. 

Sur  des  monnaies,  des  sceaux  et  des  poinçons  royaux  d'origine  in- 
doue on  trouve  également  le  sanglier,  soit  isolé,  soit  placé  au  sommet 
d'un  drapeau. 

M.  Holmboe  pense  que  les  Gaulois  ont  emprunté  leur  symbole  natio- 
nal plutôt  à  l'Inde  d'où  ils  venaient  qu'à  la  Grèce  ou  à  l'Italie.  Pour 
expliquer  l'énorme  écart  chronologique  qui  existe  entre  les  monnaies 
gauloises  et  les  monuments  indous  similaires,  l'auteur  suppose  que  la 
race  des  Chalukyas  du  v"  siècle  de  notre  ère  se  rattachait  à  une  dynastie 
qui  régnait  dans  l'Ayodhyapura  et  sur  d'autres  contrées  de  l'Inde 
septentrionale  et  de  l'Indoustan  deux  siècles  avant  Jésus- Christ.  Tout  en 
reconnaissant  que  ce  n'est  là  qu'une  hypothèse  qui  a  besoin  d'être  étayée 
de  preuves  solides,  M.  Holmboe  a  voulu  établir  qu'à  la  rigueur,  on 
peut  supposer  que  le  symbole  du  sanglier  existait  dans  l'Inde  dans  des 
temps  contemporains  de  la  nationalité  gauloise.  Nous  ne  pensons  pas 
que,  dans  l'état  de  la  science,  on  puisse  rien  fonder  sur  une  conjecture 
aussi  hardie,  dans  laquelle  l'imagination  et  des  rapprochements  un  peu 
forcés  tiennent  plus  de  place  que  la  véritable  critique.  ^ 


Bibliographie.  457 

Glossaire  gaulois,  avec  deux  tableaux  généraux  de  la  langue  gauloise,  par 
RuiiKT,  baron  de  Beli.ogukt,  2°  édition,  Paris,  Maisonneuve,  1872,  in-8', 
xxi-450  pages.  —  Prix  :  9  fr. 

Cet  ouvrage  est  le  premier  volume  de  VEthnogénic  gauloise  qui,  sous 
un  titre  un  peu  bizarre,  marque  en  France  un  progrès  considérable  dans 
les  travaux  sur  les  origines  de  notre  histoire.  Cette  publication  de  M. 
de  Belloguet,  justement  honorée  du  premier  prix  Gobert  par  l'Académie 
des  Inscriptions,  porte  partout  l'empreinte  d'un  effort  vigoureux  pour 
faire  sortir  les  études  celtiques  des  traditions  fantaisistes  oiî  elles  se 
traînent  littérairement  et  poétiquement  chez  nous  depuis  le  commence- 
ment de  ce  siècle  en  voilant  pour  ainsi  dire  d'un  rideau  de  fleurs 
l'abîme  de  notre  ignorance.  Si  seulement  nous  n'avions  pas  eu  d'autre 
illusion  !  Ainsi,  M.  Roget  de  Belloguet  nous  a  donné  un  exemple  auquel 
nous  voudrions  de  nombreux  imitateurs.  Nous  ne  disons  pas  des  copistes 
serviles,  car  son  livre,  avec  une  incontestable  valeur,  a,  suivant  nous, 
aussi  des  défauts  contre  lesquels  il  faut  se  mettre  en  garde. 

Il  y  a  d'abord  un  ordre  défectueux.  M.  de  Belloguet  s'est  avec  raison 
attaché  d'abord  à  recueillir  dans  les  auteurs  anciens  les  mots  gaulois 
qu'ils  nous  ont  conservés  en  nous  en  apprenant  le  sens.  Mais  pourquoi 
ne  pas  ranger  ces  mots  par  ordre  alphabétique  .?  L'ordre  alphabétique  si 
commode  pour  les  recherches,  rapproche  les  uns  des  autres  les  dérivés 
de  la  même  racine  :  il  facilite  ainsi  la  comparaison  de  ces  dérivés  entre 
eux  et  la  fixation  de  leur  sens.  M.  de  Belloguet  aurait  pu  prendre  pour 
modèle  à  ce  point  de  vue  le  Glossarium  italiacum  de  M.  Fabretti,  qui  peut 
donner  lieu  à  bien  des  critiques  quand  on  l'examine  au  point  de  vue  de 
la  linguistique,  mais  qui  est  si  commode  à  consulter  et  qui,  par  consé- 
quent, peut  rendre  tant  de  services  à  un  homme  pressé  comme  sont 
tous  les  érudits. 

Une  autre  critique  plus  grave  ne  porte  pas  sur  la  forme,  elle  porte 
sur  le  fond.  L'auteur  n'a  pas  suffisamment  tiré  parti  des  lois  phonétiques 
qui  font  la  base  de  la  Grammatica  Celtica  de  Zeuss,  et  dont  la  découverte 
fait  tant  d'honneur  à  cet  érudit  :  il  suit  de  là  qu'il  a  souvent  rappro- 
ché des  mots  gaulois  de  mots  bretons  ou  irlandais  qui  n'ont 
aucun  rapport  avec  eux.  Ainsi,  p.  372,  M.  de  Belloguet  persiste,  mal- 
gré mes  réclamations,  à  maintenir  dans  l'article  consacré  à  Esiis  le 
breton  armoricain  euzuz.  Il  paraît  ignorer  que  la  désinence  us  du  nomi- 
natif singulier  gaulois  esus  n'a  été  conservée  dans  aucun  nom  breton, 
que  le  premier  z  à^euzuz  a  succédé  à  une  dentale  primitive  comme  le 
prouvent  la  forme  comique  et  galloise  uth,  la  forme  irlandaise  uath,  la 
forme  vannetaise  ec'h  du  substantif  armoricain  (?uz  d'où  euzuz  est  dérivé: 


458  Bibliographie. 

il  ne  veut  pas  tenir  compte  du  fait  que  la  voyelle  primitive  initiale  que 
supposent  les  formes  néo-celtiques  euz,  uth,  ec^li,  uach,  est  un  ô  long  et 
non  Vê  long  par  lequel  commence  le  gaulois  esus. 

A  la  page  89,  M.  de  Belloguet  rapproche  reno  de  l'armoricain 
kroc'hen  en  vieil  irlandais  crocenn  (Gr.  C.^,  p,  69,  103);  il  m'est  impos- 
sible d'apercevoir  entre  ces  deux  noms  la  moindre  ressemblance. 

Candetum  est  rapproché  par  lui  probablement  avec  raison  (p.  92)  de 
l'arm.  kant,  du  corn,  cans  «cent.  »  Ce  rapprochement  s'appuie  sur  Isidore, 
Origines,  1.  XV,  c.  14,  §  6  :  Galli  candetum  appellant  in  areis  urbanis 
spacium  centuni  pedum.  On  aurait  dit  en  gaulois  canton,  «  cent  »  en  conser- 
vant Vn  primitif  comme  dans  le  grec  b.aTsv,  tandis  que  l'irlandais 
archaïque  cet  suppose  un  primitif  centan  avec  un  e=  a  comme  dans  le 
latin  centum.  Candetum  ^  cantetum  aurait  déjà  changé  le  ?  en  d  entre  n 
et  une  voyelle,  comme  nous  l'avons  fait  dans  «  marchand  »  de  mercan- 
tem  ;  quant  au  suffixe  etum  qui  finit  ce  mot  :  il  est  bien  connu.  Mais, 
pourquoi  ne  pas  se  borner  là  et  nous  citer  l'armoricain  kantvad  (lisez 
kant-ved)  =  ca«ï[o]-me/[o-5]  {Gr.  C,  p.  324)  où  le  suffixe  est  complè- 
tement différent  de  celui  de  candetum!' 

Il  n'y  a  aucun  rapport  entre  le  mot  asia  (p.  96)  et  l'armoricain  ed  = 
itu  «blé»  {Gr.  C.^,  p.  238);  —  entre  le  gaulois  culcita  et  l'armoricain 
gwelé  =  vali-on  ou  vali-a  (?)  «  lit»  {Gr.  C,  p.  81 5),  etc. 

M.  Roget  de  Belloguet  ne  paraît  pas  non  plus  se  rendre  un  compte 
bien  net  de  la  théorie  de  la  dérivation.  Ainsi  il  fait  un  substantif  du 
suffixe  -aco-s  '  qui  sert  à  former  des  adjectifs,  des  noms  de  personne  et 
des  noms  de  lieu  (p.  211,  364,  cf.  Gr.  C.^,  p.  806-807),  ^t  qui  existe 
en  latin  comme  en  gaulois  (Corssen,  Beitrxge,  p.  322;  Aussprache^, 
t.  II,  p.  195,  590).  Il  ne  veut  pas  admettre  l'existence  du  suffixe  gau- 
lois -inco-  en  regard  duquel  on  peut  cependant  placer  le  suffixe  grec 
-17^  -rcYoç.  (Régnier,  Formation  des  mots  dans  la  langue  grecque,  p.  197), 
et  le  suffixe  latin  -unca  dans  spelunca  (Corssen,  Aussprache  ^  t.  II, 
p.  188).  En  général,  la  distinction  entre  les  composés  et  les  dérivés 
n'existe  pas  à  ses  yeux. 

Il  a  placé  dans  sa  liste  de  mots  gaulois  deux  mots  francs  :  Yrias 
(p.  2 1  j)  expliqué  par  Grimm,  Gescitichte  der  deutschen  Sprache,  3''  édition, 
p.  3  8 1 ,  et  dadsidas  (p.  2 1 6)  sur  lequel  on  peut  consulter  le  même  ouvrage 
de  Grimm  (p.  381)  et  Schade,  Wœrterbuch,  p.  56. 

L'inscription  qu'il  publie  p.  336  a  été  commentée  par  M.  Mowat  en 


I.  Le  français  «  accin  »  que  M.  Roger  de  Belloguet  cite  à  ce  propos  était  en  bas-latin 
ad-cinctum.  Entre  ce  mot  et  le  suffixe  aco-s,  il  n'y  a  aucune  relation. 


Bibliographie.  459 

1870  dans  une  dissertation  dont  nous  avons  rendu  compte  dans  la 
seconde  livraison  de  la  Revue  Celtique  et  qu'il  paraît  ne  pas  connaître'. 
Mais  ceci  n'est  qu'un  détail  accessoire. 

J'en  ai  assez  dit  pour  montrer  clairement  quel  est  le  principal  défaut 
d'un  livre  auquel  je  me  plais  à  reconnaître  une  immense  supériorité  sur 
tous  les  ouvrages  analogues  publiés  en  France  jusqu'à  ce  jour.  M.  Roget 
de  Belloguet  sent  bien  lui-même  quel  est  ce  défaut.  Il  se  plaint  dans  sa 
préface  (p.  1 1  -  des  savants  qui  regardent  son  travail  du  haut  des  règles 
du  Laut-rerschiebung  et  il  déclare  que  les  lois  posées  par  Bopp  et  par 
Grimm  ne  sont  pas  applicables  au  Gaulois.  Je  ne  songe  en  aucune  façon 
à  introduire  dans  la  grammaire  celtique  les  règles  de  la  Laut-verschiebung 
puisque  un  des  caractères  qui  distingue  les  langues  néo-celtiques 
est  d'échapper  à  la  Laut-verschiebung  .  Je  n'invoque  ni  l'autorité  de  Bopp, 
ni  celle  de  Grimm,  je  me  contente  de  l'autorité  de  Zeuss  que  M.  Roget 
de  Belloguet  cite  si  fréquemment,  et  je  l'en  félicite.  Grâce  à  l'étude  qu'il 
a  faite  delà  Granmatica  celtica,  des  Keltische  Namen  de  M.  Gluck,  des 
mémoires  que  MM.  Ebel,  Becker  et  Stokes  ont  publiés  dans  les 
Beitraege  de  M.  Kuhn,  il  a  considérablement  amélioré  son  glossaire. 
Mais  je  crains  qu'il  n'ait  lu  un  peu  superficiellement  les  travaux  de  ces 
savants  linguistes,  disciples  de  Bopp  et  de  Grimm,  avant  de  créer  et  de 
perfectionner  avec  tant  de  succès  la  grammaire  comparée  des  langues 
celtiques.  M.  Roget  de  Belloguet  me  cite  plusieurs  fois  avec  une  poli- 
tesse qui  me  tlatte  d'autant  plus  que  je  suis  un  des  critiques  dont  il  se 
plaint.  J'ai  peut-être  eu  dans  la  forme  un  peu  de  rigueur,  ainsi  qu'il  sied 
à  un  «  néophyte,  »  comme  disait  de  moi  un  critique  éminent  en  parlant 
précisément  du  mémoire  dont  il  s'agit.  Néophyte,  disait-il.  En  effet, 
indépendamment  de  la  question  de  forme,  il  y  a  dans  ce  mémoire,  bien 
des  passages  qui  trahissent  la  main  d'un  écolier.  Mais  dans  mes  critiques 
il  est  un  point  sur  lequel  je  n'ai  point  varié  :  je  regrette  que  M.  Roget 
de  Belloguet,  qui  est  un  si  consciencieux  travailleur,  n'ait  pas  davantage 
étudié  les  lois  de  la  phonétique  celtique,  et  j'ajouterai  même  d'une 
manière  générale,  les  lois  fondamentales  de  la  formation  des  mots  dans 
les  langues  indo-européennes  :  c'est  le  côté  faible  d'un  livre  dont  l'au- 
teur joint  à  un  jugement  droit  une  profonde  érudition. 

H.  d'Arbois  de  Jubainville. 


I.  I citant  cette  inscription  d'après  le  texte  donné  par  la  Revue  Archéologique  (mars 
1868),  M.  de  B.  reproduit  la  mauvaise  leçon  RHED,  au  lieu  de  RIED,  leçon  réelle 
rétablie  par  M.  Mowat.  On  peut  s'étonner  que  la  Revue  archéologique  n'ait  pas,  aprèsle  tra- 
vail jle  M.  Mowat,  rectifié  ce  texte  erroné  donné  par  elle.  Faute  de  cette  rectification,^ la 
mauvaise  lecture  subsistera  et  ira  se  propageant,  —  nous  en  avons  ici  la  preuve,  —  grâce 
au  patronage  de  cet  estimable  recueil.  —  H    G.] 


Jl 


460  Bibliographie. 

[Qu'il  me  soit  permis  d'ajouter,  pro  domo  mea,  que  je  n'ai  jamais  émis 
l'étrange  assertion  que  M.  de  B.  me  prête  par  méprise  p.  80,  n. — H. G.] 

Di  alcune  Forme  de'  nomi  locali  deir  Italia  Superiore,  disserta- 
zione  linguistica  di  Giovanni  Fi.echi.s.  (extrait  des  Manoric  dtlla  rcak  Acadcmia 
dclk  Scienze  di  Torino,  ser.  II,  tom.  XXVIIi,  Torino,  Staniperia  reale,  1.^71, 
loi  p.  in-4°.  —  Prix:  6  lire. 

Un  professeur  de  Turin,  déjà  connu  des  Celtistes  par  une  brochure 
Di  un'  iscrizione  Celtica  trovata  nel  Novarese  (Turin,  1864),  Publie 
aujourd'hui  une  importante  dissertation  sur  les  quatre  suffixes  les  plus 
remarquables  que  présente  la  nomenclature  géographique  de  l'Italie  du 
Nord,  les  suffixes  ago,  asco,  ate,  engo.  Il  étudie  chacun  d'eux  dans  le 
temps  et  dans  l'espace,  c'est-à-dire  dans  ses  transformations  phonétiques 
et  dans  l'étendue  de  son  aire  géographique.  —  Le  suffixe  ago  est  le  plus 
nombreux  de  tous;  il  se  rencontre  dans  environ  400  noms.  La  moitié 
en  appartient  à  la  Lombardie  et  le  huitième  au  Frioul;  le  reste  est 
dispersé  dans  les  provinces  vénitiennes,  dans  le  Piémont,  le  long  de  la 
rive  droite  du  Pô,  dans  le  Trentin,  dans  la  Suisse  italienne  et  en  Ligurie. 
L'origine  celtique  de  ce  suffixe  (anciennement  acus,  aca,  acum,  iacus, 
iaca,  iacutn),  se  démontre  principalement  par  ce  fait  qu'elle  se  rencontre 
seulement  dans  des  pays  habités  par  des  Celtes:  M.  Fl.  établit  qu'il 
exprime  la  possession,  et  que  les  noms  en  ago,  accompagnés  à  l'origine 
de  termes  tels  que  viens,  fiindus,pr<£diiim,  rus,  ager,  colonia,  villa,  doinus, 
casa,  'etc.,  dérivent  tous  plus  ou  moins  vraisemblablement  des  noms  de 
personne,  romains  pour  la  plupart.  M.  Fl.  analyse  un  grand  nombre  de 
ces  noms  et  donne  en  passant  les  formes  correspondantes  de  la  toponomas- 
tique  française.  Dans  ces  rapprochements,  il  ne  lui  a  pas  toujours  été  pos- 
sible de  rechercher  l'ancienne  forme  des  noms  français  et  il  les  identifie 
d'après  leur  forme  actuelle.Cette  identification  est  presque  toujours  exacte; 
mais  il  arrive  quelquefois  qu'un  nom  qui  pourrait,  philologiquement,  avoir 
l'origine  supposée  par  M.  Fl.  se  trouve,  historiquement,  en  avoir  une 
autre.  La  critique  de  l'auteur  est  du  reste  si  sûre  que  ses  doutes  ou  ses  scru- 
pules sont  souvent  confirmés  par  des  faits  qu'il  semble  ignorer'.  —  Les 
nomsena5fo  se  rencontrent  au  nombre  d'environ  2  50  dans  l'Italie  du  Nord: 


I.  Donnons  quelques  exemples:  M.  Fl.  rapproche  (p.  25)  Chambly  et  quelques  noms 
analogues  de  Camh\ago=  Cambelliucum,  tout  en  admettant  que  dans  les  formes  françaises 
le  b  pourrait  être  adventice.  Chambly  est  en  effet  CamiUacum.  —  A  propos  de  Eogliaco 
(p.  ig)  qu'il  explique  par  Bovilidciim,  il  cite  entre  autres  noms  français,  mais  avec  hési- 
tation { forse,  d\t-'û),  Bouilly  ;  Bouilly  est  Baudiliacus.  —  Nos  nombreux  Châtenoy, 
Châtenay,  etc.  viennent  plus  souvent  de  Castanetum  que  de  Cnstiniacum  ''p.  27).  — 
Brissac  vient  de  Brctcaciacum  'p.  20''. 


Bibliographie.  461 

la  moitié  en  appartient  au  Piémont  et  le  reste  se  répartit  entre  la  Ligurie, 
Lombardie  et  la  Suisse  italienne.  M.  Fl.  réfute  l'opinion  qui  fait  venir 
ce  suffixe  du  latin  -aticus,  mais,  n'en  pouvant  découvrir  l'origine,  émet, 
faute  de  mieux,  l'hypothèse  qu'il  peut  être  un  reste  du  séjour  des  Ligures 
dans  la  Haute-Italie  et  avoir  survécu  à  leur  langue  comme  le  suffixe  -aco 
a  survécu  à  l'usage  de  la  langue  gauloise.  L'examen  des  noms  où  entre 
le  suffixe  -asco,  montre  que  comme  le  suffixe  -ago  il  servait  originaire- 
ment à  former  des  adjectifs.  —  Les  noms  en  -ate,  au  nombre  de  plus  de 
200,  sont  propres  à  la  Lombardie.  Les  anciens  noms  gaulois  en  -ate, 
comme  Arclate,  Condale,  se  présentent  aussitôt  à  l'esprit;  mais  l'examen 
des  formes  qui,  dans  les  autres  parties  de  la  Haute-Italie,  correspondent 
aux  formes  lombardes  en  -ate,  mène  M.  Fl.  à  l'opinion  que  cette  coïnci- 
dence avec  l'ancien  gaulois  est  accidentelle  et  que  ces  formes  actuelles 
en  -aie  se  ramènent  à  un  prototype  -aîo  (-aîunï),  formant  comme  un 
participe  passif  analogue  à  ceux  des  verbes  en  -are,  et  acquérant  ensuite 
la  valeur  d'un  substantif.  C'est  donc  une  forme  d'origine  romane  et  de 
signification  participiale.  —  Le  dernier  suffixe,  -engo  qui  se  rencontre 
non-seulement  dans  les  noms  de  lieu  de  l'Italie  supérieure  au  nombre 
de  plus  de  200,  mais  aussi  dans  des  noms  de  famille,  est  incontestable- 
ment germanique  et  témoigne  de  l'influence  de  la  conquête  lombarde  en 
Italie.  —  C'est  ainsi  que  ces  recherches  linguistiques  éclairent  l'ethno- 
graphie de  la  Haute-Italie,  en  montrant  les  couches  successives  laissées 
par  les  populations  qui  en  ont  occupé  le  sol.  La  critique  rigoureuse  et 
l'érudition  étendue  qui  se  montrent  dans  cette  dissertation  font  vivement 
désirer  que  l'auteur  publie  prochainement  le  travail  qu'il  promet  sur  les 
traces  de  l'élément  celtique  dans  l'Italie  du  Nord. 

H.  G. 


L'Art  gaulois,  ou  les  Gaulois  d'après  leurs  médailles,  par  Eugène  HuniiER, 
T.  I,  1868,  in-4'',  65  pages  et  101  planches.  Prix:  30  fr.  —  T.  II,  1"  et  2* 
livraison,  1872,  in-4°,  16  pages.  Prix:  1  fr.  la  feuille  pour  les  souscripteurs 
(le  tome  II  aura  20  feuilles). 

Cet  ouvrage,  fort  justement  couronné  par  l'Académie  des  Inscriptions 
en  1869,  paraît  devoir  former  un  traité  complet  de  numismatique  gau- 
loise. Dans  les  planches  les  médailles  sont  représentées  grossies  au 
microscope;  elles  sont,  par  conséquent,  beaucoup  plus  faciles  à  étudier 
que  dans  les  publications  anciennes  et  même  que  dans  les  planches  si 
soigneusement  exécutées  de  la  Revue  de  numismaticjue.  Nous  n'avons 
qu'une  critique  à  exprimer.  L'auteur  qui  connaît  la  Grammatica  celîica 
ne  s'en  est  pas  suffisamment  servi  et  s'est  trop  facilement  laissé  séduire 


462  Bibliographie. 

par  son  imagination  dans  les  rares  circonstances  où  il  a  cru  devoir  faire 

des  rapprochements  étymologiques. 

Voici  un  exemple  de  la  témérité  avec  laquelle  certains  numismatistes 
confondent  des  racines  complètement  différentes.  Je  dis  certains  numis- 
matistes, au  pluriel,  car  ici  M.  Hucher  n'est  pas  seul  coupable,  il  n'a 
fait  qu'adopter  une  idée  du  savant  qui,  dans  notre  siècle,  a  fait  faire  le 
plus  de  progrès  à  la  numismatique  gauloise,  de  M.  de  Saulcy.  Il  y  a  en 
France  une  rivière  qu'on  appelle  aujourd'hui  Durance.  Mais  cette  forme 
moderne  du  nom  altère  par  une  métathèse  de  l'r  le  nom  primitif, 
Druenîia.  Driientia  est  le  nom  qu'ont  écrit  Tite  Live,  XXI,  3 1  ;  Pline  le 
naturaliste,  111^  4,  $  ;  Silius  Italiens,  111,463.  Cette  forme  est  confirmée 
par  l'adjectif  druenticus  que  deux  inscriptions  nous  ont  conservé,  et  par 
la  variante  Aps'j;v-(a;  qu'on  trouve  dans  Strabon.  Druenîia  est  dérivé  de 
la  racine  dru  a  courir,  couler.  »  Cette  racine  a  été  étudiée  par  M.  Pott, 
Etymologische  Forschungen,  t.  IV,  p.  1063,  n"  279,  et  ici  même,  pages 
299-305,  par  M.  Pictet.  M.  Hucher,  s'appuyant  sur  l'autorité  de  M.  de 
Saulcy,  rapproche  du  nom  de  la  Durance  le  commencement  du  mot 
durnacos  inscnt  sur  certaines  monnaies  gauloises  (t.  I,  p.  23).  «  La 
syllabe  dur,  »  dit-il,  «  évoque  naturellement  l'idée  d'eau.  »  —  C'est  une 
erreur  :  dour  <(  eau  »  en  breton  est  une  forme  contractée  du  primitif 
"dubron.  Elle  n'évoque  pas  plus  l'idée  d'eau  en  gaulois  que  la  syllabe 
française  père  (=  pâtre)  n'évoquerait  en  latin  l'idée  de  paternité. 

Si  durnacos  est  un  nom  d'homme,  son  sens  ne  peut  guère  faire  doute. 
En  gaélique  d'Ecosse  dornach  signifie  :  <c  belonging  to  fists,  a  boxer,  a 
pugilist  »  (Dictionnaire  de  Macleod).  C'est  un  dérivé  de  l'irlandais 
dura,  dora  «  le  poing,  )>  en  gallois  dwrn,  en  comique  dorn.  Le  breton 
armoricain  a  légèrement  modifié  la  signification  de  ce  nom,  et,  comme 
il  a  perdu  le  substantif  lam  «  main,  »  il  a  donné  à  dourn,  dorn,  le  sens 
de  «  main,  «  par  conséquent  en  breton  armoricain  dournek,  équivalent 
de  durnacos  et  de  dornach  veut  dire  «  qui  a  de  grandes  mains,  »  mais  ce 
n'est  pas  le  sens  primitif;  et  le  sens  primitif  a  été  conservé  dans  le  dérivé 
dourna  «  battre  à  coups  de  poing.  )>  Durnacos  paraît  donc  signifier 
«  qui  a  un  poing  robuste.  « 

Durna-cos  est  dérivé  du  thème  durno-  qui  apparaît  dans  un  nom  de 
lieu  gaulois  Durno-magus.  Je  crois  qu'ici  le  thème  durno-  a  probablement 
un  sens  plus  général  que  dans  le  dérivé  durnacos.  Durno-  qui  semble  dé- 
rivé de  la  racine  dhar  u  soutenir,  porter,  fortifier  ;  »  serait  originaire- 
ment un  participe  ou  un  adjectifsignifiant  en  générale  qui  est  fort,  w  comme 
le  latin  fortis,  firmus,  frenum  qui  ont  la  même  racine  (Pott,  Etym.  Forsch., 
t.V,p.  333  et  suivantes,  n"  455))  "  poii^g  ^^  est  avec  valeur  de  substantif 


Bibliographie.  46^ 

un  sens  spécial  bien  ancien  puisqu'il  est  commun  au  breton  et  à  l'irlan- 
dais ;  mais  le  sens  général  de  «  fort  »  s'était  probablement  maintenu 
avec  valeur  d'adjectif  dans  Durno-magus  dont  le  premier  terme  peut  être 
comparé  quant  au  sens  à  un  autre  thème  gaulois  dont  la  racine  n'est 
pas  clairement  déterminée,  je  veux  parler  du  xhème  duro  qui  avait  valeur 
de  substantif  et  signifiait  «  forteresse.  ■» 

Je  conclus  qu'entre  le  nom  de  la  Durance  et  la  légende  monétaire 
Diirnacos  il  n'y  a  aucun  rapport  et  que  M.  Hucher  dont  la  publication 
est  du  reste  excellente,  fera  bien  à  l'avenir  ou  de  s'abstenir  de  spécula- 
tions étymologiques  ou  d'étudier  préalablement  un  peu  plus  à  fond  la 
grammaire  comparée  des  langues  indo-européennes  en  général,  la 
Grammatica  celtica  en  particulier. 

H.  d'Arbois  de  Jubainville. 

Lettres    à  M.  A.  de  Longperier  sur  la  numismatique  gauloise, 

par  F.  DE  Saulcv.  (Extrait  de  la  Revue    nunnswatique,  nouvelle  série,  t.  111, 
1858.)  Paris,  in-8% 

MM.  Rollin  et  Feuardent  publient  une  nouvelle  édition  de  ce  recueil. 
Us  reproduisent  littéralement  le  texte  et  jusqu'à  la  date  de  la  première 
édition.  Ces  lettres  sont  plutôt  un  recueil  de  causeries  qu'un  livre  pro- 
prement dit.  En  effet,  chez  M.  de  Saulcy,  à  côté  du  savant  il  y  a  un 
causeur  charmant,  plein  d'esprit,  d'imagination  et  de  feu.  La  vue  d'une 
monnaie  gauloise  éveille  chez  lui  tout  un  monde  de  vieux  souvenirs  et 
d'idées  neuves,  et  il  se  hâte  de  les  exprimer  avec  une  ardeur  égale  à  la 
vivacité  de  sa  conviction,  sauf  à  reconnaître  le  lendemain  qu'il  s'est 
trompé.  Quand  il  voit  qu'il  a  commis  une  erreur,  il  s'empresse  de  le 
proclamer  avec  autant  de  sincérité  que  de  bonheur,  car  c'est  pour  lui  le 
point  de  départ  d'une  théorie  nouvell^^n'il  expose  avec  le  même  entrain, 
le  même  esprit,  la  même  science  et  la  même  bonne  foi  que  la  théorie  de 
la  veille. 

Cependant,  chemin  faisant,  il  rectifie  nombre  de  lectures  défectueuses 
des  légendes  monétaires  et  par  là  fait  faire  aux  études  celtiques  d'incon- 
testables progrès.  Il  est  inutile  d'insister  ici  sur  les  découvertes  que 
nous  devons  au  savant  numismatiste.  Elles  sont  bien  connues  de  tous 
ceux  qui  s'occupent  de  ces  matières.  Loin  de  nous  la  pensée  de  les 
déprécier  !  Mais  ce  qui,  dans  les  érudites  et  ingénieuses  recherches  de 
M.  de  Saulcy,  prête  à  la  critique,  ce  sont  certains  rapprochements 
hasardés  entre  des  légendes  monétaires  et  soit  des  noms  de  chefs  gaulois 
mentionnés  par  César,  soit  des  termes  qui  appartiennent  aux  langues 
néo-celtiques. 


464  Bibliographie. 

En  voici  deux  exemples  : 

Le  nom  du  chef  Cattos,  inscrit  sur  des  monnaies  gauloises  p. 
114  et  suivantes),  parait  identique  à  l'armoricain  moderne  mz  =  catt 
«  chat  »  et  n^a  aucun  rapport  avec  le  nom  de  Cotus,  vergobret  des 
Eduens,  dont  parle  César.  M.  de  Saulcy  a  renouvelé  dans  V Annuaire 
de  la  Société  française  de  Numismatique  pour  1867,  p.  11^  le  rapproche- 
ment de  cattos  avec  cotus;  et  ce  rapprochement  est  inadmissible,  puisque 
les  deux  mots  diffèrent,  au  double  point  de  vue  du  vocalisme  et  du 
consonantisme. 

M.  de  Saulcy  divise  en  deux  parties  la  légende  à'Arviragus  (p.  38  et 
suivantes).  Ar,  suivant  lui,  est  l'article,  viragus  serait  le  nom  d'un  chef 
breton!  Le  savant  auteur  traite  de  même  Arcantodan,  ce  qui  lui  permet 
de  le  rapprocher  du  Conetodunus  des  Commentaires  de  César.  En  effet, 
l'article  armoricain  est  aujourd'hui  ar  devant  les  consonnes  autres  que  les 
dentales  et  /.  Mais  Vr  final  de  cet  article  est  tout  moderne  et  a  pris  la 
place  d'/2  il  y  a  au  plus  trois  siècles.  A  l'époque  gauloise,  cet  article,  s'il 
existait,  était  probablement  prononcé  'hindos  ou 'Sindos.  Si  dans/ln'/rat;us 
et  Arcantodan  ar  doit  être  séparé  du  reste  du  mot,  c'est  une  particule 
augmentative  et  non  un  article. 

L'autorité  si  légitime  qui  s'attache  aux  écrits  de  M.  de  Saulcy  fait 
aux  critiques  un  devoir  de  relever  les  erreurs  qu'ils  y  remarquent. 
Quand  un  livre  a  la  valeur  des  Lettres  sur  la  numismatique,  il  attire  à  lui 
les  lecteurs  et  la  confiance.  Plus  les  lecteurs  sont  nombreux  et  la  con- 
fiance fondée,  plus  est  grand  le  danger  que  présentent  quelques  doctrines 
fausses  éparses  dans  un  travail  où  l'on  trouve  une  science  si  vraie  associée 
à  un  si  profond  amour  de  la  vérité. 

H.   d'ArBOIS  de   JUBAINVILLE. 

Etudes  d'Archéologie  celtique,  notes  de  voyage  dans  les  pays  Scandi- 
naves, par  Henri  Martin,  membre  de  l'Institut.  iv-426p.  in-8.  Paris,  Didier, 
1872.  —  Pr.  7  fr.  50. 

M.  Henri  Martin  a  pris  place,  par  ses  diverses  publications  en  prose 
et  en  vers  ' ,  parmi  les  écrivains  qui  ont  le  plus  contribué  à  répandre  en 
France  l'étude  de  nos  antiquités  gauloises  et  le  goût  des  choses  cel- 
tiques. Par  la  vivacité  de  son  imagination,  par  l'éclat  de  son  style,  le 
poète,  qui  chez  M.  M.  se  mêle  à  l'érudit,  a  réussi  à  donner  l'illusion 
de  la  vie  aux  héros  de  cette  vieille  histoire.  Personne  ne  mérite  donc 

I.  En  prose,  dans  le  premier  volume  de  son  Histoire  de  France  et  dans  de  nombreux 
articles  de  revues  et  de  journaux  :  en  vers,  dans  son  drame  de  Vercingétorix  (Paris, 
Furne,  i86j.) 


Bibliographie.  465 

plus  l'estime  de  la  critique  ;  mais  quel  que  soit  notre  respect  pour  le 
talent  et  pour  le  caractère  de  M.  M.,  qu'on  nous  permette  de  dire  sans 
détours  notre  façon  de  penser  sur  les  théories  qu'il  soutient  :  arnicas 
Plato,  sed  magis  arnica  veritas.  Nous  sommes,  par  nos  propres  études, 
arrivé  sur  quelques  points  importants  à  des  conclusions  trop  différentes 
de  celles  de  M.  M.,  pour  laisser  passer  les  siennes  sans  protester. 
Les  lecteurs  de  la  Revue,  qui  sont  les  véritables  juges,  iront  au  fond  du 
débat  dont  nous  ne  pouvons  (faute  d'espace)  que  poser  les  termes,  et  ils 
décideront  pour  eux-mêmes. 

Le  dissentiment  principal  entre  M.  M.  et  nous,  avant  d'être  dans  les 
faits,  est  déjà  et  surtout  dans  la  façon  de  les  envisager.  M.  M.  est  le  plus 
savant  et  le  plus  illustre  représentant  d'une  école  qu'en  pourait  appeler 
l'école  druidique;  elle  a  en  effet  pour  principe  que  les  prêtres  ou  magi- 
ciens des  Gaulois,  les  «  Druides  »  comme  les  appellent  les  anciens, 
formaient  entre  eux  une  école  de  philosophie  transcendante,  étaient 
dépositaires  d'une  sagesse  ésotérique  de  la  plus  grande  élévation,  pour 
ne  pas  dire  d'origine  divine,  et  que  les  anciens  Celtes  sont  dans  l'histoire 
comme  un  second  peuple  de  Dieu,  un  autre  Israël.  L'école  critique,  que 
cette  revue  représente  de  son  mieux,  tient  au  contraire  que  les  Celtes,  si 
anciens  qu'on  les  suppose,  n'avaient  reçu  aucun  privilège  entre  les  autres 
nations  de  l'antiquité,  et  que  leur  histoire  doit  se  faire,  comme  toute 
autre,  moins  par  la  divination  que  par  l'étude  de  leurs  monuments,  de 
leurs  traditions  et  de  leur  langue,  entreprise  sans  parti  pris  et  avec  assez 
de  patience  pour  qu'une  affirmation  soit  seulement  la  généralisation 
d'une  série  de  faits  incontestables.  C'est  la  méthode  mise  en  honneur 
par  les  deux  hommes  qui  ont  véritablement  fondé  l'ethnographie  de 
l'Europe  centrale  et  occidentale,  J.  Grimm  et  Zeuss:  J.  Grimm  pour  les 
peuples  germaniques,  Zeuss  pour  les  peuples  celtiques.  Nous  ne  sommes 
partisans  d'aucune  tradition  :  mais  s'il  en  est  une  en  dehors  de  laquelle 
on  pourrait  dire  avec  quelque  vraisemblance  qu'il  n'y  a  pas  de  salut, 
c'est  bien  celle  qui  relève  de  ces  deux  grands  génies. 

Aussi,  formés  à  une  autre  école  que  M.  M.,  sommes-nous  arrêtés  à 
tout  instant  dans  son  nouveau  livre  par  des  théories  ou  des  assertions 
qui  nous  étonnent.  Ainsi  dans  sa  première  étude  (Les  races  brunes  et  les 
races  blondes)  où  il  revient,  à  tort  selon  nous,  sur  l'opinion  qu'il  avait 
émise  dans  son  Histoire  de  France  et  qui  faisait  des  Gaulois  un  peuple  à 
cheveux  blonds,  M.  M.  parle  encore  de  «  Gaëls  »  et  de  «  Cymrys  «  en 
Gaule.  Le  lecteur  français  sait  qu'à  une  époque  où  les  études  cehiques 
n'existaient  pas  encore,  en  1828,  M.  Amédée  Thierry  mit  en  avant, 
dans  son  Histoire  des  Gaulois,  un  système  ethnographique  qui,  de  la 


466  Bibliographie. 

division  actuelle  des  peuples  Celtiques  en  deux  branches,  concluait  à 
l'existence  de  cette  distinction  chez  les  Gaulois  du  continent  d'avant 
César^  et  qui  profitait  de  la  ressemblance  fortuite  du  nom  national  des 
Gallois  (Cymrv)  avec  celui  des  Cimbres  et  celui  des  Cimmérienspour  faire 
de  ces  différents  peuples  une  seule  et  même  race.  Ce  système  qui  a  mal- 
heureusement fait  fortune  en  France,  n'a  guère  été  adopté  à  l'étranger. 
Grimm  et  Zeuss  n'ont  pas  même  daigné  le  discuter,  et  en  France  même 
il  a  été  enterré^  définitivement  nous  l'espérions,  dans  VEthnogénie  Gau- 
loise de  M.  de  Belloguet. 

Ailleurs  nous  rencontrons  une  autre  opinion  qui  pour  nous  est  égale- 
ment une  hérésie  au  premier  chef.  M.  M.  regarde  les  Cimbres  comme 
des  Celtes  et  il  cite,  à  l'appui  de  cette  thèse,  des  passages  de  Cicéron  et 
de  Salluste  qui  appelle  les  Cimbres  Gaulois.  Mais  il  passe  sous  silence  les 
textes  si  positifs  de  Pline,  de  Tacite  et  du  testament  d'Auguste  qui  en 
font  positivement  des  Germains.  Il  est  facile  de  voir  que  de  ces  témoi- 
gnages contradictoires  les  derniers  ont  le  plus  d'autorité  justement  parce 
qu'ils  sont  les  plus  récents  et  que  les  premiers  datent  d'une  époque  à 
laquelle  les  Romains  confondaient  dans  le  nom  de  Gaulois  l'ensemble 
des  barbares  du  Nord,  de  même  que  les  Grecs  avaient  longtemps  fait 
rentrer  dans  le  terme  de  \i£kv.y:'q  les  régions  septentrionales  encore 
inconnues  et  qu'habitaient  les  Germains,  à  côté  et  au-delà  des  Gaulois. 

M,  M.  n'est  pas  philologue.  Eminent  historien  comme  il  est,  ce 
défaut  lui  est  bien  pardonnable,  mais  au  moins,  quand  il  veut  parler 
philologie  et  quand  il  bâtit  des  théories  historiques  ou  philosophiques  sur 
la  pointe  menue  d'une  étymologie,  devrait-il  se  renseigner  dans  les 
ouvrages,  aujourd'hui  nombreux,  qui  traitent  avec  compétence  de  philo- 
logie celtique.  Il  est  décourageant  de  voir  des  faits  qu'on  regarde^comme 
établis,  tout  simplement  ignorés  de  M.  M.  Ainsi  il  fait  venir  du  nom  d'un 
prétendu  dieu  Bel  le  mot  breton  hclck  «.  prêtre  «,  quand  ce  mot  a  une 
étymologie  si  claire  et  si  chrétienne  '.  Ainsi  il  retrouve  le  nom  du  dieu 
Gaulois  Belenos  dans  les  noms  propres  français  modernes  Belin,  Blin, 
etc.^  Ainsi  il  rapproche  le  nom  des  Cimbres  du  nom  que  les  Gallois  se 
donnent  à  eux-mêmes,  Cymry,  quand  ce  nom  est  relativement  moderne, 
et  n'a  du  reste  très-probablement  aucune  parenté  étymologique  avec  le 

1.  Bekk,  anc.  badec  =  Call.  biiplog  =  Irl.  bachlach  vient  du  latin  baculus  et  signifie 
étymologiquement  «  l'iiomme  au  bâton.  »  C'est  le  «bâton  pastoral  »  que  les  évêques  ont 
gardé. 

2.  Les  noms  propres  comme  BcUn,  Min,  etc.  sont  des  formes  aphérésées  de  noms 
tels  que  Lembelin  et  Robelin.  Voyez  Mowat  :  Noms  propres  anciens  et  modernes,  p.  H- 
Bien  plus,  et  d'une  façon  plus  générale,  nous  ne  croyons  pas  qu'il  existe  en  France,  sauf 
les  noms  empruHtés  aux  noms  de  lieu,  de  noms  propres  d'origine  celtique  (la  Bretagne 
naturellement  mise  à  part)  ;  la  formation  des  patronymiques  est  de  date  trop  récente. 


Ribliogrciphie.  46J 

premier  '.  Une  ressemblance  de  son  est  pour  M.  M.  un  argument  phi- 
lologique. A  ce  compte,  on  se  demande  pourquoi  il  n'identifie  pas  les 
Gallas  d'Afrique  avec  les  Gaulois  :  car  avec  des  procédés  aussi  peu 
rigoureux  il  n'y  a  pas  de  limite  à  l'hypothèse.  C'est  ainsi  qu'un  écrivain 
de  l'école  druidique  dont  un  livre  a  été  critiqué  plus  haut  (p.  278) 
M.  Terrien,  a  retrouvé  la  Gaule  dans  le  lac  de  Ga/-ilée  et  en  a  tiré  la  con- 
clusion que  Jésus-Christ  était  Celte! 

Se  faisant  de  l'ancienne  sagesse  des  Celtes  les  idées  les  plus  hautes,  il 
n'est  pas  étrange  que  M.  M.  ait  voulu  en  voir  un  écho  dans  le  «  Mys- 
tère des  Bardes  de  l'Ile  de  Bretagne,  »  publié  en  1794,  par  Edward 
Williams  (plus  connu  sous  son  pseudonyme  littéraire  lolo  Morganwg  2) 
et  traduit  en  français  par  M.  Pictet  en  1856.  L'essai  que  M.  M.  a  con- 
sacré à  ce  mystère  occupe  une  grande  partie  du  volume  (p.  289-368); 
l'auteur  y  donne  des  extraits  des  mss.  d'Iolo,  publiés  en  1862  à  Llan- 
doveri,  sous  le  titre  de  Barddas.  Il  semble  tout  naturel  à  M.  M.  que 
l'esprit  de  l'ancienne  Bretagne  (à  supposer  qu'il  eût  été  tel)  se  soit  con- 
servé jusqu'à  nos  jours  malgré  les  révolutions  qui  se  sont  accomplies 
dans  l'histoire  de  l'Ile.  Il  oublie  que  l'Ile  de  Bretagne  a  été  très-forte- 
ment latinisée,  que  si  les  Saxons  et  les  Angles  fussent  venus  un  siècle  ou 
deux  plus  tard,  ils  l'eussent  trouvée  toute  latine,  que  la  langue  Bretonne 
était  tombée  au  rang  de  patois,  ce  qu'atteste  le  nombre  considérable  de 
mots  d'origine  latine  en  Gallois  (ce  qu'accorde  même  l'auteur  du  Barddas, 
p.  61)  et  que,  si  dans  un  semblable  abaissement  de  la  nationalité  Bre- 
tonne, les  traditions  qui  sont  l'àme  même  d'un  peuple  n'ont  pas  péri,  il 
n'en  a  pu  être  de  même  d'une  doctrine  (je  suppose  un  instant  qu'elle 
aurait  existé),  d'une  cabale  qui  eût  été  le  fait  particulier  d'une  école 
théologique.  Du  reste,  probatio  est  affirmantis ;  c'est  à  M.  M.  à  montrer, 
s'il  le  peut,  le  lien  historique  qui  rattache  à  l'antiquité  le  néo-druidisme 
de  quelques  enthousiastes  Gallois.  Aussi  bien,  un  théologien  distingué  de 
Montauban,  dont  les  travaux  sur  cette  question  mériteraient  d'être  tra- 
duits dans  une  revue  de  Galles,  M.  Michel  Nicolas,  a  montré  dans  deux 
articles  du  Disciple  de  Jésus-Christ  (n""  des  50  septembre  et  1 5  octobre 
1865)  que  les  doctrines  philosophiques  et  religieuses  contenues  dans  les 


1.  Voyez  Zeuss  :  Gr.  C,  i"  éd.,  p.  226;  2=  éd.,  p.  207. 

2.  Il  ne  faudrait  pas  s'imaginer  par  ce  que  M.  M.  dit  d'Iolo  Morganwg,  que  cet  enthou- 
siaste sans  critique  du  commencement  de  notre  siècle  soit  une  autorité  auprès  des  écri- 
vains sérieux  du  pays  de  Galles  Voici  comment  l'apprécie  le  savant  et  honnête  M.  Stephens, 
à  propos  des  Triades  dites  Historiques  :  «  lolo  Morganwg  et  ses  disciples  n'avaient  aucune 
notion  d'histoire  générale  ;  ils  ne  connaissaient  point  la  littérature  de  l'Angleterre  et  des 
autres  pays  au  xV'  siècle;  et,  en  conséquence,  ils  étaient  incapables  d'apercevoir  les  rap- 
ports qui  existent  entre  les  Triades  et  la  littérature  originale  sur  laquelle  elles  reposent  » 
y  Beirniad,  T.  VI,  p.  307  (1865). 


468  Bibliographie. 

Triades  Galloises  n'ont  rien  de  commun  avec  l'antiquité,  et  qu'elles  sont 
empreintes  d'un  bout  à  l'autre  d'un  caractère  essentiellement  chrétien. 
Dans  un  autre  article  publié  dans  la  Revue  de  Théologie  de  Strasbourg  de 
1868  (5«  sér.,  vol.  VI,  4'-'  livr.),  il  a  essayé  de  montrer  que  ces  doc- 
trines ont  leur  source  dans  les  doctrines  d'Origène.  Remontent-elles 
vraiment  aussi  haut?  Car  l'intensité  du  mouvement  religieux  dont  le  pays 
de  Galles  donne  le  spectacle  depuis  la  Réforme  montre  un  peuple  dont 
l'esprit  se  passionne  facilement  pour  les  subtilités  théologiques.  Quoi  qu'il 
en  soit  de  la  date  encore  inconnue  de  ces  productions,  le  problème  de 
leur  origine  appartient  à  l'histoire  du  mouvement  religieux  en  Galles 
et  se  trouve  par  conséquent  au  -dessus  de  notre  compétence  en  même 
temps  qu'en  dehors  de  l'objet  de  nos  études. 

Ces  réserves  faites  sur  quelques-uns  des  points  traités  par  M.  M., 
nous  devons  dire  qu'on  lira  avec  intérêt,  comme  nous  l'avons  fait  nous- 
même,  ses  essais  sur  l'origine  des  monuments  mégalithiques  ',  sur  les 
antiquités  Bretonnes  et  surtout  ses  notes  de  voyage  dans  le  pays  de 
Galles,  en  Irlande  et  dans  le  Nord  Scandinave,  où  il  raconte  à  grands 
traits  et  d'une  façon  tout-à-fait  attachante  l'impression  que  lui  ont  laissée 
la  nature,  les  hommes  et  les  monuments. 

H.  G. 


Grammatica  celtica  e  monumentis  vetustis  tam  hibernicas  linguœ  quam 
britannicarum  dialectaruin,  cambricae,  cornic;«,  aremorics,  comparatis  gallican 
prises  reliquiis.  Construxit  I.  C.  Zeuss.  Editio  altéra.  Curavit  H.  I'Ibel. 
Berlin,  Weidmann,  1868-1871,  iij-iii^  pages.  —  Prix:  10  th.  (40  fr.i. 

Nous  sommes  heureux  d'annoncer  l'achèvement  de  cette  nouvelle 
édition  d'un  ouvrage  qui  ne  peut  être  trop  répandu.  Des  améliorations 
que  M.  Ebel  y  a  introduites,  il  en  est  une  surtout  qui  est  appelée  à 
rendre  en  France  de  grands  services.  Nous  avons,  en  efïet,  la  satisfac- 
tion de  constater  l'heureux  succès  des  efïorts  qu'il  a  faits  pour  découvrir 
la  voyelle  finale  d'un  grand  nombre  de  thèmes  néo-cehiques  dont  la 
terminaison  était  restée  indécise  dans  la  première  édition.  Il  donnera 
|tar  là  le  moyen  d'établir  l'identité  d'un  certain  nombre  de  mots  néo- 
celtiques, dont  le  sens  est  connu,  avec  des  noms  gaulois  dont  nous  ne 
pouvons  autrement  fixer  la  signification.  Nous  regrettons  toutefois  que 
M.  Ebel  n'ait  pas  davantage  utilisé  les  publications  françaises  dont  divers 
monuments  celtiques  ont  été  l'objet  depuis  la  première  édition  de  la 


I.  Sur  ce  mémoire  en  particulier  voir  de  Belloguet   :  Ethnogénic  Gauloise,  T.  111 
p.  (20  et  suiv. 


Bibliographie,  469 

Grammatica  Celtica.  Il  s'est  beaucoup  servi  du  Catlwlicon,  de  Jean  Laga- 
deuc,  publié  par  M.  Le  Men,  du  Grand  mystère  de  Jésus,  édité  et  traduit 
par  M.  de  la  Villemarqué.  Il  s'exprime  avec  beaucoup  trop  de  bienveil- 
lance sur  les  commentatiunculs,  que  M.  Gaidoz  et  moi  avons  publiés  sur 
divers  points  de  philologie  celtique  dans  la  Revue  Critique,  la  Revue  Ar- 
chéologique, et  la  Revue  Celtique  :  quibus  osienderunt,  dit-il^  en  parlant  de 
nous,  quid  illius  gentis  Iwmines  profecturi  fuerint  si  tandem  aliquando  littera- 
rum  studiis  Germanos  aemulari  mallent  quam  malis  artibus  impugnare  et 
aspergere  sanie,  imbuti  invidia  insana. 

De  telles  appréciations  insérées  dans  un  livre  de  science  internationale, 
si  je  puis  m'exprimer  ainsi,  ne  sont  pas  de  nature  à  calmer  des  esprits 
irrités  par  des  événements  qui  n'ont  aucun  rapport  avec  la  philologie 
celtique.  Il  est  inutile,  pour  ne  pas  dire  plus,  de  faire  appel  aux  haines 
nationales  dans  un  monde  littéraire  qui  devrait  les  dominer.  M.  Ebel, 
qui  date  ces  paroles  de  Schneidemùhl  (Pila;,  le  1 3  décembre  1870,  re-  1 
grette,  sans  doute,  aujourd'hui  de  ne  pas  les  avoir  effacées  de  sa  préface. 

Plus  calme  aujourd'hui,  il  doit  reconnaître  qu'il  aurait  agi  d'une  ma- 
nière plus  conforme  à  la  vraie  tradition  de  la  science,  s'il  s'était  mis  en 
mesure  de  les  remplacer  par  l'indication  du  cartulaire  de  Redon,  publié 
en  1865  par  M.  de  Courson  (cccxcv  et  760  pages  in-4"),  et  des  nom- 
breux travaux  français  sur  la  numismatique  gauloise  que  le  savant  con- 
tinuateur de  Zeuss  parait  avoir  ignorés. 

De  M.  de  Courson,  Zeuss  a  connu  V Histoire  des  peuples  bretons,  publiée 
en  1846  (Gr.  C,  p.  xlvi).  C'est  principalement  d'après  cet  ouvrage 
que  Zeuss  a  cité  le  cartulaire  de  Redon,  et  M.  Ebel  s'est  contenté  comme 
Zeuss  de  citer,  d'après  l'Wwfo/re  des  peuples  bretons,  les  chartes  du  cartu- 
laire de  Redon,  que  cette  histoire  contient.  Mais,  par  là,  d'une  part,  il 
s'est  privé  de  ressources  philologiques  importantes,  car  l'édition  du  car- 
tulaire de  Redon,  faite  en  1865,  a  mis  au  jour  un  grand  nombre  de 
chartes  inédites  ;  d'autre  part,  en  se  servant  de  textes  défectueux,  quand 
il  avait  un  texte  correct  à  sa  disposition,  il  rendra  nécessaire  un  errata 
volumineux,  dont  nous  avons  le  regret  d'avoir  à  donner  ici  l'esquisse. 

Dans  la  Gr.  C.^,  p.  87,  nous  lisons  :  vox  nemet  semper  e  /'/  syllaba 
posteriore,  i  in  priore  exhibet  in  uno  nomine  viri  comp.  Vidnimet  in  chart. 
Rhed.  Mor.  330,  sed  alias  ubique  e.  On  trouve  cependant  Cat-nimct  cinq 
fois  dans  le  Cartulaire  de  Redon,  p.  4$,  62,  64,  84. 

Dans  la  Gr.  C.^,  p.  93,  on  oppose  aux  noms  propres  armoricains 
dont  le  second  terme  tsx-hocar,  -hucar,  -hegar,  ceux  dont  le  second  terme 
est  -hocart ^ hegarat  (cf.  p.  1 52).  Mais  -iiocart  est  une  faute  dans  l'His- 
toire des  peuples  bretons.  On  lit  hocur  dans  le  Cart.  de  Redon,  p.  81,  116. 


470  Bibliographie. 

Plus  bas,  G;-.  C-,  p.  106,  au  lieu  de  IVitenglocii,  lisez  Vaetcnglocii 
par  un  e  (Cart.  de  Redon,  p.  81). 

Dans  la  Gr.  C,  p.  iio,  sont  réunis  des  exemples  de  l'adjectif  l'/u 
«  vivus  »  second  terme  d'un  certain  nombre  de  composés.  Un  de  ces  ex- 
emples est /le////e;i.  Mais  il  faut  lire  Haelliffen  avec  un  n  final  et  non  un  a 
(Cart.  de  Redon,  p.  8;.  C'est  donc  un  mot  à  rayer.  La  même  erreur  est 
reproduite  plus  bas,  p.  157. 

Dans  la  Gr.  C-,  p.  1  i  2-1  1 5  on  étudie  Vni  destitutus.  Cet  m  paraît  figuré 
graphiquement  par  mh  en  quelques  textes  armoricains.  Mais  un  des 
exemples  cités  ne  prouve  rien,  c'est  Guormlwwen,  faute  d'impression,  pour 
Guor-houuen  (Cart.  de  Redon,  ^.  10).  On  en  rapproche  Worwohen,  si  tamcn 
recte  est  impressum;  ce  doute  était  parfaitement  fondé  :  il  faut  lire  Vuor- 
houuen  [Cart.  de  Redon,  p.  59). 

C'est  donc  à  tort,  que,  Gr.  C.^,  p.  116^  Wor  wohen  est  de  nouveau 
cité  comme  exemple  d'm  infectus  ==  w.  Il  faut  lire  vuor-hoiiuen  comme 
plus  haut,  et  dans  ce  mot  un  ou  w  =  v  {Gr.  C  ^,  p.  82^,  note). 

Dans  la  Gr.C.^,  p.  \  ^  ^,  auWeude  Anogen, Usez  Anaugen(^Cart.  de  Redon, 
p.  10). 

Dans  la  Gr.  C-,  p.  152,  le  second  terme  d'Anaii-bcchan  semble  être 
identique  à  l'armoricain  moderne  biluin,  petit,  pour  biccan.  Mais  il  faut 
lire  Anau-Lechan  avec  un  /  au  lieu  d'un  b  au  commencement  du  second 
terme  (Cart.  de  Redon,  p.  95). 

Berthwalart,  donné  (Gr.  C-,  p.  169)  comme  un  exemple  néo-celtique 
de  transposition  des  consonnes  finales  t  r,  est  un  nom  franc  :  Bertuualt 
{Berctlw-waldusjqnine  s'est  jamais  terminé  par  trÇC art.  de  Redon,  p.  10) 

Parmi  les  exemples  à'i  final  Gr.  C.^,  p.  81 5,  se  trouve  Rami;  lisez 
Urmie  pare  final  (Cart.  de  Redon,  p.  23). 

Ces  noms  en  -i  ont  en  général  perdu  un  n  qui  suivait  cet  /.  D'après 
la  Gr.  C.^,  p.  81  $-816,  Davi  fait  exception  et  avait  un  d  final;  cepen- 
dant on  trouve  dans  le  Cart.  de  Redon,  p.  177,  Daiiuiniis. 

Dans  la  Cr.  C.^,p.  816,  Suloc  est  donné  comme  un  exemple  de  la  dési- 
nence oe  -^  ê.  Mais  au  lieu  de  Sidoe,  il  faut  lire  Sidoc  avec  un  c  final 
[Cart.  de  Redon,  p.  38).  Notons  en  passant  à  la  même  page  de  la  Gr.  C-, 
Haeswalloe  pour  Hael-uualoe  {Cart.  de  Redon,  p.  3)  et  Grcnbidoe  pour 
Greu-bidoe  =.  Glen-iiidoe  (Cart.  de  Redon,  p.  2  1  1-2  i  0  '• 


I .  U  me  paraît  bien  difficile  d'atlmettre  que  Vne  de  Portitoe,  cité  à  la  même  page  soit 
l'équivalent  d'un  t'  primitif.  Le  suffixe  toe  du  participe  de  nécessité  [Gr.  C^  p.  192,  H-) 
paraît  identique  au  suffixe  sanscrit  -tavjas  et  au  suffixe  grec  xso;  pour  -rsl'to-ç-  Donc, 
dans  le  suffixe  breton  -toe,  0  ^  av  ti  e  =  ja.  Des  exemples  armoricains  d'o  =  av  sont 
réunis  dans  la  Gr.  C-,  p.  852.  Dans  eguik  le  dernier  e  «=  ja. 


Bibliographie.  471 

Dans  la  Gr.  C.^,  p.  824,  Winon,  Leison  donnés  comme  exemples  delà 
désinence  -on  =  awn  ---=  -an  sont  écrits  par  erreur  pour  Vuinou  (Cart.  de 
Redon,  p.  8  ,  Leisoii  (Cart.  de  Redon,  p.  21;,  mots  terminés  en  u  et  non 
en  n  et  dont  le  suffixe  de  dérivation  contenait  probablement  à  l'origine 
un  ('  au  lieu  d'un  n  (Gr.  €.-,  p.  832).  Au  lieu  de  Jarun,  exemple  du  suf- 
fixe -un  ^^ -ân[os\,  (ibid.,  p.  824),  il  faut  lire  larnn  avec  deux  n  {Cart. 
de  Redon,  p.  49).  Galion,  exemple  unique  du  suffixe  -ion  en  armoricain 
{ibid.),  doit  être  lu  Galcon  avec  un  c  au  lieu  d'un  /  {Cart.  de  Redon,  p. 
20  et  7^1. 

Ce  qui  est  plus  étrange,  c'est  un  exemple  du  suffixe  an  :  Virmanan 
{nomen  feminae  conferendum  nomini  fluvii  bavarici  Wirmina?  adj.  cambr.  hod. 
g-^rm  fusais?)  (Gr.C.^,  p.  825).  Le  meilleur  dans  ce  passage  ce  sont  les 
points  d'interrogation.  Au  lieu  de  Virmanan  lisez  Vinuanau  (Cart.  de  Redon, 
p.  26),  qui  n'est  pas  un  exemple  du  suffixe  -an  et  qui  n'a  aucun  rapport 
ni  avec  Wirmina  ni  avec  gwnn. 

Parmi  les  exemples  du  suffixe  -ac,  Gr.  C.-,p.  848,  se  trouve  Ranwinac, 
lisez  Ran-uuinae  avec  un  e  final  {Cart.  de  Redon,  p.  14^;  parmi  les  exem- 
ples du  suffixe  -iac,  on  rencontre  Pirisiac,  lisez  Pirisac,  sans  /  entre  1'^ 
et  Va  [Cart.  de  Redon,  p.  39). 

Si  M.  Ebel  avait  consulté  les  tables  du  Cart.  de  Redon,  il  n'aurait  pas 
pris  pour  un  nom  commun  le  substantif  Imhoir,  dans  le  curieux  passage 
armoricain  reproduit  in  extenso,  p.  663,  et  en  extrait,  p.  697  de  la  Gr. 
C-  [Cart.  de  Redon,  p.  112).  Il  aurait  vu  que  ce  substantif  était  un  nom 
propre  de  rivière.  Comparez  les  passages  suivants  du  Cart.  de  Redon,  où 
il  est  question  de  la  même  localité  :  flumine  quod  vocatur  Imuuor  (p.  1  2), 
super  ripam  Hemhoir  fp.  1 1  c)'),  flumine  quod  vocatur  Himhoir  (p.  1 1  c)),flumcn 
quod  vocatur  Himboir  fp.  120).  La  forme  Himboir  établit  en  outre  que 
imhoir  ne  peut  être  donné  comme  un  exemple  de  nasalisation  du  p  dans 
le  groupe  mp,  et  qu'il  n'y  a  aucun  rapport  entre  imhoir  et  emporium  quoi 
qu'en  dise  M.  Ebel,  p.  113,  dans  une  addition  malheureuse  au  texte 
primitif  de  Zeuss. 

Les  tables  lui  auraient  fourni  le  mot  crue,  glose  à'acervus  {Cart.  de  Redon, 
p.  1 98)  à  rapprocher  du  comique  crue, du  cambrien  crug  {Gr.  C.^,  p.  1 077). 
De  l'armoricain  crue  est  dérivé  cruguel  qui  se  trouve  dans  le  Catholicon. 
Kreac'h  cité  dans  le  passage  en  question  de  la  Gr.  C.^,  est  un  autre  mot, 
c'est  une  altération  d'une  forme  plus  ancienne  knech,  quenech  'Catholicon, 
éd.  Le  Men,  p.66eti8$;  Dictionnaire  de  Rostrenen,  au  mot  «montée»); 
comparez  le  cambrien  cwn  «  altitudo  »  «  summitas,»  (Gr.  C»,  p.  92),  et 
peut-être  le  vieil  irlandais  cnocc  «  gibber  »  (Gr.  C-,  p.  67).    . 

Je  passe  aux  publications  françaises  sur  la  numismatique.  Je  ne  veux 


472  Bibliographie. 

pas  dire  que  la  plupart  des  Français  qui  s'occupent  de  numismatique  cel- 
tique n'auraient  pas  beaucoup  à  apprendre  dans  la  Grammatica  celtica.  Je 
crois  que,  sauf  quelques  exceptions,  ils  pourraient  plus  gagner  par  la 
lecture  de  ce  livre  que  M.  Ebel  à  celle  de  leurs  écrits.  Mais  je  suis  con- 
vaincu, en  même  temps,  que  la  nouvelle  édition  de  la  Gr.  C.^,  vaudrait 
mieux  si  le  savant  philologue  avait  pris  la  peine  de  lire  ces  modestes 
publications.  Quand  une  monnaie  nous  donne  un  nom  sous  sa  forme 
nationale,  il  est  déplorable  de  le  voir  reproduit  dans  la  Gr.  C-,  sous  la 
forme  exotique  que  lui  ont  imposée  les  écrivains  romains. 

Parmi  les  exemples  du  substantif  -magus  comme  second  terme  de 
composés  (Gr.  C.^,  p.  4  note),  je  voudrais  trouver  Rata-macos  avec  son 
c  =  g  comme  dans  l'écriture  romaine  archaïque  et  son  -os  final.  Au  lieu 
de  Diviîiacus  {Gr.  C^,  p.  20),  on  devrait  lire  Deioiiigiagos  {Annuaire  de 
la  Société  française  de  numismatique,  1867,  p.  17). 

Du  cambrien  cath,  de  l'armoricain  kaz,  «  chat  »  rapprocher  le  bas 
latin  cattus  qui  a  été  relevé  par  Ducange,  quand  on  a  le  gaulois  cattos 
(Ann.  de  la  Soc.  de  num.  1867,  p.  11),  cela  me  paraît  peu  à  sa  place 
dans  une  grammaire  celtique.  Sans  admettre  comme  bien  fondées 
toutes  les  hypothèses  de  M.  de  Saulcy,  il  faudrait  savoir  profiter  de  ce 
qu'il  y  a  de  bon  dans  ses  travaux  si  nombreux  et  si  pleins  de  faits. 

Au  lieu  de  Vercingetorixs  (Hucher,  Révision  des  légendes  des  monnaies  de 
la  Gaule  dans  l^ Annuaire  de  la  Société  de  Numismatique  de  1866,  p.  2', 
d^Orgetirix  ou  Orcetirix  avec  un  c  =  g  (Hucher,  Art  gaulois,  pi.  72)  de 
LvxTiiPios  =  Lucterios  (Longpérier,  Rev.  Num.  Nouv.  série,  T.  V, 
p.  188),  pourquoi  écrire  avec  les  manuscrits  de  César  Vercingeto-rix  sans 
s  final,  Orgeto-rix  avec  un  0  au  lieu  d'un  /  à  la  fin  du  premier  terme, 
Lucterius  avec  la  désinence  -us  au  lieu  de  -os  (Gr.  C.^,  p.  797,  68, 
1 56,  779) .? 

Brennus  (Gr.  C.^,  p.  1070),  aurait  dû  céder  la  place  à  sa  forme  gau- 
loise Brenos  (Longpérier,  Rev.  Num.  Nouv.  sér.,  T.  VIII,  p.  160). 
Parmi  les  exemples  du  préfixe  ate-  le  nom  gaulois  Atepilos  (Longpérier, 
Rev.  Num.  Nouv,  sér.,  T.  V,  p.  180)  aurait  fait  meilleure  figure  que 
Centullus  Ateponis  cité  d'après  Muratori  (Gr.  C.^,  p.  866). 

La  liste  des  noms  gaulois  terminés  en  -illus  =  illos  que  M.  de  L.  a 
réunis,  p.  184-5  du  mémoire  que  nous  venons  de  citer,  est  beaucoup  plus 
complète  que  celle  de  la  Gr.  C.^,  p.  767.  M.  Ebel  ne  paraît  pas  l'avoir 
connue,  pas  plus  que  la  correction  proposée  par  le  savant  français  au 
nom  du  roi  Adcantuannus  (Rev.  Num.  Nouv.  sér.,  T.  IX,  p.  542-4)- 

Dans  la-  Gr.  C.^,  p.  814,  on  cherche  à  rassembler  quelques  rares 
exemples  de  maintien  en  cambrien  de  Vu  suffixe  gaulois.  Un  des  mots 


Bibliographie.  ^.y^ 

cités  est  Bodnc  dont  Vu  est  rapproché  de  celui  du  premier  terme  de  Boduo- 
gnaiiis  .'habitué  à  faire  acte  de  volonté,  résolu,  opiniâtre?)  Mais  dans 
Boduc  les  deux  dernières  lettres  représentent  probablement  sous  une 
forme  moderne  le  suffixe  gaulois  -âcos  (Gr.  C.^,  p.  849).  Pour  retrouver 
Vu  du  premier  terme  de  Boduo-gnahis,  il  faut  remonter  à  une  forme  plus 
ancienne  que  Boduc,  il  faut  remonter  à  Boduoc  (=  Boduâcos),  conservé 
par  une  inscription  de  Margam  dans  le  Giamorganshire  (Longpérier, 
Rev.  Num.  Nouv.  sér.,  T.  IX,  p.  347,  voir  ici  même  p.  29V'.  — 
[Sur  rinscr.  de  Margam,  cf.  Archsologia  Cambrensis,  V'  sér.,  T.  V, 
p.  287-292.] 

La  Grammatica  celtica  de  Zeuss  est  un  chef-d'oeuvre  que  M.  Ebel  a 
beaucoup  amélioré  et  bien  des  érudits  français  devraient  l'étudier  plus 
qu'ils  ne  le  font:  l'auteur  de  cet  article,  tout  le  premier,  a  sur  ce  point, 
plus  d'un  reproche  à  s'adresser.  Mais,  il  ne  s'ensuit  pas  que  tous  les 
travaux  français  sur  les  étymologies  celtiques  soient  dépourvus  de  valeur. 

Il  est  ditdanslaCr.  C.2,  p.797,que  le  nom  gaulois  de  Chartres,  Autri- 
cum,  est  dérivé  du  nomi  de  la  rivière  d'Eure  et  on  propose  de  restituer 
la  forme  celtique  du  nom  de  la  rivière  :  on  suppose  que  ce  nom  devait 
être  Autara.  Au  lieu  à'Autara,  lisez  Autura  (charte  de  l'année  918,  publiée 
par  Tardif,  Monuments  historiques  n°  229,  cf.  Merlet,  Dictionnaire  topo- 
graphique du  département  d'Eure-et-Loir,  p,  66).  Quand  on  peut  consulter 
des  textes,  les  hypothèses  sont  aussi  inutiles  qu'aventureuses. 

Après  les  savantes  études  de  M.  G.  Paris  sur  Vaccentuation  etàe  M .  Qui- 
cherat  sur  la  formation  française  des  noms  de  lieux,  on  ne  devrait  plus 
pouvoir  écrire  que  l'ô  de  Cabillônum,  «  Châlon,  »  que  Va  de  Cenonumi, 
«■  Le  Mans  »  sont  des  voyelles  brèves  iGr.  C.^,  p.  773,  cf.  825;. 

Les  linguistes  qui  s'occupent  de  celtique  pourraient  même  apprendre 
quelque  chose  dans  les  écrits  de  savants  français  plus  anciens. 

On  lit  dans  la  Cr.  C.^,  p.  119,  que  la  substitution  de  1'/;  à  1'^  dans  les 
dialectes  bretons  héritiers  du  gaulois  est  postérieure  à  l'époque  romaine. 
Cependant,  au  siècle  dernier,  d'Anville  signalait  dans  Ptolémée  les  formes 
()'jéc;c;ov£ç  et  Oùi'voivsv  pour  Suessones  et  Suindinum  {Notice  de  la  Gaule, 
p.  620,  621,  cf.  l'extrait  de  Ptolémée,  publié  par  M.  L.  Renier, /Innua/r^ 
de  la  Société  des  antiquaires  de  France,  1848,  p.  274,  204).  Et  de  plus 
il  remarquait  le  maintien  de  cette  suppression  de  Vs  dans  le  nom  donné 
à  la  ville  de  Soissons,  au  ix*"  siècle,  par  Radbert,  abbé  de  Corbie  :  ce 
nom  est  Uesona,  écrit  Vesona  par  Mabillon,  Acta  s.  Bened..,  saec.  iv, 
part.  Il,  p.  250  '.  Il  est,  par  conséquent  impossible  de  croire  à  une 

I.  Mabillon  entre,  a  ce  sujet,  dans  de  longs  développements  que  je  n'ose  reproduire  ici 
de  crainte  de  paraître  prolixe,  mais  qui  méritent  d'être  lus. 


474  Bibliographie. 

fantaisie  ou  à  une  erreur  de  Ptolémée.  Dès  Pépoque  de  Ptolémée,  il  y 
avait  en  gaulois  une  tendance  vers  la  suppression  de  l'Sinitiale  dans  certains 
mots.  Cette  tendance  était  contraire  au  génie  de  la  langue  latine  qui 
paraît  en  avoir  triomphé  partout  où  elle  établit  sa  domination  définitive. 

Le  fait  observé  par  d'Anville  est  d'autant  plus  curieux  que  l'S  initial 
de  Suessiones  apparùent  à  la  particule  su  qui,  dans  les  dialectes  bretons 
comme  en  grec,  a  perdu  son  s  ou  l'a  remplacé  par  une  gutturale  spiranie 
plus  ou  moins  sensible  '. 

Cette  critique  est  bien  longue,  cependant  j'ai  encore  à  ajouter  un  mot. 
M.  Ebel  n'a  pas  compris  la  glose  dacr-lon  «  lacrymarum  plenus  »  mise  par 
une  plume  cambrienne  à  côté  du  mot  latin  vidims  qu'il  tient  à  lire  uvidiis 
[Gr.  C.',  p.  94,  149,  1054)!  Il  ne  paraît  pas  concevoir  la  différence 
qu'il  y  a  entre  une  glose  et  une  traduction. 

Je  donnerai  comme  appendice  une  concordance  entre  le  Cartulairc  de 
Redon  et  les  extraits  publiés  dans  VHistoire  des  peuples  bretons. 

H.  d'ArBOIS   de  JUBAINVILLE. 

Concordance  entre  les  numéros  des  pièces  du  Cartulaire  de  Redon 
publiées  par  M.  de  Courson  dans  son  Histoire  des  peuples  bretons,  1846, 
et  les  numéros  portés  par  les  mêmes  pièces  dans  l'édition  du  Cartulaire 
de  Redon,  qu'a  donnée  le  même  savant  en  1863. 
Histoire  des  peuples  bretons, 
T.    I,  n"   i 
il 
iii 
iv 

V 

vi 
vii 
viii 
ix 

X 

xi 

•  xii 

xiii 

I .  Un  des  exemples  les  plus  curieux  de  ce  phénomène  de  substitution  me  semble  être 
l'armoricain  dec'h,  àeac'h,  «  hier  »  =  /^Osc  =  'yôte;  =  skt  \g]hjas  =  lat.  /;«-ternus 
=  }\er-\  =  hes-\  =  goth.  gis-ixa.  Le  c'h  final  de  dec'ti  tient  lieu  d'uni  ^  primitif;  et,  au 
commencement  de  ce  mot,  la  présence  de  la  dentale  =  y,  en  grec,  comme  dans  les  dia- 
lectes néo-celtiques  (cf.  voc.  comique  doy^  gall.  doc)  fournit  une  concordance  digne 
d'attention  (cf.  Max  Millier,  Lectures,  2"  série,  2°  édit.  p.  214-215;  Curtius,  Cricch. 
Etym.,   2''  éd.,  p.    iS^;  Schleicher,  Compcndium,  2°  édit.  p.  216K 


Cartulaire  a 

k  Redon. 

1°  i. 

p.    I 

"> 

I 

iii, 

3 

iv, 

4 

V, 

5 

vi, 

6 

vii, 

7 

viii, 

8 

ix. 

9 

xxi, 

iB 

xxvi. 

21 

xxvii, 

22 

xxxiii, 

26 

Bibliographie. 


M  S 


Histoire  des  peuples  bretons, 
xiv 

XV 

xvi 

xvii 
xviii 
xix 

XX 

xxi 
xxii 

xxiii, 
xxiv 

XXV 

xxvi 
xxvii 
xxviii 
xxix 

XXX 

xxxi 
xxxii 
xxxiii 
xxxiv 

XXXV 

xxxvi 

xxxvii 

xxxviii 

xxxix 

xl 

xli 

xlii 

xliii 

xliv 

xlv 

xlvi 

xlvii 

xlviii 

xlix 

1 

li 

lii 


C art ul aire  ih 

:  Redon. 

xxxiv, 

27 

xxxv, 

28 

xlv, 

36 

xlvi, 

37 

xlviii, 

38 

xlix, 

39 

Iviii, 

46 

Ixi, 

49 

Ixviii 

53 

Ixxxv, 

64 

Ixxxvi, 

6$ 

xci, 

69 

xciii. 

70 

xcvi, 

72 

cv, 

79 

cvi, 

80 

cvii, 

81 

cviii. 

82 

cix. 

82 

cxiii. 

86 

cxiv, 

87 

cxxvi, 

95 

cxxxi, 

99 

cxxxvi, 

103 

cxxxix, 

106 

cxlvi, 

1 12 

cxlvii, 

113 

cxlviii 

"3 

clii, 

116 

clv, 

119 

dix. 

122 

clxii. 

■25 

clxxxvii 

'44 

cxcv, 

'5' 

ccii, 

157 

ccxxxvi 

184 

ccxli. 

189 

ccxliii 

194 

ccxlvii, 

198 

32 

Bibliographie. 

Histoire 

des  peuples  bretons, 

Ciirtuliiire  de 

Redon, 

liii 

cclvii, 

207 

liv 

cclxi, 

2  10 

Iv 

cclxxiv 

222 

T.  1 

1,  n"  i 

cclxxxvii, 

254 

ii 

ccxciii, 

242 

iii 

cccv, 

257 

iv 

cclxxxiv 

2]  1 

V 

cclxxxix. 

237 

vi 

ccxc, 

258 

vii 

ccclxvi 

518 

viii 

cccxxvii, 

278 

ix 

cccxxxiii;, 

283 

X    I" 

ccclx 

3" 

X    2° 

ccclxx, 

323 

xi 

ccclxxi, 

324 

xii 

ccclxxiii, 

326 

xiii 

X, 

10 

xiv 

xi, 

1 1 

XV 

xii 

12 

xvi 

xiv 

13 

xvii 

XV, 

14 

xviii 

xvi. 

'5 

xix 

xix, 

«7 

XX 

XX, 

ï7 

xxi 

xxi, 

18 

xxii 

xxiii 

'9 

xxiii 

xxiv 

20 

xxiv 

xxvii, 

22 

XXV 

xxviii. 

23 

xxvi 

xxix, 

23 

xxvii 

xxxii. 

25 

xxviii 

xxxiv. 

27 

xxix 

xliii, 

35 

XXX 

xliv, 

36 

xxxi 

xlvii, 

38 

Il  semble,  à  première  vue,  que  le  nombre  des  pièces  du  Cartulaire  de 
Redon,  publiées  en  1846  dans  VHistoire  des  peuples  bretons  soit  de  86, 
mais  il  n'est  que  de  83,  parce  que  les  chartes  données  dans  le  tome  i'''' 


Ribliograpltie.  477 

sous  les  numéros  x,  xii,  xiv,  sont  identiques  aux  chartes  imprimées  dans 
le  tome  II  dans  les  numéros  xxi,  xxiv,  xxvni.  Le  volume  intitulé  Cartu- 
laire  de  l'abbaye  de  Redon,  186^,  contient  470  chartes,  savoir  lola  repro- 
duction intégrale  du  Cartulaire,  :;9i  pièces,  2°  un  appendice  compre- 
nant 79  actes,  dont  45  inédits. 

Reliquie  Celtiche  raccolte  da  Costantino  Nigua.  —  I.  —  II  manoscritto 
irlandese  di  S.  Galle.  Turin,  Lœscher,  1872,  in-4°,  55  pageset  4  planches. — 
Prix;  16  fr. 

Dans  la  préface  de  la  Gr.  C,  Zeuss  a  placé  au  premier  rang  parmi  les 
manuscrits  irlandais  qui  ont  servi  de  base  à  cet  ouvrage,  le  ms.  904  de 
Saint-Gall,  qui  est  un  Priscien,  muni  de  nombreuses  gloses  et  inscriptions 
marginales  en  irlandais.  Il  a  consacré  sept  pages  (Gr.  C.  '  xiii-xx)  à  décrire 
ce  manuscrit  et  à  en  rechercher  l'origine;  et,  dans  le  cours  de  son  livre, 
il  en  a  donné  une  foule  d'extraits  qui  sont  distingués  par  le  signe  abréviatif 
Sg.  Le  plus  long  de  ces  extraits  se  trouve  à  Vappendice,  p.  loio-iop. 

M.  C.  Nigra,  auquel  nous  devons  une  excellente  édition  des  gloses 
irlandaises  de  Turin  (Paris,  Franck,  1869),  déjà  publiées  par  M.  Wh. 
Stokes  dans  ses  Goidiiica,  et  qui  a  inséré  dans  cette  revue,  p.  60  et  suiv., 
des  gloses  irlandaises  inédites  du  manuscrit  C.  301  de  la  Bibliothèque 
Ambrosienne  de  Milan,  précédemment  étudié  par  Zeuss  (Gr.  C.',p.xxix- 
xxxi,io63-io7i),  etpar  M.  VVh.  Stokes(Go/tf.,  p.  17-35),  ^-  C-  Nigra 
a  su  trouver,  au  milieu  d'occupations  multipliées  d'un  autre  ordre,  le  loisir 
de  se  livrer  à  une  révision  du  ms.  904  de  Saint-Gall. 

De  son  travail  est  résulté  à  la  fois  la  rectification  de  plusieurs  lectures 
inexactes  et  un  accroissement  notable  dans  le  nombre  des  matériaux 
dont  nous  disposons  pour  l'étude  de  l'irlandais  ancien. 

Le  savant  auteur  commence  par  la  description  du  manuscrit.  Il  par- 
vient à  en  fixer  la  date  à  l'aide,  entre  autres  choses,  d'une  pièce  de  vers 
latins,  en  l'honneur  de  Gontier,  archevêque  de  Cologne  dans  la  seconde 
moitié  du  ix'=  siècle.  Cette  pièce  paraît  avoir  été  écrite  sur  un  des  feuillets 
du  manuscrit,  vers  l'année  860.  Le  ms.  existait  déjà  à  cette  époque  :  il 
aura  été  écrit  en  Irlande  vers  le  commencement  du  ix^  siècle,  sera  arrivé 
d'Irlande  aux  environs  de  Cologne  vers  850,  et  aura  pris  place  dans  la 
bibliothèque  de  Saint-Gall  vers  la  fin  du  ix''  siècle. 

Ce  qui,  dans  ce  manuscrit,  pique  d'abord  la  curiosité  de  l'érudit,  ce 
sont  des  inscriptions  oghamiques.  Elles  sont  au  nombre  de  huit.  Zeuss 
en  avait  publié  six  seulement  {Gr.  C,  xiv).  Il  l'avait  fait  en  caractères 
latins  et  en  laissant  une  faute  se  glisser  dans  la  première;  M.  Nigra  les 
publie  toutes  :  il  corrige  le  lapsus  de  Zeuss;  et,  à  côté  de  la  reproduction 


478  Bibliographie. 

en  caractères  latins,  il  donne  la  reproduction  en  caractères  oghamiques, 

qui  manque  dans  la  Gr.  C. 

Des  inscriptions  oghamiques,  M.  N.  passe  aux  inscriptions  marginales. 
Les  plus  importantes  ont  été  publiées  par  Zeuss.  M.  N.  donne  une  édi- 
tion complète  de  ces  inscriptions.  Il  signale,  à  cette  occasion,  trois  fautes 
de  lectures  de  Zeuss  :  Gr.  C-,  p.  955,  oaloch  limi,  lisez  ôalotliUnd{ReU- 
quie,  p.  1 8^  Gr.  C.^,  p.  954))  '^^'"'''  chluim,  lisez,  chail,  chlaim  {Rei,  p.  2 5). 

Viennent  enfin  les  gloses.  Ici  M.  Nigra  donne,  non  plus  une  édition 
complète,  mais  un  choix,  qui  porte  autant  que  possible  sur  les  gloses 
qui  n'ont  pas  été  insérées  dans  la  Grammaîica  celtica,  ou  sur  celles  qui  s'y 
trouvent  inexactement  reproduites. 

M.  Nigra  a  fait  l'observation  nouvelle  que,  dans  le  ms.,  le  signe 
abréviatif  destiné  à  remplacer  les  nasales,  est  de  deux  formes  :  l'une, 
tient  lieu  de  l'n  ;  l'autre,  de  Vm.  Cette  distinction  parait  spéciale  à  la 
paléographie  irlandaise  :  elle  est  étrangère  à  la  paléographie  du  conti- 
nent. Il  se  suit  de  là,  que  Zeuss  et  M.  Ebel  se  sont  trompés,  en  attri- 
buant à  l'ancien  irlandais  les  deux  conjonctions  dim  (^igitiir),  et  dam 
(eîiatn),  qu'il  faut  lire  din  et  dan  {Gr.  C.  S  699,  700). 

D'autres  lectures  défectueuses  ont  été  sans  doute  le  résultat  d'inatten- 
tions momentanées  :  ainsi,  à  la  page  771  de  la  Gr.  C.  -,  solam  est  donné 
comme  exemple  du  suffixe  irlandais  -am  :  il  faut  Wrt  sohim,  qui  est  un  mot 
latin  ' . 

1.  Voici  d'autres  corrections  proposées  par  M.  Nigra  : 

Reliquie  p.  31 

p.   32 


226, 

711   atâ  diserc, 

lisez 

atîa  diseirc 

1008, 

hi  condeilc, 

— 

hi  condeulc 

1008, 

cruindd. 

— 

cruindae 

I0I2, 

ni  aedparthi, 

— 

ni  tedparthi 

I0I2, 

oai. 

— 

occi 

1014, 

daiidichtct, 

. 

dandichaet 

lois, 

dongn'itis, 

— 

dondgnîtis 

lois, 

sliiindidae, 



sluinditae 

IOI6, 

isnaib  tredaib, 



isnaib  tredib 

61, 

omalgg, 

— 

ommalgg 

480, 

ICI 8  niedustai,ni  ekustai 

— 

m  edastai 

79', 

muinae. 

— 

muince 

984, 

taidmide. 

— 

tuidmide 

274, 

airune, 

— 

airnne 

3', 

mancipium  (latin), 

— 

mancipi 

791 

dalte. 

— 

dalta 

271, 

idultaigae, 

— 

idaltaigae 

782. 

■    pellis  (latin), 

— 

pelvis 

246, 

7 1 4  ingraidi, 

— 

iiignaidi 

23, 

8(4  muirmôni. 

— 

mairmoru 

794, 

medtosrigachtigthcid, 

— 

medtosngachligtheid 

>o, 

neiin, 

— 

neimi 

■434, 

doardecbtini, 

— 

docrdechtim 

72. 

indaelchubi, 

— 

iiidtelchiibi 

743, 

is 

— • 

as 

739, 

breth- 

— 

brciih- 

Bibliographie.  479 

Parmi  les  mots  de  l'ancien  irlandais  qui  n'étaient  pas  connus  avant  la 
publication  de  M.  Nigra,  un  des  plus  curieux  est  le  nom  qui  signifie 
«poisson.».  On  sait  qu'un  des  caractères  de  l'irlandais,  est  de  supprimer 
dans  certains  mots  le  p  initial.  Un  des  exemples  donnés  par  Zeuss,  Gr. 
C,  p.  77,  est  le  nom  moderne  qui  signifie  (f  poisson  »,  iasg;  en  vieux 
cambrien,  pisc.  M.  Wh.  Stokes  reproduit  cet  exemple,  Ir.  gloss.,  p.  ^8; 
seulement,  pour  donner  à  l'irlandais  iasg  un  caractère  plus  archaïque,  il 
supprime  la  desîitutio  de  la  finale,  et  il  écrit  iasc.  M.  Ebel,  se  défiant 
probablement  de  ce  mot  moderne,  l'a  retranché  dans  sa  rédaction  nou- 
velle, Cr.  C.^,  p.  67.  M.  Nigra  nous  apprend  que  la  forme  ancienne  de 
l'irlandais  moderne  iasg  était  aesc  au  nominatif  singulier,  éisc  au  génitif. 
C'était  par  conséquent  un  thème  en  a,  et  non  un  thème  en  /  comme  le 
latin  piscis  {Rel.  p.  51;  cf.  Gl.  Taur.  p.  xxiii  et  Diefenbach,  Lexicon 
comparativum,  t.  I,  p.  38). 

Les  Reliquie  Celtiche  sont  un  ouvrage  indispensable  à  tous  ceux  qui 
s'occupent  sérieusement  de  philologie  celtique. 

H,  d'Arbois  de  Jubainville.  • 

M.   Nigra  communique  à  la  Revue  les  additions  suivantes  aux  «  Correzioni  » 

qui  terminent  son  livre  : 

P.  10,  lin.    6,  ergregius  —  si  corregga  :  egregius 

P.  M,  lin.  2i\,  follega  deve  tradursi  «  dele,  deline  »  2  per.  s.  del  fut.  red.  con 
significazione  imperativa,  del  verbo  f os ligim  (lino,  delino) 

P.  18,  lin.  23,  maris  M.  —  Si  corregga:  maris  aperti 

P.  23,  lin.  14,  clarum  poema  metri  gratiosi  —  Si  corregga:  cucuius  clarus, 
hilaris,  pulcher 
—        —      Ita  me  Dominus  servet!  —  Si  corregga  :  approbatio  a  meo  Do- 
mino veniat.  dtbrath  =  dcrbad,  t.  n.  in  ^ 

P.  26,  lin.    4,  domenica  di  pasqua  —  Si  corregga:  pascha  ^t%hv3.\  samchasc 
significa  la  sexta  domenica  dopo  Pentecoste 

P.  37,  lin.  23,  ommia  —  Si  corregga:  omnia 

P.   45,  nota,  161b.  amnntangar  —  l.  arûmtangar' 

The  poems  of  Ossian  in  the  original  Gaelic,  with  a  literal  translation  in  to 
English  and  a  dissertation  on  the  authenticity  of  the  Poems,  by  the  Rev.  Ar- 
chibald  Ci.euk,  minister  of  the  Parish  of  Kilmalie.  Together  with  the  English 
translation  by  Macpherson.  In  two  volumes  flxvj-503  et  584  p.  grand  in-8). 
Edinburgh  and  London,  W.  Blackwood  and  Sons.  —  Prix  :  3 1  sh.  6  d. 
(40  fr.  50). 

Handbuch  der  mittelgEelischen  Sprache,  hauptsaechlich  Ossian's. 
Gramniatik,  Lesestûcke,  Wœrterbuch,  vonD' AugustEitRARD.  xiv-305  p.  in-8. 
Wien,  Braumùller,  1870.  —  Prix  :  2  th.  20  sgr.  (10  fr.  75). 

Depuis  plus  d'un  siècle  que  les  <-  poèmes  d'Ossian  »  ont  été  publiés 
en  anglais  par  James  Mac  Pherson,   l'authenticité  et  l'origine   de   ces 


480  Bibliographie. 

poèmes  n'ont  cessé  de  faire  l'objet  de  discussions  toujours  renouvelées. 
Pendant  longtemps  les  préjugés  nationaux  ont  eu  plus  de  part  dans  ces 
controverses  que  l'amour  désintéressé  de  la  vérité  et  la  passion  y  a  joué 
un  plus  grand  rôle  que  la  critique.  Le  terrain  de  la  discussion  est  aujour- 
d'hui changé.  Les  adversaires  de  l'Ossian  de  M^  Ph.  ne  partent  plus  de 
cette  assertion  établie  en  principe  par  les  critiques  anglais  celtophobes 
du  siècle  dernier,  Johnson  et  Pinkerton,  qu'il  n'y  a  pas  de  littérature 
gaélique  (Johnson)  et  que  les  Celtes  sont  des  sauvages  incapables  de 
poésie  (Pinkerton)  ;  —  et  ses  défenseurs  (à  part  peut-être  quelques 
Highlanders  enthousiastes  mais  sans  autorité  en  Ecosse  même)  ne  pré- 
tendent plus  qu'on  possède  dans  ces  poèmes  l'œuvre  d'un  barde  du 
me  siècle  de  l'ère  chrétienne.  La  longue  querelle  entre  l'Irlande  et 
l'Ecosse  prétendant  chacune  avoir  le  monopole  des  traditions  ossianiques 
perd  aussi  sa  raison  d'être  devant  ce  fait  indiscutable  que,  depuis  le  vi'= 
siècle  de  notre  ère,  c'est  le  même  peuple  qui  habite  l'Irlande  et  l'Ecosse 
occidentale,  avec  les  mêmes  usages,  la  même  langue,  la  même  tradition. 
Ce  nom  même  d'Erse,  c'est-à-dire  «  Irlandais,  »  donné  aux  habitants 
des  Hautes-Terres  par  ceux  des  Basses-Terres,  devrait  rappeler  le 
souvenir  de  cette  identité  ethnographique  aux  Highlanders  qui  se  croient 
autochthones.  La  séparation  en  deux  peuples  distincts  (Gaels  d'Irlande  et 
Gaels  d'Ecosse)  ne  s'est  faite  qu'au  xvi^"  et  au  xvii"  siècle,  sous  l'in- 
fluence de  circonstances  religieuses  et  politiques.  Mais  dans  cette  sépa- 
ration aucun  des  deux  peuples  n'a  abandonné  l'héritage  des  vieilles 
traditions  des  ancêtres  :  c'est  le  bien  commun  de  tous  les  Gaels  : 

Chacun  en  a  sa  part,  et  tous  l'ont  tout  entier. 

La  question  se  réduit  donc  à  ceci  :  James  Mac  Pherson  a-t-il 
inventé  ces  poèmes  tout  d'une  pièce,  comme  l'en  accusaient  Johnson 
et  d'autres  ?  S'il  ne  les  a  pas  inventés,  les  a-t-il  retouchés,  ar- 
rangés, fondus  ?  Au  commencement  de  ce  siècle,  la  Highland  Society 
of  Scotland  qui  ouvrit  une  enquête  à  ce  sujet  et  qui  la  mena  avec 
une  intelligence  et  une  honnêteté  qu'on  ne  saurait  trop  louer  ' 
arriva  à  une  conclusion  négative  sur  le  premier  point,  affirmative  sur  le 
second.  M'^  Ph,  n'est  donc  pas  le  faussaire  que  l'on  a  dit;  mais  d'autre 
part  on  ne  peut  savoir  dans  quelle  proportion  exacte  les  ballades  popu- 


I .  Les  résultats  en  ont  été  publiés  dans  un  rapport  dont  b  rédaction  avait  été  confiée  à 
H.  Mackenzie  et  qui  est  encore  l'œuvre  la  plus  importante  sur  le  sujet  :  Report  ofthe 
Committee  0/  thc  Higland  Society  of  Scotland  appointcd  to  induire  into  thc  nature  and 
aiithenticity  ofthe  poenis  ol  Ossian,  drawn  up...  by  Henry  Mackenzie,  Edinburgh,  1S05, 
X-n  5-343  p.  in-8. 


Bibliographie.  481 

laires  recueillies  par  lui  ou  par  ses  amis  dans  les  Highlands,  ou  trouvées 
dans  des  manuscrits  disparus  depuis,  entrent  dans  la  composition  des 
morceaux  épiques  qu'il  a  publiés.  Cette  opinion  à  laquelle  la  Highland 
Society  est  arrivée  après  une  étude  minutieuse  et  impartiale  il  y  a  plus 
d'un  demi  siècle,  ne  semble  pas  devoir  être  modifiée  aujourd'hui.  C'est 
encore  celle  que  soutenait  dans  le  quatrième  volume,  de  ses  Popular 
Tilles  of  the  West  Highlands  un  des  hommes  les  plus  compétents  sur  la 
question,  M.  J.  F.  Campbell,  et  qu'il  a  résumée  ici  même  en  quelques 
lignes  (p.  193).  Voici  pourtant  deux  nouveaux  champions  d'Ossian  ou 
plutôt  de  James  Mac  Pherson  qui  surgissent  au  même  moment,  l'un  en 
Ecosse,  l'autre  en  Allemagne. 

M.  Archibald  Clark,  dans  deux  magnifiques  volumes  publiés  aux  frais 
d'un  généreux  nobleman,  le  marquis  de  Bute,  édite  à  nouveau  le  texte 
gaélique  des  poèmes  d'Ossian,  c'est-à-dire,  le  texte  manuscrit  laissé  par 
M^  Ph.  (et  rédigé  de  sa  main),  et  publié,  onze  ans  après  la  mort  de  ce 
dernier,  en  1807,  par  \a  Highland  Society  ofLondon,  avec  une  orthographe 
ramenée  à  celle  employée  dans  la  Bible  en  gaélique  Ecossais  '.  Deux  édi- 
tions subséquentes  ^  avaient  apporté  quelques  modifications  à  ce  texte; 
mais  M.  Cl.  a  suivi  le  texte  de  1807,  se  bornant,  dit-il,  à  corriger  des 
centaines  de  fautes  d'impression  et  à  «  bannir  quelques  modernisations 
évidemment  introduites  par  le  D''  Ross  »  qui  avait  été  chargé  par  la 
Highland  Society  de  l'édition  de  1807. 

En  regard  du  gaélique  il  donne  une  traduction  nouvelle  et  fort  litté- 
rale dont  il  est  l'auteur;  et  au  bas  des  pages  il  reproduit  le  texte  anglais 
de  M^  Ph.  qui  est  souvent  plutôt  une  paraphrase  un  peu  ampoulée  du 
gaélique  qu'une  traduction  réelle.  Quelque  opinion  qu'on  se  fasse  sur 
l'authenticité  de  ces  poèmes,  il  est  utile  de  trouver  réunis  de  la  sorte  les 
premiers  matériaux  nécessaires  à  l'étude  de  cette  question  et  son  livre 
sera  par  conséquent  le  bienvenu  même  auprès  des  adversaires  de  la  thèse 
qu'il  soutient.  Cette  thèse  est  développée  dans  une  «  dissertation  sur 
l'authenticité  des  poèmes  d'Ossian,  avec  l'indication  des  différentes  édi- 
tions gaéliques,  des  éditions,  etc.,  qui  ont  été  publiées  jusqu'ici,  »  qui 
figure  en  tête  du  t.  I  ;  l'auteur  cherche  à  y  établir  non-seulement  l'au- 
thenticité intégrale,  mais  aussi  l'ancienneté  des  textes  publiés  par  M^  Ph., 


1.  Il  semble  qu'après  cette  publication  le  ms.  de  Mac  Ph.  jugé  désormais  sans  utilité 
fut  détruit  :  en  tout  cas  il  a  disparu  depuis.  Le  seul  fragment  que  Mac  Pli.  avait  publié 
en  gaélique  de  son  vivant  est  le  septième  chant  de  Temora  ;  ce  texte  forme  l'appendice 
de  l'édition  de  Temora  publiée  en  176?. 

2.  Dàna  Oisdn  mhic  Fhinn...  Dun-Eidin  (Edimbourg)  1818,  8-344  P-  ii'S-  —  Dàna 
Uisein  mhic  Fhcin...  Dun-Eidin,  1859.  xvi-344  p.  in-i8.  Cette  édition  de  1859  est  due 
aux  soins  de  M.  Th.  Mac  Lauchlan. 


482  Bibliographie. 

Il  n'a  pas  manqué  de  rencontrer  outre-Manche  des  critiques  sévères, 
parmi  lesquelles  nous  signalerons  celle  de  M.  Hennessy  dans  VAcademy 
des  i"  et  1 5  août  1871.  La  philologie  de  M.  Cl.  est  tout  au  moins 
étrange.  Ainsi  il  émet  l'hypothèse  que  la  langue  de  ces  poèmes  peut 
remonter  au  x"  siècle,  sinon  au-delà,  ce  qui  ne  peut  se  préciser,  ajoute- 
t-il,  faute  de  documents  écrits  de  ces  époques.  Les  documents  au 
contraire  abondent,  bien  que  presque  exclusivementen  Irlande,  et  il  faut 
être  aveuglé  par  les  préjugés  d'un  patriotisme  Ecossais  mal  entendu  pour 
ne  pas  reconnaître  que  le  gaélique  Ecossais  n'existe,  en  tant  que  dialecte 
indépendant,  que  depuis  le  xviie  siècle  et  qu'avant  cette  date  il  n'était 
pas  sorti  du  gaélique  commun  à  l'Irlande  et  à  l'Ecosse  et  dont  il  reste 
tant  de  monuments  en  Irlande.  Il  va  même  plus  loin  et  pour  expliquer 
les  formes  usées  de  la  langue  d'Ossian,  affirme  qu'elle  peut  remonter  à 
une  époque  oij  le  langage  ne  connaissait  pas  encore  les  inflexions!  Nous 
regrettons  d'autant  plus  de  trouver  un  tel  manque  de  îraining  philolo- 
gique chez  M.  Cl.  qu'une  grande  lumière  pourrait  être  jetée  sur  le 
problème  ossianique  par  l'étude  minutieuse  de  la  langue  de  ces  poèmes, 
comparée  d'une  part  avec  la  langue  des  derniers  siècles,  et  d'autre  part 
avec  la  langue  parlée  actuellement  dans  les  Highlands  et  qui  a  subi  peu 
de  changements  depuis  le  dernier  siècle.  Cette  tâche  est  délicate  et  diffi- 
cile pour  un  étranger  :  un  Gael  d'Ecosse  ne  l'entreprendra-t-il  pas  ? 
La  gloire  de  l'Ecosse  n'a  rien  à  y  perdre,  car,  quelle  que  soit  définitivement 
la  date  de  ces  poèmes,  ils  ont  fait  assez  de  bruit  dans  le  monde  et  tien- 
nent assez  de  place  dans  l'histoire  de  la  littérature  pour  que  l'éclat  de 
leur  fortune  jette  un  voile  sur  leur  origine,  celle-ci  fût-elle  humble  et 
récente. 

L'enthousiasme  que  M.  Ebrard  nourrit  pour  «  les  poèmes  d'Ossian  » 
rappelle  la  Sîiirm-Pcriode  ossianique  du  dernier  siècle,  dont  le  Wertiicr 
de  Gœthe  nous  a  transmis  l'écho.  M.  Ebrard  est  professeur  de  théologie 
à  l'Université  d'Erlangen  :  ses  études  sur  l'histoire  ecclésiastique  des 
Gaels  fil  a  publié  sur  les  Guidées  un  travail  dans  la  Zeitschrift  fiir  histo- 
rische  Théologie  de  1862)  l'ont  amené  à  en  étudier  la  littérature  et  il 
s'est  pris  de  passion  pour  Ossian.  Après  avoir  publié  une  traduction  en 
vers  allemands  de  Fingal  fLepzig,  1 868)  il  donne  aujourd'hui  une  gram- 
maire de  la  langue  de  l'Ossian  de  M^  Ph.  et  son  but  principal  est,  dit-il, 
d'encourager  la  jeunesse  allemande  à  la  lecture  de  l'épopée  ossianique 
dans  l'original  et  de  la  lui  rendre  facile.  La  grammaire  est  accompagnée 
de  morceaux  choisis  et  d'un  vocabulaire  et  forme  en  effet  une  utile 
préparation  à  l'étude  des  «  poèmes  d'Ossian.  ^>  L'auteur  n'a  pas  évité 
de  rapprocher  le  gaélique  avec  les  autres  langues  de  la  famille  indo- 


Bibliographie.  483 

celtique,  sans  doute  pour  en  faciliter  l'étude,  mais  s'il  avait  restreint  le 
nombre  de  ces  rapprochements,  inutiles  pour  le  but  qu'il  se  propose,  il 
se  fût  évité  plus  d'une  erreur  de  détail.  Quant  à  son  titre  ''Grammaire 
du  gaélique  moyen,  principalement  d'Ossiani  nous  avouons  ne  pas  le 
trouver  justifié;  M.  E.  admet  que  la  langue  de  l'Ossian  de  M^  Ph.  forme 
une  époque  distincte  et  datée  dans  l'histoire  de  la  langue  gaélique,  mais 
ne  dit  rien  pour  le  prouver.  L'Ossian  de  M'^  Ph.  est  le  monde  dans 
lequel  vit  et  se  meut  M.  E.,  qui  n'introduit  dans  cette  étude  aucun 
terme  de  comparaison,  pas  même  les  ballades  ossianiques  d'Ecosse 
(celles-là  d'une  authenticité  incontestable)  que  nous  a  conservées  un 
ms.  écrit  dans  les  premières  années  du  xvr'  siècle  et  que  MM.  Th.  Mac 
Lauchlan  et  W.  F.  Skene  ont  publié  en  1862,  à  Edimbourg,  sous  le 
titre  de  The  Dean  of  Lismore's  BooK 

H.  G. 

Traditions    and    Hearthside   Stories    of    West     Corn-wall,     by 

William  Boïtuell  (an  old  Celtj.  Penzance  (London,  Trùbner),  1870,  in- 12, 
vj-292  p.  —  Prix  :  6  sh.  (7  fr.  50). 

Ce  volume  peut  être  apprécié  à  deux  points  de  vue  différents.  Com- 
posé par  un  habitant  du  pays  dont  il  s'occupe  et  destiné  surtout  aux 
compatriotes  de  l'auteur,  il  a  pour  eux  sans  doute  un  charme  qu'un 
étranger  apprécie  difficilement.  Les  mœurs  et  les  usages,  les  plaisan- 
teries familières,  le  parler  vulgaire  de  l'endroit  s'y  reflètent  dans  des 
récits  dont  la  scène  variée  offre  à  l'auteur  l'occasion  de  décrire  presque 
tous  les  sites  intéressants  de  la  contrée.  Nous  ne  doutons  donc  pas  que 
le  livre  de  M.  Bottrell  n'ait  du  succès  en  Cornouailles  ;  mais  nous 
avouons,  pour  nous,  que  le  titre  nous  avait  fait  concevoir  des  espé- 
rances que  la  lecture  n'a  pas  confirmées. 

Le  coin  occidental  de  la  presqu'île  de  Cornouailles  (et  spécialement 
l'extrême  pointe,  ou  district  de  West  Pentrith),oij  l'auteur  a  recueilli  les 
matériaux  de  son  recueil,  n'est  en  relations  faciles  et  fréquentes  avec  le 
reste  de  l'Angleterre  que  depuis  un  temps  relativement  très-récent.  Bien 
que  l'anglais  s'y  parle  depuis  longtemps  et  s'y  parle  seul  depuis  plus 
d'un  siècle,  il  est  naturel  de  croire  que  ces  populations  isolées  du  reste 
du  monde  ont  gardé  un  riche  trésor  de  superstitions  et  de  récits  mytho- 
logiques. Il  ne  semble  pas,  d'après  le  livre  de  M.  Bottrell,  qu'il  en  soit 
tout  à  fait  ainsi.  De  tous  les  pays  européens,  l'Angleterre  est  peut-être 
celui  où  la  civilisation  moderne  a  le  plus  complètement  étouffé  l'an- 
cienne tradition  populaire,  si  tenace  encore  dans  beaucoup  de  parties  de 
l'Allemagne  ou  de  la  France.  Le  goût  tout  celtique  des  longues  histoires 


484  .  Bibliographie. 

s'est  conservé  en  Cornouailles',  mais  les  conteurs  de  droits  ont  peu  à  peu 
substitué  aux  anciens  récits  des  anecdotes  d'un  caractère  tout  moderne, 
généralement  plaisantes,  et  où  l'abondance  des  détails,  la  vivacité  du 
dialogue,  l'originalité  des  caractères  mis  en  scène  ne  suppléent  que  fort 
imparfaitement  au  vide  presque  absolu  du  fond.  Ce  qui  reste  encore 
dans  ces  récits  de  l'ancienne  mythologie  s'est  effacé^  aplati,  décoloré  de 
telle  sorte  que  la  lecture  de  ces  histoires  irrite  souvent  plus  qu'elle  ne 
l'intéresse  l'amateur  de  véritable  folk-lore.  Je  ne  connais  rien  de  plus 
désagréable,  pour  ma  part,  que  les  histoires,  qui  remplissent  les  trois- 
quarts  des  livres  de  ce  genre  écrits  en  Angleterre,  où  des  revenants  et 
des  fantômes  terribles  se  trouvent  finalement  n'être  que  les  rêves  d'un 
ivrogne  ou  des  mannequins  manœuvres  par  un  farceur.  Cet  evhcmérisme 
sans  portée  est  surtout  choquant  lorsque  Fauteur  du  récit  l'emploie  dans 
une  intention  morale,  pour  guérir  le  peuple  (qui  ne  le  lit  pas)  de  ses 
superstitions.  M.  Bottrell  est  tombé  souvent  dans  ce  défaut,  mais  bien 
plus  souvent  encore  dans  celui  que  je  signalais  tout  à  l'heure:  la  majorité 
de  ses  récits  sont  des  anecdotes  sans  aucun  intérêt,  où  un  grain  de  sel 
est  délayé  dans  un  seau  d'eau. 

Ce  n'est  pas  qu'il  n'y  ait  rien  d'intéressant  dans  ce  livre  :  quelque 
affaiblie  qu'elle  soit,  la  mythologie  celtique  n'est  pas  tout  à  fait  morte 
en  Cornouailles,  et  M.  B.  en  a  çà  et  là  conservé  quelque  trace  précieuse. 
Si,  au  lieu  de  mettre  ses  histoires  bout  à  bout,  il  avait  classé  les  sujets 
dans  un  ordre  quelconque,  si  surtout  il  avait  donné  sur  les  points  vrai- 
ment importants  des  explications  précises  ^,  son  recueil  aurait  bien  plus 
de  valeur.  Il  a  rendu  service  en  rassemblant  des  traditions  qui  sont  à 
peu  près  toutes,  à  ce  qu'il  dit  lui-même,  déjà  éteintes;  mais  il  est  mal- 
heureux que  son  travail  n'ait  pas  été  mieux  dirigé.  Disons  à  ce  propos 
qu'il  existe  des  livres  qui  peuvent  servir  de  modèles  pour  des  travaux 
de  ce  genre,  et  qu'on  peut  imiter  sans  avoir  la  science  de  leurs 
auteurs.  Je  citerai  surtout  les  Norddeiitsche  Sagcn  de  Kuhn  et  Schwartz  ; 
là  tous  les  faits  intéressants  sont  recueillis  avec  discernement,  sobrement 
présentés,  classés  avec  soin  et  méthode;  quant  aux  remarques  mytholo- 
giques, le  collecteur  local  en  est  dispensé;  il  lui  suffit  d'apporter  à  la 
science  le  résultat  sincère  et  bien  trié  de  ses  recherches.  —  Je  vais 
indiquer  rapidement  ce  qui,  dans  le  livre  de  M.  Bottrell,  mérite  surtout 
d'attirer  l'attention  des  mythologues. 

1.  Encore  M.  B.  dit-il  que  les  droU-tellers  sont  de  plus  en  plus  remplacés  par  la  lec- 
ture des  journaux. 

2.  Ainsi  la  plupart  des  croyances  populaires  que  je  signalais  ci-dessus  sont  indiquées 
dans  ce  livre  par  des  allusions,  en  passant;  mais  on  ne  nous  dit  nulle  part  ce  que  le 
peuple  croit  au  juste  des  esprits,  des  sm^ill  pcople,  des  piskcys,  etc. 


Bibliographie.  485 

Les  récits  sur  les  géants,  en  tant  que  récits,  n'ont  pas  de  valeur  ;  mais 
ils  constatent  très-abondamment  la  croyance  populaire  à  l'existence 
d'êtres  gigantesques  qui  auraient  autrefois  habité  tout  le  pays.  Quelques- 
uns  de  ces  géants,  là  comme  ailleurs,  ont  laissé  des  traces  de  leur 
passage  dans  des  vallées,  des  rochers,  ^Xc,  dont  la  configuration  favo- 
risait cette  attribution.  La  légende  du  géant  Bolster,  qui  poursuit  sainte 
Agnès  (p.  47)  nous  montre  une  variante  effacée  d'un  mythe  extrême- 
ment répandu.  —  Les  fées  n'apparaissent  pas  dans  le  livre;  on  y  voit 
d'autant  plus  souvent  la  mention  du  small  people,  qui  vit  sous  terre, 
travaille  dans  les  mines  (on  sait  que  la  Cornouailles  est  la  terre  de 
l'étain)  et  entre  avec  les  hommes  dans  des  relations  variées,  tantôt  bien- 
faisantes, tantôt  funestes.  —  Le  piskey,  qui  égare  les  voyageurs  ou  lutte 
la  nuit  avec  eux,  a  son  pendant  dans  les  galipotes,garaches,  bigournes,  etc., 
de  nos  diverses  provinces  de  France.  —  Le  chasseur  noir  est  également 
connu  en  Cornouailles,  où  il  paraît  complètement  assimilé  au  diable.  — 
La  mermaid  figure  aussi  dans  une  ou  deux  légendes,  très-modernes 
comme  forme,  mais  qui  conservent  la  croyance  en  des  êtres  surnaturels 
habitants  des  flots.  —  La  dévotion  aux  fontaines  n'est  pas  encore 
éteinte;  on  vient  de  très-loin  baigner  les  enfants  dans  certains  puits  qu'on 
croit  doués  de  vertus  divines;  les  filles  y  jettent  des  épingles  ;  autrefois 
tous  ces  puits  étaient  ornés  de  croix  vénérées,  qui  ont  presque  partout 
disparu.  —  La  sorcellerie,  autant  qu'on  peut  en  juger  par  l'exposition 
peu  claire  de  l'auteur,  est  encore  florissante  ;  mais  il  n'y  a  plus  guère  que 
des  white  witches,  ou  pellars,  qui,  moyennant  salaire,  donnent  des  charmes 
qui  préservent  des  fantômes,  des  mauvais  sorts,  des  maladies,  etc.  voy. 
cependant  p.  85).  On  vient  annuellement,  souvent  de  loin,  chez  le 
conjurer  en  renom,  faire  renouveler  sa  protection  (p.  115  .  —  Je  ne 
parle  pas  des  anciens  usages,  des  jeux,  des  danses,  etc.,  mentionnés 
dans  ce  volume  ;  ce  n'est  pas  ce  qu'il  contient  de  moins  intéressant, 
mais  il  est  difficile  d'en  donner  une  idée  sommaire. 

Pour  la  langue,  je  ne  vois  rien  à  relever,  en  dehors  de  quelques  éty- 
mologies  hasardées  de  noms  de  lieux.  L'auteur  donne  quelques  détails, 
qui  n'ont  d'ailleurs  ni  authenticité  ni  grand  intérêt,  sur  DoUy  Pentreath, 
la  fameuse  vieille  femme  de  Mousehole,  morte  en  1777,  qui,  dit~on, 
parla  la  dernière  le  comique,  et  à  laquelle  le  prince  Lucien  Bonaparte  a 
élevé  un  monument.  Le  langage  actuel  en  Cornouailles  est  de  l'anglais 
relativement  pur,  mais  qui,  dit-on,  est  prononcé  avec  une  mélopée  toute 
particulière.  M.  Bottrell  annonce  que  si  sa  publication  est  accueillie  avec 
faveur,  il  publiera  une  seconde  série.  Nous  l'y  encourageons  vivement, 
mais  en  souhaitant  qu'il  apporte  dans  son  nouveau  recueil  plus  d'ordre 


486  Bibliographie. 

et  d'esprit  scientifique,  qu'il  entoure  les  points  vraiment  intéressants 
d'explications  plus  claires,  qu'il  écarte  tout  ce  qui  n'est  que  du  remplis- 
sage, qu'il  nous  donne,  en  un  mot,  moins  de  paille  et  plus  de  grain. 

Gaston  Paris, 

The  Life    of   Saint  Meriasek,  Bishop  and  Confesser,  a  Cornish  Drama 

edited,   with  a  translation  and  notes,    by   Whitley   Stokes.   xvj-279  pages, 
in-8°  avec  un  fac-similé.  London,  Trùbner,  1872. — Prix:   i  5  sh.  (  18  fr.  75). 

Patronymica  Cornu-Britannica  ;  or,  the  etymology  of  Cornish  Sur- 
names,  by  H.  S.  Gharxggk,  Ph.  Dr.,  etc.  xvj-160  p.  in- 12.  London, 
Longmans,  1870.  —  Prix  :  7  sh.  6  d.  (9  fr.  35}. 

L'état  misérable  où  la  nationalité  bretonne  fut  réduite  dans  la  pénin- 
sule de  la  Cornouailles  anglaise  après  les  conquêtes  saxonne  et  normande 
ne  permit  pas  à  une  véritable  littérature  de  s'y  développer  ;  car  une 
littérature  ne  peut  naître  que  là  où,  par  suite  de  circonstances  politiques, 
un  peuple  a  la  conscience  de  son  existence  et  de  son  activité  nationales. 
Aussi  le  comique,  éteint,  comme  on  sait,  à  la  fm  du  dernier  siècle, 
n'a-t-il  laissé  d'autres  monuments  que  quelques  mystères  compilés  ou 
traduits  à  différentes  époques  des  xW  et  xv  siècles  pour  le  divertisse- 
ment du  peuple  de  Cornouailles.  Ces  représentations  se  sont  continuées 
jusqu'au  commencement  du  xviT  siècle,  époque  à  partir  de  laquelle  le 
comique  tomba  définitivement  au  rang  de  patois  et  décrut  rapidement 
devant  les  progrès  de  l'anglais.  Les  mystères  comiques  jusqu'ici  connus 
avaient  été  publiés  par  M.  Edwin  Norris  ÇThe  ancient  Cornish  Drama, 
2  vol.  Oxford,  1859)  st  par  M.  Wh.  Stokes  (The  Passion  of  oiir  Lord, 
Londres,  1862;  The  Création  of  the  World,  Londres,  1864).  Un  heureux 
hasard  fit  découvrir  il  y  a  trois  ans  dans  la  riche  collection  d'Hengwrt 
(aujourd'hui  propriété  de  M.  Wynne,  à  Peniarth)  un  nouveau  mystère 
comique.  M.  Wh.  St.  vient  de  le  publier  avec  une  traduction  anglaise  et 
des  notes  philologiques. 

Le  sujet  de  ce  mystère,  qui  est  la  vie  de  saint  Meriadec,  atteste  une 
fois  de  plus  la  parenté  étroite  qui  unissait  les  Bretons  d'Armorique  et 
ceux  de  la  Cornouailles  insulaire  ;  cette  parenté  se  retrouve  aussi  bien 
dans  la  communauté  de  traditions  littéraires  et  religieuses  que  dans  les 
caractères  philologiques  des  deux  dialectes.  Saint  Meriadec  (en  comique 
Meriasek)  est  un  saint  breton,  et  la  scène  de  l'action  est  le  plus  souvent 
en  Bretagne  (les  noms  de  localités  bretonnes  mentionnées  dans  la  pièce 
ont  été  identifiées  pour  M.  St.  par  M.  de  la  Villemarqué).  Le  mystère, 
qui,  comme  les  œuvres  de  ce  genre,  brille  plus  par  la  naïveté  des  senti- 
ments que  par  l'habileté  de  la  composition,  repose  sur  trois  légendes 


I 


Bibliographie.  487 

cousues  sans  art  par  l'auteur  :  ij.  L'histoire  de  saint  Meriadec,  que  l'on 
connaît  d'autre  part  par  les  BoUandistes  (7  juin),  Albert  le  Grand  et 
Dom  Lobineau;  2)  l'histoire  du  pape  saint  Sil,vestre  et  de  l'empereur 
Constantin,  thème  souvent  traité  par  la  littérature  du  moyen-âge  et  dont 
M.  St.  signale  en  passant  la  trace  dans  la  littérature  irlandaise  (p.  VIII, 
n.);  5)  la  curieuse  histoire  d'une  femme  dont  le  fils  unique  a  été  enlevé 
par  des  brigands  et  qui  ayant  trouvé  la  sainte  Vierge  sourde  à  ses  prières 
enlève  l'enfant  Jésus  des  bras  de  la  statue  de  la  Vierge  et  le  garde  en 
gage  jusqu'à  ce  que  son  propre  fils  lui  soit  rendu  par  l'intervention  de  la 
Vierge.  M.  St.  n'a  pu  retrouver  ailleurs  la  trace  de  cette  dernière 
histoire;  mais  le  savant  M.  Reinhold  Kœhler  nous  fournit  à  cet  égard 
les  renseignements  suivants  :  «  L'auteur  du  drame  comique  a  sans  doute 
tiré  cette  histoire  de  la  Legenda  Aurea  de  Jacques  de  Voragine  où  elle  se 
rencontre  au  §  4  du  chap.  CXXXI  intitulé:  de  nativitate  beatae  Mariae 
virginis  (Ed.  Grassse,  Dresde,  1846,  p.  591).  —  Elle  se  trouve  en 
outre  dans  Li  Miracoli  délia  M  adonna,  testo  di  lingua  citato  a  penna 
recato  a  buona  lezione.  Urbino,  1855.  Chapitre  XLII  :  Come  un  figliuolo 
diuna  donna  vedova  fu  messo  in  prigione,  per  li  meriti  di  Nostra  Donna 
fu  liberato,  cioè  scampato  da  Lei.  Ce  récit  ne  s'écarte  pas  de  celui  de 
la  Legenda  Aurea,  il  semble  en  être  une  traduction  libre.  Sur  les  diffé- 
rentes éditions  des  Miracoli  délia  Madonna,  voir  Fr.  Zambrini  :  Le  opère 
volgari  a  slampe  dei  secoli  xiii  et  xiv.  Bologna,  1866,  p.  289  et  suiv.  — 
L'auteur  anonyme  du  Passional  a  aussi  introduit  cette  légende  dans  son 
poème.  Elle  a  été  plus  d'une  fois  publiée;  Voyez  1)  Das  alte  Passional 
Hgg.  von  K.  A.  Hahn,  Francfort-sur-le-Main,  1845,  p.  145.  2) 
Drei  mittelhochdeutsche  Gedichte,  Hgg.  von  K.  Schasdel,  Hanovre,  1845, 
p.  9  et  suiv.;  j)  Marieniegenden  [Hgg.  von  Fr.  Pfeiffer]  Stuttgard,  1846, 
n'5  v;  4)  Gesammtabenleuer.  Hundert  altdeusche  Erzaehlungen,  Hgg.  von 
Fr.  H.vonder  Hagen,  vol.HI,  Stuttgart  et  Tubingue,  1850,  n"  LXXV; 
5;  Gœdeke  :  Deuîsche  Dichtang  ini  Mittelalter,  Hanovre^  1854,  p.  137 
et  suiv.  D'après  les  recherches  de  Joseph  Haupt  ^Silzungsberichte  der 
phil.  histor.  Classe  der  kais.  Akademie  der  Wissenschaften,  vol.  LXIX,  p. 
11 5  et  suiv.;  le  poète  du  Passional  n'a  très-probablement  eu  que  la 
Legenda  Aurea  comme  source  de  son  œuvre  ".  » 


I.  M.  R.  Kœhler  nous  écrit  encore  à  ce  sujet  :  «  Après  avoir  lu  le  drame  de  Meriasek 
dans  la  traduction  je  veux  vous  faire  remarquer  que  l'auteur,  en  ce  qui  concerne  l'empereur 
Constantin  et  le  pape  Sylvestre,  a  évidemment  mis  à  contribution  le  ch.  XII  de  la  Legenda 
Aurea  qui  traite  de  saint  Sylvestre.  La  phrase  qui  vient  après  le  vers  iS?s  :  «  Cum  in 
aquam  descendisset  baptismatis  mirabilis  enituit  splendor  lucis  Sic  inde  mundus  exivit  et 
Christum  se  vidisse  asseruit  »  se  trouve  dans  la  Leg.  /!.,  à  cela  prés  qu'il  y  a  ibi  emicuit 
splendor  et  sicquc  (l'éd.  de  Graesse  donne  au  dernier  mot  aperuit,  mais  par  erreur:  deux 


488  Bibliographie. 

Le  ms.  est  daté  de  1 504  et  renferme  le  nom  du  scribe,  mais  il  ne 
fournit  aucun  renseignement  sur  la  date  de  composition  de  l'œuvre  ;  le 
langage,  qui  appartient  au  comique  moyen,  est  un  peu  plus  moderne 
que  celui  des  drames  publiés  par  M.  Norris;  mais  il  donne  encore  les 
formes  grammaticales  dans  leur  régularité.  M.  St.  a  accompagné  le  texte 
d'une  traduction  serrée  et  précise,  et  a,  dans  des  notes,  relevé  et  expli- 
qué les  formes  les  plus  intéressantes  philologiquement.  Il  est  inutile 
d'ajouter  qu'on  y  trouve  l'érudition  et  la  critique  ordinaires  au  savant  et 
laborieux  éditeur. 

Nous  aurions  voulu  retrouver  cette  rigueur  philologique  dans  une 
autre  œuvre  consacrée  à  la  CornouailleS;,  les  Paîronymica  Cornu-Britannica 
de  M.  Charnock.  Si  cette  rigueur  est  nécessaire  quelque  part,  c'est  bien 
dans  l'étymologie  des  noms  propres,  recherche  fatalement  conjecturale, 
car  les  documents  font  le  plus  souvent  défaut;  il  n'y  a  nul  critérium 
extrinsèque;  et,  par  conséquent,  la  limite  est  malaisée  à  établir  entre 
l'hypothèse  et  la  fantaisie.  Pour  quelques  noms  qui  ont  gardé  une  forme 
transparente  où  l'on  entrevoit  leur  sens  primitif,  combien  se  transmettent 
altérés,  et,  ce  qui  est  pis  encore,  défigurés  à  dessein,  quand  le  son  pri- 
mitif est  oublié,  pour  retrouver  une  apparence  de  sens  !  L'ouvrage  de 
M.  Ch.,  qui  contient  de  1,200  à  1,400  noms,  repose  comme  matériaux, 
sur  les  almanachs  d'adresses  de  Cornouailles  et  sur  des  listes  de  noms  que 
lui  ont  communiquées  des  personnes  qu'il  nomme.  Les  noms  d'origine 
celtique  forment  du  reste  actuellement  une  très-faible  minorité  en 
Cornouailles;  M.  Ch.  donne  la  proportion  de  i  à  10.  Après  une  intéres- 
sante préface  et  une  liste  d'ouvrages  consultés,  (parmi  lesquels  on  est 
étonné  de  ne  pas  rencontrer  le  Cornish  Drama  de  M.  Edw.  Norris  et 
surtout  les  Notes  on  the  names  oj Places  de  M.  E.  Hoblyn  Pedler  qui  sont 
dans  l'appendice  du  tome  II  de  M.  Norris),  l'auteur  donne  par  ordre 
alphabétique  les  noms  qu'il  a  recueillis  en  les  accompagnant  des  étymo- 
logies  qu'il  présente  ou  qu'il  suggère.  Il  nous  eut  semblé  plus  rationnel 


anciennes  éditions  que  j'ai  sous  les  yeux,  de  Deventer,  1479,  et  de  Bâie,  1490,  donnent, 
comme  le  drame  comique,  asscruit).  —  Aux  vers  1627-31,  comp.  Leg.  A.  «  dignitas 
romani  imperii  ipopuli,  Grasse]  de  fonte  nascitur  pietatis,  quîe  liane  etiam  legem  dédit, 
ut  capital!  sententias  subderetur  quicunque  in  belle  aliquem  occidisset  infantem.  »  —  Aux 
vers  4046  et  suiv.,  et  4080  et  suiv.,  comp.  Leg.  A.  «  eum  taliter  alloquaris  :  Dominus 
noster  Jésus  Christus  de  Virgine  natus,  crucifixus  et  sepultus,  qui  resurrexit  et  sedet  ad 
dextram  patris,  hic  venturus  est  judicare  vivos  et  mortuos.  »  Aux  vers  4168-73,  comp. 
Leg.  A.  «  sicque  populus  Romanorum  a  morte  duplici  liberatus  est,  scilicet  a  cultura 
dcemonis  et  veneno  draconis.  »  —  Le  Soracte,  qui,  soit  dit  en  passant,  doit  s'être  appelé 
jusqu'à  une  époque  récente  Monte  san  Silvestre,  s'appelle  dans  la  Leg.  A.  du  nom  de 
Siraptim,  dans  le  drame  comique  et  dans  les  poésies  de  Conrad  de  Wurzbourg,  au  vers 
1283,  ^eraptin.  Cette  dernière  leçon  se  trouvait  sans  doute  dans  certains  mss.  de  la 
Legenda  Aurea.  » 


Bibliographie.  489 

de  répartir  ces  noms  par  séries,  de  grouper  séparément  les  noms  de 
lieu  devenus  noms  d'hommes,  les  noms  de  baptême  transmis  héréditaire- 
ment, les  noms  de  dignités  ou  de  profession,  les  noms  de  bonnes  ou  de 
mauvaises  qualités  physiques  ou  morales,  etc.  ',  d'autant  plus  que  le 
rapprochement  de  noms  analogues  aurait  porté  avec  soi  une  lumière 
claire  et  vive  qu'on  cherche  vainement  dans  le  livre  de  M.  Charnock.  En 
outre  et  surtout,  il  eut  fallu,  soit  par  des  exemples  empruntés  à  la 
langue  comique  même,  soit  par  l'histoire  de  noms  de  lieu  en  Cornouailles, 
établir  les  règles  de  la  composition  des  mots  et  légitimer  leurs  transfor- 
mations phonétiques.  Faute  de  méthode  philologique,  et  malgré  la  jus- 
tesse de  l'explication  de  quelques  noms,  nous  ne  pouvons  voir  dans  ce 
livre  qu'une  oeuvre  d'étymologie  conjecturale  poussée  à  outrance.  Au 
reste  l'auteur  semble  avoir  écrit  moins  pour  les  savants  que  pour  le  grand 
public. 

H. G. 


Die  keltischen  Bestandtheile  in  der  englischen  Sprache.  Eine 
Skizze  von  Otto  v.  KNOitiiLsnoRFF.  Berlin,  Weber,  1870,  73  p.  in- 12.  Prix  : 
10  sgr.  (I  fr.  35). 

L'auteur  de  cette  brochure  trouvant  que  M.  Ed.  Mùller  dans  son 
excellent  Etymologisches  Wœrlerhnch  des  englischen  Sprache  (Cœthen, 
1865)  a  fait  la  part  trop  petite  à  l'élément  celtique,  a  dépouillé  les 
ouvrages  de  Diefenbach,  de  Pott,  de  Diez,  etc.,  et,  partout  où  il  a  vu 
un  mot  anglais  rapproché  d'un  mot  celtique,  l'a  inséré  dans  son  vocabu- 
laire des  ((  Eléments  celtiques  de  la  langue  anglaise.  »  Mais  la  bonne 
volonté  ne  supplée  pas  à  la  méthode  et  son  livre  ne  peut  guère  être 
considéré  que  comme  un  index  des  ouvrages  qu'il  a  consultés.  M. de  Kn. 
mêle  au  hasard  de  l'ordre  alphabétique  les  mots  qui  ont  une  origine 
commune  dans  l'unité  européenne  et  dont  il  eût  été  inutile  de  grossir 
son  glossaire  (ex.  scven,  young,  etc.  ;  ce  sont  les  plus  nombreux  de  sa 
liste);  ceux  qui,  quoique  d'origine  primitivement  celtique,  viennent  à 
l'anglais  directement  du  français  (ex.  :  ambassador,  arpent,  embassy,e\.c.), 
ceux  qui  viennent  à  l'anglais  et  aux  langues  celtiques  d'une  source  étran- 
gère commune  (ex.  :  Street,  sugar,  etc.)  :  il  ne  distingue  pas  les  mots 
entrés  tout  récemment  dans  la  langue  (ex.  :  glen,  brogue),  met  en  ligne 
des   mots  qui  restent  celtiques   en  anglais  (ex.  :    Brehon    dans  Brehon 

I.  C'est,  par  exemple,  le  procédé  suivi  par  M.  P.  Potier  de  Courcy  dans  son  intéres- 
sante Dissertation  sur  l'origine  et  la  formation  des  noms  de  famille  en  Bretagne,  publiée 
d'abord  en  iSji  dans  le  Bulletin  Archéologic]ue  de  l'Association  Bretonne  (t.  111,  2'  part., 
p.  115-159)  et  réimprimée  par  l'auteur  dans  le  t.  III  (p.  1-30)  de  son  Nobiliaire  et 
Armoriai  de  Bretagne  (2"  éd.  1862,  in-4). 


490  Bibliographie. 

Laws),  et  enregistre  jusqu'à  des  mots  comme  Mac  «  fils  »  du  gaélique 
mac  !  Il  est  vrai  que  s'il  n'eût  enrôlé  de  force  tous  les  mots  qu'il  rencon- 
trait sur  son  chemin,  il  n'eût  pu  former,  comme  il  l'a  fait,  tout  un 
bataillon  de  mots  anglais  d'origine  celtique  ;  mais  il  eût  mieux  fait 
d'accorder  une  étude  particulière  aux  quelques  mots  anglais  auxquels 
on  a,  faute  de  mieux,  attribué  une  origine  celtique,  et  qu'il  se  borne  à 
enregistrer  comme  les  autres  dans  son  index.  M.  de  Kn.  qui  semble  pour 
sa  préface  fort  enthousiaste  des  choses  celtiques  s'apercevra  lui-même 
de  tous  ces  défauts  en  poussant  plus  loin  ses  recherches. 

H.  G. 


Hanes  Cymry  America;  a'u  sefydliadau,  eu  heglwysi,  a'u  gweinidogion, 
eu  cerddorion,  eu  beirdd,  a'u  llenorion  ;  yn  nghyda  thiroedd  rhad  y  llywo- 
draeth  a'r  reilffyrdd  ;  gyda  phob  cyfarwyddiadau  rheidiol  i  yinfydwyr  i  siclirau 
cartrefi  rhad  a  dedwyddol.  Gan  y  Parch.  R.  D.  Thomas  (lortliryn  GwyncdJ). 
Cyfroll.  Utica,  N.  Y.  (T.  J.  Griffitlis,  Argraffydd,  Exchange  Buildings.)  1872, 
vj-179-171-177  p.  in-i2  (avec  5  p.  de  musique  et  16  p.  d'annonces),  — 
Prix:  2  dollars  (relié:  2  1/2  et  5  doll.) 

Cette  Histoire  des  Gallois  d'Amérique  qu'un  patriote  plein  de  zèle, 
M.  R.  D.  Thomas,  vient  de  publier  dans  la  petite  ville  d'Utica  (État  de 
New-York)  comble  une  grave  lacune  dans  l'histoire  de  l'émigration 
celtique  au  Nouveau-Monde.  Les  émigrants  gallois  ne  se  comptent  pas 
par  millions  comme  les  émigrants  irlandais  '  ;  mais  si  peu  nombreux 
qu'ils  soient,  ils  manifestent  un  grand  attachement  à  leur  nationalité 
première,  et  il  se  publie  en  Amérique  et  en  Australie  des  journaux,  des 
revues  et  des  livres  en  langue  galloise,  tandis  que  la  langue  irlandaise, 
déjà  dédaignée  et  traitée  de  patois  en  Irlande  même,  l'est  encore  plus  en 
Amérique 2.  L'ouvrage  de  M.  Thomas,  fruit  de  longues  années  de  travail, 
raconte  dans  le  plus  grand  détail  l'histoire  des  établissements  des  Gallois 
aux  États-Unis,  depuis  le  temps  du  célèbre  quaker  W.  Penn?  jusqu'à 

1.  Sur  l'émigration  irlandaise  aux  États-Unis,  voir  l'ouvrage  d'un  membre  du  Parle- 
ment britannique,  M.  Maguire,  The  Irish  in  America  (London,  Longmans,  1868).  Mais 
M.  Maguire  ne  donne  ni  l'histoire,  ni  la  statistique  de  l'émigration  irlandaise  et  se  borne 
à  décrire  l'état  social  et  moral  des  irlandais  aux  États-Unis  et  dans  l'Amérique  anglaise. 
M.  d'Arcy  Mac  Gee  a  écrit  un  livre  intitulé  :  A  iiistory  0/  tiie  Irish  scttkrs  in  North 
America  from  the  earliest  Period  to  the  Censiis  of  1850  (Boston,  1855);  mais  je  ne 
connais  cet  ouvrage  que  par  son  titre  et  je  ne  l'ai  jamais  eu  entre  les  mains. 

2.  Les  journaux  irlandais  d'Amérique,  —  je  veux  dire  les  journaux  de  langue  anglaise 
qui  défendent  les  intérêts  de  la  nationalité  irlandaise  aux  États-Unis,  —  publient  quel- 
quefois des  mélanges  poétiques  en  gaélique;  mais  c'est,  à  ma  connaissance,  tout  ce  qui 
se  publie  de  gaélique  irlandais  en  Amérique.  Les  Gaels  d'Ecosse  sont  plus  attachés  à  leur 
langue  :  il  y  a  des  publications  en  gaélique  écossais  au  Canada,  dans  la  Nouvelle- 
Ecosse  et  en  Tasmanie. 

5.  William  Penn  était  Gallois  et  c'est  contre  son  gré  qu'on  a  donné  son  nom  au  pays 
où  il  s'est  établi  fPennsylvania);  il  voulait  l'appeler  Nouvelle-Galles,  New-Wales. 


Bibliographie.  491 

nos  jours  et  aussi  de  chaque  groupe  gallois  existant  à  l'heure  actuelle  aux 
États-Unis.  Mais  les  descendants  des  colons  gallois  des  xvii"'  et  xviii'-' 
siècles  sont  aujourd'hui  tout  à  fait  américanisés  et  les  émigrants  de  ce 
siècle  sont  les  seuls  qui  aient  conservé  leur  nationalité  et  leur  langue. 
M.  Th.  constate  avec  regret  que  les  Gallois  des  États-Unis  sont  trop 
peu  nombreux  et  surtout  trop  dispersés  au  milieu  de  la  population  de 
langue  anglaise  pour  pouvoir  garder  leur  nationalité,  et  la  langue  qui  en 
est  le  symbole,  au-delà  de  la  seconde  ou  de  la  troisième  génération.  Le 
nombre  de  Gallois  aux  États-Unis  est  évalué  à  -^00,000,  grosso  modo,  mais 
plus  strictement,  et  en  s'en  tenant  au  nombre  des  Gallois  qui  forment  les 
congrégations  des  églises  de  différentes  confessions  où  le  service  divin  se 
célèbre  en  Gallois,  M.  Th.  arrive  au  chiffre  de  1 1 5,716.  Voici  comment 
ce  total  se  divise  entre  les  différents  États  de  l'Union  : 


I   Pennsylvania 

52,974 

1 5  Indiana 

200 

2  New-York 

21,840 

14  Illinois 

2,035 

3  Ohio 

24,810 

1 5   Michigan 

400 

4  Vermont 

i,Mo 

16  Wisconsin 

18,260 

5  New-Jersey 

942 

17  Minnesota 

'.745 

6  Maryland 

800 

18  lowa 

2,265 

7  Columbia  District 

$0 

19  Missouri 

2,195 

8  Virginia 

100 

20  Kansas 

>,75o 

9  West-Virginia 

;oo 

21   Nebraska 

200 

0  Tennessee 

200 

22  California 

2,000 

I   Massachussets 

500 

?oo 

25  Oregon,  etc. 
Total, 

500 

2  Maine 

115,716 

Ceci  est  le  chiffre  des  Gallois  gallisants  (s'il  m'est  permis  de  donner 
un  pendant  à  l'expression  de  «  Breton  bretonnant  »)  mais  c'est  évidem- 
ment un  minimum,  puisqu'il  y  a  des  Gallois  allant  de  préférence  à  des 
églises  de  langue  anglaise.  Si  religieux  que  soient  d'ordinaire  les  Gallois, 
il  en  est  peut-être  aussi  qui  ne  fréquentent  aucune  église. 

A  ces  chiffres  il  nous  parait  intéressant  d'ajouter  la  liste  de  publications 
périodiques  en  langue  galloise  qui  paraissent  actuellement  aux  États-Unis 
on  trouvera  dans  le  livre  de  M.  Th.  l'indication  d'autres  qui  ont  cessé 
de  paraître)  : 

1 .  Y  Drych  (Le  Miroir)  :  journal  politique  hebdomadaire,  fondé  en 
185 1  ;  paraît  à  Utica,  comté  d'Oneida,  État  de  New-York.  C'est  le  plus 
important  organe  de  la  presse  galloise  aux  États-Unis;  il  tire'à  plus  de 
cinq  mille  exemplaires. 

2.  Baner  America  (le  drapeau  d'Amérique),  journal  politique  hebdo- 


^c)2  Bibliographie. 

madaire,  fondé  en  1868,  paraît  à  Scranton,  comté  de  Luzerne,  État  de 

Pennsylvania. 

j.  Y  Cyfaill  O'r  hcn  IVlad  ;Tami  de  l'ancien  pays).  Revue  mensuelle 
fondée  en  18^8;  organe  des  Méthodistes  Calvinistes,  paraît  à  Rome,  comté 
d'Oneida,  état  de  New-York. 

4.  Y  Cenhadwr  AmericanaidA  (le  missionnaire  américain),  revue  men- 
suelle fondée  en  1840;  organe  des  Indépendants,  paraît  à  Steuben, 
comté  d'Oneida,  État  de  New-York. 

5.  Y  Seren  Odlewinol  (l'Étoile  de  l'Ouest),  revue  mensuelle  fondée  en 
1842;  organe  des  Baptistes;  paraît  à  Pottsville,  comté  de  Schuylkill, 
État  de  Pennsylvania. 

6.  Yr  Ysgol  (l'école),  revue  mensuelle  destinée  à  la  jeunesse;  a  cessé 
de  paraître  par  suite  de  la  mort  de  son  éditeur;  mais  va  renaître  sous  le 
titre  de  Blodau  yr  Oes  a'r  Ysgol  (fleurs  de  l'âge  et  de  l'école)  chez  l'édi- 
teur même  du  volume  de  M.  Th.,  à  Utica. 

7.  Yr  Ynnvelydd  (le  visiteur),  petite  revue  mensuelle  publiée  à  Hyde- 
Park,  Pennsylvania. 

8.  Yr  Negesydd  (le  messager),  journal  hebdomadaire  publié  à  Pitts- 
burgh,  Pennsylvania. 

Nous  avons  donné  cette  statistique  des  Gallois  et  de  leurs  journaux 
aux  États-Unis  pour  indiquer  l'intensité  du  sentiment  national  gallois  en 
Amérique  et  pour  faire  pressentir  l'intérêt  que  présente  le  livre  de 
M.  Th.  aux  celtophiles.  M.  Th.  parle  seulement  des  États-Unis  et  n'a 
que  quelques  mots  pour  les  Gallois  de  Patagonie'  et  ceux  du  Canada-; 
il  mentionne  en  passant  les  Mormons,  mais  sans  parler  de  l'élément  gal- 
lois de  la  communauté  du  Lac  Salé,  élément  que  l'on  dit  assez  impor- 
tant. Ce  volume  qui  est  intitulé  «  tome  I  »  est  partagé  en  trois  parties, 
avec  pagination  distincte.  La  première  est  consacrée  à  l'histoire  générale 
de  l'émigration  galloise  des  deux  derniers  siècles,  principalement  en 
Pennsylvania,  et  à  la  description  des  établissements  gallois  dans  les  États 
de  l'est  et  du  sud;  la  seconde  traite  des  établissements  gallois  dans  les 
États  de  l'ouest;  dans  la  troisième,  M.  Th.  donne  la  statistique  générale 
des  Gallois,  celle  des  églises  des  différentes  confessions,  des  notices  sur 

1.  On  trouvera  des  renseignements  détaillés  sur  la  petite  colonie  galloise  du  Rio 
Chupat  dans  une  correspondance  officielle  publiée  l'an  dernier,  à  Londres,  sous  ce  titre: 
Correspondence  respecting  thc  Wclsh  Colony  on  the  River  Chupat,  in  Patagonia.  Presented 
to  tlie  House  of  Gommons  by  Command  of  Her  Majesty...  London,  printed  by  Harrison 
and  Sons.  24  p.  in-folio. 

2.  H  n'a  aucun  renseignement  sur  la  force  de  l'élément  gallois  au  Canada  et  se  borne 
à  ces  paroles  :  «  Diau  fod  llaweroCymry  yn  wasgaredig  ynddi,  ac  mewn  yndeb  crefydd- 
ol  â'r  Saeson;ond  nid  wyfyn  gwybod  am  un  eglwys  na  chapel  Cymreig  yn  un  man 
ynddi  »  2"  partie,  p.  i6q. 


Bibliographie.  493 

les  Gallois  éminents  d'Amérique,  des  détails  sur  la  littérature  galloise 
aux  États-Unis  et  enfin  des  renseignements  destinés  aux  émigrants.  Si  ce 
volume  est* accueilli  favorablement  -  et  nous  ne  doutons  pas  que  le 
public  de  Galles  lui  fasse  bon  accueil,  —  M.  T.  publiera  un  second 
volume  consacré  à  l'histoire  de  la  littérature  galloise  aux  États-Unis  et  à 
la  biographie  des  membres  les  plus  distingués  de  l'émigration. 

H.  G. 

Nous  avons  en  outre  reçu  les  ouvrages  suivants  : 

Lectures  on  the  hislory  of  Ireland  {second  séries)  from  A.  D.  \  <,]/^  to  the  date  of 
the  Plantation  of  Ulster,  by  A.  G.  Richey,  Esq.,  v-447  p.  in- 12.  London,  Long- 
mans,  1870.  Prix  :  8  sh.  Ce  sont  des  lectures  faites  à  l'Université  de  Dublin 
(Trinity  Collège)  en  1870.  Cet  ouvrage,  dont  l'esprit  critique  a  été  loué  par  la 
presse  d'outre-Manche,  sort  par  sa  nature  du  cadre  de  cette  Revue:  il  s'agit  en 
effet  de  l'histoire  politique  de  l'Irlande  conquise.  Nous  nous  bornerons  donc  à 
signaler  le  chapitre  II  (p.  39-79)  qui  traite  de  l'Église  d'Irlande  avant  la  Réforme 
et  qui  est  fort  instructif. 

Legcnd  Lays  oj  Ireland,  by  Lageniensis  (Dublin,  Mullany,  xxviij-i^ô  p.  in-12, 
prix  :  I  sh.  6  d.).  Recueil  d'agréables  poésies  dont  les  sujets  sont  empruntés  aux 
traditions  et  à  l'histoire  de  l'Irlande.  Les  notes  qui  accompagnent  ces  poésies 
renferment  d'intéressants  détails  sur  les  légendes  populaires  de  l'Irlande  (sur  un 
autre  ouvrage  du  même  auteur,  voir  plus  haut,  p.  276). 

An  essay  on  the  Drulds ,  the  ancient  Chnrches  and  the  Round  Towers  of  Ireland , 
by  the  Rev.  R.  Smiddy  (Dublin,  Kelly,  vij-242  p.  in-12;  prix  :  4  sh.)  où  l'on 
trouve  plus  de  patriotisme  celtique  que  de  critique.  On  y  lit  que  ^irlandais  est  le 
premier  langage  parlé  par  l'homme,  que  les  Celtes  sont  une  colonie  scythique, 
etc. 

Bue:  ann  Duc  a  Vourdell ,  Herri  V  [par  M.  l'abbé  Henry],  viij-222  p.  gr.  in- 
16.  Quimperlé,  Clairet,  1872. 

Laez  ann  den  paour,  great  gand  P.  E.  P.  Herpin,  belek,  14  p.  in-12,  Rennes, 
Hauvespre,  poème  breton  dédié  à  Mgr.  A.  David,  évêque  de  St.-Brieuc. 

Hinmou  fia  Canticou,  hervez  kelenadure:  ar  Scrilur  Santel  [par  M.  J.  Jenkins], 
68  p.  pet.  in-i6.  Brest.  Gadreau,  1872. 


CHRONIQJJE 


M.  Wocel  et  M.  de  Belloguet.  —  L'inscription  d'HoeyIaert.  —  Articles  de 
Revues.  —  Lectures  de  MM.  Mac  Lauchlan,  Luzel  et  d'Arbois  de  Jubain- 
ville.  —  Publications  annoncées.  —  Création  d'une  chaire  de  philologie  cel- 
tique à  l'Université  de  Berlin. 

Il  nous  faut  encore  commencer  cette  chronique  par  la  nécrologie.  Nos  études 
ont^  depuis  l'apparition  du  précédent  numéro,  perdu  :  M.  J.  E.  Wocel,  profes- 
seur à  l'Université  de  Prague,  mort  dans  cette  ville  le  1 8  septembre  1871,  à 
l'âge  de  68  ans.  Dans  ses  études  sur  les  antiquités  nationales  de  la  Bohême,  il 
s'était  occupé  avec  zèle  et  talent  de  la  période  celtique  de  cette  histoire  (voir  plus 
haut,  p.  147)  et  il  mérite  à  ce  titre  que  son  souvenir  soit  signalé  ici  ;  —  et 
M.  Roget  de  Belloguet,  décédé  à  Nice,  le  3  août  1872,  à  l'âge  de  76  ans. 
Depuis  plusieurs  années  déjà  sa  santé  était  chancelante,  et  ce  n'est  que  par  un 
grand  effort  de  courage  qu'il  a  pu  terminer  son  Ethnogénie  Gauloise.  On  trouvera 
plus  haut  un  compte-rendu  du  premier  volume  de  cet  ouvrage,  et  nous  même 
avons  annoncé  le  troisième  ailleurs  (Rmic  Ciiticjuc  du  10  avril  1869).  Si  dans 
les  questions  de  pure  philologie  M.  de  Belloguet  n'apportait  pas  toute  la 
rigueur  de  méthode  qu'on  demande  aujourd'hui  aux  études  de  ce  genre  (voir 
plus  haut  l'article  de  M.  d'Arbois),  il  taisait  preuve  dans  les  questions  d'histoire 
d'une  grande  érudition  et  d'une  critique  ferme  et  sagace.  Son  Ethnoginic  fait 
époque  dans  l'histoire  des  études  gauloises  en  France. 


Une  inscription  inédite  se  rapportant  au  culte  des  Déesses  Mères  a  été  décou- 
verte en  1870  en  Belgique,  à  Hoeylaert  (province  de  Brabant).  La  voici  (nous 
étendons,  faute  de  caractères  spéciaux,  les  ligatures  du  lapicide)  : 

MATRONIS  II  CANTRVSTE1||H1ABVS.  C.  AP  ||  PIANIVSPAC  ||  ATVS. 
PROSEETIiSVIS.  L.  M.  {Matronis  Canstrustahiabus,  Caiiis  Appumius  Pacatus, 
pro  se  et  suis  votum  solvit  Libens  Merito). 

Elle  a  fait  l'objet  d'un  mémoire  d'un  savant  épigraphiste  de  la  Belgique, 
M.  Schuermans,  dans  le  Bulletin  des  Commissions  royales  d'Art  et  d'Archéologie, 
et  cette  étude  a  amené  la  rectification  du  texte  de  deux  inscriptions  déjà  connues 
depuis  longtemps,  où  l'on  avait  lu  jusqu'ici  Matronis  Andrustehiabus.  C'est  l'ins- 
cription 406  du  recueil  de  Brambach  (De  Wal,  Mœd.,  n°   125)  et  l'inscription 


Chronique.  495 

de  Godesberg  {Jahrb.  des  Ver.  von  Alterthumsfreunden  m  Rhanlande,  t.  XLIV- 
XLV,  p.  81),  toutes  deux  conservées  au  Musée  de  Cologne.  Un  nouvel  examen 
de  ces  deux  inscriptions  par  MM.  Diintzer  et  Freudenberg  .a  fait  retrouver, 
comme  le  soupçonnait  M.  Schuermans,  un  C  à  demi-effacé  :  on  doit  donc  lire 
dans  ces  deux  inscriptions  Matroms  Candrustehiabiis...  Cette  correction  vérifiée 
fait  honneur  à  la  sagacité  de  l'épigraphiste  de  Liège. 


La  dernière  livraison  des  Archives  des  missions  scienlifiqius  cl  littéraires  '  nous 
apporte  quatre  rapports  adressés  par  M.  Luzel  à  M.  le  Ministre  de  l'Instruction 
publique.  M.  Luzel  avait  été  chargé,  il  y  a  quelques  années,  de  recueillir  en 
Basse-Bretagne  les  manuscrits  encore  existants  de  mystères  bretons,  et  il  avait 
été  assez  heureux  pour  réunir  une  riche  collection  de  manuscrits  aujourd'hui 
déposée  à  la  Bibliothèque  Nationale  de  Paris.  Plus  récemment  il  eut  mission  de 
recueillir  dans  le  même  pays  les  traditions  orales  pouvant  servir  à  l'étude  com- 
parée de  l'histoire  de  la  philologie  et  de  la  mythologie  des  populations  d'origine 
celtique.  M.  Luzel  donne  dans  ces  rapports  (qui  seront  continués)  les  prin- 
cipaux résultats  de  ses  recherches  :  il  classe  les  récits  qu'il  a  recueillis  en 
1°  contes  mythologiques,  2°  contes  légendaires  chrétiens,  3»  récits  facétieux 
et  plaisants,  et  donne,  tantôt  en  breton,  tantôt  en  français,  le  texte  de  quelques 
contes  de  ces  différentes  classes.  Ces  rapports  sont  de  précieux  documents  et 
se  recommandent  d'eux-mêmes  aux  savants  qui  s'occupent  de  mythologie  com- 
parée et  qui  s'intéressent  aux  traditions  populaires.  L'humble  et  laborieux  travail 
du  collecteur  est  le  point  'de  départ  nécessaire  de  travaux  plus  étendus  et  plus 
complets  ;  M.  Luzel  est  au  premier  rang  parmi  ces  chercheurs  infatigables  et,  à 
ce  propos,  nous  rappellerons  ce  qu'un  maître  de  la  critique  disait  de  sa  collection 
de  Chants  populaires  de  la  Basse-Bretagne  (Paris,  Franck)  :  «  Pour  fonder  chez 
nous  les  études  celtiques,  deux  conditions  sont  indispensables  :  au  fond  des  pays 
où  vivent  encore  les  langues  celtiques,  de  zélés  et  consciencieux  chercheurs 
apportant  modestement  leur  pierre  à  l'édifice  futur  ;  à  Paris,  un  enseignement 
élevé  où  la  théorie  philologique  et  historique  soit  dressée,  avec  l'aide  que  fournit 
la  comparaison  des  branches  de  la  science  plus  avancée,  et  d'après  les  méthodes 
qui  ont  fait  faire  aux  autres  parties  de  la  philologie  et  de  la  critique  de  si  admi- 
rables progrès.  M.  Luzel  remplit  parfaitement  le  premier  de  ces  devoirs'.  » 


Nous  sommes  forcé,  faute  d'espace,  de  nous  borner  à   signaler  des  articles  et 
des  travaux  qui  mériteraient  chacun  une  analyse. 

Revue  des   Questions  Historihues,  avril  1872,  pp.   360-390,  article  de 


1.  Deuxième  série,  t.  Vil,   i"^  livraison,  pp.  101-205. 

2.  M.  E.  Renan,  dans  \e  Journal  des  Débats  du  i\  septembre  1868. 


496  Chronique. 

M.  An.  de  Barthélémy,  Les  likrtcs  gauloises  soas  la  dominatton  rowainc,  de  l'an 
50  à  l'an  27  avant  J.-C,  résumant,  principalement  à  l'aide  des  renseignements 
fournis  par  la  numismatique  gauloise  «  ce  que  l'on  peut  savoir  sur  la  période  de 
transition  comprise  entre  l'an  ^0  avant  J.-C.  (704  de  Rome),  date  de  la  sou- 
mission delà  Gaule,  et  l'an  27  (727  de  Rome),  époque  à  laquelle  Rome  comprit 
notre  pays  dans  l'uniformité  administrative  qui  régissait  les  autres  provinces.  » 
M.  A.  de  B.  avait  déjà  publié  dans  la  même  revue  deux  articles  que  nous 
recommandons  au  lecteur  :  Alesia,  son  véritable  emplacement,  t.  III,  pp.  5-60, 
et  Les  Assemblées  nationales  dans  les  Gaules  avant  et  après  la  conquête  romaine, 
t.  V,  pp.  s-48. 

Revue  Archéologique,  1872;  janvier,  pp.  44-^5,  et  février,  pp.  95-104, 
La  cité  des  Osismii  et  des  Vencti  {lit  Lyonnaise),  par  M.  Le  Men,  avec  une  carte; 
travail  important  et  encore  inachevé  sur  la  géographie  de  l'ancienne  Armorique 
(M.  Le  Men  montre  en  passant  que  l'île  appelée  5^/;^  parles  écrivains  anciens  ne 
peut  être  l'île  de  Sein  actuelle).  Les  conclusions  de  ce  mémoire  ont  été  adoptées 
par  la  Commission  de  la  Topographie  des  Gaules.  —  Mars,  pp.  153-1 56,  sur  un 
fond  de  "poculum  de  la  fabrique  de  Capoue  (avec  une  gravure),  par  M.  Fr.  Lenormant. 
M.  Lenormant  reconnaît  dans  le  médaillon  en  relief  qui  forme  le  fond  de  ce 
poculum  un  guerrier  gaulois  dans  le  temple  de  Delphes.  —  Avril,  pp.  234-244, 
Mai,  pp.  320-333,  suite  des  Fouilles  de  Bibracte,  par  M.  Bulliot,  qui  fournissent 
des  détails  nombreux  et  précis  sur  l'émaillerie  gauloise.  —  Avril,  pp.  259-266, 
Monnaies  émises  pendant  la  seconde  campagne  de  César  (57  av.  J.-C.)  dans  les 
Gaules,  par  un  chef  de  l'armée  confédérée  des  Belges,  par  M.  F.  de  Saulcy.  — 
Juillet-Aoïjt,  pp.  39-51,  Les  Cimbres  et  les  Kymri,  par  M.  d'Arbois  de  Jubain- 
ville  qui,  à  l'occasion  du  dernier  livre  de  M.  H.  Martin,  développe  l'opinion 
indiquée  par  nous  plus  haut  (p.  464),  à  savoir  que  les  Gallois  n'ont  rien  de 
commun  avec  les  Cimbres,  pas  même  leur  nom,  et  que  les  Cimbres  étaient  une 
population  germanique.  Mais  nous  avons  vu  avec  étonnement  M.  d'A.  de  J.  y 
parler  (p.  39)  des  Triades  galloises  comme  de  «  textes  versifiés,  n  On  sait  que  les 
Triades  sont  en  prose. 

Journal  of  the  Roy.\l  ïïistorical  and  Arch.eological  A.ssociation  of 
Ireland;  (cette  publication  étant  fort  peu  connue  sur  le  continent,  nous 
remontons  jusqu'en  janvier  1870  pour  signaler  les  articles  qui  peuvent  inté- 
resser les  lecteurs  de  la  Revue)  1870,  janvier,  pp.  94-1 12,  Ancient  lake  legends 
of  Ireland.  —  A^°  /.  The  destruction  of  Eochaid,  son  of  Mairid,  texte  tiré  du 
Lebor  na  h-uidre  et  publié  avec  une  traduction  par  M.  J.  O'Beirne  Crowe. — 
1871,  janvier,  pp.  352-359,  Irish  Art  in  Bavaria,  par  Mlle  Stokes;  traduction 
de  l'article  de  M.  Wattenbach  que  nous  avons  donné  plus  haut  et  analyse  d'un 
article  de  M.  Fr,  Bock  sur  la  coupe  de  Tassilo,  publié  dans  les  Mitth.  des  k.k. 
Central-Commission  zur  Erforschung  und  Erhaltung  der  Baudenkmale  (Vienne);  — 
pp.  371-448,  Siabur -Char pat  Con  Cnlaind  {the  demoniac  Chariot  of  Cu  ChulainJ), 
texte  curieux  du  Lebor  na  h-uidre  et  publié  avec  traduction  et  notes  par  M.  J. 
O'Beirne  Crowe.  —  Juillet,  pp.  509-534,  The  prccious  metals  and  ancient  mining 
in  Ireland,   par  M.   R.  R.    Brash.   —    1872,  Janvier,  pp.   26  49,  Ancient  lake 


Chronique.  497 

legends  of  Irtland. —  A^"  //.  The  vision  of  Cathair  mor,  texte  tiré  du  ms.  de  Lecan  et 
du  ms.  de  Leinster  et  publié  avec  traduction  et  notes  par  M.  J.  O'Beirne  Crowe. 

Collections,  historical  and  AncH.KOLOriicAi,,  uelating  to  Montgome- 
RYSHiHE  (Vol.  IV,  ij,  p.  345-3^8,  Octobre  1871);  M.  D.  Silvan  Evans  y  donne 
sous  le  titre  :  The  rivers  of  Montgomeryshire  la  liste  (environ  200  noms)  des 
rivières  et  ruisseaux  dont  le  cours  est  en  totalité  ou  en  partie  compris  dans  les 
limites  de  ce  comté;  il  donne  seulement  les  noms  actuels  sans  en  rechercher 
les  anciennes  formes. 

M.  Silvan  Evans  est  depuis  l'an  dernier  chargé  par  l'Association  Archéolo- 
gique Cambrienne  de  diriger  la  publication  de  VArchcCologia  Cambrensis,  et  nous 
voyons  avec  plaisir  que,  sous  sa  direction,  ce  savant  recueil  qui,  dans  ces  der- 
nières années,  faisait  —  au  gré  des  savants  étrangers  —  la  part  trop  grande  à 
l'archéologie  locale,  s'occupe  davantage  de  philologie  et  d'histoire  littéraire. 
C'est  une  façon  de  rendre  ce  recueil  plus  européen  sans  qu'il  soit  pour  cela 
moins  cambrien.  Les  trésors,  en  partie  inédits,  de  la  littérature  galloise  du 
moyen-âge  intéressent  les  savants  du  continent  autant  que  personne  en 
Galles. 

Le  dernier  numéro  de  I'Arch.eologia  Cambrensis  (juillet  1872)  nous 
apporte  justement,  pp.  181-210,  un  remarquable  article  de  M.  Thomas  Ste- 
phens,  An  cssay  on  the  Bardic  Alphabet  callcd  «  Coelbren  y  Beirdd  «  que  nous 
recommandons  particulièrement  aux  écrivains  qui  croient  à  la  présence  dans 
la  littérature  galloise  de  traditions  remontant  aux  druides  et  aux  bardes  de 
l'antiquité  celtique. 

C'est  une  prochaine  livraison  de  VArch.  Can:br.  que  paraîtra  (si  nous  en 
croyons  une  note  du  numéro  d'avril,  p.  166)  le  travail  de  M.  Wh.  Stokes  sur 
les  Gloses  galloises  récemment  découvertes  à  Cambridge,  dans  un  ms.  de  Mar- 
tianus  Capella,  travail  que  M.  St.  a  fait  imprimer  à  quelques  exemplaires  dans 
l'Inde,  et  auquel  il  avait  consacré  les  loisirs  de  la  traversée  «  Between  Aden 
and  Bombay.  »  Un  autre  fruit  de  son  voyage  en  Europe  est,  après  le  mystère 
de  St  Meriasek,  une  seconde  édition  des  Goidelica.  —  Le  même  érudit  a 
aussi  pendant  son  séjour  à  Dublin  fait  imprimer  un  choix  de  mélodies  populaires 
irlandaises  tirées  de  la  collection  inédite  du  D'  Pétrie.  On  ne  saurait  trop  admi- 
rer sa  merveilleuse  activité. 

Les  recueils  en  langue  galloise  nous  présentent  aussi  des  articles  qui  méri- 
ritent  d'être  signalés,  bien  que  la  langue  dans  laquelle  ils  sont  écrits  soit  acces- 
sible à  bien  peu  de  savants  du  continent  :  nous  les  trouvons  dans  les  deux 
meilleures  revues  trimestrielles  du  pays  de  Galles,  le  Beirniad,  publié  à  Llanelli, 
et  le  Truethodydd,  publié  à  Treffynon  (en  anglais  Holywell). 

Y  Beikniad  ;  série  d'articles  de  M.  John  Peter  sous  le  titre  Y  Cynfcirdd 
(juillet  1870,  pp.  75-92;  octobre  1870,  128-147  ;  et  juillet  1871,  pp,  48-60), 
consacrés  à  l'histoire  de  l'ancienne  littérature  galloise  et  à  ses  plus  anciens 
poètes,  et  bien  propres  à  faire  pénétrer  dans  le  grand  public  gallois  les  résultats 
de  la  critique  moderne  sur  ce  sujet. 


498  Chronique. 

Y  ÏR\ETHODVi)n  ;  avril  1871,  pp.  225-24^,  article  du  même  auteur  sur  la 
nouvelle  édition  de  la  Grammatica  Ccltica  de  Zeuss  ;  —  janvier  1872,  pp.  90- 
107,  article  intitulé  Hm  Lyfrau  y  Cymry  et  qui  donne  maint  détail  nouveau 
sur  la  bibliographie  galloise.  M.  D.  Silvan  Evans  lui  a  fait  quelques  emprunts 
dans  l'article  qu'on  avu  plus  haut  ici  mêmefpp.  376etsuiv).  Nousdevons  remer- 
cier l'auteur  anonyme  de  cet  article  pour  la  façon  bienveillante  dont  il  parle  de 
nous  et  de  la  Revue  Celtique.  —  Juillet  1872,  pp.  368-380,  Hcnafiaetk  a 
phwysigrwydd  ieithyddol  Llenyddiaeth  y  Cymry,  par  M.  John  Rhys  :  résumé  de 
l'histoire  de  la  langue  galloise.  C'est  avec  étonnement  que  nous  avons  vu 
M.  Rhys,  un  des  savants  dont  le  talent  honore  le  pays  de  Galles  à  l'étranger, 
attaqué  comme  mauvais  patriote  dans  quelques  journaux  gallois,  pour  avoir, 
dans  un  discours  prononcé  à  un  Eistcddfod  de  Liverpool  (Noël  1871),  reconnu 
que  la  littérature  irlandaise  remonte  plus  haut  que  la  littérature  galloise,  et 
pour  avoir,  tout  en  recommandant  la  culture  du  gallois,  exprimé  la  crainte 
qu'il  disparaisse  un  jour  devant  les  progrès  de  l'anglais.  Sans  doute  il  est 
honorable  aux  Gallois  d'avoir  une  foi  ferme  'au,  dicton  :  «  Oes  y  byd  i'r  iaith 
Gymraeg!  «,  et  de  toutes  les  langues  celtiques  le  gallois  est  certainement  celle 
dont  la  vitalité  est  la  plus  forte  et  l'avenir  le  plus  durable,  mais  l'histoire 
montre  malheureusement  que  les  groupes  nationaux  qui  n'ont  pas  d'existence 
politique  indépendante  et  sont  trop  faibles  pour  avoir  en  eux-mêmes  leur  centre 
de  gravité,  sont  insensiblement  absorbés  par  le  milieu  où  ils  vivent.  Le  discours 
de  M.  Rhys,  dont  le  thème  était  l'importance  philologique  des  langues  cel- 
tiques, a  été  publié  dans  le  Carnarvon  and  Dcnbigh  Herald  du  30  décembre 
187.. 


Nous  devons  en  outre  signaler  deux  importantes  lectures  faites,  l'une  à 
Edimbourg  par  M.  Th.  Mac  Lauchlan,  l'autre  à  St-Brieuc  par  M.  Luzel. 

M.  Th.  Mac  Lauchlan,  un  des  savants  écossais  les  plus  versés  dans  la  con- 
naissance de  la  langue  et  de  la  littérature  gaélique,  fait  au  collège  de  l'Eglise 
Presbytérienne  libre  d'Ecosse  un  cours  de  gaélique  destiné  principalement  aux 
jeunes  gens  qui  doivent  exercer  le  ministère  ecclésiastique  dans  les  Highlands, 
et  voilà  vingt' un  ans  qu'il  se  consacre  à  cette  œuvre,  toute  de  dévouement. 
L'an  dernier  il  a  ouvert  son  cours  (le  21  novembre  1871J  par  un  discours  où 
il  a  tracé  à  grands  traits  les  principaux  caractères  de  la  toponomastique  de 
l'Ecosse  gaélique  et  où  il  a  mis  ses  auditeurs  en  garde  contre  les  étymologies 
fantaisistes,  en  leur  indiquant  la  méthode  à  suivre  dans  ces  recherches  délicates 
et  intéressantes.  Ce  discours  a  été  publié  dans  la  Daily  Rcviav  d'Edimbourg  du 
23  novembre  1871 . 

La  lecture  de  M.  Luzel  se  rapporte  à  un  inipurtant  problème  d'histoire  litté- 
raire et  elle  a  eu  lieu  dans  une  des  séances  de  la  38''  session  du  Congrès 
scientifique  de  P>ance,  qui  s'est  tenue  à  Saint  Brieuc  pendant  les  premiers 
)ours  de  juillet  1872.  M.  Luzel  a  lu  un  travail  sur  l'authenticité  des  poésies 
prétendues  populaires   publiées   par  M.   de  la   Villcmarqué  sous   le  nom   de 


Chronique.  499 

Barza:  Brciz,  sujet  déjà  traité  ou  touché  par  M.  Le  Men,  dans  ['Athcnaum 
anglais  du  11  avril  1868,  p.  527;  par  M.  d'Arbois  de  Jubainville,  dans  la 
Biblioth'iquc  de  l'Ecole  des  Chartes,  ]"  série,  t.  III,  p.  265  et  suiv.,  et  t.  V, 
p.  621  et  suiv.;  dans  la  Revue  Archéologiijue,  t.  XVII,  p.  227  et  suiv.;  et  dans 
la  Rei'ue  Critique  des  16  février  et  25  novembre  1867,  et  du  3  octobre  1868; 
par  M.  F.  Liebrecht  dans  les  Goettingische  gelehrte  Anzeigen  du  7  avril  1869; 
par  M.  Luzel  même  dans  la  Reyue  Archéologique,  t.  XX,  p.  120  et  suiv.,  par 
M.  Halléguen  au  Congrès  celtique  de  St-Brieuc  de  1867  (voyez  le  volume 
intitulé  :  Congres  celtique  international,  Saint-Brieuc,  1868,  in-8,  p.  291  et  suiv.). 
Le  nouveau  travail  de  M.  Luzel  paraîtra  prochainement  en  brochure  à  la  librai- 
rie Franck. 


Dans  une  des  dernières  séances  de  l'Académie  des  Inscriptions,  M.  de 
Longpérier  a  donné  lecture  d'une  note  de  M.  d'Arbois  de  Jubainville  sur  une 
inscription  de  Poitiers,  aujourd'hui  conservée  au  Musée  de  Saint-Germain  et 
qu'on  s'est  jusqu'à  présent  accordé  pour  considérer  comme  en  partie  celtique. 
Suivant  M.  d'Arbois,  cette  inscription  serait  en  latin  avec  mélange  de  quelques 
mots  grecs.  Voici  comment  il  la  lit  : 

BIS  GONTAVRION  ANALABIS,  BIS  GONTAVRION  CE  ANALABIS. 
GONTAVRIOS  CATALAGES  VIM,  S[cilicet]  ANIMA[m],  VIM  S[cilicet] 
P.^TERNAM.  ASTA,  MAGI  ARS,  SECVTA  TE,  IVSTINA,  QVEM  PEPE- 
RIT  SARRA. 

Les  mots  grecs  seraient  :  GONTAVRION  =  xcVTa'Jpôtov,  nom  de  la  cen- 
taurée; CE  =  •/-«£,  conjonction  ;  GONTAVRIOS  =r-  -/sv-aûpsiov  au  nominatif; 
CATALAGES  =  xaTctr/ayr,;  ;  et  de  plus  ANALABIS,  que  M.  d'Arbois 
croyait  être  latin,  et  qui,  suivant  l'observation  de  plusieurs  académiciens,  est 
vraisemblablement  le  grec  àvaXaê^i:.  (luem  =  quam  est  fréquent  dans  le  latin 
de  la  décadence.  L'inscription  de  Poitiers  devrait  donc  se  traduire  comme  il 
suit  :  "  Deux  fois  tu  prendras  de  la  centaurée  ;  et  deux  fois  tu  prendras  de  la 
Il  centaurée.  Que  la  centaurée  te  donne  la  force,  c'est-à  dire  la  vie,  la  force, 
M  c'est-à-dire  [la  force]  paternelle.  Viens-moi  en  aide,  art  magique,  en  suivant 
»  Justine  qu'a  enfantée  Sarra!  » 


■  Deux  importantes  publications  sont  annoncées  dans  le  pays  de  Galles,  mais 
elles  ne  se  feront  que  si  elles  rencontrent  un  nombre  suffisant  de  souscripteurs; 
et  le  continent  leur  doit  sa  part  de  concours.  C'est  d'abord  un  recueil  des 
inscriptions  britanno-romaines  du  pays  de  Galles  publié  sous  les  auspices  de 
l'Association  Archéologique  Cambrienne  et  sur  le  plan  des  inscriptions  irlan- 
daises de  Mlle  Stokes  :  il  formera  trois  livraisons,  à  10  sh.  chaque.  L'ouvrage 
sera  donné  à  l'impression  dès  qu'il  y  aura  un  nombre  suffisant  de  souscripteurs. 
Les  souscriptions  doivent  être  adressées  à  M.  E.  Barnwell,  secrétaire  général 
de  l'Association  Cambrienne,  à  Meiksham,  Wiltshire.  —  M.  Robert  Williams 


500  Chronique. 

annonce  en  outre  un  recueil  de  textes  gallois  du  moyen-âge  (St-Graal  *,  Gestes 
de  Charlemagne,  Beuve  d'Hampton,  Purgatoire  de  St  Patrice,  Evangile  de 
Nicodème,  etc.),  qui  paraîtra  par  demi-volumes,  à  lo  sh.  6  d.  chaque,  s'il  se 
rencontre  un  nombre  suffisant  de  souscripteurs.  Les  souscriptions  sont  reçues 
par  M.  Robert  Williams  à  Rhydycroesau,  Oswestry.  —  Les  souscripteurs  du 
continent  peuvent  employer  l'intermédiaire  d'un  libraire. 

Nous  recommandons  en  outre  la  seconde  série  de  VArt  Gaulois  par  M.  Hucher, 
annoncée  plus  haut,  et  qui  paraît  par  souscription,  au  prix  d'un  franc  la  feuille: 
on  peut  avoir  des  prospectus  de  l'auteur,  rue  d'Hauteville,  25,  au  Mans 
(Sarthe).  C'est  un  ouvrage  indispensable  pour  l'étude  de  l'antiquité  gauloise. 

Le  manque  d'espace  nous  force  de  remettre  au  prochain  n°  l'analyse  d'un  article 
de  M.  Leemans  sur  un  autel  de  Nehalennia  trouvé  récemment  à  Dombourg  (Zé- 
lande)  et  la  traduction  d'une  dissertation  de  M.  Kern  sur  la  déesse  même  Neha- 
lennia ,  travaux  publiés  le  premier  dans  les  Verslagcn  en  Mcdcdcclingcn  de  l'Aca- 
démie néerlandaise,  et  le  second  dans  le  Taal-  en  Lcttcrbodc,  recueil  philologique 
de  Haarlem. 

Il  nous  arrive  au  dernier  moment  une  importante  nouvelle.  M.  Ebel,  jusqu'ici 
professeur  au  collège  {giamw.ar-school)  de  la  petite  ville  de  Schneidemiihl,  vient 
d'être  appelé  à  occuper  une  chaire  de  langues  et  de  littératures  celtiques  à  l'Uni- 
versité de  Berlin.  Voilà  donc  la  philologie  celtique  recevant  droit  de  cité  dans  le 
haut  enseignement  :  comme  on  devait  s'y  attendre,  c'est  l'Allemagne  qui  prend 
l'initiative  et  donne  l'exemple  à  cet  égard. 

H.  Gaidoz. 

P.  S.  Nous  comptons,  dès  le  second  volume,  analyser  d'une  façon  régulière  les 
principaux  articles  des  revues  d'érudition  consacrées  aux  mêmes  études  que  la 
nôtre.  Quand  il  paraîtra  dans  d'autres  recueils,  où  ils  pourraient  nous  échapper, 
des  articles  se  rapportant  aux  langues  ou  aux  littératures  celtiques,  nous  prions 
les  auteurs  de  vouloir  bien  nous  les  adresser.  Même  prière  pour  les  lectures  ou 
conférences  publiées  dans  les  journaux. 


I.  En  1865,  M.  R.  Williams   .ivait  publié  quelques  fragments  de  la  version    galloise 
du  ^amx-Gxà3.\  [ArcheologiaCamhrensis,  3"' série,  t.  IX,  pp.  160-178). 


1 


CORRIGENDA  ET  ADDENDA. 


24,  p.  5,1.  6,  et  p.  5,  I.  10,  au  lieu  de:  Prémeaux  lire  :  Pernand 

M,  au  lieu  de:  Kronweissenburg  lire:  Wissembourg 

12,  and,  p.  41,  I.  54,  for:  Gaeidhel  read  :  Gaeidhil 

1  read  :  Lis-Badhbha 

19,  for  :  Slaibh  read:  Siiabh 

14,  for:  hight  read  :  night 

34,  for  :  cloud  read  :  clouds 

33,  for:  Daiiautat  read  :  Danautal 

I ,  for  :  gcrgara  read  :  fergara 
50,  for:  strenght  read:  strength 


for  :  dolliud  read  :  dolliiid 

for:  Valkynan  read  :  Valkyria 

au  lieu  de:  niirad  inse  lire:  niiradinse 

—  trigiiim        —    trigiun 

—  séc.  —     sec. 
dern.  I.      —         duaccradat  —     diiacradal 

22,  lire:  nuradinse  (quae  loquebar),  prés.  sec. 

14,  au  lieu  de:  salvabantur  lire  :  salvabuntur 

7,  —         th.  masc.  en  u,  lire:  th.  masc.  en  t 

5,  et  av.  dern.,  au  lieu  de  français,  lire  :  français 

16  et  19.  au  lieu  de  :  ^5  bo   lire  :  as  po 


V.  dern. 

'8, 

20, 

22, 

30, 

.  20, 

4> 

S, 

vant  dern. 


1.         — 


au  lieu  de 


gistr 

— 

jistr 

a-c'han 

- 

a-c'hann 

sclu-inl 

— 

setu  int 

dû  Koadalan 

— 

da  Goadalan 

kcr  du 

— 

kcn  du 

gromzas 

— 

gomzas 

strumm 

— 

sUimm 

ma  oa  oa  d. 

— 

maoa  d. 

a  roue 

— 

ar  roue 

gule  après  Pcrag 

nemet-hon 

lire: 

nemet-on 

kolzgoudé 

— 

koulzgoudc 

n'enrcl 

— 

verwel 

ouspcm 

— 

ouspcnn 

invc 

— 

nvc 

b,ic 

— 

bijè 

502 

Corrigendd  et  Addenda. 

p.    120, 

1.     1, 

— 

rochcll     —     rochdl 

— 

1.    6  et  8, 

~ 

a  t'ai:     —     at  eu: 

— 

1.  17.  p.' 

122,  1. 

12  et  p.  124,  1.  22,  au  lieu  de:  gant 

lire:  gant 

— 

1.  19,  au  ' 

lieu  de; 

:  hc,  lire:  hc. 

P.    122, 

I.  11, 

— 

ijcm  as  chacra     —     ijcnn  as  c'hacra 

— 

1.  16, 

— 

aun     —     ann 

— 

1.  31, 

— 

cm     —     eu: 

P.    .24, 

1.  Il, 

— 

c  ger     —     cr  ger 

— 

■•  S-, 

— 

gne..hc    —     g''f...  ht 

P.    126, 

1.     1, 

— 

0  :ri    —     ho  :ri 

— 

1-     5, 

— 

iuu:c     —     neuzc 

— 

1.  12, 

— 

père  a  ha     —     père  ach  a 

— 

1.25, 

— 

ec'h  han     —     ce  h  an 

— 

1.  26, 

— 

pa  wo     —     pa  vo 

P.    128, 

1.  21, 

— 

vagcre:     —     vageres 

p.  130, 

1.  14, 

— 

gawd     —     gwad 

— 

1.  15, 

— 

c-krci:     —     en  kreiz 

— 

1.   19, 

— 

wr  ar  baern     —     war  ar  bern 

p-  >S7, 

1-  34, 

— 

ruccaitgthc       —     ruccaigthc 

P-  '59, 

1.  26, 

— 

persuasis     —     peruasis 

— 

1-37, 

— 

perrerantes     —     pererrantes 

P.  162, 

n.  1,  1.   1 

,    — 

Le  lecteur    —     Les  lecteurs 

P-  '97, 

1.  26, 

— 

Varon     —     Varron 

P.  267, 

1.  19, 

_ 

Plouniventer    —     Plounéventer 

P.  278, 

1.     1, 

— 

Libérien  hag  Avielen  lire  :  Liherieu 

hag  Avîeleu 

P.  289, 

1.  18, 

— 

Ha  da  lire  :  Ha  d'ar 

P.  261,  Man  ocTiPARTiTE.  M.  R.  Kœhler  nous  fait  remarquer  que  sur 
cette  légende  il  a  écrit  un  article  (Adain's  Erschaffung  aus 
acht  Theilen  dans  la  Germania  de  Pfeiffer,  t.  vu  (1862', 
p.  550-5  54),  où  il  a  fait  entrer  le  texte  irlandais  publié  par 
M.  Stokes  dans  Thr.  Ir.  Gl.  Il  nous  apprend  en  même  temps 
que  cette  légende  a  été  étudiée  depuis  par  W.  Scherer 
(Denkmdcr  deulschcr  Poésie  and  Prosa  aus  dcn  viii-xii 
Jahrhundcrten  hgg.  von  K.  Mùllenhofï  und  W.  Scherer. 
Berlin,  Weidmann,  1864,  p.  542  et  suiv.),  et  il  renvoie 
en  outre  à  la  Revue  critique  (1866,  t.  1'"'',  p.  222)  et  au 
Corrcspondenzblatt  des  Gesainrntvereines  dcr  dcutschen  Geschicht- 
iind  Altcrthumsvcrcine  (Altenberg,  Pierer;  année  1871,  p.  5). 


Corrigenda  et  Addenda.  ^05 

THE    LUXEMBOURG    FOLIO. 

P.  5)4, 1.  58.  The  Welsh  glosses  lately  discovered  in  a  ms.  of  Martianus 
Capella,  which  hâve  just  corne  to  hand,  make  me  hesi- 
tate  as  to  the  relative  âge  of  m  and  0. 

P.  560,  1.  54.  The  words  niî  guorgnau  molim  map  meir  are  Stokes'  and 
Bradshaw's  reading. 

P.  :;65,  1.  II,  criheî  is  to  be  struck  out  :  crihot  is  probably  the  correct 
form,  belonging,  as  it  seems,  tothe  â-conjugation:  the 
first  person  is  crcham  and  the  whole  singular  would 
probably  be  : 

1 .  creham  =  *crihâmi. 

2.  *creha   =  *cnhasL 
5.  crilwt    =  crihât  [/]. 

The  /  in  the  third  person  having  been  dropped  at  a 
very  early  date,  crihlti  became  crihot;  where  as  the 
/  having  probably  been  retained  longer  in  crihami 
prevented  the  preceding  â  becoming  0,  just  as  it 
frequently  does  in  words  borrowed  from  Latin,  e.  g. 
brakh  from  brâchium,  maer  from  major,  pabell  from 
pâpilio,  etc. 

P.  ;6s,  !.  21,  trcorgain  =  tre  «  through  »  and  org-am,  with  which 
compare  orgiat  (gl.  caesar;  i.  e.  qui  caedit)  Gr.  C-, 
p.  859.  So  treorgam  =  «  I  eut  or  break  my  way) 
through.  » 

P.  566,  1.  1 2,  e/îar/mj  stands  probably  for  e«<2/rrma,  the  second  ibeing 
an  obscure  or  irrational  vowel  not  written  in 
airmaou. 

P.  366,  1.  54,  s.  V.  millnon  :  compare  the  late  Latin  mellitura  in  Diefen- 
bach  :  torta  «  libus  vel  mellitura.  » 

P.   ^y6-j,  1.  2],  instead  of  tnvm  =  'trom  read  :  trwm=  'tram. 

P.  569,  1.  8,  s.  V.  cepriov  :  another  scrutiny  of  the  ms.  must  décide 
between  cepriou  and  cipriou  :  the  former  is  favoured 
by  the  modem  ceibr,  while  the  latter  has  the  analogy 
of  such  words  as  guiltiatou  in  its  favour.  The  word  is 
to  be  compared  with  the  French  chevron  derived  from 
a  late  Latin  form  caprio. 

P.  374,  1.  37,  s.  v.  holeu.  I  am  nowinclined  tothinkthat/io/eu  i'^=/2v/e/) 
can  hardly  be  the  correct  reading  on  account  of  the 


^04  Corrigenda  et  Addenda. 

infection  of  the  m  :  so  I  wish  to  suggest  that  what  now 

looks  like  an  ii  is  merely  the  first  part  ofan/H,  thc 

rest  having  disappeared  when  the  ms.  was  damaged 

in  this  part  :    thus  we  should  hâve  liolem  {=  liylcj). 

The  mistakes  I  hâve  made  in  my  attempts  to  explain  thèse  glosses, 

m\\  be  readily  excused  by  Celtic  scholars,  who,  1  hope,  will  kindly 

suggest  to  me  further  corrections  as  well  as  explanations  of  what  still 

remains  obscure  in  them. 

John  Rhys. 
June  1 1,  1872;  Rhyl,  North  Wales. 


Nous  profitons  des  pages  blanches  qui  nous  restent  pour  donner  une  note  de 
M.  Nigra  sur  la  dernière  publication  de  M.  Wh.  Stokes ,  en  regrettant  que  cet 
article  ait  dû  se  proportionner  à  d'aussi  étroites  limites. 

Goidelica.  Old  and  early-middle-lrish  glosses,  prose  and  verse.  Edited  by 
Whitley  Stokes.  Second  édition.  184  p.  in-8".  London,  Trùbner.  1872.  — 
Prix  :  18  sh.  (22  fr.  $0). 

Dans  le  <(  proœmium  »  à  la  2''  édition  de  la  Gr.  'C,  M.  Ebel,  parlant 
de  l'éditeur  des  Goidelica,  dont  nous  annonçons  ici  la  seconde  édition, 
s'exprime  ainsi  :  ((  Post  ipsum  conditorem  ac  parentem  grammaticae  cel- 
))  ticae  [Zeuss],  haud  facile  quisquam  invenitur,  qui  melius  meritus  sit 
»  de  omnibus  huius  doctrinae  partibus  quam  Whitleius  Stokes  '.  » 

Cet  éloge  n'est  que  mérité,  et  M.  Stokes  le  justifie  chaque  jour  davan- 
tage par  ses  publications  multipliées  de  textes  et  d'observations  ayant 
trait  aux  deux  branches  des  langues  celtiques.  Ses  études  sur  le  verbe 
irlandais,  publiées  dans  les  Beitmge  de  M.  Kuhn  en  1870-71  (vol.  VI, 
459,  VII,  i),  ont  fait  connaître  plusieurs  formes  verbales,  qui  étaient 
restées  inconnues  à  Zeuss  et  à  Ebel,  et  elles  forment  le  complément  in- 
dispensable de  la  Grammatica  Celtica.  Le  recueil,  dont  il  vient  maintenant 
de  publier  une  seconde  édition  améliorée  et  augmentée,  est  non  moins 
important  par  la  quantité  de  textes  de  l'ancienne  langue  irlandaise  qu'il 
contient  et  par  les  traductions  et  les  remarques  comparatives  dont  l'édi- 
teur les  accompagne  souvent.  L'espace  réservé  à  cette  annonce  ne  nous 

1.  Zeuss.  Gr.  C'  XXXIX. 


Bibliographie.  505 

permet  pas  d'entrer  dans  un  examen  détaillé  des  Goidelica.  Nous  devons 
nous  borner  à  signaler  cette  nouvelle  publication  de  M.  Stokes  à  l'atten- 
tion de  tous  les  celtistes.  Nous  le  faisons  avec  un  vif  sentiment  de  grati- 
tude pour  le  nouveau  et  réel  service  que  le  savant  linguiste  irlandais 
vient  d'ajouter  à  ceux  qu'il  a  rendus  à  la  philologie  celtique  par  ses  nom- 
breuses publications  antérieures. 

Les  Goidelica  contiennent  :  I.  Les  gloses  irlandaises  du  ms.  de  Turin, 
que  M.  St.  publie,  en  tenant  compte,  avec  des  expressions  dont  je  le 
remercie  sincèrement,  de  l'édition  que  j'ai  faite  de  ces  mêmes  gloses,  en 
1869.  H.  Des  extraits  des  gloses  du  ms.  de  Milan.  IIL  Id.  des  mss.  de 
Vienne.  IV.  Les  gloses  du  ms.  de  Nancy,  découvertes  par  M.  d'Arbois 
de  Jubainville,  dont  les  lecteurs  de  la  «  Revue  »  ont  pu  apprécier  les 
travaux  extrêmement  remarquables,  et  publiées  avec  une  traduction 
exacte  et  un  excellent  commentaire  par  M.  H.  Gaidoz  dans  les  actes  de 
l'Académie  royale  irlandaise,  X,  70-71.  V.  Une  glose  des  Évangiles  de 
Mac-Durnan.  VL  Les  gloses  du  ms.  de  Berne  que  je  me  réserve  d'exa- 
miner dans  une  étude  spéciale.  VIL  Les  gloses  du  ms.  de  Leyde. 
VIII.  Les  gloses  du  Psautier  de  Southampton.  IX.  Les  gloses  irlan- 
daises du  «  Liber  Hymnorum  »  du  Trinity  Collège.  X.  Le  Dùil  Laithnc. 
XI.  Les  notes  irlandaises  du  «  Book  of  Armagh.  »  XII.  Les  préfaces 
irlandaises  aux  hymnes  latins  du  «  Liber  Hymnorum  «  du  Trin.  Coll. 
XIII.  La  partie  gaélique  du  «  Book  of  Deir.  »  XIV.  Les  hymnes  irlan- 
dais du  <(  Liber  Hymnorum  »  du  Trin.  Coll.  XV.  Les  poésies  irlandaises 
du  ms.  du  couvent  de  Saint-Paul,  en  Carinthie.  XVI.  Les  vers  irlandais 
du  <(  Codex  Boernerianus.  »  —  Le  recueil  est  terminé  par  deux  pages 
de  <c  corrigenda  et  addenda,  »  auxquelles  je  me  permets  d'ajouter  ici 
quelques  corrections,  concernant  les  gloses  de  Milan. 

P.  25  llthai  Leg.  Ml.  i:^\d  lithtai  (g\.  îesim) 
»     gl.  rugatus                        »  »  1 32cgl.corrugatus.ms.conro- 
))     todaernam                          »  »  135a  todâernam 

24  cruciatum  «  »  «       cruciatuum 

))  trisnaceimmen  »  »  133/^  trisnacemmen 

))  huad fadisin  »  »  133c  huadi fadisin 

»  aitherrech  »  »  133^  aithirrech 

25  ascada  «  »  134c  ascadu 

iG  arùnntangar  »  »  135a  arûnutangar 

»     cianudchanar  »  »       «       cian- 

»     remsedaigthe  »  »       »       remsetaigthe 

»     ndae  »  »  i^'^c   ndae 


5o6  Bibliographie. 

P.  26  inmeccun  Leg.  Ml.  i^c  inmeccunn 

»     Nota  47r  immindairc,  est  le  verbe  imm-air-ic  avec  le  pronom  in- 
fixe.   La  glose  est  «  licet  Salomonis  personae...  incinatur;  )i 
c'est-à-dire  :  «  licet  conveniat  ei,  directus  sit  ei,  psalmus.  » 
Leg.  Ml. 


27 

innun 

» 

forsnadrammaib 

» 

slain 

» 

modulus 

). 

nonnodiummusdigtis 

)) 

ronsoirni 

28 

tindnacul 

)) 

cach  dib 

29 

cosochenelaigidir 

)) 

doibsium 

» 

gl.  delicta 

)) 

huât  ingnu 

30 

is  due 

» 

huammuintir 

» 

gl.  tinctum 

?1 

immaircidetaid 

» 

conterisedar 

35 

cena  nidfris 

» 

cernetur 

36 

nequat 

38 

consennam 

)) 

opprimât 

43 

dimisit  sum 

46 

quamvis  sit  gravis  ista 

47 

dilei 

48 

conroemi 

5' 

effecta 

■3K 

inniun 

forsnaib  druminaib 

M6a 

sLîin 

136/' 

modulum 

» 

-diummuss- 

136c 

nonsoirni 

137^ 

tindnaccul 

157c 

cach  diib 

138c 

-aigdir 

« 

doibsum 

139c 

gl.  delicata 

140^ 

uat  ingnu 

140c 

is  daé 

143a 

huanimuntir 

142c 

gl.  distinctum. 

144^ 

iminaircedetaid 

145c 

conterissedar 

27/^ 

cenanid  fris 

30a 

cernitur 

31C 

nequeat 

35c 

consernam 

36a 

devoret 

53^ 

dimisit  eum 

6ib 

quaevis  sit  ejus  gravitas 

68a 

dileir 

76a 

conroemi 

lOIC 

effectu 

C.  N. 

Nogent-le-Rotrou,  imprimerie  de  A.  Gouverneur. 


Les  numéros  de  la  Revue  Celtique  ne  se  vendent  pas  séparément;  on 

s  formant 
;,  20  fr.; 
;:  Pour  la 
'.  Vieweg, 
,9  aris;  pour 


nir  ymhob  man  aral,  am  hynny  cyphre 
dinaijl  y  gelyir  nhyy  ohlegid  nad  oes 
un  le  nodedig  ydynt,  mijy  noi  gilid. 
Mo.  Beth  a  ijnaeth  ichyi  neyidio  hen 
y  au  rhai  o'r  cysseiniaid,  mal  eg  yn  ge, 
ec,  yn  ce;  ed,  yn  de,  ag  fely  rhai  erail  he 
fyd.  Gr.  Am  fod  yn  hays  gyybod  yrth 
yr  lienyau  yma,  pa  rai  0  honynt  syd  fu 
diaid  a  pha  rai  syd  hanner  seiniaid  : 
canys  yrth  galyn  yr  henyau  yma  idynt 
pobun  syd  ag  e,  yn  nechrau  i  heny,  a  gy 
frifir  yn  hannersain ,  a'r  cysseiniaid 
erail  syd  yn  fudiaid.  Ond  pe  cedyid  yr 
henyau  hên,  ni  yasnaethai  mor  rheo- 
ledig£th  yma  dim,  a  hays  a  fyd  rhoi 
rheoledigaethau  byr'ion  erail,  onid 
galy  nhyy  fal  hyn.  Mo.  Beth  a  yna- 
eth  K,  yn  ych  erbyn  chyi,  pan  daflech 
yhî  alan  0  fysc  y  lythrennau  cymraeg, 
a  hyd  y  bu  hi  vn  0  honynt?  Gr.  Am 
G      ij      fod. 


•  le  titre  le 
ist  double, 

'ent    être 

VlEWEG, 

s. 
uteurs  les 


mount  of 
Post  Of- 


~>ubscribers. 
oer  annum 


the  Edi- 
Franck, 


Trùbner 
is  which  are 


5o6  Bibliographie. 

P.  26  inmeccun  Leg.  Ml.  155c  inmeccunn 


27 


«  /oii,  c,  V"  4^digon  yn  i  le  lii.  Ag  nid  ia- 

"  un   oed  .adel  al  an.    c;    syd    ijedussach  i 

liiii  yn  gymhuyssacli  i  le,  yn  haus  i'scri- 
28 

fennii,   ag    yn   gymoradijy   ymhob     iaith 

20  yma^r  elfydion   ladin  yn  arferedig  yn- 

»  d/,  a'r  K,  nid  yu   ond   aldudes  ymhob 

»  vn,   o4ieithr  y  saesn£g  ag  ieithoed  Ger- 

^*  mania,   le  cafaud   y   sa£sn£g  i  dechre- 

'  iiad.    Mo.  A    uasn.utha,    c.  ymhob  gair 

le  y  guasnaetha  K,  fal  y  galer  i  galu 

î,  vn  alu  a  là?  Gr.   Ymhob   gair  cymra- 

»•  eg  maent   ildijed    m    alu     yn     difade. 

5  5  Ond    meun    geiriau    ladin    a    chuenny- 

cher  i  laferu  yn  ladinaid,  c;  0  flaen.  e, 

ne.  i.  a  fyd  vn  alu  ag.  s.  ganmyyaf.  Ond 

da  oed  yn  y  mannoed  hynny  roi'r  nod 

yma  tan  i  throed  lu,  mal  y  mae'r  phra 

46  ncod    yn    guneuîhur,     Cyprianus,     syd 

47  '  .'  raid  i    doedyd   Svprianns   cito  pan  dar 
pho   giineuthur  gair    ladin   yn    gymreu- 

i'aul, 


36 
38 
» 

43 


5' 


Les  numéros  de  la  Revue  Celtique  ne  se  vendent  pas  séparément;  on 

s  formant 
;,  20  fr.; 
;:  Pour  la 
'.  Vieweg, 
aris;  pour 


21 


gayl,  a  rhoi  ido  megis  i  fraït  yn  y  gym 
raeg,  e  geidu  y  lythyren  hon  yr  vn  ga- 
in 0  flaen  pob  bogail,  mal  cddo,  cela,  ca- 
no,  cann,  cenais,  cecini.  yr  vn  peth  syd 
oi  jarnn  ynghylch  g;  megis  y  doedais 
am  c  ;  canys  hiîhaii  yn  y  ladin  a  neui- 
dia  i  galu  oflaen.  e.  ag  i.  Mo.  A  gy- 
frifir.  h.  ymysc  y  lythyrenau?  Gr.  Nid 
yu  hi  lythyrc  .dim,  ond  aryyd  chuthiad 
ne  anadl  cryf  ar  y  fogail  ne'r  dyph- 
dong  ai'  canlhyno;  mal  hael,  haus  :  uei- 
thie  hi  a  bar  grychu,  ag  anadlu  y  gys- 
sain  a  fo  oi  blaen;  mal,  ymhlith,  rhai, 
yn  nhy  duu.  Mo.  Pessaul  lythyren  syd 
yn  y  gymraeg  urth  hynny  ?  Gr.  Nid 
oes  ond  pedair  arhugain  angenrhei- 
diaul  i'scrifennu  pob  gair  cymraeg  : 
canys  e  darfu  difedu.  h.  o  frainî  lythy- 
ren. Tu  ag  at  am  y  tair  erail  diuaetha 
fo  doettyyd  or  blaê  nad  rhaid  yrthynt 
ond 


'  le  titre  le 
;st  double. 


'ent    être 

VlEV^-EG, 

s. 

uteurs  les 


mount  of 
Post  Of- 


■.ubscribers. 
oer  annum 


the  Edi- 
Franck, 


Trùbnek 
is  which  are 


5o6  Bibliographie. 

P.  26  inmeccun  Leg.  Ml.  155c  inmeccunn 


27 


?o 


51    ' 


o/2<i  mew«  geiriau  groeg  ne  ladin.  Mo. 
Gen  darjod  doedyd  digon  ynghylch 
in  o'r  pum  peth  oed  oi  iraethu  yrth 
dosparth  y  lythyrennau;  madus  belach 
yu  son  am  y  daxi  erail. 

Guahaniad  rhyng  y   lythyrennau.   Cap.  4. 


Ma'r  gualian  syd  rhyngthynt,   canys   hyn 
jj  ny  yu'r  pedueryd  peth?    Gr.    Yn  gyn- 

ji  taf  ei    rhennir  nhuy    yn  fogeiliaid,   ag 

»•  yn  gysseiniaid.    Mo.    Pa   heth  y  y   bogail 

3  5  ne  gyssain?  Gr.  Bogail  yy  lythyren,  a 

"         '  yna  ar  i  phen   ihun  lafar  perphaith.   A 

„  chyssain  y  y  pob  vn,   ni  yna  lafar  per- 

jj  phaith   yn   y    byd    heb    gymorîh    bogail 

A-i  y  gydseinay  a  hi.   Mo.   Pessayl  bogail 

46  syd  yn  y  gymraeg?  Saith.  a.  e.  i.  0.  u.  y. 

47  y.  ond  e  yna  rhai  yyth,  0  heryyd  bod 
daa  lafar  i  y,  vn  toyyl  mal  y  mae,  idi 

yn    V 


Les  numéros  de  la  Revue  Celtique  ne  se  vendent  pas  séparément  ;  on 

s  formant 
20  fr.; 
Pour  la 
',  Vieweg, 
aris;  pour 


yn  y  geiriau  liyn,  phyd .  crefyd,  yf,  a 
phob  amser  y  bo  yn  y  silaf  diuaethaf  i 
air  :  canys  yna  nid  oes  eglur  rhagor 
rhyngthi  ag.  u.  ond  pan  fo  hi  meyn  si- 
laf au  erail,  o  flaê  y  diudthaf,  ef  a  fyd 
eglurach  i  lais  a'r  rhagor  rhyngthi  ag 
u.  mal  yma^  phydlon,  crefydol,  yfed.  Am 
hynny  y  geluir  hi  yn  y  cyfleoed  yma,  y 
eglursain,  ne  y  agored;  yn  y  leoed  erail 
o,r  blaen,  ef  ai  henuir,  y,  doyyl,  ne  y  ga- 
uedig.  Mo.  Mi  a  yn  yrîh  a  doedas- 
soch  o'r  blaen  paru  y  geluir  hi  eglur, 
ne  doyyl  :  Ond  ni  doedassoch  etto  pain 
yr  henuir  hi  y.  agored,  ne.  y.  gauedig. 
Gr.  Pan  fo  hi  a  sain  doyyl  idi,  rhaid 
eau  myy  ar  y  guefussau  urth  i  doedyd 
hi  :  eithr  pan  fo  hi  yn  eglursain,  rhaid 
agori'r  gyefussau  yn  led,  ag  ynol  hyn 
ny  y  cafod  amrafael  henuay. 


•  le  titre  le 
ist  double, 


fent    être 
Vieweg, 
s. 
uteurs  les 


mount  of 
Post  Of- 


-.ubscribers. 
per  annum. 


Dos 


the  Edi- 
Franck, 


not  asKcu  îor. 


Trùbner 
is  which  are 


5o6  Bibliographie. 

P.  26  '(tneccun  Leg.  Ml.  \]<^c  inmeccunn 


27 

24 

Dospartli     ar    y     dyphdongiaid.     Cap.     5. 

» 

28  Mo.   A  elir  cyssyldu  diiy  fogail  i  uneu- 
»  thur  vn   silaf?   Gr.   Gelir,   ag  yeiîhiaii 

29  dair,  a'r  rhelni  a  cluir  dyphdongiaid. 
Mo.  Beth  yit  dyphdong^  Gr.  Duy  fo 
gail  ne   dair  ynghyd,  yn  gyneuthur  vn 

,Q  ,  silaf    a    sain    cyfansodedig.     Mo.    Pa 

»  fo4  y  parthir  y  dyphdongiaid  y  ma? 

^>  Gr.    Ei    rhennir    nhijy  yn   dyphdongiaid 

^'  rhoyiaijg,    ag    yn    dyphdongiaid   afroui 

aijg.    Mo.   Pain  y  geluir  nhuy  dyphdo- 
„  niaid  rhoijiog?   Gr.    Yrhain  syd   dyph- 

î6  dôgiaid   rhouiog,  a  fydant  uedi  y  cys- 

38'  syltu  0  duy  fogail  yn  vnig,  a'r  flaenor 

*  yn  cael  i  chijbl  lais,  a'r  dylynaul  hefyd 

heb    goli    moi     lafar    hiîhau    chuaith . 

mal,  ai,   ci.   Mo.   Beth  yy  bogail  flae- 


45 
4É 

47 

A^  nor,  a   bogail  dylynaul  ?  Gr.    Y  gyntaf 

y  or   duy  fogail   mcun    dyphdong  a    eluir 

'  laenor, 


Les  numéros  de  la  Revue  Celtique  ne  se  vendent  pas  séparément  ;  on 

'-"S  formant 

i,   20  fr.; 

::  Pour  la 

'.  Vieweg, 

2j  aris;  pour 


hlaenor,  vr  ail  a  henuir  dylynaul.  Mo. 
Pessaul  dyphdong  rouiog  y  syd?  Gr. 
Pedair  ardeg.  vi  y  mae.  u.  yn  dylynaul 
yndynt,  a  thair  y  mae.  i.  yn  diuaeîhaf, 
dijy  y  mae.  e  a  dijy  y  mae,  y  ;  yn  can- 
Ihyn  ag.  y.  syd  dylynaul  meun  vn  yn 
vnig;  a;  ag.  o.  nibydant  dylynaul  bith 
meun  dyphdong  rouiog.  Mo.  Mi  a 
uelaf  nad  oes  ond  pum  bogail  a  eil  fod 
yn  dylynaul  meun  dyphdong  rouiog,  s, 
u;  i;  e;  u\  y;  doeduch  pessaul  blaenor  a 
fyd  i  bobû,  Gr.  Fal  dyma  'r  mod  i  ueled. 


•  le  titre  le 
;st  double, 

'ent    être 
Vieweg, 
s. 
uteurs  les 


mount  of 
Post  Of- 


a 

[au 

c 
i 

[eu                    à      rhai 
'[lu   5  blaenor  e  mal,  rhei 

6  blaenor 

mal 

.'subscribers. 

u,      0 

ou        i            0         rh 

ds  per  annum. 

II 

duu 

y 

yu                   a      aeth 

e. 

2  flaenor  e, 

jy  : 

0      oed 

a 
'aenor 

dur 
mal 

e 

u 

euthum   i  flaenor     u  mal  uy 
y.    '  D.    ' 

• 

To  the  Edi- 
A.  Franck, 

- 

irsTRÙBNEK 

is  which  are 

not  asKcu  îorr 


-q5  Bibliographie. 

P.  26  -.tmeccun  Leg.  Ml.  135c  inmeccmn 


27 


26 


)  itfo.  0;?/^  V(i/w  e,  ynfldenor  i  y,  hefyd  mal 

»  yn  y  gair  y  ma  teyrnas?  Gr.  nid  dyph- 

'  dongydyy  ey  yno,  eithr  duy  silaf  yaha- 

*'  nedig    etto    er    hynny    yrth    fesuro    ce- 

rd  ni  byd  fynychaf  ond  ymraint  vn 
^j  silaf,  megis  hoeu,   gloey.    Mo.   Mi  ach 

,)  clouais    chyi    amser    aral    yn    doedyd, 

»  mae    vn    silaf  oed  hoey  a  gloey.   Gr. 

30  Fely  y  doyad  y  prydydion  i  minnau. 

'*  Ond   yn  hyn  0   beth   gyel  gennyf  gan- 

Ihyn  y  ladinyyr,  a  farnât  yn  amrafael 

silaf  au,  le  ho  amryy  accennau,  megis 
, ,  y  mae  yn  y  geiriau  y  ma,  vn  ar  hoe,  a 

»  honno  yn   lem,    ne    yn  dyrchafidul,   vn 

36  aral  or  y,  a  honno  syd  hyl,  ne  dyscynni 

3^  ayl,  yr  vnphunyd  y   mae   barnu   am  y 

'*  gair  gloey,  mal  y  cair  gyeled   rhaglay 

^  pan  elom  i  4osparth  yr  accennau.   Mo. 

Urth  ofyn,  hyn,  mi  ach  dugum  chyi 
a]  '  odiyrth  y  peth  oed  oi  draeihu.  s.  blae- 

i  nor 


Les  numéros  de  la  Revue  Celtique  ne  se  vendent  pas  séparément;  on 

sons  formant 
aris,  20  fr.; 
■crit:  Pour  la 
l.F.Vieweg, 
27  à  Paris;  pour 


norion  y.  Beth  am  a,  yn  y  gâir  y  ma  ba- 
ych,  ne  yn  hun  baytio.  Cr.  Nid  fely  y 
dylyd  i'scrifennu  nhyy,  eithr,  baich 
baetio,  mal  y  gyelir  rhaglau. 
lo.  Mi  ach  douais  yn  ion  am  dyphdon- 
giaid  ialgrynnion,  gyib  ledfau,  a  die- 
ithr,  beth  yu  pob  vn  o'rhêini.  Cr.  Nid 
y  ma  mae  dosparth  y'rheini,  eithr  yn  y 
rhan  diyaethaf,  a  elyir  tonydi£th,  ca- 
nys  at  y  cynghanedion  y  perthynant 
yn  gynt  nog  at  iaunscr.  A  digon  yu  son 
yma  am  bynciau  anhepcor  i  yr,  achyê 
nychai  dyscu  scrifennu  yn  goyir,  etto,  i 
dorri  ych  blys  chyi  rhaid  y  y  doedyd  pa 
rai  ydynt.  Talgron  y  gelyir,  au,  a  phob 
dyphdong  royiog  y  bo,  u,  dylynayl  yndi 
a  hefyd  ymbel  dyphdôg  afroyiog,  mal, 
gyas,  gyin,  gyych,  Pob  dyphdong  royi 
og  aral,  a  elyir  ledfau.  Mo.  Beth  yu 
dyphdong  afroyiog,  ne  dieithr,  Canys 
D        ij      mae'r 


.  sur  le  titre  le 
ires  est  double, 

doivent    être 

F.   ViEWEG, 

^aris. 

X  auteurs  les 


i  amount  of 
n  a  Post  Of- 


Df  subscribers. 
ds  per  annum, 

e. 

oy  : 


To  the  Edi- 
A.  Franck, 


not  asKtu  for. 


irsTRÙBNER 

is  which  are 


5o6  Bibliographie. 

p    26    .mt"-'-"''  '•^^-  ^^-  '^^^  inmeccunn 


27  28 

» 

„  mder   dau   henij  hunnu  idi  ni.    Gr.   Poh 

),  dyphdong  y  ho,  u.  ne,  i.  yn  flaenoriô,  heb 

»  gael  nai  sain,  nai  haccè  ond  yn  eguan 

20  douil,   a^r  dylynaijl  yn   myned   a  phob 

"  vn   or  dau   ganmyyaf  igyd,   mal  gi/an, 

29 

gyaith,  guyd,  chuyn,  chuith,   iar,   iaith, 

„  chui  a  yelych  fod,  u.  ag.  i,  yedi  todi  i 

»  haccen  ai  lafar.  Ag  am  i  bod  yn  diei- 

3c  thro   0   diurth    naiur   dyphdong    royiog, 

*  a  ryd  ran  o^r  accen  a'r  lafar  i'r  flae-, 

nor  yn  gystal  ag,  i^r  dylynayl,  ei  gelyir, 

dieithr,     ne    a    froyiog.    Mo.     Pessaul 

,f  peth  syd  yn  gyahan  y   nail    odiyrth   y 

»  lai.  Gr.  layer  ond   tri  yn  anuedig;   yn 

36  gyntaf,    ni    byd    meyn    vn    royiog  fyth 

5"  ond  dyy  fogail;   yn  yr  afroyiog  yeithi- 

aa  e  gair,  tair,   mal,  iaith  heblay  hynny 

y  royiog  a  ryd  i  rhan  o'r  lafar  a'r  ac- 


4 

A'  cen  i-r  flaenor  ag  ir  dylynayl  yn  gystal 

4'  bob  un  ai  gilid,  yr  afroyiog  a  ryd  y  rhan 
5  fyyaf 


Les  numéros  de  la  Revue  Celtique  ne  se  vendent  pas  séparément;  on 

sons  formant 
aris,  20  fr.; 
.crit:  Pour  la 
1.  F.  Vieweg, 
29  *  à  Paris;  pour 


ftjyaj  ir  fogail,  ne  i'r  dyphdong  dyly- 
naijl.  Hefyd  urth  ganu,  ni  chydodla'r 
rouiog  ond  a  hi  i  kunan,  yr  ajroinog  a 
gydodla  ueithiaii  a  bogail  sengl  ne  a 
dyphdong  rouiog.  Mo.  Pessaul  blae- 
nor  a  eil  fod  i  dyphdong  af rouiog?  Gr. 
dyy,  i,  ne  u.  Ni  chair  u  fyth  heb  nail  ai 
ch,  ynîau.  g,  oi  blaen  mal  chuith,  guan. 
Mo.  Pessaul  dylynaul  syd  i^r  dijy  flae- 
•  nor  yma?  Gr.  Pob  dyph4ong  rouiog, 
gan  muyaf  a  phob  bogail  sengl,  megis 
y    mae    oi    gyeled   yn  y    dafulan    yma. 


;  sur  le  titre  le 
ires  est  double, 

doivent    être 

F.   ViEU-EG, 

^aris. 

X  auteurs  les 


3  amount  of 
n  a  Post  Of- 


a 

guan 

u 

e 

guen 

0  flaen 

i 

mal      guin 

bogail 

y 

chu  in 

0 

gloeuon 

01  subscribers. 
'ds  per  annum. 

e. 

by: 


To  the  Edi- 
A.  Franck, 


not  asKcu  tor. 


jrs  Trubner 
is  which  are 


,o6  Bibliographie. 

P    26  •./m^'—"  ^'^^-  ^^-  '^^^  inineccunn 


27 


» 


30 


au 

guaud 

ai 

chyain 

K 

ae 

chuaer 

0  flaetï 

au 

mal, 

gyau 

dyphdong 

ei 

gueini 

eu 

gyeuyd 

ou 

gyoydyd 

îc  a  iar 


i  e  leruerth 

» 

0  flaen  0  mat,  ior 

j^.  bogail  y  iyrch 

5  5  y  iyrchod 

» 

5?- 


ai 

iaith 

ae 

iaeth 

/ 

au 

iau 

0  flaen 

au 

mal, 

iayn 

dyphdong 

ei 

ieiîhyd 

oy 

ioynach 
Vei- 

Les  numéros  de  la  Revue  Celtique  ne  se  vendent  pas  séparément;  on 

sons  formant 
aris,  20  fr.; 
.crit:  Pour  la 
I.F.Vieweg, 
3*  à  Paris;  pour 


^eithiau  e  gymnr.  i.  o  flaen  y  bogeiliàid 
ner  dyphdongiaid  hyn  a'r  i  phen  ihun 
ag  yna  nid  dyphdong  eithr  duy  silaf 
fydant  mal  yma,  priod,  dial  a  da  oed 
yn  y  cyphelib  koed,  roi  dau  ditl  uuch  i 
pennau  fal  hyn  prïod ,  dïal.  Mo.  Pa 
ham  y  rhoessochyi  yy  ymysc  y  dyphd. 
rhojjiog  :  a  chuedi  hynny  chui  ai  burias 
soch  ymlhith  y  rhai  afroyiog.  Gr.  Am 
fod  ganthi  dau  sain  :  canys  nid  va 
al  y  yy  hi  yn  y  geiriau  yma  gyyn,  cyyn, 
gyyd,  gyyd,  celyyd,  aryyd  Mo.  Oes 
fod,  î'dnabod  pa  bryd  y  byd  hi  yn  rho- 
uiog,  a  pha  bryd  yn  afroyiog"^  Gr.  Os 
afroyiog  a  fyd  hi,  ni  sai  hi  ond  yn  ni- 
yed  gair  a  phan  ystynner  y  gair,  nés  i 
bod  yn  aildiyaeiha  hi  a  dry  yn.  y.  mal 
gyynnn  gynnach  ;  gyinyyd,  guinuden 
celyyd,  celydog  :  etto  pan  fo'n  dyphd. 
royiog  hi  a  drig  ymhom  mam  cystal  ai 
gilid 


i  sur  le  titre  le 
ires  est  double, 

doivent    être 

F.   VlEWEG, 

^aris. 

X  auteurs  les 


2  amount  of 
n  a  Post  Of- 


of  subscribers. 
ids  per  annum. 


by: 


To  the  Edi- 
A.  Franck, 


not  asKcu  for. 


5rs  Trùbnf-r 
is  which  are 


,q6  Bibliographie. 

P.  26   ,m<"-'-""  Les.  Ml.  lUC  inmeccunn 


27  J2 

g;7/^  ma/,  c/yvn,  ^Vy^au,  gyyd^  gvy4<^^ 
jj  flrwj'd    aryydhau.    Mo.    Mi    auelaf  )n 

,)  iounda   beth   yu    bogail ,   a   phessaiil  un 

28  ij^  0  honynt,  a  pha  fod  i  gijnair  dypli- 
'^  dongiaid  oi  cyssult  nhyy.  Moessych 
^5  belach   dosparth  ar  y  cysseiniaid  :  ag  0 

flaen  pob  peth  doedych  beth  yu  cyssain. 
,j  Gr.  lythyren  ne  elfen  ni  yna  fyth  lajc- 

3c  ryd  perphaith  ar  /  phcn  i  hiin,  heb  gy- 

»  moflh    bogail.    Mo.    Pcssayl    vn   syd   0 

'*  honynt    Gr.    Dyy   ar    bymtheg,    chyech 

'  ■  a  elir  i  galy   hanner  lajerayg   ne   han- 

ner  bogeiliaid :  /.  / .  m.  n.  r.  s.  a'r  m  ardeg 


35 

„  crail    a  gyfrifir  yn  fudiaid  :  ag  o'rhain 

36  mae     tri     theulu     iniid     anghenrhaid     /' 

3^"  gyybod.     Mo.    Ai    rhaid    dosparthu  yn 

'*  fanylach  na  hyn   y    cysseiniaid  yma  ? 

Gr.  Rhaid  yn  yir,  os  myn  dyn  yybod  y 

.,  lyybr  syd  i'scrifcnnn  ne  i    doedyd   cym 

4;  racg  yn   dilediaith  :  Am  hynny  y  byd  da 

j  dyscu 


Les  numéros  de  la  Revue  Celtique  ne  se  vendent  pas  séparément;  on 

sons  formant 
'aris,  20  fr.; 
xrit:  Pour  la 
1.  F.  Vieweg, 
à  Paris;  pour 


?? 


dyscu  vn  fyfyr  u  guhà  a'r  henuau  sy4 
idynt,  yrtli  yrhain  y  gelir  rhoi  rheole- 
digaethau  byrrion  i  d'anges  pa  fod  y 
neyidir  y  nail  lythyren  a'r  lai  iirth  gys 
trauennu'r  geiriau  ynghyd.  Ag  o  eis 
siau  gyybod  y  pethau  hyn,  y  mac  cyma 
int  0  floescni  a  lediaith  ar  y  sae^ô  ur 
th  doedyd  cymraeg.  Canys  ni  neuidiât 
huy  mo'r  (ythyren  gyntaf  i'r  gair,  ond 
i  chadu  ymhob  man,  a  hynny  syd  yn  er- 
byn  îegucli  a  phriodoldeb  yn  hiaith  ni, 
a  diflas  ynghlust  cymro  :  megis  pe  doe- 
dai  vn,  pen,  fy  pen  i,  dy  pcn  di,  a  pen  y 
bryn.  Os  yn  gymreigaiij  i  doedid,  rhaid 
oed  neyidio,  p.  fal  hyn,  pen,  fymlien,  dy 
ben,  a  pheb  y  bryn.  Ar  un  peth  syd  ra- 
id i  yneuthur  meyn  geiriau  a  deckre- 
uanî  a  lythyrennau  erail,  megis  y  dâ- 
gossaf  rhag  lay.  Mo.  I  bessayl  rhan  y 
gyahenir  y  cysseiniaid  yn  gyntaf,  yrtli 
E     hyni' 


ne. 

t  sur  le  titre  le 
ires  est  double, 


doivent    être 

F.   VlEV^-EG, 

Paris. 

X  auteurs  les 


2  amount  of 
n  a  Post  Of- 


of  subscribers. 
j(^5perannuin. 


by 


To  the  Edi- 
A.  Franck, 


not  asked  for. 


srs  Trùbnek 
is  which  are 


jo6  Hihlio  graphie. 

P.  26   Amfrrun  Leg.  Ml.  i^^c  inmeccunn 


27 


28 


M 


/!}'/î.''  Gr.  _yrt  duy  ran  :  canys  mue  pob 
cyssain  nail  ai  yn  lefn,  yntau  yn  grech 
Crychion  y  geluir  pob  vn  a  fo  a  gryin 
h.  yndi;  ysef  yu,  yn  anadlog  yrth  i  lafe- 
ru,  megis,  ch.  ph.  d.  rh.  Ih.  l.  a^r  cy- 
»  phelib,  y  lail  igyd  a  elyir  lyfnion.  Mo. 

»  Pessaijl    bath    syd    ar    lythrennau    cry- 

»  chyion?   Gr.    Rhai  0    honynî   syd  0  na- 

î^  turiizth    yn  grychion,  ag  ai  geluir  cry- 

chion anianavl  :  mal.  ch.  ph.  th.  erail  0 
j  1  naturixth  syd  lyfnion  ,   ond   0  damyain 

»  nhuy  a  gant  anadl  cryf  yeithiau  :  mal. 

3J  Ih.  rh.  megis   yma,  fymhlaid,  fymhren. 

"  Heblau  rUiain   mae   rhai  ag   anadl  ys- 

'  ,^  cafnach'  yndynt  nog   syd  gen  y   cryckiô 

anianavl  nid  0   damyain,  ond   0  natii- 
fi£th,  ag  ai  gelyir  yscafngrychiô,  mal, 
d.  /.  eithr,  fh.  ag,  Ih.  a  elir  i  galy  crychiô 
4'  damyeiniaul.     A     hefyd    da   oed    nodi 

4  hynnyma,  nad  oes  vn  gair    cymraegaul 

5  ai    ' 


Les  numéros  de  la  Revue  Celtique  ne  se  vendent  pas  séparément;  on 
s'abonne  pour  un  volume  qui  paraît  en  plusieurs  livraisons  formant 
ensemble  environ  520  pages.  —  Prix  d'abonnement:  Paris,  20  fr.; 
Départements,  22  fr.;  Étranger,  le  port  en  sus.  On  souscrit  :  Pour  la 
France,  en  envoyant  un  mandat-poste  payable  au  nom  de  M.  F.  Vieweg, 
propriétaire  de  la  librairie  Franck,  67,  rue  de  Richelieu,  à  Paris;  pour 
l'étranger,  par  l'intermédiaire  d'un  libraire. 

Une  liste  des  souscripteurs  est  publiée  avec  chaque  volume. 

Il  est  tiré  quelques  exemplaires  sur  papier  de  Hollande  portant  sur  le  titre  le 
nom  imprimé  du  souscripteur.  Le  prix  d'abonnement  à  ces  exemplaires  est  double, 
c'est-à-dire  40  fr.  pour  Paris,  44  fr.  pour  les  départements. 

Toutes  les  communications,  correspondances,  etc.,  doivent  être 
adressées  franc  de  port  à  M.  H.  Gaidoz,  aux  soins  de  M.  F.  Vieweg, 
propriétaire  de  la  librairie  Franck,  rue  de  Richelieu,  67,  Paris. 

La  direction  de  la  Revue  ne  s'engage  pas  à  renvoyer  aux  auteurs  les 
manuscrits  non  insérés. 


TO   DUR   BrITISH    SUBSCRIBERS    : 

The  subscribers  are  respectfully  requested  to  remit  the  amount  of 
L  I  subscription  for  the  2nd  volume  ofthe  Revue  Celtique,  in  a  Post  Of- 
fice Order  payable  at  the  General  Post  Office  London  to 
Trûbner  and  C^ 

8  and  60  Paternoster  Row.  E.  C. 
London. 

N.  B.  A  few  copies  are  printed  on  laid  paper  with  the  names  of  subscribers. 
The  terms  of  subscription  fer  thèse  copies  is  double,  viz.  two  pounds  per  ânnum . 

A  list  of  the  subscribers  is  given  with  every  yearly  volume. 
Subscriptions  for  America  and  the  Colonies  are  received  by  : 
E.  Steiger,  New-York  (U.  S). 
John  Wiley  and  Son,         d" 
J.  B.  Lippincott  and  Co.,  Philadelphia  (U.  S.) 
Mohun  and  Bestor,  Washington  (U.  S.) 
Dawson  Brothers,  Montréal  (Canada). 
G.  Robertson,  Melbourne  (Australia). 
Ail  literary  communications  to  be  addressed,  post  free,  «  To  the  Edi- 
tor,  care  of  Mons.  F.  Vieweg,  propriétaire  de  la  librairie  A.  Franck, 
67,  rue  de  Richelieu,  Paris.  » 

Books  for  review  to  be  sent  «  To  the  Editor,  care  of  Messrs  Trubner 
AND  C°,  8  and  60,  Paternoster  Row_,  E.  C.  London,  » 

The  Editer  cannot  undertake  to  return  communications  which  are 
not  asked  for. 


AVIS  AU   RELIEUR. 

Les  feuilles  in-3  2  qui  accompagnent  chaque  numéro  de  cette  revue 
ne  doivent  pas  être  reliées  avec  elle  ;  elles  doivent  être  mises  de  côté 
jusqu'à  ce  que  cette  réimpression  fac-similé  ait  été  achevée  dans  les 
prochains  numéros  de  la  Revue. 


DIRECTION  TO  THE  BINDER. 

The  32mo  sheets  which  accompany  each  number  of  this  magazine 
must  not  be  bound  with  it  ;  they  are  to  be  kept  aside  until  this  fac- 
similé  reprint  has  been  completed  with  the  next  numbers  of  the 
,,  Revue.  " 


Vient  de  paraître  à  la  librairie  Franck,  67,  rue  Richelieu,  à  Paris. 

De  l'authenticité  des  chants  du  Barzaz-Breiz  de  M.  de  la  Villemarqué,  par 
F.  M.  LuzEL,  lauréat  de  l'Institut.  Brochure  gr.  in-8^  i  fr. 


Nogent-le-Rotrou,  imprimerie  de  A.  Gouverneur. 


F 


r'^:>p,-wm^^^ 


r-i^: 


i 


A!